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Université de Sherbrooke. Identification des substrats de la caspase-8 dans des cellules du cancer colorectal résistantes à l apoptose

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Academic year: 2022

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Université de Sherbrooke

Identification des substrats de la caspase-8 dans des cellules du cancer colorectal résistantes à l’apoptose

Par

Victor Létourneau Programme de pharmacologie

Mémoire présenté à la Faculté de médecine et des sciences de la santé en vue de l’obtention du grade de maitre ès sciences (M. Sc.) en pharmacologie

Sherbrooke, Québec, Canada Septembre 2022

Membres du Jury d’évaluation

Pr Jean-Bernard Denault, département de pharmacologie-physiologie Pr Michel Grandbois, département de pharmacologie-physiologie Pr François-Michel Boisvert, département d’anatomie et de biologie cellulaire

© Victor Létourneau, 2022

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RÉSUMÉ

Identification des substrats de la caspase-8 dans des cellules du cancer colorectal résistantes à l’apoptose

Par

Victor Létourneau Programme de pharmacologie

Mémoire présenté à la Faculté de médecine et des sciences de la santé en vue de l’obtention du diplôme de maitre ès sciences (M.Sc.) en pharmacologie, Faculté de médecine et des sciences de la santé, Université de Sherbrooke, Sherbrooke, Québec,

Canada, J1H 5N4

L’apoptose est un mécanisme cellulaire se déclenchant lorsque la cellule est endommagée et mène au suicide de la cellule grâce aux caspases, une famille de protéases qui contrôlent ce processus de mort cellulaire. Dans certaines conditions comme le cancer, où la résistance à la mort cellulaire est normalement observée, il a longtemps été considéré que l’activité des caspases subissait une suppression quasi totale. Cependant, la caspase-8 initiatrice peut être activée dans les cellules du cancer colorectal (CCR) en absence d’apoptose. Cela soulève des questions quant à son rôle principal connu qui se veut pro-apoptotique. Parmi les protéines qui sont clivées par les caspases initiatrices dans des lignées de cellules du CCR, notre laboratoire a identifié SNX1 et SNX2. Ces protéines sont impliquées dans le routage intracellulaire et la signalisation des récepteurs tyrosine kinase (RTK) qui sont impliqués dans la pathogenèse du CCR. Ce projet vise à identifier d’autres protéines qui sont clivées par les caspases initiatrices et qui pourraient augmenter la tumorigénicité et la capacité métastatiques. Notre hypothèse de recherche est que les caspase-8 et -10 auraient d’autres substrats qui, une fois clivés dans les cellules du CCR résistantes à l’apoptose, augmenteraient la tumorigénicité et le pouvoir métastatique des cellules cancéreuses. Notre but était d’identifier ces nouveaux substrats ainsi que de caractériser l’impact de leur clivage sur la tumorigénicité de lignées de CCR. Nous avons d’abord converti des cellules résistantes à l’apoptose. Pour y arriver, plusieurs techniques furent utilisées comme la diminution des molécules pro-apoptotiques et l’augmentation des molécules anti-apoptotiques, et ce, sans succès. Cependant, nous y sommes parvenus par le retrait complet des caspases exécutrices 3 et 7 avec le CRISPR-Cas9. Nous avons démontré que les cellules étaient résistantes par divers tests, dont l’induction de l’apoptose avec TRAIL et l’analyse du clivage de PARP, un marqueur de l’apoptose. Pour identifier des substrats, nous avons marqué des cellules résistantes avec des isotopes (SILAC) et avons induit la mort cellulaire dans celles-ci. Nous avons analysé les résultats par spectrométrie de masse et avons identifié un substrat potentiel, la profilin-1. Malheureusement, nous n’avons pas pu confirmer son clivage par immunobuvardage. Nous avons tenté la même procédure, mais en utilisant la technique TAILS, sans avoir identifié de nouveaux substrats. Notre hypothèse reste donc à vérifier. Il serait intéressant de tenter d’autres méthodes de protéomique ou de les optimiser afin de peut- être pouvoir identifier de nouveaux substrats.

Mots clés : apoptose, cancer colorectal, caspase, substrat, protéomique,

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SUMMARY

Identification of caspase-8 substrates in colorectal cancer cells resistant to apoptosis

By

Victor Létourneau Pharmacology Program

Thesis presented at the Faculty of medicine and health sciences for the obtention of Master degree diploma maitre ès sciences (M.Sc.) in Pharmacology, Faculty of medicine

and health sciences, Université de Sherbrooke, Sherbrooke, Québec, Canada, J1H 5N4

Under physiological conditions, apoptosis is a cellular mechanism triggered when the cell is damaged and leads to cell suicide orchestrated by caspases, which form a family of proteases that control the process of cell death. In certain conditions, such as in cancer where there is resistance to cell death, it has long been thought that caspase activity is near completely suppressed. However, initiator caspase-8 is activated in colorectal cancer (CRC) cells in the absence of apoptosis. This raises questions about its canonical role, which is intended to be pro-apoptotic. Among the proteins that are cleaved by initiator caspases in CRC cells, our laboratory has identified SNX1 and SNX2. These two proteins are involved in the intracellular routing and signaling of receptor tyrosine kinase, which are involved in the pathogenesis of CRC. This project aims at identifying other proteins such as SNX1 and SNX2 that are cleaved by initiator caspases and which could increase tumorigenicity and the ability to metastasize. Our research hypothesis is that caspase-8 and -10 has other substrates which, upon cleavage in cells resistant to apoptosis of CRC, would increase the tumorigenicity and metastatic capacity of cancer cells. Our goal was to identify new substrates and to characterize the impact of their cleavage on cancer tumorigenicity. We first made HCT-116 cells resistant to apoptosis. To achieve this, several approaches were attempted such as the reduction of pro-apoptotic proteins and the increase of anti-apoptotic proteins expression, without success. However, we succeeded by completely removing using CRISPR-Cas9, the executioner caspases 3 and 7. We demonstrated that the cells were resistant by various tests including following the induction of apoptosis with TRAIL and by observing PARP-1 cleavage, a marker of apoptosis. To identify substrates, we labeled resistant cells with isotopes (SILAC) and induced cell death in them. We analyzed the results by mass spectrometry and identified a potential substrate, profilin-1. However, we could not confirm its cleavage by immunoblotting. We attempted the same procedure, but using the TAILS proteomics technique, without obtaining any substrate. Therefore, our hypothesis remains to be verified. It would be interesting to try other proteomic methods or to optimize them to be able to identify new substrates. Nevertheless, the cellular model we developed constitute a very useful tool to investigate initiator caspase substrates.

Keywords: apoptosis, colorectal cancer, caspase, substrate, proteomics,

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TABLE DES MATIÈRES

RÉSUMÉ ... iii

SUMMARY ... iv

TABLE DES MATIÈRES ... v

LISTE DES TABLEAUX ... viii

LISTE DES FIGURES ... ix

LISTE DES ABRÉVIATIONS ... xi

INTRODUCTION ... 1

1.1 L’apoptose ... 1

1.1.1 Fonctions physiologiques de l’apoptose ... 1

1.1.2 Caractéristiques de l’apoptose et d’autres types de mort cellulaire ... 2

1.2 Les caspases ... 6

1.2.1. Les caspases apoptotiques ... 8

1.2.2. Les caspases inflammatoires ... 12

1.3 Les différentes voies de mort cellulaire par apoptose ... 13

1.3.1 La voie extrinsèque ... 13

1.3.2 La voie intrinsèque ... 15

1.4 Roles de l’apoptose dans diverses pathologies ... 17

1.5 L’apoptose comme cible dans le traitement du cancer... 21

... 22

1.6 Les substrats des caspases ... 22

1.6.1 Méthodes d’identification des substrats des caspases ... 23

1.7 Hypothèse et objectifs ... 26

1.7.1 Hypothèse ... 26

1.7.2 Objectifs ... 27

MATÉRIEL ET MÉTHODES ... 28

2.1 Liste des anticorps utilisés ... 28

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2.2 Constructions plasmidiques et DsiRNA utilisés ... 29

2.3 Culture cellulaire, transfections, invalidation génétique et traitements apoptotiques ... 30

2.4 Extraits cellulaires ... 31

2.5 Immunobuvardages ... 32

2.6 Coloration à l’annexine V et iodure de propidium (PI) ... 32

2.7 Microscopie confocale – Marquage des noyaux ... 33

2.8 Test de vitesse de prolifération ... 33

2.9 Test de vitesse de migration ... 34

2.10 Spectrométrie de masse ... 34

RÉSULTATS ... 36

3.1 Cellules HCT-116 résistantes à l’apoptose – Diminution de BAK et BAX par l’utilisation de DsiRNA ... 36

3.2 Cellules HCT-116 résistantes à l’apoptose – Augmentation des protéines BCL-XL et XIAP par l’utilisation de plasmides ... 40

3.3 Cellules HCT-116 résistantes à l’apoptose – Diminuer l’expression des caspases exécutrices ... 43

3.4 Résistance à l’apoptose induite dans les HCT-116 CASP3/7 KO – Marquage à l’annexine-V et au PI ... 47

3.5 Résistance à l’apoptose induite dans les HCT-116 CASP3/7 KO – Marquage des noyaux et visualisation par microscopie confocale ... 50

3.6 Caractérisation des cellules HCT-116 CASP3/7 KO – Tester la capacité d’activation de la caspase-8 ... 52

3.7 Caractérisation des cellules HCT-116 CASP3/7 KO – Vitesse de prolifération... 53

3.8 Caractérisation des HCT-116 CASP3/7 KO – Vitesse de migration ... 54

3.9 Identification des substrats de la caspase-8 dans les HCT-116 CASP3/7 KO - SILAC ... 56

3.10 Identification des substrats de la caspase-8 dans les HCT-116 CASP3/7 KO – TAILS ... 60

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DISCUSSION ... 65 4.1 Induction d’une résistance à l’apoptose ... 65 4.2 Caractérisation des HCT-116 CASP3/7 KO ... 67

4.3 Identification des substrats de la caspase-8 par différentes approches de protéomiques . 69

CONCLUSION ... 75 RÉFÉRENCES ... 76

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LISTE DES TABLEAUX

Tableau 1 : Anticorps utilisés. ... 29 Tableau 2 : Plasmides utilisés. ... 29 Tableau 3 : DsiRNA utilisés. ... 29 Tableau 4 : Protéines identifiées avec l’approche SILAC qui possèdent un site de clivage suivant un résidu aspartate ... 58 Tableau 5 : Protéines identifiées avec l’approche TAILS qui possédaient un ratio LÉGER/MÉDIUM > 1,5... 62 Tableau 6 : Protéines identifiées avec l’approche TAILS qui possédaient un ratio LÉGER/MÉDIUM < 0,5... 63

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LISTE DES FIGURES

Figure 1 : Différences morphologiques entre l’apoptose et la nécrose ... 5

Figure 2 : Caractéristiques structurales des différentes caspases ... 7

Figure 3 : Maturation de la forme zymogène des caspases en forme active... 9

Figure 4 : Voies apoptotiques ... 17

Figure 5 : Site de clivage des caspases ... 22

Figure 6 : Niveaux d’expression des protéines BAK et BAX dans les HCT-116 transfectées ... 37

Figure 7 : Niveaux d’expression des protéines BAK et BAX dans les HCT-116 transfectées ... 38

Figure 8 : Résistance à l’apoptose par l’observation du clivage de PARP-1 dans les cellules HCT-116 transfectées exposées au TRAIL ... 40

Figure 9 : Transfection des cellules HCT-116 afin de surexprimer les protéines BCL-XL et XIAP ... 42

Figure 10 : Résistance à l’apoptose par l’observation du clivage in cellulo de PARP-1 dans les cellules HCT-116 surexprimant BCL-XL et XIAP exposées au TRAIL ... 43

Figure 11 : Résistance à l’apoptose par l’observation du clivage in cellulo de PARP-1 dans les cellules HCT-116 CASP7 KO exposées au TRAIL ... 44

Figure 12 : Niveau d’expression de la caspase-3 dans les cellules HCT-116 CASP7 KO transfectées... 45

Figure 13 : Résistance à l’apoptose par l’observation du clivage de PARP-1 dans les cellules HCT-116 CASP7 KO transfectées exposées au TRAIL ... 46

Figure 14 : Validation de l’absence de la caspase-3 dans des clones de cellules HCT-116 CASP7 KO CRISPR/Cas9 ... 47

Figure 15 : Résistance à l’apoptose par l’observation du clivage in cellulo de PARP-1 dans les cellules HCT-116 CASP3/7 KO exposées au TRAIL ... 48

... 49

Figure 16 : Résistance à l’apoptose par le marquage avec annexine-V et PI pour quantifier le pourcentage de cellules apoptotiques ... 49

Figure 17 : Résistance à l’apoptose par le marquage des noyaux... 51

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Figure 18 : Validation de l’activation de la caspase-8 ... 52

Figure 19 : Essais de prolifération ... 54

Figure 20 : Essai de migration ... 55

Figure 21 : Essais de migration... 55

Figure 22 : Schéma expérimental de l’approche SILAC ... 56

Figure 23 : Schéma à l’échelle des différentes classes de peptides détectés en spectrométrie de masse – SILAC ... 57

Figure 24 : Validation in cellulo du clivage de PFN1 ... 59

Figure 25 : Validation in cellulo du clivage de PFN2 ... 60

Figure 26 : Schéma expérimental de l’approche TAILS ... 61

Figure 27 : Schéma à l’échelle des différentes classes de peptides détectés en spectrométrie de masse – TAILS... 64

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LISTE DES ABRÉVIATIONS

APAF-1 BAD BAK BAX BCL-2 BCL-XL BID CID CP DAMP DD DED DFF DISC DMEM DNT DsiRNA FADD

Fas/Apo1/CD95 FBS

GFP GSDMS HCT116 HMGBI HSP90 HUNTER IAP IL-1 IL-10 KO LBR LPS NAD NuMa PAMP PARP-1 PBS PFN1

Apoptosis protease-activating factor 1 BCL-2-associated death promoter BCL-2 homologous antagonist/killer BCL-2-associated X protein

B-Cell Lymphoma 2

B-Cell Lymphoma-extra large

BH3 interacting-domain death agonist Connecteur interdomaine

Cellules parentales

Damage-associated molecular patterns Death domain

Death-effector domain DNA fragmentation factor

Death-inducing signaling complex Dulbecco’s Modified Eagle Medium Domaine N-terminal

Dicer-substrate small interfering RNA Fas associated with DD

Fas receptor/Apoptosis antigen 1/Cluster of differentiation 95 Fetal bovine serum

Green fluorescent protein Gasdermin D

Human colorectal carcinoma High mobility group box 1 Heat shock protein 90

High-efficiency undecanal-based N termini enrichment Inhibitor of apoptosis

Interleukine 1 Interleukine 10 Knock out

Récepteur de la lamine B1

Lipopolysaccharide

Nicotinamide adénine dinucleotide Nuclear mitotic apparatus protein Pathogen-associated molecular patterns Poly (ADP-ribose) polymerase 1

Phosphate-buffered saline Profiline-1

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PFN2 PI PRR PtdSer PUMA RISC ROCK1 RTK SDS-PAGE SILAC SMAC SNX1 SNX2 TAILS TGF-

TNF TNFR TP TRAIL XIAP

Profiline-2 Propidium iodide

Pattern recognition receptor Phosphatidylsérine

p53 upregulated modulator of apoptosis RNAi-induced silencing complex Rho-associated kinase I

Récepteur tyrosine kinase

Sodium dodecyl sulfate-polyacrylamide gel electrophoresis Stable isotopic labeling of amino acids in cell culture Second mitochondria-derived activator of caspases Sorting nexin-1

Sorting nexin-2

Terminal amine isotopic labeling of substrate Transforming growth factor beta

Tumor necrosis factor

Tumor necrosis factor receptor Température pièce

Tumor necrosis factor-related apoptosis-inducing ligand X-linked inhibitor of apoptosis

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INTRODUCTION

1.1 L’apoptose

L’apoptose est un processus de mort cellulaire programmé permettant à l’organisme d’éliminer les cellules endommagées. Le terme apoptose fut introduit pour la première fois en 1972 par une équipe de recherche australienne étudiant des coupes de tissus à l’aide d’un microscope électronique. Ils mirent en évidence certaines caractéristiques cellulaires clés de l’apoptose, en particulier la condensation de la chromatine, pavant la voie pour la recherche dans ce domaine (Kerr et al., 1972). Il fallut encore quelques années avant que cet important processus cellulaire gagne de l’intérêt dans la communauté scientifique grâce à la parution de plusieurs publications montrant concrètement que l’apoptose est un processus de mort cellulaire programmé. C’est notamment avec des études sur le ver Caenorhabditis elegans qu’il fut possible de comprendre que des 1090 cellules qui constituent l’animal immature, un nombre précis de 131 sont programmées à mourir par apoptose (Gumienny et al., 1999). Les principaux acteurs dans le phénomène d’apoptose sont les caspases, des protéases à cystéine responsables du clivage de diverses protéines impliquées dans ce processus et sont aussi derrière plusieurs phénomènes clés de l’apoptose comme la fragmentation de l’ADN. Les divers rôles des caspases seront couverts en détail dans une section ultérieure. Bien que l’apoptose reste la voie de mort cellulaire la plus étudiée et connue, plusieurs autres furent par la suite découvertes comme la pyroptose et la ferroptose (Tang et Kroemer, 2020 ; Vande Walle et Lamkanfi, 2016).

1.1.1 Fonctions physiologiques de l’apoptose

L’apoptose et la mitose sont deux processus aux rôles opposés, mais complémentaires, qui permettent le maintien de l’homéostasie cellulaire du corps et ont tous deux des rôles dans la croissance et le développement. Si la mitose permet de former de nouvelles cellules, l’apoptose, elle, permet d’éliminer les cellules âgées et endommagées.

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L’apoptose a aussi des rôles avant notre naissance en permettant la destruction des cellules devenant superflues lors de l’embryogenèse. Notamment, celles présentes entre les doigts dans le développement du fœtus, ce qui permet d’avoir des doigts séparés les uns des autres (Gilbert, 2000). Un autre rôle crucial de l’apoptose durant l’embryogenèse se trouve dans la formation d’un réseau de neurones connecté (Hollville et al., 2019).

Durant cette période, les neurones sont produits de façon excessive et les neurones qui ne réussissent pas à former des connexions neuronales seront éliminés par apoptose (Hollville et al., 2019). Une fois l’embryogenèse terminée, l’apoptose a plusieurs rôles protecteurs en nous débarrassant des cellules endommagées. C’est notamment le cas lorsque les cellules subissent des dommages irréparables à leur ADN en étant, par exemple, exposées au rayonnement UV. Avec l’intervention du facteur de transcription p53 qui induit la transcription de facteurs pro-apoptotiques, la cellule mourra par apoptose, nous protégeant des effets potentiellement néfastes qu’une cellule à l’ADN endommagé pourrait avoir (Roos et Kaina, 2006). L’apoptose possède aussi divers rôles dans la guérison de blessures. Différents types cellulaires sont impliqués dans ce processus comme les cellules immunitaires et celles-ci doivent être éliminées une fois leur travail terminé. Par exemple, les neutrophiles responsables de l’élimination des pathogènes présents dans une blessure meurent par apoptose une fois les pathogènes détruits (Fox et al., 2010).

1.1.2 Caractéristiques de l’apoptose et d’autres types de mort cellulaire

L’apoptose est un processus exécuté par les caspases. Ce phénomène peut être déclenché de plusieurs façons, mais suit généralement certains changements morphologiques clés qui lui sont propres. Pour mieux mettre en évidence l’unicité de ces changements, l’apoptose sera comparée à un autre processus de mort cellulaire, la nécrose. L’une des caractéristiques clés de l’apoptose est que ce phénomène est un type de mort cellulaire programmé et finement régulé. Comparativement à l’apoptose, la nécrose (ne pas confondre avec la nécroptose qui est en partie programmée) n’est pas un type de mort cellulaire programmé et ne dépend pas des caspases (Linkermann et Green, 2014). En effet, certains mécanismes permettent de limiter les dégâts potentiels que la nécrose

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pourrait causer, dont l’inflammation. Prenons l’exemple d’une coupure de la peau où l’on observe la nécrose des cellules fortement endommagées (D’Arcy, 2019). Dans ce cas, les macrophages ont pour rôle de phagocyter les débris et les cellules nécrosées afin d’éviter les dommages collatéraux qu’il pourrait y avoir, comme une réponse inflammatoire trop importante. En effet, une cellule nécrosée perd l’intégrité de sa membrane plasmique et gonfle jusqu’à ce qu’elle se brise et relâche différentes molécules et protéines qui se retrouveront dans l’espace extracellulaire (Savitskaya et Onishchenko, 2015). Parmi celles-ci, il y a des facteurs pro-inflammatoires comme HMGB1, qui aident au déclenchement d’une réponse inflammatoire en se liant au NLRP3, une protéine de l’inflammasome (Nikoletopoulou et al., 2013). Les neutrophiles sont ensuite recrutés et relâchent des espèces réactives, ce qui a comme effet d’augmenter la réaction inflammatoire (Haanen et Vermes, 1995). Il est donc crucial de réguler l’activité de ces cellules immunitaires, car elles relâchent des molécules bactéricides et une trop grande sécrétion de celles-ci pourrait potentiellement tuer des cellules saines se trouvant à proximité (Rock et Kono, 2008). Donc, il est nécessaire que ces cellules immunitaires meurent et elles le font par apoptose, ce qui permet d’éviter une destruction excessive des tissues sains.

Dans le contexte d’une blessure, une réaction inflammatoire contrôlée est également bénéfique du fait qu’elle créer de la vasodilatation qui permettra d’amener plus rapidement les cellules du système immunitaire au site de la blessure afin d’éviter une infection potentielle (Rock et Kono, 2008). Comme la nécrose cause une réaction immunitaire, le corps fera la distinction entre la nécrose qui est plus souvent associée à un danger comme une blessure et il pourra y réagir rapidement comparativement à l’apoptose qui n’engendre normalement pas de réponse immunitaire (Matzinger, 1994).

C’est d’ailleurs l’une des plus grandes différences entre la nécrose et l’apoptose, soit l’absence de réaction inflammatoire. Comparativement à la nécrose, lorsqu’une cellule meurt par apoptose celle-ci est phagocytée par les cellules avoisinantes ou par les macrophages, ce qui empêche le déclenchement d’une réaction immunitaire. Les cellules apoptotiques sont reconnues comme prêtes à être phagocytées, par l’exposition du phosphatidylsérine (PtdSer). Normalement, le PtdSer est absent sur le feuillet externe de

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la membrane plasmique et son exposition donne aux macrophages le signal de les phagocyter (Segawa et Nagata, 2015). Un autre phénomène propre à l’apoptose est que la membrane d’une cellule apoptotique ne perd pas son intégrité, même si la cellule diminue en taille et forme plusieurs petites vésicules appelées corps apoptotiques.

Plusieurs phénomènes doivent se produire pour arriver à cette morphologie comme le clivage par la caspase-3 du Rho-associated protein kinase 1 (ROCK1) (Tixeira et al., 2020).Une fois clivé, ROCK1 phosphoryle les fibres de myosine et permet la contraction de l’actomyosine provoquant le bourgeonnement de la membrane plasmique et ainsi la formation de vésicules (Atkin-Smith et Poon, 2017). Avec l’aide d’autres processus, la formation de vésicules intactes est possible et il n’y aura pas le déversement de molécules pro-inflammatoires dans le milieu extracellulaire, ce qui empêche une réaction inflammatoire (Haanen et Vermes, 1995). De plus, le recrutement des macrophages permet parfois la relâche de certaines molécules anti-inflammatoires comme IL-10 et TGF- (Chung et al., 2006 ; Huynh et al., 2002). Ce processus n’a d’ailleurs aucun impact sur les cellules avoisinantes (Doonan et Cotter, 2008).

Outre l’inflammation, plusieurs autres différences morphologiques entre l’apoptose et la nécrose sont présentes comme la modification de la structure de l’ADN. Durant l’apoptose, le noyau rétrécit, la chromatine se condense et l’ADN est clivé de façon contrôlée (Saraste et Pulkki, 2000). Le complexe Caspase-activated DNase (CAD) est un hétérodimère responsable de ce clivage et est composée de deux sous unités, l’unité de 40 kDa (DFFB) et celle de 45 kDa (DFFA), dont le rôle est d’inhiber DFFB. Durant l’apoptose, la caspase-3 clive cette dernière, libérant ainsi DFFB qui sera en mesure de cliver l’ADN chromosomique (Zhang et Xu, 2000). Cela produira des fragments d’environ 180 à 200 paires de bases, soit la taille d’un nucléosome. Cette dégradation de l’ADN condamne effectivement la cellule à mourir (Bortner et al., 1995). Lors de la nécrose, la chromatine n’est généralement pas condensée. L’ADN est tout de même clivé, mais de manière aléatoire, créant des fragments de différentes tailles (Edinger et Thompson, 2004).

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Figure 1 : Différences morphologiques entre l’apoptose et la nécrose

Il existe plusieurs différences morphologiques entre la nécrose et l’apoptose. D’abord, lors de l’apoptose la cellule voit son volume diminuer et il y aura bourgeonnement de la membrane grâce à la caspase-3 qui clive et active ROCK1. Une fois activé, ROCK1 va phosphoryler la myosine (sphère rouge) et permettra la contraction de l’actomyosine (ligne verte) ce qui mènera à la formation des corps apoptotiques qui sont phagocytés par les cellules avoisinantes. Ensuite, l’ADN va se briser de façon régulière, donnant des fragments de 180 à 200 pb. Lors de la nécrose, le volume cellulaire augmente, l’ADN sera brisé en fragments de différentes tailles et il y aura largage du contenu intracellulaire à l’extérieur de la cellule. Cela engendre une réponse inflammatoire qui n’est pas présente dans l’apoptose. Figure réalisée avec BioRender.com

Bien que les changements morphologiques soient clés pour différencier une cellule en apoptose d’autres types de morts cellulaires, il existe aussi plusieurs changements biochimiques dans la cellule qui marque l’état d’apoptose. L’une des composantes biochimiques importantes qui dicte si la cellule mourra par apoptose ou par nécrose est le niveau d’adénosine triphosphate (ATP). En effet, l’apoptose nécessite une consommation importante d’ATP et un niveau bas de cette molécule peut entraîner la cellule vers la nécrose. Par exemple, la poly (ADP-ribose) polymérase 1 (PARP-1), une protéine impliquée entre autres dans la réparation de l’ADN, consomme du nicotinamide adénine dinucléotide (NAD+) de manière importante. Le NAD+ est un substrat utilisé pour

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convertir l’ADP en ATP et une activation de la protéine PARP-1 pourrait donc diminuer indirectement le niveau d’ATP présent dans la cellule et pousser la cellule vers la nécrose.

Lors de l’apoptose, PARP-1 est rapidement clivé par les caspase-3 et caspase-7, empêchant son activité et conservant un niveau élevé d’ATP permettant à la cellule de mourir par apoptose. Le clivage de PARP-1 est d’ailleurs considéré comme un marqueur d’apoptose important (Boucher et al., 2012 ; Kiechle et Zhang, 2002) et l’observation de ces fragments à 89 kDa et à 24 kDa de PARP-1, généralement par buvardage de type Western, est suffisante pour indiquer qu’il a été clivé par les caspases et que les voies apoptotiques sont mobilisées (Chaitanya et al., 2010). Une autre façon d’observer la présence d’apoptose est de montrer l’activation des caspases exécutrices par l’utilisation d’anticorps qui reconnaissent la forme clivée active de la caspase d’intérêt, souvent la caspase-3 (Srinivasan et al., 1998).

1.2 Les caspases

Les principaux acteurs de l’apoptose sont une famille de protéases à cystéine nommées caspases. Le terme caspase est dérivé de l’appellation cysteine-aspartyl-specific protease.

Comme son nom l’indique les caspases clivent généralement du côté C-terminal d’un résidu aspartate. Cependant, il fut récemment démontré qu’elles pouvaient aussi cliver suivant un résidu glutamate ainsi que plus rarement suivant un acide aminé phosphosérine (Seaman et al., 2016). Toutes les caspases, à l’exception de la caspase-14, sont composées de trois domaines. Elles possèdent un domaine en N-terminal (DNT) de longueur variable responsable de la régulation de leur activité. Elles présentent aussi un domaine catalytique qui est composé d’une petite sous-unité (~10 kDa) ainsi que d’une grande sous-unité (~20 kDa). Celles-ci sont liées entre elles par un connecteur interdomaine (CID) qui est clivé lors de l’activation des caspases (Lavrik et al., 2005). Ce clivage permet aux deux sous- unités de former un hétérodimère chez les caspases initiatrices alors que pour les caspases exécutrices sont déjà sous cette forme et le clivage leur permettra de former un hétérotétramère composé de deux hétérodimères. Cette forme est une condition essentielle à l’activité de toutes caspases (Kumar, 2007).

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Les caspases sont produites sous forme de zymogène (forme inactive) et, afin d’être activées, elles doivent subir certaines modifications qui varient selon le sous-groupe auquel elles appartiennent. Les caspases ne sont pas toutes activées de la même façon et dans un contexte d’apoptose, elles sont divisées en deux grandes catégories; les caspases initiatrices composées des caspases 2, 8, 9 et 10 et les caspases exécutrices qui comprennent les caspases 3, 6 et 7 (Galluzzi et al., 2016 ; Shi, 2002). Il y a aussi d’autres caspases spécifiquement impliquées dans l’inflammation plutôt que dans l’apoptose, soient les caspases 1, 4 et 5.

Figure 2 : Caractéristiques structurales des différentes caspases

Il existe trois grands groupes de caspases : les caspases inflammatoires (caspases 1, 4 et 5), les caspases initiatrices (caspases 2, 8, 9 et 10) et les caspases exécutrices (caspases 3, 6 et 7). Il y a aussi la caspase-14 qui ne se trouve dans aucune de ces catégories. Le groupe des caspases inflammatoires ainsi que certaines caspases initiatrices (caspase-9) possèdent un domaine CARD capable d’interagir avec des protéines de recrutement et réguler leur activité tandis que les autres caspases initiatrices possèdent deux motifs DED (caspases 8 et 10) qui permettent par l’interaction avec différentes protéines d’échafaudage de les activer ou les inhiber. Finalement, les caspases exécutrices possèdent un domaine N-terminal court de régulation. Figure adaptée de (Li et Yuan, 2008) et réalisée avec BioRender.com

Il y a finalement la caspase-14 impliquée de la différenciation des kératinocytes qui ne figure pas dans aucune des catégories dues à son rôle qui lui est propre (Denecker et al., 2008). Ses mécanismes d’activation ne sont pas encore complètement élucidés, mais elle semble l’être par certaines molécules présentes dans la peau comme les céramides

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(Markiewicz et al., 2021). Cela diffère de l’activation classique d’une caspase, qui se produit généralement suite à des dommages ou à des dangers comme une infection. Celle- ci participe aussi dans la conservation de l’eau dans la peau afin d’éviter son dessèchement (Markiewicz et al., 2021). Outre la caspase-14, seulement présente dans les kératinocytes, les autres caspases sont exprimées de façon ubiquitaire. Bien qu’aussi ubiquitaire, la caspase-1 est plus abondamment présente dans les monocytes et les macrophages (Ramirez et Salvesen, 2018).

1.2.1. Les caspases apoptotiques

Tel que présenté plus haut, deux groupes de caspases sont responsables en grande partie du déroulement de ce processus de mort cellulaire par apoptose, soient les caspases initiatrices et les caspases exécutrices. Le principal rôle des caspases initiatrices est d’activer, par clivage, la forme zymogène des caspases exécutrices. Ces dernières peuvent, une fois activées, cliver plusieurs substrats, certains servants à la progression de l’apoptose, d’autres étant des protéines essentielles à la survie de la cellule et un dernier groupe, sans rôle important reconnu souvent qualifier de substrats collatéraux (bystanders). Elles sont aussi responsables de plusieurs processus présents dans l’apoptose, dont la formation des corps apoptotiques, au clivage de l’ADN ainsi qu’à l’exposition des phosphatidylsérines (Julien et Wells, 2017).

1.2.1.1 Les caspases initiatrices

Parmi les caspases initiatrices se trouvent les caspases 2, 8, 9 et 10 qui s’autoactivent par dimérisation. L’un des modèles qui expliquent cette activation est celui de l’activation par proximité, qui sera décrit plus loin, stipulant qu’un nombre élevé de molécules de caspase dans un espace restreint aiderait à leur activation par dimérisation (induced- proximity model) (Salvesen et Dixit, 1999). Les caspases 8 et 10 possèdent deux death effector domain (DED) qui leur permettent d’interagir avec des récepteurs de la mort par le biais de protéines adaptatrices se liant à ceux-ci comme le Fas-associated protein with death domain (FADD). D’autres protéines peuvent aussi lier les DED pour inhiber

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l’apoptose comme le cellular FLICE (FADD-like IL-1-converting enzyme)-inhibitory protein (c-FLIP) permettant de réguler l’activation des caspases initiatrices 8 et 10 (Ramirez et Salvesen, 2018).

Figure 3 : Maturation de la forme zymogène des caspases en forme active

L’activation d’une caspase est différente entre les groupes de caspases. Les caspases initiatrices et inflammatoires sont présentes sous forme de monomères inactifs dans le cytosol et sont activées par dimérisation. Suite à leur activation, il y a fréquemment clivage à différents résidus aspartate (ciseaux), l’un présente entre le prodomaine et la grande sous-unité permettant de les séparer ainsi que deux se trouvant dans le CID entre la grande et la petite sous-unité. Les caspases exécutrices, elles, sont présentes sous forme de dimères inactifs et seront clivées au niveau du CID par les caspases initiatrices afin d’être activées et elles seront matures suite au clivage de leur DNT. Figure réalisée avec Biorender.com

La caspases-8 est connue pour son rôle dans l’initiation de l’apoptose par la voie extrinsèque, un processus enclenché par des signaux externes comme des ligands activant les récepteurs de la mort (Fischer et al., 2006). La caspase-8 est beaucoup plus étudiée et ses fonctions, autant dans l’apoptose que dans divers processus biologiques, sont beaucoup mieux répertoriées que celles de la caspase-10 puisque cette dernière n’est pas présente chez la souris ou le rat (Jänicke et al., 2006). La caspase-8 joue un rôle dans l’embryogenèse en aidant la prolifération et la différenciation des cellules progénitrices;

la délétion de cette protéase dans des embryons mène à la mort de ceux-ci (Kang et al.,

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2004). De plus, certaines de ses fonctions seraient indépendantes de son activité enzymatique puisqu’une mutation lui enlevant cette activité permet toujours de voir les mêmes effets par la caspase-8 (Kang et al., 2004). La caspase-8 possède aussi un rôle sur l’activité de l’inflammasome. En fonction du type cellulaire, la caspase-8 peut aider ou nuire à son activation (Tummers et Green, 2017). Un autre rôle intéressant de la caspase- 8 est celui qu’elle possède dans la régulation des cellules immunitaires. La caspase-8 permet aux cellules T et B autoréactives d’être éliminées afin d’éviter le développement de maladies auto-immunes. En effet, la mutation de la caspase-8 inhibe ce processus (Maelfait et Beyaert, 2008). La caspase-8 montre très bien que les caspases apoptotiques n’ont pas que des rôles dans l’apoptose, mais qu’elles possèdent aussi d’autres rôles importants dans l’homéostasie et le développement. La caspase-10 pourrait aussi avoir certains rôles immunitaires, car la mutation de celle-ci est impliquée dans le syndrome lymphoprolifératif avec auto-immunité (Wang et al., 1999). Un rôle opposé dans l’activation de l’apoptose a toutefois été identifié pour la caspase-10 (Horn et al., 2017).

Celle-ci pourrait empêcher le déroulement de l’apoptose par la voie dépendante de la caspase-8; la caspase-10 diminuerait la formation du death-inducing signaling complex (DISC) et, donc, diminuerait l’activation de la caspase-8 (Horn et al., 2017).

La caspase 9 possède un caspase activation and recruitment domain (CARD) dans sa portion N-terminale dont la fonction est d’interagir avec le domaine CARD d’APAF-1 (Apoptotic peptidase activating factor 1) (Lahm et al., 2003). Cette interaction est cruciale dans l’activation de cette caspase et dans le bon déroulement de la voie intrinsèque de l’apoptose. Ces rôles seront couverts dans une section ultérieure. La caspase-9 joue un rôle dans la différenciation des myoblastes squelettiques en myotube. Ces effets sont médiés par la caspase-3, mais c’est la caspase-9 qui est responsable de son activation, car un fonctionnement anormal de cette dernière empêchera cette différenciation (Murray et al., 2008). La caspase-9 est aussi impliquée dans la réponse aux infections virales ainsi que dans l’autophagie (Avrutsky et Troy, 2021).

Bien que la caspase-2 soit classée parmi les caspases initiatrices, elle ne clive pas les caspases exécutrices pour les activer (Fava et al., 2012). La caspase-2 possède aussi un

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domaine CARD, mais interagit plutôt avec PIDD permettant son activation. Une fois activée, elle peut cliver certains substrats comme BID en sa forme active pro-apoptotique tBID (Bouchier-Hayes et Green, 2012).

1.2.1.2 Les caspases exécutrices

Les caspases exécutrices sont les caspases 3, 6 et 7. Comparativement aux caspases initiatrices, les caspases exécutrices sont présentes dans le cytosol en tant que dimères inactifs. Elles ne s’autoactivent pas in cellulo, sauf lorsque surexprimées, mais sont activées par clivage protéolytique de leur CID par les caspases initiatrices (Boatright et Salvesen, 2003). Elles peuvent aussi être activées par d’autres protéases comme la granzyme B (Darmon et al., 1995) qui est larguée dans le cytosol des cellules par certaines cellules immunitaires afin d’induire l’apoptose des cellules cancéreuses ou infectées (Goping et al., 2003). Les caspases exécutrices ont une région N-terminale courte qui ne possède pas sites d’interaction bien définis (Boice et Bouchier-Hayes, 2020). Les caspases exécutrices ont comme rôle principal de cliver divers substrats essentiels à la survie cellulaire et au déroulement de la mort cellulaire par apoptose. En effet, il a été démontré que dans des souris KO pour la caspase-3 et la caspase-7, le phénomène d’apoptose y est déficient et ces souris meurent à la naissance. Cela montre qu’en plus de leur rôle crucial dans le bon déroulement de l’apoptose, ces caspases sont aussi essentielles dans le développement (Lakhani et al., 2006). Même si à première vue les caspases-3 et 7 ont une activité presque identique sur certains substrats communs, chacune a un répertoire de substrats qui lui sont propres. La caspase-3 est celle qui a le rôle le plus important durant l’apoptose, car elle possède un plus grand nombre de substrats et son absence chez les souris est suffisante pour causer la mort des souris avant la naissance (Walsh et al., 2008). Elle va notamment activer la caspase-6 et la DNAse CAD. Elle va aussi cliver plusieurs substrats comme PARP-1, une protéine responsable de la réparation de l’ADN (Lakhani et al., 2006 ; Porter et Jänicke, 1999). Bien que la caspase-7 possède certaines fonctions communes à la caspase-3, celle-ci possède aussi des rôles uniques. Par exemple, cette caspase clive certains substrats, comme la cochaperone d’HSP90, p23 et PARP-1, de façon plus efficace que la caspase-3 grâce à

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un exosite (Boucher et al., 2012). Elle aurait aussi un rôle dans le combat des infections (Akhter et al., 2009). En effet, il a été montré que des macrophages déficients en caspase- 7 ont une moins bonne capacité à réduire la réplication de certains pathogènes.

La caspase-6, elle, est activée par la caspase-3 et a un rôle dans l’apoptose comme la diminution du volume du noyau. Celle-ci est aussi capable de cliver plusieurs caspases, dont la caspase-2, 3 et 8, mais avec des effets variés qui ne seront pas discutés ici. Outre ses fonctions apoptotiques, la caspase-6 participerait à l’inflammation, dont dans l’activation de l’inflammasome et participe à la protection contre l’infection par l’influenza (Wang et al., 2015 ; Zheng et al., 2020). Il a aussi été démontré que la caspase- 6 active est présente dans plusieurs maladies neurodégénératives comme la maladie d’Alzheimer et de Huntington, mais son rôle dans ces pathologies n’est pas bien défini (Graham et al., 2011).

1.2.2. Les caspases inflammatoires

Bien que les caspases soient plus souvent décrites pour leur rôle dans l’apoptose, il existe un groupe de caspases, les caspases inflammatoires, qui possèdent une multitude de rôles dans des processus inflammatoires et dans le combat des infections. Les caspases inflammatoires sont constituées de la caspase-1, 4, 5, et 12. Même si la caspase-12 fait théoriquement partie de ce groupe, son rôle ne sera pas couvert puisqu’elle n’est pas active chez l’humain (Bateman et al., 2021 ; Fischer et al., 2002).

La caspase la plus étudiée des caspases inflammatoires est la caspase-1. Celle-ci doit être activée par un complexe protéique nommé inflammasome qui est notamment responsable de reconnaître les damage-associated molecular pattern (DAMP). Ces molécules sont produites pour annoncer des dommages cellulaires qui ne sont pas liés à une activité bactérienne. L’inflammasome reconnaît aussi les pathogen-associated molecular pattern (PAMP) qui indiquent la présence de pathogènes dans l’organisme et permette d’y répondre (Schroder et Tschopp, 2010). La reconnaissance des DAMP et PAMP se fait par le biais des pattern recognition receptor (PRR). La caspase-1 est recrutée par un domaine

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CARD présent sur diverses protéines senseurs formant l’inflammasome et activée par dimérisation. Une fois activée, elle aura comme fonction de cliver certains substrats, comme c’est la pro-interleukine-1 (IL-1) qui est une cytokine jouant un rôle clé dans la réponse immunitaire innée et dans la génération d’une réaction inflammatoire. La caspase-1 peut aussi activer la gasdermine D (GSDMD) qui est importante dans la réponse immunitaire et peut initier la mort par pyroptose (Xia et al., 2021).

Les caspase-4 et caspase-5 ont des rôles moins connus. Cependant, un rôle récemment identifié de la caspase-4 est qu’elle reconnaît les lipopolysaccharides (LPS) présents sur les bactéries Gram négatives lors d’une infection. La caspase-4 aurait aussi un rôle dans la sécrétion d’IL-1 et dans la destruction par pyroptose des macrophages infectés par des bactéries (Matikainen et al., 2020). La caspase-5 peut aussi lier les LPS bactériens ; il fut montré qu’en présence de LPS, la caspase-5 serait activée et aiderait au relâchement des molécules pro-inflammatoires IL-1 et IL-1 (Viganò et al., 2015).

1.3 Les différentes voies de mort cellulaire par apoptose

Il existe deux façons principales d’activer l’apoptose, soit par la voie intrinsèque ou par la voie extrinsèque. Deux voies déclenchées par des signaux différents sont exécutées par plusieurs protéines, certaines propres à l’une des deux voies alors que d’autres leur sont communes. (Elmore, 2007). Les acteurs et les mécanismes participant dans ces voies seront couverts en détail dans cette section.

1.3.1 La voie extrinsèque

Afin qu’une cellule meure par la voie apoptotique extrinsèque, un ligand provenant de l’extérieur de la cellule doit se lier à l’un des récepteurs de la mort de la grande famille des tumor necrosis factor receptor (TNFR). Il existe six récepteurs dans cette famille qui régulent l’apoptose, soit le TNFR1, Fas/Apo1/CD95, DR3, DR4/TRAIL-R1, DR5/TRAIL-R2 et DR6 (Nair et al., 2014). Comme leur nom l’indique, ces récepteurs lient des facteurs de nécrose tumorale (TNF). Avec l’aide d’une région intracellulaire

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appelée le death domain (DD), il sera possible de prendre le signal extracellulaire et de le traduire en signal interne permettant le déclenchement de l’apoptose (Elmore, 2007).

Pour illustrer ce processus, prenons le ligand TRAIL que j’ai abondamment utilisé dans mon projet, bien que d’autres ligands agissent aussi sur ces récepteurs comme TNF et FasL. La principale fonction de TRAIL est d’induire l’apoptose dans des cellules tumorigéniques (Holoch et Griffith, 2009). Afin de déclencher le processus d’apoptose, TRAIL peut se lier à deux récepteurs, DR4 et DR5, causant leur trimérisation (Pan et al., 1997). Dans la partie intracellulaire des récepteurs, il y aura la liaison de l’adaptateur FADD sur le motif DD des récepteurs suivi des procaspases 8 ou 10 (caspase-8 pour fin de simplification) à FADD grâce à leurs domaines DED et la combinaison de ces protéines, récepteurs-adaptateurs-caspases, forme le DISC. Suivant la formation de ce complexe, il y aura autoactivation par dimérisation de la procaspase-8; une fois activée, cette caspase clivera plusieurs substrats comme les procaspases exécutrices 3 et 7 (Kischkel et al., 2000). La caspase-8 peut aussi cliver certaines protéines pro- apoptotiques impliquées dans la voie intrinsèque de l’apoptose dont BH3 Interacting- domain death agonist (BID) en sa forme active tBID. (Li et al., 1998 ) (voir section 1.4.2).

Une fois les caspases exécutrices activées, elles cliveront plusieurs substrats afin de déclencher l’apoptose. Par exemple, la caspase-3, qui est l’actrice principale dans l’exécution de l’apoptose, clivera notamment ICAD, l’inhibiteur de la DNase CAD (Enari et al., 1998). Elle inactive aussi la protéine PARP-1 qui, dans des conditions normales, participe à la réparation de l’ADN (Jänicke et al., 1998 ; Walsh et al., 2008). Un autre changement cellulaire important de l’apoptose causé en grande partie par la caspase-3 est le bourgeonnement membranaire. La caspase-3 clive et active plusieurs modulateurs du cytosquelette d’actine comme ROCK1, le p21-activated kinase 2 (PAK2) et la gelosine.

La gelosine clivée est constitutivement active et les protéines ROCK1 et PAK2 ne dépendront plus de l’activité des GTPases ce qui crée une réorganisation anormale du cytosquelette d’actine causant le bourgeonnement cellulaire (Green et Llambi, 2015).

Ce ne sont cependant pas toutes les cellules qui peuvent directement mourir via la voie extrinsèque (cellules de type I). Ce qui différencie les autres types cellulaires est le niveau

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de la protéine X-linked inhibitor of apoptosis protein (XIAP). Dans les cellules de type II, XIAP est présent en quantité suffisante pour inhiber les caspases exécutrices activées par les caspases initiatrices de la voie extrinsèque (Jost et al., 2009). Pour que ce type de cellules meurent, elles doivent aussi utiliser la voie intrinsèque de l’apoptose qui leur permet de relâcher le second mitochondria-derived activator of caspases (SMAC), un inhibiteur de XIAP. Cela permettra donc l’activation des caspases exécutrices et la mort cellulaire par apoptose (Green et Llambi, 2015). Les cellules utilisées durant ma maîtrise, les HCT-116, sont de type II (Özören et El-Deiry, 2002).

Afin d’éviter que la cellule enclenche la voie extrinsèque de l’apoptose à tort, il existe plusieurs protéines comme XIAP qui régulent le processus d’apoptose. Une protéine illustrant bien ce processus de régulation est la protéine c-FLIP dont il existe deux formes : la forme courte (c-FLIPS) et la forme longue (c-FLIPL) (Irmler et al., 1997). Les deux protéines possèdent un domaine DED leur permettant de se lier à la protéine FADD du complexe DISC. Lorsque c-FLIPS lie FADD, elle empêche la caspase-8 de s’y lier, inhibant ainsi son recrutement et son activation (Krueger et al., 2001). Il se produit la même chose lorsque c-FLIPL est présent en grande quantité. Cependant, lorsque cette protéine est présente à une faible concentration, elle favorise plutôt le déroulement de l’apoptose (Chang et al., 2002) et peut même participer à l’activation des caspases initiatrices 8 et 10 (Boatright et al., 2004).

1.3.2 La voie intrinsèque

Comparativement à la voie extrinsèque, la voie intrinsèque de l’apoptose est déclenchée suite à des signaux provenant de l’intérieur de la cellule. Plusieurs phénomènes peuvent enclencher ce processus comme la présence de matériels viraux, des radiations, la perte de facteurs de croissances ou des dommages à l’ADN. Il est aussi possible, comme expliqué dans la section précédente, que par la voie extrinsèque les caspases 8 et 10 clivent BID en sa forme active tBID et active la voie intrinsèque de l’apoptose (Kiraz et al., 2016 ; Westphal et al., 2011). Ce dernier interagit avec BCL-2 associated X protein (BAX) et avec BCL-2 homologous antagonist/killer (BAK) dont la capacité de former

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des pores permettra au cytochrome c de sortir de la mitochondrie et d’enclencher la voie intrinsèque de l’apoptose (Li et al., 1998 ; Moldoveanu et al., 2013).

Pour illustrer ce processus, prenons l’exemple dans lequel la cellule aurait subi des dommages à l’ADN à la suite d’une exposition aux rayonnements UV. Ces bris à l’ADN auront comme impact d’activer p53. p53 activée augmente la transcription de facteurs pro-apoptotiques comme BAX, le p53 upregulated modulator of apoptosis (Puma), BID et même la protéine Noxa (Hemann et Lowe, 2006). Parmi ces protéines, BAX ainsi que BAK, activées par tBID, feront des pores dans la membrane externe de la mitochondrie qui aura deux conséquences principales. La première, sera que ces pores laisseront certaines protéines pro-apoptotiques comme SMAC et Omi sortir de la mitochondrie (Westphal et al., 2011). Ces protéines pourront inhiber les inhibitor of apoptosis proteins (IAP) comme XIAP. La deuxième sera de laisser le cytochrome c sortir de la mitochondrie. Celui-ci liera les domaines WD40 de la protéine APAF-1 pour former un complexe dépendant de l’ATP nommé apoptosome (Jiang et Wang, 2004). Ce complexe est formé de sept molécules d’APAF-1 organisées en roue et possédant à son centre des domaines CARD qui permettent la liaison de la pro-caspase-9. L’un des modèles qui expliqueraient comment la caspase-9 est activée propose que plusieurs molécules de caspases-9 se trouvent à l’apoptosome. Dû à la proximité des molécules de caspases, cela permettrait leur dimérisation et l’activation de la caspase-9 (Riedl et Salvesen, 2007). Une fois la caspase-9 activée, celle-ci activera les caspases exécutrices 3 et 7 qui pourront enclencher divers processus déjà expliqués menant à la mort de la cellule (Kuida, 2000).

Tout comme la voie extrinsèque, il existe plusieurs protéines qui régulent le processus de mort cellulaire par la voie intrinsèque. La famille de protéines BCL-2 illustre parfaitement cette régulation, car dans cette famille on retrouve tant des molécules pro-apoptotique (BAK et BAX) qu’anti-apoptotiques (BCL-2 et BCL-XL) qui réguleront celles-ci (Westphal et al., 2011). Même ces protéines anti-apoptotiques vont, elles aussi, être régulées par la protéine BCL-2-associated death promoter (BAD) qui lie BCL-2 et BCL- XL, les empêchant d’inhiber BAX et BAK et permettant le déroulement de l’apoptose (Howells et al., 2011).

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Figure 4 : Voies apoptotiques

Afin d’activer la voie extrinsèque de l’apoptose, un ligand doit se lier à un récepteur de la mort, causant la trimérisation de celui-ci. Il y a ensuite formation du DISC qui permet de recruter les pro-caspases 8 et 10 et de les activer par dimérisation. Dans une cellule de type I, les caspases initiatrices actives pourront directement activer suffisamment de caspases exécutrices et causer la mort cellulaire. Dans les cellules de type II, il faut que la cellule passe par la voie intrinsèque de l’apoptose. Cette voie peut être activée de plusieurs façons. Avec l’augmentation de l’expression de BID par p53, à la suite de dommages à l’ADN et par le clivage de BID par la caspase-8. La forme clivée de BID, tBID, a la fonction d’inhiber les molécules anti-apoptotiques BCL-2 et BCL-XL ainsi que d’activer BAX et BAK qui formeront des pores dans membrane des mitochondries. Ces pores laissent fuir SMAC qui inhibe XIAP, une protéine inhibant les caspases exécutrices et la caspase-9. Le cytochrome c sortira aussi de la mitochondrie afin de lier APAF-1 ce qui engendrera la formation de l’apoptosome. Cette structure recrute et active la caspase- 9 qui pourra ensuite activer les caspases exécutrices. Figure réalisée avec BioRender.com

1.4 Roles de l’apoptose dans diverses pathologies

L’apoptose est un processus qui doit être régulé de façon très stricte. Un niveau d’apoptose soutenu est notamment observé dans certaines maladies neurodégénératives,

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comme celle d’Huntington. En effet, il a été démontré dans un modèle murin de cette maladie qu’il y avait une trop forte activation de la caspase-1 et de la caspase-3 plus tard dans la maladie. Des signes apoptotiques dans les neurones, comme le relâchement du cytochrome c, ont été observés et démontrent la présence d’apoptose excessive (Friedlander, 2003).

L’absence d’apoptose est toutefois beaucoup plus répertoriée dans la littérature et plus spécifiquement dans le cancer. En effet, l’un des éléments clés dans la formation du cancer est l’évasion de l’apoptose des cellules cancéreuses (Hanahan et Weinberg, 2000).

Par exemple, les cellules cancéreuses ne réagiront pas ou moins efficacement à certains signaux qui devraient normalement causer leur mort, comme le dommage à l’ADN, une division cellulaire incontrôlée et la perte d’encrage à la matrice extracellulaire (Hanahan et Weinberg, 2011). Le dogme accepté sur l’activité des caspases dans le cancer a longtemps été que les caspases étaient inactivées dans cette pathologie et qu’une activité de celles-ci serait nécessairement bénéfique pour diminuer le cancer. Cependant, une vue plus nuancée du rôle des caspases dans le cancer a vu le jour dans les dernières années. Il est tout de même important de mentionner les effets et causes de l’inhibition de l’activité des caspases et de la dérégulation de l’apoptose dans le cancer. Comme mentionné plus haut, la balance entre les protéines pro et anti-apoptotiques est très importante pour le bon déroulement de l’apoptose. Généralement dans le cancer, les protéines anti-apoptotiques sont surexprimées et les pro-apoptotiques sont sous-exprimées. Les protéines de la famille BCL-2 sont un bon exemple de cette dérégulation (Kang et Reynolds, 2009). Les protéines comme BCL-2 et BCL-XL qui ont des rôles anti-apoptotiques sont souvent surexprimées dans les cancers (Lebedeva et al., 2000 ; Reed, 2008). De plus, la surexpression de ces protéines est liée à la résistance aux traitements par chimiothérapie, des récidives, ainsi qu’une survie plus courte (Goldar et al., 2015 ; Wuillème-Toumi et al., 2005). BAX, une protéine pro-apoptotique, voit son expression diminuée dans le cancer colorectal et pourrait jouer un rôle dans la résistance à certains agents de chimiothérapie (Manoochehri et al., 2014). Ce débalancement entre les molécules régulant le processus apoptotique explique souvent en partie pourquoi il est si difficile de tuer les cellules cancéreuses in vivo. Une autre protéine dont la fonction est dérégulée

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dans le cancer, la protéine p53, est très souvent mutée et sera incapable de répondre aux dommages à l’ADN et autres stress auxquels elle répond lorsque fonctionnelle. Il suffit d’un seul acide aminé différent pour causer cette mutation qui est suffisante pour entraver l’activité de cette protéine. Comme son activité est perturbée facilement, il n’est pas surprenant de constater qu’elle soit si souvent mutée dans le cancer (Muller et Vousden, 2013).

Un autre aspect de la dérégulation de l’apoptose est la délétion ou le non-fonctionnement de certaines caspases (Zhou et al., 2018). Toutefois, le rôle des caspases dans le cancer est plus nuancé que l’on pourrait le croire. Bien que la présence des caspases soit généralement considérée comme positive, les études des dernières années ont montré que dans un contexte de cancer, certaines caspases peuvent avoir des rôles néfastes. Comme ce sont souvent le rôle des caspases dans le déroulement de l’apoptose qui sont présentées, ces résultats peuvent de prime abord surprendre. Il est maintenant évident que les caspases possèdent plusieurs rôles non apoptotiques et sont impliquées dans divers processus biologiques (Zhou et al., 2018); rendant les traitements visant à activer les caspases plus complexes. Induire la mort cellulaire est généralement positif dans certains cancers. Par exemple avec des agents visant BCL-2, il fut possible de ralentir la vitesse de croissance des cellules du cancer des poumons (Carneiro and El-Deiry, 2020). Cependant, si le traitement ne mène pas à l’apoptose, les autres rôles des caspases pourraient être activés, comme celui dans la prolifération cellulaire, des conséquences néfastes pourraient résulter de ce type de traitement. Comme certaines composantes de l’apoptose sont souvent compromises dans le cancer, une activation des caspases ne menant pas à la mort cellulaire pourrait être délétère au patient. Par exemple, la caspase-3 pourrait aussi favoriser la régénération de suivant une radiothérapie (Huang et al., 2011). En effet, il a été observé que lorsque des cellules tumorales saines sont mises en contact avec des cellules cancéreuses récemment irradiées, celles-ci croissent plus rapidement. Cependant, si la caspase-3 est retirée des cellules irradiées, cet effet est grandement diminué, suggérant un rôle de la caspase-3 dans les signaux de croissances que les cellules endommagées par la radiation pourraient envoyer aux cellules cancéreuses non touchées par le traitement (Huang et al., 2011). Bien que surprenant, il fut aussi démontré que

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l’absence de la caspase-3 chez certains patients dans le cancer colorectal rendait les cellules plus sensibles à la chimiothérapie et à la radiothérapie; cette absence diminuerait le risque d’invasion et de migration des cellules cancéreuses par des mécanismes qui restent à élucider (Zhou et al., 2018). Cette étude semble donc montrer que dans certains cas, la présence de la caspase-3 ne serait pas un signe positif chez un patient atteint d’un cancer. Comparativement, l’absence de la caspase-9 dans le cancer de la tête et du coup est reliée à un traitement avec le cisplatine moins efficace (Kuwahara et al., 2003). Ces observations montrent que l’implication des caspases dans le cancer est complexe et changent d’un cancer à l’autre, mais aussi d’un patient à l’autre.

La caspase-8 est aussi un bon exemple montrant les divers rôles des caspases dans le cancer; celle-ci est augmentée dans certains cancers et diminuée dans d’autres, causant divers effets. La perte de la caspase-8 a été observée dans plusieurs cancers comme le cancer des ovaires, le cancer du sein, de la prostate et plusieurs autres (Kim et al., 2003 ; Mandal et al., 2020). Cette diminution pourrait notamment avoir un effet dans la production de métastases ainsi que dans l’évolution générale du cancer en aidant la transformation cellulaire (Krelin et al., 2008). Il rend aussi moins efficaces les traitements visant à induire l’apoptose. Puisque la caspase-8 possède un rôle crucial dans l’induction de l’apoptose, des mutations peuvent être suffisantes pour perturber le phénomène d’apoptose (Mandal et al., 2020). La dysfonction du processus peut donc contribuer à la création d’un cancer (Olsson et Zhivotovsky, 2011). Dans d’autres types de cancers, la caspase-8 n’est pas diminuée, voire même augmentée comme c’est parfois le cas dans le cancer colorectal (Mandal et al., 2020). Comme cette caspase possède des fonctions non apoptotiques, sa présence peut engendrer des effets néfastes. Elle peut notamment favoriser la mobilité des cellules cancéreuses, les aidant à envahir plusieurs parties du corps (Franco et Huttenlocher, 2005). Elle arriverait à cet effet en stimulant l’activité de la calpaïne qui contribue à la prolifération et la migration des cellules. Dans les glioblastomes, la caspase-8 peut aussi favoriser l’angiogenèse, un processus important dans la croissance d’une tumeur et pourrait participer à la résistance face à certains agents utilisés en chimiothérapie (Fianco et al., 2017). Il est cependant important de comprendre

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que la présence de caspases actives dans le cancer est souvent un signe positif donnant une meilleure chance de survie au patient (Elrod et al., 2010).

1.5 L’apoptose comme cible dans le traitement du cancer

Bien que les caspases aient des rôles divers et même parfois opposés dans le cancer, l’induction de l’apoptose par celles-ci ou d’autres protéines impliquées dans l’apoptose peut représenter une solution thérapeutique intéressante. L’une des premières stratégies tentées visant à induire la mort cellulaire dans le cancer fut avec le TRAIL qui induit la mort par apoptose via la voie extrinsèque. L’attrait de ce ligand est qu’il peut induire la mort cellulaire de façon sélective en ne faisant mourir que les cellules cancéreuses; les cellules saines sont généralement épargnées (Walczak et al., 1999). Malheureusement, lors des essais cliniques les cellules cancéreuses se sont avérées résistantes au TRAIL dans la majorité des cas. Cependant, certaines études semblent démontrer qu’il est possible de sensibiliser des cellules cancéreuses au TRAIL grâce à l’utilisation d’agents chimiothérapeutiques comme le cisplatine. Bien que cette méthode semble prometteuse, elle n’a pas encore été évaluée dans le cadre formel d’une étude clinique (Lemke et al., 2014). Une autre approche intéressante est l’utilisation de molécules visant certaines protéines importantes de l’apoptose et qui sont souvent impliquées dans sa dérégulation.

Parmi ces composés pharmacologiques, se trouvent plusieurs inhibiteurs des régulateurs de l’aptoptose BCL-2 et BCL-XL (Navitoclax), des molécules mimétiques de SMAC (Birinapant), différents agonistes synthétiques des récepteurs de la mort (GEN1029) ainsi qu’une molécule visant à restaurer l’activité de p53 (APR-246 ) (Boice et Bouchier- Hayes, 2020). Plusieurs de ces composés se trouvent à différentes phases cliniques de recherche et montrent que l’induction de l’apoptose comme traitement contre le cancer est une voie intéressante pour traiter cette maladie et surmonter la résistance à l’apoptose présente dans cette pathologie. L’une des protéines les plus ciblées est la famille BCL-2.

Comme on y trouve autant de protéines anti que pro-apoptotiques, cela en fait une cible intéressante. Par exemple, il existe le ABT-737, une petite molécule qui se lit à BCL-2 et BCL-XL et les empêchent d’interagir avec les protéines pro-apoptotiques qu’elles inhibent. Cette molécule s’est montré efficace pour ralentir la croissance de certains types

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de tumeurs (Carneiro and El-Deiry, 2020). Donc, c’est par l’étude de cette résistance qu’il sera possible d’élaborer de nouveaux composés pharmacologiques la contournant.

Figure 5 : Site de clivage des caspases

Les caspases clivent généralement en c-terminal d’un résidu aspartate à un endroit nommé le lien scissile. Les résidus se trouvant en amont de ce lien se nomment P1, P2 … et ainsi de suite alors que ceux présents en aval du site se nomment P1, P2… et ainsi de suite. Il est possible de dire que la majorité des caspases vont cliver lorsque certains résidus (représentés en jaune) sont présents à certaines positions spécifiques donnant le motif X-Glu-X-Asp  (Gly/Ala/Ser)-X-X-X. Figure réalisée avec Biorender.com.

1.6 Les substrats des caspases

Le but de mon projet est d’identifier de nouveaux substrats pour une caspase, il est donc crucial de comprendre comment clivent les caspases et ce qui constitue un site de clivage idéal pour celles-ci. Comme toute protéase, les caspases clivent certaines séquences spécifiques. Durant l’apoptose, environ 2000 protéines seraient clivées (Seaman, 2016.).

Par convention, le résidu adjacent au site de clivage du côté N-terminal se nomme P1 et les résidus se trouvant en amont de celui-ci se nomment P2, P3, P4, etc (Figure 5). Du côté C-terminal, le résidu suivant le site de clivage se nomme P1’ suivi de P2’, P3’, etc.

(Schechter and Berger, 1967). Parmi ces résidus, celui ayant le plus grand impact sur l’efficacité du clivage est P1. Généralement, les caspases clivent à la suite d’un résidu aspartate (~90%) ou glutamate (~10%). Toutes les caspases possèdent aussi une préférence en P3 pour un résidu glutamate (Thornberry et al., 1997) et pour un petit résidu (Gly, Ala, Ser) en P1’ (Stennicke et al., 2000). Il est donc possible de généraliser en disant

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que la plupart des caspases clivent les motifs X-Glu-X-Asp(Gly/Ala/Ser) (Shi, 2002).

Cependant, même s’il est vrai que les caspases ont cette préférence, chaque caspase possède des différences dans son affinité pour certains résidus. Entre les différentes caspases, les préférences pour l’acide aminé en P4 et P2 varie. Ce sont en partie ces différences qui expliquent pourquoi les différentes caspases ne possèdent pas les mêmes substrats et qu’elles présentent des fonctions diverses. C’est grâce à des études utilisant des librairies de peptides synthétiques que ces préférences ont été établies. Pour chaque caspase, plusieurs combinaisons furent testées pour les acides aminés présents près du lien scissile et il fut possible de déterminer quel résidu était clivé de façon plus efficace en tenant compte de leur position. C’est ainsi que pour chaque caspase, les résidus préférentiels sont connus pour les positionsP1 à P4 afin d’obtenir un clivage optimal par une caspase donnée. Par exemple, pour les caspases exécutrices 3 et 7 le motif DEVD est bien connu comme étant le site de clivage idéal pour ces deux caspases (Timmer et Salvesen, 2007) et la caspase-8 préfère plutôt le motif LETD (Julien et Wells, 2017).

L’emplacement du site de clivage est aussi important, car il doit se trouver à la périphérie de la protéine pour permettre à la caspase d’y avoir accès. De plus, les caspases clivent plus fréquemment dans les boucles, suivi des hélices  et moins efficacement dans les feuillets  (Julien et Wells, 2017).

1.6.1 Méthodes d’identification des substrats des caspases

L’identification des substrats des différentes caspases est cruciale dans la compréhension de leurs rôles dans les divers processus biologiques auxquels elles participent. L’une des approches les plus utiles pour l’identification de nouveaux substrats et sans équivoque la protéomique qui peut-être définit comme l’identification et la quantification des protéines présentes dans un extrait cellulaire (Aslam et al., 2017). Ce large domaine analytique comprend plusieurs sous-catégories, dont la dégradomique qui s’intéresse aux substrats et aux inhibiteurs des protéases (Rogers et Overall, 2013). Puisque mon projet consiste à identifier des substrats de la caspase-8, une protéase importante dans la mort cellulaire, je m’attarderai à présenter la dégradomique pour mon projet.

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