ENTRE SOUS LE N" 60,309
FACULTÉ
DEMÉDECINE
ET DE PHARMACIE DE BORDEAUXANNEE 18 98-1899 103
DU POUVOIR ANTISEPTIQUE
DU
CYANURE DE MERCURE
Son Emploi en Obstétri
(Travail faitau Laboratoirede la Clinique d'Accouchemi
THÈSE POUR LE DOCTORAT EN MÉDE
présentée et soutenue
publiquement
le29 Juillet 1899
PAR
Jean-Joseph LABORIE
Né à Carlux (Dordogiie), le 27 Décembre 1873
ANCIEN EXTERNE DES HOPITAUX
LAURÉAT DES HOPITAUX (1896)
MEMBRE DE LA SOCIÉTÉ D'ANATOMIE ET DE PHYSIOLOGIE DE BORDEAUX
/MM. LEFOUR professeur Président.
_ . , ,
\
LANELONGUE professeur....!Examinateursde la Thèse:< . , / ,
) FIEUX agrégé V Juges.
( MOURE chargé decours)
Le Candidat répondra aux questions qui lui seront faites sur les
diverses parties de l'Enseignement médical.
BORDEAUX
IMPRIMERIE DU MIDI, P. GASSIGNOL
91 — RUE PORTE-DIJEAUX — 91 1899
Faculté de Médecine et de Pharmacie de Bordeaux
M. DE NABIAS, doyen — M. PITRES, doyen honoraire.
l'I&OFHSSHUIt»
MM. MIGÉ
AZAM DUPUY MOUSSOUS
Professeurs honoraires.
MM.
p,. ■ • , 1 PICOT.
Clinique interne PITRES
.
, \ DEMONS.
Clinique externe
j
LANEL0NGUf.Pathologie et théra¬
peutique générales. VERGELY.
Thérapeutique ARNOZAN.
Médecine opératoire. MASSE.
Clinique d'accouche¬
ments LEFOUR.
Anatomie pathologi¬
que COYNE.
Anatomie N.
Anatomie générale et
histologie «VIAIILT.
Physiologie JOLYET.
Hygiène LAYET.
\s; s&i''iim si s i<:x
section de médecine (Patholog
MM. CASSAET.
AUCHÉ.
SABRAZÈS.
MM.
Médecinelégale MORACHE.
Physique
BERGON1É.
Chimie BLAREZ.
Histoire naturelle ... GUILLAUD.
Pharmacie FIGUIER.
Matièremédicale.... de NABIAS.
Médecine expérimen¬
tale FERRÉ.
Clinique ophtalmolo¬
gique BADAL.
Clinique des maladies chirurgicales des en¬
fants P1ÉCHAUD.
Clinique gynécologique BOURSIER.
Cliniquemédicale des
maladiesdesenfants A. MOUSSOUS.
Chimiebiologique... DENIGES.
ie interne etMédecine légale.)
MM. Le DANTEC.
HOBBS.
section dechirurgie 1£t accouchements (MM. BINAUD.
Pathologie
externe]
BRAQUEHAYECHAVANNAZ.
Accouchements.■
(MM. CHAMBRELENT FIEUX.
Anatomie
section dessciences anatomiques etphysiologiques
(MM. PRINCETEAU | Physiologie MM. PACHON,
■•"l CANN1EU. I Histoirenaturelle BEILLE.
section dessciences physiques
Physique
MM. S1GALAS. | Pharmacie
COUltS €OHP(iÉIIËWTAIHU§ :
Clinique desmaladies cutanées et
syphilitiques MM,
Clinique desmaladies des voiesurinaires
Maladies dularynx,desoreilles etdunez Maladies mentales
Pathologie interne Pathologieexterne Accouchements Chimie
Physiologie Embryologie Pathologie oculaire
Conférence d'Hydrologie etMinéralogie
Le Secrétaire de la Faculté: LEMAIRE.
M. BARTHE.
DUBREIJILH.
POUSSON. s MOURE.
RÉGIS.
RONDOT.
DENUCÉ.
CHAMBRELENT.
DUPOUY.
PACHON.
CANNIEU.
LAGRANGE.
CARLES.
Par délibération du 5 août 1879, la Faculté aarrêté que les opinions émises dans les
Thèsesqui lui sont présentées doiventêtreconsidérées comme propres à leursauteurs, et qu'elle n'entend leurdonner niapprobationniimprobation.
A MON PÈRE ET A MA MÈRE
A vousqui fûtes pourmoiles meilleurs,
Je dédie ce modeste travail.
A MA SŒUR
A MES FRÈRES
A MES PARENTS
A MES AMIS
A MONSIEUR LE DOCTEUR DUPIELLET
MÉDECIN A CARLUX
(DQRDOGNE)
En reconnaissance de sa sympathie.
Au moment de quitter la Faculté, avant de nous
livrer,
seul et insuffisamment armé peut-être, à la pratique
médi¬
cale, nous nous conformons à ce vieil usage qui veut que l'on remercie ceux qui ont pu vous faire aimer
l'art qu'ils
sont chargésde vous enseigner.
Nous avons passé nos trois années d'externat
dans les
ser¬vices de MM. les Drs Bergonié, Baudrimont,
Verdalle.
Nousleur savons gréde nousavoir prodigué leurs
sympathies.
M. le Dr Baudrimont nous permettra de lui
témoigner
en cette circonstance toute notre gratitude pour la grandebien¬
veillance qu'il n'a
cessé
de noustémoigner.
Si nous avons pu nous intéresser
à l'art obstétrical et
ac¬quérir quelques notions exactes,
c'est à
M.le professeur
agrégé Fieux que nous le devons. Pendant toutle
tempsquenous avons passé à la Clinique
d'accouchements, il
ne nousa ménagéni sa sympathie ni ses
excellents conseils,
nous lui en conserverons une grande reconnaissance.M. le professeur Lefour a mis
à
notredisposition
unoutil¬
lagecomplet d'expérimentation pour
l'élaboration de notre
thèse, il nous fait aujourd'hui l'honneur d'enaccepter la
présidence, qu'il nous permette de lui adresser tous nos re¬merciements.
M. le professeur agrégé Barthe et tous
les chirurgiens des
Hôpitaux, par l'empressement etla bonnegrâce qu'ils ont
mis à nous fournir des renseignements, ont droit
à
notrereconnaissance.
Merci à M. le professeur agrégé
Binaud
de sonextrême
bienveillance.
Nous remercions aussi M. le Dr Gibert, qui a bien
voulu
nouscommuniquer des observations ; M.
Garaud, pharma-
_ 8 -
cien de
l'Hôpital
des Enfants, chargé du laboratoire de la Clinique obstétricale, qui nous a aidé dans nos expé¬riences.
Quantà ceux qui furent pour nous d'excellents amis, avec le regret de les quitter, nous leur
exprimons ici l'assurance
d'un
ineffaçable souvenir.
INTRODUCTION
Depuis que
l'antisepsie
est venue se faire le précieux auxi¬liairede la chirurgie, de nombreux corps ont été employés
pour la destruction des micro-organismes. Les sels de mer¬
cure, et parmi eux surtout le bichlorure, se sont montrés les plus efficaces. Il est un de ces sels qui, à l'inconvénient qu'onttous les autres d'attaquer les instruments, joignait, croyait-on, celui d'être peu antiseptique et très toxique. Le moyen trouvé par M. le professeur Denigès pour le rendre inoffensif vis-à-vis des instruments l'a fait entrer dans la
pratique et il a donné d'excellents résultats. Nous voulons
parler du cyanure de mercure.
Ce produit, d'un usagecourant dans tous les services des
Hôpitaux
de Bordeaux, tend à s'y substituer complètementau sublimé. A la Clinique d'accouchements il est employé depuisle mois de janvier à l'exclusion de tout autre anti¬
septique, exception faite cependant pour le permanganate de potasse dans les cas d'albuminurie. Mais son usage a été basésur des faits pratiques, sur les résultats cliniques;
quant à son pouvoir microbicide il n'a pas
été
recherché, onne possèdesur lui aucune donnée à peu près précise. Il était intéressant de connaîtrecepouvoir antiseptique ducyanure de mercure, aussi avons-nous acceptéd'en faire le sujet de notre thèse inaugurale.
Nous regrettons de n'avoirpu apporter à notre tâche l'au¬
torité d'un expérimentateur rompu aux minuties de la pra¬
tique microbiologique.
Nous y avons mis tout notre soin et— 10 —
toute notre patience; nous avons
répété plusieurs fois les
diverses
expériences
pourle contrôle des résultats.
Nous diviserons notre travail dela façon suivante :
Chapitre premier. Etude historique de l'emploi du
cya¬nure de'mercure.
Chapitre II.
Etude expérimentale du
cyanurede
mercure.11.
Du cyanurede
mercure,de
sespropriétés.
| II. De
l'action du
cyanurede
mercure surles micro¬
organismes.
| III.
Comparaison du
cyanurede
mercure avecles
autres antiseptiques.
Chapitre III.
Avantages et inconvénients du
cyanurede
mercure.
Chapitre IV.
Observations cliniques.
Conclusions.
Sinous avions été moins
pressé
etplus expérimenté,
nous aurions tenté de fixer le plusexactement possible la toxicité
du cyanure de mercure par
des injections
auxanimaux, mais
cela, si toutefois nous avions pu
le faire dans de bonnes
con¬ditions, nous eût entraîné
beaucoup trop loin.
CHAPITREPREMIER
Etude
historique de l'emploi du
cyanurede
mercure.L'emploi des composés formés par le cyanogène avec le
mercure commeantiseptiques date relativement de très peu de temps.
C'est Chibret
(*),
de Clermont, qui, le premier, dans une communication à l'Académie desSciences, le 19 juillet 1888, préconisa l'emploi de l'oxycyanure de mercure, vu sa puis¬sante action microbicide etsa propriété de ne pas altérer les instruments. Divers ophtalmologistes l'essayèrent après lui,
les uns pourle condamner, tels : Rogman, dans sa thèse re¬
latée parValude (2) en1893, Mutermilch
(3)
en1894, les
autrespour le conseiller : Darier
(4)
en 1891, Dufour(s)
en1896.
En 1894, M. le professeur Tarnier
(6) infirma les conclusions
deChibret au point devue microbicide. MM. Monod et Ma- caigne
(7),
au 9e Congrès de Chirurgie(1895),
ont tentéde le
(D Comptereildu des séancesdel'Académie des Sciences, 19 juillet 1888,
t. 107,p. 119.
(2) Annales d'Oculistique, 1893.
(3) Annales d'Oculistique, 1894.
(4) Annalesd'Oculistique, 1891.
(3) Publications de Lausanne (Imp. Bridel and Co, 1896).
(6) De l'asepsieetde l'antisepsie en obstétrique,1894.
(7) Compte rendu du Congrès de chirurgie, Paris21-26octobre 1895,
— 12 —
remettre en honneur. M. le
professeur Barthe (1)
en1896
a montré que l'oxycyanureattaquait les instruments.
Quant au cyanure
de
mercure, sonaction
surles métaux
l'avait fait complètement
délaisser. En 1896, M. Maréchal (2),
d'Angers, dans une
communication faite à la Société de
**Thérapeutique,
prétendit
quel'immersion des instruments
» ■ métalliquesdans
unesolution alcaline les préservait de la
rouille.
M. le professeur
Denigès (3) présente
enmai 1897, à la So¬
ciété de Pharmacie deBordeaux, une note ayantpour
titre
:« Mode
d'emploi du
cyanurede
mercure pourla stérilisation
des instruments de
chirurgie
».Il utilise le
cyanurede
mer¬cureadditionné d'un alcalin
(borate, carbonate
oubicarbo¬
natede
soude)
etil constate après plus de deux mois l'inalté¬
rabilité absolue des objets
immergés dans
unesolution
composée de :Cyanure mercurique 2 à 5 grammes.
# Borate ou carbonate desoude an¬
hydres
5
grammes.Eau distillée 1 litre.
Si, par comparaison, on
plonge
cesobjets dans des solu-
:*
tions de cyanure de mercure
seul, l'attaque est manifeste
au bout dequelques heures. M.
Denigès ajoute
que, endehors
de l'usagepour
stériliser les instruments, le
cyanurede
mer¬cure en solution alcaline pourrait
être utile à la désinfection
des mains par la
facilité
aveclaquelle il dépouille l'épiderme
des corps gras sans
l'irriter;
satoxicité aurait été exagérée,
son prix de revient
n'est
pastrop élevé.
Le cyanure demercure en
solution alcaline est employé
(4) Bulletin des travauxde la SociétédePharmacie de Bordeaux, février
1896.
(2) Journal de Pharmacieetde Chimie, 15mars 1896.
(») Bulletin destravauxde la Société de Pharmacie de Bordeaux, 1897,
p. 167.
V
- 13 —
pour la
première
fois à Bordeaux, par M. le DrSengesse;
au mois de mai 1898, il est mis en usage dans le service de M. leprofesseur Piéchaud et successivement dans les autres ser¬
vices de
rhôpital
des Enfants Assistés. Au mois de novembreon l'utilise à
l'hôpital
Saint-André dans le service de M. le professeur Démons, et, peu après,son usagedevientgénéral.A l'ouverture de la Clinique d'accouchements, en janvier 1899, M. le professeur Lefour proscrit le sublimé pour n'em¬
ployer
quele cyanurede mercure.kf
CHAPITRE II
Etude
expérimentale du
cyanuredu
mercure.§ I. Du cyanure
de
mercure.Le cyanure
mercurique est
un corpsstable et bien défini
découvert par
Scheele. Il s'obtient
pardivers modes de pré¬
paration.
Desfosses
aindiqué
untrès bon procédé
pourpré¬
parer
le
cyanuremercurique à l'aide du ferro-cyanure de
potassium et
du sulfate mercurique. On prend
:Ferro-cyanurede
potassium 50
grammes.Sulfate mercurique
100
—Eau distillée 500gr. (1/2
lit.)
On porte
le mélange à l'ébullition qu'on maintient pendant
20 ou 25 minutes en renouvelant l'eau àmesure
qu'elle
s'éva¬pore. On
filtre bouillant dans
unecapsule de porcelaine et
onlavele
précipité formé
avec un peud'eau bouillante. Le
liquidefiltré est porté à l'ébullition pendant 5 à 10 minutes
pour
le concentrer. Par refroidissement il
seforme de jolis
cristauxde cyanure
mercurique. Les cristaux sont égouttés,
puis
séchés à l'étuve au-dessous de 100°.
On peut encore
préparer
ceproduit
parla méthode de
Scheele qui consiste
à faire bouillir
unmélange pulvérisé de
30 grammes
d'oxyde mercurique, 40
grammesde bleu de
Prusseet400
parties d'eau et à filtrer bouillant lorsque la
— 15 -
masse a
pris
une teinte brune. Il est aussi possible de l'obte¬nir en saturant de l'acide
cyanhydrique
parl'oxyde
de mer¬cure.
Ce sel se présentesous la forme de prismes blancs anhy¬
dres, solubles dans 8 parties d'eau froide, dans 2 parties d'eau
bouillante,
dans 20 parties d'alcool et 4 parties de gly¬cérine.
Le cyanure de mercure neprésente pastoutes les réactions des sels mercuriques ni descyanures simplessolubles.Ainsi ilne se
précipite
pas par l'iodurede potassium; pourlamême raison il ne fait pas doubledécomposition
avecl'azotate d'ar¬gent; au contraire, il est attaqué par les acides forts
(C1II,
IH,SII2)
avec miseen liberté d'acidecyanhydrique,
car les réactions correspondantessontexothermiques.
L'acide
cyanhydrique
a une grande affinité pour le mer¬cure. Celui-ci, mis en présence des cyanures autresquecelui de mercure, s'unit rapidement à l'acide
cyanhydrique
pour* donner du cyanurede mercure
(1).
Le cyanure de mercure ne coagule pas
l'albumine,
il n'est pas irritant pour les tissus. Les solutions du sel pur atta¬quent les
métaux,
altérabilité rendue absolument nulle par l'addition d'un alcalin. C'est sous cette forme qu'il estemployé
dans la pratiqued'après
la formule;Cyanure mercurique 1 gramme.
„ ~ Borate de soude 2 grammes.
Eau distillée 1 litre.
Chromate de potasse q. s. pourcolorer.
^
Quant à
satoxicité, elle
adonné
lieu à des controverses.Tardieu et Roussin
(2),
en 1867, prétendent « qu'il est extrê¬mementvénéneux parce qu'il réunit deux élémentséminem-
(4) Tiré du Coursde Chimiede M. le professeur Deuigès,
(2j Tarjheu etRoussin,
Étude
médico-légale et clinique sur l'empoison nement, 1867, p. 576.— 16 —
mentvénéneux ». Rabuteau
(*),
en1877, dit
que «les
cyanuresintroduits dans letube digestif agissent par
l'acide cyanhy-
drique
plutôt
que parle métal qu'ils renferment
».Le
professeur
Denigès (2) trouve
quel'on exagère beaucoup trop
sa toxicité, qui
n'est
pas, enréalité, plus forte
quecelle du
sublimé.
Pour cequi est
du pouvoir antiseptique,
nosexpériences
vontnous montrer ce qu'il faut en penser.
|
II.De l'action du
cyanurede mercure en solution alcaline
sur les
micro-organismes.
Nous n'avonscru mieux faire que
de suivre la méthode d'expérimentation de M. Vignal, préparateur du professeur
Tarnier, méthode qui non
seulement
nousamènera à des
résultats précis, mais encore nous
permettra de comparer
plus exactementle pouvoir microbicide du cyanure de mer¬
cure aveccelui des autres antiseptiques.
Les cultures de microbes que nous avons
employées sont
celles de :
Staphylococcusaureus, Bacterium coli commune, Charbon.
Nous regrettons de
n'avoir
puexpérimenter
surle strepto¬
coque,
qui est le microbe
parexcellence de l'infection puer¬
pérale, mais il
nous aété impossible de nous en procurer;
de plus,
il est difficile de le cultiver et de conserver les cul¬
turesvivantes; si nous
ajoutons
queM. Vignal et les expéri¬
mentateurs qui ont
mis
enprésence des antiseptiques en
usage, le
staphylocoque et le streptocoque, ont trouvé que
les résultats étaient à peu
près identiques,
nousespérons
que
l'on
excuseracette lacune.
(i) Rabuteau,
Éléments de thérapeutique et de pharmacologie.
(8) Denigès, Communication à
la Société de Pharmacie de Bordeaux.
Loc. rit*
— 17 -
Quant au vibrionseptique, qui est anaérobie et par
consé¬
quent doit se cultiver dans des milieux spéciaux, nous l'avons éliminé, car, entre nos mainsinexpérimentées, il eût
lisqué
fort de ne donner que des résultats manquant de précision.Les solutions de cyanure de mercure que nous avons
employées sont: la solution des hôpitaux à 1/1000 et la
solution à 0 gr.
50/1000
que l'on utilise à la Clinique d'accou¬chements.
Les divers microbes que nous avons
expérimentés
ont montré une résistance à peu près identique, sauf le charbon qui est moins vite détruit et fournit des résultats peu précis.Nous donnerons ici les chiffres qui s'appliquent au staphy¬
locoque.
Pour chacune de nos expériences, nous avons gardé plusieurs tubes témoins pourêtre bien certain de la vitalité des cultures que nous avons employées.
But. — Déterminer la dose de cyanure de mercure nécessaire pour empêcher le développement du microbe dans unbouillonnutritif.
Procédé. —Dans unesérie detubes contenant 10 centimètres cubes de bouillondeveau peptonisé, on introduit successivement une goutte d'une culture du microbe âgée de quarante-huit heures, et une dose variable de cyanure de mercure. On porte les tubes à l'étuve à36-38°.
Vingt-quatre heures après, on ensemence sur gélose pour contrôler les résultats.
Résultat.— Pourempêcher le développement des microbes, il faut introduire dans unlitre de bouillon:
0 gr. 015 à 0 gr. 017 de cyanure de mercure.
But. — Déterminer la dose de cyanure de mercure qui tuera le
microbeen voie dedéveloppement dans un bouillon nutritif.
La. 2
Deuxième série d'expériences Première série d'expériences
Procédé. — On ensemence une série de tubes avec une goutte de
culture âgée de quarante-huit heures. Les tubessont placés à l'étuve à
36° pendant vingt-quatre heures: les quelques petits flocons produits
sont suffisants pourmontrer que le microbe est en plein développement,
mais pas assez nombreux pour gêner les observations ultérieures. On
introduit alors des doses croissantes de cyanure de mercure dans ces cultures que l'on porte à 36-38°. Si la dose d'antiseptique a été suffi¬
sante pourarrêter ledéveloppementdu microbe,on ne voit plus au bout
de quelques jours ni apparaître de nouveaux flocons, ni grossir ceux qui existaient déjà. Ces flocons, composés de microbes en pleine vie
avant l'addition d'antiseptique, se désagrègent et précipitent au fond
des tubes. Lavérification estfaite par ensemencement sur gélose.
Résultat.— Pour tuerle microbeen voie de développement, il faut:
0 gr. 07 à0 gr. 09 de cyanure de mercure.
Troisième série d'expériences
But. — Savoir le temps nécessaire à une solution de cyanure de
mercure déterminée pour tuer le microbe mis en contact avec elle.
Procédé.— Dans une culture de microbe, on trempe desmorceaux de papier buvard de 1 centimètre carré de surface. Après séchage com¬
pletsous cloche en présenee d'acide sulfurique, ces carrés sont plongés
dans la solutionantiseptique à 36-38°. A des intervalles de temps donnés (toutes
les minutes),
cescarrés
sontretirés du
cyanure etlavés à l'eaustériliséependant plusieurs heures, puis placés dans le bouillon de cul¬
ture et portés à l'étuve à 36-38°. Cette immersion dans l'eau est néces¬
saire pour enlever la matière antiseptique qui baigne la surface du
buvard et éviter d'en introduire dansle milieu de culture, ce qui faus¬
seraitles résultats.
Résultat. — Pour tuer les microbes, il a fallulaisser les carrés de buvard séjourner dans lasolution antiseptique:
4 minutes avec la solution à
1/1000.
6 minutes avecla solution à0.50/1000.
— 19 —
Quatrièmesérie d'expériences
But. — Pour se rapprocher des conditions offertespar l'organismeoù les microbesne sont pas placés àla surface des plaies, mais logés dans
les anfractuosités des tissus, nous avons, à l'exemple de M. Yignal,
retenu les microbes dans l'épaisseur d'un tissu, la flanelle feutrée.
Procédé. — Aprèsavoir enlevé avecsoin l'apprêtd'un morceau de flanelle feutrée, on le découpeen fragments de 1 centimètre carré qui,
unefois bien séchés, sont stérilisésà 160° pendant trois quarts d'heure.
On les place dansun cristallisoirflambéoù on les arrose avec une cul¬
ture de troisjours; on les met à sécher sous clocheen présence d'acide sulfurique. Ils sontplongés dans la solution antiseptiqueà 36-38° d'où
on les retire au bout d'untemps variable(toutesles deux ou trois minu¬
tes).
Lavage prolongé dans plusieurs eaux stériliséespendant plusieurs heures, puis, introduction dans les tubes de bouillon.Résultat. — Laflanelle est stérilisée aubout de :
12 minutes avecla solution à 1/1000.
15 minutes avec la solution à
0.50/1000.
Cinquième série d'expériences
But. — Commeles organes génitaux dela femme sontbaignés par des liquides albumineuxet inuqueux, on emploie, pourêtre plus près de la réalité,du bouillonauquel on a ajouté en quantités égales de l'albu¬
mine d'oeuf.
Procédé. — Les morceauxde flanelle séchéssontimbibésaveccebouil¬
lon, puis séchés, plongés pendant dix minutes dans de l'eau sté¬
rilisée pour hydrater l'albumine, puis soumis à l'action du cyanure de
mercure. On les lave avec soin comme dans lesexpériences précédentes.
Résultat. — Les microbessont détruits après unséjour de : 7 minutes dans la solutionà 1/1000.
10 minutes dans la solutionà
0.50/1000.
- 20 -
Sixième série i/expêriences
But. —Le mêmeque pour
l'expérience précédente.
Procédé. — Identique auprécédent
jusqu'au moment où
onretire les
carrés de flanelle albumineusede la solution antiseptique.
Ici,
aulieu de
fairesubir à laflanelleunlavage
prolongé,
onla met directement dans
les tubes debouillon. De cette façon-là, l'actiondu cyanure
de
mercureseprolonge dans
le milieu de culture puisque la flanelle en est encore
imbibée.
Résultat.—Il suffit, pourstériliser
les
morceauxde flanelle, de les
laisser dansle cyanure de mercure :
2minutes aveclasolution à 1/1000.
3 minutes aveclasolution à
0.50/1000.
§111.
Comparaison du
cyanurede mercure avec les autres
antiseptiques employés
enobstétrique.
Nos résultats nous
permettent d'établir le tableau suivant
:DOSES EïGRAMMES TEMPS EN MINUTES
ANTISEPTIQUES - --—
1" série série 3™' série série 5"*série 6™' série
Solutions
Bichlorure demercure.. 0.015 0.05 i/1000 2 2 3 2 0.015 0.07
Cyanurede mercure... à à 11000 4 12 7 2 0.017 0.09
Formol 0.014 0.15 2/1000 7-9 13-15 10 4
Acide phénique 2 3 20 1000 15 15 30 6
Iode 0.9 1.20 3/1000 8 8 8-11 8
Permanganatedepotasse » » 0.25/1000 30 30 •35 15
Biiodure demercure.. . 0.04 0.15 0.25/1000 26 30 40 6 Sulfate de cuivre 0.16 0.95 5/1000 35 35 45 30 Microcidine 0.20 0.30 1/1000 25 15 20 8-10
Si le cyanure
de
mercure nevient qu'en troisième rang
pource
qui est de
sonpouvoir stérilisant, il tient dans tou¬
tes les autres séries la
seconde place. Il vient donc immé¬
diatement
après le sublimé, et les résultats fournis présen¬
tentdans certains cas des
différences
peusensibles; dans la
Ge série ils sont même
identiques.
CHAPITRE III
Avantages et inconvénients du
cyanurede
mercure.Lorsque dans le domaine de la
thérapeutique
onveut subs¬
tituer à une médication
préexistante
unenouvelle substance
curative, il importe d'exposer
entièrement, mais aussi
sans parti pris,les raisons qui militent enfaveur de
cechoix.
L'antisepsie chirurgicale et
obstétricale date relativement
de très peu de temps, et pourtant
nombreux
sontles agents
dont on a expérimenté l'emploi. Nous ne passerons
point
enrevue tous les antiseptiques connus, c'est un
travail
sans grand intérêt puisqu'il aété
déjàfait,
etbeaucoup mieux
que nous ne saurionsle faire, par un maîtreen
obstétrique
:nous avons nomméM. leprofesseurTarnier.
Lesconclusions tirées par lui dansson ouvrage
De l'asep¬
sie et de
l'antisepsie
enobstétrique
concourenttoutes à
prou¬ver la supériorité du bichlorure de mercure sur tous
les
autres antiseptiques.
Nous venons de voir à la suite de nos expériences que
le
cyanure de mercure, dans la liste des antiseptiques, tient
la
seconde placeimmédiatement
après
le sublimé, nousle
con¬sidérons donc par rapport à cesel de mercure, pour
lequel
M. le professeur Tarnier garde toutes ses sympathies. Le
sublimé est, suivant l'avis de ce maître : « l'antiseptique le plus puissant, le plus sûr... Avec lui on
sauvegarde le
mieux la vie des femmes». Dureva êtrenotre tâche, sera- ble-t-il, sinous nousattaquons à semblable adversaire.
Le cyanurede mercure présente sur
le sublimé des
avan-— 22 —
toges indéniables que ses partisans eux-mêmes seront obli¬
gés de reconnaîtreavec nous.
Tout d'abord, au sujet de l'usage courant; pour le chirur¬
gien lui-même, nous en appelons à nos maîtres qui après
une séanceopératoireun peu prolongéesentaient leurdoigté émoussé, leur sensibilité tactile moins exquise par suite
d'un phénomène bien connu dû au contact du bichlorure de mercure. Cesel, coagulant les albuminoïdes du sang, recou¬
vre trèsvite les mains d'une gaine dont l'effet immédiat est de gêner
l'opérateur
consciencieux qui tente deselaver dansl'antiseptique
courant. L'épiderme lui-même n'a pas moins à souffrir que la sensibilité; très fortement atteint par les so¬lutions antiseptiques
(cependant
peu concentrées), il se des¬quame très largement et très vite, d'une manière sinon gênante du moins peu agréable.
Avec la solution de cyanure de mercure à titre
égal,
riende semblable ne se produit: les mains demeurent souples,
la sensibilitéest intacte et les diverses parties de la séance opératoire peuvent s'accomplir avec la plus grande facilité.
L'enduit
hématique
disparaît très vite, même des plis de lapeau, par un lavage superficiel. Quant au
champ
opératoire,il reste net et n'est point souillé par cette sorte de vernis dont l'aspectestsi désagréable.
En
obstétrique,
le cyanure de mercure ne présente pas moins d'avantages. Les injections faites avec la solution à0,50/1000ne produisent chez la femme, même en travail, au¬
cune sensation désagréable. Le vagin se nettoie très facile¬
ment, les mucosités sont aisément
détergées,
ce que l'on n'obtenait que difficilement avec le bichlorure. L'injection terminée, les muqueuses sont souples et toutes prêtes à se laisser distendre.D'aucuns ontvoulu faire un reproche au cyanurede mer¬
cure du fait de cette onctuosité, prétendant qu'elle rendait difficiles les ligatures en obstétrique comme en chirurgie.
Cet argument est pour nous de peu de valeur, car le bichlo¬
rure par la rugosité particulièrequ'il produit sur les catguts
a le même inconvénient à un titre au moins égal.
— 23 -
M. le professeur agrégé Binaud s'est vu, eu certains en¬
droits où il setrouvait à opérer
(en
Saintongeet à Arcachonparticulièrement),
obligéde
se laver les mains à l'alcool après les avoir plongées dans lecyanure pour pouvoir teniravec sûretéses instruments. L'eau d'Arcachon est déjà onc¬
tueuse parelle-même à l'état pur; de plus, les solutions em¬
ployées contenaient 5 et 10grammes de borate de soude par litre; c'est là qu'il faut chercher la cause, car nous avons
remarqué nous-même àl'aide de plusieurs solutionsquesi on augmente la teneur en alcalin, l'onctuosité augmente. Mais si cet état de la solution peut avoir un inconvénient en chi¬
rurgie, il n'en estpas de même en
obstétrique
courante, car les mains sont recouvertes de cettefaçon-là
d'une sorte de vernis antiseptique protecteur. A propos des instruments,nous noterons en passant qu'il ne faut pas laisser séjourner trop longtemps les sondes urétrales sans les essuyer dans
une solution assezfortementchargée en borate de soude,car il se dépose à leur surface des cristaux qui la rendent ru¬
gueuse et peuvent produire des excoriations.
Une seule fois, à la suite d'injections de cyanure, nous avons constaté, sur la vulve et la face interne des cuisses d'une parturiente, ces zones érythémateuses que
l'emploi
dusublimé et surtout de l'eau
phéniquée
avait coutumed'y faire naître, ces plaques qui, facilement excoriées, étaient autant depoints où l'absorption pouvait se faire, et exposaient à l'intoxication mercurielle dans le cas d'antisepsie rigou¬reuse, à l'infection puerpérale pour les cas de négligence.
Voilà donc deux dangers qui sont en somme évités par l'em¬
ploi du cyanure de mercure.
Si on ne possède pas de données exactes sur la toxicité du cyanure de mercure, les résultats cliniques peuvent nous fournir d'utilesrenseignements.
Lecyanure de mercure, réunissant dans une même molé¬
cule le cyanogène et le mercure, serait très toxique, d'après
MM. Tardieu et Roussin. M. le professeur Denigès, dans sa communication à la Société de pharmacie de Bordeaux,
pré-
tend que la toxicité est fortement exagérée; elle ne dépasse
pas sensiblement celle du subliméau môme titre et « cela se
conçoit si l'on réfléchit que dans une
molécule
Cy2 Hg, lemercure représente les quatre
cinquièmes
du produit etlecyanogène
un cinquième.Nous pouvons, à ce sujet, citer une série de cas assez concluants, empruntésà nos maîtres de la Faculté de Bor¬
deaux.
M. leprofesseur Badal depuis qu'il utilise le cyanure de
mercure n'a eu aucun accident à la suite de ses interven¬
tionsen ophtalmologie; il constate que les solutions faites
avec cetantiseptique n'irritentpas plus la périphérie que
le
champopératoire
et que, notamment dans les ulcérations de la cornée, on ne rencontrait pas l'irritation que produit le sublimé etjamais le moindre signe d'intoxication.M.le DrFromaget fait, dans certains cas, des injections sous-conjonctivales à
5/1000;
il a pumême
employer des so¬lutionsà 10/1000,c'est-à-dire injecter un1/2 centigrammeà la
fois sans avoirjamais eu d'accidents à déplorer. Quant aux résultats antiseptiques, ils étaient meilleurs qu'avec le su¬
blimé. M. le professeur agrégé Pousson a déjà substitué en
partie dansson service les solutions de cyanure aux solu¬
tions de nitrate d'argent pour les injections intra-vésicales.
Cetemploi présente de grands avantages en ce qu'il diminue beaucoup la douleur; quant à la toxicité, ellene s'est jamais
manifestée.
Nous tenons enfin du Dr Verdelet le faitsuivant,assez par¬
ticulier. Chaque fois qu'il opérait (et que la séance durait
assez
longtemps)
s'exposant à toucherdu sublimé,
il res¬sentait une sensation désagréable de goût métallique dans la boucheet parfois mêmeavait une légère gingivite. Rien de ce genre nelui est arrivé depuis
qu'il emploie le
cyanure demercure.La raison
(toute personnelle d'ailleurs) du
peude toxicité
relative du cyanurede mercure
résiderait
dansce fait depuislongtemps
constaté; la grande résistancedu
cyanure demer-- 25 -
cureà la décomposition. Ses
solutions
sonttrès stables,
nese modifient que très peupar
action chimique; le cyanogène
fixe le mercure, fixant lui-même le cyanogène, de telle sorte
que chacundes éléments en
particulier, dont la toxicité est
grande, doit être atténuépar lacombinaison chimique. De
plus, la présence de lasolution alcaline augmente
encorela
fixité desélémentsen présence.
Revenantau cas particulier
de l'obstétrique, l'emploi du
cyanuredemercure dans
les
casde rétention placentaire et
même dedilacérationsmultiples etétendues
n'a jamais
pro¬duitd'accidents, même à la suite d'injections intra-utérines prolongées. Chez les
accouchées ayant
eudes hémorragies
abondantes, en particulierpendant
ouaprès la délivrance,
làoù le bichlorure de mercure nepeut être employé
à
couse du pouvoir absorbant des muqueusesanémiées, le
cyanurea donné les meilleurs résultats.
Un desinconvénients du sublimé
(sur lequel Tarnier
passeunpeu trop
légèrement) réside dans l'altération rapide et
inévitable des instruments. Cedéfaut, qui appartient
aussi
aucyanure de mercure pur,
n'existe plus
en aucunefaçon
avec le cyanure ensolution
alcaline.
Ladissolution de l'antiseptique
dans
l'eaun'a
pasbesoin
d'être aidée par l'addition
de liquides
oude cristaux (alcool,
acide tartrique,
etc.),
etelle
sefait très facilement à froid.
Le cyanure de mercure,
employé
enpansements
ou en lavages, peut provoquerchez certains de la douleur
assez intense, quelquefois; chezd'autres,
on nenote
aucunphéno¬
mène de douleur. M. le professeur Démons nous a
signalé
unfait qui lui est
personnel.
Ayant audoigt
uneplaie
con- tuse, qu'il soignait habituellement ausublimé, il voulut la
plongerdans le cyanure de mercure etressentit
unedouleur
brûlante. Faut-il attribuer ces phénomènes douloureux au cyanureseul? Nousnelecroyonspas,
le chromate dépotasse,
qui sert de colorant,pourraityêtrepour unepart, selon qu'il
est en plus ou moins grande
quantité. En obstétrique,
d'ailleurs, les lavages portent surla paroi vaginale, qui
n'étantgénéralement pas excoriée, ne sera pas atteinte, ou sur la paroi utérine, qui offre une plaie, c'est vrai, maisne
possède pas de sensibilité.
Dans les cas d'albuminurie, le sublimé produit une dégé¬
nérescence de la substance corticale du rein, l'élimination du mercure ne pouvant être complète, les phénomènes se manifestent promptement. A la
Clinique
obstétricale, onn'a point tenté
l'emploi
du cyanure de mercure dans cesconditions et il est prudent d'agir ainsi, car des doses infini¬
tésimales de mercure absorbé pourraient produire de funestes résultats; d'ailleurs les solutions de formol ou de permanganate de potasse donnent des résultats assez satisfaisants pourqu'on ne tente pas de les supplanterdans
ce casparticulier.
CHAPITRE IV
Observations
cliniques.
A la Clinique obstétricale, toutes les injections vaginales
et intra-utérines sont faites avec le cyanure de mercure en solution à 50 centigrammes par litre. Pendant le travail, avant et après la délivrance, on fait desinjections vaginales.
Si l'accouchement ou la délivrance ont nécessité une inter¬
vention, c'est-à-dire toutes les fois que l'on est obligé de porter la main dans l'utérus, on fait à la suite une injection intra-utérine. Dans les accouchements normaux, on ne fait quedes injections vaginales, que l'oncontinue deuxfois par jour pendantles suites decouches.
Nous donnons ici quelques observations, les seules que nous ayons pu relater, où, à la suite d'avortement, de rétention placentaire, il se soit produit de l'infection. Nous ferons remarquerque les malades dont nous allons parler
venaient du dehors, où elles n'avaient peut-être paspristous les soins que nécessitait leur état. Nous ajouterons que,
depuis lecommencement de janvier, date de l'ouverture de la Clinique, il a été fait plus de 400 accouchements naturels
ou artificiels. La morbidité est doncinsignifiante,etcela bien que par les exigences de l'enseignement, on fasse subir à toutes les femmes qui viennent à la Clinique de nombreux touchers successifs.
- 28 —
Observation I
Institutrice de vingt-quatre ans. Réglée à douze ans, toujours irrégu¬
lièrement. Primipare. Douleurs dans la nuit du 12au 13 janvier, à la
suite de laperte deseaux; elles se continuent les jours suivants. Le 15, l'enfant succombe. Le 17, un médecin, appelé pour extraire le fœtus quiseprésentait par le siège décomplété mode desfesses, tentel'abais¬
sement du pied antérieur ; ilextrait un fœtus volumineux ayant subi
un commencement deputréfaction. Déchirure complète du périnée et de lacloison recto-vaginale, jusqu'à 5 centimètres environ du fond du cul-de-sac postérieur. Restauration immédiate sansrésultat. Quatre ou
cinq jours après, fièvre, délire. La malade entre à l'isolement de la Clinique d'accouchements le 23janvier.
L'examen à ce moment-là permet de constater que la cloison recto- vaginale et le périnée sont complètementeffondrés. Les tissussont spha-
célés sur toutela surface de la plaie. On donne une injection vaginale prolongéeetune injection intra-utérine avec du cyanure de mercure,
on fait untamponnement autour du col pour essayer de le séparer des
matières fécales. On donneà la malade trois injections vaginales par
jour. Son état s'améliore de jour en jour; la température, qui avait
atteint 40° le 24janvier au soir, descend pour osciller entre38° et 39°
lesjours suivants. Le 6 mars, elle est même au-dessous de 38°, elle subitune recrudescence pendant trois jours, elle redescend ensuite, à partir du 10mars, pour se maintenir aux environs de 37° à 37°6. Le 16 mars, on tenteune reconstitution du périnéede la malade; la partie postérieure, seule, estconsolidée, la partie antérieure cède. On continue
lesinjections vaginales. L'état dela maladesemaintient bon.Le24 mai,
on fait une nouvelle suture; le périnée est résistant, onrefait en entier
la cloisonrecto-vaginale. La reconstitution s'opèretrèsbien et la malade
sort guérie le 23 juin. (Pour la courbe de température, voir Pl. 1, Fig.
1.)
Cette observation nous montre
qu'il
a suffi de quinze jours pour ramenerà l'état sain
uneplaie
enpleine période
de- 29 -
sphacèle,
plaie
qui par le voisinage d'un utérus infecté, d'un rectum déchiré, étaitplusprédisposée
que tout autreà l'in¬fection.
Observation II
Domestique, vingtans. Réglée à treizeans, toujours régulièrement.
Pertes blanches pendant lagrossesse. Primipare. Entre le 17 mai à la salle de travail venant du dehors. Le troisième jour, l'enfant a de l'ophtalmiepurulente. Lehuitièmejour, la mère estinfectéeàson tour, elle fait de la lymphangite péri-utérine. La température, qui s'était maintenue au-dessous de 37°, monte à37°6le soir du septièmejour, à 38°1 le soir duhuitième, à38°4 le matin du neuvième. On fait alors
une injection intra-utérine. Latempérature du soir étantde 38°, on fait une nouvelle injection intra-utérine etla température redescend le lendemain aux environs de36°8-37° pour s'y maintenir jusqu'à la sortie de lafemme, complètement guérie, le dix-septième jour.
(Voir
tempérât. Pl. 1, Fig. 2.)Observation III
Femme de dix-neufans, sans profession. Réglée à treize anset demi irrégulièrement, plusieurs fois par mois très abondamment. Entrée à la salle de travail le 26 février, à cinqheures du matin, venant de la salle6 où elle était traitée pourtuberculose pulmonaire aupremier de¬
gré. Elle fait un avortementde trois mois etdemi, le foetus est seul ex¬
pulsé, ily a rétention placentaire, pasde fièvre,pas de pertes de sang.
Lelendemain, elle souffre de coliques ; on lui administre deux cachets
d'antipyrine
de 0gr. 50 centig. chaque à deux heures dix et à trois heures dixsanssoulagement. A cinq heures, on fait untamponnement lâche à lagaze iodoformée. Ce tampon est retiré letroisièmejour à huit heures du matin, le placenta est toujours dans lecorps utérin. A neuf heures, curage digitalavec deux doigts, le placenta estextrait par ex¬pression