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Mukherjee, M.D., F.A.C.C., Yale School of Medicine ; Dan M. Roden, M.D., Vanderbilt University School of Medicine ; F. Estelle R. Simons, M.D., University of Manitoba ; Jordan W. Smoller, M.D., Sc.D., Harvard Medical School ; Neal H. Steigbigel, M.D., New York University School of Medicine ; Arthur M.F.Yee, M.D., Ph.D., F.A.C.R., Weil Medical College of Cornell University. SENIOR ASSOCIATE EDITORS : Donna Goodstein, Amy Faucard. ASSOCIATE EDITOR : Cynthia Macapagal Covey. EDITORIAL FELLOW : Esperance A.K.Schaefer, M.D., M.P.H., Harvard Medical School. MANAGING EDITOR : Susie Wong. ASSISTANT MANAGING EDITOR : Liz Donohue.
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Founded 1959 by Arthur Kallet and Harold Aaron, M.D. Copyright© 2016. The Medical Letter, Inc. (ISSN 0025 – 732X).
TRADUCTION ET ADAPTATION DE L’ÉDITION FRANÇAISE : Dr Pierre-Alain Plan, Grandson.
Egalement dans ce numéro :
Jentadueto XR pour traiter le diabète de type 2 ... p. 112
Emtricitabine/ténofovir alafénamide pour traiter le VIH ... p. 114 Vénétoclax pour traiter la leucémie lymphocytaire chronique ... p. 115 Addendum : Dépression et suicidalité avec l’isotrétinoïne ... p. 115
Vol. 38 No 18 (ML USA No 1500) 26 août 2016
Cannabis et cannabinoïdes
Aux Etats-Unis, 25 Etats et le District de Columbia permettent main- tenant l’usage médical de la marijuana (Cannabis sativa).1 Cette plante a été utilisée depuis des siècles pour traiter diverses maladies, mais la non standardisation des dosages rend l’interprétation des données disponibles difficile. Le cannabis contient >60 cannabi- noïdes possédant une activité pharmacologique.2
Deux cannabinoïdes oraux peuvent être prescrits aux Etats-Unis. Le dronabinol (non commercialisé * – F, CH, B) est une forme synthé- tique du delta-9-tétrahydrocannabinol (THC), le composant psy- choactif principal du cannabis ; le département des stupéfiants américain (DEA) l’a classé dans l’annexe III des substances contrô- lées (moins grand potentiel de dépendance que les drogues des an- nexes I ou II ; usage médical actuellement accepté). Une formulation liquide de dronabinol (Syndros – USA ; non commercialisé – F, CH, B) a été récemment homologuée par la FDA des Etats-Unis. La nabilone (non commercialisé – F, CH, B) est un analogue synthé- tique du THC ; il fait partie des substances contrôlées de l’annexe II (fort potentiel d’abus ; usage médical actuellement accepté). Le dro- nabinol et la nabilone sont tous deux approuvés pour le traitement des nausées et des vomissements associés à la chimiothérapie anti- cancéreuse. Le dronabinol est aussi homologué pour traiter l’ano- rexie associée à une perte pondérale chez les patients avec un sida.
Le nabiximol, un extrait standardisé de cannabis contenant un mé- lange de THC et de cannabidiol (CBD), un autre cannabinoïde majeur trouvé dans le cannabis, n’est pas disponible aux Etats-Unis, mais il est largement utilisé en Europe et au Canada sous forme d’un spray oral (Sativex – F, CH, B) pour le traitement des douleurs cancéreuses et de la sclérose en plaques (SEP).
NAUSÉES ET VOMISSEMENTS INDUITS PAR LA CHIMIO
THÉRAPIE – Le dronabinol et la nabilone sont tous deux approuvés par la FDA depuis 1985 pour le traitement des nausées et des vomis- sements induits par la chimiothérapie n’ayant par répondu à d’autres traitements antiémétiques. Ils sont efficaces pour la prévention et le traitement des nausées et des vomissements provoqués par les mé- dicaments anticancéreux légèrement ou modérément émétisants.
Avec les substances fortement émétisantes comme le cisplatine (Cisplatine Teva et autres – F, CH, B), d’autres médicaments comme le palonosétron (Aloxi – F, CH, B) et l’aprépitant (Emend – F, CH, B) semblent plus efficaces et mieux tolérés. Il n’existe pas d’études comparant le cannabis aux médicaments de première ligne pour le traitement des nausées et vomissements induits par la chimio- thérapie.3,4
DOULEUR CANCÉREUSE INTRAITABLE – Une étude rando- misée en double aveugle de 5 semaines, contrôlée par placebo et portant sur 360 patients, a montré que l’utilisation additionnelle de doses faibles (1-4 pulvérisations/jour) et moyennes (6-10 pulvérisa- tions/jour) du spray oromuqueux de nabiximol était significative- ment plus efficace que le placebo pour soulager les douleurs cancéreuses intraitables, avec des effets indésirables comparable au placebo. Les hautes doses ont été moins efficaces et ont provoqué davantage d’effets indésirables.5 Il n’existe pas d’études acceptables évaluant l’efficacité du cannabis dans cette indication.
SCLÉROSE EN PLAQUES – Plusieurs études ont montré que les cannabinoïdes étaient efficaces pour traiter certains symptômes as- sociés à la SEP.6 L’ American Academy of Neurology a recommandé l’utilisation d’un extrait oral de cannabis contenant un mélange de THC et de CBD (non approuvé par la FDA) ou de dronabinol pour le traitement de la spasticité et des douleurs chez les patients souf- frant d’une SEP, et a recommandé le nabiximol pour le traitement des douleurs, de la spasticité et de la dysfonction urinaire associées à la SEP.7
Réflexions à propos de 1500 numéros – Le premier numéro du Medical Letter est paru le 23 janvier 1959. Le premier article de ce numéro s’intitulait Decadron and Other Adrenal steroids. Le seul en-tête de paragraphe était Caution Needed and Contraindications.
Il concluait en disant : « L’affirmation de Merck prétendant que le Decadron coûterait moins cher que des doses thérapeutiques équiva- lentes d’autres stéroïdes n’a pas été confirmée par un contrôle des prix dans de nombreuses pharmacies de New York ». Trois ou quatre articles par numéro, un numéro toutes les deux semaines, 1499 numéros plus tard, le Medical Letter reste prudent et sceptique au sujet des affirmations de fabricants de produits pharmaceutiques. Il reflète non seulement l’opinion de ses rédacteurs, mais aussi de cen- taines, peut-être de milliers, de critiques qui ont pris le temps, sans compensation ni même la publication de leur nom, de commenter nos articles en préparation. Nous leurs sommes très reconnaissants, ainsi qu’à nos fidèles lecteurs.
* Éventuellement disponible après demande spécifique aux autorités sanitaires.
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ÉPILEPSIE – Les média, qui ont rapporté une amélioration specta- culaire après traitement avec le CBD chez quelques enfants présen- tant des formes sévère d’épilepsie, en particulier le syndrome de Dravet, ont renforcé l’intérêt pour l’utilisation des cannabinoïdes dans ces pathologies. Dans une étude ouverte de 12 semaines chez des patients âgés de 1 à 30 ans atteint d’une épilepsie sévère résis- tante au traitement depuis l’enfance, l’ajout d’Epidiolex (non com- mercialisé – F, CH, B), un extrait de cannabis purifié en cours d’investigation contenant 99 % de CBD, a diminué la fréquence men- suelle médiane des crises de 36,5 %.8 Des études randomisées avec l’Epidiolex sont en cours aux Etats-Unis chez des patients souffrant de ces maladies. Les données ne sont pas suffisantes pour recom- mander l’usage de cannabinoïdes chez les patients présentant une forme plus commune d’épilepsie.9
EFFETS INDÉSIRABLES – Une sécheresse buccale, une sédation, une hypotension orthostatique, une ataxie et des vertiges sur- viennent fréquemment lors de l’usage de cannabis et des cannabi- noïdes synthétiques. Anxiété, tachycardie, agitation et confusion sont également fréquentes, en particulier chez les sujets âgés, et l’aptitude à la conduite peut être réduite. Les cannabinoïdes peuvent provoquer une sédation, une dysfonction motrice, une altération des perceptions, une dysfonction cognitive et des psychoses dose-dé- pendantes. Cependant, le CBD pur n’a pas d’effets psychoactifs.
Aucun décès en relation avec un surdosage aigu de cannabis utilisé seul n’a été rapporté.
GROSSESSE ET LACTATION – Il n’existe pas d’études bien contrô- lées avec le cannabis ou des cannabinoïdes administrés pendant la grossesse, mais les études observationnelles chez les enfants ex- posés au cannabis pendant la grossesse et les études chez les ani- maux suggèrent la possibilité d’effets négatifs sur le développement neurologique. Aucun effet tératogène n’a été rapporté. Le THC est sécrété dans le lait maternel ; les effets sur les nouveau-nés allaités ne sont pas connus.10
INTERACTIONS MÉDICAMENTEUSES – Les cannabinoïdes pro- voquent une somnolence et des effets additifs peuvent survenir si de l’alcool ou d’autres dépresseurs du SNC sont pris concomitamment.
De faibles doses d’alcool peuvent significativement augmenter les concentrations sanguines de THC.11 Le dronabinol est métabolisé principalement par les CYP2C9 et 3A4 ; l’administration avec des in- hibiteurs de ces enzymes peut augmenter le risque d’effets indési- rables et l’utilisation avec des inducteurs enzymatiques peut réduire son efficacité.12
CONCLUSION – Les cannabinoïdes dronabinol et nabilone sont ef- ficaces pour traiter les nausées et les vomissements induits par la chimiothérapie ; ils ont été homologués pour cette indication aux Etats-Unis. Les produits contenant des cannabinoïdes peuvent aussi être efficaces comme traitement de deuxième ligne des douleurs cancéreuses ainsi que des douleurs neuropathiques et de la spasti- cité associées à la sclérose en plaques, mais aucun n’est actuelle- ment approuvé dans ces indications aux Etats-Unis. Le cannabidiol seul, qui n’a pas d’effets psychoactifs, peut être efficace pour traiter l’épilepsie, mais davantage de données sont nécessaires. Aucune étude adéquate avec les fleurs de cannabis (marijuana) n’est dispo- nible pour ces indications.
Références
1. National Conference of State Legislatures. State medical marijuana laws.
Accessible à: www.ncsl.org/research/health/state-medical-marijuana- laws.aspx. Consulté le 21 juillet 2016.
2. Whiting PF, et al. Cannabinoids for medical use: a systematic review and meta-analysis. JAMA 2015;313:2456.
3. Wilkie G, et al. Medical marijuana use in oncology: a review. JAMA Oncol 2016;2:670.
4. Rolapitant pour prévenir les nausées et vomissements tardifs induits par la chimiothérapie. Med Lett Drugs Ther, édition française 2016;38:29.
5. Portenoy RK, et al. Nabiximols for opioid-treated cancer patients with poorly-controlled chronic pain: a randomized, placebo-controlled, graded- dose trial. J Pain 2012;13:438.
6. Hill KP. Medical marijuana for treatment of chronic pain and other medical and psychiatric problems: a clinical review. JAMA 2015;313:2474.
7. Yadav V, et al. Summary of evidence-based guideline: Complementary and alternative medicine in multiple sclerosis: report of the guideline develop- ment subcommittee of the American Academy of Neurology. Neurology 2014;82:1083.
8. Devinsky O, et al. Cannabidiol in patients with treatment-resistant epilepsy:
an open-label intervention trial. Lancet Neurol 2016;15:270.
9. Friedman D, Devinsky O. Cannabinoids in the treatment of epilepsy. N Engl J Med 2015;373:1048.
10. Committee on Obstetric Practice. The American College of Obstetricians and Gynecologists. Committee Opinion: Marijuana use during pregnancy and lactation. Number 637, July 2015. Accessible à: www.acog.org/
Resources-And-Publications/Committee-Opinions/Committee-on-Obste- tric-Practice/Marijuana Use-During-Pregnancy-and-Lactation. Consulté le 21 juillet, 2016.
11. Hartman RL, et al. Controlled cannabis vaporizer administration: blood and plasma cannabinoids with and without alcohol. Clin Chem 2015;61:850.
12. Inhibitors and inducers of CYP enzymes and P-glycoprotein. Med Lett Drugs Ther 2016;58:e46.
Jentadueto XR
pour traiter le diabète de type 2
La FDA des Etats-Unis a approuvé le Jentadueto XR (non commer- cialisé – F, CH, B), une formulation à libération prolongée s’adminis- trant une fois par jour de la combinaison de linagliptine, un inhibiteur de la dipeptidyl peptidase-4 (DPP-4), et de metformine, un bigua- nide, pour le traitement oral du diabète de type 2. La linagliptine et la metformine sont disponibles depuis des années sous forme d’une combinaison à libération immédiate (Jentadueto – CH, B ; non com- mercialisé – F) nécessitant 2 prises quotidiennes.1 Des formes à libé- ration prolongée pour administration monoquotidienne combinant la metformine avec les inhibiteurs de la DPP-4 saxagliptine (Kombi- glyze XR – CH ; non commercialisé dans cette forme galénique – F, B) et sitagliptine (Janumet XR – CH ; non commercialisé dans cette forme galénique – F, B) sont aussi disponibles.2
ESSAIS CLINIQUES – Aucune nouvelle étude n’a été requise pour l’homologation du Jentadueto XR, qui est basée sur des études anté- rieures lors desquelles la linagliptine a été coadministrée avec la metformine. Il a été démontré que la prise concomitante de linaglip- tine à libération immédiate et de metformine permettait une réduc- tion supplémentaire de 0,5-1,1 % de l’HbA1c en comparaison de l’administration des deux composants individuellement.3,4
EFFETS INDÉSIRABLES – Les effets indésirables les plus fréquem- ment rapportés lors des études cliniques durant lesquelles la lina- gliptine et la metformine avaient été administrées ensemble ont été des rhinopharyngites et des diarrhées. Des réactions d’hypersensi- bilité (telles qu’angiœdème, urticaire ou hyperréactivité bronchique), une toux, une diminution de l’appétit, des nausées, des vomisse- ments et un prurit ont également été observés.
Des pancréatites aiguës, des insuffisances rénales aiguës et des ar- thralgies sévères ont été rapportées avec les inhibiteurs de la DPP-4.
En plus de ses effets sur l’homéostasie du glucose, la DPP-4 joue aussi un rôle dans la différenciation cellulaire et la fonction immuni- taire ; la sécurité d’emploi à long terme des inhibiteurs de la DPP-4 comme la linagliptine n’est pas connue.
Une acidose lactique, qui est une complication rare mais potentielle- ment mortelle, peut survenir en cas d’accumulation de metformine.
Des diminutions des concentrations sériques de la vitamine B12 se sont produites lors de l’utilisation à long terme de la metformine et ont rarement été associées à une anémie.
POSOLOGIE ET ADMINISTRATION – Le Jentadueto XR doit être pris une fois par jour avec un repas. Les comprimés doivent être avalés entiers ; ils ne doivent pas être cassés, écrasés ou mâchés.
Les patients avec un diabète insuffisamment contrôlé par la metfor- mine seule ou ceux qui reçoivent déjà la linagliptine et la metformine peuvent passer à une dose de 5 mg de linagliptine et une dose aussi proche que possible de leur dose totale quotidienne actuelle de met- formine. Les patients ayant besoin de 2000 mg de metformine par jour doivent prendre deux comprimés de Jentadueto XR à 2,5/1000 mg une fois par jour. Pour les patients ne recevant pas encore de la metformine, la dose initiale de Jentadueto XR doit être de 5 mg/1000 mg une fois par jour. La dose quotidienne maximale recommandée de la combinaison est de 5/2000 mg.
Comme la metformine,5 le Jentadueto XR ne doit pas être commencé chez les patients avec un TFGe de 30-45 ml/min/1,73 m2 et est contre-indiqué chez les patient avec un TFGe <30 ml/min/1,73 m2. La combinaison ne doit pas être administrée pendant les 48 heures sui- vant un examen d’imagerie avec produit de contraste iodé chez les patients avec un TFGe <60 ml/min/1,73 m2 ou des antécédents de