NOTE
UTILISATION PAR LES VACHES LAITIÈRES
DE L’URÉE AJOUTÉE
A UNE RATION D’ENSILAGE DE MAIS RÉCOLTÉ
A UN STADE DE MATURITÉ PEU AVANCÉ
M. JOURNET
B. MARQUIS
Station de Recherches sur
l’Élevage
des Ruminants,Centre de Recherches de
Clermont-Ferrand,
I. N. R.A.,
Saint GenèsChampanelle,
63110 i3eaumontDe nombreux essais ont
permis
de montrerqu’il
étaitpossible
deremplacer
de 15 à 25 p. 100 de l’azote des tourteaux par de l’azoteuréique
sans diminuer laproduction
laitière de vaches recevant del’ensilage
de maïs récolté à un stade de maturité assez avancé(plus
de 30 p. 100 de matièresèche) (cf.
revues de COPPOCK etS TONE , r 9 68 ; C OPPOCK , r 9 6 9 ; J OURNET
et HoDEN,1970
).
Leprésent
essaientrepris
a pour but d’étudier lespossibilités
d’utilisation del’urée, comparativement
au tourteaud’arachide,
avec unensilage
de maïs récolté à 24 p. 100 de matière sèche(MS)
au stade laiteux dugrain, ayant
une forte teneur en azote soluble( 52
p. 100 de la:B1S)
et une faibleproportion d’épi ( 33
p.100 ) (cf.
tabl.i).
MATERIEL ET MÉTHODES
Deux aliments
complémentaires
de la rationd’ensilage
de maïs ont étécomparés
pour satisfaire les besoins azotés des animaux(6 0
g de matières azotéesdigestibles
parkg
de lait à4p. 100 de matières grasses et o,6 g de matières azotées
digestibles
parkg
depoids vif).
L’undes aliments était
composé
de 80 p. 100 de luzernedéshydratée
et 20 p. 100 d’urée et le deuxième de luzernedéshydratée (i kg
parjour)
et de tourteau d’arachide. Lesapports
azotés du a lot urée » ont étéégaux
à ceux du « lot tourteau pour une mêmeproduction
de lait. Les vaches du e lot urée !> ont reçu la luzernedéshydratée-urée
en 4 distributions parjour
pour améliorer l’utilisation de l’urée(la
luzernedéshydratée
utilisée était d’excellentequalité,
18 p. 100 de matièresazotées) ;
elles ontégalement
reçu unapport supplémentaire d’orge
pouréquilibrer
lesapports énergétiques. L’orge broyée
a été distribuée enmélange
avec le tourteau et la luzernedéshydratée,
ou avec la luzernedéshydratée-urée.
Lesapports énergétiques
et azotés ont étéajustés
pourchaque
vache,chaque
semaine, en fonction de laproduction
de lait et des quan- titésingérées
la semaineprécédente.
Deux lots de 9vaches Frisonnes
(r 4
en Irelactation,
ç en2 e )
ont étéappariés
à la fin d’unepériode préexpérimentale
de 3 semainespendant laquelle
les animaux recevaient unrégime
d’ensilage
d’herbe et de foin de luzerne. Lapériode expérimentale
de 12 semaines surl’ensilage
de maïs distribué ad libitum a été suivie d’une
période post-expérimentale
de 3 semainespendant laquelle
les vaches ont été mises aupâturage.
Le passage durégime pré-expérimental
au
régime expérimental, puis
durégime expérimental
aurégime post-expérimental
s’esteffectué au cours de
périodes
de transition de 2 et i semainesrespectivement.
Les mesuresindividuelles suivantes ont été effectuées :
quantité
de matière sècheingérée, quantité
de laitet taux
butyreux journaliers,
taux de matières azotées du lait etpoids
vifhebdomadaire,
étatd’engraissement
au début et à la fin del’expérience.
RÉSULTATS ET DISCUSSION
Le
mélange
luzernedéshydratée-urée
et orgebroyée
a été bien consommé tant que laproportion
d’urée dans lemélange
nedépassait
pas 6 p. 100. Laquantité
d’urée distribuéea été en moyenne de 182 g par
jour ;
elle a varié de 224 g au début( 1 8 4
à 309 g selon lesvaches)
à 137 g à la fin
( 92
à 166g).
L’azoteuréique
areprésenté
26 p. 100 de l’azote total( 30
p. 100au début et 23 p. 100à la fin de
l’expérience).
Par
rapport
au tourteau, l’urée n’a pas eu d’effetdépressif
sur lesquantités
de maïsingérées.
Laproduction
de lait du lot urée a étésignificativement
inférieure(P
<0 , 01 )
àcelle du lot « tourteau o de z,i
kg,
soit de 14 p. 100(par analyse
de covariance en serapportant
à lapériode pré-expérimentale).
La différence entre les 2 lots s’est surtout « creusée o au coursdes 6
premières
semainespendant lesquelles
laproduction
de lait a diminuérespectivement
de35et 27 p. ioo ; elle n’a ensuite diminué que de 13et 8 p. 100
pendant
les 6 semaines suivantes et cette dernière différence n’a pas étésignificative.
Le tauxbutyreux
a étéidentique
et élevé(près
de 40g p. iooo)
dans les 2lots ; le taux de matières azotées du lot tourteau a étésupérieur (mais
nonsignificativement,
paranalyse
decovariance)
de o,8 g p. 1ooo à celui du lot urée. Legain
depoids
vif des animaux(calculé
parrégression)
au cours de lapériode expérimentale
etl’évolution de l’état
d’engraissement
des animaux n’ont pas étésignificativement
différentsentre les 2 lots
(tabl. 2 ).
L’azote du lait areprésenté
dans chacun des 2 lots 24 et 27 p. 100 del’azote
ingéré
et 51 p. 100 de l’azotedigestible (après
avoir soustrait l’azotedigestible
nécessaire aux besoins
d’entretien).
Cetteégalité ( 51
p.100 )
est obtenuelorsqu’on
attribueà l’azote de l’urée un coefficient de
digestibilité
de 77 p. 100 bienqu’il
n’ait pas de réellesignification.
La faible efficacitéapparente
d’utilisation de l’azote est enpartie
due à unapport
excédentaire aux besoinsqui
ont été estimésd’après
laquantité
delait
4 p. 100sans tenir
compte
du taux de matières azotées du laitqui
a été faiblecomparativement
au tauxbutyreux.
Cette faible efficacité estégalement
laconséquence
des normes azotéesqui
sontélevées, comparativement
à celles utilisées dans d’autres pays.Le
régime d’ensilage
de maïs seul distribué ad libitum etqui
constituait le seulfourrage
de la ration a été
ingéré
enquantité
modérée : 1,9kg
de matière sèche par 100kg
depoids
vif enmoyenne dans les 2lots
(de
1,66 à2 , 3 6
selon lesvaches) ;
la diminutionrapide
de laproduction
de lait en début
d’expérience
a été due enpartie
à la sous-alimentationénergétique,
en raisonde la surestimation de la valeur de
l’ensilage
de maïs(cf. ci-après). Cependant,
laproduction
de matières grasses a diminué moins
rapidement,
en raison de l’accroissementimportant
dutaux
butyreux
de 7 g p. i o0o en 12 semaines(fig. i). Malgré
la faiblepersistance
de laproduction
laitière, les vaches ont eu tendance à se maintenir àpoids
constant ou à gagner dupoids.
La valeur
énergétique
del’ensilage
de maïs calculée en tenantcompte
des besoinsénergétiques
p
des animaux
( 0 , 3 8 UF/kg
de lait 4 p. 100 et 1,5+ zoo
Up pourl’entretien)
et desapports
200
estimés des aliments concentrés
co:nplémentaires,
a été de 0,72Uh/kg
deMS,
alors que la valeur calculée par la formule de BREIRBI(r 95 y),
àpartir
du coefficient dedigestibilité
de lamatière
organique
était de 0,79 UF.L’effet
dépressif
de l’urée sur laproduction
de laitpeut
être attribué à laproportion
élevéed’azote
uréique
mais aussiprobablement
auxcaractéristiques
del’ensilage
de maïs, enparti-
culier à sa teneur élevée en azote soluble et à sa faible teneur en amidon liées à son stade de
maturité peu avancé. lfn effet, les céréales
(orge
et maïs) n’ontreprésenté
que3 8
p. 100 de la matière sèche de la ration et laquantité
totale d’azote solubleingérée
a été élevée compara- tivement à laquantité
de céréales( 7
p. joo de la matière sèche descéréales).
Ces valeurs sont très inférieures à celles observées dans lesexpérimentations
où l’urée a été bien utilisée(JouR:vEr
et al.,1970
).
L’étude de l’aminoacidémie libre du sang apermis
de mettre en évidence une diminutionde la concentration de certains acides aminés
indispensables
chez les animaux recevant l’uréecomparativement
au tourteau, mais ces modifications sontplus
faibles que celles observées lors du passage durégime d’ensilage
de maïs aupâturage, pendant lequel
la concentration en acides aminésindispensables
aaugmenté
defaçon importante (CxnmPtxLDOV
etal., 1970 ).
L’effet défavorable de l’urée sur la
production
de lait,comparativement
au tourteau, s’est surtout manifesté en débutd’expérience
et il doit être attribué à laproportion
élevée d’azoteuréique
à cettepériode
et autemps d’adaptation
de la flore microbienne à l’urée. Cet effet a dû être accentué par la diminutionplus rapide
desquantités
d’aliments concentrés distribuées(et
donc
d’énergie)
en débutd’expérience
dans le lot urée, en raison de la méthoded’ajustement
hebdomadaire des
quantités
d’aliments concentrés offertes en fonction de laproduction
de laitobservée. Sur l’ensemble de
l’expérience
lesapports
du u lot urée » parrapport
au e lot tour-teau » ont été inférieurs de 0,70 HF et 100g de matières azotées par
jour.
Cet essai
permet
d’attirer l’attention sur la nécessité d’utiliser l’urée avec desensilages
demaïs à stade de maturité avancé
ayant
uneproportion
élevée degrain
et une faibleproportion
d’azote soluble. La
proportion
d’azote soluble dans la ration devraitprobablement
êtreinférieure à 1,7 p. 100de la matière
organique digestible ingérée
ou à 3,5 p. 100 de laquantité
de céréales
(y compris
legrain
contenu dans le maïsensilé).
Cet essai montreégalement
la nécessité deprévoir
unepériode
de transition d’au moins 15jours
pouradapter
les animaux à l’urée.Reçu pour publication
enjuillet
1972.SUMMARY
UTILIZATION BY DAIRY COWS OF UREA ADDED TO A DIET OF ENSILED MAIZE HARVESTED AT AN EARLY STAGE OF MATURITY
Urea included into dried lucerne at a level of 20p. ioo was used as a
supplement
to a diet ofmaize
silage
ascompared
topeanut
oil-meal. The milkproduction
of the cowsreceiving
urea was1
p. ioo lower. This
probably depended
on a toohigh
level of ureanitrogen
in the diet( 25
p. 100 of totalnitrogen),
but wasespecially
due to a too lowproportion
of cereals( 3 8
p. ioo, maizegrain included)
because of the insufficientstage
ofmaturity
of the maize( 24
p. 100dry
matter, 33 p. 100cobs)
harvested at an altitude of 800m.Urea caused a
rapid
decrease of the milkproduction
at thebeginning
of theexperiment.
Thiswas due in
part
to alarger
reduction of the concentratesupply (and
energysupply),
determinedaccording
to the amount of milkproduced.
Thesefindings
show the role of the time ofadaptation
of the animals to
high
urea doses.RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES
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