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État de l'enseignement de la formation auditive en contexte extrascolaire offert aux enfants de 6 à 12 ans, au Québec

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Academic year: 2021

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État de l’enseignement de la formation auditive en

contexte extrascolaire offert aux enfants de 6 à 12 ans,

au Québec

Mémoire

Justine Pomerleau Turcotte

Maîtrise en musique – Éducation musicale

Maître en musique (M.Mus.)

Québec, Canada

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État de l’enseignement de la formation auditive en

contexte extrascolaire offert aux enfants de 6 à 12 ans,

au Québec

Mémoire

Justine Pomerleau Turcotte

Sous la direction de :

Maria Teresa Moreno Sala, directrice de recherche

Francis Dubé, codirecteur de recherche

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Résumé

Ce projet a pour but de dresser un portrait de l’enseignement de la formation auditive (FA) en milieu extrascolaire offert aux enfants de 6 à 12 ans au Québec. Un questionnaire en ligne complété par 147 professeurs a permis de récolter des informations sur les activités réalisées avec les élèves, leurs perceptions à propos de l’apprentissage et de l’enseignement de la formation auditive, ainsi que sur leur utilisation des technologies et des stratégies qu’ils proposent aux élèves lorsqu’ils réalisent des dictées musicales. De façon générale, les résultats obtenus permettent d’en savoir davantage sur la façon dont la FA est enseignée aux enfants au Québec, et sur les besoins des professeurs. Plus précisément, ces réponses obtenues mettent en lumière que les professeurs interrogés ont, pour la plupart, une conception traditionnelle de la pédagogie de la formation auditive. Une majorité des professeurs questionnés ont vécu une expérience positive de leur propre apprentissage de la FA, et ont une perception positive de l’enseignement de cette matière. De plus, ces professeurs semblent peu utiliser les technologies pour enseigner la FA, et ceux qui néanmoins les utilisent sont davantage les hommes, ceux n’enseignant pas le piano, de même que ceux ayant une perception plus négative de leur apprentissage de la FA ou des ressources disponibles pour l’enseigner. Finalement, le choix des stratégies pour enseigner la dictée musicale est corrélé avec des caractéristiques sociodémographiques, avec le vécu des professeurs pour l’apprentissage de la FA et avec leur perception pour l’enseignement de cette matière.

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Abstract

The goal of this project is to draw a portrait of aural skills (AS) teaching to children between 6 and 12 in studios, in Quebec. An online survey completed by 147 teachers gave insights about the activities made with their students, their perceptions of learning and teaching of AS, their use of technology, and the strategies they propose to their students during musical dictations. The results lead to a better understanding of the way AS are taught in Quebec, and of the teachers’ needs. More precisely, the data highlights the fact that most of the surveyed teachers have a rather traditional conception of AS pedagogy. A majority of participants have a positive perception of their own learning of AS and of its teaching. Furthermore, they do not use technologies a lot when teaching AS, and those who use them most are men, people who teach another instrument than piano, and those who have a negative perception of their learning experience of AS and of the resources currently available to teach it. Finally, the strategies chosen by the respondents to teach musical dictation are correlated with sociodemographic characteristics, learning experience of AS, and the perception of its teaching.

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Table des matières

Résumé ... iii

Abstract ... iv

Table des matières ... v

Liste des tableaux ... vii

Liste des figures ...viii

Remerciements ... ix

Avant-propos ... x

Chapitre 1 : Introduction ... 1

Chapitre 2 : Revue de littérature ... 5

Travaux de recherche portant sur le développement ... 5

Perception musicale ... 5

Chant ... 10

Transcription musicale ... 15

Stratégies pouvant être utilisées pour enseigner la dictée musicale ... 17

Apport de la recherche... 17

Recommandations des praticiens ... 21

L’apport des technologies dans l’apprentissage et l’enseignement de la FA ... 23

Applications pour MacBook ... 26

Applications pour iPhone ... 27

Analyse du contenu des méthodes ... 27

Programmes d’écoles préparatoires ... 28

Ouvrages conçus pour enseigner la formation musicale dans les Conservatoires, en France . 30 Autres méthodes ... 32

Synthèse du contenu des ouvrages... 34

Énoncé du problème ... 39

Chapitre 3 : Méthodologie ... 41

Chapitre 4 : Résultats concernant les habitudes d’enseignement de la FA ... 43

Description de l’échantillon ... 43

Raisons pour ne pas enseigner la FA ... 43

Comment la FA est-elle enseignée ? ... 44

Perception de l’apprentissage et de l’enseignement de la FA ... 46

Expérience préalable avec la FA ... 46

Perception de l’enseignement de la FA ... 47

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Résumé ... 52

Abstract ... 53

Factors influencing technology use in aural skills lessons ... 54

Introduction ... 54 Methodology ... 56 Results ... 58 Discussion ... 65 Conclusion ... 66 Funding ... 67 Acknowledgments ... 67 References ... 68

Chapitre 6 : Les stratégies suggérées par les professeurs de musique en extrascolaire

pour enseigner la dictée musicale aux enfants ... 72

Résumé ... 72

Abstract ... 73

Strategies used by independent music teachers working on musical dictation with children . 74 Introduction ... 74 Methodology ... 79 Results ... 81 Discussion ... 90 Conclusion ... 92 Funding ... 93 Acknowledgments ... 93 List of references ... 94

Chapitre 7 : Discussion et conclusion ... 98

Principaux résultats obtenus ... 98

Habitudes d’enseignement de la FA ... 98

Perception de la FA ... 99

Utilisation des technologies ... 100

Utilisation de stratégies pour enseigner la dictée musicale ... 102

Conclusion et propositions pour des recherches futures ... 103

Bibliographie ... 105

Annexe I : Recrutement des participants ... 118

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Liste des tableaux

Tableau 1. Développement de la perception du rythme chez les enfants... 6

Tableau 2. Développement des préférences tonales chez les enfants. ... 8

Tableau 3. Développement des perceptions mélodiques et harmoniques chez les enfants. ... 9

Table 4. Frequency of use of some technological devices. ... 59

Table 5. Frequency of use of software and applications. ... 59

Table 6. Occurrences of strategies in research and books aimed at practitioners. ... 78

Table 7. Characteristics of the sample. ... 82

Table 8. Variables linked to the use of non-tonal strategies. ... 85

Table 9. Variables linked to the use of tonal strategies. ... 86

Table 10. Variables linked to the use of tertiary strategies. ... 87

Table 11. Variables linked to the frequency of use of non-tonal strategies. ... 88

Table 12. Variables linked to the frequency of use of secondary strategies. ... 89

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Liste des figures

Figure 1. Stimuli utilisés par Howard et Angus (1997). ... 11

Figure 2. Adaptation du modèle de Welch (1986) sur le développement de l’habileté à chanter. ... 13

Figure 3. Exemple de notations figurales et métriques, adaptées de Bamberger (1991). ... 16

Figure 4. Nombre d’ouvrages abordant divers thèmes en lien avec la perception rythmique. ... 35

Figure 5. Nombre d’ouvrages abordant divers thèmes en lien avec la perception mélodique. ... 36

Figure 6. Nombre d’ouvrages abordant divers thèmes en lien avec la perception harmonique... 37

Figure 7. Nombre d’ouvrages abordant divers thèmes en lien avec la perception d’autres paramètres. ... 38

Figure 8. Activités réalisées par les professeurs lorsqu’ils enseignent la FA. ... 44

Figure 9. Réponses demandées aux élèves lorsqu’ils prennent une dictée musicale. ... 45

Figure 10. Proportion of men and women using computers when teaching AS. ... 60

Figure 11. Proportion of teachers using computers, depending on their feeling of competence during training. ... 62

Figure 12. Proportion of teachers using mobile phones, depending on their feeling of competence to teach AS. ... 63

Figure 13. Proportion of teachers using technological tools, depending on their perception of the quantity of available resources. ... 64

Figure 14. Percentage of participants using non-tonal strategies. ... 82

Figure 15. Percentage of participants using tonal strategies. ... 83

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Remerciements

Je tiens d’abord à remercier Maite Moreno et Francis Dubé pour leur encadrement attentif et leurs conseils judicieux, et Isabelle Héroux et Noémie Robidas pour leurs commentaires au moment de l’approbation du projet. Je remercie également Gaétan Daigle, Josiane Bissonnette et Yves Turcotte pour leurs conseils concernant les analyses statistiques.

Je remercie également toutes les personnes ayant généreusement pris le temps de remplir mon questionnaire, et de le partager à leurs collègues ; merci également à Guillaume Pigeon, Michèle Bergeron et Laura Trottier d’avoir participé au pilote.

Merci également à Andrée Têtu, Vincent Brauer et Mathieu Boucher de m’avoir donné accès aux statistiques de l’École préparatoire de musique Anna-Marie-Globenski.

Merci aussi à Manon St-Pierre pour la révision linguistique pour l’article présenté au chapitre 6.

Je remercie aussi ma famille et mon conjoint pour leur support et leurs encouragements qui ont grandement facilité la réalisation de ce mémoire.

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Avant-propos

Les deux articles en préparation inclus dans ce mémoire ont été rédigés par Justine Pomerleau Turcotte (auteure principale) avec la participation de Maria Teresa Moreno, directrice de recherche, et Francis Dubé, codirecteur de recherche. Tous sont affiliés au Laboratoire de recherche en formation auditive en didactique instrumentale (LaRFADI) et à l’Observatoire interdisciplinaire de création et de recherche en musique (OICRM). Les modifications qui seront faites avant la publication dépendront des normes éditoriales des revues auxquelles les articles seront soumis.

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Chapitre 1 : Introduction

La formation auditive (FA), passage obligé pour plusieurs musiciens en formation, inclut habituellement l’étude du solfège (en lecture à vue, ou préparé) et de la dictée musicale (Fry et Spencer, s.d.). Au Québec, la FA est une matière obligatoire pour tous les programmes d’études collégiales en musique (MÉES, 2014), en plus d’être une exigence de tous les programmes universitaires de 1er cycle en musique. De

plus, selon Butler et Lochstampfor (1993), 40 000 étudiants en Amérique du Nord seraient inscrits à un cours de FA de niveau universitaire. Ainsi, considérant que la plupart des programmes d’études supérieures en musique ont peu changé depuis ce rapport, il est légitime de penser que ce nombre d’étudiants est toujours sensiblement le même aujourd’hui. Une telle donnée n’existe pas pour le Québec à l’heure actuelle, mais il est légitime de penser que ce nombre important justifie qu’on s’intéresse à l’enseignement de la FA. Aux États-Unis, contrairement au Québec, plusieurs apprenants ne commencent le solfège et la dictée musicale qu’au niveau universitaire. C’est possiblement ce qui explique que plusieurs auteurs se sont intéressés à l’apprentissage de la dictée auprès d’adultes qui commencent l’étude formelle de la musique (Buonviri, 2014, 2015a ; Foulkes-Levy, 1997 ; K. M. Hoppe, 1991 ; Karpinski, 1990 ; Powell, 2013), mais son apprentissage fait par les enfants demeure toujours inexploré scientifiquement. Le solfège et son enseignement auprès d’élèves de niveau précollégial ont, pour leur part, fait l’objet de quelques études, notamment auprès des adolescents (Henry, 2011 ; Kielczewski, 2011 ; Killian et Henry, 2005 ; Russell, 2016) et des enfants (Reifinger, 2009, 2012). Cet intérêt peut s’expliquer par l’importance accordée à la lecture à vue chantée dans la pratique du chant choral, soit une pratique musicale souvent exercée par cette population d’apprenants (Henry, 2011  ; Kielczewski, 2011  ; Killian et Henry, 2005).

Mais est-il toujours pertinent d’enseigner la FA au XXIe siècle ? Pour plusieurs praticiens, la question

ne se pose pas, car il s’agit d’une évidence pour eux. À titre d’exemple, dans leur manuel destiné à des étudiants de niveau universitaire, Cleland et Dobrea-Grindahl (2010) avancent que la FA est déterminante pour le développement de l’écoute intérieure, d’une attitude professionnelle, de la sensibilité au son, et de la capacité à penser et à communiquer musicalement. Pour Foulkes-Levy (1997), l’identification de structures harmoniques est une compétence que doit maitriser tout musicien. Plus précisément, la FA offrirait les outils nécessaires pour ajuster sa performance dans un contexte de musique d’ensemble, pour composer, ou devenir un auditeur actif pouvant distinguer une bonne performance d’une autre moins satisfaisante (Covington, 1992). De plus, l’identification et la production d’intervalles et de séquences mélodiques sont, pour Lake (1993), un moyen d’atteindre une meilleure perception et une meilleure compréhension des mélodies tout en permettant de mieux les interpréter. Selon Karpinski (2000), les avantages de l’apprentissage de la FA sont multiples et incluent le développement de l’attention musicale, de l’écoute extractive (l’habileté qui permet de noter une mesure d’une dictée alors qu’un plus grand fragment est entendu), la mémoire musicale à court

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terme, la compréhension musicale et la notation musicale. Autrement dit, tous ces éléments permettraient aux apprenants de développer, de façon plus générale, leur sens musical (musicianship). Finalement, M.R. Rogers (1984) considère que la FA représente une forme d’entraînement de l’esprit (mind training) bien plus qu’un simple entraînement de l’oreille (ear training).

Par ailleurs, plusieurs chercheurs ont également vérifié si la FA pouvait avoir des impacts positifs sur d’autres composantes de l’apprentissage musical. Par exemple, M. Rogers (2013) a vérifié s’il existait des liens entre les niveaux de performance en lecture à vue chantée, en dictée musicale, et ceux pour le jeu instrumental et la composition chez des élèves faisant leurs études secondaires dans la région des South Wales en Australie. En compilant l’ensemble des résultats obtenus par 749 élèves en 2010 et 729 élèves en 2011, l’auteure est arrivée à la conclusion que l’obtention d’un bon résultat pour la réalisation de dictées musicales à plusieurs voix était le meilleur prédicteur pour l’obtention d’un bon résultat pour le jeu instrumental. Autrement dit, plus l’élève obtient un résultat élevé pour sa dictée musicale, plus son résultat en jeu instrumental est élevé. De plus, une grande proportion des meilleurs élèves en dictée musicale dans ce projet faisaient également partie du groupe des meilleurs instrumentistes et des meilleurs compositeurs.

Ensuite, la FA pourrait également avoir un impact positif sur l’habileté à lire à vue la musique à l’instrument. En effet, une méta-analyse effectuée à partir de 92 études quasi expérimentales portant sur la lecture à vue instrumentale publiées entre 1944 et 2010 démontre que la pratique de la FA (tant la dictée que le solfège) est liée à une amélioration significative de la lecture à vue instrumentale (Mishra, 2014b). De plus, lorsque la FA inclut le jeu à l’oreille, elle peut avoir un effet positif sur la capacité à improviser ; par ailleurs, ceux qui déclarent jouer à l’oreille ont également une plus grande facilité à jouer de mémoire et à improviser (McPherson, 1995). Pourtant, selon une étude réalisée auprès de jeunes musiciens canadiens suivant des leçons d’instruments de musique en contexte extrascolaire, le jeu à l’oreille et la FA font partie des activités les moins souvent pratiquées, et ce, malgré le fait que les habiletés auditives soient un prédicteur de succès pour le jeu instrumental (Upitis, Abrami, Varela, King et Brook, 2016).

Sur le plan professionnel, les cours de FA suivis durant les études universitaires peuvent avoir un impact positif sur les tâches que le musicien doit accomplir. Dans une étude réalisée auprès de 601 professeurs de musique en milieu scolaire, Groulx (2016) a constaté que les cours de formation auditive figuraient parmi les cours jugés les plus utiles par les praticiens une fois en carrière. Cela peut s’expliquer notamment par leur capacité à détecter des erreurs au moment d’enseigner à des ensembles, laquelle serait améliorée par un entraînement spécifique basé sur la lecture à vue chantée et la dictée musicale (Sheldon, 1998).

Toutefois, l’apprentissage de la FA au niveau universitaire ne se fait pas sans heurts. En effet, plusieurs étudiants entameraient leur première année d’université avec un niveau insuffisant pour la lecture de la notation musicale, ce qui est un obstacle important à la réussite des matières théoriques et au jeu

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instrumental (Asmus, 2004). En effet, les standards à ce niveau d’étude sont difficiles à atteindre pour les individus n’ayant pas d’expérience précollégiale avec la FA (Anderman, 2011), car les étudiants qui réussissent le mieux la résolution de dictées musicales sont généralement ceux qui ont déjà réalisé des dictées durant leur formation précollégiale (Powell, 2013). Des problèmes similaires sont également observés au Québec en début d’enseignement postsecondaire : au cégep Saint-Laurent, 45 % des étudiants admis aux sessions d’automne 2011, 2012 et 2013 étaient classés dans les cours de niveaux faibles en FA et, de ce nombre, 24 % échouaient leur première session (Fournier, 2015). De plus, Hedges (1999) soutient que l’inclusion de la FA à l’enseignement musical des enfants et des adolescents pourrait résoudre certains problèmes observés dans l’enseignement supérieur, alors que son enseignement aux enfants n’est pas généralisé dans tous les pays.

Bien que peu étudiée, la FA est enseignée aux plus jeunes par le biais de nombreux programmes de formation musicale extrascolaire offerts dans plusieurs pays d’Europe et d’Amérique du Nord, lesquels sont utilisés pour encadrer l’apprentissage d’instruments de musique auprès de jeunes âgés approximativement de 6 à 16 ans. À titre d’exemple, en France, l’enseignement de la FA, appelée là-bas « Formation musicale », se fait en groupe, dans le cadre du cursus proposé par les conservatoires (Conservatoire à rayonnement régional de Paris, s.d.). Par conséquent, les professeurs d’instrument n’ont habituellement pas à l’intégrer à leurs leçons. La situation des professeurs affiliés à l’Associate Board of the Royal Schools of Music (ABRSM) ou du

Royal Conservatory of Music (RCM) ressemble sensiblement à celle des professeurs québécois, puisqu’eux

aussi ont à intégrer l’enseignement de la FA à leurs leçons (Associate Board of the Royal Schools of Music, s.d.; The Royal Conservatory, s.d.). De plus, leurs programmes ont tendance à aller au-delà du solfège et de la dictée, en proposant des activités musicales qui ne nécessitent pas le recours à la notation musicale (Holmes et Scaife, 2011). Des exemples à ce propos seront expliqués plus en détail au chapitre 2. Au Québec, la FA est également inhérente à la plupart des programmes extrascolaires d’enseignement offerts par les écoles préparatoires de musique, auxquelles peuvent s’affilier les professeurs d’instrument de la province, notamment les Conservatoires de musique et d’art dramatique du Québec, l’École de musique Vincent d’Indy, l’École préparatoire de musique de l’Université du Québec à Montréal, l’École préparatoire de musique de l’Université de Sherbrooke et l’École préparatoire de musique Anna-Marie-Globenski de l’Université Laval (ÉPAMG). Ces programmes encadrent l’apprentissage de nombreux élèves ; par exemple, dans le cas de l’ÉPAMG, la FA concerne 1331 élèves et 326 enseignants (données 2014 obtenues directement de l’organisation). Néanmoins, les professeurs n’ont pas à être affiliés à une école préparatoire pour enseigner la musique en milieu extrascolaire. Par ailleurs, un professeur peut décider de ne suivre que partiellement le programme de l’école préparatoire à laquelle il est affilié, et de ce fait décider de ne pas enseigner la FA. Si l’on additionne l’ensemble des institutions de la province offrant un programme extrascolaire de formation

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musicale intégrant la FA, nous pouvons, malgré tout, conclure que cette matière touche un nombre substantiel de jeunes apprentis musiciens au Québec.

Par ailleurs, on peut supposer que les enfants ne développent pas leurs habiletés auditives de la même façon que les adultes, puisque leurs fonctions cognitives sont différentes (Siegler, 2010). Ainsi, il est très probable qu’ils apprennent la musique différemment, et qu’une meilleure connaissance de leurs particularités puisse permettre un enseignement de la FA mieux adapté. Il apparaît par conséquent nécessaire de présenter l’état de la recherche concernant le développement de trois habiletés nécessaires pour la FA chez les enfants, soit la perception auditive, le chant ainsi que la notation musicale. Par la suite, deux autres aspects pouvant faciliter l’enseignement de la FA seront davantage développés : les stratégies pouvant être utilisées pour enseigner la dictée musicale, et l’apport des technologies dans l’enseignement de la FA. Toutefois, l’étude des stratégies, dans le cadre de ce projet, sera limitée à la dictée musicale et n’inclut pas les stratégies utilisées en solfège. Ce choix permet d’aborder les stratégies propres à la dictée musicale plus en profondeur. Finalement, un survol du matériel pédagogique disponible pour enseigner la FA sera présenté. Cette recension des écrits et du matériel pédagogique disponible, présentée au chapitre suivant, permettra de mieux cerner le problème étudié dans le cadre de ce projet.

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Chapitre 2 : Revue de littérature

Travaux de recherche portant sur le développement

Nous avons vu dans la section précédente que l’enseignement de la FA aux enfants avait été l’objet de très peu d’études, et que les rares ayant été effectuées ne concernent que le solfège. Pourtant, on peut supposer que certaines caractéristiques du développement musical des enfants de 6 à 12 ans pourraient avoir une incidence sur l’enseignement de la FA à cette catégorie d’apprenants. Cette section explore donc brièvement de quelle façon certaines habiletés musicales semblent évoluer avec l’âge : la perception musicale, le chant et la notation musicale.

Perception musicale

Bien percevoir les différentes composantes de la musique, telles que les rythmes, les mélodies et l’harmonie, est essentiel pour lire, chanter et interpréter la musique. La perception musicale se distingue de la simple sensation et implique une interprétation liée à un cadre de référence (Colman, 2015). Ainsi, il ne suffit pas d’entendre la musique pour être un musicien complet : il faut également être capable de distinguer et de comprendre chacune de ses composantes. Une première de ces composantes, le rythme, a fait l’objet de plusieurs études auprès d’enfants. Afin de mieux comprendre comment il est perçu, des chercheurs se sont penchés sur les capacités de reproduire des rythmes à divers moments dans le développement. Tout d’abord, la capacité des enfants âgés de 5 et 7 ans à reproduire des séquences rythmiques et arythmiques a été étudiée par Drake et Gérard (1989). Les résultats obtenus par les 26 sujets ayant participé à leur étude ont démontré que les rythmes réguliers étaient plus faciles à reproduire, et que la qualité de leur exécution s’améliorait avec l’âge. De plus, c’est le nombre de temps joués dans les séquences (et non le nombre de sons entendus) qui s’avère le facteur le plus influent pour déterminer la longueur du fragment qu’un enfant peut mémoriser. Gérard et Drake (1990) ont également étudié la capacité pour des enfants âgés de 5 à 8 ans à reproduire des séquences rythmiques tout en tenant compte de variations d’intensité, donc à l’aide d’accents, auprès de 120 participants. Les résultats obtenus indiquent que les enfants de ce groupe d’âge seraient en mesure de reconnaître les changements d’intensité. Par contre, la reproduction d’une séquence à l’intérieur de laquelle des changements d’intensité sont intégrés semble exiger des ressources attentionnelles trop grandes pour que la tâche soit réussie. Drake (1993), pour sa part, a comparé les habiletés d’enfants suivant des cours de musique à l’école à celles d’adultes ayant ou n’ayant pas une formation musicale, à reproduire des rythmes afin de voir dans quelle mesure ces habiletés étaient reliées à l’expérience et à la maturation de l’individu. Elle a observé qu’entre l’âge de 5 et 7 ans, la capacité à reproduire des rythmes ternaires augmentait considérablement, mais elle n’a pu trouver aucune différence significative entre les enfants âgés de 7 ans et les adultes n’ayant pas une formation musicale. Ainsi, cette capacité ne serait pas

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liée à la maturation cognitive de l’individu. Par ailleurs, il semble qu’à la lumière des observations faites sur les 48 participants de son étude, qu’il soit plus facile de reproduire des rythmes binaires que des rythmes ternaires. De façon plus générale, Drake, Jones et Baruch (2000) ont étudié, auprès de 180 participants âgés de 4 à 10 ans et d’adultes, musiciens ou non, le développement de diverses compétences liées à la perception rythmique, dont le tempo le plus lent qu’un individu est en mesure de maintenir, la diversité des tempos qu’un individu arrive à garder, l’éventail de tempos qu’il est en mesure de suivre et de distinguer à l’audition, et la précision de la synchronisation avec un tempo imposé. Ces tâches étaient réalisables par tous les individus étudiés, mais leur qualité d’exécution évoluait avec l’âge et l’expérience. Le Tableau 1 résume les différents résultats discutés jusqu’à maintenant sur l’évolution de la perception rythmique chez les enfants.

Tableau 1. Développement de la perception du rythme chez les enfants.

Référence

Groupe(s) d’âge(s)

étudié (s)

Tâche(s)

demandée (s)

Conclusions

Drake et Gérard (1989) 5 et 7 ans Reproduction de

rythmes – Amélioration avec l’âge – Mémorisation influencée davantage par le nombre de temps que par le nombre de notes Gérard et Drake (1990) 5 à 8 ans Reproduction de

rythmes et d’accents – En mesure d’identifier les accents – Reproduire les accents est difficile (surcharge cognitive)

Drake (1993) 5 et 7 ans Adultes musiciens Adultes non musiciens

Reproduction de rythmes binaires Reproduction de rythmes ternaires – Amélioration entre 5 et 7 ans

– Pas de différence entre les enfants de 7 ans et les adultes non musiciens – Rythmes binaires plus faciles à reproduire que les rythmes ternaires Drake, Jones et Baruch

(2000) 4, 6, 8 et 10 ans Adultes musiciens Adultes non musiciens

Tempo le plus lent possible à maintenir Tempos différents à maintenir et distinguer

– Tâches possibles pour tous les groupes de participants

– Amélioration avec l’âge et l’expérience

La seconde composante musicale mentionnée plus tôt, la perception mélodique, a également été étudiée chez les enfants. Dans cette section, nous allons présenter des études s’intéressant au sens tonal, à l’identification des hauteurs et à la reconnaissance des contours. Selon les résultats de plusieurs recherches, les enfants seraient en mesure d’identifier certains de ces paramètres très tôt dans leur développement. À titre d’exemple, les fonctions tonales, même chez des auditeurs n’ayant pas de connaissances théoriques, peuvent être ressenties tant par des enfants que par des adultes; dans une étude réalisée auprès de 52 enfants

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inscrits dans des classes allant de la 1re à la 6e année, et auprès de 14 adultes, Krumhansl et Keil (1982) ont

fait entendre aux participants une série de notes appartenant à l’accord de tonique en do majeur, suivie de deux autres notes, appartenant ou non à la même tonalité. Les adultes comme les enfants manifestaient leur appréciation esthétique en l’inscrivant sur une échelle à sept items. Toutefois, dans l’échelle utilisée par les enfants, des visages (triste, neutre et souriant) remplaçaient les chiffres. Les résultats obtenus ont permis de démontrer que tous les participants, même les plus jeunes, étaient en mesure de distinguer, par leur appréciation esthétique des différentes combinaisons, les notes appartenant ou non à la gamme de do. Une préférence pour les notes faisant partie de l’accord de tonique émerge avec l’âge ; ainsi, à partir de la troisième et de la quatrième année, les enfants ont tendance à préférer entendre des notes qui font partie de l’accord de tonique. D’ailleurs, selon Dowling (1988), le début de l’enfance serait une période critique pour l’acquisition du sens tonal. En effet, modelé par l’exposition à une culture musicale donnée, le sens tonal se développerait principalement durant les huit premières années de vie. Trehub, Cohen, Thorpe et Morrongiello (1986) ont, pour leur part, vérifié si les enfants âgés de 4 à 6 ans étaient en mesure de reconnaître des changements d’un demi-ton dans une mélodie de cinq notes. Les résultats obtenus ont révélé que ces enfants étaient plus habiles à reconnaître ce type de changements dans les mélodies diatoniques que dans les mélodies non diatoniques. La même étude suggère également que les bébés de 9 à 11 mois sont également en mesure de reconnaître des changements d’un demi-ton, mais dans toutes les mélodies, tant diatoniques que non diatoniques. Il semblerait par conséquent que la préférence pour la gamme diatonique émerge durant la petite enfance. Morrongiello et Roes (1990) ont vérifié dans quelle mesure des enfants âgés de 5 et 9 ans pouvaient reconnaître des changements dans le contour de mélodies tonales et atonales. Les résultats ont démontré qu’à 5 ans, les performances n’étaient pas influencées par le type de mélodie. Par contre, à l’âge de 9 ans, les performances des enfants quant à la perception de demi-tons étaient significativement plus élevées lorsqu’ils entendaient des mélodies tonales seulement lorsqu’ils avaient déjà reçu une formation musicale au préalable. De façon générale, les performances des enfants étaient corrélées positivement avec l’âge et leur expérience musicale. En résumé, le sens tonal ne semble pas inné, mais acquis avec l’âge et l’expérience musicale ; les connaissances dans ce domaine sont résumées dans le Tableau 2.

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Tableau 2. Développement des préférences tonales chez les enfants.

Référence

Groupe(s) d’âge(s)

étudié (s)

Tâche(s)

demandée (s)

Conclusions

Krumhansl et Keil (1982) 1ere à 6e année

Adultes Évaluation esthétique d’une série de deux notes jouée après un accord de tonique

– Tous ont une préférence pour les notes de la gamme – La préférence pour les notes de l’accord de tonique émerge avec l’âge

Trehub, Cohen, Thorpe

et Morrongiello (1986) 9 à 11 mois 4 à 6 ans Reconnaissance de changements d’un demi-ton dans des mélodies de cinq notes, diatoniques ou non

– 9-11 mois : Pas de différence entre les deux types de mélodies

- 4-6 ans : Reconnaissent les changements plus facilement dans les mélodies diatoniques Morrongiello et Roes

(1990) 5 et 9 ans Reconnaissance de changements de contour dans des mélodies tonales et atonales

– 5 ans : Le résultat n’est pas influencé par le type de mélodie – 9 ans : Meilleure perception des ½ tons dans les mélodies tonales seulement pour ceux qui ont une formation musicale

Les enfants sont également capables, tôt dans leur développement, de distinguer le grave de l’aigu, et de donner des réponses verbales adéquates en ce sens ; en revanche, les termes utilisés pour définir ces paramètres peuvent avoir une influence importante sur les résultats obtenus. Ainsi, Costa-Giomi et Descombes (1996) ont démontré, grâce à un échantillon de 23 enfants francophones de première année du primaire, qu’il leur était plus facile de répondre correctement aux questions en utilisant les termes « grave » et « aigu » que « bas » et « haut », puisque ces deux termes peuvent également représenter d’autres réalités pour l’enfant. Or, les études réalisées en milieu anglophone, et dans le matériel pédagogique publié en anglais, utilisent les termes high et low. Ainsi, il est possible que cette nomenclature cause plus de difficultés pour l’enfant que la perception réelle de ces deux paramètres. Stalinski, Schellenberg et Trehub (2008) ont vérifié la capacité d’enfants âgés de 5 à 11 ans et d’adultes à identifier des changements axés sur la direction des notes. Les instructions présentées aux enfants permettaient d’enrayer toute ambigüité sur les significations des mots high et low, puisque les participants étaient, avant l’expérimentation, entraînés à associer des sons à une balle qui montait ou descendait, laquelle était présentée sur un écran. Les réponses étaient également données en utilisant cette même représentation visuelle. Les résultats obtenus ont démontré que les enfants âgés de 5 ans étaient déjà en mesure d’associer ces termes à des hauteurs de sons. À l’âge de 8 ans, certains enfants étaient en mesure de reconnaître des changements aussi fins qu’un dixième de demi-ton. De plus, les performances de ces derniers étaient similaires à celles des adultes. Fancourt, Dick et Stewart (2013) ont, eux aussi, étudié les seuils à partir desquels les enfants âgés de 5 à 13

(19)

ans (n=130) et les adultes (n=13) étaient en mesure de reconnaître des changements de direction musicale. La capacité à détecter de tels changements est la même chez l’adulte que chez l’enfant âgé de 6 et 7 ans. Toutefois, l’identification de la direction du changement (vers le grave ou vers l’aigu) est identique à celle de l’adulte qu’à partir de l’âge de 11 ans.

Quant à la perception harmonique, il semble qu’elle soit aussi accessible aux jeunes enfants, contrairement à ce qui a été véhiculé par le passé (Moog, 1976). De plus, ce type de perception s’améliorerait grandement après l’âge de neuf ans (Sloboda, 1986), même si les plus jeunes sont néanmoins en mesure d’identifier des paramètres harmoniques simples. Ainsi, les enfants de cinq ans sont en mesure d’identifier des changements d’accords dans des progressions d’accord simples (Costa-Giomi, 1994), et peuvent aussi distinguer le mode majeur du mode mineur (Costa-Giomi, 1996). Le Tableau 3 résume les conclusions des études mentionnées plus haut concernant l’évolution de la perception mélodique et de la perception harmonique chez les enfants.

Tableau 3. Développement des perceptions mélodiques et harmoniques chez les enfants.

Référence

Groupe(s)

d’âge(s)

étudié (s)

Tâche(s) demandée

(s)

Conclusions

Costa-Giomi et

Descombes (1996) 1ere année Distinction entre les sons graves et aigus – Les termes « grave » et « aigu » portent moins à confusion que les termes « bas » et « haut » Stalinski, Schellenberg et

Trehub (2008) 5-11 ans Adultes Identification de changements de direction des notes

– Les enfants de 5 ans peuvent associer les termes « bas » et « haut » aux hauteurs

– Dès 8 ans, les enfants réussissent aussi bien que les adultes et reconnaissent des changements très fins

Fancourt, Dick et Stewart

(2013) 5-13 ans Adultes Identification de changements de direction des notes

– Les enfants de 6 et 7 ans détectent les changements aussi bien que les adultes

– Les enfants de 11 ans détectent la direction des changements aussi bien que les adultes

Costa-Giomi (1994) 5 ans Identification de changements d’accords dans des progressions d’accords simples

– Possible pour ce groupe d’âge

Costa-Giomi (1996) 5 ans Distinction entre les

modes majeurs et mineurs – Possible pour ce groupe d’âge

Ces conclusions, notamment parce qu’elles suggèrent que certaines habiletés de perception sont liées au développement de l’individu, semblent particulièrement pertinentes pour l’élaboration d’activités pédagogiques destinées aux enfants et basées sur la détection d’erreurs et sur la reproduction par imitation.

(20)

Ainsi, il semble pertinent de tenir compte de l’amélioration marquée des habiletés rythmiques observée entre l’âge de 5 et 7 ans (Drake, 1993; Drake et Gérard, 1989; Drake et al., 2000), du fait que le nombre de temps soit plus critique que le nombre de notes pour la mémorisation (Drake et Gérard, 1989) et du défi que représente la reproduction d’accents dans une cellule rythmique (Gérard et Drake, 1990). Ces connaissances peuvent notamment être utiles lors du développement de matériel pédagogique. Plus encore, ces études peuvent également expliquer pourquoi la dictée musicale, qui implique une compréhension solide de la pulsation, du rythme, du contour mélodique et de la direction mélodique, représente un réel défi pour les jeunes apprenants; d’où l’importance de prendre en considération, notamment, que l’identification de la direction d’un changement de contour mélodique peut être ardue pour certains (Fancourt et al., 2013; Morrongiello et Roes, 1990), et que les termes « haut » et « bas » peuvent porter à confusion (Costa-Giomi et Descombes, 1996). De plus, il est également important de savoir que les enfants sont capables de reconnaître certains paramètres harmoniques (Costa-Giomi, 1994, 1996 ; Sloboda, 1986), et donc que les aspects verticaux de la musique peuvent être abordés avec les enfants dans les cours de FA.

Chant

Le chant est, lorsque maîtrisé, un moyen efficace de vérification de la perception auditive musicale des élèves, en plus d’être, en soi, un outil reconnu pour développer l’oreille. Plusieurs auteurs, dont les études seront l’objet de cette sous-section, suggèrent que la capacité à chanter juste se développe avec l’âge et avant 6 ans, peu d’enfants y arrivent, du moins selon les critères utilisés dans la plupart des études qui seront décrites ici pour mesurer cette habileté. Une étude portant sur l’efficacité d’un logiciel visant à développer la capacité à reproduire des notes (traduction libre de pitch matching) révèle qu’à la fin d’une année scolaire, seulement neuf enfants sur 29, dans une classe de maternelle, y sont parvenus (Welch, Rush et Howard, 1991). Toutefois, il est à noter que les notes à imiter étaient générées par le logiciel, et non par une voix humaine, ce qui peut avoir influencé les résultats. Les notes, toutes entre la2 et la3, étaient également générées de façon

aléatoire, ce qui pourrait ne pas témoigner adéquatement de la capacité d’enfants à reproduire une mélodie connue. De leur côté, White, Sergeant et Welch (1996) ont constaté que les réponses vocales données par des enfants de 5 ans sont généralement plus graves que le stimulus à imiter. De plus, dans une mélodie à imiter, les intervalles chantés par un enfant de cet âge seraient souvent plus étroits que dans le modèle à reproduire, et les notes chantées auraient tendance à se situer dans l’extrémité inférieure du registre vocal. Ces observations découlent d’une étude longitudinale réalisée au Royaume-Uni avec environ 200 enfants de cinq ans durant leurs trois premières années de scolarité, ainsi que sur une étude comparative réalisée auprès d’environ 600 enfants de trois à douze ans. Ces derniers étaient évalués sur leur capacité à effectuer des glissandos entre deux, trois et cinq notes avec des changements de direction. Leurs capacités à reproduire des motifs de trois à cinq notes, à reproduire des notes isolées et à chanter des chansons spécialement

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conçues pour l’étude, et donc inconnues des participants, étaient également testées. Il semblerait aussi que la proportion d’enfants pouvant chanter juste augmente avec l’âge, comme le révèle une étude conduite auprès de 184 enfants de 4 à 8 ans (Welch, Sergeant et White, 1997). Ces derniers ont utilisé les mêmes types de stimuli, soit des glissandos, des motifs, des notes isolées et des chansons spécifiquement conçues pour l’étude. Le registre de ces dernières, considéré confortable pour des enfants par les auteurs, allait du la2 au

do4. Les résultats suggèrent que des différences existent entre les sexes, mais seulement à partir de 7 ans,

âge à partir duquel plus de filles chantent plus juste que les garçons. Les raisons pouvant expliquer cette différence ne sont pas discutées dans l’article. Quant à Howard et Angus (1997), leur étude réalisée auprès de 175 enfants âgés de 8 à 11 ans et 12 chanteurs professionnels adultes suggère également que la justesse s’améliore avec l’âge. Ils ont aussi observé que cette amélioration était plus rapide que chez les garçons; environ la moitié de ces derniers n’arrivaient pas à chanter juste. De plus, les intervalles ascendants, lorsque reproduits, avaient tendance à être trop étroits, alors qu’au contraire, les intervalles descendants avaient tendance à être chantés trop large. Des exemples de stimuli utilisés sont présentés à la Figure 1. Chaque session consistait en 15 essais de trois notes pour les enfants (première ligne) et cinq notes pour les adultes (deuxième ligne).

Figure 1. Stimuli utilisés par Howard et Angus (1997).

Le constat que le chant est une tâche ardue pour les plus jeunes pourrait peut-être dépendre des tâches à effectuer. En effet, Moreno Sala (2003), dans sa thèse visant à étudier l’oreille absolue et relative chez des enfants de 3 à 9 ans, n’avait pas remarqué de difficulté à chanter, et ce, même chez ses plus jeunes participants. Le registre des chansons utilisées allait du do3 au la3, ce qui est légèrement plus étroit que dans

les études mentionnées plus haut. De plus, une étude réalisée par Wolf, Frega, Limongi et Melicchio (2016) auprès de 74 enfants argentins de 5 et 6 ans suggère qu’on sous-estime parfois les capacités des enfants, ou, du moins, que certaines décisions pédagogiques sont basées sur des conceptions inexactes. Un test élaboré par les chercheurs, le Tonal Pattern and Rhythm Pattern Performance Test (TPRPT), a été administré à chacun des enfants. Ce dernier est composé de 40 motifs tonaux écrits en ré afin de convenir aux capacités de la majorité des enfants, comme suggéré par Welch et al. (2009). L’impact de cinq variables sur la capacité des enfants à reproduire les mélodies a été mesuré : le mode (majeur ou mineur), l’harmonie (accord de

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tonique ou de dominante), la direction mélodique (ascendante ou descendante), le nombre de notes (deux ou trois) et la hauteur (les motifs étant situés en haut du la3 étaient considérés comme aigus, et ceux situés sous

le mi3 étaient considérés comme graves). Les participants ont mieux réussi les motifs de deux notes, ainsi que

ceux situés dans le registre grave. Aucune différence significative n’a été observée pour le mode, l’harmonie et la direction mélodique. L’auteure suggère par conséquent que de limiter le répertoire appris aux jeunes enfants au mode majeur ainsi qu’aux harmonies pentatoniques ne serait pas nécessaire, étant donné que le mode mineur et l’accord de dominante n’ont pas présenté de difficultés particulières aux enfants de son échantillon.

Par ailleurs, contrairement à la croyance populaire, il semblerait que la dichotomie ne soit pas nette entre ceux qui savent chanter, et ceux qui n’y arrivent pas (souvent qualifiés de bourdons, monotones ou

poor-pitch-singers). Welch (1986) suggère plutôt que cette capacité s’exprime sur un continuum, lié à des phases

(23)

Figure 2. Adaptation du modèle de Welch (1986) sur le développement de l’habileté à chanter.

Des modèles similaires à celui proposé par Welch ont été utilisés dans des études plus récentes afin de mesurer les performances vocales d’enfants (Hornbach et Taggart, 2005 ; Leighton et Lamont, 2006). Par ailleurs, le modèle de Welch (1986) a récemment été combiné à celui de Rutkowski et Miller (2002), preuve que le modèle développemental est encore d’actualité (Welch, Himonides, Saunders, Papageorgi et Sarazin, 2014). De plus, cette manière de considérer le développement des aptitudes vocales permet au professeur désirant intégrer le solfège à ses leçons instrumentales de s’adapter au stade auquel l’élève est parvenu, tout en sachant que son niveau de développement actuel n’est pas immuable.

Cela dit, les enfants ne parviennent pas tous à utiliser adéquatement leur voix chantée (par opposition à leur voix parlée). Or, sa maîtrise serait corrélée à une plus grande précision des notes chantées (Rutkowski, 2015). En effet, une étude longitudinale portant sur l’acquisition de la voix chantée menée auprès de 25 enfants du primaire entre leur première et leur cinquième année suggère que l’apprentissage de la musique à l’école entraîne des changements positifs, les plus significatifs survenant après la première année (Rutkowski et Miller, 2002). En effet, c’est à partir de ce moment que la principale amélioration se manifeste dans la capacité à reproduire une mélodie en écho, avec ou sans le texte. Les résultats pour chaque groupe d’âge étaient mesurés à l’aide du Singing Voice Development Measure (Rutkowski, 1990).

Stade 1 : L’enfant accorde plus d’importance aux mots qu’à la mélodie, et

chante sur une note confortable pour lui, sans chercher à imiter. Cette note est toutefois parfois consonante avec la cible.

Stade 2 : L’enfant commence à prendre conscience de sa capacité à changer

de note. Les sons qu’il produit atteignent parfois la cible.

Stade 3 : La mélodie chantée par l’enfant commence à suivre le contour de la

mélodie à imiter. De plus en plus de notes atteignent la cible, parfois au moyen d’intervalles disjoints. Le registre s’étend graduellement.

Stade 4 : L’enfant peut procéder à des ajustements plus subtils des sons qu’il

produit. Le contour et les notes sont souvent corrects, avec quelques modulations involontaires lorsque le registre est moins confortable.

Stade 5 : Pas d’erreurs majeures dans la mélodie et dans les notes qui la

composent. Le registre continue à s’étendre. Le processus n’est pas terminé, puisque d’autres aptitudes seront par la suite développées (interprétation, lecture à vue, etc.).

(24)

Une étude réalisée par Flowers et Dunne-Sousa (1990) auprès de 93 enfants de 3 à 5 ans visait à vérifier si la capacité à imiter des mélodies en écho était corrélée avec le sens tonal de l’enfant. Vingt mélodies de quatre temps ont été enregistrées par une soprano sur une syllabe neutre, « loo ». L’ambitus était d’une octave pour tous, mais six registres étaient disponibles afin de tenir compte des zones de confort des participants. Par la suite, pour mesurer le sens tonal, les chercheuses ont demandé aux enfants de chanter une chanson de leur choix. Ils étaient par la suite classés en trois groupes : ceux qui modulaient (c’est-à-dire ceux qui changeaient involontairement de tonalité), ceux qui modulaient un peu et ceux qui ne modulaient pas. Deux chansons étaient utilisées pour l’expérimentation : une était choisie par l’élève; l’autre était enseignée dans le cadre du projet. Cette dernière, The little white duck, avait été choisie, car il y avait peu de risques qu’elle soit connue des enfants, parce qu’elle avait une étendue d’une octave, comme les mélodies à imiter, parce que sa tessiture moyenne pouvait convenir à la plupart des enfants, et en raison des intervalles qui la composent (surtout du mouvement conjoint, des tierces et quelques intervalles plus grands). Il semblerait que les modulateurs, donc les enfants ayant un sens tonal moins développé, obtiennent des résultats significativement moins élevés aux tâches d’imitation en écho. De plus, la propension à moduler diminue avec l’âge, alors que la capacité à réussir la tâche d’écho, elle, augmente avec l’âge. Il est également à noter que pour tous les groupes d’âge, peu d’enfants (autour de 30 %) arrivaient à imiter la note de départ donnée par l’expérimentatrice (pas indiquée dans l’article), ce qui laisse supposer que l’imitation de notes est difficile pour ce groupe d’âge, comme l’ont également observé Welch et al. (1991). Hornbach et Taggart (2005) ont aussi exploré le lien pouvant exister entre le sens tonal de l’enfant (mesuré avec le Tonal Subtest of the Primary

Measures of Music Audiation [Gordon, 1986]) et sa capacité à chanter. Leur étude, réalisée auprès de 162

élèves allant de la maternelle jusqu’à la troisième année, révèle que les deux variables ne sont pas reliées. Il semble également que les performances au test de chant augmentent avec le niveau scolaire, sauf entre la deuxième et la troisième année. Une partie de l’explication réside peut-être dans l’acceptabilité sociale du chant, principalement par les garçons. En effet, selon les propos rapportés par les auteures, la voix de tête, nécessaire à la justesse de certaines notes, est connotée négativement aux yeux de certains garçons, qui rapportent ne pas vouloir utiliser ce qu’ils appellent leur « voix de fille ».

La précision du chant n’est pas le seul facteur de succès vocal ayant été étudié. Dans une étude réalisée sur deux ans auprès de 28 enfants âgés de 4 à 6 ans, il a été observé que, dans un contexte de groupe, la qualité vocale avait tendance à s’améliorer avec l’âge, contrairement à la justesse, qui elle, déclinait (Leighton et Lamont, 2006). Des difficultés à entendre sa propre voix au sein d’un ensemble, ou encore des consignes du professeur mal interprétées par les élèves pourraient être les causes de ce déclin, selon les auteures. Cela confirme toutefois qu’un élève identifié comme un mauvais chanteur en contexte scolaire peut très bien être en mesure de chanter dans une situation différente.

(25)

Transcription musicale

La maîtrise de la représentation écrite du langage musical est incontournable dans un contexte formel d’apprentissage de la musique. Toutefois, les enfants amorcent parfois l’apprentissage de la dictée musicale alors qu’ils ne sont pas encore tout à fait familiarisés avec la notation musicale, d’autant plus que certaines des difficultés qu’ils éprouvent pourraient être expliquées par leur âge. Il y a donc lieu de se demander si la dictée musicale est la meilleure façon d’évaluer la perception musicale des 6 à 12 ans, ou si d’autres moyens d’écriture ou de réponse peuvent favoriser le passage vers la transcription musicale. Bamberger (1991) a voulu explorer l’émergence de la notation en demandant à un enfant de 8 ans ayant un diagnostic de difficultés d’apprentissage de reconstruire des chansons connues (Hot cross buns et Twinkle-twinkle little star) à l’aide de cloches Montessori, et de noter la façon de jouer les mélodies de manière à ce qu’une autre personne puisse éventuellement comprendre et jouer la pièce de la même manière. Au départ, la notation était directement liée à la façon dont les cloches avaient été disposées par l’enfant. De plus, elles étaient disposées selon leur ordre d’apparition dans la chanson, ce qui causait quelques difficultés lorsque des notes étaient récurrentes, mais que toutes les cloches les représentant avaient été utilisées. Par contre, l’enfant a pu, au fil des rencontres avec la chercheuse, illustrer la marche à suivre pour jouer un morceau sur des cloches ordonnées suivant l’ordre de la gamme de do, comme sur un instrument de musique. Cette expérimentation a amené Bamberger à conclure que les notations inventées par les enfants seraient des indices de choix pour tout enseignant désirant accéder au mode de pensée d’un élève. De plus, les problèmes rencontrés par les enfants au moment de transcrire une mélodie pourraient simplement découler d’une conceptualisation différente de l’adulte du matériel musical à traiter.

Dans les études s’intéressant aux notations instinctives, tant chez les enfants que chez les adultes, et tant chez les musiciens que chez les non-musiciens, deux types de notations émergent : des notations métriques, c’est-à-dire qui utilisent la pulsation pour organiser l’ordre d’apparition des symboles, et des notations figurales, qui rassemblent les symboles en fonction de groupements plus instinctifs (Bamberger, 1991). La Figure 3 illustre comment de telles notations pourraient être utilisées pour représenter un rythme simple.

(26)

Figure 3. Exemple de notations figurales et métriques, adaptées de Bamberger (1991).

Bamberger soutient que les professeurs auraient avantage à sortir de leur zone de confort pour tirer profit des notations instinctives créées par les enfants, car ce type de notations est légitime, même si elles diffèrent de la notation habituelle basée sur la pulsation. Par exemple, elles peuvent s’avérer un point de départ intéressant pour amener les élèves à se concentrer sur des caractéristiques rythmiques différentes, ou pour varier les façons d’écrire un même rythme. D’ailleurs, la création d’une notation figurale n’est pas toujours synonyme d’une mauvaise compréhension de la musique. Les adultes (musiciens et non-musiciens) démontrant une préférence pour les notations métriques ont tendance à mieux réussir certaines tâches (frapper un rythme en imitation, frapper une pulsation) que ceux qui préfèrent les notations figurales. Par contre, de telles différences ne sont pas observées chez les enfants. En effet, chez ces derniers, la précision de la notation, tant figurale que métrique, a un impact plus grand que le type de notation (Smith, Cuddy et Upitis, 1994).

Davidson et Scripp (1988) croient également que les notations employées instinctivement par les enfants pourraient être représentatives de leur développement cognitif. Ils affirment que la hauteur des notes est perçue comme étant la composante principale de la mélodie à transcrire qu’à partir de l’âge de 7 ans. Or, il arrive fréquemment que les enseignants demandent à des enfants de moins de 7 ans de transcrire des dictées musicales dans une portée. Il semblerait donc que la rigidité de la notation conventionnelle pourrait ne pas être idéale pour aider les enfants à développer leurs habiletés d’écoute (Reybrouck, Verschaffel et Lauwerier, 2009). Par conséquent, la dictée musicale n’est sans doute pas la meilleure façon de tester les habiletés auditives des jeunes apprenants, surtout si elle exige de l’enfant le recours à la notation traditionnelle.

Exemple de notation figurale :

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La connaissance des enjeux liés au développement des capacités à percevoir la musique, de chanter et de noter la musique est essentielle aux pédagogues qui désirent développer des activités d’apprentissage de FA adaptées à l’âge de leurs élèves. Or, il arrive, dans certains cas, que certaines exigences pédagogiques observées sur le terrain soient incohérentes avec les données issues de la recherche, tant dans le domaine de la psychologie que de l’éducation musicale. Par exemple, certaines tâches, comme le solfège et la dictée musicale, sont parfois demandées à des enfants qui ne sont pas encore prêts à les réaliser (Davidson et Scripp, 1988). De plus, il semble ne pas y avoir de consensus sur la tessiture vocale la plus appropriée selon l’âge des enfants. D’un autre côté, certaines capacités, comme la perception harmonique, sont parfois sous-estimées, à tort (Costa-Giomi, 1994, 1996).

Stratégies pouvant être utilisées pour enseigner la dictée

musicale

Le survol des habiletés propres à différents groupes d’âge présenté dans la section précédente aura permis de mieux comprendre les activités pouvant être réalisées par des enfants. La section suivante se concentrera davantage sur un pilier de l’enseignement de la FA, la dictée musicale et les stratégies favorisant sa réussite. Bien que les études réalisées dans ce domaine concernent exclusivement des apprenants adultes, leurs conclusions peuvent néanmoins nous orienter dans l’enseignement aux enfants. En effet, elles peuvent, malgré le fait que les enfants apprennent différemment des adultes, nous indiquer des pistes à explorer et nous permettre de mieux comprendre ce qui peut aider des débutants à réussir des tâches impliquant des dictées musicales.

Apport de la recherche

Les études portant sur les stratégies à utiliser pour réaliser et réussir des dictées musicales se divisent en trois catégories, selon leur sujet : les stratégies utilisées par des étudiants, ou des musiciens, considérés très compétents pour la dictée musicale (Buonviri, 2014; Potter, 1990) ; les stratégies les plus efficaces parmi celles utilisées par les étudiants pour réussir cette tâche (Cruz de Menezes, 2010  ; K. M. Hoppe, 1991  ; Moreno Sala et Brauer, 2007  ; Powell, 2013) ; et finalement, la comparaison expérimentale de diverses stratégies (Beckett, 1997a ; Buonviri, 2015a ; Paney, 2016; Pembrook, 1986, 1987). Par ailleurs, ces stratégies peuvent être elles-mêmes regroupées en catégories basées sur certaines caractéristiques communes. Dans le cadre de ce projet, une classification inspirée de celle élaborée par Moreno Sala et Brauer (2007) sera utilisée. Ces derniers proposent une classification des stratégies utilisées par des étudiants en musique de niveau universitaire pour réaliser une dictée musicale qu’ils divisent en deux catégories principales : les stratégies primaires et secondaires. Les stratégies primaires incluent les stratégies non tonales, par exemple, celles qui concernent la reconnaissance d’intervalles. Les stratégies secondaires, quant

(28)

à elles, incluent les stratégies tonales, ou toutes celles qui demandent un niveau d’analyse et de compréhension plus étoffé, par exemple, le recours à l’analyse harmonique, ou l’utilisation des degrés tonaux. Cette classification a été reprise par Cruz de Menezes (2010) dans une étude, réalisée auprès de 50 étudiants débutant des études universitaires en musique, qui avait pour but d’observer les stratégies cognitives utilisées par des étudiants de niveau universitaire lors de la résolution d’une dictée mélodique. La plupart des stratégies observées répertoriées (tant primaires que secondaires) avaient un haut taux de succès, c’est-à-dire qu’elles étaient efficaces pour résoudre la dictée. De plus, son étude met également en lumière que le nombre de stratégies utilisées pour résoudre la dictée semble déterminant pour la réussir, car l’absence de stratégies entraîne un haut taux d’échec. Puis, la combinaison de stratégies, particulièrement de type tonal, favorise la réussite pour résoudre une dictée. Finalement, de façon générale, son étude a démontré que les étudiants ayant obtenu les meilleurs résultats pour la tâche utilisaient plus efficacement les stratégies tonales, c’est-à-dire que ces stratégies occasionnaient moins d’erreurs que chez ceux ayant obtenu de moins bons résultats. Ces résultats suggèrent qu’il serait important d’amener les apprenants à utiliser un large éventail de stratégies et à porter une attention particulière à l’utilisation de stratégies tonales pour mieux résoudre des dictées musicales.

Dans le but de documenter les stratégies utilisées par des étudiants considérés performants en dictée musicale par leurs professeurs, Buonviri (2014) a demandé à six participants de compléter deux dictées, puis il les a interviewés afin de mieux comprendre les stratégies qu’ils ont utilisées. L’analyse des données récoltées a permis d’observer que ces étudiants avaient de la facilité à diriger leur attention de façon à mieux réaliser la tâche, c’est-à-dire qu’ils arrivaient à maintenir une concentration optimale et à tenir compte de certaines informations tout en faisant abstraction des sources de distraction potentielles. Parmi les stratégies répertoriées, on retrouve notamment : compter intérieurement, reconnaître des motifs structurels (par exemple, des répétitions dans la mélodie), écrire rapidement les notes (des traits plutôt que des têtes de notes bien définies), établir des liens avec la structure harmonique et la théorie, noter le rythme avant la mélodie, et vice-versa (selon les participants), chanter intérieurement, et finalement, utiliser une approche par degrés. Cette dernière stratégie désigne toute façon d’aborder une mélodie en s’attardant non pas aux hauteurs absolues des notes, mais plutôt à leur rôle dans la gamme diatonique. Des numéros, ou encore un système utilisant un do mobile (ou parfois un la, en mode mineur) peuvent être utilisés pour désigner les notes à reconnaître et à transcrire (Karpinski, 2000).

D’autres auteurs ont également observé l’efficacité de l’approche par degrés. C’est notamment le cas de Potter (1990), dans son étude dédiée aux stratégies de prise de dictée musicale utilisées par des musiciens professionnels, mais ne prenant pas des dictées sur une base régulière. Ses résultats ont révélé que les participants utilisant cette stratégie ont obtenu un plus haut taux de succès pour la tâche. Il a également observé que cette approche générait des résultats particulièrement satisfaisants lorsque combinée

(29)

à une pensée par intervalles. Toutefois, se fier essentiellement aux intervalles ne serait pas une stratégie très efficace pour réussir une dictée musicale, puisqu’elle entraîne fréquemment des erreurs. Quant à Hoppe (1991) dans son étude portant sur les stratégies de notation utilisées par 75 musiciens (étudiants de niveaux universitaires et musiciens professionnels), elle a observé que ceux qui faisaient le moins d’erreurs étaient ceux qui notaient d’abord le rythme, et les degrés correspondants au-dessus du rythme. Ce résultat pourrait toutefois être dû aux repères rythmiques qu’offre une telle méthode, ce qui serait cohérent avec les résultats obtenus par Beckett (1997). En effet, dans son étude réalisée auprès de 60 étudiants de niveau universitaire, Beckett a comparé les résultats obtenus pour résoudre une dictée musicale à deux voix à partir de trois approches différentes : un premier groupe écrivait d’abord le rythme, puis la mélodie ; un deuxième groupe écrivait d’abord la mélodie, puis le rythme ; enfin, pour le troisième groupe, aucune instruction particulière ne leur était donnée. L’analyse des données a permis de constater que ceux ayant d’abord écrit le rythme commettaient moins d’erreurs rythmiques. Les résultats obtenus n’ont toutefois pas permis de déterminer si l’une des trois approches avait un impact significatif sur le nombre d’erreurs total lié à l’identification des notes. L’auteure avance deux hypothèses dans sa conclusion afin d’expliquer ces résultats. Premièrement, le fait de mettre en place la structure rythmique dès le début de la prise d’une dictée pourrait faciliter la mémorisation des hauteurs; c’est d’ailleurs ce qui a été suggéré par certains participants. Deuxièmement, retarder l’écriture du rythme pourrait par être néfaste pour la perception des deux composantes, soit la mélodie et le rythme.

Le chunking est une autre stratégie qui pourrait être considérée comme tonale ou secondaire. Cette stratégie repose sur les découvertes de Miller (1956) à savoir que la mémoire à court terme d’un adolescent ou d’un adulte peut enregistrer sept éléments différents à la fois, avec plus ou moins deux éléments selon l’individu. Cette stratégie consiste à regrouper des éléments (par exemple, regrouper des lettres pour en faire un mot), afin d’augmenter les limites de la mémoire à court terme et ainsi retenir davantage d’éléments. Cette théorie a été étendue à la mémorisation musicale. En effet, Madsen et Staum (1983) ont suggéré que certaines mélodies peuvent s’avérer plus faciles à mémoriser si elles sont regroupées en unités plus grandes, réduisant ainsi le nombre d’éléments distincts à mémoriser (des groupes de notes plutôt que des notes isolées). Afin de savoir ce qui pouvait le mieux expliquer la mémorisation musicale, Oura (1991) a comparé huit pianistes à qui il a demandé de reproduire des mélodies à l’aide de trois approches différentes : le regroupement en structures plus globales (chunks, appelés dans son article reduced pitch patterns), le contour, et la structure harmonique. Il semble que le modèle basé sur les structures globales soit le plus déterminant dans la rétention d’une mélodie. Le terme chunking n’apparaît toutefois pas dans les études sur la dictée musicale, bien que certains auteurs encouragent l’identification de motifs typiques, qu’ils soient mélodiques, harmoniques ou rythmiques (Potter, 1990).

Dans les écrits sur les stratégies utilisées pour résoudre des dictées musicales, on dénombre des stratégies qui peuvent difficilement entrer dans l’une ou l’autre des catégories proposées par Moreno Sala et

Figure

Tableau 1. Développement de la perception du rythme chez les enfants.
Tableau 2. Développement des préférences tonales chez les enfants.
Tableau 3. Développement des perceptions mélodiques et harmoniques chez les enfants.
Figure 1. Stimuli utilisés par Howard et Angus (1997).
+7

Références

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