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Les mesures provisionnelles dans la poursuite pour dettes et la faillite

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Les mesures provisionnelles dans la poursuite pour dettes et la faillite

PETER, Henry, LEMBO, Saverio

PETER, Henry, LEMBO, Saverio. Les mesures provisionnelles dans la poursuite pour dettes et la faillite. In: Bernasconi, Paolo ; Chopard, René. Mesures provisionnelles judiciaires et administratives : droits et devoirs de la banque suisse et de ses clients . Bellinzona : Méta-Editions, 1999. p. 65-85

Available at:

http://archive-ouverte.unige.ch/unige:30396

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Les mesures provisionnelles dans la poursuite pour dettes

et la faillite

HENRY PETER'

1. Introduction

La durée d'une procédure de poursuite peut être telle qu'elle risque de rendre difficile, voire impossible, la réalisation de l'objectif de la loi fédéra- le sur la poursuite pour dettes et la faillite (ci-après «LP»), savoir de s'assu- rer que les avoirs du débiteur soient effectivement affectés au désintéresse- ment de ses créanciers. Afin de contourner cet écueil, le droit de la poursui- te prévoit des mesures consistant en la mise sous main de justice des droits patrimoniaux du débiteur en vue d'en garantir la réalisation.

Dans la procédure de poursuite, l'on distingue plusieurs types de mesu- res provisionnelles; ces dernières peuvent être divisées en trois catégories principales:

- les mesures conservatoires ou de sûretés (cf. en particulier le séquestre (art.

271ss LP), la saisie provisoire (art. 83 al. 1 LP) et différentes hypothèses de prise d'inventaire [(art. 83 al. 1, 162, 183 al. 1, 221 et 283 LP) infra 2.)];

- les mesures d'exécution anticipée (cf. notamment la répartition provisoire dans la saisie ou dans la faillite (respectivement art. 144 al. 2 et 266 al. 1 LP);

- les mesures procédurales (notamment l'effet suspensif (art. 36 LP) et la suspension de la poursuite par l'opposition (art. 78 al. 1 LP) ou en cas de sursis (art. 85a LP, 123 LP, 141 LP, 334 LP, etc.).

Vu le sujet qui nous a été confié, triplement limité au domaine bancaire, aux mesures provisionnelles et à la poursuite pour dettes et la faillite, le pré- sent exposé se concentrera sur la première catégorie sus-évoquée, et plus précisément encore sur le séquestre, mesure particulièrement fréquente et, à plusieurs égards, délicate en matière bancairel.

*En collaboration avec SAVERIO LEMBO, avocat à Genève.

1 Pour une description plus détaillée des mesures provisoires dans la procédure de poursuite, voir BERTRAND REEB, «Les mesures provisoires dans la procédure de poursuite», RDS II 116 (1997), pp. 421 ss., 429.

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2. Les types de mesures conservatoires urgentes

On rappellera que l'on distingue trois principales mesures conservatoi- res urgentes:

- la saisie provisoire (art. 83 al. 1 LP)2,

- l'inventaire (art. 83 al. 1, 162, 183 al. 1, 221 et 283 LP), - le séquestre (art. 271ss LP).

2.1. La saisie provisoire et l'in ven taire

A teneur de l'art. 83 al. 1 LP, lorsqu'il a obtenu la mainlevée provisoire, le créancier peut, passé le délai de paiement et selon que le débiteur est sujet à la poursuite ou à la faillite, requérir la saisie provisoire ou demander au juge qu'il soit procédé à l'inventaire au sens de l'art. 162 LP. Ces mesu- res sont destinées à assurer au créancier une protection suffisante avant et pendant la durée, souvent longue, de la procédure en libération de dette.

Nonobstant les hésitations formulées par une partie de la doctrine3, ces interventions échappent aux temps prohibés, féries et suspensions de l'art.

56 LP, en raison de leur caractère d'urgence4. Elles ne seront pas davantage discutées ici.

2.2. Le séquestre

La mesure provisionnelle du droit des poursuites qui vient immédia- tement à l'esprit du fait de son importance et de sa fréquence est sans aucun doute le séquestre, institution largement revisitée lors de la modi- fication de la LP entrée en vigueur le 1er janvier 19975. Il se justifie dès lors de concentrer notre exposé sur ce moyen et d'examiner quelques-uns de ses aspects spécifiques au domaine bancaire. Nous nous référerons à cette fin en particulier à la pratique genevoise, notoirement active et innovatrice en la matière.

L'exécution forcée d'une prestation ayant pour objet une somme d'ar- gent ou la fourniture de sûretés est réglée exclusivement par le droit fédé- ral6. Il en découle que le séquestre au sens des art. 271ss LP est la seule intervention conservatoire à laquelle il est consenti de recourir dans ces

2 REEB, op. cit., p. 435.

3 PIERRE-ROBERT GILLIERON, Poursuite pour dettes, faillite et concordat, 3e éd., Lausanne, 1993, pp. 153 et 154.

4 BERTRAND REEB, op. cit., pp. 441-443.

s Adoptée par les chambres fédérales le 16 décembre 1994; RO, 1995, p. 1309.

6 Art. 64 al. 1 Cst. Féd.

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LES MESURES PROVISIONNELLES DANS LA POURSUITE POUR DETTES ET LA FAILLITE 67 deux cas7. Le corollaire tiré de ce principe par la jurisprudence est que, lorsque le créancier dispose d'une créance pécuniaire qui fait l'objet d'un procès pendant ou à introduire, il n'est pas admissible que le juge ordonne d'autres mesures provisionnelles, mêmes en vertu d'une disposition expresse d'une loi cantonaleS. De telles ingérences sont qualifiées de

«séquestres déguisés» et, en principe, violent le droit fédéral. Ce problème ne sera pas développé plus avant dans le présent exposé9.

Enfin, nous n'examinerons pas non plus la question de la validation du séquestre, qui relève de la procédure ordinaire et n'est spécifique ni au domaine bancaire, ni aux mesures provisionnelles qui nous occupent.

3. Le séquestre (271 ss LP)

Le séquestre est un procédé provisionnel fondé sur la LP et qui est des- tiné à conserver les biens du débiteur afin que le créancier requérant puisse être désintéressé sur ceux-ci lorsqu'il aura démontré son droit- à condition naturellement qu'il s'avère à même de le faire.

Le séquestre est réglementé par les art. 271 et ss LP. Ces dispositions ont fait l'objet de modifications importantes lors de la récente révision de la LP.

L'institution du séquestre met en présence deux catégories d'intérêts divergents: ceux des créanciers qui souhaitent protéger leurs droits et ceux des débiteurs pour lesquels il est une mesure d'autant plus incisive qu'il est immédiat et qu'il ne requiert pas la démonstration d'un droit établi. Il a été généralement considéré par le passé que les conditions prévues pour l'ob- tention d'un séquestre étaient trop facilement réalisées, ce qui permettait à des créanciers dont la créance était parfois éminemment douteuse d'obtenir en Suisse, sans difficulté, le blocage d'avoirs bancaires appartenant à leur prétendu débiteurlO, C'est en particulier afin de remédier à ces excès que le législateur a posé de nouvelles conditions pour l'obtention des séquestres et sensiblement revu la procédure qui les accompagne.

7 PIERRE-ROBERT GILLIERON, op. cit., p. 364.

8 PIERRE-ROBERT GILUERON, op. cit., p. 364 et références citées.

9 Pour plus de détails, voir BERTOSSA 1 GAILLARD 1 GUYET 1 SCHMIDT,

Commentaire de la iai de procédure civile genevoise, ad. 320 n. 5, qui rappellent dans quelles conditions le juge cantonal genevois peut recourir à des mesures pro- visionnelles de droit cantonal pour interdire au défendeur de disposer de biens.

1o Message concernant la révision de la loi fédérale sur la poursuite pour dettes et la faillite du 8 mai 1991, FF 199llll 187.

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3.1. Les conditions légales pour l'obtention du séquestre

Le séquestre étant une mesure provisionnelle et urgente, on ne saurait attendre du créancier séquestrant qu'il apporte la preuve stricte des faits qu'il allègue. Dès lors, la loi se contente de la seule vraisemblance - on parle parfois de «fumus boni juriS>> - des faits concernés.

Pour obtenir un séquestre, le créancier doit ainsi rendre vraisemblable la réalisation des conditions suivantes:

3.1.1. Une créance échue et non garantie par gage

Le créancier ne peut obtenir de séquestre que pour une «dette échue>>, c'est-à-dire exigible (art. 271 al. 1 LP). Il n'existe d'exception à ce principe que lorsque le débiteur n'a pas de domicile fixe ou qu'il cèle (on dit désor- mais «fait disparaître>>) ses biens (art. 271 al. 2 LP). Par ailleurs, un séquest- re ne saurait être requis lorsque la créance invoquée est garantie par un gage.

3.1.2. La présence de biens à séquestrer appartenant au débiteur

Le créancier doit désigner les biens dont il souhaite obtenir le séquestre, et ces derniers doivent appartenir au débiteur. Pour ce qui concerne les séquestres opérés auprès de banques, ceux-ci porteront généralement sur des comptes, c'est-à-dire sur des créances du débiteur séquestré à l'égard de l'institut; sur des biens meubles, généralement des papiers-valeurs, métaux, œuvres d'art ou contenu de coffres-forts; ou encore sur des créances décou- lant par exemple d'accréditifs ou plus généralement de garanties plus ou moins conditionnelles dont le débiteur séquestré serait le bénéficiaire. Pour ce qui est de la question des éventuels biens du débiteur appartenant nomi- nalement à un tiers, il est fait renvoi au point 4. 5. ci-dessous.

3.1.3. L'existence d'un cas de séquestre

La nouvelle loi a subi d'importantes modifications en ce qui concerne les hypothèses dans lesquelles un séquestre peut être requis. Les cas justifiant un séquestre peuvent aujourd'hui être regroupés en trois catégories principales Il.

11 Pour une présentation générale, voir WALTER STOFFEL, «Le séquestre)) in La LP révisée, Lausanne, 1997, p. 263. On ne traitera pas ici du cas particulier de ce qui a été appelé le «séquestre Lugano» fondé sur la réserve opérative de l'art. 30a LP et sur l'art. 24 de la Convention de Lugano; voir à ce propos BERTRAND REEB, op. cit., p.

441 et LoUIS DALLEVES, «<ntroduction au nouveau droit du séquestre)), in Le séques- tre selon la nouvelle LP, Zurich 1997, p. 10.

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LES MESURES PROVISIONNELLES DANS LA POURSUITE POUR DETTES ET LA FAILUTE 69 Les cas visés aux chiffres 1 et 2 de l'art. 271 al. 1 LP concernent les espè- ces dans lesquelles un débiteur est introuvable, sans domicile fixe, ou cher- che à se soustraire à ses obligations en cachant ses biens ou en fuyant à l'é- tranger. Un deuxième type de situations correspond aux hypothèses dans lesquelles le créancier possède contre le débiteur un acte de défaut de biens provisoire ou définitif (art. 271 al. 1 ch. 5 LP).

La catégorie la plus commune, la troisième, est celle dans laquelle le créancier cherche à obtenir un séquestre à l'encontre des biens d'un débi- teur domicilié à l'étranger. Sous l'empire de l'ancien droit, il était dans ce cas suffisant que le débiteur ne soit pas domicilié en Suisse pour que le séquestre soit accordé. Pour les motifs exposés précédemment, il a été considéré que cette disposition permettait un trop ample recours à l'insti- tution. Le législateur a donc introduit à l'art. 271 al. 1 chiffre 4 des condi- tions supplémentaires pour l'obtention d'un «Ausliinderarresb>, Doré- navant, outre cette première condition, le créancier devra de surcroît démontrer soit que la créance «a un lien suffisant avec la Suisse», soit qu'elle se fonde sur un jugement exécutoire ou sur une reconnaissance de dettes au sens de l'art. 82 al. 1 LP.

La notion de lien suffisant avec la Suisse n'est pas nouvelle et découle en réalité de celle élaborée par le Tribunal fédéral en rapport avec le séquestre de biens d'Etats souverains. On se souviendra en effet que, depuis des années, le Tribunal fédéral a développé une jurisprudence aux termes de laquelle ne peuvent être séquestrés les biens d'un Etat étranger que pour autant que la créance alléguée présente un lien étroit avec la Suisse. Il s'agit de la condition dite de la Binnenbeziehung12. Le Message du Conseil fédé- ral, les travaux législatifs ainsi que la doctrine considèrent que ladite jurisprudence antérieure du Tribunal fédéral est pertinente dans la per- spective de l'interprétation de la nouvelle disposition.

Dans le premier arrêt rendu sur cette question, le Tribunal fédéral a esti- mé qu'un tel lien suffisant est réalisé lorsque la créance donnant lieu au séquestre résulte d'un contrat dont la prestation doit être exécutée en Suisse13.

12 A propos de la notion du lien suffisant, voir notamment BERTRAND REEB, op.

cit., p. 439; LUCIEN GANI, «Le lien suffisant avec la Suisse et autres conditions du séquestre lorsque le domicile du débiteur est à l'étranger (art. 271 al. 1 ch. 4 nLP)n, SJZ, 92 (1996), p. 227; Loms GAILLARD, «Le séquestre des biens du débiteur domici- lié à l'étranger», in Le séquestre selon la nouvelle LP, Zurich 1997, pp. 19ss.

13 ATF 123 III 494; voir à cet égard aussi le consid. 3a p. 496 dudit arrêt et les références citées où le Tribunal fédéral, après avoir rappelé que la condition du

«lien suffisant avec la Suisse» doit faire l'objet d'un examen limité à la seule vrai- semblance, déclare que- en conséquence- cette condition ne doit pas être interpré- tée restrictivement.

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Dans le secteur bancaire, la doctrine considère généralement que la condition du lien suffisant avec la Suisse est réalisée dans le cas où la créan- ce se rapporte à un accréditif bancaire émis par une banque en Suisse14. Il est en revanche probable que la seule existence d'un compte bancaire dans notre pays ne remplisse pas la condition de la Binnenbeziehung. L'admettre viderait en effet cette condition de son sens, puisque par définition tout séquestre ne peut porter que sur un objet et que le législateur n'a manifes- tement pas voulu que la seule présence de celui-ci satisfasse automatique- ment la condition en question.

Cela étant, dans un arrêt du 4 mai 1998 rendu par la Ilème Cour Civile statuant sur le recours de droit public en matière de séquestre, le Tribunal fédéral (consid. 3b bb), a déclaré que «L'existence d'un lien suffisant avec la Suisse doit être reconnue ]orque les juridictions suisses, que ce soit en vertu des règles de compétences de la LDIP ou d'une élection de for, sont com- pétentes ratione loci pour connaître de l'action>>. Il en découle à nos yeux que ladite condition du lien suffisant avec la Suisse devrait être considérée comme remplie dans tous les cas où le débiteur poursuivi est lié à son créancier séquestrant par une convention qui comprend une clause d'élec- tion de for en faveur d'une juridiction ayant son siège en Suisse.

Quand bien même il est encore trop tôt pour tirer des enseignements définitifs, il paraît incontesté que les conditions posées par la nouvelle loi en matière d'Ausliinderarrest sont substantiellement plus sévères. Si cela désole probablement certains créanciers malheureux qui caressent l'espoir de saisir des biens déposés dans des coffres helvétiques, les établissements bancaires devraient en revanche constater avec satisfaction une diminution du nombre de mesures de séquestre (en tout cas civils!) qui leur sont noti- fiées. Certains ont d'ailleurs plaidé que cet accroissement des exigences aura pour conséquence indirecte le renforcement de l'attrait de la place ban- caire suisse.

Cela étant, le créancier séquestrant dont le débiteur est domicilié à l'é- tranger pourra également solliciter le prononcé d'une mesure de séquestre s'il est au bénéfice d'un jugement définitif ou d'un titre de mainlevée au sens de la LP. Dans un tel cas, les conditions étant alternatives, le créancier n'aura pas besoin de démontrer un lien suffisant avec la Suisse.

3.2. La procédure de séquestre

La nouvelle loi n'a pas modifié les principes préexistant en la matière.

Le créancier qui souhaite obtenir le séquestre d'avoirs de son débiteur doit

14 Voir dans ce sens notamment FÉUX C. MEIER-DIETERLE, «Der AusHinderarrest im revidierten SchKG- Eine Checkliste», A)P /P)A, 1996, p. 1422; LuCIEN GAN!, op.

cit., p. 231; WALTER A. STOFFEL, «Das neue Arrestrecht», A)P /P)A, 1996, p. 1407.

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LES MESURES PROVISIONNELLES DANS LA POURSUITE POUR DEITES ET LA FAILLITE 71 s'adresser au juge compétent ratione loci et materiae. Celui-ci est déterminé par le lieu de situation des avoirs. La compétence du juge saisi étant en effet territoriale, le séquestre de biens se trouvant auprès de banques situées dans différents cantons nécessitera ainsi tout autant de requêtes -et d'or- donnances -de séquestre. De même, un séquestre pratiqué auprès du siège central d'une banque ne peut concerner que les avoirs localisés dans la cir- conscription du juge saisi et non pas, par exemple, les comptes ouverts auprès des succursales de l'institut concerné. Ces derniers comptes devront, le cas échéant, faire l'objet de séquestres décrétés par le juge du siège de chacune desdites succursales. On voit bien les conséquences insa- tisfaisantes que ceci peut avoir, par exemple dans un canton comme celui du Tessin qui est divisé en de nombreuses circonscriptions judiciaires et où les banques possèdent parfois un réseau très capillarisé de guichets; ce non- obstant cette exigence a été délibérément perpétuée par le législateur.

3.3. L'exécution du séquestre

L'ordonnance de séquestre rendue par le juge est remise directement au préposé de l'Office des poursuites du lieu où se trouvent les biens à saisir, celui-ci revêtant le rôle d'autorité chargée de l'exécution du séquestre. Dans le cas du séquestre d'avoirs bancaires à Genève, c'est donc l'Office des pour- suites de l'arrondissement de l'établissement bancaire en question qui noti- fiera l'ordonnance judiciaire de séquestrelS à la banque concernée.

L'Office des poursuites est, cela dit, principalement chargé de rédiger le procès-verbal de séquestre, lequel est établi sur la base des renseignements donnés par la banque. Ce document revêt une importance de deux points de vue au moins. Tout d'abord, la réception par le créancier séquestrant du procès-verbal de séquestre lui permettra en principe de savoir si la mesure qu'il a sollicitée a porté ses fruits (au sujet du devoir de renseigner de la banque, voir infra IV. 1.). Par ailleurs, à teneur de l'art. 279 LP, c'est la réception de ce procès-verbal qui fait courir les délais que doit respecter le créancier afin de procéder à la validation du séquestre.

3.4. Les sûretés

L'art. 273 LP prévoit que le créancier répond du dommage qu'un séquestre injustifié peut causer tant au débiteur qu'aux tiers. On a vu que, de par sa nature, le séquestre doit pouvoir être ordonné alors même que le créancier n'a pas fourni la démonstration «définitive» du bien-fondé de son droit. S'il s'avère par la suite que le séquestre n'était en réalité pas justifié, il

15 Voir à ce sujet MICHEL ÜCHSNER, «De quelques aspects de l'exécution des séquestres», in Le séquestre selon la nouvelle LP, Zurich 1997, p. 47.

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paraît en effet légitime que le créancier séquestrant soit tenu de réparer le préjudice causé au débiteur ou au(x) tiers en raison de cette mesure a pos- teriori infondée.

Afin de garantir l'éventuelle action en responsabilité pour séquestre injustifié, l'art. 273 al. 1 LP in fine stipule que le juge peut astreindre le créancier à fournir des sûretés. Le juge dispose à cet égard d'un certain pou- voir discrétionnaire et la pratique diffère d'un canton à l'autre. Dans le Canton de Genève, on requiert en principe du créancier séquestrant des sûretés correspondant au 10% du montant de la créance; celles-ci sont géné- ralement fournies sous forme d'une garantie bancaire. Il est douteux que cette pratique <<forfaitaire» soit conforme à la jurisprudence du Tribunal fédéral qui exige en effet que le juge se détermine en fonction du risque couru in casu par le débiteur16.

Les conditions de l'action en dommages et intérêts pour séquestre injus- tifié ne seront pas examinées ici17, si ce n'est pour souligner que la nouvel- le loi a fait sienne un revirement de jurisprudence amorcé par le Tribunal fédéral en 1989. Notre haute Cour avait en effet longtemps dénié au tiers la qualité pour agir. Elle a fini par la lui reconnaître dans un arrêt publié aux ATF 115 III 125. La loi a consacré ce revirement en prévoyant expressément que l'action appartient désormais non seulement au débiteur, mais égale- ment à tout tiers (de bonne foi), y compris donc aux banques qui seraient lésées par un séquestre infondé.

3.5. Les moyens de défense: l'opposition à la plainte

La LP a été révisée sur ce point de façon fondamentale dans le sens d'une simplification de la procédure de recours et d'une amélioration sen- sible de la protection des débiteurs et des tiers touchés par le séquestre, et donc de la sécurité juridique.

L'on se souviendra en effet que, sous l'empire de l'ancien droit, il n'existait en principe pas de voie de recours à l'encontre de l'ordonnance de séquestre18. Ce caractère théoriquement irrémédiable de l'ordonnance était toutefois accompagné de la possibilité d'entreprendre celle-ci ou son exécution, selon les moyens invoqués, par le biais de trois procédures dis- tinctes, auprès de trois autorités différentes, savoir (i) l'action en contesta- tion du cas de séquestre (devant le juge ordinaire); (ii) la plainte à l'auto-

16 Voir notamment ATF du 23 août 1994 C.T. SA C.S.M. qui renvoie à ATF 113 III 94 consid. 12, p. 104.

17 Voir à ce sujet notamment l'article de BERTRAND REEs, op. cit., p. 452 et l'ouvra- ge détaillé de PETER ALBRECHT, Die Haftpflicht des Arrestglaübigers, Zürich, 1968.

18 Sous réserve de la possibilité, aménagée par certains cantons, d'appeler de la décision de l'autorité de séquestre à un niveau juridictionnel supérieur sur le plan cantonal.

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LES MESURES PROVISIONNELLES DANS LA POURSUITE POUR DEITES ET LA FAILLITE 73 rité de surveillance en invoquant un vice (en principe de forme) ou un abus de droit commis par l'autorité d'exécution du séquestre et (iii) le recours de droit public au Tribunal fédéral pour violation de l'art. 4 de la Constitution fédérale contre les autres points de l'ordonnance de séquest- re. On n'insistera pas sur la complexité d'une telle réglementation, dérou- tante pour les administrés et face à laquelle seuls les spécialistes - et enco- re- trouvaient leur voie19. Dans le but d'améliorer la situation du débi- teur séquestré, le législateur a introduit une procédure en principe unique ou en tout cas plus simple et compréhensible: l'opposition au séquestre.

Celle-ci permet de faire valoir la plupart des griefs envisageables dans le cadre d'une seule procédure, en ouvrant par ailleurs cette voie plus large- ment et en instaurant un droit d'être entendu en faveur des différentes personnes intéressées.

L'opposition est adressée au juge même du séquestre. Il ne s'agit donc pas d'une procédure d'appel à l'encontre de l'ordonnance, mais d'une sorte de révision immédiate de celle-ci, par le même magistrat, cette fois dans un contexte contradictoire.

Cela étant, l'instauration de la voie de l'opposition ne rend pas caduque celle de la plainte. La première est en effet dirigée contre l'or- donnance de séquestre; la deuxième a pour cible son exécution (art. 17ss LP). Les nouvelles dispositions de la LP n'entrainent en principe aucun changement de ce point de vue. Toutefois, en l'absence de toute possibili- té de contester le bien- fondé de l'ordonnance sous l'ancien droit, la pra- tique tolérait que l'Office pût parfois ne pas se limiter à un examen essen- tiellement formel de l'ordonnance de séquestre qui lui avait été transmise pour exécution. Il est probable que les compétences des autorités de pour- suite soient dorénavant à nouveau limitées aux mesures d'exécution stric- to sensu des séquestres et donc à un contrôle purement formel de l'or- donnance. D'autre part, comme le relevait à juste titre Reeb, <<La plainte ne sera recevable que dans la mesure où le moyen invoqué ne peut être soulevé par la voie de l'opposition à l'ordonnance de séquestre ou du recours contre la décision sur l'oppositiow>20. Cette approche devrait limi- ter les incertitudes quant au choix des voies à suivre, dont il faut toutefois admettre qu'elles continueront probablement en pratique à être parfois nébuleuses.

19 Pour un résumé de la pratique sous l'ancien droit, voir WALTER STOFFEL, op.

cit., note 11, p. 299.

20 BERTRAND REEB, op. cit., p. 489 et PIERRE-ROBERT GILUERON, Le séquestre dans

la LP révisée, BLSCHK (59) 1995, pp. 121ss, 140.

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HENRY PETER

3.5.1. La qualité pour agir

L'art. 278 al. 1 LP prévoit que peut former opposition «celui dont les droits sont touchés par un séquestre». Il ressort de cette formulation de la disposition que le législateur n'a manifestement pas voulu limiter le droit d'opposition au débiteur séquestré, mais qu'elle est également ouverte à tout tiers concerné par la mesure21. La légitimation active doit être ainsi reconnue de façon large; ceci transparaît d'ailleurs du texte même de l'art.

278 al. 1 LP où le terme «touché par un séquestre», à première vue mal- adroit, a été à dessein choisi pour mettre en évidence qu'il n'est pas même nécessaire que le tiers opposant soit <<affecté» dans ses droits ou ses obliga- tions: il suffit qu'il soit concrètement atteint - matériellement ou juridique- ment- par la mesure ordonnée22.

Il apparaît dès lors que, selon les circonstances, la banque auprès de laquelle des biens auront été séquestrés - voire même une banque tierce - pourra disposer de la qualité pour former opposition. On imaginera à titre d'exemple le cas d'une banque dont l'activité en faveur de son client est ren- due impossible du fait d'une ordonnance de séquestre portant sur des accréditifs.

3.5.2. Le délai d'opposition

L'art. 278 al. 1 LP prévoit que l'opposition doit être formée dans les dix jours à compter du moment où l'opposant a eu connaissance du séquestre.

C'est donc la connaissance effective du séquestre qui fait courir le délai.

Dans la perspective qui nous occupe ici, l'existence d'un séquestre sera en général révélée au débiteur par l'établissement bancaire auprès duquel les biens saisis sont situés. L'Office ignorera en effet dans la règle où se trouve effectivement le débiteur séquestré et ne pourra de toute manière commu- niquer avec lui qu'en respectant les voies diplomatiques, ce qui peut durer des semaines, voire des mois. La banque est en revanche en principe à même de se mettre rapidement et informellement en contact avec son client, et c'est donc par elle que celui-ci sera informé en premier lieu. On peut même considérer qu'il s'agit là d'une obligation à charge de l'institut de crédit, laquelle découle de sa qualité de mandataire. Pour des raisons de preuve, afin d'éviter toute contestation quant au respect du délai, on ne peut cela étant que recommander aux banques d'informer sans attendre et par écrit leurs clients de la survenance d'un séquestre.

21 BERTRAND REEB, op. cit., p. 473; RUDOLPH OrTOMANN, «Der Arrest», RDS, 1996, p. 256.

22 BERTRAND REEB, op. cil., p. 474 et ATF 122 Il 36 et 132.

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LES MESURES PROVISIONNELLES DANS LA POURSUITE POUR DEITES ET LA FAILLITE 75 3.5.3. Les motifs d'opposition

L'objet de l'opposition est de permettre au juge ayant ordonné le séques- tre de procéder à un nouvel examen de la question, après avoir donné l'op- portunité au débiteur (et/ ou au(x) tiers) de présenter ses arguments. Dans ce contexte, l'opposition peut porter sur chacune des conditions requises pour le prononcé de la mesure provisionnelle litigieuse. Ainsi, l'opposant pourra notamment alléguer que le créancier n'a pas rendu sa créance vrai- semblable ou qu'aucun cas de séquestre n'était réalisé. L'opposant pourra également faire valoir que le séquestre concerné est <<Ïnvestigatoire» (ou

«exploratoire>>) ou «générique>>, tous deux devant être écartés. Le premier a été défini par Gilliéron comme étant celui par lequel un prétendu créancier - qui en réalité ne l'est pas23 - cherche seulement à satisfaire sa curiosité en tentant de localiser les avoirs du débiteur ou de connaître leur importance et leur nature. Le séquestre dit générique24, en second lieu, qui est parfois également exploratoire, est donné lorsque le créancier ne sait manifeste- ment pas où se trouvent les biens de son debiteur et «ratisse donc large», c'est-à-dire demande le séquestre auprès d'un grand nombre de banques.

La doctrine cite à cet égard l'exemple d'un séquestre effectué auprès de tous les établissements bancaires du Canton de Genève, soit environ 13025.

Cela dit, si la procédure d'opposition est contradictoire, elle n'en demeure pas moins sommaire. Son but reste en particulier limité à s'assurer de la vraisemblance - par opposition à la certitude - des faits allégués par le créancier. Elle ne saurait dès lors être confondue avec une véritable action au fond dans le cadre de laquelle toutes les mesures probatoires sont possibles. Dans le cadre de l'opposition au séquestre, l'administration des preuves sera ainsi limitée à celles qui sont immédiatement disponibles. En termes concrets, cela signifie en particulier que ni le créancier ni le débiteur ne peuvent solliciter l'audition de témoins pour étayer leurs positions respectives.

Statuant sur opposition, le juge rejette ou admet cette dernière, et ce par- tiellement ou totalement. En conséquence, l'ordonnance de séquestre ren- due sur requête unilatérale sera confirmée, modifiée ou annulée.

23 PIERRE-ROBERT GILLIERON, op. cit., note 3, 1993, p. 376.

24 La terminologie n'est à cet égard pas uniforme: certains auteurs considèrent, probablement à raison, qu'un séquestre «générique» est celui qui désigne les objets à séquestrer par leur genre, ce qui est licite, le séquestre <<investigatoire>), celui-ci illi- cite, étant celui dont l'objet principal est de satisfaire la curiosité du créancier ou encore de lui permettre de découvrir - ce que par hypothèse il ignore - où les biens du débiteur se trouvent. Voir notamment AUBERT/BÉGUIN/BERNASCONI, Le secret bancaire suisse, Berne, 1995, p. 206.

25 Voir à ce propos MICHEL ÜCHSNER, op. cit., note 3, p. 57.

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Le législateur fédéral a prévu à l'art. 278 al. 3 LP que la décision sur opposition du juge de première instance peut être déférée dans les dix jours à l'autorité judiciaire (cantonale) supérieure. Il s'agit d'un recours ordinaire qui permet de revoir entièrement et librement les faits et Je droit26.

S'agissant de la qualité pour agir, il importe de souligner que tant Je créan- cier que Je débiteur - ou encore les tiers, notamment la banque concernée - peuvent interjeter recours. Ainsi, Je créancier qui a obtenu une ordonnance de séquestre annulée sur opposition du débiteur ou d'un tiers peut former recours à l'encontre du jugement révoquant Je séquestre.

3.5.4. L'effet suspensif de l'opposition et du recours

Une question importante qui se pose en pratique a trait au sort des biens séquestrés lorsque l'ordonnance est contestée. L'art. 278 al. 4 LP pré- voit expressément que J'opposition et Je recours «n'empêchent pas le séquestre de produire ses effets». Par conséquent, dès lors que Je créancier a obtenu un séquestre en sa faveur, les biens demeureront bloqués tant que la procédure ne sera pas arrivée à son échéance, c'est-à-dire aussi longtemps que l'ordonnance n'aura pas été modifiée ou annulée par une décision entrée en force de chose jugée. Dans ce contexte, on relèvera qu'à Genève l'autorité cantonale de surveillance a même estimé (à nos yeux à juste titre) que l'Office des poursuites ne pouvait procéder à la levée du séquestre avant d'avoir reçu J'arrêt du Tribunal fédéral statuant sur une requête d'effet suspensif accompagnant un recours de droit public à l'en- contre de la dernière décision cantonale prononçant ou confirmant la révo- cation d'une ordonnance de séquestre27.

4. Problemes spécifiques aux banques 4.1. Le devoir de renseigner des banques

Lorsqu'une banque reçoit une ordonnance de séquestre, elle est généra- lement invitée par l'Office non seulement à bloquer les biens du débiteur poursuivi, mais également à se déterminer expressément sur la question de savoir si la mesure a porté- et à concurrence de quel montant. Le problème qui se pose est donc de savoir si les banques détentrices de biens séquestrés doivent renseigner l'Office dès réception de l'ordonnance de séquestre, et si cette obligation est assortie d'une quelconque sanction. Le problème est

26 WALTER STOFFEL, op. cit., note 11, p. 289.

27 Décision non publiée de l'Autorité de surveillance des Offices de poursuite et de faillite de Genève du 12 novembre 1997.

(14)

LES :MESURES PROVISIONNELLES DANS LA POURSUITE POUR DETIES ET LA FAILLITE 77 délicat; on voit en effet bien qu'une telle obligation heurte de front celle du respect du secret bancaire.

L'ancienne LP étant muette sur la question, la jurisprudence a donc dû combler cette lacune. Ainsi, le Tribunal fédéral avait développé la solu- tion nuancée bien connue: une banque requise de renseigner l'Office ne pouvait se retrancher derrière le secret bancaire28. Toutefois, l'Office n'é- tait pas habilité à utiliser la force publique, ni à recourir à la menace d'une sanction pénale en cas de refus de renseigner du banquier, à moins que la créance à la base du séquestre ne constituât un titre exécutoire29 (jugement - ou sentence arbitrale - exécutoire en Suisse30, commande- ment de payer non frappé d'opposition31 ou acte de défaut de biens après saisie32). La banque récalcitrante engageait cependant sa responsabilité civile s'il devait par la suite s'avérer que, du fait de son silence, le créan- cier avait subi un dommage33.

Depuis le 1er janvier 1997, une obligation de renseigner a été introduite à charge des tiers à l'art. 91 al. 4 LP, qui concerne la saisie. En vertu de cette disposition, «les tiers qui détiennent des biens du débiteur ou contre qui Je débiteur a des créances ont, sous menace des peines prévues par la loi (art.

324 ch. 5 CP), la même obligation de renseigner que le débiteur.» La doctri- ne est partagée sur la question de savoir si cette norme est applicable par analogie au séquestre (art. 275 LP).

Gilliéron estime qu'il incombe désormais expressément aux tiers qui détiennent des biens du débiteur ou contre lesquels ce dernier possède des créances d'indiquer tous les droits patrimoniaux du poursuivi, sous mena- ce de la peine d'amende prévue par l'art. 324 ch. 5 CP. Citant le Tribunal fédéral, il ajoute d'ailleurs que, sous l'ancien droit, il n'était <pas facile d'ac- cepter que l'autorité ait, pour ainsi dire, capitulé devant l'insoumission des établissements bancaires>>34.

Dallèves ne partage pas cette opinion. Cet auteur démontre, de maniè- re à notre avis convaincante, que l'ancienne jurisprudence a été indirecte- ment confirmée par le silence du Message du Conseil fédéral à ce propos et ajoute que «si on avait voulu, par une disposition nouvelle, renverser la solution bien établie dans un domaine aussi important et sensible que Je

28 ATF 108 III 116 = )T 1985 JI 4 et les références citées.

29 Voir pour le détail CARLO GICK-SCHLÀPFER, Die Mitwirkungspflichten von Drittpersonen im schweizerischen Pfiindungs- und Arrest-verfahren, Zürich, 1980.

30 ATF 107 III 51 = JT 1983 JI 138.

31 ATF 109 III 22.

32 LoUis DALLEVES, Fiches juridiques suisses, n. 740, p. 17.

33 AUBERT /BEGUIN/BERNASCONI, op. cit., p. 208.

34 PIERRE-ROBERT GILUERON, op. cit., note 20, p. 139.

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séquestre en banque, le législateur n'aurait pas manqué d'expliquer ce

revirement>>35.

Nous n'avons connaissance d'aucune décision du Tribunal fédéral qui tranche clairement cette question. On retiendra quoi qu'il en soit que, dans l'attente d'éclaircissements jurisprudentiels, il existe un risque (théorique) qu'une sanction pénale soit infligée à une banque insoumise et, en tout état de cause, que celle-ci engage sa responsabilité civile en refusant de rensei- gner l'Office.

Cela étant, on précisera qu'en vertu de la nouvelle réglementation le devoir de renseigner paraît incomber uniquement à la banque qui détient des biens du de'biteur ou contre laquelle ce dernier dispose de créances (art.

91 al. 4 LP). Si l'on s'en tient en effet à la lettre de cette disposition, on pour- rait soutenir que la banque qui ne possède aucun actif appartenant au débi- teur peut conserver le silence. Dans cette hypothèse, son comportement ne devrait logiquement pas engager sa responsabilité pénale ou civile à l'égard du créancier qui a continué à tort- ou en tout cas en vain- sa procédure.

Cette interprétation ne serait toutefois pas convaincante. De fait, dès lors que rien ne laisse clairement entendre que le législateur ait voulu modifier une pratique consolidée en la matière36, il est probable que, considérant que l'art. 91 al. 4 LP n'est qu'une codification de la jurisprudence préexis- tante, les tribunaux continuent à examiner le devoir de renseigner des banques à la lumière des principes qui avaient été dégagés par notre haute Cour; or, celle-ci avait établi qu'une banque répond du dommage qu'elle cause lorsque, ne détenant aucun avoir du débiteur et ne le disant pas, elle induit implicitement le créancier à poursuivre inutilement la procédure qu'il a entamée.

4.2. L'étendue du séquestre (art. 97 LP)

L'art. 97 LP, applicable par analogie au séquestre par le renvoi de l'art.

275 LP, requiert de l'Office qu'il ne bloque que les biens nécessaires pour satisfaire les créanciers saisissants en capital, intérêts et frais. La mise en oeuvre de cette disposition est en pratique délicate lorsque la créance fon- dant le séquestre porte intérêts. En effet, ceux-ci courent jusqu'à ce que l'Office soit en mesure de verser le produit de la poursuite, c'est-à-dire pos- térieurement à la conversion du séquestre en saisie (art. 144 al. 4 LP). La dif- ficulté réside précisément dans le fait qu'il est en général impossible, lors de

35 LOUIS DALLEVES, op. cit., note 11, pp. 9 et 16. Cet auteur appuie sa thèse sur le fait que le projet de l'al. 5 de l'art. 324 CP, qui sanctionne l'obligation de renseigner des tiers, citait expressément l'art. 275 LP (exécution du séquestre). Or le texte final ne contient plus cette référence. Selon lui cette suppression démontre que le législa- teur a voulu traiter le séquestre d'une manière différente de la saisie.

36 MICHEL ÜCHSNER, op. cit., pp. 61-62.

(16)

LES MESURES PROVISIONNELLES DANS LA POURSUITE POUR DEITES ET LA FAILLITE 79 l'exécution du séquestre, de prévoir quand la créance du créancier séques- trant sera établie de manière définitive, principalement parce que la durée de la procédure au fond peut varier considérablement selon les cas.

Ce problème revient souvent dans le domaine bancaire, chaque fois notamment que le débiteur poursuivi dispose auprès de sa banque d'ac- tifs dont le total est supérieur au montant réclamé par le créancier séquestrant. La question se pose donc de savoir ce que la banque doit bloquer dans cette hypothèse et, par voie de conséquence, ce qu'elle peut laisser à la libre disposition de son client.

La solution pratiquée par les Offices genevois consiste à limiter l'éten- due du séquestre au montant réclamé par le créancier séquestrant, aug- menté de dix ans d'intérêts. Il faut préciser que ce modus operandi est adopté uniquement sur demande de la banque ou du débiteur; l'Office opère alors le calcul et autorise le débiteur à disposer librement des actifs qui excèdent la somme ainsi déterminée. Cette période de dix ans peut paraître longue; les Offices genevois la justifient par leur souci d'éviter d'engager leur responsabilité dans le cas où les actifs bloqués au jour du séquestre devaient s'avérer insuffisants pour désintéresser le créancier séquestrant lors de la conversion du séquestre en saisie.

Outre la délicate question des intérêts, l'Office devra aussi tenir compte de ce que le nouvel art. 88 al. 4 de la LP permet au créancier séquestrant de demander que sa créance soit <<recalculée» au moment de la continuation de la poursuite (après séquestre), dans l'hypothèse où celle-ci est libellée en une monnaie étrangère et que la conversion qui a été (nécessairement) effectuée en francs suisses au moment de la concession du séquestre se basait sur un cours de change qui apparaît a posteriori défavorable compte tenu des taux de change en vigueur au jour de la réquisition de continuer la poursuite. Ceci devrait inciter les Offices des poursuites à faire preuve d'en- core plus de prudence dans la détermination des montants à séquestrer.

4.3. La sauvegarde des droits de la banque sur les avoirs séquestrés Il incombe à celui qui entend faire valoir des droits préférables sur les biens séquestrés (en général droit de propriété ou de gage) de l'annoncer à l'Office des poursuites afin que la procédure prévue aux art. 106-109 LP puisse être mise en oeuvre. Ceci concerne en particulier les banques qui, souvent, disposent elles-mêmes de prétentions sur les avoirs concernés, et ce en vertu d'actes de nantissement généraux ou spéciaux, d'actes de ces- sion ou encore simplement du fait de leurs conditions générales. On sait à ce dernier égard que celles qui sont proposées par l'Association Suisse des Banquiers comprennent précisément un droit de gage et de cession.

Un problème particulier se pose à ce propos dans la perspective qui nous intéresse ici, celui de savoir à qui l'Office doit assigner le délai de 10

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jours (art. 107 al. 2 LP) ou de 20 jours (art. 108 al. 2 LP) pour introduire l'a~­

tion, en d'autres termes si le rôle de demandeur doit incomber à la banque ou au créancier séquestrant. La question avait été discutée par le Tribunal fédéral dans un arrêt de 199037. En substance, il avait été établi à cette occa- sion que, puisqu'un compte bancaire n'était pas un bien meuble (auquel cas le critère serait celui de sa possession) mais une créance, il appartenait à l'Office des poursuites de déterminer laquelle des prétentions, respective- ment de la banque et du créancier séquestrant, apparaît la mieux fondée; ce sera à l'autre partie qu'il appartiendra d'introduire l'action et donc à la fois d'en avancer les frais et d'en supporter la charge de la preuve. Il est ainsi conseilla ble aux banques d'être aussi convaincantes que possible, au fond et à la forme, lorsqu'elles font valoir leurs droits prétendument préférables.

En ce qui concerne le secret bancaire, celui-ci s'efface devant le droit de mainmise officielle en cas de séquestre. Pour garantir ses propres préten- tions, la banque peut donc sans crainte - c'est une incombance- annoncer à l'Office les actifs frappés par le séquestre en faisant valoir son droit prio- ritaire sur ces mêmes biens38.

On rappellera enfin que la loi ne fixe pas de délai précis pour notifier des droits préférables; la jurisprudence a d'ailleurs établi qu'une revendication peut intervenir jusqu'à la distribution des deniers39. Toutefois, de jurispru- dence constante, un retard déraisonnable est considéré comme constitutif d'un abus de droit et entraîne la déchéance de la faculté de faire valoir son droit40, Le critère est à cet égard en principe que le tiers revendiquant ne doit pas induire le créancier à entamer des procédures inutiles41.

4.4. La gestion des biens frappés par le séquestre

Comment et par qui les actifs séquestrés doivent-ils êh·e gérés?

En vertu de l'art. 275 LP, la conservation et la gestion de ces actifs devraient être assurées en application des art. 98 à 105 LP qui concernent la saisie. Ce simple renvoi a toutefois été considéré comme insuffisant par une partie de la doctrine42.

37 ATF 116 III p. 82ss, 84/85. Voir aussi ATF 116 III 82 consid. 2: «ln questo casa la nozione di possesso è supplita da quella di migliore verosimiglianza: se la posi- zione del terza rivendicante appare provvista di maggior fondamento rispetto a quella del debitore, incombe al creditore promuovere azione; nell'ipotesi contraria il termine per agire va assegnato al terza (DTF 97 III 64 consid. 1, 88 III 57 consid. 1).».

38 Voir à cet égard notamment AUBERT/BEGUIN/BERNASCONir etc., op. cit., pp.

208-209.

39 ATF 106 II 57= JT 1982 II 85 = S) 1981168.

40 ATF 109 III 18 = JT 1985 II 70.

41 ATF 113 III 104 = )T 1989 II 124.

42 MICHEL ÜCHSNER, op. cit., pp. 47, 74.

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LES MESURES PROVISIONNELLES DANS LA POURSUITE POUR DETTES ET LA FAILLITE 81 Ainsi, en matière bancaire, lorsque le séquestre porte sur des espèces, billets de banque, effets de change ou autres titres au porteur ou transmis- sibles par endossement, métaux précieux ou objets de prix, l'Office les prend sous sa garde (art. 98 al. 1 LP). A Genève, ces biens devraient être placés en consignation auprès de la caisse de l'Etat de Genève, conformé- ment aux art. 9 et 24 LP. Pour le reste et d'une manière générale, les Offices des poursuites genevois font preuve de grande prudence, en ce sens qu'ils s'efforcent de ne prendre de décisions de gestion qu'après avoir obtenu l'ac- cord ou l'avis du débiteur et du créancier.

Cela dit, le devoir de conservation de l'Office ne peut lui incomber que si la banque détentrice a porté à sa connaissance l'existence et la nature des biens séquestrés, ce qui est rare - du moins en l'état et pour les rai- sons dont il a déjà été question. En cas de silence, la banque détentrice assume seule la responsabilité de la gestion, notamment à l'égard du créancier séquestrant. Ce dernier, parvenu au terme de sa poursuite, pourra le cas échéant faire valoir la perte de valeur subie par les actifs par rapport au jour du séquestre43, à condition naturellement qu'il démontre aussi le lien de causalité entre ce dommage et le comportement de la banque. Il en découle que si le séquestre porte sur des biens dont la valeur est susceptible de varier considérablement (métaux précieux, devi- ses, dérivés), il peut être conseillable que la banque réalise ces biens en vue de pouvoir assurer au moins la conservation de leur valeur au jour du séquestre. Pour ce faire, des investissements plus sûrs, tels que des placements à terme, peuvent être envisagés. La question est toutefois délicate, car le droit du créancier séquestrant n'est qu'éventuel et il paraît assez discutable que l'on puisse imposer au débiteur séquestré - mais seulement présumé - de liquider ses positions du seul fait du séquestre.

Ceci risque en effet de le priver de plus-values potentielles parfois délica- tes à démontrer, ou même seulement de constituer une ingérence préju- diciable dans la politique globale de gestion de son patrimoine. Dans une perspective pratique, les banques tentent parfois de convenir avec le débiteur et le créancier d'une administration des biens séquestrés qui satisfasse les deux parties.

4.5. Le séquestre de biens appartenant nominalement à un tiers

C'est là un problème fréquent et désormais classique dans le domaine bancaire.

Après quelques hésitations et non moins d'excès, la jurisprudence du Tribunal fédéral a, depuis plusieurs années, restreint les possibilités dont dispose le créancier d'obtenir le séquestre de biens appartenant nominale-

43 MICHEL ÜCHSNER, op. cit., pp. 47, 75.

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ment à un tiers, en exigeant qu'il démontre ou en tout cas qu'il rende vrai- semblable que ces biens «sont en réalité la propriété du débiteuN44.

Le législateur a apparemment voulu confirmer cette jurisprudence par sa nouvelle rédaction de l'art. 272 al. 1 ch. 3 LP, qui exige désormais que le créancier rende vraisemblable l'existence de biens «appartenant» au débi- teur. Au-delà de cette déclaration de principe, la question demeure de savoir comment ladite jurisprudence et l'art. 272 al. 1 ch. 3 LP s'appliquent concrètement lorsque le créancier demande le séquestre de biens qui sont formellement détenus par un tiers. Nous sommes de l'avis que le critère

«d'appartenance» au débiteur devrait être interprété de façon relativement rigoureuse. Les simples affirmations du créancier ne sauraient ainsi suffire;

il convient d'exiger plus.

4.5.1. Cas dans lesquels le séquestre est exclu

Selon une jurisprudence aujourd'hui bien établie, le séquestre ne doit pas porter sur des biens qui ne sont pas la propriété du débiteur séquestré.

Ainsi, un séquestre sera nul s'il vise des biens «qui, aux dires même du créancier, de toute évidence n'appartiennent pas au poursuivj,,45. Selon cette même jurisprudence, la détermination de la propriété des biens se fait sous un angle juridique et non économique.

On peut citer à ce propos la question des biens détenus à titre fiduciaire, qui a fréquemment occupé nos tribunaux. Selon la conception traditionnel- le du droit suisse, le propriétaire fiduciaire doit être considéré comme un propriétaire à part entière46. Il s'ensuit qu'un séquestre dirigé contre un débiteur fiduciant et opéré sur des biens détenus pour lui par un tiers agis- sant à titre fiduciaire est nul, car il vise en réalité des avoirs qui n'appar- tiennent précisément pas au poursuivi: «les biens appartenant à une per- sonne physique ou juridique à titre fiduciaire ne peuvent être séquestrés dans le cadre d'une poursuite introduite contre le fiduciant: dans ce cas, le fiduciaire est un tiers au sens de la jurisprudence précitée>>47.

En application des susdits principes, on ne peut pas non plus admettre une ordonnance de séquestre simplement parce que sa formulation tend à faire appréhender les biens dont le débiteur est l'ayant droit économique.

Dans ce sens, la Cour de justice de Genève (suivant en cela la jurispruden- ce fédérale) a mis fin en 1992 à une pratique qui consistait à accorder de plus en plus de séquestres portant sur des biens appartenant au débiteur

44 ATF 107 III 35 = JT 1983 II 25.

45 ATF 109 III 126; ATF 107 III 38 cons. 4 et 5; ATF 105 III 114 ss cons. 4 = Sj 1980 p. 353; ATF 104 III 58 ss cons. 3 et 4

=

S) 1979 p. 236.

46 )T 1971 1 342; )T 1983 II 67.

47 )T 1983 II 67.

(20)

LES MESURES PROVISIONNELLES DANS LA POURSUITE POUR DETTES ET LA FAILLITE 83 sous son nom propre ou au nom de personnes ou entités dont les tiers séquestrés savent ou doivent savoir que l'ayant droit économique est le débitem.,,4B, La Cour a en effet estimé que, par le recours à ce libellé, le créancier séquestrant reconnaissait implicitement que le débiteur n'était pas le propriétaire juridique des biens en question, de sorte que l'Office des poursuites aurait dû refuser d'exécuter le séquestre. Dans le domaine ban- caire, on en conclura que la seule teneur du <<formulaire A», dont le but est précisément d'établir à qui les biens appartiennent en définitive d'un point de vue économique (concept de l'<<ultimate beneficiai ower>>), n'est pas décisive: elle permet en effet de prouver que le débiteur est l'ayant droit économique des biens considérés, ce qui ne signifie pas - ou en tout cas ne suffit pas à rendre en tant que tel vraisemblable - que ceux-ci lui <<appar- tiennent»49.

4.5.2. Exception: cas où les biens d'un tiers appartiennent en réalité au débiteur

Cela étant, le principe selon lequel des biens formellement possédés par un tiers ne peuvent être séquestrés n'est pas absolu. Il souffre en effet une exception à laquelle il est assez fréquemment recouru et qui se fonde sur le fait que les biens dont on demande le séquestre appartiennent en réalité au débiteur, même s'ils sont formellement possédés par un tiersSD. Les fonde- ments et les limites de cette exception sont incertaines. L'incertitude de la jurisprudence préexistante n'a d'ailleurs pas été dissipée par l'entrée en vigueur le 1er janvier 1997 de la LP modifiée. A cela s'ajoute le fait que l'au- torité de séquestre dispose d'un large pouvoir d'appréciation, pouvoir d'au- tant plus discrétionnaire qu'il concerne des faits qu'il suffit de rendre crédi- bles.

En substance, on l'a dit, l'exception consiste à affirmer et à rendre vrai- semblable que les biens déposés au nom d'un tiers appartiennent en réalité au débiteur poursuivi. La nature de la démonstration qui doit être faite par le créancier séquestrant n'est pas très claire. Certains arrêts (par exemple ATF 109 III 120) sont muets à ce propos, se limitant à une référence au caractère patent de la propriété du débiteur sur les biens séquestrés51.

48 SJ 1993 pp. 125 ss.

49 Voir à ce sujet récemment SYLVAN MATTHEY, «La notion d'ayant droit écono- mique en droit bancaire Suisse», in Freiheit und Ordnung in Kapitalmarktrecht, Zürich, 1998, pp. 53 ss., 63-65.

50 Cf. LOUIS DALLÈVES, op. cit., note 11, p. 11 et note no. 6.

51 ATF 109 III, p. 127. Voir aussi ATF 107 III 33, en particulier pp. 35 et36, consid.

2 in fine et 3.

(21)

D'autres décisions sont plus explicites, notamment l'important arrêt sus- mentionné rendu par la Cour de Justice de Genève le 8 avril199252, ou celui du Tribunal fédéral du 11 décembre 197953, Même s'ils ne le disent pas expressément, ces deux arrêts se fondent à n'en pas douter sur la théorie du

<<Durchgriff,,, c'est-à-dire sur la possibilité de «lever le voile social», dont la base légale est l'art. 2 al. 2 CC. Cette possibilité est ouverte lorsqu'il est manifestement abusif de la part du débiteur de se réfugier derrière la dua- lité juridique (entre lui-même et le tiers détenteur des avoirs) pour se sous- traire à une mesure d'exécution forcée (in casu au séquestre)54.

A notre avis, le grief sous-jacent à toutes les espèces concernées est bien celui de la théorie de la transparence (<<Durchgrif!»), même si, encore une fois, la plupart des arrêts ne s'y réfèrent pas explicitement. Il est toutefois important de le voir et de le dire, car ceci devrait permettre de mieux cer- ner les faits qui doivent être rendus vraisemblables par le créancier. On rap- pellera à ce propos que ce moyen revêt un caractère extraordinaire et que la levée du voile social ne saurait donc devenir la règle. On a vu ainsi qu'il était insuffisant d'affirmer - voir même d'établir - que le débiteur est l'ayant droit économique des titres dont on entend séquestrer les avoirs; de même, on ne pourra se contenter d'établir que le débiteur est l'actionnaire unique du tiers, sauf à remettre en cause certains principes fondamentaux de notre droit. On n'oubliera pas à cet égard, par exemple, que ledit tiers peut avoir lui-même des créanciers auxquels il pourrait être porté un pré- judice parfois grave si les actifs de leur propre débiteur pouvaient être trop facilement bloqués, souvent pendant des années.

La question devra être tranchée par l'autorité appelée à ordonner le séquestre, c'est-à-dire par le juge, et non pas par celle qui est chargée de l'exécuter, c'est-à-dire par l'Office des poursuites. La jurisprudence est en effet compliquée par le fait que, fréquemment, les parties ou les tribunaux, saisis d'un recours ou d'une plainte, semblent avoir confondu les rôles: c'est bien au seul juge de vérifier le caractère vraisemblable des affirmations du créancier, l'Office ne peut revenir sur cet examen, sauf s'il ressort manifes- tement de l'ordonnance qui lui est communiquée que les biens n'appartien- nent pas au débiteur.

4.5.3. Moyens de droit ouverts au tiers séquestré

Quoi qu'il en soit, dès lors qu'un juge aura admis que les conditions d'application de l'exception susdite sont remplies, et qu'il aura, partant,

52 S) 1993, p. 125.

53 ATF 105 III 107.

54 On renverra à ce propos plus précisément à SJ 1993, p. 130 et à ATF 105 Ill, p.

113. Voir aussi ATF 10811 213; ATF 105 Ill113 consid. 3; ATF 102 Ill 170ss; RS) 1989 p. 85-86; ATF 8511 111 = )T 1960121 consid. 3.

(22)

LES MESURES PROVISIONNELLES DANS LA POURSUITE POUR DETTES ET LA FAILLITE 85 concédé le séquestre sur des biens appartenant nominalement à un tiers, ce dernier, s'il conteste la mesure, pourra intervenir de plusieurs manières:

(i) il pourra tout d'abord recourir à la procédure d'opposition: le juge (éventuellement en deuxième instance cantonale) sera, dans ce cadre, amené à réexaminer si les conditions d'existence de l'exception en ques- tion (la vraisemblance d'un cas de «Durchgrifh>) sont réunies;

(li) pour mémoire, on rappellera qu'il est théoriquement possible d'atta- quer la décision rendue en dernière instance cantonale dans le cadre de la procédure d'opposition, et ce par la voie du recours de droit public;

(ill) si le vice est tellement flagrant que l'Office des poursuites aurait dû le relever au moment de l'exécution du séquestre, par exemple s'il est absolument évident que les biens n'appartiennent pas au débiteur, en particulier lorsque le créancier lui-même ne l'affirme pas, il reste théori- quement possible d'entreprendre l'exécution du séquestre par la voie de la plainte (art. 17ss LP);

(iv) enfin - et indépendamment de ce qui précède55 - le tiers qui estime disposer d'un droit préférable sur les avoirs, y compris celui au nom duquel ceux-ci sont déposés, disposera de la voie classique de l'action en revendication des art. 106-109 LP dont il a déjà été question56.

Indépendamment de la question du fardeau procédural de l'action, c'est dans le cadre de cette voie ordinaire que se discutera, le cas échéant, la question du bien- fondé des affirmations du créancier séquestrant concernant l'appartenance des avoirs, par hypothèse rendu vraisemblable dans le cadre de la procédure de séquestre.

55 L'action en revendication n'est pas soumise au principe de subsidiarité par rapport aux autres moyens de droit mentionnés précédemment. Il sera toutefois conseillable au tiers d'intervenir à titre principal par la voie de l'opposition, puisque celle-ci permet de mettre à néant le séquestre ab initia. Le tiers conservera toutefois, au fond, la faculté (pleine) de faire valoir sa thèse dans le cadre de l'action en reven- dication.

56 Cf. supra, IV.3.

Références