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Le transfert des compétences en gestion des ressources naturelles aux communes rurales de la région de Kita (MALI). <br />D'un encadrement étatique intégré à des logiques d'acteurs locaux.

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Texte intégral

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HAL Id: tel-00353162

https://tel.archives-ouvertes.fr/tel-00353162

Submitted on 14 Jan 2009

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Le transfert des compétences en gestion des ressources naturelles aux communes rurales de la région de Kita

(MALI). D’un encadrement étatique intégré à des logiques d’acteurs locaux.

Eric Idelman

To cite this version:

Eric Idelman. Le transfert des compétences en gestion des ressources naturelles aux communes rurales de la région de Kita (MALI). D’un encadrement étatique intégré à des logiques d’acteurs locaux..

Géographie. Université de Nanterre - Paris X, 2008. Français. �tel-00353162�

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UNIVERSITE PARIS OUEST – NANTERRE - LA DEFENSE

ECOLE DOCTORALE MILIEUX, CULTURES ET SOCIETES DU PASSE ET DU PRESENT

N° attribué par la bibliothèque :

THESE

pour obtenir le grade de

DOCTEUR DE L'UNIVERSITE PARIS OUEST NANTERRE - LA DEFENSE Discipline : Géographie humaine, économique et régionale

présentée et soutenue publiquement par Eric IDELMAN

Décembre 2008

Titre :

Le transfert des compétences en gestion des ressources naturelles aux communes rurales de la région de Kita (MALI).

D’un encadrement étatique intégré à des logiques d’acteurs locaux.

Directeur de thèse :

Monsieur Jérôme MARIE, Professeur à l'Université de Paris X

JURY :

Madame Monique BERTRAND, Directrice de recherche à l’I.R.D., Monsieur Alain DUBRESSON, Professeur à l’Université de Paris X,

Monsieur Alain ROCHEGUDE, Professeur à l'Université de Paris I, Monsieur Olivier BARRIERE, chercheur à l’I.R.D.

TOME 1

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UNIVERSITE PARIS OUEST – NANTERRE - LA DEFENSE

ECOLE DOCTORALE MILIEUX, CULTURES ET SOCIETES DU PASSE ET DU PRESENT

N° attribué par la bibliothèque :

THESE

pour obtenir le grade de

DOCTEUR DE L'UNIVERSITE PARIS OUEST NANTERRE - LA DEFENSE Discipline : Géographie humaine, économique et régionale

présentée et soutenue publiquement par Eric IDELMAN

Décembre 2008

Titre :

Le transfert des compétences en gestion des ressources naturelles aux communes rurales de la région de Kita (MALI).

D’un encadrement étatique intégré à des logiques d’acteurs locaux.

Directeur de thèse :

Monsieur Jérôme MARIE, Professeur à l'Université de Paris X

JURY :

Madame Monique BERTRAND, Directrice de recherche à l’I.R.D., Monsieur Alain DUBRESSON, Professeur à l’Université de Paris X,

Monsieur Alain ROCHEGUDE, Professeur à l'Université de Paris I, Monsieur Olivier BARRIERE, chercheur à l’I.R.D.

TOME 1

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Mots-clé : décentralisation, gestion des ressources naturelles, transfert de compétences, foncier, encadrements, communes rurales, coton, CMDT, Kita, Mali, malinké.

Résumé :

Le Cercle administratif de Kita, région malinkée située à deux cent kilomètres à l’Ouest de Bamako, est demeuré longtemps très enclavé, et, jusque dans les années 1970, les différentes interventions étatiques n’ont eu que peu d’impacts sur la population rurale. De ce fait, le dualisme entre les deux systèmes d’encadrement : l’un étatique, donc officiel, et l’autre, paysan, mais constituant la référence des ruraux, est demeuré particulièrement fort dans la région de Kita.

Ce sont les Opérations de Développement Rural, arachidières jusqu’en 1995, puis surtout cotonnières, qui ont encadré les producteurs et leur ont apporté les moyens de production modernes permettant les cultures commerciales. Parallèlement, les années 1980, et surtout 1990, ont vu l’émergence de nouveaux pouvoirs locaux issus de « projets » de « gestion de terroirs villageois », mais qui n’ont guère bouleversé les encadrements paysans.

A la fin des années 1990, la décentralisation territoriale, par la création des collectivités locales dont les communes constituent le maillon de base, fait émerger dans le milieu rural un nouveau pouvoir : les élus locaux. Ce contrepouvoir élu doit se faire une place au sein du dispositif déconcentré déjà établi et surtout, ne peut exister que par le transfert des pouvoirs de gestion détenus par les encadrements paysans. C’est tout l’enjeu de la réussite de la réforme de décentralisation, déterminée par son degré d’appropriation par les ruraux, lui-même dépendant des modalités de ce double transfert de compétences, dont l’objet clé semble être le pouvoir de gérer le foncier et les autres ressources naturelles.

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Key words: decentralization, natural resources management, competences transfers, land tenure, people circles, rural communes, cotton, CMDT, Kita, Mali, Malinke.

Summary:

The administrative Kita region in Malinke area, located at about two hundred kilometres west from Bamako, had been isolated for a long time. Until the 1970s, the State influence and impacts on the rural people remained few. Therefore, the dualism between the two circle systems, the static one, “so official”, and the traditional one with reference to rural people, has remained particularly strong in this region.

The operations of the Rural Development Organisations, initially groundnut based until 1995 and which later became predominantly cotton-based to date, had helped to gathered the farmers and provided them with the modern means of production to increase commercial cultures. During the 1980s and especially in the 1990s, we saw the emergence of new local government powers, on issues of “projets de gestion de terroirs”, but which did not have any significant change in the traditional areas.

At the end of the 1990s, the decentralization reform, through the creation of the rural communes, has generated a new power: the locally elected people. The elected have had to make a place between the static power and the traditional power, through the competences transfers from both circles. Here is the stake of the success of the decentralization reform, which is shortly linked to its degree of appropriation by rural people. The land tenure and the natural resources seem to be the key elements of the double competences transfer, and then of the success of the whole decentralization reform.

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REMERCIEMENTS

Sur le plan personnel, je remercie tous mes proches et en particulier ma mère pour son éternel appui, mon père qui m’a toujours incité à réaliser une thèse de doctorat et ma femme, Aminata, sans le soutien constant de qui cette entreprise n’aurait certainement pas pu être menée à bien.

Sur le plan professionnel, je tiens particulièrement à remercier ceux qui ont bien voulu croire en moi depuis le début de ce projet de recherche, à commencer par mon directeur de thèse, Monsieur Jérôme MARIE, Professeur à l’Université de Paris X, qui m’a rendu visite à Kita dès janvier 2002 ainsi qu’à Monsieur André TEYSSIER, chercheur au CIRAD TERA, et Monsieur Alain ROCHEGUDE, Professeur à l’Université de Paris I pour leurs conseils avisés.

Un tel travail, même s'il est signé d'un seul auteur est toujours en réalité un ouvrage collectif. Je tiens donc à remercier tous ceux qui, de près ou de loin, d’une manière ou d’une autre, m’ont apporté leur concours, ouvert des voies de recherche ou simplement facilité mon travail, apportant ainsi leur pierre à l’édifice.

La liste ne peut pas être exhaustive, mais je cite tout de même :

mes collègues au sein de l’équipe du PAE Kita, dont Karim DIARRA, Mathias GERTIG, Gérôme DAKOUO, Mikaela BRAUN-YAO, Elie DEMBELE, Katharina WOLFFENBUTTEL et Salif FOMBA, au DED Bamako, Andréas SCHLEENBAECKER, Hendrik KUIPERS, Gérard DARASPE, Hans-Uli CASPARY et Brigitte TRAORE, mes collègues à la CMDT Kita dont Amadou SOW, Mahamane KAMIA, Fodé DEMBELE, Docteur SOUMARE, Mohamed SIDIBE et Ibrahima LY, à Intercoopération Suisse, François PICARD et Norbert DEMBELE, à Jèkasy Sikasso, Amadi COULIBALY, à la SNV, Joost NEELEN, et Souleymane DIARRA, au PACT Bamako, Dirk BETKE, à tous les membres du réseau IIED « réussir la décentralisation » de Bamako animé par Modibo KEITA, Abdel Kader DICKO et Ousmane SAMAKE du CEK Kala-saba, à l’IIED Londres, Ced HESSE, à l’Université de Paris X, outre les membres du comité de thèse, Caroline HUMBEY et Stéphanie LIMA, au CIRAD Bamako : Mamy SOUMARE, Baptiste HAUTDIDIER et Denis GAUTIER, Yves NOUVELLET et Didier BAZILLE et au CIRAD France, Patrick CARON, Michel GRIFFON, Guy FAURE, Martine ANTONA et Patrick DUGUE, à l’IRD Bamako, Joseph BRUNET-JAILLY et Balla DIARRA, à l’IER, Salmana CISSE et Samba SOUMARE, au CNRST, Bréhima KASSIBO et Seydou KEITA, au PNUD-BIT Kita, Boubakar KANTE, Kouloutan COULIBALY et Djiguiba KOUYATE, au PAVD, Moumouni SANOGO, au CCC de Kita : Kassim KOUROUMA et tous les conseillers du CCC, au GDRN5, Aly Bacha KONATE, à SOS Sahel, Mamadou DIAKITE et Marie ALEN, Valentin BEAUVAL et « Paco », agriculteurs en Anjou, à la DNCN : Félix DAKOUO et Mamadou GAKOU, à la DNHE, Oumar TRAORE et Didier ALELI, au CDI, Kalifa DIAKITE et Sidi COULIBALY, à l’Université des sciences juridiques et économiques de Bamako, Moussa DJIRE, à l'Université de Chicago : Dolores KOENIG, au sein des services locaux techniques de l'Etat : Monsieur GATTA du SLACAER, Mamary Tidiane KOKAÏNA du SLCN, au bureau du Cercle de Kita, les adjoints aux Préfets : Issiaka BATHILY puis Daniel DEMBELE, le Percepteur du Cercle de Kita, Sahada TRAORE, chargé de suivi régional des CCC à Mopti et également Sylvia TAG, Abdel Kader DICKO, Alexandre MATHIEU et Erika NIMIS.

A tous ceux-là et à tous ceux que je n’ai pas cité : membres d’ONG et de projets de développement, élus, fonctionnaires, techniciens, paysans et population de la région de Kita, je dis un grand

Merci !

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SOMMAIRE GENERAL

Chapitre 1. Problématique et méthodologie de la recherche Chapitre 2. L'espace géographique de l'étude

Partie 1 : DES ENCADREMENTS DUALS :

A. LES ENCADREMENTS PAYSANS

Chapitre 3. Les systèmes de production paysans Chapitre 4. Les élevages paysans et nomades

Chapitre 5. La société paysanne et les encadrements fonciers

B. LES ENCADREMENTS ETATIQUES

Chapitre 6. Centralisme d’Etat et dualité juridique Chapitre 7. Kita, capitale de l’arachide

Chapitre 8. L’encadrement de la culture cotonnière

Partie 2 : DES LOGIQUES D’ACTEURS LOCAUX :

A. LES AUTRES LOGIQUES D’ENCADREMENTS Chapitre 9. Déterminants externes

Chapitre 10. Vers une gestion locale

Chapitre 11. Emergence des pouvoirs décentralisés

Chapitre 12. Fonctionnement de la décentralisation communale

B. LES TRANSFERTS :

13. Modalités de transferts

14. La filière cotonnière : le transfert de ses compétences en gestion 15. Le cadre légal des transferts

16. Réussir les transferts

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SOMMAIRE DU TOME I

Chapitre 1. Problématique et méthodologie de la recherche Chapitre 2. L'espace géographique de l'étude

Partie 1 : DES ENCADREMENTS DUALS :

A. LES ENCADREMENTS PAYSANS

Chapitre 3. Les systèmes de production paysans Chapitre 4. Les élevages paysans et nomades

Chapitre 5. La société paysanne et les encadrements fonciers

B. LES ENCADREMENTS ETATIQUES

Chapitre 6. Centralisme d’Etat et dualité juridique Chapitre 7. Kita, capitale de l’arachide

Chapitre 8. L’encadrement de la culture cotonnière

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Introduction

Comme de nombreux pays d’Afrique de l’Ouest, le Mali a entamé, au cours des années 1990, une vaste réforme de décentralisation territoriale. Celle-ci s’opère dans un contexte de dualité juridique où l’Etat proclame la souveraineté de son pouvoir sur l’ensemble du territoire national, alors que son manque de moyens lui impose de laisser, de fait, les encadrements paysans gérer les finages ruraux.

Si la composante fondamentale de cette décentralisation est le transfert de compétences, nous partons de l’hypothèse que son objet-clé se situe au niveau de la gestion du foncier et des ressources naturelles.

Pourquoi et comment la gestion des ressources naturelles est-elle devenue une composante centrale des projets de développement ? Comment, au Mali, se préparent les transferts de compétences en gestion du foncier et des ressources naturelles ? Comment se réalise le passage d’un encadrement étatique déconcentré à un encadrement décentralisé dans le milieu rural de la région de Kita qui est marqué par l’encadrement d’une ODR « intégré » basée sur la culture commerciale du coton ? Quelle légitimité et quelle place ces nouveaux acteurs locaux peuvent-ils se constituer entre, d’une part, les autorités déconcentrées de l’Etat, et, d’autre part, les encadrements « traditionnels » paysans ? Le transfert des compétences en gestion du foncier et des ressources naturelles est-il susceptible de modifier les rapports entre ces pouvoirs, et, si oui, selon quelles modalités et a quelle échéance?

Après avoir détaillé notre méthodologie de recherche puis présenté géographiquement la région dans laquelle se déroule cette étude, nous mettrons en évidence la dualité des encadrements en présence.

Tout d’abord, l’observation de l’organisation et du fonctionnement des encadrements paysans de la région de Kita nous permettra de mieux comprendre comment s’opère la gestion du foncier et des ressources naturelles dans cette région rurale. Ensuite, l’étude du cadre juridique et du système d’encadrement « intégré » des Opérations de Développement Rural, arachidières puis surtout cotonnières, nous permettra de cerner comment la CMDT (Compagnie Malienne pour le Développement des Textiles), société cotonnière paraétatique jouant le rôle d’une ODR (Opération de Développement Rural), a développé un système d’encadrement agricole efficace, basé sur le transfert de compétences à des structures paysannes de gestion.

Dans une seconde partie, nous observerons dans quels contextes international et intérieur sont nés les nouveaux encadrements décentralisés. Nous étudierons comment se sont constituées les nouvelles collectivités territoriales, ce qui impliquera d’aborder la question de la délimitation territoriale ainsi que les difficultés de fonctionnement apparues lors du premier mandat des élus communaux. Mais c’est évidemment sur la question du transfert des compétences, ou plutôt des transferts, de gestion et des ressources, foncières et forestières, que nous nous focaliserons. Après avoir énoncé les conditions cadre de leur réussite et développé le cas de la filière cotonnière, nous analyserons les modalités de leur préparation institutionnelle. Cela impliquera d’étudier le cadre juridique légal, ainsi que de mettre en évidence les différentes difficultés et blocages, réels ou supposés, inhérents à la mise en œuvre de ces transferts.

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CHAPITRE 1 :

PROBLEMATIQUE ET METHODOLOGIE DE LA

RECHERCHE

Le sujet de cette thèse est : « Le transfert des compétences en gestion des ressources naturelles aux communes rurales de la région de Kita (MALI). D’un encadrement étatique intégré à des logiques d’acteurs locaux. », ce que l’on peut traduire par la problématique suivante : comment, au Mali, peut se faire le transfert de compétences en gestion des ressources naturelles en direction de jeunes communes rurales qui cherchent à asseoir leur légitimité entre un Etat qui n’a pas réussi à s’affirmer complètement et un système d’encadrement paysan qui demeure le référent légitime des ruraux ?

La compréhension de ce sujet nécessite que ses termes soient définis et précisés, afin que le lecteur sache exactement quelle acception nous leurs donnons lorsque nous les employons.

DEFINITIONS :

Le transfert de compétences s’inscrivant au sein de la dynamique de la décentralisation, il convient de définir ce dernier terme.

Décentralisation :

Selon le dictionnaire de la Constitution, BARILLON, R. et al, 1980, Ed. Cujas, « La décentralisation consiste en une attribution de pouvoirs décisionnels, sur une base territoriale à des autorités autonomes, généralement élues au suffrage universel. » Selon BRUNET, in La décentralisation en Afrique subsaharienne, elle est l’action d’un « Etat qui se dessaisit au profit de collectivités territoriales, dont l’administration est assurée par des assemblées élues et disposant d’une liberté de décision, de compétences exercées jusque là par ses organes centraux et ses représentants territoriaux ».

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La mise en œuvre de la décentralisation suppose que quatre conditions soient réunies : - il faut tout d’abord isoler, parmi les besoins auxquels l’administration doit pourvoir, ceux qui présentent, à titre principal, un caractère local. Ce sont uniquement ces compétences qui pourront être transférées. Il est exclu, en effet, de voir l’État renoncer à son pouvoir décisionnel sur des questions intéressant l’ensemble de la population ou qui relèvent de ses attributions régaliennes, par exemple, en matière de défense nationale ;

- il convient ensuite que l’Etat reconnaisse l'existence d'autres entités publiques responsables en dehors de lui-même ;

- il faut aussi que ces collectivités territoriales soient dotées de la personnalité juridique et d’une autonomie financière et de gestion, afin qu’elles soient en mesure de disposer de ressources propres nécessaires à leur action ;

- il faut enfin que les organes exécutifs de ces collectivités soient élus en leur sein (et non désignés par l’État), et qu’ils jouissent d’une réelle autonomie à l’égard du pouvoir central.

Mais la décentralisation ne signifie nullement que les collectivités territoriales sont indépendantes et peuvent prendre des actes illégaux ! Pour qu'elles fonctionnent efficacement, nous verrons que l'Etat doit jouer pleinement son rôle.

Il y a donc décentralisation lorsque des élus de collectivités territoriales sont légalement autorisés par l'Etat à exercer localement certains pouvoirs décisionnels (notamment administratifs) pour lesquels l'Etat procède à un transfert de compétences (financières, techniques,...).

Le transfert de compétences matérialise la décentralisation.

Pour BARRIERE O. et C., 2002 : " La mise en œuvre de la décentralisation dépendra de l'importance effective des affectations des cessions ainsi que des transferts que l'Etat voudra bien accepter". La politique de décentralisation mise en oeuvre au Mali, et dans les pays francophones en général, est une forme de décentralisation avec dévolution de compétences accompagnée d’un transfert de charges et de ressources à des collectivités territoriales. Le transfert de compétences est donc une dévolution de pouvoirs, terme qui implique un renoncement par transmission à un niveau inférieur de certaines prérogatives, ce qui amène à son tour la notion de subsidiarité. La Déclaration de RIO de 1992, outre le principe de développement durable, consacre le principe de la subsidiarité selon lequel : "La meilleure façon de traiter les questions d'environnement est d'assurer la participation de tous les citoyens concernés, au niveau qui convient". Selon BARRIERE, O., 1995, ce principe signifie que : " les décisions soient prises selon leur nature, chaque fois au niveau le plus bas possible apte à assurer l'autorité, à les mettre en œuvre et à en assumer le premier contrôle". Ce principe de subsidiarité, sans remettre en cause le principe de domanialité, donne de réelles prérogatives aux populations.

La décentralisation est donc une stratégie de gouvernance permettant de faciliter le transfert de pouvoir au plus près de ceux qui sont le plus concernés par l'exercice de ce pouvoir.

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Compétence :

Laurence BOUTINOT, une chercheuse du CIRAD forêt qui travaille, au Sénégal, sur un thème proche du nôtre, utilise le terme : « transfert de la gestion des ressources naturelles… » au lieu de celui de : « transfert de compétences en gestion des ressources naturelles ». Cette différence de formulation nous a amené à nous interroger sur l’acception exacte du terme « compétence ».

Lorsque l’on transfère une compétence, on transfère des « capacités » (par exemple, de gestion).

Pour CADIS 2003 (bibliographie n°87), « la compétence se définit comme un ensemble de savoirs, de savoirs-faire, de savoir-être constatés et mesurés, permettant à une personne d’accomplir de façon adaptée une tâche ou un ensemble de tâches. » C’est le fait d’ « être capable de faire »). Cela inclut des « connaissances » (il s’agit, par exemple, de posséder des savoirs scientifiques sur une plante, des savoir-faire techniques sur le maintien du potentiel productif des sols etc.) ; le tout dans le cadre des dispositions légales de l’Etat. On évoque ainsi le « domaine de compétences » des collectivités territoriales pour désigner le champ de compétences, c'est-à- dire les prérogatives légales, que l’Etat leur a dévolu. En outre, l’organisme récipiendaire de cette compétence doit être reconnu par l’Etat comme « légalement » détenteur de cette compétence, et on montrera à quel point il est souhaitable qu’il soit aussi « légitimement » investi par la population qui le reconnaît comme étant habilité à exercer cette prérogative.

Fondamentalement, la différence entre le libellé de notre travail et celui choisi par Laurence BOUTINOT s’avère peu significative, car transférer la gestion revient implicitement à transférer les compétences en gestion. Toutefois, nous préférons notre formulation car elle est plus précise et qu’elle met l’accent sur le nécessaire aspect de « renforcement de capacités » des récipiendaires de ces compétences, là où le libellé de BOUTINOT évoque davantage le seul acte juridique, l’action de transférer les responsabilités, c'est-à-dire la simple dévolution.

Cette réflexion aboutit à ce que nous pourrions résumer par la formule suivante : Compétence =

légalité1 : être légalement autorisé à…, c'est-à-dire jouir de la capacité juridique, de l’aptitude légale,

+ capacité : c'est-à-dire posséder les capacités de faire, ce qui inclut les savoirs et savoir-faire, + légitimité : être socialement habilité à…, par l'ensemble ou la majorité de la population.

Nombre de personnes rencontrées, et pas seulement des ruraux, font ou entretiennent une confusion quant à l’objet des transferts. Certes, le sujet est complexe et les limites entres notions peuvent être ambiguës ; mais notre texte se doit d’être précis dans la définition de l’objet de ces transferts. Il convient donc de différencier les transferts, de l’Etat aux collectivités territoriales, des différents objets ci-dessous :

- les domaines fonciers, c'est-à-dire les terrains, - la gestion de ces domaines,

- les ressources naturelles,

- la gestion de ces ressources naturelles.

1ce que DIAKITE, K. et DIALLO,Y., 2004 nomment "attribution"

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Si, de nombreuses considérations étant communes à ces différents types de transferts, ils peuvent parfois être désignés et même traités dans cet ouvrage de manière confondue, en revanche, il est impératif de conserver à l’esprit leur nette distinction conceptuelle, surtout lorsque nous rentrerons au cœur de l’étude de ces différents transferts.

Décentralisation et déconcentration :

Il importe de ne pas confondre décentralisation et déconcentration. La différence essentielle entre les deux notions est d’ordre politique et tient au statut des organes qui bénéficient de la redistribution du pouvoir. Dans le cas de la décentralisation ces organes ont leur identité propre et disposent d’une véritable autonomie de gestion territoriale vis-à-vis de l’État ; les collectivités locales jouissant ainsi de la personnalité morale. En revanche, dans le cadre d’une déconcentration, les organes n’ont pas la compétence de s’administrer de manière autonome et ne sont que les représentants locaux du pouvoir central. Ainsi, le SLACAER ou la Préfecture, bien que situés « localement », au niveau des chefs-lieux des Cercles, ne sont que des services déconcentrés des directions nationales du pouvoir central. L’autorité déconcentrée est donc sous la dépendance directe d’un supérieur hiérarchique aux ordres duquel elle doit absolument se conformer. Nommés par le pouvoir central, les agents décentralisés de l’Etat restent donc directement subordonnés à l’autorité de l’État.

Si la déconcentration rapproche géographiquement l'administration de l’Etat des administrés, elle ne remet nullement en cause la centralisation du pouvoir de décision. De plus, elle s'organise dans le cadre territorial de circonscriptions administratives, alors que la décentralisation se réalise au sein de collectivités territoriales. La déconcentration ne constitue qu’un mode pratique d’aménagement de la centralisation. Une autre distinction majeure entre décentralisation et déconcentration concerne leur mode de contrôle par l'Etat. Dans le cas de la déconcentration, le contrôle est a priori et donc d'opportunité, alors que, dans le cadre de la décentralisation, il est a posteriori dans le cadre d’un « contrôle de légalité » systématique.

Gestion et gouvernance :

Le terme français de "gestion" est très général. Notons qu'il peut comprendre plusieurs fonctions qu'en anglais on distingue par les termes anglo-saxons de « governance » : les principes, la façon de diriger, « management » : les décisions, et « operating » : la mise en œuvre. Dans cet ouvrage, on utilise le terme de gestion (des ressources naturelles) qui renvoie à un système de droits, à une réglementation des usages, plutôt que celui d’exploitation (des ressources naturelles) qui renvoie davantage à une utilisation technique et commerciale.

L’expression "bonne gouvernance" est omniprésente dans le discours des institutions internationales. Le terme "gouvernance", issu du bas français, renvoie d’abord à un groupe social : on gouverne des hommes qui s’inscrivent dans un territoire donné et y mobilisent des ressources. La notion anglo-saxonne de "gouvernance" renvoie à la fois à une déconcentration administrative, où l’Etat gère l’échelon local en tenant compte du contexte propre à chaque espace, et aux pouvoirs qu’exercent les pôles de décision locaux, élus ou paysans. Il n'y a donc

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pas divergence, mais complémentarité cumulable entre le terme latin de "décentralisation" et celui, d'inspiration américaine, de "bonne gouvernance", comme l'écrit LE ROY, E., 1995 : « Si la décentralisation offre une nouvelle géographie de la répartition des pouvoirs ou une

"architecture" renouvelée des attributions dévolues aux pouvoirs centraux et locaux, en particulier par la redistribution des compétences financières (…), la gouvernance prend en charge la manière de mettre en oeuvre ces compétences par le choix des élites, les styles de gestion et le nécessaire règlement des conflits. La gouvernance offre une "carte du cœur" là où la décentralisation propose un planisphère. »

encadrement (système de)

Enfin, dans cet ouvrage, nous utilisons très souvent le terme de système d'encadrement employé par le géographe Pierre GOUROU, pour désigner l’ensemble des techniques sociales qui fondent l’efficacité d’un groupe humain sur un espace et sur les ressources que portent cet espace. Cette approche considère qu’une civilisation se caractérise par des techniques de production et des techniques d'encadrement, les deux étant interdépendantes, c'est-à-dire que dans toute société humaine, le système social, le système foncier et le système de production sont étroitement imbriqués.

Nous l'utilisation de manière large en évoquant par exemple le système d'encadrement de la CMDT (Compagnie Malienne pour le Développement des Textiles), soit la stratégie et les moyens qu'utilise cette société cotonnière pour organiser les producteurs et assurer le fonctionnement de la filière coton. De même, le système d'encadrement paysan désigne l'ensemble de l'organisation, des instances et règles de fonctionnement des chefferies traditionnelles : chefs de terre, chefs de village, etc.

"Village" et "hameau"

Nous nous conformons ici à la distinction administrative : est village, un établissement humain reconnu comme tel par la loi2. Sont "hameaux" les autres habitats humains. Nous adoptons volontiers cette distinction car nous montrerons que les hameaux d’un village font historiquement et socialement partie intégrante de celui-ci.

Ajoutons que, contrairement à certains auteurs, nous n'appellerons pas "quartier", mais hameau", la partie d'un village distante de plusieurs kilomètres de celui-ci, d’autant que, dans un village il y a des quartiers au sens « urbain » du terme. En effet, nous montrerons que leur distinction géographique correspond le plus souvent à une différence qui est aussi historique et sociale.

2 notamment la Loi n° 96-059 du 4 novembre 1996 portant création des communes (en établissant la liste des villages les composant).

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« Projet »

On donne ici à ce terme un sens très large, proche de celui que lui attribue les ruraux de notre région d’étude, selon lequel un "projet" est un acteur ou une intervention extérieure en milieu rural. Sont toutefois exclus de ce vocable les services techniques de l'Etat, mais également la CMDT.

Enfin, par convention, dans cet ouvrage, on utilise une majuscule pour distinguer l'institution du nom commun. C'est particulièrement le cas du Cercle, de la Région et de l'Administration, ce dernier terme désignant communément les autorités territoriales déconcentrées : Préfets, Sous- préfets et leur administration déconcentrée.

Que désigne-t-on dans cet ouvrage par le terme « ressource naturelle »

?

" La notion de ressources naturelles n'est-elle pas au premier rang des préoccupations du géographe humain ? " s’interrogeait déjà Pierre GOUROU en 1971. « La gestion des ressources naturelles s’inscrit en toute logique, non pas comme une préoccupation indépendante du reste, mais au cœur même des activités rurales dominantes et des mécanismes socio-économiques qui les conditionnent. » confirmait GUYON, G., 1988.

Ressource :

Selon BARRET et al., 2000, les ressources sont des : "richesses ou réserves naturelles que peuvent exploiter les sociétés humaines". Ils distinguent ainsi les ressources non renouvelables : minerais, pétrole,… des ressources renouvelables : énergie solaire, énergie éolienne et enfin des

"ressources potentiellement renouvelables" : sols, forêt, plantes cultivées. Bien que les ressources naturelles considérées dans cette étude appartiennent à cette dernière catégorie, nous utiliserons les termes de ressources renouvelables, ou, plus simplement, de ressources naturelles.

Le terme « ressource renouvelable » introduit l'idée que les ressources naturelles ne sont pas indéfiniment exploitables en terme de stock. Les ressources naturelles non renouvelables (à court et moyen terme) que sont en particulier les ressources du sous-sol : or, cuivre, pétrole,…, ne sont pas inclues dans la notion de ressource naturelle utilisée dans cette ouvrage parce qu’elles ne sont pas présentes ou n’interviennent pas dans les processus étudiés.

Ressource naturelle :

Stricto sensu, une ressource est dite « naturelle » quand elle n’est pas créée par l’Homme. Selon cette définition restrictive, les champs cultivés, les vergers, le bétail et même les forêts aménagées ne sont pas des ressources naturelles. Elle exclut donc le milieu naturel anthropisé qui est pourtant l'objet de notre étude. Ce ne sont donc pas les ressources "naturelles", au sens purement écologique du terme, qui nous intéressent, mais plutôt, replacées dans le champ de la géographie humaine, les ressources liées à l'espace anthropique.

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CLOUET, Y., 1996 souligne que : "La gestion des ressources naturelles, en elle-même, ne mobilise pas les villageois. Les ressources naturelles n'ont de sens que dans la mesure où elles permettent de satisfaire des besoins…". Cela nous conduit à l'idée qu'une ressource (naturelle) ne l'est que si elle est exploitée (sinon, c’est la « nature »). LAVIGNE DELVILLE P., 2001 confirme qu’une ressource « n’est ressource que pour autant qu’elle fasse l’objet d’un usage (…) En effet, il n’y a de ressource que s’il y a une société qui la considère comme telle ». On peut donc considérer les ressources naturelles comme les attributs de la nature qui sont considérés comme utiles pour les Hommes. C'est également cette notion d'utilité pour l'Homme qui ressort majoritairement de nos enquêtes. La ressource naturelle se différencie donc de la nature par son exploitation ; autrement dit, c’est l’exploitation de la nature qui crée la ressource naturelle.

HUMBEY C., 2003 citant DEMANGEOT, explique que : " le milieu est dit naturel lorsqu'il y prédomine les éléments non ou peu transformés par l'homme". En revanche, n’est pas considéré comme une ressource naturelle un élément où les facteurs anthropiques prédominent, tel un objet fabriqué par l’homme : outil, case,… Puisque nous travaillons à l'interface homme-nature dans l'espace, nous prenons la liberté de considérer comme « ressource naturelle » tout élément du milieu naturel qui se trouve en interaction avec le milieu rural anthropisé. Ainsi, les champs, dont la productivité dépend en grande partie de facteurs naturels, sont ici considérés comme une ressource naturelle. Excluant les champs cultivés des ressources naturelles, de nombreux travaux ne portent que sur la brousse (ou la ressource bois). Si notre approche plus globale et plus originale rend certainement cette étude plus complexe, son résultat en est peut-être plus complet.

Nous considérons donc ici la terre comme une ressource naturelle particulière, puisque, dans les régimes fonciers africains, à la différence de la conception occidentale où la terre est un bien, elle n'est pas une ressource en soi, mais tire sa valeur de sa fructification par le travail. A la différence du foncier qui est l’ensemble du système de droits qui règle la gestion des terres, le sol est une ressource naturelle qui fait l'objet d'exploitation. D’ailleurs, au bout de quelques années, on dit que le sol est "épuisé", c'est-à-dire qu'il est devenu moins fertile. Dans le système extensif paysan, la restitution de fertilité s’effectue par une de jachère de longue durée. Dans le système intensif vulgarisé par la CMDT, la remontée de fertilité est partiellement obtenue par des amendements organiques et minéraux, censés remplacés intégralement les vertus de la jachère.

Pourtant, les sols de certaines régions, comme dans celle de Koutiala, seraient devenus moins fertiles, ce qui tendrait à prouver que le sol est une ressource naturelle, qui, au même titre que les autres, peut s'épuiser, voire disparaître. Dans cet ouvrage, nous étudions particulièrement les systèmes de production (indissociables du foncier et des encadrement sociaux) pour mettre en évidence les évolutions des différents encadrements des ressources naturelles. En effet, dans le milieu agro-sylvo-pastoral prédominant dans notre région d'étude, on ne peut séparer radicalement les espaces de champs, de jachère, de savane et de forêt, car on se trouve encore dans un système à jachère plus ou moins longue, c'est-à-dire que le champs cultivé n’est pas radicalement coupé de la nature : il en vient et y retourne périodiquement.

Si le foncier et les encadrements paysans feront l’objet de développements ultérieurs, la lecture de cette thèse nécessite, au préalable, non seulement que soient bien compris le sens que l’on donne aux mots « foncier » et « ressources naturelles », mais aussi que soient bien connus les différents pouvoirs qui s’exercent sur des espaces plus ou moins distincts.

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Les espaces d’expression des droits et encadrements paysans :

Puisqu’un droit donné s’applique sur un espace défini, voyons quelles sont les délimitations et les articulations de ces droits sur les finages villageois de notre région d'étude.

Terroir et finage

: Terroir :

Selon BRUNET et al. 1992, le terroir est un : " lieu défini par des qualités physiques particulières : pente, exposition, nature du sol". Selon MARIE, J., in LAVIGNE DELVILLE, P., 1998, B,

" Le mot terroir, dans sa stricte acception, n'est pas porteur de droits sur le sol." BARRET et al.

2000 inscrivent plus précisément le terroir dans l'espace agricole : "portion d'espace agricole homogène présentant des aptitudes agronomiques particulières ou des aménagements agraires particuliers". MARIE, J., in LAVIGNE DELVILLE, P., 1998, B, souligne que " Le mot terroir, dans sa stricte acception, n'est pas porteur de droits sur le sol."

Finage :

Selon BRUNET et al. 1992, le finage est une : " Etendue de terre appropriée et plus ou moins complètement exploitée par une communauté agricole (village, hameau), voire par une entreprise agricole. Il est généralement continu et délimité." En effet, étymologiquement, "finage" vient de

"fines", qui signifie « limite ». D’ailleurs, la limite du finage se confond souvent avec celle des finages voisins. GALLAIS, J., 1986, explique comment le finage traduit, "par ses limites et ses complications, l'histoire sociale du groupe qui y est attachée". Nous montrerons qu’il y a, dans notre région d’étude, une grande lisibilité historique et sociale de l'espace géographique. Le finage est donc un ensemble de terres (utilisées ou non) sur lesquelles un groupe social exerce des droits.

Si l’espace du terroir est inscrit dans celui du finage, les deux notions sont théoriquement distinctes. Cependant, le mot « terroir » semble de plus en plus souvent utilisé par les géographes africanistes (mais aussi par les projets de développement : voir la gestion de

« terroirs » villageois) pour désigner le finage. Déjà BRUNET et al. 1992 écrivait que : " finage ne doit pas être confondu avec terroir, bien qu'une tradition des études agraires en pays tropical emploie ce dernier terme dans le sens de finage". De même, pour HUMBEY, C., 2003 : en

"Afrique subsaharienne, le terroir ne se définit pas tant comme un espace physique que comme un espace socialisé, approprié et exploité par une communauté rurale", ce qui recouvre plutôt la définition du finage. Parce que nous verrons que les espaces non agricoles font également l’objet de droits d’appropriation du sol et parce que c’est l’ensemble de l'espace sur lequel une communauté villageoise exerce des droits qui fait l’objet de notre étude, nous recourrons plus souvent au mot « finage » stricto sensu plutôt qu’à celui de « terroir ».

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Un finage aux appropriations de droits différenciées

Selon Jean GALLAIS3, " le village est le centre de l'organisation de l'espace. " Pour GOUROU, P., 1970, "Chaque village est au centre d'une mise en valeur exprimée par des auréoles concentriques". SAUTTER, G., 1962 a décrit ces trois auréoles topocentrées autour de l’habitat : - Les champs de cases situés à proximité immédiate des habitations constituent la première auréole. Ce sont les sols les plus riches car amendés par les déchets organiques du village. Dans la région d'étude, on y cultive surtout le maïs. S’y trouve également les jardins maraîchers clôturés, le parc à bétail, voire le silo de coton. Dans le système d’agriculture extensif de la région d'étude, c’est seulement au niveau de ces champs de case que l’agriculture revêt un caractère permanent.

- Une deuxième auréole est constituée par les champs de cultures vivrières et commerciales. Une partie variable de cet espace est occupé par des jachères plus ou moins longues.

- Quant à la troisième auréole, ses meilleures terres sont cultivées pour quelques années. Ces champs épars font l'objet de longues jachères car l’apport de fertilisation y est inexistant.

Le terroir fait surtout référence aux deux premières auréoles où les logiques d'appropriation du sol sont dominantes, alors que le finage intègre la troisième auréole. La limite extérieure de cette troisième auréole correspond souvent à celle de ce finage, et donc aussi à celle des troisièmes auréoles des villages voisins.

Dans les finages où la pression foncière est importante, comme à Djidian, ce sont même les deuxièmes auréoles qui sont jointives (par intégration de la troisième auréole dans la deuxième auréole). Lorsque tous le finage est devenu terroir, la brousse boisée est devenue inexistante et les jachères se raccourcissent puis disparaissent.

L’évolution permanente des finages et la variabilité de situation nous amène à nous interroger sur la validité du modèle d’organisation des terroirs en auréoles topocentriques, observé et théorisé il y a plus de 40 ans, d’autant qu’il a été remis en cause par plusieurs chercheurs depuis une vingtaine d’années.

Si, dans notre région d'étude où les finages sont largement forestiers, cette organisation auréolaire des terroirs s’observe encore assez nettement, elle a toutefois tendance a disparaître : au fur et à mesure de la croissance démographique, les terroirs occupent tous l’espace des finages et les auréoles se rejoignent. De plus, le système agraire de la région de Kita n’a pas encore entraîné de séparation ager-saltus, c'est-à-dire qu’entre le champ cultivé, la jachère et la brousse, il y a un continuum dont les frontières sont floues.

Cependant, nous sommes convaincus que, même lorsque ce modèle est devenu plus théorique qu’observable, il est utile de le connaître et de le conserver à l’esprit. En effet, il nous a fourni un cadre de compréhension et d’analyse de la genèse des paysages observés.

Enfin, il faut signaler que, au-delà de ce schéma où c’est le seul critère de la distance au village qui détermine la nature de l’occupation du terroir, dans notre région d'étude, les terres incultes,

3 in " La signification du village en Afrique de l'ouest", in Cahiers de sociologie économique, n°2, pp.128-162

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comme les bowé et les collines constituent autant de discontinuités spatiales. La mise en valeur des finages villageois de notre région d'étude est donc guidée par une logique duale de proximité des habitations et de fertilité.

Poursuivons l’analyse de notre milieu selon cette logique zonale topocentrée : Le statut foncier de la brousse lointaine (la troisième auréole et au delà) :

GOUROU, P., 1991 écrit que : "les villages sont séparés les uns des autres non par une limite précise mais par cette brousse d'appartenance incertaine, où on a le droit, à ses risques, d'ouvrir un essart." La limite entre les espaces d’influence des villages riverains y est floue. Cette brousse sert à la fois de réserve foncière et de domaine sylvopastoral. C’est un espace multifonctionnel de faible pression anthropique. Par opposition au "dugu", le terme "wula" désigne cette brousse qui commence à ne plus relever de l'autorité politique du chef de village et dont les ressources peuvent être librement prélevées. On y pratique le pastoralisme, la chasse, le ramassage de bois et la cueillette. C’est aussi le lieu de passage des troupeaux transhumants. CISSE, D., 1970, écrit que " les réserves et les zones de chasse jouissent d'un caractère communautaire irréfutable".

En revanche, même lorsque la pression foncière sur le finage est peu importante, tout (les droits fonciers sur) l’espace du finage est attribué dès la fondation du village. GOUROU, P. 1969 écrivait déjà que : " rares sont les terres sans maîtres, même dans les régions tropicales faiblement peuplées." Pour GOUROU, P., 1970, "il n'est pas de terres vacantes". De même, pour GALLAIS, J., 1984, "Toute brousse inculte, si éloignée soit-elle d'un lieu habité, appartient à un individu ou relève d'une communauté". CISSE, D., 1970 confirme que : " l'autorité ou la collectivité se réserve la propriété de tout le territoire cultivé ou non. C'est dire que de vastes étendues peuvent être momentanément vacantes mais pas pour autant sans "propriétaires", ou plutôt sans répondants. C'est là un principe qui a régi et continue de régir les populations malinkés." Un conseiller au chef de village de Kabe nous affirme que "Ici, toutes les terres sont pour les KEITA.

Tout (l'espace) est occupé par des champs et des anciennes jachères et les gens déplacent leurs champs entre leurs anciennes jachères…" Cela explique que, même dans un espace apparemment situé en brousse, aucun étranger n’est autorisé à s’installer sans en demander le droit à son détenteur.

Un vieux paysan de Djinagué nous affirme également qu’autrefois, "de la colline de Kita jusqu'à la rivière Bafing, on ne demandait pas la terre. On défrichait librement. Maintenant il faut toujours la demander aux villages voisins". Ces espaces libres de droits fonciers pour les autochtones sont donc aujourd'hui absents de notre région d'étude, sauf dans des cas particuliers, comme celui des villages situés en marge de régions forestières protégées, comme celle de la réserve de faune du Parc National de la Boucle du Baoulé. On a observé ce cas dans le village de Koundou (commune de Kassaro) qui se trouve isolé au cœur d’une forêt classée.

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L’accès aux ressources naturelles de la « brousse ».

En milieu malinké, en dehors du domaine agricole, l’accès aux ressources naturelles se situant en brousse, est traditionnellement libre, y compris pour les allochtones. Parce qu'elles sont abondantes, les ressources naturelles ne font pas l'objet de règles de contrôle des ressources : elles appartiennent à tous, c'est-à-dire à celui qui vient les prendre. Selon CILSS 1997 à propos de l'étude du cas kitois, " la paille est activement et librement exploitée par les autochtones et étrangers (…) Les arbres fruitiers situés sur les jachères, sont également exploités de façon libre par tout le monde…" Les étrangers ont librement accès au domaine forestier. AGOSSOU, G. et al., 1996 confirment que : " Les terres lointaines, exploitables par tous les enfants du village sont directement sous l'autorité du chef de village qui les gère pour les étrangers, les autochtones s'en servant sans permission."

Cependant, les règles d’accès aux ressources des étrangers se restreignant, pour prélever les fruits des arbres de karité (mêmes situés hors du terroir), les allochtones au village, doivent normalement en demander l'autorisation au chef de village qui peut leur imposer de lui en attribuer une partie en signe d'allégeance. En pratique, ils font rarement cette démarche, car une ressource située très loin du village est réputée libre pour les allochtones. De plus, le contrôle y est aléatoire : s’il n’est pas vu et surtout, ce qui est lié, s’il ne prélève pas une partie importante de cette ressource, le plus souvent, l’étranger ne procédera à aucune demande préalable.

Lorsqu’un étranger au village souhaite effectuer un prélèvement important sur la brousse du finage, par exemple, pour une exploitation commerciale du bois, c’est le chef de village et son conseil qui statuent sur les conditions de l'accès de l'étranger à l’exploitation de la ressource. De plus en plus, et en particulier lorsqu'il s'agit de prélèvements en quantité importante, les intéressés doivent obligatoirement requérir l'assentiment du chef de village, sous peine de devoir affronter le courroux populaire. C’est ce chef qui leur indiquera les lieux limitatifs où le prélèvement peut être fait et demandera aussi que lui soit remis une part de la ressource exploitée. Plus le prélèvement est important, plus l’apport originellement réalisé en signe d'allégeance aux autorités villageoises, sera quantitativement important.

En résumé, autour des habitations,

- les deux premières auréoles constituent le "terroir villageois", l'espace agricole où l'attribution des droits fonciers est gérée par le chef de terre. Tout l'espace y est clairement attribué ; - la troisième auréole est incluse dans la notion de finage ou "dugu". Cet espace est attribué et

reconnu comme appartenant à un village et sa gestion incombe au chef de village. Pour les autochtones, c'est un espace d'accès libre aux ressources naturelles.

De manière générale, plus l'espace est éloigné des habitations, moins, il est fortement

"encadré" et clairement marqué, c'est-à-dire moins les droits qui y sont attachés sont forts.

Plus l’espace est proche du village, plus il est clairement attribué et travaillé, et moins le besoin de demander l’octroi de droits au lignage fondateur s’exprime. A ce propos, HUMBEY, C., 2003 évoque : "une dégradation progressive de l'emprise villageoise sur le milieu naturel".

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Les différences entre droits fonciers et droits sur les ressources naturelles

:

LAVIGNE DELVILLE, Ph., 2001 affirme que la question de la gestion des ressources renouvelables s’affronte à la complexité de la question foncière et ne peut être analysée indépendamment d’elle. Dans cet ouvrage, si nous considérons le foncier comme une ressource naturelle, sa maîtrise par les encadrements paysans semble différenciée de celle des ressources naturelles.

Les maîtrises foncières, c'est-à-dire les règles d’appropriation des droits de culture sur la terre, sont détenues par la chefferie foncière. Elles s’appliquent sur un espace qui correspond approximativement au terroir villageois, c'est-à-dire à un espace agricole déjà défriché, travaillé de manière plus ou moins permanente, mais clairement « approprié » correspondant approximativement aux deux premières auréoles.

En revanche, les maîtrises sur les ressources naturelles, c'est-à-dire les règles d’accès et d’exploitation de ces ressources renouvelables, sont détenues par la chefferie villageoise.

Elles s’appliquent sur l’espace du finage qui se situe au-delà du terroir cultivé. Ainsi, par exemple, les chasseurs (pratiquant en brousse) doivent s’acquitter d’un tribut (duga kama) non au chef (religieux) de terre, mais au chef (politique) de village dont les domaines leur procurent le gibier.

Toutefois, il faut souligner que les ressources naturelles qui se situent sur le terroir cultivé font l’objet de droits d’utilisation particuliers. Ainsi, un arbre de karité ou de néré qui est localisé dans un champ ne pourra être exploité, sauf autorisation expresse, que par le détenteur des droits opérationnels d’exploitation de cet espace. Dans le cas de l’arbre fruitier, c’est généralement la femme de ce détenteur qui effectue la récolte des fruits. JOUVE, P., 2001 écrit que : " Les droits d'accès (aux ressources naturelles dans les jachères4) ne se confondent pas avec les droits fonciers et, comme eux, ils évoluent en fonction de la pression sur les ressources". Chez les Malinkés de Kita, comme, semble-t-il, chez la majorité des peuples d'Afrique de l'Ouest, droits fonciers et droits sur les ressources naturelles sont donc clairement différenciés.

Si le sol constitue donc une ressource naturelle à part entière, il possède des caractéristiques particulières puisque l'accès et la gestion du sol et des ressources naturelles qu'il supporte font l'objet de règles foncières et d'instances différentes :

• Concernant le sol, sa gestion par les encadrements paysans est limitée au "terroir"

villageois, c'est-à-dire aux deux premières auréoles topocentriques. Il s'agit d'un espace clairement attribué et délimité par la marque du travail humain, où les différents types de droits des divers acteurs sont précisément définis et connus de tous les membres de la communauté villageoise. Le gestionnaire (l'arbitre suprême et non le chef, au sens d'aliénation) de cet espace est le chef de terre. Comme nous le montrerons plus loin, dans la région d'étude, c'est souvent le

4les droits sur les jachères, distincts des droits sur le foncier cultivé et sur la "brousse" encore jamais défrichée, font l'objet d'un statut intermédiaire, qui, en matière de droits opérationnels sur les ressources, tend à se confondre avec ceux qui s'appliquent sur les brousses. Nous avons remarqué que les règles qui s'y appliquent perdent en lisibilité : elles varient notamment en fonction de l'âge de la jachère, de son éloignement des habitations et surtout d'une localité à l'autre.

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chef de village qui, au moins par délégation, assume cette fonction de gestion courante en s'appuyant sur les chefs de lignage.

• Concernant les ressources naturelles, qui sont principalement forestières dans notre région d'étude, elles se situent majoritairement dans ce que des chercheurs forestiers comme Baptiste HAUDIDIER nomment la "brousse", c'est-à-dire dans la troisième auréole topocentrique dont les limites extérieures sont floues et se confondent avec celles des villages voisins. Le faible marquage du travail humain sur cet espace fait qu'il est moins clairement attribué et délimité. Si l'accès et les prélèvements des ressources naturelles y sont souvent libres pour les autochtones, en revanche, les allochtones sont tenus de requérir préalablement l'accord du chef de village.

Si le sol et le foncier n’apparaissent pas dans le titre de cet ouvrage, il sont néanmoins omniprésents en filigrane central de notre problématique. En effet, comment étudier les ressources naturelles sans comprendre le statut et les règles qui s’appliquent à la terre qui les supportent ?

Après cette clarification des termes-clés de notre sujet, il convient d'exposer comment nous avons réalisé notre recherche, selon quelles inspirations, quelles voies, quelle méthodologie, quelles sources et avec quels moyens, sans oublier de mentionner les difficultés que nous avons rencontrées.

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Méthodologie de la recherche

Genèse d'une recherche :

En 1999, je terminais un DEA en géographie humaine. Déclaré "apte" au service national, alors obligatoire, je choisissais la coopération en volontariat et fut envoyé dans une région du centre du Mali. Passionné par le milieu dans lequel je me trouvais plongé, en 2001, j'ai proposé à l'Université PARIS X - Nanterre d'entreprendre un doctorat de géographie sur le thème de la décentralisation et de la gestion des ressources naturelles. Mon directeur de thèse s'est tout de suite montré intéressé et est rapidement venu me retrouver à Kita au Mali, où je m'implantais pour trois années, pour me conseiller et m'aider à affiner le sujet de ma recherche. Me trouvant en région d'encadrement cotonnier, la thématique cotonnière s'est imposée. Mon directeur de thèse m'a surtout sensibilisé et orienté vers deux domaines privilégiés. Il s'agit, d'une part, des aspects fonciers ; et je me suis effectivement rendu compte par la suite qu'on ne peut étudier la gestion des ressources naturelles sans connaître les modalités de gestion du foncier. De plus, il est également apparu que les questions foncières sont étroitement liées à celles du découpage territorial de la décentralisation.

D'autre part, la seconde direction vers laquelle il m'a guidé est le développement, ce qui a ouvert ma recherche vers une réflexion plus large, notamment sur les systèmes d'encadrement. Ces aspects sont venus s'imbriquer et compléter les thématiques précédentes pour me permettre d’engager une étude assez large du milieu, que nous avons ensuite progressivement focalisée sur sa problématique.

1. L’approche

L’entrée principale de ce travail de géographie est naturellement l'espace et les sociétés humaines. Il nous amène à pénétrer largement dans le champ des sciences humaines : sociologie, anthropologie, etc. En outre, l'étude des interventions extérieures sur les sociétés étudiées (Etat, organismes internationaux de développement,…), nous fait aborder le champ de la géopolitique et de la macroéconomie. Notre travail s'inscrit donc dans la lignée de l'approche culturelle et sociale de la géographie développée notamment par Roger BRUNET et Jean GALLAIS. Cette géographie humaine propose une vision riche et profonde du territoire. Ce dernier est d’abord considéré et étudié comme un espace approprié, que les acteurs locaux connaissent, ont appris et ont fait leur. On appelle "territorialité" ce rapport, fait de pratiques, de relations interpersonnelles et d'affectivité. Notre recherche se situe donc pleinement au sein des rapports entre le milieu physique et le milieu humain, c'est-à-dire à l’interface Homme – Nature.

De manière complémentaire, ce travail de recherche est également influencé par l'approche géohistorique des "géosystèmes" (ou systèmes géographiques) chère à André HUMBERT, Professeur à l’Université de Nancy II : à partir de l'observation des traces et éléments d’un espace, on tente de reconstituer la dynamique de construction de cet espace géographique et de l'évolution de la population qui l'a façonnée. C’est une approche holistique qui recherche d'abord l'organisation et le fonctionnement de ce qui est observé. Pour O. et C. BARRIERE, "on ne peut

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maîtriser la réalité sans la concevoir dans sa globalité, sans la connaître toute entière", réalité qu’ils nomment « foncier-environnement » et qu’ils définissent comme un produit systémique interdisciplinaire, introduisant les éléments d’une nouvelle dynamique anthropo-juridique d'une gestion (patrimoniale) viable à long terme. Selon ces auteurs, la « co-gestion » ou droit de co- viabilité entre les systèmes sociaux et écologiques, nécessite le choix d'un système foncier qui intègre les préoccupations environnementales. Ils préconisent de réinventer une construction juridique garante du maintien de la biodiversité et de la reproduction sociale.

Cette approche foncière nécessite d'étudier les systèmes d’"encadrements" de la société dans le sens que Pierre GOUROU donne à ce terme, qui dépasse très largement le foncier. Cette notion se situe donc au cœur de la relation Homme-Nature dont le foncier n’est qu’un aspect.

La problématique foncière est donc largement étudiée, non en soi, mais parce que, dès le début de la recherche, il nous est apparu qu’elle était indissociable du cœur de notre sujet : le transfert des compétences en gestion des ressources naturelles. En effet, l’approche par les seules ressources naturelles ne permet pas de saisir tous les facteurs qui influent sur leur accès et leur usage. En revanche, l'approche foncière peut englober celle des ressources naturelles. Le Club du Sahel et le CILSS ont défini en 1993 le foncier comme étant " constitué à la fois par la terre et les ressources naturelles qui y sont directement rattachées et l'ensemble des relations entre individus ou groupes pour l'appropriation et l'utilisation de ces ressources." Enfin, pour KHOUMA, 2000,

"le foncier constitue une porte d'entrée pour mieux appréhender les jeux du pouvoir qui se nouent autour de la terre." Les travaux de chercheurs tels que LE ROY, MATHIEU, CHAUVEAU, ROCHEGUDE et LAVIGNE DELVILLE nous ont donc largement inspiré.

Pour WEBER J., 1998, l'entrée par le contrôle du sol, cadre habituel des études foncières, est insuffisante pour analyser et comprendre la dynamique de l'appropriation et de l'usage des ressources. Il préconise de partir des systèmes d'accès et d'usage, notamment parce que l'on pose le principe que le milieu naturel est une ressource susceptible d'appropriation. La notion d'espace- ressource permet de mettre en évidence qu’un espace donné peut relever d'espaces/ressources différents, à des moments différents. Il faut en effet conserver à l'esprit la polyvalence d'usages qui caractérise cette région d'étude : champs, jachères et brousses se succèdent dans le temps sur un même espace. Leurs limites sont floues et leurs interactions multiples. Pour O. et C.

BARRIERE, si le droit foncier intéresse le sol, le droit foncier environnemental concerne aussi les éléments qui s'y rattachent, la ressource ne pouvant être appréhendée isolément de son support.

Toutefois, si l’entrée par la seule problématique de la gestion des ressources naturelles s’est rapidement avérée insuffisante, car incapable d’appréhender le milieu géographique humain dans son ensemble, l’approche foncière s’est révélée beaucoup plus complexe et délicate. De ce fait, elle a nécessité de notre part un effort de recherche considérable. On montrera comment l'Etat, notamment lors de sa réforme de décentralisation, a évité d’aborder de front la question foncière en raison de sa complexité et du risque de déstabilisation sociale.

Enfin, la décentralisation territoriale constitue notre principal contexte d’étude. Notre approche opérationnelle consiste à étudier la décentralisation et la dévolution de la gestion des ressources naturelles en tant que processus de transformation des rapports entre les différents acteurs : Etat, institutions, collectivités locales, organisations paysannes, population, etc.

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2) Les échelles d'étude

Une telle recherche ne peut se réaliser uniquement sur un espace trop vaste, comme le Cercle administratif, sous peine de rester cantonnée à des généralités. A l’inverse, la seule analyse du

"petit" (le village, l’exploitation agricole) ne peut suffire à comprendre le grand ! La thématique de la gestion décentralisée des ressources naturelles exige en effet d'étudier de vastes territoires, cadres des encadrements politiques nés de la décentralisation (communes et Cercle). Dans les aires de front pionnier où l'hétérogénéité est forte, l'analyse d'une seule commune ne peut suffire à saisir correctement la situation prévalant dans l'ensemble de cette aire. Ainsi, l'étude menée notamment dans les communes rurales de Djidian et Tambaga démontre qu'au sein d’un même Cercle administratif peuvent coexister des systèmes de culture intensive où les réserves foncières sont minimes et des systèmes de culture extensive où la pratique de la jachère est encore largement répandue. Dans ce contexte, l'étude à échelles multiples s’impose comme un passage obligé. Enfin, il convient de souligner que si notre étude est multiscalaire, toutes ces échelles spatiales sont emboîtées et, dans cette étude, nous circulons en permanence sur l’axe qui les relie.

Notre espace d’étude se compose donc de différents niveaux spatiaux d'analyse : - Le niveau "sous-régional"

Dans une moindre mesure, nous ouvrons notre travail sur l’ensemble de la zone sahélienne d’Afrique de l’Ouest, en comparant notre région d’étude à d’autres régions cotonnières, et la décentralisation malienne à celle de ses voisins : Sénégal, Burkina Faso et Niger.

En effet, lorsque les milieux physiques et humains possèdent les mêmes caractéristiques générales, on peut plus aisément y observer les impacts des différentes stratégies politiques et économiques.

- Le niveau étatique

Les lois concernant la décentralisation et la GRN (gestion des ressources naturelles) ainsi que le transfert de compétences en cours sont ceux de la République du Mali et s’appliquent uniformément sur l’ensemble du territoire national. Une partie du travail de recherche a donc été effectué dans d’autres régions du pays, et, en particulier, dans la capitale : Bamako.

- Le niveau "régional"

Terminologie : "Région" et "zone" :

Dans cet ouvrage, nous utilisons plutôt le terme "région d'étude " mais parfois aussi, celui de

"zone d'étude". Pourtant, le terme "zone" a une signification géographique plus restreinte.

Provenant ethymologiquement du grec "zôné" signifiant ceinture, il s'agit, selon BARRET 2000, de la "surface d'une sphère comprise entre deux plans parallèles qui la coupent". On parle ainsi à juste titre de zone tempérée. Le même auteur en donne aussi une définition plus large : "position

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