G. K REWERAS
Les préordres totaux compatibles avec un ordre partiel
Mathématiques et sciences humaines, tome 53 (1976), p. 5-30
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LES PREORDRES TOTAUX COMPATIBLES AVEC UN ORDRE PARTIEL
G. KREWERAS
1. INTRODUCTION
Chacun sait que le
principal
intérêt de la notion depréordre,
c’est-à-dire de relation réflexive et transitive définie sur unensemble,
résulte de cequ’elle
traduit enlangage mathématique
ces intuitions trèssimplets
que lelangage
de tous lesjours exprime
par les tournurescomparatives : plus,
mieux, avant, au-delà, je préfère,
etc. La transitivité est évidemment icil’ingrédient essentiel ;
la réflexivité n’estqu’un
artifice poursimplifier
le maniement
proprement mathématique (quand
on veut en tenircompte
dans lelangage ordinaire,
on a au contraire besoin des lourdes tournures du genre"pas plus grand
que, au moins aussi bonque").
Parmi les
qualités qu’un préordre peut posséder
ou non, suivant les cas, deux desprincipales
sontz
1 °)
latotalité,
ou interdiction des"incomparabilités"
2°) l’antisymétrie,
ou interdiction des"ex-aequo" (ou
"indiffé-rences").
Seuls les
préordres possédant
la deuxième de cesqualités
ontdroit, traditionnellement,
au nomd’ordres.
Ceuxqui
nepossèdent
que lapremière
sont
appelés
tout bonnementpréordres
totaux(on peut regretter
que la tra- dition n’ait pas consacréquelque
dénominationplus simple,
tant la notionde
préordre
total est familière dans les domaines d’utilisation tels que lessports,
les concours,etc.).
Bien entendu si la totalité et
l’antisymétrie
sont réalisées toutesdeux à la
fois,
ils’agit
d’un ordretotal ;
pour les autresordres,
c’est-à-dire ceux dont on
n’exige
pas latotalité,
sans pour autantl’interdire,
on
précise
souvent "ordrepartiel" (mais
il faut alors entendre le total nonpas comme
négation
dupartiel,
mais comme casparticulier limite).
Quand
unpréordre
est noté à l’aide dusigne
cequi
est le cassouvent mais pas
toujours,
onexprime
engénéral
par a b une affirmation et.
une
négation simultanées,
à savoir l’affirmationde a
bet la négation
deb
a. Lesigne
note lepréordre
strict(ou irréflexif) correspondant àq.
Si
le préordre
initial est noté R au lieude ~,
onpeut
parexemple
convenirde noter
R le préordre
strictcorrespondant.
Supposons
que sur un certain ensemble fini E ={a, b,...},
de cardinal n, on ait défini une fois pour toutes un ordrepartiel noté . (On désignera dorénavant,
saufrisque
deconfusion,
par la même lettre E l’ensemble lui- mêine et l’ordrepartiel
défini surlus) .
4tSi sur le même ensemble on définit un
préordre total R,
on dira que.b . /B
R est
CO1at1 le
avec E si a b - a R b.L’idée d’un
préordre
totalcompatible
avec un ordrepartiel
donné estl’extension naturelle d’une idée
évoquée
dans[9] ;
ellepeut
être rendue intuitive deplusieurs
manières.1°)
L’ordrepartiel
donnépeut
êtrereprésenté
par ungraphe
dontles arcs sont tous
diri;és
vers lebas,
de sorte que a bsignifie
que le sonnet a estfiguré plus
bas que le sommetb ;
si lepréordre
total a r clas-ses
(d’indifférence),
les sommets seront alorsrépartis
à r "niveaux"diffé-
rents.
2°)
Les r niveauxpeuvent
être numérotés de Z à r àpartir
dubas,
de sorte que le
préordre
totalpeut
être défini comme uneapplication sur-
’active f
de E dans l’ensemble totalement ordonnéfil, 2,t.. rl,
telle quea b ~
f(a) f(b).
3°)
L’ordrepartiel
donné Epeut
être considéré comme unedescription incomplëte de préordre
total R, ladescription complète
consistant àpréciser
ce
qu’il
advient desincomparabilités qui apparaissent
dansE ;
cepoint
devue
peut
notamment être celui desgéologues
ou desarchéologues.
Dans ce
qui
suit nousappellerons u r
le nombre depréordres
totaux à rclasses
qui
sontcompatibles
avec E. Nous commencerons par établir une pro-priété générale
desnombres ur, puis
nouspréciserons
le mode de calcul etdiverses
propriétés
de ces nombres dansplusieurs
casparticuliers
relatifsà la nature de l’ordre
partiel
E. ,2. S(M4E ALTERNEE DES u
r
Remarquons
d’abord queur
n’est différent de 0 que si1°)
r est inférieur ouégal
au cardinal n de E(r ~
n)2°)
r estsupérieur
ouégal
au nombre d’éléments k de laplus
lon-gue suite strictement croissante ai a2 ...
ak
que l’onpuisse
trouverdans E.
La
propriété générale
desnombres ur peut s’exprimer
parUne autre manière
d’exprimer
la mêmepropriété
est la suivante : lespréordres
totaux pourlesquels
le nombre de classes est de mêmeparité
que n sontplus
nombreux d’une unité que ceux pourlesquels
ce nombre est de laparité opposée (ce qui entraîne,
bienentendu,
que le nombre total despré-
ordres totaux est
toujours i air).
La
propriété
est, par sagénéralité,
suffisammentimportante
pour faire icil’objet
de deux démonstrationsdistinctes,
toutes deux par récurrencesur n.
1 re DEMONSTRATION
Une
première démonstration,
due à Alan J. Hoffman et nonpubliée, peut
s’effectuer à l’aide d’une récurrenceauxiliaire,
pourchaque
valeur de n,sur le nombre v de
paires
d’élémentsimcomparables
de E. En effet si v = 0,deux éléments
quelconques
sontcomparables
et E est un ordretotal ;
le seulpréordre
total Rcompatible
avec E est Elui-même, qui
a n classes se rédui-sant chacune à un
élément ;
donc leseul ur non
nulest un qui
estégal
à1,
et la
propriété
est vérifiée.D’autre
part
lapropriété
s’établit immédiatement pour lespetites
valeurs de n par vérification directe sur tous les cas. Par
exemple
si n =2,
E =
{a,b},
trois ordrespartiels
distinctspeuvent
être définis sur E : les deux où a et b sontcomparables
et où l’on se retrouve dans le cas v =0, qui
vient d’être
réglé,
et celui où a et b sontincomparables.
Dans ce derniercas, il
n’y
a manifestement que troispréordres
totaux Rcompatibles
avecl’ordre
partiel :
1 deux à 2 classes (u2 = 2) et un seul à 1 classe(Ut = 1),
et l’on a bien U2 - Ul = 1.
Soit donc E un ordre
partiel
donné sur un ensemble decardinal n,
etsoient a et b deux éléments
incomparables choisis
une fois pour toutes dansE. Parmi
les ur
ordrespartiels
R à r classescompatibles
avecE,
on distin-guera :
on a
toujours
Or il est clair
qu’à partir
d’un ordrepartiel
E donné et d’unepaire
donnée
{a, b}
d’élémentsincomparables
dansE,
onpeut toujours
définir sur lemême ensemble un nouvel ordre
partiel
E’ 1 ou E" enimposant
entre a et b un sens decomparaison
déterminé et en tenantcompte
de toutes les"conséquences
par transitivité" de cette nouvelle
comparaison ;
cette transformation dimi-nue en tout cas au moins d’une unité le nombre de
paires incomparables.
On
peut
aussi définir un nouvel ordrepartiel
Y nonplus
sur le mêmeensemble,
mais sur un ensembleayant
un élément demoins,
en convenant deremplacer {a,b }
par un élémentunique
c et de conserver tous les autres élé-ments x ainsi que leurs
comparaisons
entre eux, et en convenant en outre que (x a ou x b dans E) - (x cdans E)
(a y ou b y dans E) - (c y dans
7)
~{~~}
et{z,b} incomparables
dans E) -({z,c} incomparables
dansË~.
Dans ces conditions il
apparaît
que u’ r(resp.
ull) n’est autre que ler
nombre de
préordres
totaux à r classescompatibles
avec E’(resp. E"),
et queur
est le nombre depréordres
totaux à r classescompatibles
avecE.
Leshy- pothèses
de récurrencepermettent
alors d’écrire :En
ajoutant
membre à membre les deuxpremières
de ceséquations
et enretranchant la
troisième,
on obtient bien pour El’égalité
annoncée2me DéMONSTRATION
Une autre démonstration consiste à
compter
lesapplications f
de E dans{1, 2, ... , ~ } qui
sontsurjectives
etqui
satisfont à x y ~f (x) f(y).
Elle fait intervenir l’ensemble M des éléments maximaux de
E,
ensemble decardinal m (1 m j
n).Si l’on commence par
compter
toutes lesapplications qui préservent
l’ordre et non pas seulement les
surjections,
onpeut appeler
leur nombrePE (r).
.On a alors
l’égalité
où F(H)
désigne
cequi
reste de Elorsque
l’onsupprime
tous les élémentsappartenant
à unepartie
H non-vide de l’ensemble M(le
cardinal de F(HJ estn-1) ;
cetteégalité exprime
que le "niveau"peut
soit n’être pas attri- bué du tout, soit l’être aux éléments de H et à eux seuls.L’égalité
ainsi établiepermet
demontrer,
par récurrence sur n, que les valeurs dePE (r)
pour E donné sont celles d’unpolynôme
dedegré n
par
rapport
à sa variable t. Cepolynôme
est en effet trivialementégal
à tsi n = 1,
et pour les autres valeurs de n il est déterminé par le fait que0 et
6PE(t) =
E E àdésigne l’opêratehr
diffê-H t)
rence et la somne du 2me membre
est celle de 2n -
1polynômes
dont m sont despolynômes
croissants dedegré n - 1
et dont tous les autres sont dedegré
~ ~ - 2.
De cette même
égalité résulte aussi,
par récurrence sur n, laproprié-
té
numérique
En effet si l’on fait t = -~ dans
l’égalité,
onpeut l’écrire,
engroupant
toutes lesparties H
de même cardinal et en tenantcompte
del’hy- pothèse
de récurrence :ce
qui
entraîne bienUne fois
supposé
connu le nombreP (r)
de toutes lesapplications,
il est facile de trouver le
nombre u P de
celles d’entre ellesqui
sont sur-jectives.
Onpeut
pour cela se servir du fameux"principe
d’inclusion-exclu-sion", qui indique
querevient du reste à inverser la formule additive
ur apparaît
en tout cas comme la différence r-ièine dePE (t) pour t = 0,
cequi
nous serviraplus
tard.Quant à
la somme -...., ellepeut
maintenants’exprimer
aisément à l’aide des valeursprises
par pourt = 0, 1, 2,...,
n ;compte
tenu despropriétés
élémentaires des nombresbinomiaux,
on trouve ainsiSi au second membre ci-dessus on
ajoutait
encore un termedont la valeur
numérique
est -1puisque
1:,E(-i) = (-1 J n ,
on aurait la différencepour t = -1,
dupolynôme P E (t) .
Mais cette différence est nullepuisque
lepolynôme
est de
degré
n. On a doncbien un- un-1 + un-2-’
1.3. SOMMES DESORDONN7EES ET SOf.t4ES TOTALEMENT ORDONNEES
3.1. Examinons d’abord ce
qu’indique
notre résultatgénéral
dans un cas par- ticulierlimite,
celui où E est un "désordretotal",
c’est-à-dire avec in-comparabilité
entre deux élémentsquelconques, N’importe quel préordre
totalà r classes est alors
compatible
avec E, et l’onaPE(t) = ~B
Le
nombre urest
la valeur de6Ptn pour t x
0 ; on la notequelquefois Sn =
oùpn désigne
un "nombre deStirling
de 2èmeespèce".
Ces nombresse tabulent aisément à l’aide des récurrences bien connues 1
Voici une table
des Sr‘
1:1 pourBien entendu
Le résultat
général
établisignifie
que dans ce tableau les sommesalternées en colonne
(ascendante)
sont touteségales
à 1 ; ; le fait est ici facile à déduire directement de larègle
de formation du tableau(et
audemeurant bien connu encore que rarement
mentionné).
3.2. Plus
généralement,
si E est une "sonnedésordonnée",
c’est-à-dire si Epeut
êtrepartiti,onné
endeux, classes Et
etE,de
cardinauxrespectifs,-ni
etn2 telles que toutes les
paires
"mixtes"(formées
d’un élément dechaque classe)
soientincomparables,
on aura évidemmentIl en résultera notamment que, si l’on
désigne
parun
nt. (Et)et. u
n2 (E2)les nombres d’ordres totaux
respectivement compatibles
avec El etE2 ;fon
auraen effet
puisque u n
est la valeurprise, pour t = 0,
par son quo-tient par n! est
égal
au coefficient du terme deplus
hautdegré
deil s’obtiendra donc par
multiplication
desquotients correspondants
danspEi et pE2
° ,Notons que la formule obtenue ne fait que traduire la
règle
suivante :pour définir l’un
des un
ordres totaux surE,
définir defaçon indépendante
n ni
deux ordres totaux sur Et et
E2, puis
les"composer"
de l’une des n.nt 1 r nz i manières
possibles
comme on fait legeste
de "battre" deux talons de cartessans en
changer
l’ordre "interne".3.3. L’autre cas
particulier limite, déjà
mentionné et tout à faittrivial,
est celui où l’on se donne pour E un ordre
déjà
total sur un ensemble de n éléments. On aet u r =
0 pour toutr ~ n. Quant
àP E(t),
il estalors
égal
à(t) n Inl,
où(t)n=
t(t-1)... (t-n+l) conformément à la notation dite "de Vandermonde".Mais une famille intéressante d’ordres
partiels
est celle que l’on obtient enprenant
la somme désordonnée de k ensembles dont chacun est tota- lement ordonné etqui
ont pour cardinauxrespectifs
ili2 --- i k ;
il résul-te alors de ce
qui précède
quece
qui permet,
du moinsthéoriquement,
le calcul deur
commue différencer-ième de
PE(t) pour t =
0.Il est clair que ce calcul ne donnera un nombre non nul que si r est au moins
égal
auplus grand
des nombres il i2 ...ik
et auplus égal
à leursomme. Si l’on
désigne
enabrégé
par I la liste (il i2 ... et si l’onrappelle
i par un indicesupérieur
I lafaçon dont ur
rdépend
deI,
le nombreur possède
unepropriété qui
en fait éventuellement un outil commode de calcul. Si l’on considère en effet unproduit fi f2 ... fk
de k fonctions .et que l’on veuille enexprimer
la différence r-ièmef2
.../.J,celle-
ci se
présente
comme une combinaison linéaire deproduits
dutype
avec des coefficients
qui
sontprécisément
lesentiers u (et qui
notamment se trouvent être non-nuls si et seulement sitous les 2
sont
r en mêmetemps
que leur sommeest >r).
Une démonstration de cettepropriété
est donnée dans[7] ,
où l’on établitégalement que u§
r estle nombre de tableaux de r
lignes
et k colonnes dont les rk casesportent
deso ou des 1 et
qui
sont tels quechaque ligne comporte
au moins un Z et que lessommes des colonnes forment une suite
imposée
(il ~2 .... I.Il est en outre à remarquer que si k =
2,
c’est-à-dire si I est unesuite de deux termes I = (i
j),
le nombre r a uneexpression exceptionnel-
lement
simple, qui’est
le trinomialLa
propriété
de la somme alternée desu r
est alors facile à établir parun calcul direct.
Voici,
à titred’illustration,
’ un tableaunumérique
ades uI
pour toutesr
les suites I dont le
plus grand
terme est 3 et dont la sonne des termes nedépasse pas 6 (on
se borne aux suites Ipositives
etnon-croissantes,
lesautres cas se réduisant immédiatement à
celui-là) :
3.4. A
l’opposé,
dans un certain sens, de la famille d’ordrespartiels qui
vient d’être considérée se trouve une autre
famille,
elle aussi entièrement décrite par une suite d’entierspositifs
J =(j, j2
... Mais on consi- dère cette fois l’ensemble E, de cardinal n =ji + ~j2 ~- .. ~ 7z~
commepartitionné
en k classes El E2 ...E
dont chacune est totalementdésordonnée,
les classes
présentant
au contraire entre elles un ordre totalqui
est celuides indices de leurs cardinaux
respectifs ji j2
... ainsi si a EE2
et$ é E. avec i
j,
alors a b E est, si l’onveut,
une somme totalement7
ordonnée d’ensembles désordonnés.,
Il est clair que tout
préordre
total R à r classescompatible
avec Ese
décompose
alors en kpréordres
totauxqui
sont ses traces sur E, E2 ...Ek;
la trace de R sur
E~ comporte r classes,
avec1 ~ r~,~ ~j~,
et l’on ari + r2 +.... + On voit notamment r n.
Pour former la suite des entiers
positifs uk u,+,
....un,
il suffitde faire la convolution des colonnes
y j2... jiL
du tableau desnombres s§
donné en
3.1.,
cequi
donne bien une suite de n - k + I entierspositifs.
Ci-dessous,
à titred’exemple,
un tableau de toutes les valeurspossibles
deur pour n = 5 :
Rems
1 ° )
Bien que la suite J =j2
ne seprésente
pas engénéral
sous forme
non-croissante,
onpeut toujours
se ramener à ce caspuisque
l’or-dre des termes
n’y joue
manifestement aucun rôle.2°)
Laprésence
d’un ouplusieurs
termeségaux
à 1 dans J a pour seul effet undécalage
vers la droite de toute la suitedes ur.
.
3°)
Un casspécialement simple est
celui où n =2p
et où J ~ (22...~ ~
on
a
alors p p " r2p et u =/ p 2 P.
Le fait que la somme alternée des u’ r
r-p
p
11
soit
égale
à 1exprime
alors ledéveloppement
de(2-1)P
par la formule du binôme.4. ORDRES ALTERNES
4.1 Une famille
spécialement
intéressante d’ordrespartiels
est celle desordres alternés. Nous
appellerons
ainsi un ordrepartiel
défini par l’exis- tence sur E d’unnumérotage
el ~2 ...en
des n éléments tel que l’on ait al- ternativement e2 , e2 > e3 , e4, .... ; seraen
ou~en
sui-vant que n est
pair
ouimpair.
Le
problème
du dénombrement des ordres totaux(ou préordres
totaux à nclasses) compatibles
avec un ordrepartiel
alterné E a été traité par DésiréAndré
jij , qui
a montré que si l’onappelle cn le
nombre de ces ordres totaux,c est
le coefficient
de dans ledéveloppement
de Mac-Laurin de,
Rappelons
lespremiers
termes de laLes c d’indice
pair, qui
sontimpairs,
sont connus dans la littérature sousle nom de "nombres
d’EuleP’ ;
les autres sontparfois appelés
"nombres destangentes" puisque
ce sont euxqui apparaissent
dans ledéveloppement
detg x.
Les uns et les autres sont en
parenté
étroite avec les célèbres nombres de Bernoulli(qui
eux,rappelons-le,
ne sont pas des entiers mais des ration-nels).
Notons par
parenthèse
que lepoint
de vue de Désiré André était l’inver-se de celui de la combinatoire énumérative : il
partait
des nombresen qu’il
connaissait comme outils de calcul et se demandait s’ils n’étaient pas redé- finissables par
quelque
autre moyen quel’analyse
ou latrigonométrie.
Laphrase
initiale de sa note de 1879 mérite à cetégard
d’être citée tout en-tière : "On n’a
point
donnéjusqu’à présent,
du moins à maconnaissance,
dedéveloppement,
suivant lespuissances
de x, soit detang
x, soit de sec x, où les coefficients aient une définitionsimple, nette, indépendante
de toutautre
développement. L’objet
de laprésente
note est de combler cettelacune".
Les résultats de D. André et de ceux
qui
se sont intéressésaprès
luià des
problèmes analogues
sont habituellementprésentés
dans lelangage
des"permutations alternées",
c’est-à-dire despermutations
de (I 2... n) danslesquelles
les n-1couples
de termes consécutifsprésentent
alternativementune croissance
("up")
et une décroissance("doim").
Les auteurs delangue anglaise parlent
depermutations "up-down"
ou"down-up"
suivant que lepre-
mier
couple présente
une croissance ou une décroissance m >nous
adopterons
celangage
ici.Mentionnons,
parce que sonprincipe
nous resserviraplus loin,
un modede calcul
spécialement simple
desc ,
9 dont l’idéeparaît
due àEntringer[2] :
n
on forme le
triangle numérique ci-après, qui
comdnence par uneligne
réduiteà 1 et où
n’importe quelle ligne
a pour terme la somme des k derniers termes de laligne précédente,
avecrépétition
du dernier terme ainsi trouvé danschaque ligne :
Les
en
s’obtiennent alors en tête(ou
enqueue)
deslignes
successives.Une
justification
dont nous laissons le détail au soin du lecteur repose surune classification des
permutations up-down
de~~,2,,..,n~
suivant la naturede leur
premier
terme :parmi
les ~6permutations up-down
de(12345),
il yen a ainsi
4.2 On s’est
également intéressé,
à propos du recensement destrajets
derayons lumineux à travers une
pile
de lames à facesparallèles (cf. [ 3]
eto 0] ),
à ce que l’onpourrait appeler
nonplus
les"permutations up-down",
mais les
"arrangements up-down
avec ou sansrépétitions",
tels que par exem-ple
la suite 36231615. Une telle suite de 8 termespeut
être considérée commedéfinissant,
sur l’ensemble E des 8"emplacements" lei,
e2, ..., e8lpartiel-
liement ordonné par ei e~ , e2 > e3,...., e7 e8 , un
préordre
totalcompati-
ble avec E ; ce
préordre
comporte ici lescinq classes 1, 2,
3, 5, 6 dans leur. ordre naturel. Si dans
l’exemple
ci-dessus on avaitremplacé
5 et 6respecti-
vement
par 4
et5,
on aurait eu uneapplication différente,
mais le mêmepré-
ordre total à 5 classes.
Dans ce qui
suit nouspréciserons,
pour ndonné,
les nombres que nousavons
appelés ur
et dans le casgénéral.
Ces nombresdépendent
bienentendu de n, mais nous n’introduirons
qu’un
peuplus
loin des notationsqui
rappellent
cettedépendance.
PE(P)
est le nombred’applications f
dequi
satisfont aux n-1 conditions"up-down" :
’ Ce nombre
dépend
de n et de r. Parmi cesapplications,
certaines sonttelles que
f(l)
= r-p, cequi implique
que2, ~ .. , r-1 1 ;
; leur nombredépend de n,
de r et de p.Appelas a(n,p)
ce nombre pour une valeur donnée de r ; on a alorsPour s’en
convaincre
il suffit d’énumérer les suitesqui
restentaprès
sup-pression
dupremier
terme ouplutôt
leurs"complémentaires" (la complé-
.mentaire d’une suite
down-up
est une suiteup-down
dontchaque
terme s’obtientpar substitution à t de
r+1-t).
On voit ainsi que
sont les r-1
composantes
d’un vecteurA ,
n et que lap-.ième de
cescomposantes
est la somme des p dernières
composantes
duvecteur An .
Autrement onpeut
écrire,
en considérantet A n
comme des vecteurs-colonne :où M
est
une "matrice sud-est" d’ordrer-1,
c’est-à-dire une matrice dont l’élément m.. 1,,l deligne
etj- ièifie
colonne est 0 si1+j
" --i et 1 siPour r = 5 par
exemple,
Les
composantes
successives de A2sont 1, 2,...,r-1,
cequi
revient àpartir
d’un vecteur A1 dont les rcomposantes
sontégales
àZ,
ou même d’unvecteur Ao dont seule la dernière
composante
est non-nulle etégale
à 1.Le nombre
PE(r)
est finalement la somme des r-1composantes
du vecteurAn,
ou encore la dernièrecomposante
duvecteur An+l . Appelons-la
iciP n (r) ;
nous savons
déjà
que c’est unpolynôme
dedegré n
en r, mais pour former le tableau de ses valeurs nous ne pouvons pour l’instant rien faire d’autre que de lescalculer,
pour rfixe,
à l’aide despuissances
successives de M.Les "matrices sud-est" ont, en
fait,
d’assez curieusespropriétés spectrales,
surlesquelles quelques
indicationsfigurent
dans [3] et etqui permettent d’organiser quelque
peu cecalcul ;
laplus remarquable
estque M a pour valeurs propres les r-1 nombres
(-1) /2cos2r-1’
pour,
p s p p ( 2r.1 PCe
tableau,dont
laligne
r = 3 est une suite deFibonacci,
aurait pu êtrecomplété,
tout au moins pour n > 2, par deuxlignes
dezéros,
corres-pondant
aux cas triviaux r = 1 et r = 0.Le nombre
ur
depréordres
totaux à r classes(ou d’applications
sur-jectives
dans{l, 2,...,r}) peut
ici être noté avec deuxindices,
soitun ;
rrappelons
queun
r est la différence r-ième deP (t)
n pour t =0,
cequi
per-met de former le tableau des
un
àpartir
duprécédent :
r
On retrouve bien en
position diagonale
CP les nombresc = u n,
et l’onn n
vérifie sur
chaque
colonne lapropriété
Mentionnons,
commeconséquence
curieuse de cettepropriété,
l’identitésuivante,
dont la démonstration détaillées’appuierait
surl’expression trigonométrique,
iciomise,
des Pn(r)
àpartir
duspectre
de M, etqu’il
neserait sans doute pas facile d’établir directement :
4.3 Une fois ces résultats
obtenus,
il est naturel de passer au cas où l’or- drepartiel
donné est "circulairement alterné" sur un ensemble de n =2p éléments ;
cela revient àcompter
lespermutations
ou les suitesup-doim
de2p
termes danslesquelles
onimposerait
en outre au dernier terme d’êtreplus grand
que lepremier.
Le
problème
est très facile tantqu’il
nes’agit
que depermutations.
En effet
n’importe lequel
des p termes de numéropair peut
être leplus grand,
et cequi
resteaprès
sasuppression équivaut
à unepermutation
up- down de2p-1
termes. Le nombre cherché depermutations
pour p donné est doncd p = pC2 p- 1 ’
cequi
donne la suiteon s’assure immédiatement que
Si l’on veut
également compter
lespréordres totaux,
lecalcul est un peu
plus
lourd. L’une des manièresde le conduire
est de se servir de
l’aspect particulier
queprend
la relationgénérale
établie en 2.
Appelons ici Q (t)
lepolynôme
dedegré 2p qu’il
faudrait
appeler FE(tJ. Après suppression
d’un ensemble non-vide H d’élémentsmaximaux,
leP F(H) de
l’ordrepartiel
restant est évidemment unproduit
de facteurs dont chacunest "un
P d’indiceimpair. à
savoir celuiqui compte
lesapplications up-down
pour les élémentsqui
subsistent entre deuxéléments
maximaux"consé-
cutifs"
supprimés.
Plusprécisément
La loi
générale
des coefficientsqui apparaissent
dans cesformules ne serait d’ailleurs difficile ni à
préciser,
ni àjus- tifier. Quoi qu’il
ensoit,
lespolynômes Qp(t) peuvent
être parune conduite
approprice
ducalcul,
directement écrits comme com-binaisons
linéaires
deet le coefficient de
(t)/r!
r n’est alors autre que lenombre ur
rcherché de
préordres à
r classes.On trouve ainsi
5. PRODUITS D’ORDRES TOTAUX
5.1 Examinons encore une autre famille d’ordres
partiels,
ceuxqui
sontdéfinis
commeproduits
de deux ordres totaux(et qui
sont familiers aux
économistes, psychologues,
etc).
Onprend
par
exemple
et l’on définit F par le
produit cart6sïen A
x B et l’ordreUne fois de
plus,
ce sont les ordres totauxcompatibles
avec E
qui
ont étélargement étudiés,
mais pas lespréordres
totaux avec un nombre
impos’
r de classesqui
soit’_inférieur t ab. Nous utiliserons ~plusieurs reprises
dans ceparagraphe
la notation abréviative n!1 = C/~/2/.,..~-J~/
complétée
par la convention 0!! = Z.Le résultat le
plus
connu, découvert ensubstance
par Alfred YOUNG et étudiédepuis
sous des formesplus systé-~
matiques
par divers auteurs(c,
notamment[3]
et[4])
est que le nombre d’ordres totauxcompatibles
avec E s’obtient en divi-sant (ab)! par
-ab (diviseur auquel
seul le souci d’unea.... .
écriture
symétrique
donne une apparence defaction, puisqu’il
est
simplement égal
auproduit
de ab entiersqui
sont parexemple
ceux de 1 à
b, pui.s
de 2 àb+1,
etc.. enfinUne des manières d’énoncer ce résultat est de dire que l’on a dénombré les différentes manières de
disposer
lesentiers
de 1 à ab dans les cases d’un
quadrillage
de ab cases, en s’im-posant
que dans chacune des b couches lue degauche
droite etdans chacune des a colonnettes lue de bas en haut ces entiers
figurent
dans un ordre croissant.Quid
du cas più l’ons’impose toujours
ces conditions de stricte croissance mais avec des entiersqui
vont seulement de 1 à r r ~ abJ ?Exemple
avec a =4,
b =3,
r = 10 :Il est clair
qu’à partir
de toutedisposition
de cettenature on
peut
former un nouveau tableau de même format en re., tranchant1+j-1
du nombre inscrit dans la case(1,j) j
ici l’onobtiendrait
et de
façon générale
un tableau T de abentiers,
touscompris,
au sens
large
entre 0 et c Tr-(a+b-1),
etqui,
lus soit de droi-te à
gauche
danschaque ligne
soit de haut en basdans chaque colonne,
seprésenteraient toujours
de manièrenon-croissante.
Un tel tableau
T,
poura,b
et cdonnés,
est réalisabled’un nombre de manières
qui
a uneexnression b,
c)sym6tri-
que par
rapport -’i
a,b, c ;
ce nombre est(c~.[4])
La
réponse à
laquestion nosce (combien d’applications
"compatibles"
de Edans 11,
2...r}?)
est ainsiSi l’on
exige
en outre lasurjectivitc (combien.de préo-
dres totaux à
r classes?,
on obtient lesur, toujours
commedifférences r-ième de pour
t=o;voici
li titred’exemple
leurs valeurs
numériques
pour a = 4 et b - 3 :’ Nous laissons au lecteur intéressé le soin d’établir que dans le cas
général, qui
estégal à 1 et uab qui
secalcule
rapidement,
on a aussi desexpressions simples
pour les indices voisins des extrêmes :et
La
propriété
de la somme alternéeuab -
... d’êtreégale ài 6quiv,aut,
on l’a propos du casg,,noral > li
PE(-l)
= . Cequi
ycorrespond
ici. c’est une remarque relative àl’expression w(a, b,
c) :celle-ci,
s i l’on fixea et
b,
estpolynomiale
dedegré
ab parrapport à
c et devientsi c est choisi de
façon
que a+b+c = 0. Cette remarque est facile àjustifier
nar un calcul direct ; eneffet,
si l’on utilise la notation de
Vandermonde,
on voit qued’où
5.2,Les résultats
précédents
méritent d’êtreregardés
deplus près
dans le casparticulier
où b -. 2. En effet dans ce cas nonseulement les mais aussi
les ur prennent
deremarquables
formes monômes.
En ce qui concerne
P E(r)
on le calcule directement enfaisant b ~ 2 dans
l’expression générale w(a,b,
Ontrouve ainsi
Il
s’agit
denombres, parfois appelés
nombres deNarayana
ou nombres de
Runyon,
que l’on rencontre dans de nombreuxproblè-
mes, et dont voici un tableau pour