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Compte rendu de A. Schor, Theodoret’s People. Social Networks and Religious Conflict in Late Roman Syria, Berkeley-Los Angeles-Londres, 2011, dans Antiquité Tardive, 20, 2012, p. 436-440.

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Networks and Religious Conflict in Late Roman Syria, Berkeley-Los Angeles-Londres, 2011, dans Antiquité

Tardive, 20, 2012, p. 436-440.

Vincent Puech

To cite this version:

Vincent Puech. Compte rendu de A. Schor, Theodoret’s People. Social Networks and Religious

Conflict in Late Roman Syria, Berkeley-Los Angeles-Londres, 2011, dans Antiquité Tardive, 20, 2012,

p. 436-440.. 2012. �hal-02568906�

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de la métrique traditionnelle, du moins jusqu’à l ’époque de Georges de Pisidie. Les traités militaires sont évoqués par Eric M cGeer qui, s ’il déplore le caractère souvent compi- latoire et paraphrastique de ces écrits, rappelle combien les travaux d ’Alphonse Dain et Gilbert Dagron ont permis de noter un renouveau de la pensée tactique en relation avec la venue de nouveaux adversaires plus mobiles. Au risque de susciter l ’étonnement dans un ouvrage généra­

liste, pas moins de vingt pages sont vouées à la musique par Alexander Lingas. Répétant les conclusions de Martin Litchfield West, il relève, pour la fin de l ’Antiquité, l ’essor de la modulation des syllabes sur plusieurs notes et l ’engouement pour le genre diatonique, sans omettre le rôle, déterminant à cette époque, de la psalmodie constanti- nopolitaine et palestinienne.

L’ouvrage s’achève par deux articles curieux et assez décevants. Le premier, de propos très général, est consacré par James Howard-Johnston aux relations géostratégiques de l ’Empire byzantin avec ses voisins, mais laisse dans l ’ombre la période qui précède les conquêtes arabo-musulmanes. Le second, de Cyril Mango, s ’interroge sur l’héritage culturel byzantin. En appendices sont fournies de longues listes d ’empereurs, de souverains d ’États proches, de patriarches de Constantinople et de papes. Plus utile pour le maniement de ce gros livre, un index des noms et des thèmes se déroule sur près d ’une cinquantaine de pages. Au regard des divers manuels jusque-là disponibles et en nombre croissant dans le monde anglophone depuis une dizaine d ’années, force est de reconnaître que cet ouvrage complète ses prédéces­

seurs. Descriptifs ou analytiques, informatifs ou chronolo­

giques, les articles qui le constituent forment des synthèses brèves mais souvent efficaces et assorties d ’orientations bibliographiques utiles à défaut d ’être complètes. Comme il est de règle pour un compte rendu, la louange n ’interdit par la critique. Plusieurs thèmes économiques, sociaux ou politiques auraient mérité des contributions : l ’élevage et les circuits commerciaux sont absents ou traités de manière trop allusive ; pis, l ’enfance, l’esclavage, les eunuques et l ’aristo­

cratie sénatoriale font défaut ; enfin, les étrangers à Byzance, les minorités religieuses et les peuples voisins méritaient un traitement de choix.

Ces réserves n ’enlèvent rien à l ’intérêt de ce magnifique livre qui s ’ajoute à une liste déjà longue de manuels anglo­

phones : citons d ’abord la somme, toujours précieuse et non remplacée avec ses quelque 5 000 articles, d ’Alexander Petrovitch Kazhdan (dir.),

The Oxford Dictionary o f Byzantium,

Oxford, 1991, rééd. 2005 (337 £) ; en revanche

The Oxford History o f Byzantium,

Oxford, 2002 (20 £ seulement !), publié sous la direction de Cyril Mango, est plus concis (moins de 330 pages contre plus de 2330), car il réunit seulement une demi-douzaine d ’études, certes de belle taille ; un peu plus gros (environ 600 pages), le manuel de Paul Stephenson (dir.),

The Byzantine World,

Londres / N ew York, 2010 (150 £), ignore toute la période protoby­

zantine, ou tardo-antique si l ’on préfère adopter un point

de vue plus conforme à la revue dans laquelle est publiée cette recension ; enfin, d ’une taille intermédiaire (450 pages) et composé, comme le précédent ouvrage, d ’articles de synthèse courts mais un peu plus originaux, le manuel de Liz James (dir.),

A Companion to Byzantium,

Chichester, 2010.

Espérons que la multiplication de ces instruments facilitera le travail des étudiants et des enseignants sans jamais réduire la nécessité d ’élaborer de nouvelles synthèses plutôt que des récapitulations parfois redondantes.

Sylvain Destephen Université Paris Ouest-Nanterre / IUF

Adam M. Schor,

Theodoret’s People. Social Networks and Religious Conflict in Late Roman Syria,

Berkeley / Los A ngeles / Londres, University o f California Press, 2011 (Transformation o f the Classical Heritage, 48), xv + 342 p., 20 pl. ISBN : 978-0-520-26862-3.

Cet ouvrage résulte d ’un Ph. D. débuté il y a dix ans et dont l ’A. résuma déjà certains des éléments dans deux articles parus en 2007 et 2009. Il est publié dans la collection de qualité dirigée par P. Brown, qui fit partie de ceux qui conseillèrent dans son travail l ’A., maintenant

Assistant Professor

d ’Histoire à l ’Université de Caroline du Sud.

Rappelons d ’emblée que Théodoret fut évêque de Cyr, dans la province d ’Euphratésie (située en Syrie du Nord, à l ’ouest du cours supérieur de l ’Euphrate), entre 423 et 460 environ.

L’introduction débute par un rappel de la querelle chris­

tologique du début du V5 siècle, opposant les miaphysites (ou monophysites) et les diophysites, selon les termes retenus par l ’A. Le rôle de Théodoret au sein du groupe diophysite y est présenté de manière très rapide. L’A. poursuit par une brève description de la Syrie dans l ’Antiquité tardive et une présentation des sources portant sur le débat théologique.

On aurait aimé trouver ici une analyse plus systématique des écrits de Théodoret lui-même, en particulier de sa correspondance, dont il est bien sûr fait un grand usage dans l ’ensemble du livre. L’A. expose sa méthode, qui se fonde sur ce qu’il nomme « a network approach to religious conflict » (une notion définie p. 9-13). D ’après lui, la théorie des réseaux sociaux s ’applique bien aux querelles religieuses car les individus s ’y livrent à des discours et à des gestes qui justifient leur m ise en relation. M ais l ’A. se réclame plus largement de cette approche inspirée par la sociologie et cite en particulier un livre qui l ’a déjà utilisée pour l ’histoire de l ’Antiquité tardive orientale, celui de G. Ruffini,

Social Networks in Byzantine Egypt,

Cambridge, 2008. Notons que G. Ruffini lui-même a signé un compte rendu de l ’ouvrage de A. Schor

(Journal o f Early Christian Studies,

20/1, 2012, p. 174). L’introduction s ’achève par un utile résumé du contenu de l ’ouvrage. La première partie, com posée de cinq chapitres, est consacrée au réseau ecclé­

siastique antiochien de Théodoret. La seconde, incluant

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trois chapitres, s ’intéresse plus largement à la place de Théodoret dans les réseaux de patronage romains tardifs.

Le chapitre 1 expose en quelque sorte les éléments de base des relations entre clercs. Il repère un langage de l ’affection cléricale, fondée surtout sur les termes d ’ayarcq et de ^ ilia . Par parenthèse et d ’un point de vue purement formel, on se demande pourquoi l ’A. n ’utilise jamais dans son ouvrage les caractères grecs, mais opte pour une translittération, qui donne, dans ce cas,

agape

e t

philia.

L’A. s’interroge ensuite sur les signes d ’affinité doctrinale permettant de détecter les clercs adhérant à l ’école d ’Antioche. Comme les concepts théologiques sont peu explicités dans nombre d ’écrits, il juge qu’un bon signe d ’identification est souvent la référence à des docteurs de la foi tels que Diodore de Tarse et Théodore de Mopsueste. À juste titre, il prend ses distances envers les théories attribuant à telle école théologique des marqueurs dans le vocabulaire usuel. La pratique conjointe du grec et du syriaque au sein de l ’école d ’Antioche est bien relevée mais il faudrait davantage souligner que cette caractéristique a concerné plusieurs courants théologiques. D e même, il existe des stéréotypes révélant l ’intimité entre évêques, mais l ’A. souligne lui-même que de telles habitudes de langage renvoient à un univers beaucoup plus vaste que le réseau de Théodoret. U n élément plus tangible repose sur les visites épiscopales et les conciles, qui ancrent ce réseau dans une géographie et lui confèrent son assise institutionnelle. D e telles relations assurent une vraie familiarité aux relations entre les clercs, qui emploient de nombreuses personnes pour échanger leurs courriers mais aussi se surveiller.

Le chapitre 2 est consacré à la description du réseau de Théodoret vers 436. L’A. pourrait mieux préciser dès l’abord qu’il s’agit pour Théodoret de l’époque faste qui suit le premier concile d ’Ephèse (431) et précède sa condamnation (449). Il caractérise ce réseau comme un modèle antiochien de relations (« antiochene relational patterns »). Sa méthode quantitative lui suggère d ’inclure un individu dans ce réseau s ’il partage avec une autre personne au cours de plusieurs occasions (c’est- à-dire plus d’une fois) au moins trois des éléments définis au chapitre 1, dont au minimum un point de doctrine. L’A. établit d ’abord le réseau des évêques. On y distingue un premier cercle composé de Théodoret, Jean d’Antioche, Acacius de Bérée et André de Samosate : ce sont eux qui disposent du plus fort degré de « connectivité » (« connectivity » - un terme décidément à la mode), c ’est-à-dire des relations les plus nombreuses entre eux et avec les autres évêques. Le second cercle correspond à une région que l ’A. devrait décrire tout de suite comme le diocèse civil d ’Orient et ainsi le patriarcat d ’Antioche en voie de construction à cette époque (ainsi que le suggère la carte p. 54). Mais il est évident que son tableau des évêques (p. 44) est tributaire des écrits de Théodoret et ne saurait refléter objectivement l’état des relations épisco­

pales dans la région : quitte à dresser un schéma d ’apparence aussi scientifique, l ’A. pourrait le signaler plus clairement.

Le tableau des simples clercs et des moines confirme la géographie épiscopale et n ’apporte guère en lui-même.

Délaissant l ’approche purement quantitative, l’A. note que les relations avec ces personnages concernent surtout l ’appel à la charité ou la protestation publique et le recrutement comme prêtre ou évêque. Il décrit ensuite les relations avec les laïcs, qui constituent le tiers des correspondants de Théodoret. Mais leur évocation est peu pertinente dans cette première partie car les laïcs ne sont pas prioritairement intéressés par le réseau religieux antiochien.

Le chapitre 3 est dédié aux « racines du réseau », censées s’exprimer dans les vues de Théodoret sur l ’héritage légué par l’Eglise d’Antioche. L’A. recourt ici à titre principal à deux grands ouvrages du théologien,

l’Histoire ecclésiastique

et

l’Histoire des moines de Syrie.

Quant à la première de ces œuvres, il est dommage qu’il n ’utilise pas les deux volumes, parus en 2006 et 2009, de la traduction française de P. Canivet revue et annotée par J. Bouffartigue, A. Martin, L. Pietri et F. Thelamon. Il est intéressant de relever que Théodoret est sensible, s ’agissant du ive siècle, au défaut de primauté de l’Eglise d ’Antioche - surtout si l’on examine en regard sa rivale d’Alexandrie. L’A. nous gratifie encore de tableaux de réseaux au sujet des partisans et opposants de Meletius, évêque nicéen d’Antioche (360-381), qui fut exilé à trois reprises (p. 63). Il est vrai que cet épiscopat fut décisif pour l’affirmation du siège d’Antioche. Il est non moins patent que ce réseau mélétien incluait des maîtres à penser pour la génération de Théodoret, surtout, on l ’a dit, Diodore de Tarse et Théodore de Mopsueste (que notre théologien a défendus ensemble dans un opuscule spécial). Il est également à noter qu’Acacius de Bérée assure le lien entre les deux époques, lui qui mourut centenaire dans les années 430. Mais on peut estimer que l ’A. se livre ici à un long développement quelque peu plaqué sur son sujet car il porte sur une période assez nettement antérieure. Il en va de même du passage sur la tradition monastique, qui n ’est pas uniquement propre à l ’Eglise d ’Antioche. En revanche, la fin du chapitre est bienvenue car elle révèle la manière dont se forge une conscience locale : elle montre que Théodoret surestime la cohésion du clergé antiochien, si l ’on confronte ses écrits aux autres sources (Socrate, Sozomène, Pallade d’Hélénopolis). Cette tendance est surtout manifeste à propos de la chute de Jean Chrysostome (sur lequel l’A. aurait pu citer le livre de R. Brändle paru en 1999).

Le chapitre 4 s ’intéresse aux aspects qualitatifs du réseau antiochien au moment du premier concile d ’Ephèse (431) et de ses suites. À la veille du concile, le réseau se trouve dans une position de force surtout due à l ’élection de Nestorius au patriarcat de Constantinople en 428. Mais il est fortement identifié au Nord de la Syrie et au Sud de l ’A sie Mineure, et l ’A. exagère quelque peu sa puissance d ’attraction en Palestine et en Cappadoce. Le début du chapitre est consacré à un récit général estimable du concile de 431 et des négociations qui suivirent jusqu’en 435.

La fin du chapitre est plus originale car elle se consacre à des portraits contrastés d ’évêques du réseau antiochien pris dans la controverse nestorienne. Le v ieil Acacius de Bérée, évêque depuis 379, est qualifié de « père spirituel »

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et il joua en effet un important rôle de médiation. Rabbuia d ’Édesse est présenté com m e le type même du transfuge

defector

»), puisqu’il s ’agit d ’un Oriental ayant rejoint Cyrille d ’Alexandrie, mais un tel vocabulaire présuppose la cohésion du réseau - pourtant mise à l ’épreuve par bien des aspects lors de ces années. Jean d ’Antioche, en raison du siège qu’il occupe, fut porté à prendre la tête du réseau, mais il se signala par ses maladresses (« blunders »), lui qui fit déposer par la force certains de ses collègues. Face à un Jean d ’Antioche prompt à négocier avec le parti cyrillien se dressa un groupe de « confesseurs » emm enés par Alexandre de Hiérapolis. Enfin, quelques évêques, au premier rang desquels Helladius de Tarse et André de Samosate, furent portés à discuter avec les différents camps. L’A. en arrive enfin au rôle propre de Théodoret (p. 104-107), qui tenta une médiation entre Jean d ’Antioche et Alexandre de Hiérapolis, dont il faut souligner qu’ils étaient ses deux « supérieurs » puisque Cyr était un siège suffragant de la métropole de Hiérapolis. M ais au sein d ’un ouvrage d ’abord centré sur Théodoret, on aurait attendu une analyse plus serrée du rôle propre de l ’évêque de Cyr lors de cette période d ’intenses discussions. C ’est à une telle étude que s ’est justement livré récemment J.-N. Guinot

(Une contribution à l ’histoire de la crise nestorienne. La correspondance de Théodoret de Cyr,

dans R. Delmaire, J. D esm ulliez et P.-L. Gatier (dir.),

Correspondances. Documents pour l ’histoire de l ’Anti­

quité tardive,

Lyon, 2009, p. 437-459). M ais il est vrai que cet article date de 2009 et que, dans ce livre paru en 2011, l ’A. cite bien les travaux antérieurs de J.-N. Guinot sur l ’exégèse de Théodoret. Selon les termes de l ’A., la crise finit par se résoudre par la reconstitution d ’un nouveau réseau antiochien. La réconciliation fit une victime principale : Alexandre de Hiérapolis. D eu x tableaux (p. 95 et p. 108) montrent les stades successifs du réseau : au temps de la rupture avec Jean d ’Antioche puis à l ’époque de la réconciliation. L’épilogue de 435 convainc que l ’on a bien affaire à un réseau antiochien, ce dont les oppositions des années précédentes pouvaient faire douter. Le chapitre 4 démontre donc

a posteriori

la validité de la construction présentée de manière assez théorique au chapitre 2 : le réseau antiochien vers 436.

Le chapitre 5 s ’attache à préciser les caractères du réseau de Théodoret à son apogée puis les conditions de la chute de l ’évêque de Cyr. Comme l ’a montré J.-N. Guinot dans l ’étude précitée, la période comprise entre 435 et 448 est pauvre dans la correspondance de Théodoret. À l ’A. revient le mérite d ’avoir en particulier utilisé les documents conci­

liaires pour compenser ce manque. Il décrit la manière dont Théodoret a alors élargi son réseau. C ’est l ’époque de l ’accès à l ’épiscopat d ’Édesse d ’Ibas, qui sera associé à Théodoret de Cyr et à Théodore de M opsueste dans les

« Trois Chapitres » condamnés au VIe siècle. L’A. met bien en valeur le grand rôle joué par Ibas d ’Édesse dans la traduction en syriaque des œuvres de Théodoret, ce qui eut pour effet d ’enraciner son école religieuse dans un

terreau local. C ’est aussi le moment où Théodoret s ’attache tout spécialement à la personne de l ’ermite Jacques de Cyrrhestique, qu’il sollicita d ’abondance jusque pour des questions touchant à la fiscalité de sa cité. Si cette période voit justement la rédaction de

l ’Histoire des moines de Syrie,

c ’est aussi celle de l ’élaboration de

l ’Histoire ecclésiastique

et des œuvres théologiques de Théodoret (la

Défense de Diodore et Théodore

et

l’Éranistès).

La chronologie permet ainsi de m ieux comprendre l ’impor­

tance de tels écrits pour la cohésion du réseau antiochien - là encore affirmée par anticipation relativement abstraite au chapitre 3. À partir de 448, la documentation épistolaire redevient abondante et permet de déceler avec précision les circonstances de la chute de Théodoret. Ayant attaqué Eutychès dans

l ’Éranistès,

l ’évêque de Cyr se trouva dès lors pris dans un engrenage qui le dépassait. L’A. s ’accorde avec J.-N. Guinot pour décrire un Théodoret réduit aux appels au secours et aux tentatives de défense passive de sa propre orthodoxie. L’apport propre de l ’A. consiste en la description de ce qu’il appelle l ’effondrement (« collapse ») du réseau de Théodoret. U n tableau (p. 124) et une carte (p. 128) montrent b ien l ’ampleur des soutiens que le tout-puissant Dioscore d ’Alexandrie mobilisa face à lui dans le patriarcat d ’Antioche. Néanmoins, peu de partisans de Théodoret furent retournés par ses adversaires et il conserva un groupe de fidèles au sein de l ’épiscopat oriental. L’A. avance que le réseau s ’effondra en raison de l ’attaque extérieure subie, mais on peut estimer qu’il se maintint tout de même. Selon un processus inverse, la mort de Théodose II en 450 favorisa certes la réhabilitation de Théodoret, mais il bénéficia aussi alors sans doute de la permanence de ces soutiens.

La seconde partie est consacrée à la place de Théodoret dans les réseaux de patronage romains tardifs. Elle débute par le chapitre 6, qui cherche à préciser la position des évêques syriens face aux différentes formes possibles de patronage autour du Ve siècle. L’A. aurait dû commencer par une définition plus rigoureuse du patronage. Il recourt à la sociologie pour expliquer que le patronage repose sur un échange de faveurs et d ’actes de loyauté. Mais c ’était le moment d ’exposer la différence entre le patron du Haut-Empire, dont le rôle est codifié et reconnu par le pouvoir, et celui du Bas-Empire, qui se trouve bien davantage en porte-à-faux vis-à-vis de l ’administration.

L’A. passe trop vite sur l ’apport de Libanius dans son fameux discours

Sur les patronages

- d ’autant que ce texte concerne la Syrie du Nord. D e même, il renvoie rapidement aux études sur la “prolifération” des élites dans l ’Antiquité tardive. Or ce phénomène n ’est, là aussi, compréhensible que si l ’on mesure l ’évolution qui conduit du Haut-Empire au Bas-Empire : la bureaucratie s ’étoffe considérablement, de même bien sûr que la hiérarchie ecclésiastique. Quand l ’A. évoque les relations entre les évêques et les notables locaux (p. 138-141), on aurait également attendu davantage de précision, par exem ple au sujet des oxp^aonKof

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(qualifiés rapidement de « lawyers »). Lorsque l ’A. traite de la place des évêques syriens dans les « réseaux éducatifs » (p. 141-143), il devrait mentionner en particulier que le sophiste Isocasius était un païen endurci et qu’il fut avocat à Constantinople (avant d ’accéder à l ’éminente fonction de questeur du palais). Quitte à évoquer de façon générale les lettrés, il aurait pu remarquer que les évêques entre­

tiennent d ’intenses relations avec les représentants de la culture hellénique, dont Théodoret affirme par ailleurs qu’il faut se guérir. À propos des rapports entre les évêques et les fonctionnaires impériaux (p. 144-146), l ’A. pouvait au moins dresser un tableau plus précis de la hiérarchie de la cour, que la correspondance de Théodoret reflète avec beaucoup de détail. En ce qui concerne la position des évêques face à l ’armée (p. 146-148), il faudrait dire qu’Ariobindus était

magister militum,

définir ce titre et le distinguer de sa condition de propriétaire foncier sur le territoire de Cyr. Ce chapitre évoque enfin le rôle des évêques face aux « alternatives religieuses », terme qui renvoie aux païens, juifs et chrétiens hétérodoxes (p. 148-153). Il s ’agit, encore une fois, d ’un exposé bien général, qui aurait pu être avantageusement relié au réseau de Théodoret, dont cinq correspondants connus adhéraient par exem ple au polythéisme.

À la suite de cette vue d ’ensemble, le chapitre 7 étudie heureusement plus en profondeur un certain nombre de cas, sous le titre : « L’irremplaçable Théodoret : actes de patronage et stratégie sociale » (« The Irreaplaceable Theodoret: Patronage Performance and Social Strategy »).

L’A. affirme pour commencer que Théodoret a profité d ’un réseau qu’il a nettement accru lors de la controverse nestorienne : on peut en effet mesurer le grand nombre de ses correspondants laïcs qui furent des protagonistes de cette querelle - et dont certains se trouvèrent interpellés sur d ’autres sujets, surtout le gouvernement de l ’Euphra- tésie et les questions fiscales. À propos de ces dernières, particulièrement délicates à débrouiller, l ’A. ne s ’embar­

rasse pas des détails qui permettraient de les comprendre vraiment : il se limite à un bref paragraphe (p. 158) avant d ’y revenir sur une page environ (p. 168). Plutôt qu’au fond de l ’affaire, il s ’attache à la variété des personnes sollicitées par Théodoret : famille impériale, fonctionnaires, militaires, notables civiques, clercs. Selon l ’A., l ’évêque de Cyr dirigeait ainsi les acteurs d ’une sorte de pièce de théâtre, d ’où le recours au vocabulaire de la « performance », qui peut s ’appliquer aux représentations théâtrales et dont la sociologie a fait l ’un des éléments de la théorie des réseaux.

Mais, comme l’A. le remarque lui-même, on ne connaît pas le résultat final des malheurs fiscaux de la cité et l ’on ne peut exclure que Théodoret, en fait de metteur en scène, ait été le dindon de la farce ! Autrement dit, l ’évêque de Cyr est sans doute irremplaçable comme source littéraire mais peut-être moins comme acteur historique. Le recours à la

paideia

comme élément de persuasion et de distance sociale est traité de façon classique à la manière de P. Brown. Dans un

judicieux passage sur les risques d ’échec des interventions de Théodoret (p. 170-172), l ’A. aurait pu remarquer que l ’évêque de Cyr apparaît comme très subordonné à la cour impériale : il n ’ose aucune critique directe de l ’adminis­

tration et ne recourt aux laïcs en matière religieuse qu’en cas de danger pour lui-même. L’A. affirme que Théodoret a bâti un véritable réseau de patronage, ce qui a le mérite de poser un problème central. Il est incontestable que Théodoret fut un acteur de la controverse nestorienne et un protecteur pour les populations locales. Mais il est beaucoup plus discutable d ’en faire un patron dans tous les domaines : au contraire, les liens créés lors de la querelle théologique firent de lui un quémandeur systématique. L’ambivalence de ces relations avec les contemporains est illustrée par plusieurs tableaux de réseaux, qui offrent des exem ples de mobilisation de ses correspondants par Théodoret : l ’aide aux curiales chassés d ’Afrique par les Vandales (p. 167), la question fiscale (p. 168) et la controverse eutychienne (p. 177).

Ce dernier cas montrerait, selon l ’A., que le patronage exercé par Théodoret alla jusqu’à influencer l ’expression de sa théologie, ce que l ’ultime chapitre 8 examine sous le titre « Patronage, Human and Divine: The Social Dynam ics o f Theodoret’s Christology ». Notons que, com m e dans toute cette seconde partie, le terme de patronage est un peu réducteur car il n ’épuise pas toutes les relations sociales de Théodoret. L’A. se réclame ici de la linguistique cognitive, qui postule que les usages du langage influent sur sa structure. Comme il le reconnaît lui-même, les explications de ce type sont intrinsèquement spéculatives (« explanations o f this sort are inherently speculative », p. 181). Il tente pourtant deux rapprochements entre les caractères du réseau de Théodoret et sa doctrine chrétienne.

C ’est ainsi que la bienfaisance qualifierait à la fois D ieu et le patron terrestre. D e même, l

’Éranistès

expose que les deux natures du Christ font de lui un médiateur entre D ieu et l ’humanité, une métaphore que Théodoret aurait puisée dans sa propre expérience épiscopale. Fort heureusement, l ’A. ne recourt pas à une explication sociologique détermi­

niste de la religion : « Divinity is

not

[souligné par l ’A.]

a direct reflection o f social constructs » (p. 183). M ais on peut lui objecter le caractère artificiel de ces rapproche­

ments, fondés sur des notions si générales que l ’on pourrait par exem ple les utiliser dans un contexte païen. L’A. n ’est pas lui-même sans remarquer que la langue grecque use depuis longtemps des mêm es termes pour qualifier

les dieux

[c’est nous qui soulignons] et les patrons humains (p. 182).

La fin de son chapitre semble d ’autant plus mobiliser un modèle théorique qu’il s ’agit de sortir de ces apories.

L’A. introduit alors le concept de « resonance » (terme qui renvoie à l ’orchestre - après le théâtre) : il caractériserait la correspondance entre les signaux transmis par un réseau et la configuration du réseau lui-même. Il expliquerait la fidélité à sa doctrine des membres du réseau de Théodoret.

D e même, la « revulsion » et la « differentiation » s ’appli­

queraient à la répugnance des Cyrilliens à l ’égard de la

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christologie antiochienne. On se trouve ici proche de raison­

nements tautologiques, où les protagonistes s ’accordent parce qu’ils s’accordent, et s’opposent car ils s ’opposent.

On ne voit guère en quoi cet usage extrême de la théorie des réseaux sociaux apporte du neuf à la compréhension des querelles théologiques, dans lesquelles - on le sait depuis longtemps - les enjeux intellectuels et politiques se mêlent inextricablement.

U n bref épilogue est consacré à la position du réseau antiochien au concile de Chalcédoine (451). L’A. rappelle que la doctrine de Théodoret y fut approuvée, mais que son réseau se trouva divisé face à la nouvelle théologie officielle.

Il explique que le groupe étudié dans le livre fut intégré dans des réseaux plus vastes. Ce pouvait être l ’occasion de rappeler aussi que le concile fixa définitivement la place des patriarcats de Constantinople et d ’Antioche, ce qui eut des conséquences certaines sur le devenir des églises syriennes.

Il existe peu de bons livres sur Théodoret et cet ouvrage fait indubitablement partie de ceux qui méritent une audience. Il s ’agit d ’un travail estimable sur l’exis­

tence sociale de l ’évêque de Cyr - un thème qui a été moins abordé que d ’autres et qui est ici toujours judicieusement relié aux questions religieuses. Il contient nombre d ’appré­

ciables mises au point synthétiques. Mais il est permis de douter de la véritable utilité de l ’approche inspirée par la théorie des réseaux sociaux, dont il n ’est pas besoin de dire ce qu’elle doit à une mode actuelle. Elle conduit à un certain développement du quantitatif au détriment du qualitatif.

Elle comporte deux défauts, qui se trouvent encore bien plus marqués dans d ’autres ouvrages que dans celui-ci : des affirmations évidentes, des constructions artificielles ou trop générales. Elle se révèle finalement être une clé explicative trop schématique. Pourtant, l ’étude des réseaux fondée sur une prosopographie précise et systématique a montré sa fécondité. Mais elle a intérêt à couvrir un groupe le plus large possible. Dans le cas du réseau de Théodoret de Cyr, il y aurait ainsi avantage à le replacer au sein de l ’ensemble des élites laïques et ecclésiastiques de son temps.

Vincent Puech Université de Versailles Saint-Quentin

J. VizcainoSânchez,

La presencia bizantina en

Hispania

(siglos VI-VII). La documentación arqueológica,

Murcia, Universidad de Murcia, 2009 (Antigüedad y Cristianismo.

Monografias historicas sobre la antiguedad tardia, 24), 934 p. ISB N 978-84-8731-912-1.

D evo premettere di essere stato molto in dubbio nell’ac- cettare la proposta della redazione di Antiquité Tardive per una recensione del volume di Jaime Vizcaino Sanchez, giacché ho seguito fin dai suoi inizi l ’evolversi della ricerca da cui il libro trae origine e sono stato anche componente della commissione finale che ha valutato la monumentale

tesi dottorale che ne è stato il primo esito. Ho infine deciso di accettare perché penso di poter offrire ai lettori della rivista il punto di vista di un lettore particolarmente attento, che, per dovere professionale e per interesse specifico, ha letto più di una volta integralmente le quasi mille pagine di un lavoro che è, per molti versi, “d ’altri tempi”, per dimensioni, completezza, sistematicità e accuratezza nella trattazione.

Il contenuto di una monografia di queste dimensioni non è evidentemente sintetizzabile in poche righe, a meno di non ricorrere a una categoria di tipo enciclopedico: l ’aspirazione del lavoro - mi pare peraltro del tutto raggiunta - è infatti quella di offrire al lettore “tutto” quello che sappiamo, dal punto di vista archeologico, della breve storia della presenza bizantina in Spagna.

U n obiettivo di tal genere era al tempo stesso necessario e concretamente perseguibile. Obiettivo necessario, perché il tema della definizione del concetto di “presenza” o di

“dominazione” bizantina in Spagna (così com e in Italia e lungo la costa adriatica orientale o anche nella stessa Africa settentrionale) è così sfuggente che richiede di essere solida­

mente poggiato sulla analisi puntuale di tutte le evidenze archeologiche disponibili. Operando una paziente opera di raccolta dei materiali e una ancor più complessa opera di inserimento in contesti interpretativi solidi anche di tutti quei materiali - e sono purtroppo la stragrande m aggio­

ranza - che sono frutto di ricerche condotte in maniera più o meno approssimativa in anni in cui le tematiche proprie della tarda antichità erano semplicemente ignorate. Obiettivo perseguibile, perché la dimensione spazio-temporale della vicenda della

Hispania

bizantina (qualche decina di anni e una singola regione costiera) è sufficientemente limitata da consentire a un singolo studioso di arrivare a dominare per l ’appunto la sostanziale totalità delle tracce su cui costruire un paradigma interpretativo. Anche se, a ben guardare, proprio la limitatezza della dimensione spazio-temporale costituisce anche una difficoltà specifica, dal momento che in archeo­

logia è difficile “vedere” su tempi troppo brevi e su scale territoriali troppo piccole fenomeni complessi com e quelli della trasformazione delle città, del sistema insediativo delle campagne o del sistema economico in generale. Il pregio più grande, tra i molti, del libro di Jaime Vizcaino sta proprio nel non aver rinunciato a questa lettura complessiva, nel non essersi limitato a registrare nella loro oggettività monumenti, edifici, reperti e contesti, ma nell’aver comunque tentato di trasformarli in un sistema di tracce utili a ricostruire un quadro complessivo, a mio modo di vedere assai credibile.

Il volume si presenta con una articolazione “classica”, che se da un lato dichiara la sua derivazione da una tesi dottorale, dall’altro permette al lettore anche non specialista di seguire con chiarezza i passaggi del ragionamento dell’autore.

Diciassette capitoli (che a mio modo di vedere sarebbe stato utile raggruppare in almeno quattro sezioni chiaramente distinte) prendono in esame dapprima il contesto storico generale della vicenda della

Hispania

bizantina, quindi la sua dimensione territoriale, poi le testimonianze archeolo-

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