THE UNIVERSITY OF BRITISH COLUMBIA
Carnegie CorporationGrant for
French Canadian Studies
in
2010
withfunding from
University of British
Columbia
Librarylittp://www.archive.org/details/lettresdevoyageOObeau
DE VOYAGE
FRANCE — ITALIE — SICILE— MALTE
TUNISIE — ALGÉRIE— ESPAGNE
PAR
H. BEAUGRAIMO
MONTREAL
DES E'RESSES DE LA
PATRIE
18S9
Les
pagesqui suivent sontune
reproduction textuelle des Lettres de voyageque
j'ai adres- séesaujournalLa
Patrie, depuislemois d'oc- )1^tobre 1888 jusqu'au moisd'avril 1889. Elles forment
un
itinéraire plusou moins
régulier, d'unvoyage de
sixmoisque
j'ai fait en France, en Italie, en Sicile, à Malte, en Tunisie, en Algérie et enEspagne
;non
pasun voyage
d'études et d'observations, maisun
simplecongé de
repos et d'agrément. C'est assez direque
je n'ai pas eu la prétention d'écrire des lettres critiques, travailléesou même
sui- vies surune
foulede
choses intéressantesque
je n'aipu
observerque
bien superficiellement, en filant à toute vapeur, dans lespays du
midide
l'Europeetdansles provincesdu
nordde
l'Afrique. J'aisimplement
écrit à loisir età bâtonsrompus, sanssystème préconçu, lors-
que
les circonstancesme
le permettaient.J'ai raconté un
peu
ceque
j'aivu
etj'ai beau-\ coup
emprunté aux
écrivains qui ont publié des études sur les paysque
j'ai visités. J'aiconsulté tous lesguides qui
me
sonttombés
sous la main, maisjeme
suis toujours efforcé de rester dans les limitesde
la plus stricte vérité ;me
bornant souvent à faireune
sim- ple nomenclature deschoses intéressantesque
je voyais, sansme
permettre lamoindre
ap- préciation, de peur de jugermal ou
légère- ment.Ce
sontdonc de
simples notesde
voyage, rédigées à la hâte,que
j'envoyais àLa
Patrie, etje désireque
ces Lettres soient jugéescomme
telles.Il fautdire
que
lemauvais
étatde ma
santé m'aurait, d'ailleurs,empêché de me
livreràun
travail sérieux,
même
si j'en avais eu l'inten- tion.Maintenant, pourquoi,
me
dira-ton, publier ces Lettres de nouveau, puisqu'elles doivent être considéréescomme
ayant le caractèrede
simples correspondancesde
journal?Plusieurs
abonnés de La
Patrie m'ont de-mandé
la chose, et un q-randnombre
ontmême
souscrit d'avance à la publication ; et cela, spontanément, sur la simple lecture d'un paragraphe annonçantmon
intentionde
réunirmes
correspondances en volume.Avec
ces quelquesexplications, jelivremes
Lettres de voyage à l'indulgence
de
ceux qui auront la curiositéde
les lire,ou
la patiencede
les relire.PREMIÈRE LETTRE
A
bordditpaquebot ''LaBourgogne' Le Havre,
28 oct. 1888.Une
première lettre ne saurait être autre chose qu'une reditede
ceque
tous les voya- geurs allant enEurope
ont écrit avantmoi
;aussi ferai-je grâce
aux
lecteurs deLa
Patrie,du
récitde
notre départde
Montréal,de
notreembarquement
àNew- York
etde
notre installation à borddu
superbepaquebot
L^a Bourgogne,de
laCompagnie
Générale Trans- atlantique.Nous sommes
160 passagers depremière classe :
nombre
fort considérable à cette saison, alorsque
lestouristes reviennent plutôtd'Europe
qu'ils nes'y rendent. Ilsuffitcependant de faire une traversée sur l'un des
grands paquebots de la ligne française pour
comprendre
et pour apprécier la popularité dont elle jouit auprèsdu
publicvoyageur
américain.Nous
allons, si vous le voulez bien, causer un peudu
steamer sur lequel noussommes
en train de traverser l'Atlantique.
La Bour-
gogne est un navire de 7,200 tonneaux, avec une force de 8,000 chevaux-vapeur etune
vitesse
moyenne
de 18nœuds
rnarins àl'heure.Elle est de construction française,
comme
lesont d'ailleurs les trois autres grands paque- bots
du même
modèle, qui font le servicehebdomadaire
entreNew-York
et leHavre
:la
Champagne,
la Gascogne et la Bretagne.Comme
architecture navale,comme
vitesse,comme commodités d'aménagement,
ce sont sans contredit les plusbeaux
navires qui fas- sent le servicede l'Atlantique.Comme
nour- riture, service et confortable sous tous les rapports, la réputation de lacompagnie
est établie depuis longtemps, et je n'en parle icique
pour la forme. Il n'y a pas d'hôtel aumonde
où l'on puisse faire mieux, plus pro-prement
et pluspromptement. Et
je consi- dèrecomme
un devoir de le répéter àceux
qui se permettent de douter
que
la marinefrançaise et les marins français soientcapables
de
faire concurrence aumonde
entier. Il estprobablement
vraique
lescompagnies
fran- çaises sontmoins nombreuses que
lescompa-
o-nies anglaises, mais
pour
vousdonner une
idéede
ceque
sont quelques-unes des pre- mières, laissez-moi par exemple, vous direun mot
des servicesque
fait laCompagnie Géné-
rale Transatlantique et
du nombre
des navires qu'elle possède. C'estune
nomenclatureun peu
longue, mais il n'ya pas unCanadien
sur mille qui connaisse l'importance de cette compagnie, etje suis certainque
je vais éton- ner et intéresser les lecteursde La
Pah'ie en leurdonnant
ces détails.Voici
une
liste complètede
la flotte :LIGNE
DE
l'atlantiqueTonii. C/icv.
La Champagne
7.200 8,000La
Bretagne. 7>200 8,000La Bourgogne
7.200 8,000La Gascogne
7.200 8,000La Normandie
6,300 7,000Amérique
4.700 3.300France
4.700 3.300Labrador
4.70° 3-300TOHJI.
Canada
4-200Saint-Laurent 4.200
Saint-Germain
3700
Lafayette 3>6oo
Washington
3.600Olinde-Rodrigues »... 3,200
Saint-Simon 3,200
Ferdinand
de
Lesseps 2,90*0 Ville-de-Marseilles 2,900Colombie
2,900Ville-de-Bordeaux 2,800 Ville-de-St-Nazaire 2,800
Venezuela 950
Colombia 850
EN
CONSTRUCTIONLa
Touraine 9,000LIGNES DE LA
MEDITERRANEE Eugène
Pcreire 2,000Ville-de-Brest 2,800
Ville-dc-Tunis 1,850
Moïse
1,850Saint-Augustin 1,850
Isaac Péreire 1,850
Abd-cl-Kader
1,850Charles-Quint 1.950
CheiK 3.300 3.300 3.200 3.200 3,200 1,800 1,800 1,700 1,700 1,900 2,700 2,700
650
50012,000
3,000 2,700 2,000 2,000 2,000 2,000 2,000 2,000
LETTRES
DE VOYAGE
13Ville-de-Madrid Ville-de-Barcelone. . Ville-d'Oran..
Ville-de-Bone Ville-de-Naples. . .
Ville-de-
Rome
Kléber Guadeloupe
Martinique Désirade Afrique Ajaccio Bastia Corse Lou-CettoriMaréchal-Canrobert.
Malvina Manoubia
Ville-de-Tanger.. . Salvador
Saint-
Domineue.
. .SERVICES COTIERS
Le Morbihan La Vendée
Alice
Drao;ut c 575
Tonn.
,850 ,850 ,850 ,850 ,850 ,850 ,850 ,800 ,800
,250 ,250 ,250 ,250 ,250 ,250 ,250 ,000 ,000 ,000 ,000
,000 ,000
C/iev.
2,000 2,000 2,000 2,000 2,000 2,000 2,000 1,400 1,000 1,000 1,150 I.15O 1,150 1,150 1,150 1,150 1,150
750
750 700 700900
900
400
600
Toiw. Chev-
Mustapha-
ben-Ismaïl 575600
La
Valette 575600
STEAMERS-TRANSPORTS
Alexandre-Bixio 2,250 1,100
Flachat 2,250 1,100
Le
Châtelier 2,250 1,100Fournel 2,100 1,300
REMORQUEURS
République 275 500
Belle-Isle " 175 300
Soit : 64 paquebots de toutes les dimen- sions faisant le service de
New-York
etde
tous les ports des Antilles etdu
littoraldu
golfe
du
Mexique,de
tous les ports français, espagnols, algériens et tunisiens de laMédi-
terranée, et enfin le service côtier
du
nord etde l'ouest de la France en touchant en Angle- terre et en
Espagne.
Nous
ne croyons pas qu'il y ait aumonde
une
compagnie
maritime plus importante, et ce n'est pas la seulecompagnie
française qui lutte avec avantage, dans toutes lesmers du monde,
avec les paquebots des autres nations.Mais
revenons encoreun moment
à laJ>ouroognc pour vous dire
que
ce superbenavire a
une
longeur totale de 508 pieds 6 pouces, une largeurde
52 pieds 2 pouces etune
profondeur de 38 pieds 4 pouces. Ses cabinesde
1ère classepeuvent
loger329
pas-sagers, et elle peut en outre transporter, cou- cher et nourrir
60
passagers dedeuxième
et900
passagersd'entrepont;soit 1289 passagersde
toutes classes, sanscompter
l'équipage.Le
grand salon, lasallede
musique, le fumoir sont desmodèles
d'élégance et legrand
pont depromenade pour
les passagersde
première, n'a pas moinsde
492 piedsde
longueur.Ce
steamer a coûté $1,775,000, en chiffres ronds.Ajoutez à tout cela,
un commandant,
le capi- taine Frangeul, d'unegrande
expérience et d'une courtoisie sans bornes, et des officiers qui luttent tous d'attention etde
prévenance pour les voyageurs, et vous vous formerezune
assezbonne
idéedu
servicede
laCom-
pagnie Générale Transatlantique.
On
rencontre à bord toutun monde cosmo-
polite, mais
on remarque que
les Français, les Américains et lesEspagnols prédominent
sur les autres nationalités.Au
pointde vue
deslangues,on
est en pleine tour de Babel et Vil faut toujours parler,
comme
si l'on devait être compris de tout lemonde,
car il y a ungrand
nombre de
passagers qui parlent cou-ramment
l'anglais, le français, l'italien, l'espa- gnol et l'allemand.En
fumant un soir sur le gaillard d'arrière»j'ai fait la connaissance d'un brave
homme
qui m'a vivement intéressé enme
racontant les péripétiesde
la terrible catastrophe qui est arrivée au brigantin français le Medelin, sur les bancsde Terreneuve, dans la nuitdu
4au
5 octobre courant.
Le Medelin
venaitde
terminer sacampagne
depêche
et se prépa-rait à rentrer en
France
avecune
cargaison complète de morue, lorsqu'il a été coulé bas par le steamer anglaisQueai
de la ligne National.Le
grand steamer, courant à toute vitesse, frappa le brick français en plein milieu et lecoupa
en deux.Sur
vingt-cinqhommes
d'é- quipage, quatre seulement furent sauvés et c'est un des quatre survivants quime
racontala chose, des larmes dans la voix.
On com-
prend facilement ce qu'il y a de navrant et deterrible dans le désastre arrivé à ces pauvres marins, juste au
moment
oij ils faisaient voile pour la France, aprèsune campagne com-
mencée
sous d'heureux auspices.Combien
de mères et d'enfants, d'épouses et de sœurséplorées attendentenvainleretour
du
pêcheur qui devaitramener
l'aisance et le bien-être au foyer !Nous
entrons dans laManche
après avoirfait
une
traversée superbe pour la saison, car nous n'avons euque deux
joursde
grostemps
; ce qui ne nous a pasempêché
d'arri- ver auHavre
ledimanche
dans la matinée,comme
d'habitude, sans incidents remarqua- bles et surtout sans accidents.DEUXIÈME LETTRE
Hôtel Continental Paris, 2 nov. i
J'arrive à Paris en pleine excitation bou- langiste et tous les
journaux
s'occupentdu
grand banquet offert au général à la salleLowendahl
etdu
mariage de sa fille Marcelle avec le capitaine Driant,du
4e zouaves.On
ne parle
que du
général, et legouvernement semble
s'occuper de lui avecune
sollicitude toute paternelle.La
police amême
trouvémoyen de
s'occuperdu
mariage et tout s'est terminé,comme
on s'y attendait d'ailleurs, parune immense
manifestation en faveurde
l'ancien ministre
de
la guerre.Le Figaro
juge ainsi la situation :" Nous ne savons pas quel est lesortqui est réservé au ,t(éncral Boulanger, mais le député des trois départe-
ments serait bien difficile s'il ne considérait pas lajour- née de mardi commeune apothéose."
Je ne prétends pas juger ici qui a tort
ou
raison dans toute cette affaire, mais il est in-
discutable
que
la popularitédu
généralBou-
langer granditchaque
jour etqu'il est difficilede prévoir
comment
tout cela pourrait bienfinir.
En
attendant,on annonce que M.
Farcy,député de
la Seine, aurait l'intentionde
don- ner sa démissionde député
pour permettre au général Boulangerde
se présenterà Paris.J'ai eu le plaisir, en débarquant au
Havre de
trouverune dépêche de M. Léon Meu-
nier, ancien rédacteur en chef
du
Courrier desEtats-Unisde New-
York,qui habite main-tenant Paris, m'invitant à assister au ban- quet annuel
donné
par l'UnionFranco-Amé-
ricaine
pour
célébrer l'anniversaire de l'inau- gurationde
la statuede
la liberté àNew- York. Le
banquet a euun
grand succès.Environ
cent convives y ont pris part.L'amiral Jaurès, sénateur, présidait, ayant à sa droite
M.
Goblet, ministre des affairesétrangères et à sa gauche,
M.
Poubelle, pré-fet
de
la Seine.En
facedu
président, avaientpris place
M. MacLane,
ministre des Etats-Unis, ayant pour voisins
M.
Darlot, présidentdu
conseil municipal, etM. Georges
Berger, directeurde
l'exploitationde
l'Exposition universelle de 1889.On
remarquait parmi les convives la pré- sencede MM. Maze,
Rousselle, sénateurs;Poubelle, préfet de la Seine ; Claverie, direc- teur au ministère des affaires étrangères;
Robert, chef
du
cabinetdu
ministre des affai- res étrangères ; Vignaud, premier secrétairede
la légation des Etats-Unis; Chabrié, ad- ministrateur généraldéléguéde
laCompagnie
Transatlantique ; Visinet, agent
de
laCom-
pagnie des chemins
de
ferde
l'Ouest en Angleterre;Léon
Meunier, notre confrèredu
Courrier desEtats- Unis, organisateurdu
ban- quet; Bartholdi, Herbette, etune
foule d'au- tres notabilités politiques et littéraires.Au
dessert,M,
Jaurèss'est levé le premier, et aexprimé
tous les regrets deM. de
Les- seps, qui devait présider, et qui, absent en cemoment de
Paris, n'a pu, à songrand
re- gret, assister au banquet.C'est
M.
Goblct qui a parlé après le prési- dent. Portant d'abord la santéde M.
Cleve- land, président des Etats-Unis,M.
leministre des affaires étrangères ajoute : "On
ditque
la
France
est isolée parmi les nations ; laréunion d'aujourd'hui
prouve
le contraire : laFrance
a des amis dans lesdeux
mondes, et elle en a qui se souviennent encore, après unsiècle,
de
l'aide qu'elle leur adonnée
pour conquérir leur indépendance."M.
Goblet dit encoreque
l'Amérique sera largement représentée à l'Expositionde
1889, car son industrie ne craint pas d'êtrejugée.M. MacLane
arépondu
àM.
Goblet, parun
discours empreintdu
plus pur sentimentde sympathie pour
laFrance
et il a terminé en disant qu'il s'arrêtait, craignant de dire trop d'amabilités à la France, ce qu'unam-
bassadeur ne peut jamais faire sans danger.M. MacLane
boit au présidentde
laRé-
publique Française,M.
Carnot.Plusieurs autres discours sont prononcés et
il faut assister à ces fêtes
pour
se formerune
idéede
lasympathie
et de l'entente amicale qui existent entre lesgouvernements
deFrance
et des Etats-Unis. L'influenceamé-
ricaine se fait sentir d'ailleurs dans les cercles diplomatiques européens et le consul o-^néral américain à Paris, sur l'invitation
du
secré- taire d'État des Etats-Unis, aconvoqué
tousses collègues
de France
àune
réunion qui se tiendra le 15novembre
à Paris, et dans la-22 LETTRES
DE VOYAGE
quelle,
—
fait digne d'être relevé et imité,seront discutées toutes les questions qui inté- ressent les fonctions consulaires.
Le
servicegéographique de
l'armée fran- çaise, dirigé actuellement par le colonel Der- recagaix, successeurdu
général Perrier, exé- cute en cemoment,
de concert avec l'obser- vatoire royal de Greenwich,une
opération astronomiquede
haute précision des plus in- téressantes.Il s'agit
de
mesurer ànouveau
la différence de longitude entre Paris etGreenwich
en appliquant les nouvellesméthodes
d'enregis- trement des passages d'étoiles parl'électricité.Les commandants
Bassot eu Deforges, collaborateursdu
général Perrier et conti- nuateursde
son œuvre, représententlaFrance
dans cette opération, tandisque MM. Turner
et Lewis, astronomes, sont délégués par l'An- gleterre.
Ce
travail servira, paraît-il,de
vérification à lamesure
de la nouvelle méridiennede
P^rance entreprise par le général Perrier en 1870 et terminée cette année, ainsi qu'il en a été rendu compte, par lecommandant
Bassot auCongrès
international géodésique de Salz- bourg, en septembre dernier.J'ai eu l'honneurderencontrer hier, à dîner, chez
M.
Herbette, legrand astronome
fran- çais,M.
Jannsen, qui m'alonguement
causé de ses travaux et qui, malgré songrand
âge, prétend qu'il nemourra
pas sans aller visiter le Canada, cetteFrance
d'outremerque
tous les Français aiment tant.Mercredi
matin a eu lieu l'exécutionde
Mathelin,condamné
àmort
le 8septembre
dernier par la cour d'assisesde
la Seinepour
avoir assassiné au moisde
mars, à Esbly,M.
Cudin, surveillant
du
balayage municipal.On
avait pensé il y adeux
moisque
l'exé- cutionde
Mathelin n'aurait pas heu.Le
malheureux, en effet,était atteintde
phtisieet paraissait devoirsuccomber
rapidement.Mais
bientôt on constataque
lecondamné
exagé-rait
beaucoup
son état dans l'espoird'obtenirune commutation de
peine.Tout
s'est passé dans l'ordre ordinaire et j'ai refusé un permis spécialque Ton
m'avait offert pour assister à l'exécution. J'ai déjà vu guillotinerun homme
en 1867, et j'en ai eu assezde
ce spectacle sanglant.Le
corpsde
Mathelin a été transportéaussitôt après l'exé- cution, à l'Ecolede
médecine,où
quelques expériences ont eu lieu,La
tête portaitdeux
ecchymoses
profondes. Il est probable qu'aumoment
où il a été renversé sur la bascule sa tête a heurté la partie inférieure de la lunettede
la guillotine.La peau
de Mathelin était couverte de tatouages.Au
bras droit,on
remarquaitun
artilleur à cheval, au-dessus d'une trophéefait
avec
deux
canons en croix,comme
il y en avait autrefois sur les gibernes.Au
bras gauche,une
sériede femmes
à chignons très hauts. L'une d'ellemanie un
éventail. L'au- topsie a fait reconnaître, dans lepoumon,
les tuberculesdelaphtisiedontsouffrait Mathelin.La
journée d'hier, la Toussaint, avu comme
chaque
année, les cimetières parisiens s'emplir de visiteurs. Rarement, le ciel s'estmontré
plusmaussade
etmieux
enharmonie
avec lafunèbre solennité
du
premiernovembre. La
journée s'est passée sans soleil, presque sans lumière, dans une pluie lugubre qui semblait bien faite pour assombrir encore le tableau des pèlerinages annuels.
Le
chiffre des entrées dans les cimetières de Paris et de la banlieue qui, l'année der- nière, était de 350,000, esttombé
hier à188,000 environ.
Voici, pour
chaque
nécropole, lenombre
des visiteurs :35,000 personnes se sont rendues au Père- Lachaise ; 13,750
au
cimetièredu Nord
;20,000 à
Montparnasse;
18,990 au cimetièrede Saint-Ouen
(nouveau), vulgairement ap- peléCayenne
; 24,240au
cimetière d'Ivry- Parisien.Pour
les autres nécropoles, lenombre
des entrées sedécompose
ainsi : Ivry-Parisien (ancien), 10,110;Bagneux-
Parisien, 18,500;Pantin-Parisien 22,500 ; Clichy-Batignolles, 10,000; Bercy,
644
; Grenelle, 310; Vaugi- rard, 1,300; Passy, 1,570; Auteuil, 550;Montmartre
(rue Saint-Vincent), 500 ;Mont-
martre (Saint- Pierre),450
;La
Chapelle, 3,000;La
Villette, 1,200; Charonne, 120;Belleville, 2,300 ; Saint-Ouen (ancien), 2,950.
Le
terrible accident arrivé prèsde
Tara-nowka
au train dans lequel se trouvaient l'empereur et l'impératricede
Russie a causé dans toutes les capitalesde
l'Europe une très vive émotion.Pour
ne parlerque
de Paris, le présidentde
la Républic^ue a adressé hier au tzaruntélégramme
defélicitationsà l'occa- siondu danger
qu'il a couru ; à l'HôtelCon-
tinental de
nombreux
visiteurs sont venusi
offrir leurs compliments au grand-duc Alexis;
à l'ambassade de Russie il y aeu
une
véritable avalanche de cartes et de lettres des princi-paux
personnages politiques : le présidentdu
conseil, leprésident
de
la chambre,le général, etc.A
midi, à l'église russede
la rue Daru, on a célébréune messe
d'actionsde
grâces pour la préservation de l'empereur et de l'im- pératrice.Enfin, le
gouvernement
français a chargéM. de
Laboulaye, son ambassadeur, d'expri-mer
sesfélicitations augouvernement du
tzar.LETTRES DE
VOYAGE
2TROISIÈME LETTRE
Paris, 9 nov. i
Rien ne frappe plus
vivement
l'étrangerqui visite Paris,que
l'extrême propreté des rues, desavenues
et des boulevards de lagrande
capitale.
Même
à cetteépoque de
l'annéeoù
les pluies sont fréquentes, et où l'on patauge dans les rues
de
notrebonne
villede Mont-
réal, Paris fait sa toilette tous les jours
pour
conserver sa réputation d'être la ville la plus propredu monde.
Jeme
suisdemandé
par quelsystème on
arrivait à cette perfection et je suis alléaux
renseignements, croyantque
cela intéresserait les lecteurs
de La
Patrie etque
ces détails pourraienttomber
sous lesyeux de mon ami
Michel Laurent, présidentdu Comité
des chemins à Montréal.On
va voirque
c'est touteune
histoire qui vaudrait bien la peine d'être mise à l'étude par notreconseil municipal.
Le
balayage des ruesde
Paris se fait pendant la nuit et la surface à balayer estde
11,800,000 mètres.Le
person- nel chargé de cetimportant service, lequel est recrutéuniquement
parmi les citoyens fran- çais, secompose comme
il suit : 35 cantonniers surveillantspayés
à raisonde
30 dollars par mois; 86 cantonniers chefsde
première classe à 35 dollars; 74 cantonnierschefsdedeuxième
classe à 24 dollars.
Quant ^ux
cantonniers ordinaires, les balayeursproprement
dit, ilssont au
nombre de 620
seulement, ayantune
rétribution
de
21 dollars, sur lesquelschaque
mois il leur est retenu, àeux comme
àchacun de
leurs chefs hiérarchiques,une somme de un
dollar,
déposée
à la caisse d'épargne par les soins de l'administration.Ce
dépôt constitue pour leurs vieux jours leur seul et uniqueretraite.
Indépendamment de
ce personnelfixe, il en est un autre mobile
composé de
balayeurs auxiliaires.La moyenne prévue
pour la périodede
1889 à 1893, en dehors des surcroîts occasionnés par les neiges et les glaces, estde
1,100, travaillant la journée complète à raisonde
64 cents etde
1,085 "^faisant
que
la demi-journée. Il y a,de
plus,600 femmes
payées 42 cents.Et pour
cemaigre salaire, durant lo heures par jour, balayeurset balayeuses,
de
4 heuresdu
matin à 1 1 heures etde
2 heuresdu
soirà 5 heures, doivent pousser qui la raclette, qui le balaide
bouleau, qui la brosse en piazzava et livrerau Parisien exigeant prèsde
12,000,000 mètresexempt de
touteimmondice
!Nous sommes
loindu temps
où le soin d'enlever lesimmondices amassés
dans les rues des grandes villes étaitabandonné
à des troupesde
chiens errantsou même de
porcs qui venaient la nuit dévorer les charoo-nes et les détritusde
toutes sortesque
les habitants jetaientchaque
^soir devant leurs maisons, ainsi qu'il est encore fait dans quelques gran- des villes de l'Orient. Aujourd'hui, le ba- layage a fait des progrès, il est régipar la loi.Le
riverain n'est plus tenu,comme
il y a encore quinze ans, de bala)'er et faire balayer la partiedu
trottoirou de
la rue qui lui in-combe,
mais il est tenude
payer. "A
partirde
sapromulgation, ditla loidu
26mars
1873,la charge qui
incombe aux
propriétaires rive- rains des voiesde
Paris livrées àla circulation publique,de
balayer, chacun au droit de sa façade, surune
largeur égale à celle de lamoitié des dites voies et ne
pouvant
toutefoisexcéder six mètres, est et
demeure
convertie enune
taxe municipale obligatoire, payable en numéraire, suivant un tarif délibéré en conseil municipal, après enquête etapprouvé
parun
décret rendu dans laforme
des règle-ments
d'administration publique, tarif qui devra être revisé tous les cinq ans."Les
voies dechaque
arrondissement sont divisées en huit catégories subdiviséeschacune
en trois classes.Dans une même
catégorie, la gra- duationdu
tarif tient à ceque
la rue est plusou
moins fréquentée ; dansune même
classe,elle varie suivant la nature des constructions en bordure.
La
taxe rappprte à la ville en- viron 2,700,000 francs, tandisque
lesdépenses de balayage en personnes et en matériel lui coûtent prèsde
7,000,000.J'ai eu la
bonne
fortune d'assister au dînerque
donnait la Société d'alliance latine\Alouette au
Rocher de
Cancale,pour
fêter ledixième anniversaire de sa fondation par Xavier de Ricard et
Edmond
Thiaudière.Le
président,
M.
Victor Tissot, étant Suisse, leshonneurs de la soirée ont été naturellement pour l'Helvétie, "qui réalise déjà l'alliance latine dans ce qu'elle
semble
avoirde
plusdifficile aujourd'hui, a dit
M.
Thiaudière, puis-qu'en sonsein viventen paix l'élémentfrançais et l'élément italien, et qui
ébauche même
lesEtats-Unis
d'Europe
puisqu'elle joint à cesdeux
éléments un élémentgermanique
assez considérable."Rappelons que
le premierdînerde
\Alouette fut présidé le 3juillet 1878, par Viollet-Leduc, etque
les autres dîners l'ont été depuis parun
certainnombre d'hommes
très éminents, tels
que
Frédéric Mistral, Emilio Castelar, Ruiz Zorrilla, le général Tiirr, Frédéric Passy.Ces
dîners anniversaires sont très o-ais et très intéressants, car l'on y rencontre les per- sonnalités politiques et littéraires les plus envue de
Paris.Le grand
sculpteur Bartholdique
tout lemonde
connaît au moins denom au
Canada, m'a fait l'honneurde
m'inviter au dînerde
la société laMarmite,
qui aura lieu à l'hôtel Continental le 16novembre
courant.M.
Goblet, ministre des affaires étrangères, tiendra le fauteuil de la présidence. C'est assezvous
dire l'importancede
cette réunion.Je vois par lesjournaux canadiens
que
l'on s'estoccupé de M.
Pasteur, à Montréal, et iios compatriotes apprendrontprobablement
avec intérêtque
la datede
l'inauguration del'Institut Pasteur est définiment fixée au 14
novembre. Le
présidentde
laRépublique
a promis àM.
Pasteurde
présider cette céré-monie
à laquelle assisteront également les présidentsdu
Sénat etde
laChambre, M.
Goblet,
un
certainnombre
demembres du
Parlement, de l'Institut, etde
diverses socié- tés savantes. Etantdonné
l'exiofuitéde
la salle dans laquelle doit se faire l'inauguration, lenombre
des invitations sera très restreint.Les
préparatifs et la construction des bâti-ments
pour l'Expositionde
1889, se poursui- vent avec vigueur et tout fait prévoirun
succès sans précédent. Bienque
lesmonarchies européennes aient trouvébon de
ne pas pren- dre une part officielle à cegrand
concours universel, les peuples qui pensent, qui inven- tent et qui travaillent pour nourrir ces frelonsque
l'onnomme
des rois, se sont organisés, et toutes les Nations seront représentées auChamp de Mars —
je dis toutes,—
leCanada
excepté. Il paraît
que
si nos gouvernants ont été trop aveuglespour comprendre
lesavantages d'une représentation officielle, nos industriels n'ont pas été assez entreprenants pour passer outre et agir
eux-mêmes. Tant
pis pour le Canada.
Il faut suivre les journaux quotidiens fran-
çais
pour
bien sefaireune
idéedes sentiments qui existent enFrance
enversrAllemagne
etdes tracasseries journalières
que
le gouverne-ment de
Berlin suscite à tout ce qui est français.C'est vraiment à n'y pas croire, et l'on se
demande comment
ungouvernement
qui se respecte et qui prétendmarcher
à la tête dela civilisation
moderne,
peut descendre à ce rôle demouchard
provocateurque
joueM.
de Bismarck
vis-à-visde
la France.Le Matm
publie cependantune dépêche de Vienne
qui semblerait comfirmer lesbruits d'après lesquelsM. de Bismarck
prépare saretraite définitive :
—
"Dans peu de
mois, peut-être dans quelques semaines,M. de
Bis-marck
laissera son poste de ministre desaffaires étrangères à son fils, et, à ce
moment
les autres postes occupés actuellement par le chancelier seront distribués à quelques per- sonnes dont le choix n'est pas encore arrêté définitivement." Cette nouvelle, dit le cor- respondant
du
Matin, a été lancéepour
ainsidire par
M.
de Bismarck lui-même.En
effet,le
comte
de Moltke, en parlant ces jours derniers au général Bronsartde
Schellendorlf, lui a dit:"Je
viens de recevoirune
lettrede M.
de Bismarck; ilm'annonce que
sa santé exige absolument qu'il se retire bientôt et qu'il ne peut plus supporter les lourdes charo-esde
la chancellerie."Les
nouvelles des élections présidentielles des Etats-Unis ontému vivement
la colonie américaine de Paris, et il fallait voir l'excita- tion qui régnaitaux
abords desbureaux du New- York Herald
et dans les grands hôtels.C'était à se croireà
New- York ou
à Chicago.On
s'attendait généralement iciàlaréélection deM.
Cleveland, mais personne ne paraît avoir été surpris outremesure de
l'électiondu
général Harrison.Je partirai avec
ma
famillepour
le midide
la
France
où nous irons visiter notrecompa-
triote Chartrand, lieutenant
de Zouaves
et professeur àl'école militairedeSt.Hyppolyte-
du-Fort.Les
lecteursde
la Patrie savent déjàque M.
Chartrand écrit dans la Patrie souslepseudonyme
de Chs. des Ecorres, etjeme
fais une fête d'aller lui présenter les cor- diales amitiésde
tous ceux qui ont suivi avec tant d'intérêt et de sympathie sa carrière mi-litaire et littéraire.
, Il n'y a riendebien
nouveau
danslemonde
des théâtres et la présence de Coquelin et
de
Jane Hading, à Montréal, vous a placés, pen- dant quelques jours au moins, sur un pied deealité avecla scène parisienne.
L'Académie
française a fixé au jeudi, 13 décembre, la réceptiondu comte
d'Hausson-ville. C'est
M.
Bertrand, secrétaire perpétuelde
l'Académie des sciences, qui recevra le récipiendaire. D'autre part l'Académie a arrêté leprogramme de
sa séance publiqueannuelle qui aura lieu le 15 courant.
M.
Camille Doucet, secrétaire perpétuel, fera le rapport d'usage sur les concours littéraires
de
1888.M.
Sully-Prud'homme
prononcera l'é- loge des prixde
vertu, et, entre deux,M.
Ludovic Halévy
lira un fragmentdu
discours qui a remporté le, prix d'éloquence : XEloge de Balzac. Enfin l'Académie a décidéque
lejeudi, 22 novembre,elleprocéderait àl'élec- tion d'un
membre
enremplacement de M.
N
isard.Quelques
livresnouveaux
:V: Illustration
commence
aujourd'hui la pu- blicationdu roman que
vientde
terminerGeorges Ohnet
et qui a pourtitre le DocteurRameau.
Demain
paraît levolume
si curieux et siremarquable
du comte d'Osmond
: Reliques etImpressions.
Enfin, le
nouveau volume de M.
PaulDé-
roulède, Refrains militaires,
que
lamaison Caïman
va publier dans quelques jours, con- tiendra à sa premièrepage une
dédicace des plus touchantes.La
voici :Ce livre où pleure ma souffrance,
Où
chante aussi l'espoir dont mon cœur bat, Je le dédieau cherpetit soldatQui, le premier, dans le i^remier combat, Aura versé sonsang pour notre France.
C'est un patriotique
mot de
la fin.QUATRIÈME LETTRE
Paris, i6 nov. i
Comme
la politiquechôme
et qu'il n'y a actuellement rien d'absolumentnouveau
au pointde vue
de l'art,du
théâtre etde
la litté- rature,jeme
suis remis à revisiter Paris et à étudier son histoire. J'ai consulté les guides et j'ai rafraîchima mémoire
surune
foulede
détails
que
j'avais àpeu
près oubliés. Si vousle voulez bien je vais vous faire part de
mes
recherches. Je suis certain d'avance
que
tous les lecteurs de la Patrie prendront plaisir àse renseigner sur tout ce qui touche à lagrande
capitale.
La
population de Paris était au dernier re-censement, en 1886,
de
2,344,550 habitants, plus de dix fois la population actuellede
Montréal. Paris est situé par48°
50' de lati-tude nordeto''
de
longitudede son propremé-
ridien (2° 21'
de
Greenwich) sur la Seine qui la traversedu
sud-ouest au nord-ouest, en décrivantune
fortecourbevers le nord. C'est le centre d'un bassin tertiaireoù
apparaissentla formation crétacée et des alluvions quater- naires.
Les
bords de ce bassin,que
la ville afini par couvrir, n'atteignent pas plus de
300
pieds au-dessusdu
niveaudu
fleuve et400
au-dessusdu
niveaude
la mer.Les
princi- pales hauteurs sont, encommençant
par l'est, cellesde
Charonne, Ménilmontant, Belleville, la Villette etMontmartre
sur la rive droite;et celles
de
la Maison-Blanche, la Butte-aux- Cailles etSainte-Geneviève surlarive o-auche.La
Seine adeux
îles importantes, dans son parcours à l'intérieur de la ville qui est d'en- viron 1 1 kilomètres : l'île Saint-Louis etde
la Cité, forméesde
la réunion de plusieurs îlots.La
ville se divise endeux
parties princi- pales : la rive droite et la rive gauche, à laquelle se rattachent la Cité et l'île Saint- Louis.Les
distinctions entre le vieux Paris, les faubourgs et lescommunes
annexées ne sont plus guère sensibles depuis les grandes transformations des 30 dernières années, qui ont fait disparaître une partie des anciennes rues, prolongé les grandes artères jusqu'auxfortifications et fait élever sur tous les points de grandes et bdles constructions.
Le
centre a seulementplusd'édifices etplus d'animation.Au
delà des grands boulevards sont les an- ciens faubourgs dont lesnoms
se conservent encore dansceux
des rues principales rayon- nant vers l'extérieur.Les
plus importants sur la rive droite, sont,de
l'Est à l'Ouest, lesfaubourgs
SL
Antoine,du
Teinple, St. Martin, St. Denis, Poissonnière,Montmartre,
et St.Honoré.
Ceux de
la rivegauche
sontmoins
connus, sauf le faubourg St.Germain
quifait depuis
longtemps
partiede
la ville vieille.Les
faubourgsSt.Antoine
etdu Temple
sont particulièrement occupés par des établisse-ments
industriels, le premierfabricant surtout desmeubles
et tout ce qui a rapportau mobi-lier; le second ces milliersd'objetsdefantaisie dits articles de Paris : orfèvrerie, bijouterie fine
ou
fausse, éventails, tabletterie, maroqui-nerie, bimbeloterie, papeterie
de
luxe, etc.Les
petites industriespouvant
s'exercer enchambre
pénètrentmême de
ce côté dans la vieille villeoù
sont les magasin:.Les
faubouriisSt. Martin, St. Denis etPois- sonnière sont pluscommerçants
qu'industriels :ils font le
commerce
en gros et l'exportation.tandis
que
les parties voisinesdu
centre ont plutôt pour spécialité le détaîl et les autres articlesde
luxe,surtout lesgrands boulevards, avec leurs splendides magasins, et les autres rues principalesde
ce côté.Le
faubourg Montmartre, les quartiersde
la Bourse, de l'Opéra etdu
Palais-Royal sont les parties dela ville préférées par les établissements finan- ciers et ils réunissent en outre les grands et les petits hôtels et tout ce qui est nécessaire pour recevoir et distraire les étrangers.
Le
faubourgSt.
Honoré
etlequartierdesChamps-
Elysées sont occupés par les résidencesde
l'aristocratie de l'argent, et le faubourg St.
Germain
par ce qui reste encore de la vieille noblesse, les ministères et les ambassades.Le
quartier latin,ou
des Ecoles, qui l'avoisine à l'Est, est,comme
sonnom
l'indique assez, le siège de l'Université et d'une grande partie des établissements scientifiques de la ville.Là
aussi sontlaplupartdes grandeslibrairies.Paris, au point de
vue
administratif, est di- visé en 20 arrondissemants, ayant chacun leur mairie, quoiqu'il n'y ait qu'un seul conseil municipal ayant pour chefdirect le Préfet dela Seine, qui est
nommé
par legouvernement
central.
Les
fortifications de Paris ont étél'Angleterre dont les travaux d'installation sontlissez avancés pour
que
lemontage
des machines puissecommencer
le premier jan-vier 1889.
On
voit par ces renseignementsque
les travauxde
l'exposition sont plutôt enavance
qu'en retard, si bienque M.
Berger s'occupe déjàde
l'organisation etdu
fonc- tionnementdu
servicede
la manutentionintérieure.
Je ne vous dirai rien
du grand
procès qui passionne aujourd'hui Paris, au sujet d'unfameux
coquinnommé Prado
qui a assassiné sa maîtresse après avoircommis
d'innombra- bles filouteries.Ces
histoiresde
cour d'assi- ses se ressemblent toutes, dans tous lespays du monde,
et les criminels finissent générale-ment
sur l'échafaud, quelque soit d'ailleurs legenre
de
supplice qu'on leur inflige. Prado,lui, sera guillotiné.
Une
feuille italiennedonne un
relevé assez curieux: c'est le chiffre des troupesde
toutes nationalités qui ontpassé parle canal deSuez
dans les trois dernières années, par suitede
l'expédition anglaise au Soudan,
de
l'occupa-tion française
du Tonkin
et des expéditions ii-alicnnesàMassouah
et en Abyssinie. 206,- 716 soldats ont franchi l'isthmede Suez
dansla période 1886-87 dont 102,692 Anglais, 101,217 Français, 37,936 Italiens et 20,144 Turcs. C'est ce qu'on appelle
une
voie paci- fique.L'inaueuration de l'Institut Pasteur a eu
lieujeudi,
comme
jevousl'avaisannoncé
dansma
dernière lettre en présencedu
présidentde
la République, des présidentsdu
Sénat etde
laChambre
des députés, des ministresde
la guerre,
de
l'intérieur,de
l'instruction publi- que,des finances etdu commerce,
des grands- ducsde
Russie et d'ungrand nombre de membres
de l'Institut,de
l'Académie fi'an- çaise,de
l'Académiede
médecine, des Fa- cultés et autres centres d'enseignement.Tout
lemonde
arendujusticeaux
merveil- leuxrésultats obtenus par legrand
savant, qui est trop bienconnu
auCanada pour
qu'ilme
soitnécessaire
de
faire ici l'historiquede
ses découvertes.LETTRES
DE VOYAGE
4Iconstruites en vertu d'une loi
de
1840, dans l'espacede
trois ans, et elles ont coûté alors 140 millions de francs. Elles secomposent
d'une enceinte continuede
34 kilomètresde
développement, renforcéede
94 bastionsde
30 pieds de hauteur, avecun
fossé de 48 piedsde
largeur, avec un glacis ; puis,de
1forts avancés qui forment autour
de
la villeune seconde enceinte, à différentes distances.
La
plupartde
ces forts ont été détruits dansles sièges
de
1870-71, maison
les a recons- truits depuis. Enfinune
troisième enceinteen- core pluséloignée, secompose de
19nouveaux
forts construits depuis la guerre.
Le
servicede
la police est parfaitement réglé à Paris et l'étranger y est en parfaite sûreté à toutes lesheures
du
jour etde
la nuit, à la condition élémentairede
ne pas se laisserduper
etde
ne pas se placersoi-même
entre les mains desfilous et des malfaiteurs qui existent ici