HAL Id: dumas-01365783
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L’épilepsie et son traitement par les benzodiazepines :
exemple d’une etude de cohorte comparant l’utilisation
de Clobazam et Clonazepam dans cette indication
Marion Cossecq
To cite this version:
Marion Cossecq. L’épilepsie et son traitement par les benzodiazepines : exemple d’une etude de cohorte comparant l’utilisation de Clobazam et Clonazepam dans cette indication. Médecine humaine et pathologie. 2014. �dumas-01365783�
Université de Bordeaux
U.F.R des SCIENCES PHARMACEUTIQUES
Année 2014 Thèse n° 80
Thèse pour l’obtention du
DIPLOME d’ETAT de DOCTEUR EN PHARMACIE Présentée et soutenue publiquement le 25 Juillet 2014
Par Marion COSSECQ Née le 04 Juin 1988 à Bordeaux
L’EPILEPSIE
ET
SON
TRAITEMENT
PAR
LES
BENZODIAZEPINES :
E
XEMPLE D
’
UNE ETUDE DE COHORTE COMPARANT L
’
UTILISATION DE
CLOBAZAM ET CLONAZEPAM DANS CETTE INDICATION
.
Directeur de thèse :
Docteur Véronique MICHEL
Membres du Jury :
Mr Bernard MULLER – Professeur des Universités Président Mme Véronique MICHEL – Maître de conférences des Universités Juge Mlle Emeline SAILLIO – Docteur en Pharmacie Juge
Je dédie ma thèse à mon tonton Domi, pharmacien lui aussi…
R
EMERCIEMENTS
A Monsieur Bernard Muller, président du jury,
Doyen de l’UFR des Sciences Pharmaceutiques et Professeur de Pharmacologie à l’Université Victor Segalen
Pour l’honneur que vous me faites de présider le jury de cette thèse. Veuillez trouver ici l’expression de mon profond respect et de mes sincères remerciements.
A Madame Véronique Michel, directrice de thèse,
Maître de conférences en Pharmacologie à l’Université Victor Segalen
Pour avoir accepté de diriger cette thèse et m’avoir aidée dans sa réalisation et sa finalisation dans les temps. Je vous remercie pour votre confiance, vos précieux conseils ainsi que pour votre patience et votre disponibilité. Veuillez trouver dans ce travail, l’expression de ma plus profonde reconnaissance.
A Mademoiselle Emeline Saillio, membre du jury,
Docteur en Pharmacie et Pharmacovigilant chez GlaxoSmithKline
Pour m’avoir fait l’honneur d’accepter de participer au jury de cette thèse. Ta présence est importante pour moi aujourd’hui car elle symbolise mon arrivée à Paris il y a deux ans et mes premiers pas dans le monde de la « PV ».
A ma famille,
Papa et Maman, merci de m’avoir accompagnée, encouragée pendant ces longues années d’étude et d’avoir continuellement cru en moi. Vous m’avez toujours soutenue dans mes choix personnels ou dans les petites épreuves de la vie. C’est grâce à vous si j’en suis là aujourd’hui. Maman merci pour ton aide et pour cette ultime relecture de thèse, je pense que ça va te manquer !
Célinou, ma sœur chérie, je ne te le dis jamais assez mais j’ai de la chance d’avoir une sœur comme toi. Tu sais être là quand il le faut, tu vas me manquer.
Papy et Mamie, merci pour tout ce que vous m’avez apporté, pour tous ces souvenirs d’enfance à Piquey et Cazoulès. Vous avez cru en moi et su m’encourager dans tout ce que j’ai entrepris.
Mes taties, cousin et cousines, merci pour tous ces moments en famille que l’on partage ensemble. J’ai la chance de pouvoir compter sur vous.
Je vous aime tous très fort.
A mes amis de toujours, Céline, Luc, Val, Marie, Clémence, Rebek, Julia, Caro et mon Jbou.
Depuis l’école primaire, le collège ou le lycée rien n’a changé. Malgré l’éloignement, notre amitié est toujours aussi belle et solide, elle le restera encore longtemps.
A mes amis pharmaciens,
Juliette, Francis, Leslie et Marine, ma dream team, vous êtes juste irremplaçables.
Sophie, Do, Marie, Astrid et Léa, cosmo forever, vous êtes des amies formidables, baaaaah !! Gaëtan (GG), j’ai passé des supers moments avec toi. Clément, merci pour tes mémorables 1,2,3…Clément et tes magnifiques benzodiazépines.
Merci à vous, à mes amies de Master et à tous les autres pharma, pour ces sept années de folie qui sont passées bien trop vite. Pour ces soirées, WEI magiques, déjeuners à « la galère », stress des révisions de dernière minute, soirées McDo-‐Amphi, fous rires à la BU, boule magique… Tous ces moments qu’on a pu partager sont juste inoubliables !
Et à Romain, pour le passé, le présent et l’avenir ensemble.
T
ABLE DES
M
ATIERES
R
EMERCIEMENTS... 3
L
ISTE DES ABREVIATIONS... 9
L
ISTE DES FIGURES... 11
L
ISTE DES TABLEAUX... 12
I
NTRODUCTION... 13
P
ARTIE1 :
L’E
PILEPSIE... 14
Historique de l’épilepsie et de son traitement ... 14
1 LES CRISES D’EPILEPSIE ... 16
1.1 Définition ... 16
1.2 Classification des crises épileptiques ... 16
1.2.1 Les crises partielles ou focales ... 18
1.2.2 Les crises généralisées ... 20
1.2.3 Les crises inclassables ... 23
2 L’ETAT DE MAL EPILEPTIQUE ... 24
3 L’EPILEPSIE OU MALADIE EPILEPTIQUE ... 25
3.1 Définition ... 25
3.2 Epidémiologie descriptive ... 25
3.2.1 Prévalence/Incidence ... 25
3.2.2 Mortalité/Morbidité ... 26
3.3 Conséquences économiques et sociales ... 27
3.3.1 Aspects économiques ... 27
3.3.2 Implications sociales ... 28
3.4 Classification des épilepsies : les syndromes épileptiques ... 28
3.5 Diagnostic ... 31
3.5.1 Diagnostic clinique ... 31
3.5.2 Diagnostic par exploration cérébrale ... 32
3.6 Mécanismes centraux impliqués ... 34
3.6.1 Au niveau cellulaire, les anomalies de conductance ionique ... 35
3.6.2 Au niveau synaptique, rupture d’équilibre entre excitation et inhibition ... 36
3.7 Prise en charge et traitements de l’épilepsie ... 37
3.7.1 Prise en charge pharmacologique ... 38
3.7.2 Chirurgie conventionnelle ... 40
3.7.3 Autres approches ... 41
P
ARTIE2 :
L
ESB
ENZODIAZEPINES... 44
Historique sur les Benzodiazépines ... 44
1 GENERALITES SUR LES BENZODIAZEPINES ... 46
1.1 Structure et nomenclature ... 46
1.2 Relation structure-‐activité ... 47
1.2.1 Substitution sur le cycle benzénique ... 47
1.2.2 Substitution sur l’hétérocycle ... 48
1.2.3 Substitution sur le cycle benzénique en position 5 ... 48
1.2.4 Adjonction d’un cycle ... 48
1.3 Mécanisme d’action ... 48
1.3.1 Le système GABAergique ... 49
1.3.2 Potentialisation de l’action du GABA par les BZD ... 52
1.4 Propriétés pharmacocinétiques ... 54 1.4.1 Absorption/Résorption ... 55 1.4.2 Distribution ... 55 1.4.3 Métabolisme ... 55 1.4.4 Elimination ... 56 1.5 Indications ... 56 1.5.1 Troubles anxieux ... 57 1.5.2 Epilepsie ... 57 1.5.3 Insomnies ... 57 1.5.4 Contractures musculaires ... 58 1.5.5 Autres ... 58 1.6 Consommation des BZD ... 60
1.6.1 Consommation en France et dans le monde ... 60
1.6.2 Consommation selon les indications ... 61
1.7 Effets indésirables ... 62
1.7.1 Tolérance – dépendance ... 62
1.7.2 Amnésie ... 63
1.7.3 Autres effets indésirables ... 64
1.8 Contre-‐indications ... 64
2 BENZODIAZEPINES ET EPILEPSIE ... 66
2.1 BZD utilisées dans l’épilepsie en France ... 66
2.1.1 Clobazam ... 67
2.1.2 Clonazépam ... 67
2.1.3 Diazépam ... 67
2.1.4 Midazolam ... 68
2.2 Autres BZD utilisées dans le monde ... 69
2.2.1 Clorazépate ... 69
2.2.2 Lorazépam ... 69
2.2.3 Nitrazépam ... 70
2.3 Limites de leur utilisation dans l’épilepsie. ... 70
P
ARTIE3 :
E
TUDE PHARMACO-‐
EPIDEMIOLOGIQUE... 72
1 INTRODUCTION ... 73
1.1 Le syndrome de Lennox-‐Gastaut ... 73
1.2 Justifications de l’étude ... 75
2 OBJECTIFS ... 76
2.1 Objectif principal ... 76
2.2 Objectifs secondaires ... 76
3 METHODES ... 77
3.1 Schéma général de l’étude ... 77
3.2 Recueil et source des données ... 77
3.3 Critères d’éligibilité et populations cible de l’étude ... 78
3.4 Exposition ... 79
3.5 Analyse préliminaire ... 79
3.6 Critères d’évaluation ... 80
3.6.1 Objectif principal ... 80
3.6.2 Objectifs secondaires ... 82
3.7 Taille de l’échantillon – Puissance statistique ... 84
3.8 Analyses statistiques ... 84
4 RESULTATS ... 86
4.1 Analyse préliminaire ... 86
4.1.1 Incidence ... 86
4.1.2 Diagnostic ... 87
4.1.3 Population d’étude finale ... 88
4.2 Modalités d’utilisation et caractéristiques des patients traités ... 88
4.2.1 Enfants et adultes ... 88
4.2.2 Enfants (< 18 ans) ... 91
4.3 Efficacité réelle et tolérance de CLB et CLN dans l’épilepsie ... 93
4.3.1 Persistance ... 93
4.3.2 Délai entre les augmentations de doses ... 94
4.3.3 Observance ... 94
4.3.4 Survenue d’évènements d’intérêt ... 94
4.4 Utilisation de ressources associées aux traitements par CLB ou CLN dans l’épilepsie ... 95
5 DISCUSSION ... 97
5.1 Principaux résultats ... 97
5.2 Forces et limites de l’étude ... 98
5.2.1 Forces ... 98
5.2.2 Limites ... 98
6 CONCLUSION DE L’ETUDE ... 101
C
ONCLUSION... 102
R
EFERENCESB
IBLIOGRAPHIQUES... 104
A
NNEXES... 112
L
ISTE DES ABREVIATIONS
AE Antiépileptique AED Antiepileptic Drug
AES American Epidemiology Society
AMM Autorisation de Mise sur le Marché AMPA Acide α-‐amino-‐propionique
ANSM Agence Nationale de Sécurité du Médicament et des produits de santé ATC Anatomique, Thérapeutique et Chimique
BHE Barrière Hémato-‐Encéphalique BZD Benzodiazépine
CGTC Crise Généralisée Tonico-‐Clonique CP Crise Partielle
CPRD Clinical Practice Research Datalink
DCI Dénomination Commune Internationale DDD Defined Daily Dose
DRESS Drug Reaction with Eosinophilia and Systemic Symptoms
EEG Electroencéphalogramme EME Etat de Mal Epileptique FDA Food and Drug Administration
GABA Acide γ-‐aminobutyrique
GABA-‐T GABA Transaminase mitochondriale GAD Acide Glutamique Décarboxylase GAT GABA Transporteur
GPRD General Practitioner Research Database
IBE International Bureau for Epilepsy
ILAE International League Against Epilepsy
IM Intramusculaire IR Intrarectal
IRM Imagerie à Résonnance Magnétique IV Intraveineux
LFCE Ligue Française Contre l’Epilepsie NDD Numeric Daily Dose
NICE National Institute for Health and Care Excellence
OMS Organisation Mondiale de la Santé PO Per os
RCP Résumé des Caractéristiques du Produit SLG Syndrome de Lennox-‐Gastaut
SD Standard Deviation
SNC Système Nerveux Central
SmPC Summary Of Product Characteristics
SSA Acide Semi Aldhéhyde Succinique
SSA-‐D Semi-‐Succinique Aldéhyde Déshydrogénase SUDEP Sudden Unexpected Death in Epilepsy
TEM Tomographie d’Emission Monophotonique TEP Tomographie par Emission de Positons TOC Trouble Obsessionnel Compulsif
L
ISTE DES FIGURES
Figure 1 : Représentation schématique de la propagation de la décharge épileptique au sein
du cortex cérébral lors de crises d’épilepsie généralisée ou partielle simple.
Figure 2 : Incidence spécifique de l’épilepsie selon l’âge et taux d’incidence cumulatif des
crises épileptiques à Rochester, Minnesota, de 1935 à 1984.
Figure 3 : Schéma d’un neurone et ses principales parties. Figure 4 : Schématisation du potentiel d’action neuronal.
Figure 5 : Schématisation de la synapse excitatrice glutamatergique et la synapse inhibitrice
GABAergique.
Figure 6 : Autres approches possibles du traitement de l’épilepsie ; la Stimulation du nerf
vague, le Gamma Knife.
Figure 7 : Les premières BZD mises sur le marché : chlordiazépoxide et diazépam. Figure 8 : Squelette de base des 1,4-‐BZD et 1,5-‐BZD.
Figure 9 : L’acide γ-‐aminobutyrique ou GABA.
Figure 10 : Biosynthèse et métabolisme du GABA : libération du GABA dans la fente
synaptique schématisation de la biosynthèse et du métabolisme du GABA.
Figure 11 : Représentation schématique du récepteur GABAA.
Figure 12 : Schématisation du mécanisme d’action des BZD sur le récepteur GABAA.
Figure 13 : Consommation des BZD et apparentées de 2000 à 2012. Figure 14 : Répartition des indications des BZD en France en 2012.
Figure 15 : Les différentes BZD utilisées en France dans le traitement de l’épilepsie :
clobazam, clonazépam, diazépam et midazolam.
Figure 16 : Autres BZD utilisées dans le monde dans le traitement de l’épilepsie :
clorazépate, lorazépam et nitrazépam.
Figure 17 : Pourcentage des patients persistants aux traitements par CLB ou CLN durant une
période d’observation de 12 mois.
L
ISTE DES TABLEAUX
Tableau 1 : Classification internationale des crises d’épilepsie.
Tableau 2 : Classification terminologique révisée des crises d’épilepsie.
Tableau 3 : Classification internationale des épilepsies et syndromes épileptiques. Tableau 4 : Les principaux médicaments antiépileptiques et leurs caractéristiques. Tableau 5 : BZD et apparentées commercialisées en France en 2012.
Tableau 6 : Décompte des patients traités par CLB/CLN selon les différentes définitions de
prévalence/incidence.
Tableau 7 : Décompte des patients selon les différentes périodes de définitions du diagnostic
associé.
Tableau 8 : Population d’étude finale.
Tableau 9 : Caractéristiques sociodémographiques des patients et des traitements à la date
index.
Tableau 10 : Caractéristiques des traitements pendant la durée du suivi.
Tableau 11 : Caractéristiques sociodémographiques des patients et des traitements à la date
index chez les patients épileptiques âgés de moins de 18 ans.
Tableau 12 : Caractéristique des traitements pendant la période de suivi chez les patients
épileptiques âgés de moins de 18 ans.
Tableau 13 : Persistance aux traitements par CLB et CLN dans les 12 mois de suivi après la
date index.
Tableau 14 : Adhérence aux traitements par CLB et CLN.
Tableau 15 : Utilisation de ressources ayant eu lieu entre la date index et la date de fin de
traitement.
Tableau 16 : Utilisation de ressources qui ont eu lieu dans les 12 mois après la date index
chez les patients ayant eu au moins 12 mois de traitement.
I
NTRODUCTION
L’épilepsie est une des affections neurologiques chroniques les plus fréquentes, elle touche environ 50 millions de personnes dans le monde. Elle se caractérise par la récurrence spontanée de crises épileptiques qui résultent d’une décharge anormale et simultanée de milliers de neurones dans le cerveau. Compte-‐tenu des diverses formes des crises et de leur évolution, on peut dire qu’il n’existe pas une mais des épilepsies. Sa complication la plus grave et la plus redoutée est l’état de mal épileptique, il peut engager le pronostic vital avec un risque de séquelles neurologiques définitives. En dépit de la vingtaine de molécules disponibles sur le marché actuellement, il subsiste 30% de formes pharmacorésistantes. D’autres alternatives non pharmacologiques peuvent alors être proposées dans des cas bien particuliers.
Les benzodiazépines sont des molécules qui agissent sur le système nerveux central et permettent de diminuer l’excitabilité neuronale par leur action sur le système GABAergique. Elles font partie des acteurs majeurs du traitement de l’épilepsie grâce à leur rapidité d’action et leur efficacité sur presque tous les types de crises. Cependant leur utilisation est confrontée à deux problèmes majeurs : leurs effets indésirables et le développement d’une tolérance rendant difficile l’arrêt du traitement.
L’objectif de ce travail sera donc dans une première partie de présenter les aspects cliniques, étiologiques et neurobiologiques de l’épilepsie ainsi que la place des traitements médicamenteux et des autres alternatives non pharmacologiques dans la stratégie thérapeutique afin de mieux appréhender cette pathologie sous ses différents aspects. La deuxième partie sera consacrée à l’étude des benzodiazépines, leurs mécanismes d’action et leurs principales propriétés ainsi que leur place dans la prise en charge de l’épilepsie.
Enfin dans une troisième partie, pour illustrer l’utilisation des benzodiazépines dans le traitement de l’épilepsie, nous étudierons les données d’une étude pharmaco-‐ épidémiologique menée dans le laboratoire pharmaceutique Lundbeck. Cette étude de cohorte a été réalisée à la demande des autorités de santé afin de documenter l’utilisation de clobazam en situation réelle d’utilisation suite à sa mise sur le marché américain dans le traitement de l’épilepsie associée au syndrome de Lennox-‐Gastaut.
P
ARTIE
1 :
L’E
PILEPSIE
Historique de l’épilepsie et de son traitement
L’épilepsie est une affection neurologique caractérisée par la répétition chronique de décharges électriques dans les cellules nerveuses du cortex cérébral [1]. C’est l’une des affections les plus anciennement connues de l’humanité. Le document le plus ancien en traitant est une tablette babylonienne, gardée au British Museum à Londres, datant d’au moins 2000 ans avant Jésus-‐Christ. On y retrouve une description précise de différents types de crises, mais également les représentations de leur caractère surnaturel [2,3].
L’épilepsie a longtemps été considérée comme un mal sacré, en particulier chez les grecs, au Ve siècle avant Jésus Christ, qui l’avaient surnommée ainsi [4]. On pensait à
l’époque, et durant de nombreux siècles, qu'une personne en souffrant était la proie d'une force ou d'une puissance surnaturelle, ce qui explique le nom de la maladie. En effet, le mot épilepsie provient du grec epilepsia signifiant « attaque » dérivant lui-‐même du grec ancien
epilambanein (ἐπιλαμβάνειν) qui signifie « prendre par surprise» [2,5].
L'idée de l'épilepsie comme dérèglement cérébral n'a commencé à prendre racine qu'aux XVIIIe et XIXe siècles. Dans l'intervalle de 2000 ans, ce sont ces conceptions
surnaturelles qui ont prévalu et ce n’est que dans les années 1850 que Hughlings Jackson, neurologue britannique, fera passer définitivement l’épilepsie du domaine de la psychiatrie à celui de la neurologie. Il émit à l’époque, l’hypothèse que les crises épileptiques pouvaient être provoquées par des décharges électrochimiques brutales d’énergie dans le cerveau et que le type de crise pouvait varier en fonction de la localisation et de la nature de ces décharges [3]. C’est au même moment, devant la Société royale de médecine et de chirurgie de Londres, que Sir Charles Locock, obstétricien britannique, fit part de ses résultats obtenus avec le bromure de potassium ; ce dernier devint le premier médicament efficace contre l’épilepsie [2, 3, 6].
Au cours du XXe siècle, l’investigation de cette affection va se poursuivre grâce à l’essor des technologies médicales ; le psychiatre allemand Hans Berger découvrit en 1920 l’électroencéphalogramme (EEG) qui sera très utilisé à partir de 1930 pour l’exploration et l’étude de l’épilepsie [4]. Celui-‐ci permit de confirmer l’existence de décharges excessives au niveau des neurones cérébraux mais aussi de localiser les sites des décharges et différencier les nombreux types de crises [3].
Des molécules innovantes, très utilisées à l’époque, furent également découvertes : le phénobarbital, la phénytoïne, la carbamazépine, les benzodiazépines et le valproate de sodium. Ces molécules restent encore de nos jours des traitements de premier choix dans la prise en charge de l’épilepsie [6, 7].
Le diagnostic et le traitement de l’épilepsie ont encore été améliorés au cours des dernières décennies par le développement de la neuro-‐imagerie structurelle et fonctionnelle. Ces techniques ont permis de découvrir un grand nombre de lésions cérébrales plus subtiles à l’origine des crises. La connaissance des mécanismes moléculaires a également permis de développer de nouveaux traitements ; de nombreuses molécules antiépileptiques sont apparues sur le marché depuis le début des années 1990 constituant un véritable arsenal thérapeutique [6].
Toutefois, bien que l’épilepsie soit connue depuis longtemps et que des traitements adaptés assurent une certaine maîtrise thérapeutique, l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) souligne que cette affection neurologique suscite encore aujourd’hui la crainte, l’incompréhension et demeure l’objet de croyances et préjugés tenaces dont les patients sont les premiers à souffrir [2].
1 LES CRISES D’EPILEPSIE
1.1 Définition
Selon la définition élaborée par la Ligue Internationale Contre l’Épilepsie (ILAE :
International League Against Epilepsy) et le Bureau International pour l’Épilepsie (IBE : International Bureau for Epilepsy), une crise épileptique ou crise d’épilepsie correspond à la
survenue aigue et transitoire de signes et/ou de symptômes dus à une activité neuronale anormale, excessive ou synchrone, d’un groupe plus ou moins étendu de neurones du cortex cérébral et de son éventuelle propagation [8, 9].
La crise épileptique doit être paroxystique, c’est à dire qu’elle est caractérisée par une durée brève (de quelques secondes à quelques minutes) avec un début et une fin nets. Elle doit s’accompagner de manifestations cliniques qui peuvent varier fortement suivant la localisation cérébrale de la population neuronale hyperexcitable [8]. Elle peut donc se manifester par une modification brutale de l’état de conscience, par des phénomènes moteurs et/ou sensitifs, sensoriels, psychiques, végétatifs ou encore par une altération de la réponse de l’individu à son environnement. Enfin, elle doit également s’accompagner d’une augmentation anormale de la synchronisation neuronale et de signes électroencéphalographiques particuliers qui diffèrent en fonction de chaque type de crise.
Il faut cependant souligner que même si l’apport de l’EEG a contribué à poser le diagnostic, ce dernier reste avant tout basé sur les signes cliniques [8, 10].
1.2 Classification des crises épileptiques
La grande diversité sémiologique des crises épileptiques a conduit les spécialistes à essayer d’établir une classification internationale. Les travaux d’Henri Gastaut, caractérisés par une observation rigoureuse des crises et de leur traduction électroencéphalographique, conduisirent à la première (1970) [11] puis à la seconde (1981, Tableau 1) [12] classification internationale des crises d’épilepsie.
La Commission de la Classification et de la Terminologie de l’ILAE a proposé en 2010 une nouvelle révision des concepts de la terminologie et des approches de la classification des crises épileptiques présentée dans le Tableau 2 [9].
Tableau 1 : Classification internationale des crises d’épilepsie [12].
• Crises généralisées - Absence : petit mal
- absence typique - absence atypique - Myocloniques - Toniques - Cloniques
- Tonico-‐clonique : grand mal - Atoniques
- Spasmes infantiles • Crises partielles
- Crises partielles simples (pas de modification de la conscience) - avec signes moteurs
- avec signes somatosensitifs ou sensoriels - avec signes végétatifs
- avec signe psychiques
- Crises partielles complexes (altération plus ou moins marquée de la conscience) - début partiel simple suivi de troubles de la conscience et/ou d’automatismes
- avec troubles de la conscience dès le début de la crise accompagnés ou non d’automatismes - Crises partielles secondairement généralisées
- crises partielles simples secondairement généralisées - crises partielles complexes secondairement généralisées
- crises partielles évoluant vers une crise partielle complexe puis vers une généralisation secondaire • Crises non classées
Tableau 2 : Classification terminologique révisée des crises d’épilepsie [9].
• Crises généralisées - Tonico-‐clonique - Absence
- absence typique - absence atypique
- absences avec caractéristiques particulières
- absences myocloniques
- absences avec myoclonies palpébrales
- Myocloniques - myocloniques - myoclono atoniques - myoclono toniques - Cloniques - Toniques - Atoniques • Crises partielles • Inconnues - Spasmes épileptiques
Ces deux classifications qui reposent sur les éléments cliniques et électroencéphalographiques sont divisées en trois groupes. Les deux plus grandes catégories de crises classées par l’ILAE sont les crises partielles (ou focales), affectant une zone unique et précise du cerveau, et les crises généralisées, qui elles en affectent la totalité (Figure 1). Toutefois, dans certains cas, le type de crise épileptique peut demeurer inclassable.
C’est la sémiologie clinique et l’EEG qui permettent de distinguer les crises partielles et les crises généralisées [5].
(a) (b)
Figure 1 : Représentation schématique de la propagation de la décharge épileptique au sein du cortex
cérébral lors de crises d’épilepsie généralisée (a) ou partielle simple (b) [13].
1.2.1 Les crises partielles ou focales
Les crises partielles touchent environ 60% des personnes souffrant d’épilepsie [14, 15]. Elles surviennent lorsque l’activité électrique du cerveau reste focalisée au niveau d’une seule aire corticale. La crise démarre dans un secteur limité des structures corticales, appelé zone épileptogène, mais peut se propager à d’autres régions ; les crises peuvent alors devenir généralisées si elles affectent la totalité du cerveau [5].
Ces crises peuvent se manifester sous différentes formes ; en effet l’expression de la crise va dépendre de la région dans laquelle la décharge épileptique a lieu. Elles peuvent donc n’affecter que certaines parties du corps, et se manifester par différents symptômes moteurs, sensitifs, somatosensoriels ou psychiques comme des pertes de mémoire, de conscience et de parole [16, 17].
Les crises partielles sont classées en deux catégories : les crises partielles simples sans modification de la conscience et les crises partielles complexes avec altération de la conscience.
• les crises partielles simples
Ce sont des crises qui ne modifient pas la conscience car elles n’intéressent qu’une petite zone discrète du cerveau et sont habituellement de courte durée (en général moins d’une minute) [15]. Elles sont très diverses et sont souvent considérées comme une aura par les patients. Les symptômes accompagnant ces crises dépendent de la zone où a lieu la décharge électrique. Il existe donc différentes crises partielles qui sont motrices, sensorielles, végétatives ou psychiques [16-‐18] :
-‐ Les crises partielles simples avec signes moteurs peuvent se présenter sous la forme
de crises somatomotrices avec clonies unilatérales et marche jacksonienne, de crises motrices caractérisées par des clonies ou spasmes toniques sans marche jacksonienne, de crises versives associées à une déviation de la tête et des yeux avec une giration de l’ensemble du corps ou de crises phonatoires se manifestant par un arrêt de la parole ou la répétition d’un mot, d’une voyelle ou d’une phrase.
-‐ Les crises partielles simples avec phénomènes sensitifs ou sensoriels s’expriment par
des hallucinations ou illusions. Il peut s’agir de paresthésies élémentaires (fourmillements, picotements, décharges électriques), de sensations douloureuses ou thermiques affectant une partie d’un hémicorps ou encore d’hallucinations qui peuvent être visuelles, auditives, olfactives, gustatives ou vertigineuses.
-‐ Les crises partielles simples avec signes végétatifs peuvent entraîner des troubles du
rythme cardiaque, une hypersalivation ou encore une sensation de pesanteur épigastrique remontant vers la gorge.
-‐ Enfin les crises partielles simples avec symptômes psychiques occasionnent des troubles du langage, une altération de la mémoire avec des impressions de « déjà-‐vu » ou au contraire de « jamais vu » et elles provoquent également des états de rêve, des impressions d’irréalité ou d’étrangeté.
• les crises partielles complexes
Les crises partielles complexes touchent des structures centrales profondes du cerveau qui régissent la conscience [15]. Ces crises entraînent donc des altérations ou une perte de la conscience, produisant une apparence vague, confuse ou onirique. Les caractéristiques cliniques de la crise partielle complexe dépendent de la région touchée par une activité électrique anormale, la personne peut répondre mais souvent de manière inappropriée et afficher un comportement étrange accompagné de gestes automatiques répétés [17].
Après la crise, le patient présente souvent une période de confusion et peut n’avoir que très peu, ou même aucun souvenir de ce qui s’est passé. Ces crises durent approximativement de 30 secondes à 3 minutes [14].
• les crises partielles secondairement généralisées
Toute crise partielle, simple ou complexe, peut éventuellement se généraliser et donner lieu à une crise tonico-‐clonique [19]. Il arrive même que, compte tenu de la rapidité de la généralisation, il soit impossible de déceler les signes focaux initiaux [20]. Les crises partielles secondairement généralisées ont un foyer d’origine, à la différence des crises généralisées qui se déclarent en même temps dans tout le cerveau [13].
1.2.2 Les crises généralisées
Elles sont les plus connues du grand public et les plus impressionnantes mais pas les plus fréquentes. Durant ces crises, la décharge paroxystique est d’emblée propagée aux deux hémisphères cérébraux. Elles semblent de ce fait intéresser simultanément l’ensemble du cortex cérébral et ne comportent aucun signe pouvant les rattacher à une zone corticale localisée [5].
Les crises généralisées peuvent être convulsives ou non mais s’accompagnent presque toujours d’une perte de conscience. Les signes moteurs les accompagnant sont d’emblée bilatéraux et symétriques ; la perte de connaissance est de durée brève, quelques secondes au cours d’une absence, ou plus longue, quelques minutes au cours d’une crise généralisée tonico-‐clonique [16].
• les absences
Autrefois appelées « petit mal », les crises d’absence débutent presque systématiquement durant l’enfance et sont très souvent confondues à tort avec des rêveries ou de l’inattention, et de ce fait passent fréquemment inaperçues.
Le terme « absence » fait référence à une rupture du contact avec arrêt de l’activité en cours et fixité du regard pendant quelques secondes [21]. Ces crises commencent et se terminent brusquement et durent environ de 2 à 10 secondes. La plupart des personnes touchées retrouvent leurs fonctions mentales immédiatement et retournent à leurs activités sans aucun souvenir de l’événement. Les absences sont également caractérisées par une perte d’expressions du visage, une absence de réponse et un arrêt du clignement des yeux pouvant s’accompagner d’une révulsion vers le haut des globes oculaires.
On peut distinguer deux types d’absences, les absences dites « typiques » et celles dites « atypiques ». L’adjectif typique caractérise le fait que l’absence est isolée et simple sur le plan clinique (il n’existe aucun autre symptôme associé).
Au contraire, atypique signifie qu’à la rupture du contact s’ajoutent d’autres symptômes comme par exemple des contractions musculaires, des mouvements saccadés ou automatiques. Elles différent des absences typiques car sont de début et fin moins brutales, la perte de conscience n’est pas toujours complète et ces crises durent habituellement plus de 10 secondes. Elles sont également plus susceptibles de se produire chez des enfants ayant un retard de développement [16].
L’absence est une forme d’épilepsie très fréquente, probablement une des plus bénigne, mais elle mérite d’en faire le diagnostic et d’être traitée. Les enfants qui ont des crises d'absence ont souvent une fonction cognitive et une intelligence normale, mais si les crises ne sont pas traitées, elles peuvent créer des lacunes dans l'apprentissage puisqu’elles surviennent plusieurs fois par jour [14, 17].
• les crises myocloniques
Il s’agit du seul type de crise généralisée se produisant sans troubles de la conscience [16]. Ces crises, qui se manifestent par des secousses musculaires brusques et violentes, impliquent habituellement les deux côtés du corps simultanément. Elles peuvent affecter les muscles périorbitaires, les muscles des membres supérieurs, faisant lâcher ou projeter un objet tenu dans les mains, ou les muscles des membres inférieurs, pouvant faire tomber le sujet [18].
Ces crises sont spontanées ou provoquées par des stimulations, en particulier par une stimulation lumineuse intermittente. Elles surviennent très souvent après le réveil et sont totalement différentes des myoclonies de l’endormissement qui ne sont pas de nature épileptique [17].
• les crises cloniques
Ces crises sont caractérisées par la contraction rythmique et répétitive d’un groupe de muscles, des spasmes du visage, des membres (bras ou jambes) ou du corps tout entier. Les spasmes se manifestent le plus souvent de façon asymétrique, prédominant au niveau d’un hémicorps [17]. Elles sont souvent précédées d’une hypotonie ou d’un spasme tonique et s’accompagnent toujours d’une perte de conscience [18].
• les crises toniques
Généralement accompagnées d’un trouble ou d’une perte de conscience, ces crises sont souvent brèves et consistent en une contraction musculaire tonique soutenue qui entraine un raidissement des muscles de l’ensemble du corps ; celui-‐ci devient entièrement rigide. Les crises toniques sont habituellement observées chez les patients atteints d’épilepsie généralisée symptomatique et sont l’un des types de crises fréquents chez les enfants en particulier ceux atteints du syndrome de Lennox-‐Gastaut (encéphalopathie épileptique sévère de l’enfant caractérisée par trois principaux critères : crises multiples, anomalies de l’EEG intercritique et retards mentaux). Ces crises surviennent souvent durant la nuit car elles sont activées par le sommeil lent [17, 18].
• les crises atoniques
Les crises atoniques sont caractérisées par la perte soudaine mais brève du tonus musculaire de tout ou d’une partie du corps. La tête s'incline vers l'avant, les bras perdent leur tonus, les jambes ne portent plus la personne et celle-‐ci peut tomber au sol [22]. Ces crises durent seulement quelques secondes et il n’y a pas de perte notable de la conscience chez les personnes concernées, elles récupèrent généralement rapidement. Mais le risque de chute grave et de blessures, notamment à la tête et dues aux crises soudaines, les rend particulièrement dangereuses [17].
• les crises tonico-‐cloniques
Autrefois appelée crise « grand mal », ce sont les crises les plus connues en raison de leur caractère spectaculaire, et pour lequel elles représentent, à tort, pour la majorité de la population la seule forme de crise épileptique [18]. Elles peuvent se manifester d’emblée ou bien faire suite à une crise partielle simple ou complexe.
Ces crises se déroulent en trois phases [16, 22] :
- la phase tonique dure 10 à 20 secondes. La personne pâlit, perd brusquement conscience, ses yeux se révulsent, elle pousse parfois un cri et tombe à terre. L’ensemble de sa musculature se contracte d’abord en flexion puis en extension. La contracture des muscles de la mâchoire provoque une fermeture brutale de la bouche avec souvent morsure de la langue.
- la phase clonique dure en moyenne de 20 à 30 secondes. Le relâchement intermittent de la contracture initiale va produire des secousses musculaires affectant de façon symétrique et synchrone l’ensemble du corps avec un rythme s’estompant progressivement.
- la phase résolutive ou postcritique dure quelques minutes. C’est une phase de coma profond au cours de laquelle le relâchement musculaire commencé lors de la phase précédente devient total. Le sujet gît, cyanosé, gardant les mâchoires serrées ; sa respiration, bloquée depuis le début de la crise, reprend, ample et bruyante, gênée par l’hypersécrétion bronchique et salivaire, parfois sanglante. Il peut y avoir incontinence urinaire et parfois fécale et d’une façon générale l’ensemble de la crise s’accompagne de manifestations végétatives [23].
Au réveil, la personne ne garde aucun souvenir de sa crise ; elle peut se plaindre de céphalées, courbatures, voire douleurs en relation avec le traumatisme occasionné par la chute initiale [17].
1.2.3 Les crises inclassables
Certaines crises demeurent inclassables, soit par absence de renseignements cliniques suffisants, soit en raison d’une sémiologie déroutante [5]. On y trouve les spasmes épileptiques (qui comprennent les spasmes infantiles) et les autres crises (certaines crises convulsives nocturnes par exemple) [17].
2 L’ETAT DE MAL EPILEPTIQUE
L’OMS définit l’état de mal épileptique (EME) comme « un état caractérisé par une crise d’épilepsie qui dure suffisamment longtemps ou qui se répète à des intervalles suffisamment brefs pour créer une condition fixe et durable » [24]. L’EME est également caractérisé par la persistance d’une altération de la conscience pouvant s’accompagner de signes neurologiques [16]. C’est la complication médicale la plus redoutée de l’épilepsie car elle peut engager le pronostic vital et fonctionnel avec un risque de séquelles neurologiques définitives.
On parle d’EME dès la constatation de deux crises successives en moins de 20 minutes ou lorsqu’une activité convulsive continue se prolonge au-‐delà de 10 à 20 minutes. Les crises sont si prolongées ou si répétées qu’il n’y a pas de retour à la normale entre elles [21].
Il existe autant d’EME qu’il existe de variété de crises épileptiques. Cependant deux situations cliniques très différentes peuvent être considérées [16, 25] :
- Les EME convulsivants sont particulièrement graves. Ils sont caractérisés par la
répétition subintrante de crises convulsives, (la répétition des crises est si rapide que des nouvelles commencent avant la cessation complète des premières). Ces crises induisent des troubles neurovégétatifs, une acidose, un œdème cérébral et des lésions neuronales rapidement irréversibles à l’origine de séquelles neurologiques. Ceux-‐ci constituent une urgence thérapeutique car ils peuvent mettre en danger le pronostic vital.
- Les EME non convulsivants sont beaucoup moins graves et de meilleur pronostic.
Leur symptôme principal est une confusion mentale d’intensité variable pouvant persister des heures voire des jours. On distingue les états de mal épileptique-‐ absence associé à des myoclonies péri-‐oculaires ou buccales et les états de mal épileptique partiels complexes où la confusion mentale est le symptôme isolé. Ils sont néanmoins beaucoup plus difficiles à diagnostiquer.
Les EME sont des urgences médicales dont le taux de mortalité avoisine les 10% [16]. Il est essentiel de stopper le plus rapidement possible l’état de mal convulsif car des séquelles neurologiques peuvent apparaître dès la deuxième ou troisième convulsion [21].
3 L’EPILEPSIE OU MALADIE EPILEPTIQUE
3.1 Définition
Il existe une différence fondamentale entre les crises épileptiques et l’épilepsie. Une crise est un événement aigu, bien défini dans le temps, qui a un début et une fin nets ; à l’opposé, l’épilepsie est une affection chronique définie par la répétition spontanée, à moyen et long terme, de ces crises [21]. Selon la définition de l’ILAE, l’épilepsie est une affection cérébrale caractérisée par une prédisposition persistante à la production de crises épileptiques, et par les conséquences neurobiologiques, cognitives, psychologiques et sociales de cet état. La définition de l’épilepsie nécessite la survenue d’au moins une crise épileptique et la présence d’une altération cérébrale persistante augmentant la probabilité de crises ultérieures [8].
L’épilepsie est plus un groupe de syndromes qu’une maladie ; on considère d’ailleurs souvent qu’il n’y a pas une mais des épilepsies. L’ILAE la définit comme une famille diversifiée d’états morbides qui ont en commun une prédisposition anormalement importante aux crises [8].
3.2 Epidémiologie descriptive
L’épilepsie est l’affection neurologique chronique la plus fréquente après la migraine, elle peut apparaître à n’importe quel âge mais elle survient le plus souvent aux âges extrêmes de la vie, chez les enfants adolescents ou bien chez les personnes âgées [16]. Elle affecte enfants et adultes, quel que soit leur sexe, leur ethnie, leur religion, leur patrimoine génétique et leur classe sociale. Sa distribution dans les différentes régions du monde n’est toutefois pas homogène.
3.2.1 Prévalence/Incidence
L’OMS estime que la proportion de personnes souffrant d’épilepsie se situe entre 4 et 10 pour 1000 habitants. A l’échelle mondiale, environ 50 millions de personnes souffrent donc de cette maladie. Dans les pays développés, le nombre annuel de nouveaux cas se situe entre 40 et 70 pour 100 000 habitants [26, 27].