J
OURNAL DE
T
HÉORIE DES
N
OMBRES DE
B
ORDEAUX
C
ORNELIUS
G
REITHER
Sur les normes universelles dans les Z
p-extensions
Journal de Théorie des Nombres de Bordeaux, tome
6, n
o2 (1994),
p. 205-220
<http://www.numdam.org/item?id=JTNB_1994__6_2_205_0>
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205
par CORNELIUS GREITHER
Introduction
L’origine
de ce travail était l’observation suivante : d’unepart,
la struc-turegaloisienne
du groupe des unités(ou
desp-unités)
dans le n-ièmeétage
d’une tourcyclotomique
F 00/ F
n’est connuequ’à
un groupe finiprès.
D’autre
part,
les groupes des unitéscyclotomiques
parexemple
sont mieuxconnus du
point
de vue de la structuregaloisienne,
et on remarque que cesunités
"spéciales"
sont souvent des normes universelles: ellesproviennent
de tous les
étages supérieurs
de la tour par la norme. Cela nous a amené àétudier les normes universelles dans un cadre
plus général,
cequi,
nousper-mettra un
grand
choixd’applications
dans la suite de l’article. Pour toutfoncteur A en
Zp-modules,
défini sur lacatégorie
des corps denombres,
et muni de
morphismes normiques
(cela
seraprécisé
au§1),
et pour touteZp-extension F,,IF
d’un corps de nombresF,
nous définissons le foncteurdes normes universelles vA associé au foncteur A en
posant :
Remarque
sur laterminologie :
Dans la théorie du corps declasses,
les "norme universelles" sont les élémentsqui
sont normes dans toute extensionfinie. La définition des normes universelles que nous venons de donner est
évidemment différente: elle
dépend
du choix d’un foncteurA,
et aussi de l’extensionFooi F.
Celadit,
aucune confusionterminologique
ne résulterade notre
emploi
du terme.Bien
sûr,
l’exemple
canonique
seratoujours
A(F) =
p-complétion
dugroupe des
(p-) unités
de F. Nous exhibonsquelques
autres axiomes tels que tout foncteur A soumis à ces axiomes satisfasse à la conclusion: pour tout n, le groupe des normes universelles modulotorsion,
soitv(AIAtor) (Fn),
estlibre sur l’anneau de groupe
Zp[Gal(Fnl F)],
avec un rangqui
est calculable. Bien que la preuve ait besoin des A-modules dans lestyle
d’Iwasawa,
elle n’est pastrop
compliquée.
Les axiomes dont nous venons deparler
sontassez
évidents,
saufpeut-être
lequatrième,
qui
est de naturecohomologique
(il
impose
des conditions sur certains groupesH1 ).
Dans la 2ème
section,
on trouve maintesapplications.
Pour A =p-complété
du groupe desp-unités,
les axiomes serontsatisfaits,
et on auradémontré un résultat
qui
remonte à KUZ’ MIN(1972)
pour laZp-extension
cyclotomique.
Unelégère
modification est valable pour les unités à laplace
desp-unités.
Cecigénéralise
un résultat de DE SHALIT(1989).
Apriori,
il n’est même pas clair si le groupe des normes universellesdans,
disons,
E’(F)
Q9Zp
est nontrivial,
si l’on nedispose
pas d’unsystème
d’unitésspéciales,
voirecyclotomiques
ouelliptiques.
Finalement,
nous obtiendronsdes résultats
analogues
pour lep-complété
du foncteurK3,
à l’aide denom-bre de résultats
profonds
deLEVINE,
MERKUR’EV -SUSLIN,
BOREL etKAHN.
A la fin du
présent article,
on trouveraquelques
compléments:
uneversion
algébrique
de la formuleanalytique
des nombres de classes dansquelques
casparticuliers
(on
rédémontre un résultat deKIM,
BAE etLEE);
et un lien avec laconjecture
p-adique
deGross,
cequi
permet,
à titrecon-jectural,
de déterminer les groupes de normes universelles defaçon
encoreplus précise.
Cet article a été achevé
pendant
unséjour
à l’université de Bordeaux.Je tiens à remercier cet établissement et en
particulier
Ph.Cassou-Noguès.
Je suis aussi très reconnaissant à Th.
Nguyen
Quang
Do pour une lettre surle
sujet
de cetarticle,
dontj’ai
tirégrand profit.
Enfin, je
veux remercierA. Jehanne pour sa lecture
critique
de ce texte.1. Résultats
généraux
On considère un foncteur A de la
catégorie
des corps de nombres dansla
catégorie
desZp-modules
degénération finie, p
étant un nombrepremier
fixé. Pour toute extension
LIK
de corps de nombres on a uneapplication
naturelle
A(K) - A(L),
image
de l’inclusion K C L sous le foncteur A.On suppose en outre que ce foncteur satisfait aux conditions suivantes:
Pl)
Il existe unhomomorphisme
normique
N -MA :
~4(L) 2013~
A{K)
pour toute extensionLIK,
et au cas oùL/K
estgaloisienne
avecgroupe
G, l’application composée
A(L) - A(K) -
A(L)
(la
secondeétant
l’application
naturelle)
coïncide avec lamultiplication
par la sommenormique
sG =EueG
~.P2)
A satisfait à la descentegaloisienne:
Pour toute extensionG-galoi-sienne
LIK,
l’application
A(K) -->
A(L)
estinjective
d’image
A{L) G .
Onpeut
alors la considérer comme une inclusion.De
plus,
on se donne uneZp-extension
jFoo
=Un Fn
d’un corps de nombresF. Le groupe de Galois de
jFoo
surFn
sera notérn,
et r sera le groupeGal(F~ /F) .
Nous introduisons alors deux autres conditions:Abrégeons
Un A(Fn) en Aoo.
P3)
Pour n assezgrand,
leZp-rang
deA(Fn)
peut
être écrit sous laforme
spn
-t- t,
avec des entiers s et tindépendants
de n.P4)
Les ordres des groupes decohomologie
H1 (hn, A~ )
sontbornés,
etles groupes de
cohomologie
HI(r n,
(Aoo)tor)
sont tous réduits à zéro. Pour tout foncteurA,
notons A le foncteurqui
associe àchaque
F le moduleA(F)/A(F)tor.
Remarque.
La condition(P4)
entraîne que A satisfait à la descente dans la tour~oo/F:
en d’autres termesAfi
coïncide avecA(Fn ) .
Le résultatprincipal
de cette section s’énonce alors ainsi:THÉORÈME.
Pour toutfoncteur
A et touteZp-extension Fooi F
tels que les conditions(Pl)
à(P4)
soientsatisfaites,
on a pour tout n > 0:a)
Le sous-modulevÂ(Fn)
des normes universelles dansÂ
au niveau n est libre de rang s surZp ~Gn~,
avecGn
=Gal(Fn/F) .
b)
La limiteprojective
limA(Fn)
est libre de rang s surl’algèbre
An--. 00
d’Iwasawa.
PREUVE : Comme la limite
projective
dusystème
( A ( Fn ) )
n’est autre quela limite du
système
(vA(Fn)),
lapartie
(b)
est uneconséquence
facile dela
partie
(a).
Pour démontrer
(a),
nous commençons parquelques
suites exactes. Nousrappelons
que le tildesignale
qu’on
aquotienté
par la torsion. EcrivonsAn
pour
A(Fn)
etAn
pourÂ(Fn).
Prenons un entier i et considérons la suite exacte :
En
prenant
les éléments fixés sousrn
et enappliquant
la suite exacte deet par passage à la limite sur i:
Or,
le moduleAn
Q9Qp/Zp
n’est autre queAn
Q9Qp/Zp,
et de même pourj4oo.
Si l’on écritCn
pour le groupeA~ ),
on obtient une suite dela forme
Les ordres des groupes
Cn
sont bornés par(P4):
il suffit de constaterqu’on
a une suite
A~ ) -~
A~ ) --~
H2(f n,
@(A.)t.r),
et le termeH2
est nul.Nous allons utiliser la dualité de
Pontryagin:
soit D le foncteur de lacatégorie
des A-modules discrets dans celle desA-modules
compacts.
Définissons J par :Evidemment,
J est sansZp-torsion.
On va voir tout de suite que J est degénération
finie sur A. Alorsl’invariant li
de J est forcément nul. LEMME 1.a)
Il y a une suite exacte naturelleb)
J est degénération finie
sur A.PREUVE : La
partie
(a)
s’obtient enappliquant
le foncteur D exact à lasuite
(1).
Pour établir
(b)
fixons nquelconque.
CommeAn
est degénération
finiesur
Zp ,
il en est de même pourD(An Q9
Par la finitude deD(Cn),
on voit que
Jr~
est degénération
finie surZp.
Comme J estcompact,
onconclut par le lemme de
Nakayama.
Nous allons
appliquer
la théorie structurale d’Iwasawa au module J. Ilexiste alors un nombre naturel r et des
polynômes distingués fl, ... , fk
E A telsqu’il
y ait une suite courte exacte sur A avec unconoyau K
fini:
Calculons r et les
f i ,
comme dans IWASAWA(1973).
Par le lemmela,
être diviseurs d’un élément’ 1 - convenable
(u
étant ungénérateur
topologique
der,
choisi une fois pourtoutes).
Maintenant,
examinonsle rang de
D (An
Q9Qp/Zp).
Il estégal
au rang deAn, qui
vaut, par lacondition
(P3),
pour n assezgrand.
Mais le rang deJrn
estpour n > j ,
où l’on aposé
d = Parcomparaison,
on obtient s = r et t = d.Pour n assez
grand,
enprenant
lesrn-coinvariants
dans(2)
on trouveen utilisant
l’égalité
K)
= K la suite exacte :Définissons
Bn
par .. La dernière suite donne alors:Mais par le lemme
(la),
nous avonsD(AnQ9QpIZp).
Parconséquent,
on trouve:
Il nous faut alors
comprendre
cequi
se passequand
on fait varier n danscette suite.
Quelles
sont les "bonnesapplications
verticales"? Fixonsm > n, n assez
grand.
Lesinjections
correspon-dent aux inclusions
canoniques t :
(Aoo
Q9lesquelles
sont transformées par la dualité D dans lesépimorphismes
canon-iques
Jr,~ --~ Jrn -
On a donc undiagramme
commutatif:l’application
can étantcanonique.
Enparticulier,
elle est l’identité sur lefacteur
Z~ .
Comme les modules
Bn
ne sont pas ceuxauxquels
ons’intéresse,
nous avons besoin d’un autre foncteur dedualité,
soit ô =Zp) .
Pourn
quelconque, ô
est un foncteur M -.J~l,
où M dénote lacatégorie
desZp[Gn]-modules
degénération
finie,
et 6 induit une dualitéquand
on lerestreint aux modules sans torsion
(i.e.
Zp-libres).
Il n’est pas difficile deLEMME
2. Il y
a unisomorphisme
defoncteurs
sur J~1:Remarques.
a)
L’opération
deGn
sur6(M)
et surD(M)
esttoujours
donnée par la formule habituelle
(Tf)(x)
=f(T-lx), x
E M.b)
Le lemme nous dit queb(Bn) ’-’
An ,
et 8D¿ redonne ~.Il existe une méthode
canonique
pour identifier8Zp[Gn]
et Ondéfinit 0 :
Zp ~G.~,)
enposant
0(f)
=f (T ) ~
T. Dans lasuite,
il nous faudra savoir comment secomporte
l’application
can sous cetisomorphisme 0.
Démontrons unpetit
lemme:LEMME 3. Soit E
Zp[Gm]
(avec
commeplus
haut)
la sommede tous les T E
Ker(Gm --+
Gn);
nous allons utiliser la même notationpour le
A-homomorphisme
deZ [Gn]
enZp[Gm]
donné parmultiplication
avec cette somrrae.Alors, 0 transforme
bcon enPREUVE : Il suffit de voir que
~(6can(~-1(1)))
=8m,n.
Or,
e =~-1(1)
Eest donné par: T - 0 pour
T # lGn, et
1. On obtient:4;( 8 can( e)) = 0(e can).
L’application
e can est la fonctioncaractéristique
de
qui
donne facilement que0(e can)
=s".,"n.
Appliquons
le foncteur ô audiagramme
(5)
enprenant
compte
du lemme3 et de
l’isomorphisme
Extl(Zp,
1 K)
DK,
et écrivons(3n
pour8(a:n).
Ceciproduit
un nouveaudiagramme:
Il nous reste un dernier pas à faire: il faut déterminer les
applications
verticales de bas en haut dans ce
diagramme
qui
correspondent
auxap-plications normiques Am - An.
Appelons
l’application
cherchée dee
Zd
en eZd.
L’application
id)
o n’est autre que lamultiplication
par et cette condition détermine defaçon
unique puisque ED
id estinjective.
On constate queagit
surZd
commemultiplication
par(n
étant assezgrand),
ce dont nous tironsque
l’application
est donnée par can EB Bienentendu,
canest
l’épimorphisme
canonique
Pour la mêmeraison,
l’application correspondante
DK - DK estjustement
lamultiplication
par sm,n .
Récapitulons
cela dans undiagramme
final:Maintenant il est facile d’achever la démonstration du théorème: Prenons
n fixe et laissons m tendre vers l’infini. Pour tout m suffisamment
grand,
l’application
verticale à droite dans(7)
seranulle,
et on trouve que les normes universelles dansAn
sont identifiées par!3n
à l’intersection desimages
de toutes lesapplications
canE9 pm-n.
On voit par un coup d’ceilque cette intersection est
égale
àZp[Gnls,
cequi
achève la preuve pour n assezgrand.
Mais pourtout n
n’,
le groupe contient évidemment legroupe =
8n’,n.
D’autre part,
vAn
esttoujours
contenu dans le groupe desGn,,n-invariants
devAn’.
Si l’on sait d’avance quevAn,
est libre sur on trouve que(vAn’) n’,n
et les deux groupes coïncident avecvAn qui
est libre surZp[Gnl
à son tour. Le théorème est doncprouvé
pour tout entier npositif.
Chemin
faisant,
nous avons démontrédavantage.
Ecrivons cela sousforme d’un corollaire:
COROLLAIRE. Gardons les
hypothèses
du théorème. Alors lesapplications
normiques
induisent dessurjections:
~~
quelcon-ques),
et lesapplications
d’inclusion induisent desisomovhismes
(VAM)G-,-. Il
est d’ailleursfacile
de voirque les
surjections
mentionnées ci-dessus sefactorisent
par desisomovhismes
En un mot: le
comportement
galoisien
des groupes de normesuni-verselles est le meilleur
qu’on puisse
souhaiter. La méthode parlaquelle
nous y sommes arrivés n’est pas du tout la seule
possible:
dans unever-sion
préliminaire
de cetravail,
on démontrait d’abord la descente galoisi-enne pour les normes universelles defaçon
directe;
le reste de la preuve2.
Exemples
Dans cette
section,
on va étudier certainsexemples
de foncteursqui
satisfont aux axiomes
(Pl)
à(P4).
Nous fixons uneZp-extension F /F,
où
désigne
F un corps de nombres et p un nombrepremier
quelconque.
1 ° Posons
A(K)
=E’(K) 0 Zp ,
le groupep-adifié
des S-unités deK,
oùS
= SK
est l’ensemble desplaces
sur p dans K. Il est alors évident que(P l )
et
(P2)
sont vérifiés pour A.Soit g
=g(F)
le cardinal deS’F. Décomposons
9 = gd +
gn,
où gd
est le nombre desp-places
dans Fqui
sedécomposent
complètement
dansF,,.
Les autresplaces
sur p ne sedécomposent plus
à
partir
d’un certainétage,
disonsFZ,
de la tourRemarquons
que gd est nul pour laZp-extension
cyclotomique.
Alors le théorème sur lesS-unités
implique
que(P3)
estégalement
vérifié(pour n
> i),
si l’onprend
s =
rl (F)
+r2 (F)
+gd, t
=Quant
à laquatrième
condition,
ontrouve:
PROPOSITION 1. La condition
(P4)
estsatisfaite
pour A = E’ Q9Zp
si soitFooi F
estcyclotomique,
soit(p e
F(Noter
que ce deuxième cas est excluslorsque
p =2).
PREUVE : Comme
d’habitude,
C1’ (K)
désignera
le groupe desp-classes
deK,
c’est-à-dire le groupe de classes de Kquotienté
par les classes d’ideauxavec
support
sur p. Il est bien connu(IWASAWA
( 1973) )
que les groupes decapitulation
Ker(Cl’(Fn)
-~ sont bornés(en
fait,
ils se stabilisentpar la
norme).
D’autrepart,
on aKer(Cl’ (Fn )
-d’où la
première partie
de(P4).
Pour ladeuxième,
notonsqu’il
est bien connu dans le cascyclotomique
queHl
(rn,
est trivial. Si(p ft
F,
alors lapartie p-primaire
de estdéjà
nulle,
et alors leH 1
est de nouveau trivial.
Remarques.
a)
Pour le cascyclotomique,
le résultatqu’on
vient dedémon-trer est dû à Kuz’ MIN
(1972).
Cependant,
notre démonstration estplus
simple
etplus générale.
b)
Si leshypothèses
de la prop. 1 ne sont passatisfaites,
la conclusionest encore vraie
quitte
àremplacer
le groupeAn
par le groupeA~
=On a une suite
canonique
0 ~An -
A’ -
Hl (rn,
et l’ordre du dernier terme estborné;
enfait,
est fini.2° Il serait beau d’avoir un résultat similaire pour les unités au lieu
des
p-unités.
Mais cela estimpossible,
comme onpeut
s’en convaincrepar
(au moins)
deux voies: Ou bien onprend
à titred’exemple
laet où
h(F)
n’est pas divisible par p. Alors le groupeZp
des unitésp-adifiées
coïncide avec le groupeZp,
où on aremplacé
les unités par les unités
cyclotomiques.
On saitqu’il
y a une suite courte0 --~
E(F~,)/{~1} -->
Z~G.~~~p-1~~2 ->
Z ->0,
et alorsE(Fn) ~ Zp
ne sera pas libre sur Une autrefaçon
de le voir: Si l’on suit lesarguments
de la section1,
on voit que la constante additive t(rappelons
que le rang de était
spn
+t)
est forcémentpositive
(ou nulle).
Maispour les
unités,
le théorème de Dirichlet entraînerait t = -1.Pourtant,
onpeut
sauver unepartie
du résultat comme suit. On va refaire etgénéraliser
un résultat de DE SHALIT(1989).
Pour cela supposonsqu’aucune place
au-dessus de p dans F ne sedécompose
dans Un peu de notationsupplémentaire:
Pourchaque
foncteur A munid’applications
normiques,
posonsxA(Fn)
=Ker(N :
A(Fn) ->
A(Fo)
=A(F)~.
Alors rA est unsous-foncteur de
A,
et il est munid’applications
normiques
lui aussi.PROPOSITION 2. Sous ces
hypothèses, si
l’on poseA(L)
=Zp,
les modules
vxA(Fn)
ne sontplus
libres sur maisisomorphes
à avec s =rl(F)
+TZ(F)
(Nous
rappelons
au lecteur que o,est un
générateur fixé
der).
PREUVE : Posons
A’(L)
=(le
foncteur du numéroqui
précède).
On calcule: C
v(KA)
Cn(vA’).
MaisvA’
est libre surpar la prop. 1. On en déduit que
(1 - a) (vA£ )
C C(La
dernière inclusion s’ensuit du faitqu’ aucune p-place
n’estdécomposée.)
De cette chaîned’inclusions,
on obtientl’égalité
(1 -Q)(vAn),
cequi
suffitd’après
la prop. 1.3°-Maintenant nous traiterons le foncteur
K3.
Il estconjecturé
que tous les foncteursK2n+1
(n
>1)
secomportent
comme "unités tordues"quand
on lesapplique
aux corps denombres,
et pour n =1,
voire pourle
K3,
on abeaucoup
d’information. Ceci nouspermettra
d’établir unrésultat sur les normes dans
K3.
Rappelons
d’abord queK3(F);na
estdéfini comme
K3(F)
quotienté
par les élémentdécomposables,
c’est-à-direqui proviennent
du groupe de Milnor. Ce dernier est finid’exposant
2 si F est un corps de nombres.
PROPOSITION 3. Soit une
Zp-extension,
et soit A lefoncteur
K3 (-)ind 0 Zp.
Notons que pourp ~
2 l’indice ind estsuperflu. Supposons
que
F 00
estcyclotomique,
ou bien quejjp 0
jjp (F)
soittrivial,
en d’autrestermes:
[F((p) :
F]
> 2.Alors,
les axiomes(Pl)
à(P!,)
sont valables pourPREUVE : L’existence
d’applications
normiques
auxpropriétés
habituelles(voir (P l ) )
est bien connue en K-théorie.Là,
on lesappelle
"transferts". Ladescente
galoisienne
pourK~
est due à LEVINE(1989)
et à MERKUR’EV et SUSLIN(1990).
Pourchaque
corps L denombres,
K3(L)
est degénération
finie et de rangr2 (L)
surZ;
ceci est essentiellement dû àBorel,
voir KAHN(1993)
Prop.
4.1. Ceciétant,
(P3)
est aussi démontré avec s =r2(F)
ett = 0.
Pour
(P4),
citons d’abord une suite exacte fort utile(KAHN
(1993)
Thm.4.2):
SoitE/L
une extensionG-galoisienne
de corps de nombres.Alors:
est exacte. En
appliquant
cette suite pour L -Fn
et E = onvoit que les groupes =
HI(fn,K3(Foo)ind)
sont bornés parles groupes de
capitulation
Ker(K2(Fn) - K2(Foo)).
Or,
B. KAHN etTH. NGUYEN
QUANG
Do(voir
KAHN loc.cit.,
Thm. 6.2 avec Thm.4.2)
ontprouvé
que les derniers groupes sont bornés. Il reste à voir que les groupesHl (r,,,
sont nuls.D’après
LEVINE et MERKUR’EV-SUSLIN(voir
KAHN loc. cit.(1.2)),
on aQp/Zp(2)
comme modules surSi lip est
trivial,
alors est lui aussitrivial,
et iln’y
a rien à démontrer. Si estcyclotomique,
alors il est bienconnu que
Qp/Zp(2))
est trivial pour tout n.§3. Applications
etcompléments
Nous conservons la notation du
§2:
Fooi F
est uneZp-extension
et A unfoncteur soumis aux axiomes
(Pl)
à(P4).
Dans lesapplications,
A serapresque
toujours
le foncteur E’ Q9Zp.
*1° Groupes
de classes et unitéscyclotomiques
D’abord, expliquons
la relation entreAn
etv An.
LEMME 4.
a)
L’indice[An : v An]
est borné si et seulement si l’entier t dans(P3)
vaut zéro. Si t =0,
lesimages
de la normeAm --+ An
se stabilisentpour m assez
grand,
avec valeur limiteégale
avAn.
b) Si t
=0,
lesapplications
sontinjectives,
et desisomorphismes
pour n assezgrand.
c)
Si C est unsous foncteur
devA,
alors ou bienCn]
n’est pasborné,
ou bien C et vA sontégaux.
PREUVE :
a)
résulte dudiagramme
final dans la preuve du Thm. 1(noter
que t=d).
b)
Lesapplications
enquestion
sontinjectives
parce que le foncteur vAsatisfait à la descente
galoisienne
dans la tourcyclotomique,
par le corollaireau Thm. 1. Le reste est une
conséquence
dea).
c)
Admettons que[v An : C~~
pe
pour tout n. Alors il existe un entierf
qui
nedépend
que de n tel queopère
trivialement sur tous r-modules de cardinal auplus
pe .
Prenons x EAn ;
il faut montrer que x est dansCn .
Prenons un m >max(n, f )
et unantécédent y
E de x.L’image
dey sous la norme dans
vAm
estégale
à Mais alorsl’image
de y dansvAm
sera dansCm,
et afortiori, x
sera dansCn.
On notera
K (A)
le module On verra queK(A),
pourA = E’ 0
Z p,
est lié auxp-parties
des groupes de classes.Prenons pour
exemple
F =C~ (~p)+
avecp ~
2. On sait que le groupe desp-unités cyclotomiques
(mod torsion)
dansF~
est alors libre surl’algèbre
avec 1 -(p.
commegénérateur.
NotonsCn
son tensorisé avecZp.
Il est aussi connu(et évident)
queCn
est contenu dans les normesuniverselles
vAn
desp-unités
concernés. Pourvuqu’on
sachedéjà
que les indices[An : Cn]
sont bornés(ce
qui
équivaut
à dire que lesp-parties
des nombres des classesh(Fn)
sontbornées,
par la formuleanalytique
des nombres declasses),
on trouve alors queCn =
vAn
pour tous n. PosantK =
K (A) ,
on a une suiteoù K est un r-module fini et on
peut
prendre
lesr,,-invariants
dans cette suite. Comme est libre sur ontrouve,
en tenantcompte
du Corollaire(fin
du§1):
On vient de faire
l’hypothèse
que lesp-parties
des sont bornées. Par la théoried’Iwasawa,
ceciimplique
que lesp-parties
des groupesCl’ (Fn)
se stabilisent par la norme, avec une valeur limite H
qui
est aussiégale
aunoyau de
capitulation
Or ce noyau est aussi
isomorphe
àH1(Gm,n,
Am).
La suite(8)
et le fait quevAn
est librepermettent
de calculer:Hl (Gm,n,
Am) ~
Hl
(Gm,n, K),
et le dernier groupe vautKrn
pour m assezgrand.
Nous avons donc trouvé:pourvu que les
p-parties
des nombres de classes soientbornées;
end’autres termes: l’invariant
B(F)
doit être nul(La
conjecture
deGreenberg
afferme que c’est le cas pour tout F totalementréel).
Ces formules
peuvent
être considerées comme la versionexplicite
etalgé-brique
de la formuleanalytique
des nombres de classes pour les corpsFa.
Noter que
Krn
etKrn
onttoujours
le mêmecardinal,
et ils sontégaux
à K pour n assezgrand. Ainsi,
nous venons de redémontrer un résultat deBAE,
KIM and LEE(1991).
On
peut
généraliser
tout cela au cas d’un corps réel abélien F danslequel
p est totalement inerte
(Un
tel corps doit êtrecyclique
surQ).
Précisons:On
peut
montrer pour un tel F que toutes lesp-unités
cyclotomiques
dansFn
sont des normes universelles dep-unités
(en
fait,
dep-unités
cyclo-tomiques),
en utilisant les formules standard pour les normes d’unitéscy-clotomiques. Supposons
quea(F)
= 0. Par SINNOTT(1980)
cela entraîneque
~An : Cn]
estborné,
et on conclutgrâce
au lemme 4qu’on
al’égalité
Cn
=vAn .
Tout cequ’on
vient de direpour F =
Q(~p)
reste alors valabledans le cas d’un corps réel abélien où p est totalement inerte.
2’-Noyaux
des valeurs absolues etconjecture
de Gross.Soit maintenant la
Zp-extension
cyclotomique
d’un corps de nombresF;
posonsA ( - )
=E’ ( - ) ® Zp.
Introduisons la valeur absoluep-adique,
aussi dite
logarithme
de Gross(JAULENT (1990),
KOLSTER( 1991 ) ) :
Il ya une
application
canonique
(diagonale)
Pour
chaque place v
deFn
au-dessus de p, soitNv
C le groupe desnormes universelles de la
Zp-extension
cyclotomique
deFn,v.
Grâce aucorps de classes on sait que
Nv
estl’image réciproque
sous N:~~ 2013~ C~p
du groupe
Np
des normes universelles de laZp-extension
cyclotomique
deQp.
Or on sait queNp = (+1)
x d’où découle que lelogarithme
p-adique
logp
induit unisomorphisme
2pZ p .
Définissonslogv
comme lacomposée
jF~ 2013~
2pZp,
et lelogarithme
An
de Grosscomme
’
où nous avons
posé Yn -
Ilvlp
2pZp.
En outre, posons KerÀn = Bn,
etappelons
le"noyau
de Gross" ou"noyau
des valeurs absoluesp-adiques" .
Il est
important
de noter queBn
est par définition l’ensemble des éléments deAn qui
sont des normes universelles deF 00
localementpartout
sur p. On en tire tout de suite queBn D
vAn,
et on a trivialement quevAn
=vBn.
Mais d’un certain
point
de vue, lecomportement
desBn
parrapport
à la norme est meilleur que celui desAn .
La démonstration du Thm. 1 nous amontré que si p se
décompose,
alors lesimages
desapplications normiques
ne sestabilisent jamais;
nous allons voirmaintenant que cela n’est pas ainsi pour les groupes
Bn .
Si lequotient
Bn/vAn
estfini,
il est clair que lesimages
Im
deBn
sestabilisent;
la
réciproque
estégalement
vraie(utiliser
quevAn
+pm-nbn
C etvAn ) .
Leprochain
résultat nousindique
quand
ces conditionséquivalentes
sont verifiées.PROPOSITION 4. Le
quotient
Bn/vAn
estfini
si et seulement si laconjec-ture
(p-adique)
généralisée
de Gross est valable pourFn .
PREUVE : Nous commençons par une suite
exacte,
due à KUZ’MIN(1972):
où est un module standard
d’Iwasawa,
à savoir le groupe deGa-lois sur
F 00
de lapro-p-extension
non ramifiée abélienne maximale deF 00
décomposant
totalement toutes lesplaces p-adiques.
Vérifions d’abord que lepremier
terme(non trivial)
estcanoniquement
isomorphe
àvAn :
eneffet,
on a uneapplication
canonique
7r :vAn .
Elle estsurjective,
car les
applications
normiques
dans lesystème
sont toutessurjec-tives. Alors on sait
grâce
au Thm. 1 que la source et le but de 7r,quotientés
par leur
partie
detorsion,
sont tous deux libres surZp (Gn~,
du même rang,et que 7r est un
isomorphisme
(On
a le droit dequotienter
par la torsion: cesont les racines de
l’unité,
et elles sont toutes des normesuniverselles) .
Or,
SINNOTT
(1981)
a montré que laconjecture
de Gross pourp et
Fn
équivaut
à la finitude de
X~n
siFn
estCM;
et engénéral,
onappelle
conjecture
de Grossgénéralisée
l’énoncé :~X~
est fini" .Remdrques.
a)
Si laconjecture
de Gross vaut pour tous les onpeut
montrer sans
peine
que l’ordre duquotient
Bn/vAn
est borné par l’ordre de le groupeXoo
étantpris
pourFo .
Alors,
les éléments du noyaude Gross sont
proches
d’être des normes universelles(globales).
b)
Onpeut
démontrer laProp.
4 sans utiliser la suite deKuz’min,
sansc)
Considérons les unitésp-adifiées
du corps F. Si laconjecture
deLeopoldt
vaut pourF,
alors le rang deIm(Ào :
E(F) Q9 Zip - Yo)
est g - 1,
où g
est le nombre deplaces p-adiques
deF,
et on trouve que le rang duquotient
est aussig-1.
Autrement dit: sip est
décomposé
et si laconjecture
deLeopoldt
estvalable,
alorsbeaucoup
d’unités de F ne sont pas des normes universelles
(remarquons
iciqu’on
a,presque
trivialement,
égalité
dev(E(F) Q9 Zp)
avecvA(F) n E(F) ©
Zp
si p ne sedécompose
pas dansF /F) .
Si l’onregarde
le cas extrème où F estabélien, réel,
etp est
complétement décomposé
dansF,
alors lesconjectures
de Gross et deLeopoldt
valent pourF,
et par le calcul ci-dessus on trouveque le rang de
v(E(F) 0
Zp
est nul. En d’autrestermes,
une unité de Fqui
est une norme universelle(après
tensorisation avecZp)
estdéjà
uneracine de l’unité. Dans ce
cadre,
il y a en outre un lien entrevA(F)
et legroupe
/CF
introduit par SOLOMON(1992):
ce dernier groupe est contenudans
vA(F),
et les deux groupes ont le même rang surZp.
Nousespérons
revenir sur cette
question
dans un travail ultérieur.3°-Calcul du noyaux moderé
Nous donnons ici
l’esquisse
d’une méthodepermettant
de calculer legroupe
K2(OF)
pardescente,
c’est-à-dire enprenant
des groupesd’inva-riants. Le lecteur est invité à comparer avec la démarche de KEUNE
(1989),
qui
fonctionne en sensinverse,
enprenant
les c6invariants. Nous omettronsles détails. Comme
ci-dessus, Foo
est la tourcyclotomique;
An
=E’(Fn) Q9
ZP.
Ecrivons W pourPar des calculs standard
(comparer
COATES(1972))
on trouve une suiteexacte:
D’autre
part,
si nous supposons poursimplifier
que p ne sedécompose
pasdans nous avons comme au numéro 1° ci-dessus un r-module fini K
et une suite
D’ailleurs,
K estisomorphe
au noyau decapitulation
dans la tour~oo,
comme on le voit en
prenant
points
fixes sous etpuis
-)
danscette suite. Nous
appliquons -
0 W à cettesuite,
cequi
donne(noter
queet il découle du Thm. 1 :
qui
est alors un module divisible. Deplus,
est un r-module induit.Par
conséquent,
on a:On a donc construit une suite :
Si p
sedécompose,
la situation estplus compliquée,
et on obtient seulement une formule donnant l’ordre de lap-partie
du noyau moderé.BIBLIOGRAPHIE
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