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Pour soi vêtir honnêtement à la cour de monseigneur le duc : costume et dispositif vestimentaire à la cour de Philippe le Bon, de 1430 à 1455

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Pour soi vêtir honnêtement à la cour de monseigneur le duc : costume et dispositif vestimentaire à la cour de

Philippe le Bon, de 1430 à 1455

Sophie Jolivet

To cite this version:

Sophie Jolivet. Pour soi vêtir honnêtement à la cour de monseigneur le duc : costume et dispositif vestimentaire à la cour de Philippe le Bon, de 1430 à 1455. Sciences de l’Homme et Société. Université de Bourgogne, 2003. Français. �tel-00392310�

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UNIVERSITE DE BOURGOGNE

Pour soi vêtir honnêtement à la cour de monseigneur le duc de Bourgogne

Costume et dispositif vestimentaire à la cour de Philippe le Bon de 1430 à 1455

Tome 1 – Texte

Thèse pour le doctorat d’Histoire présentée par Sophie JOLIVET

2003

Sous la direction de Vincent TABBAGH

(Professeur à l’Université de Bourgogne)

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MEMBRES DU JURY

Bretrand SCHNERB, professeur à l’université de Lille III, président

Michel PASTOUREAU, directeur d’études à l’Ecole Pratique des Hautes Etudes Jacques PAVIOT, professeur à l’université de Paris XII

Françoise PIPONNIER, directeur d’études à l’Ecole des Hautes Etudes en Sciences Sociales

Vincent TABBAGH, professeur à l’université de Bourgogne

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► CE TRAVAIL N’AURAIT PAS PU ABOUTIR SANS VOUS. QUE CE FUT

POUR ME SOUTENIR OU POUR M’APPUYER, M’ACCOMPAGNER ET ME

CONSEILLER VOUS AVEZ TOUS ETE LA. CES QUELQUES MOTS NE PEUVENT

EXPRIMER MA GRATITUDE. MERCI A OLIVIER JACQUET, RELECTEUR,

SECRETAIRE, DOCTORANT, AMI, AMANT, MARI, CONSEILLER, PATIENT ; A

ROMANEE, ADORABLE ET PATIENTE, COLETTE, YVON, ISABELLE JOLIVET,

SANS QUI JE NE SUIS RIEN, MARIE-JO ET JEAN-MARIE JACQUET,

DISPONIBLES ET BIENVEILLANTS ; AU PROFESSEUR VINCENT TABBAGH,

PRECIEUX CONSEILLER TOUJOURS DISPONIBLE ET BIENVEILLANT, AVEC

RIGUEUR ET JUSTESSE ; A NELLY GANDRE, CELINE VANDEUREN-DAVID,

SYLVAIN FAIVRE, RELECTEURS ET CONSEILLERS INFATIGABLES ; A HEDI

MAAZAOUI ET LILIAN VINCENDEAU, AU LABO D’HISTOIRE DE L’UNIVERSITE

DE BOURGOGNE ET JEANNOT BOURGEON, AMIS ET CONSEILLERS POUR

LEUR DISPONIBILITE, LEUR AIDE TECHNIQUE ET MATERIELLE ; A MARIE-

HELENE GUELTON, DU CIETA, DOMINIQUE CARDON, SIMONNE ABRAHAM-

THISSE, BERTRAND SCHNERB, ODILE BLANC, MICHEL PASTOUREAU,

FRANÇOISE PIPONNIER, MONIQUE SOMME, NEITHARD BULST, DANIEL

ROCHE, POUR LEURS CONSEILS ET LEURS DISPONIBILITE ; A ANKE GREVE

ET WENER PARAVICINI, DE L’INSTITUT HISTORIQUE ALLEMAND, POUR LEUR

AIDE PRECIEUSE ; A GERARD MOYSE ET L’ENSEMBLE DE L’EQUIPE DES

ARCHIVES DEPARTEMENTALES DE LA COTE D’OR ; A M. VANGHELUWE ET

L’ENSEMBLE DE L’EQUIPE DES ARCHIVES DEPARTEMENTALES DU NORD ; A

SERGE FREMAUX, DES ARCHIVES COMMUNALES DE LILLE ; AUX EMPLOYES

DE LA BIBLIOTHEQUE MUNICIPALE DE DIJON ET CEUX DE LA BIBLIOTHEQUE

UNIVERSITAIRE DE DIJON ; A CHRISTINE PERES ET A MES COLLEGUES DU

MUSEE DE LA VIE BOURGUIGNONNE. MERCI ENFIN A TOUS CEUX QUE J’AI

CROISES, QUI M’ONT ENCOURAGEE ET CONSEILLEE, QUE J’OUBLIE DE

REMERCIER NOMINALEMENT ◄

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I I n n t t r r o o d d u u c c t t i i o o n n

« A Nicolas de Poulenne, garde du lion, pour s’habiller pour estre plus honnestement au service de monseigneur le duc

1

». A lui seul, ce petit article issu de la comptabilité de Philippe le Bon, source première de cette étude, résume mieux que tout autre l’esprit même qui a présidé à ma recherche. Ainsi le duc de Bourgogne dans sa grande générosité (l’article est inscrit au chapitre des dons et compensations) ponctuait ses faveurs d’une obligation de bien paraître, tant devant lui qu’ailleurs en son nom. C’est le principe incarné que défendent les sociologues depuis des générations : le costume porteur de signes, le costume acteur en communication, le costume langage de société. C’est à travers ses dépenses ostentatoires que le duc de Bourgogne choisissait de paraître. Une apparence qui ne pouvait se faire sans un fort soutien financier.

La cour de Bourgogne à l’époque de Philippe le Bon évoque grandeur, luxe, faste...

autant de qualificatifs que chacun, contemporain du Grand Lion ou simple nostalgique reconnaît et accepte. Sans être coupée du monde, la cour de Bourgogne générait ses propres codes, son langage, ses rites, son organisation originale que nul en son sein n’était sensé ignorer. Elle se donnait à voir, se voulait magnifique et s’en procurait les moyens. Grands seigneurs, courtisans, prélats reconnus, jeunes nobles en formation, dames rivalisant de titres et d’atours, petit personnel fourmilliant, chacun tenait un rôle bien défini. Et quand le microcosme se déplaçait, c’était un cortège formé de centaines de personnes, chevaux, chariots, qui se mettait en mouvement, défonçant les routes, et ébranlant les esprits de ceux qui le voyaient défiler.

Choisir son costume pour étudier une cour, c’est d’abord approcher des noms évocateurs, des formes colorées, des « bizarreries » anciennes qu’il faut restituer, comme ces

1ADN, B 1972, f. 190 r°.

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robes « à façon de ploy derrière et de palettot devant », portées à partir de 1450

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. A la lecture des pages des registres médiévaux, on se laisse emporter dans une réalité qui n’est pas sans rappeler l’imaginaire de nos comtes d’enfant. Au-delà d’une réponse à une curiosité personnelle pour les belles choses, c’est la volonté d’aller plus loin qu’un simple regard posé sur les images d’antan, c’est dépasser la frustration de voir sans connaître. Avec la cour de Bourgogne, les historiens bénéficient d’un outil exceptionnel : la combinaison de sources comptables, narratives, et monumentales de grande qualité sur une très longue période, et la richesse et la précision d’une société parfaitement organisée.

Philippe le Bon et son entourage sont connus pour compter parmi les plus dépensiers de leur époque en matière de luxe, de représentation, de mise en valeur des personnes et des biens. Dans cette étude donc, on ne propose pas d’étudier la société médiévale, il ne s’agit pas de reconstituer la vie des cours au XVe siècle, mais la vie d’une cour, de « La » cour de Bourgogne, donnée en modèle pour ses concurrentes, admirée et convoitée, mais unique. Et cette exception demeure aujourd’hui dans la permanence de la documentation : nulle cour du XVe siècle n’a réussi à transmettre autant de qualité, autant de quantité d’archives. C’est sans doute pour cette raison que paradoxalement, elle demeure si mal connue, comme le souligne Werner Paravicini : « elle pourrait l’être davantage, par l’étude globale et méthodique du personnel la composant, par l’analyse des décisions bien documentées prises en son sein, par des recherches sur les résidences ducales, par la mise en série de sa culture festive, si célèbre et si mal étudiée

3

». C’est sans doute aussi pour la richesse de sa documentation qu’elle a été si souvent donnée en modèle de cour.

A travers un des éléments matériels constitutifs de cette cour, son costume, des éclairages nouveaux pourront être proposés sur son organisation matérielle, sur ses principes de décision, sur ses techniques et ses modalités de fonctionnement. Envisager le costume dans ses aspects économiques à partir d’une documentation chiffrée ouvre les portes à bien d’autres domaines : le vêtement est un objet pensé, conçu, confectionné, vendu, acheté, délivré, porté, prêté, dégradé, réparé, délaissé, transmis. Les étapes de sa réalisation nous entraînent vers

2ADN, B 2008, f. 325 r°.

3 « Structure et fonctionnement de la cour de Bourgogne au XVe siècle », dans La cour de Bourgogne, le duc, son entourage, son train, Jean-Marie CAUCHIES éd., Brepols, Turnhout, Belgique, 1995, p. 8 (cet article est la version plus courte d’un article paru sous le titre « The Court of Burgundy : a Model for Europe ? » dans Princes, Patronage, and the Nobility : The Court at the Beginning of the Modern Age, publié par R.G. ASCH et A.M.

BIRKE, Oxford, 1991, pp. 69-102).

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toutes les préoccupations, financières, mentales, sociologiques, qui étaient celles du prince et de son entourage. Et si la terminologie, les formes du costume bourguignon semblent déjà bien connues, il manque le détail, le menu, les preuves que toutes nos impressions correspondent à des réalités vécues, ou au contraire qu’il faut revenir sur certains points. Se détacher du subjectif pour se tourner vers l’objectif. C’est ce que souhaite Werner Paravicini : analyser, rechercher, mettre en série une documentation abondante pour mieux étudier la cour.

Définitions et limites du sujet :

L’intitulé préalable, « Pour soi vêtir honnêtement la cour de monseigneur le duc de Bourgogne », est directement inspiré des articles comptables qui ont été si familiers au cours de mes recherches. Ancrer l’étude du costume dans la comptabilité bourguignonne est un des principes fondamentaux de ce travail. « Honnêtement », ou « honorablement

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», dans ce contexte signifie « comme il se doit », « comme je veux qu’il soit ». On ne se vêtait pas à la cour de Bourgogne sans penser son vêtement, selon la volonté du principal juge et décideur.

Autrement dit, pour rester à la cour, il ne fallait pas déplaire au prince, à commencer dans sa première approche, directement visible, dans le costume. D’emblée cette étude s’inscrit dans un ensemble de valeurs propres à la cour, avec lesquelles il faudra compter, et qu’il s’agira d’analyser : sens de la hiérarchie, sens de la représentation, sens des convenances. Mais il ne suffisait pas de paraître selon son rang et son état, encore fallait-il pouvoir honorer son contrat.

Vivre dans l’entourage du prince imposait d’emblée un rythme de vie et de dépenses.

La cour de Bourgogne n’est plus à présenter, on l’a dit, et les auteurs sont nombreux à se pencher sur ce sujet. Récemment, Werner Paravicini en a redessiné les contours : « la cour, quant à sa structure, est l’ensemble des hommes et des femmes qui, à des titres divers, forment l’entourage continuel, périodique ou occasionnel du prince. Son principe est la familiaritas, l’appartenance à la maison qu’il préside en tant que pater familias, et le service personnel du prince en tant qu’individu, ce qui explique la cessation de tout office curial (et même local), à la mort du prince.

4En 1431, on utilise plus volontiers ce terme que le précédent, qui se généralise vraiment vers 1440. Voir par exemple ADN, B 1942, f. 159 r° et suivants.

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« Ses limites sont flottantes, mais son noyau est clairement défini : appartient à la cour qui mange le pain du maître et a le droit d’ainsi faire - l’accès aux tables du prince n’est jamais parfaitement contrôlé. La cour consiste aussi en ceux qui, en principe pairs du prince, acceptent d’être nourris par lui, et en la foule de ceux qui, serviteurs de courtisans, attendent les résignations, successions, nominations, ou qui, ambassadeurs, envoyés, messagers, quémandeurs et nobles voyageurs, n’y restent qu’un temps

5

».

La cour de Bourgogne était donc sous Philippe le Bon un ensemble hétérogène, constitué autour d’un personnage central, et qui n’existait que par lui. C’était un lieu de vie et de consommation, dans lequel on distinguera un aspect vital, indispensable, et une dimension ostentatoire, frivole, mais dont il était hors de question de se passer. Des sommes très importantes étaient dépensées pour subvenir à ces besoins, et ceci pour des centaines de personnes. L’habillement était présent partout dans cette consommation, et touchait directement trois des cinq fonctions principales de la cour décrites par Werner Paravicini : organiser la vie quotidienne, impressionner les concurrents, intégrer les couches dirigeantes.

Les deux dernières, garantir la sécurité du prince, gouverner et administrer le pays, sont moins concernées, mais non exclues de ce propos.

Lieu de consommation, mais aussi de décision et de fabrication, la cour de Bourgogne, était constituée d’un organe indispensable, sans lequel elle n’aurait été qu’une coquille vide : l’hôtel, formé par le duc, réunissait l’ensemble des officiers rémunérés par le prince pour leur service. La duchesse Isabelle et le comte de Charolais bénéficiaient de leur propre hôtel. Il gérait l’ensemble des services chargés de subvenir matériellement aux besoins du prince et des siens. Plus restreint que la cour, l’hôtel était donc une réalité beaucoup plus concrète, et mieux définie. Afin de prévoir ses dépenses de fonctionnement, le duc Philippe a édicté plusieurs ordonnances de l’hôtel, donnant la liste des officiers, leur rôle, leur rémunération

6

. L’étiquette à la cour de Bourgogne, si précautionneuse, était régie par l’hôtel, ainsi que l’a relaté Olivier

5« Structure et fonctionnement de la cour de Bourgogne au XVe siècle », op. cit., p. 1.

6PARAVICINI W, « Die Hofordnungen Herzog Philipps des Guten von Burgund », Edition II : « Die verlorene Hofordnung von 1419/21, Die Hofordnung von 1426/1427 », Francia 11, 1983, p. 257-301 ; Edition IV : « Die verlorenen Hofordnungen von 1431/14322, Die Hofornung von 1433 », Francia 15, 1987, p. 183-231 , Edition V : « Die Restriktionsordonnanz von 1437 », Francia 18, 1991, p. 111-123. Voir aussi l'ordonnance de décembre 1458 publiée en 1459, ADN, B 3376, Nr. 113.545 pour la période qui nous intéresse.

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de la Marche

7

. Divisé en six offices (échançonnerie, écurie, panneterie, cuisine, fruiterie, fourrière), il devint de plus en plus complexe, et ses membres de plus en plus nombreux. En 1433, le nombre des titulaires d’office s’élevait à 414 personnes, auxquels il faut ajouter les serviteurs et valets mis à leur disposition, soit en tout 760 à 800 personnes

8

. Les officiers chargés de l’habillement faisaient partie de la chambre, et le duc entretenait également une chapelle à demeure. L’hôtel était un des éléments de prestige du duc, par son caractère imposant, accentué pour des occasions choisies d’une grande uniformité visuelle par le biais des distributions de vêtements. Il avait également un grand rôle politique, notamment par l’intégration de l’aristocratie, et militaire. L’hôtel était le lieu où se prenaient les décisions, où les vêtements étaient réalisés, où les habits étaient portés, mais également d’où provient le corpus des sources essentiel retenu pour cette étude : les registres de comptes édités par les receveurs généraux.

L’étude du costume est envisagée dans ses aspects les plus complets : de la simple chemise de corps aux plus riches robes d’apparat, tout doit être mis à plat, reconstitué, organisé, afin de mieux connaître les formes et les matières propres à cette société médiévale.

Les sociologues, en permettant leur application à toutes les sociétés, ont dégagé les définitions les plus pertinentes du costume, de l’habit, du vêtement. Se vêtir, c’est passer un vêtement, quelqu’il soit. Le vêtement est donc un élément destiné à être porté sur le corps, une pièce d’habillement indépendante, qui n’a pas de signification intrinsèque. Au-delà, s’habiller n’est plus simplement se vêtir, mais se préparer, se parer, s’apprêter, s’équiper. Il avait cette signification au XVe siècle dans l’art militaire par exemple. Le mot latin « habitus » désigne une manière d’être : l’habit est l’ensemble des vêtements qui composent l’habillement. C’est donc une notion beaucoup plus large que le vêtement. Elle s’applique d’ailleurs à d’autres domaines, comme l’architecture (habiller, coiffer une tour), la cuisine (préparer pour la cuisson une volaille, une pièce de gibier...), l’horlogerie (monter le mécanisme d’une montre dans son boîtier)... S’habiller, c’est également prendre soin de son apparence pour une occasion particulière.

7 « L’Estat de la maison du duc Charles de Bourgogne, dit le Hardy », dans BUCHON J.A.C, Choix de chroniques et mémoires sur l’histoire de France, Notice sur Olivier de la Marche, Paris, Desdrez, 1936, pp. XV- XXXV.

8PARAVICINI W, « Die Hofordnungen Herzog Philipps des Guten von Burgund », IV, Die verlorenen Hofordnungen von 1431/14322, Die Hofornung von 1433, op. cit., p. 183-231. Bertrand Schnerb compte environ 660 personnes (détenteurs d’offices, valets, aides et auxiliaires additionnés) dans l’ordonnance de 1428, signalant tout de même que tous n’assuraient pas leur service en même temps, par le système des services à tours, dans L’Etat Bourguignon, Perrin, Paris, 1999, p. 292.

(11)

Avec le costume on touche le cœur de la société : c’est le principal apport des sociologues dans le renouvellement de notre vision du costume médiéval

9

. Indissociable de la coutume, il dégage une très forte connotation sociale. Par l’assemblage de ses vêtements dans un ordre étudié, l’individu se positionne par rapport à la société, il affiche sa conformité avec sa manière d’être, son « style ». C’est un moyen de communication, un instrument organisé, qui obéit à des règles communes au groupe, et fonctionne selon des codes connus et reconnus, dans un « système ». Pour étudier le costume, il faut dégager sa structure dans une culture donnée, à une époque donnée (qui, quand, où), avant de dégager l’organisation des divers éléments vestimentaires les uns par rapport aux autres (comment). Enfin, on pourra s’attacher à la signification d’un élément vestimentaire donné en contexte et hors contexte

10

(pourquoi).

Pour résumer cette définition du costume, je ferai appel à l’article récent d’une sociolinguiste, Yvonne Elisabeth Broutin : « la finalité d’un costume ne se limite pas à l’individu porteur de costume, à l’homme habillé. Il prend en compte les autres hommes, ceux de la communauté dont il fait partie, et ceux des communautés environnantes qui l’entourent comme des strates »

11

. Le vêtement et l’habit participent du costume, ils en sont les outils, mais ce dernier est véritablement ancré dans la société qui l’a produit, et c’est pour cette raison qu’il a tout à fait sa place dans le titre de mon travail.

Les vêtements sont souvent accompagnés d’ornements et d’accessoires pour former le costume, qui ne peuvent au sens strict être considérés comme des vêtements (ce qui couvre le corps) : les bijoux sont des éléments enjoliveurs (notion d’ornement), pouvant sembler moins importants que le vêtement, ou le groupe de vêtements, mais pourtant indispensables pour compléter le costume dans de nombreux cas : le collier de la Toison d’Or par exemple est un des attributs primordiaux grâce auxquels on reconnaît un confrère de l’ordre sur les images à partir de 1430.

La notion de « textile » enfin recouvre une réalité qui s’étend au-delà de l’habillement : on désigne par ce terme tout ce qui met en oeuvre des produits tissés (draps de laine, drap d’or,

9 Pour tous les apports des sociologues, voir l’article d’Odile BLANC, « Historiographie du vêtement : un bilan », dans Le vêtement, histoire, archéologie, symbolique vestimentaire au Moyen-Age, cahiers du Léopard d’Or, 1, Paris, 1989, pp. 7-33.

10LABOV W., Sociolinguistique, Minuit, Paris, 1976.

11 « Les mots du costume », dans Se vêtir pour dire, cahiers de linguistique sociale, Université de Rouen, 1996, p.

11-24, p. 12.

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toiles...) qu’ils soient destinés à la fabrication de vêtement ou à la décoration et au confort domestique. Ainsi entrent dans ce cadre les tentures des chambres, les garnitures de lit, les tapisseries de haute lisse, les tapis…. Par conséquent, dans cette étude et pour des raisons pratiques, la notion de « décor » devient un générique destiné à représenter tout ce qui, étant textile, ne fait pas partie de l’habillement.

A la cour de Bourgogne comme dans toutes les cours du Moyen-Age, le costume renvoie à plusieurs réalités en fonction des circonstances : costume civil ou militaire, vêtement de parade ou quotidien, de deuil... L’ampleur d’une étude systématique sur le costume à la cour de Bourgogne, grâce à une documentation très abondante, oblige à faire des choix, non seulement dans la durée, mais également dans le contenu. Le costume militaire, parce que son étude impose un élargissement du corpus à d’autres matières (le métal et le cuir en particulier), parce qu’il requiert des connaissances approfondies sur les armures et l’art militaire, parce qu’il demande une autre approche, avec d’autres méthodes, ne sera abordé dans cette étude que par ses éléments textiles : les huques des archers par exemple, délivrées régulièrement par le duc, procédaient à la fois du costume civil et militaire (elles n’étaient pas portées que sur les champs de bataille), et me semblent indispensables dans l’approche sociale. Un grand nombre de vêtements avaient, pour les hommes, un usage à la fois civil et militaire.

La période envisagée ne couvre pas tout le règne de Philippe le Bon (1419-1467). Le choix de la fourchette chronologique s’est opéré d’une manière tout à fait originale : j’ai recherché volontairement un ensemble de données continues et cohérentes. D’une part, l’ampleur de la recherche de doctorat ne me permettait pas de couvrir l’ensemble de ce règne, long de 48 ans. J’ai estimé en accord avec mon directeur de thèse qu’une étude approfondie porterait sur une chronologie plus restreinte. Ensuite, il a semblé que la meilleure solution était de préférer une période aux lacunes limitées en ce qui concerne les données vestimentaires : si les deux comptes de la recette générale de toutes les finances de 1430 et de 1456 ont disparu, entre ces deux dates, seul le compte de 1452 n’est pas complet

12

, mais l’essentiel des articles concernant y l’habillement a été conservé. J’ai donc choisi arbitrairement de travailler sur un espace temps plus restreint que le règne (1430-1455), dans l’objectif de partir d’une analyse systématique du corpus pour arriver à en dégager les permanences et les évolutions, tout en limitant les partis-pris, même involontaires, d’un tenant et d’un aboutissant choisi parmi les

12 Voir Introduction, corpus des sources.

(13)

évènements politiques du règne. Il a semblé que 25 années était une période permettant d’approfondir, sur un temps relativement court, une analyse fine, « au jour le jour », vêtement par vêtements, tout en autorisant l’analyse des évolutions sur un temps relativement long du point de vue vestimentaire. Cette période offre un choix suffisant d’évènements politiques, militaires, religieux, familiaux, sociaux pour que leur impact sur la consommation vestimentaire soit parfaitement documenté.

Contexte

En 1430, Philippe le Bon était, à 34 ans, un homme jeune, et un prince bien assis dans sa fonction, sûr de son pouvoir. Son caractère et sa physionomie sont connus, grâce aux témoignages de ses contemporains, en particulier celui de Chastellain

13

, célèbre et largement repris dans les travaux des historiens. Paul Bonenfant est le plus reconnu des auteurs qui ont travaillé sur la personnalité même du duc de Bourgogne. Il a dégagé de ses recherches un personnage essentiel pour l’avenir de l’Etat bourguignon, le fondateur de la future Belgique. Il en a fait également un prince de sang royal français, profondément attaché à sa « francitude », et surtout le chef d’un parti soucieux de maintenir sa place dans le royaume

14

. Doublement veuf, Philippe épousa en 1430 une princesse qui avait presque le même âge que lui, et qui allait se révéler une amie sûre et une conseillère compétente, Isabelle du Portugal

15

. Elle devait lui donner trois fils, Antoine, Josse et Charles, mais seul le dernier devait survivre pour hériter de son père.

Parmi les plus controversées des opinions sur ce personnage, sa force de travail est celle qui divise le plus. Johan Huizinga

16

et Henri Pirenne

17

se sont affrontés, le premier minimisant son rôle personnel au profit de celui de ses conseillers, mais Paul Bonenfant, tranchant la

13CHASTELLAIN Georges, « Déclaration de tous les hauts faits et glorieuses aventures du duc Philippe de Bourgogne, celui qui se nomme le Grand Duc et le Grand Lion », Kervyn de Lettenhove éd., t. VII, dans Splendeurs de la cour de Bourgogne, Danielle REGNIER-BOHLER dir., Laffont, Paris, 1995, p. 753.

14 « Les traits essentiels du règne de Philippe le Bon », dans Philippe le Bon, Sa politique, son action, rééd. des articles de l’auteur, De Boeck, Université, Paris-Bruxelles, 1996, p. 5.

15SOMME Monique, Isabelle du Portugal, duchesse de Bourgogne, une femme au pouvoir au XVe siècle, Presses Universitaires du Septentrion, Lille, 1998.

16 « La physionomie morale de Philippe le Bon », dans Annales de Bourgogne, t. 4, 1922, p. 101-129.

17 Histoire de Belgique, t. 2, 3éd, Bruxelles, 1922, p. 267-269.

(14)

querelle, a préféré le souvenir d’un véritable prince capable de prendre lui-même les grandes décisions au moment où cela s’avérait nécessaire

18

. Ces points de vue sont d’autant plus intéressants que nous aurons l’occasion, à propos du costume, d’évaluer le pouvoir de décision personnel dont disposait Philippe le Bon. Thèmes forts de son principat, l’idée de croisade et de chevalerie accompagnaient le duc dans ces activités : tout au long de son règne, il eut à cœur d’organiser et de mener une croisade, dans le cadre de l’ordre de chevalerie de la Toison d’Or, qu’il fonda en janvier 1430, au moment de son mariage.

Titré comte de Charolais à sa naissance en 1396, il était le seul fils légitime et successeur de Jean Sans Peur, assassiné en 1419. A son avènement, il inscrivit sur son sceau les titres hérités de son père, et de son grand-père Philippe le Hardi, premier duc de Bourgogne de la famille des Valois : duc de Bourgogne, comte de Flandre, d’Artois, palatin de Bourgogne, seigneur de Salins et de Malines. Sous influence bourguignonne se trouvaient les domaines de la maison de Nevers (comtés de Nevers, de Rethel principalement), les duchés de Brabant et de Limbourg, les comtés de Hainaut, de Zélande, de Hollande, les domaines de la maison de Luxembourg et le duché de Clèves. Au cours de son règne, le duc devait acquérir par héritage, achat, traité ou guerre les comtés d’Auxerre et de Bar-sur-Aube, le Mâconnais, le comté de Namur, les duchés de Brabant et de Limbourg, les comtés de Hainaut, de Hollande et de Zélande, les villes de la Somme. Il contrôlait également une partie de la Picardie (Boulogne, Roye, Péronne, Montdidier...). Sa dernière acquisition, par la force, fut celle du Luxembourg, en 1443. Les possessions du nord étaient appelées génériquement « pays de par-deçà », et celles du sud « pays de par-delà ». Elles formaient un ensemble territorial considérable,

« caractérisé par l’hétérogénéité de ses structures et le caractère décentralisé, pour ne pas dire particulariste, de ses institutions

19

».

Dans les années 1430 se manifestait dans un contexte favorable une volonté plus soutenue de régler la guerre franco-anglaise. Le renversement des forces joua en faveur de la réconciliation franco-bourguignonne, qui devint effective en septembre 1435, avec le traité d’Arras. La guerre civile était officiellement terminée, mais les relations franco- bourguignonnes restèrent tendues pendant tout le règne (en témoignent les nombreuses conférences organisées pour le règlement des litiges). En revanche la rupture fut consommée

18 « Les traits essentiels du règne de Philippe le Bon », édité dans BONENFANT Paul, Philippe le Bon, Sa politique, son action, Bruxelles, De Boeck Université, 1996, p. 3-18.

19SCHNERB Bertrand., L’Etat Bourguignon, op. cit., p. 227 ; de manière générale, voir cet ouvrage pour le détail contextuel de la cour de Philippe le Bon.

(15)

entre l’Angleterre et la Bourgogne, et après deux années de guerre (siège avorté de Calais, contre-offensive anglaise), les conférences de Gravelines, conduites du côté bourguignon par l’épouse du duc Isabelle de Portugal, rétablirent les relations commerciales, même si la guerre franco-anglaise n’était pas réglée. Dans ses Etats, le duc dut prendre les armes à plusieurs reprises, soit pour conquérir de nouvelles possessions dont il s’estimait ayant droit légitime (Hollande, Zélande, Frise et Luxembourg), soit pour mater les révoltes des villes du nord (Cassel en 1430, les villes de Flandre en 1436 pendant le siège de Calais, Gand en 1451...).

Les années 1430-1455 furent marquées par des relations politiques intenses, où le duc de Bourgogne eut maintes occasions de montrer à tous, en grand apparat et à force de deniers, sa puissance et sa dignité. Elles seront étudiées à travers le prisme vestimentaire au cours de ce travail.

Le règne de ce prince et les Etats bourguignons ont fait l’objet de nombreuses, très nombreuses publications, depuis Dom Plancher

20

et le comte de Barante

21

, jusqu’à Bertrand Schnerb

22

et les Publications du Centre Européen d’Etudes Bourguignonnes

23

. Les collectifs récents initiés par la bibliothèque royale de Belgique tels que L’ordre de la Toison d’or, Idéal ou reflet d’une société

24

ou Les Chroniques de Hainaut ou les ambitions d’un prince Bourguignon

25

permettent d’affiner les connaissances sur les conceptions politico-culturelles de la cour au temps de Philippe le Bon. Cependant, bien des aspects de sa vie quotidienne restent mal connus, pour les raisons que W. Paravicini évoquait plus haut. Ce qui apparaît clairement et ostensiblement, c’est l’étiquette très rigoureuse qu’il avait imposée aux membres de sa cour. Tous les auteurs mettent en avant l’aspect festif et ostentatoire de la vie à la cour de Bourgogne : jamais une cour au XVe siècle n’atteignit un tel degré de coloration luxueuse et même aux yeux de ses contemporains, la cour de Bourgogne apparaît toujours avec un superlatif. L’organisation de banquets à entremets et de tournois, étalés avec force détails dans les pages les chroniqueurs, comptait parmi ses spécialités. Le duc appréciait l’art sous toutes

20PLANCHER, Dom Urbain et dom MERLE, Histoire générale et particulière de Bourgogne, t. IV, Frantin, Dijon, 1781.

21BARANTE Prosper, Comte de, Histoire des ducs de Bourgogne de la maison de Valois, 1364-1477, t. 6 : Philippe le Bon, Chez Ladvocat, Paris, 1825.

22L’Etat Bourguignon, op. cit.

23 Les rencontres de 1996 (26-29 septembre) à Nivelles et à Bruxelles ont été gérées en conjonction étroite avec l’exposition de la Bibliothèque royale de Belgique. Les actes sont parus dans Images et représentations princières et nobiliaires dans les Pays-Bas bourguignons et quelques régions voisines (XIV-XVIe siècles), Publication du Centre européen d’études bourguignonnes, n°37, Neuchâtel, 1997.

24 Ed Christiane Van den Bergen-Pantens, dir. Pierre Cockshaw, , Brepols, Tournhout, 1996.

25 Ed Christiane Van den Bergen-Pantens, dir. Pierre Cockshaw, , Brepols, Tournhout, 2000.

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ses formes (littérature, peinture, musique...) et entretenait à son service des artistes réputés, comme Jan Van Eyck ou Jean Wauquelin.

Pendant la période envisagée, le contexte économique des Pays-Bas bourguignons était favorable. Malgré des nuances indispensables, Werner Prevenier et Wim Blockmans considèrent que de 1385 à 1550, les Pays-Bas bourguignons bénéficiaient d’un relatif bien-être général qui fit revivre toute l’économie, entre autres la consommation intérieure, et en particulier les produits de luxe, achetés par les nantis des villes et les membres de la cour de Bourgogne

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. Le volume des trafics commerciaux a plus ou moins doublé entre environ 1400 et environ 1480. Dans les « pays de par-deçà » dominait le secteur textile, en cours de transformation à la fin du Moyen-Age : nouveaux centres de production (la Hollande en particulier), fabrication de draps de moindre qualité mieux adaptés à la demande (Hondshoote), diversification des activités (par exemple à Malines). Ceux qui ne savaient pas s’adapter déclinaient, comme Ypres, alors que les cités qui connaissaient déjà une relative diversité progressaient (Lille, Bruxelles, qui étaient aussi des résidences ducales privilégiées).

Le commerce des draps de luxe restait cependant très présent, notamment pour fournir la cour de Bourgogne, et l’organisation de la production demeurait très hiérarchisée et corporative. En outre, deux villes situées dans le delta de l’Escaut, faisaient partie des hauts lieux du commerce international : Bruges, centre de rencontre de toutes les nations européennes, maintenant une grande tradition de courtage et une forte expérience du commerce de l’argent, et Anvers, au caractère plus international, avec les foires de Bergen-op-Zoom tenues quatre fois par an. La région était donc très ouverte sur des produits divers, et la cour de Bourgogne pouvait profiter du marché, en trouvant ici à la fois des draps de soie, des draps de laine de toutes qualités, des fourrures, des bijoux, etc.

En revanche, les pays de par delà (possessions du sud) n’avaient pas de productions réputés de draps, bien qu’il s’en fabriquait assurément, et ont subi davantage les conséquences des guerres et des écorcheurs. L’économie y était plutôt tournée vers la terre et ses produits (en particulier le vin et le sel), mais le duc y trouvait un marché bien approvisionné quand il s’y rendait. La Bourgogne conservait son caractère de point de rencontre commercial et intellectuel majeur dans la France médiévale. Ces pays du sud concernent moins la période

26Les Pays Bas bourguignons, Fonds Mercator, Anvers, 1983, p. 94.

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envisagée, parce que la cour du duc de Bourgogne y était beaucoup moins présente, et également beaucoup moins consommatrice de ses produits que de ceux du Nord.

Historiographie

Dès l’époque des ducs Valois, des recueils de costumes, des planches d’images circulaient dans les ateliers, mais ils n’avaient pas la vocation de donner à voir simplement pour la curiosité des choses anciennes. Les auteurs de ces recueils produisaient avant tout des outils de travail : pour les peintres et les artistes du figuré d’abord, pour les couturiers ensuite.

Le plus célèbre de ces livres de modèles est conservé à Vienne au Kunsthistorisches Museum : cinquante six dessins montés sur panneaux de bois, chaque dessin séparé par une bordure mesurant environ 9,5 x 9 cm. Il présente des bustes de personnes, des têtes d’animaux, des végétaux. Pour Craig Harbison

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, les peintres travaillaient essentiellement à partir de ces modèles pour réaliser leurs compositions. Ainsi, ces recueils étaient directement liés aux méthodes de travail des artistes. Grâce à une anecdote, l’historien de l’art montre l’importance de ces cahiers de modèles pour les artistes eux-mêmes : le peintre Gérard David, afin de compenser une dette, déroba les carnets de motifs d’Ambrosius Benson, et obligea sa victime à l’assister dans son atelier. Ambrosius Benson, pris au piège, fut obligé de s’exécuter pour récupérer ses outils de travail.

Pour les couturiers, le problème est plus délicat, car moins balayé par l’historiographie.

On attend encore un bon manuel décrivant les techniques et les méthodes de travail de ces artisans du Moyen-Age. Cela dit, ces recueils de costumes étaient connus chez les italiens (Pisanello par exemple), et il est tout à fait probable que partout les modèles circulaient pour diffuser la mode naissante. Peut-être celui de Mathaus Schwartz, banquier d’Augsbourg, doit- il être classé parmi ceux-là

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?

27La Renaissance dans les Pays du Nord, Tout l’Art, Flammarion, Paris, 1995 (traduit de l’anglais), p. 70 et suivantes.

28 Un banquier mis à nu : autobiographie de Matthaus Schwarz, bourgeois d'Augsbourg, présenté par P.

BRAUNSTEIN, Paris, Gallimard, 1992, 143 p. Il contient la reproduction du manuscrit du "livre des costumes" de Matthaus Schwarz, conservé à la Bibliothèque nationale de France (1497-1574).

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Peut-on faire entrer dans la catégorie de l’histoire du costume les recueils d’armoiries que devaient connaître les hérauts et rois d’armes qui géraient les inscriptions aux tournois ? Là aussi le propos n’a rien d’historique. L’armorial de la Toison d’Or conservé à la bibliothèque de l’Arsenal

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est un témoignage de l’intérêt pour les couleurs héraldiques, un élément de prestige luxueux. Il a pu également être consulté pour la beauté des costumes réunis dans un beau volume, offerts à la postérité.

Françoise Piponnier signale également une initiative intéressante du duc René d’Anjou : il aurait en 1478 lancé une enquête sur les habillements que portaient ses ancêtres.

L’historienne ne peut expliquer de façon sûre les raisons de cette commande, mais propose deux hypothèses pour lesquelles elle ne tranche pas : codifier une étiquette comme il l’avait fait pour le livre des tournois ou assouvir une curiosité pour les belles choses du temps passé ? Pour répondre à la première de ces hypothèses, il faut déjà avoir établi l’existence d’une étiquette du costume, passé et actuel, nécessaire à codifier. On la connaît par les lois somptuaires, par les ouvrages de moralité comme « le Triomphe des Dames » d’Olivier de la Marche. Pour ce qui est de l’esprit de curiosité, rien n’empêche d’imaginer la gestation des premiers recueils d’histoire des costumes (dont les traces sont mieux attestées au XVIe siècle) dans des initiatives comme celles-ci. Le recueil « d’habits anciens et modernes » de Vecellio en est un des plus fameux exemples

30

.

Les trois siècles suivants devaient en effet proposer quelques recherches sur le costume, mais il s’agissait avant tout de présentations visuelles, dans lesquelles primait l’esprit d’exotisme, comme pour les ouvrages sur les mœurs des peuplades non européennes. Ces belles images avaient un pouvoir de fascination par la variété des formes et des couleurs, par l’aspect artistique qui s’en dégageait. Ces recueils passionnaient d’abord les érudits et les antiquaires

31

, mais il ne faut pas y voir une approche structurée. Elle devait venir plus tard, avec les premiers ouvrages d’histoire scientifique.

Au XIXe siècle, les archéologues proposèrent des dictionnaires : le texte fit son apparition, mais c’était encore pour illustrer des images qui conservaient leur primauté. Elles

29Ms. 4790.

30 VECELLIO C., Habiti antichi et moderni di tutto il mundo, 2 vol., Paris, 1965.

31 Littéralement ceux qui s’intéressent aux choses anciennes.

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étaient le prétexte à constituer des corpus de costumes : Enlart

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, Jacquemin

33

, Viollet le Duc

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, Demay

35

reproduisirent des images et fournirent quelques explications : nom des pièces d’habillement ou de matières textiles, repères chronologiques... Leur but était de fournir des outils de travail, de montrer les costumes, par des énumérations méthodiques. Ils s’inscrivaient dans l’école positiviste, dans la lignée de l’histoire événementielle. Les costumes y apparaissaient sous forme de fiches méthodiques, dans une optique pédagogique. Jules Quicherat proposa une dimension sociale par une typologie des formes vestimentaires

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en fonction de leur périodisation. Le romantisme a joué aussi dans cette recherche de l’ancien moyen-âge, du beau gothique et des passions chevaleresques. Il a aussi contribué à forger une image du Moyen-Age encore fort tenace.

Les principaux apports de ces premiers historiens ont été décrits par Odile Blanc dans un article de 1989. Mais pour elle, la conception générale selon laquelle l’évolution des formes était soumise aux choix esthétiques des sociétés a conduit à l’impasse, et c’est grâce à l’apport d’autres sciences sociales (ethnologie, anthropologie, sociologie et linguistique) que la recherche a pu évoluer

37

. Passionnée de symbolique, l’historienne des « Usages du paraître

38

» a rédigé son article dans une conception plutôt théorique de la réflexion historique en matière de costume. Ainsi en s’appuyant sur des lois générales applicables à tout phénomène vestimentaire (ce que cherchent à définir les autres sciences sociales), les historiens ont pu se tourner vers des réflexions beaucoup plus profondes pour mettre en évidence la place et le rôle du costume dans une société donnée. Les ethnologues ont proposé des typologies de vêtements selon leur positionnement sur le corps, ou bien de leur fonctionnalité

39

. Ces listes détaillées, largement utilisées dans les inventaires muséographiques, permettent de classer les pièces, de les étudier à grande échelle, et de les appliquer à toutes les sociétés

40

. Les sociologues ont résolu l’équation de l’évolution des

32Manuel d’archéologie française depuis les temps mérovingiens jusqu’à la Renaissance, t. III : Le costume, Paris, 1916.

33Iconographie générale et méthodique du costume du IVe au IXe siècle, Paris, 1860.

34Dictionnaire raisonné du mobilier français de l’époque carolingienne à la Renaissance, t. III et IV : vêtements et bijoux de corps et objets de toilette, Paris, 1872-1873.

35Le costume du Moyen-Age d’après les sceaux, Paris, 1880.

36Histoire du Costume en France depuis les temps les plus reculés jusqu’à la fin du XVIIIe siècle, Paris , 1875.

37 « Historiographie du vêtement : un bilan », op.cit.

38Les usages du paraître : le dispositif vestimentaire et les représentations du corps vêtu en France du Nord du milieu du XIVe siècle au début du XVe siècle, thèse de doctorat, Histoire : société et mentalités, EHESS, 1990.

39LEROY-GOUHRAN A., Evolution et Technique. t.1 : L’homme et la matière, t. 2 : Milieu et Technique, A.

Michel, Paris , 1943-1945.

40 « Le système descriptif du costume », basé sur une connaissance pratique et approfondie des objets textiles du musée national des Arts et Traditions populaires, fait partie d’un programme d’informatisation de l’ensemble des

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costumes en les intégrant dans un système de société, en en faisant un langage, avec le concours des linguistes

41

. Dès lors, le but à atteindre pour tout historien, quels que soient les moyens qu’il emploie, devient la reconstitution du système ou langage vestimentaire de la société envisagée. On en vient donc à envisager, à affirmer, puis confirmer que le costume à une réelle signification dans la société. L’analyse des faits matériels qui tournent autour du costume sont vus comme un fait salutaire pour l’histoire de la discipline. L’anthropologie, par la mise en valeur des objets permettant la confection et l’entretien du linge, a également favorisé l’idée que les techniques participent aussi aux phénomènes sociaux.

Parallèlement, se développait un courant fort de l’histoire du costume : celui de la mode, là aussi à partir des travaux de sociologues comme Roland Barthes, M.A. Descamps, Quentin Bell, G. Butazzi, Gilles Lipovetsky ou Yvonne Deslandres

42

. Les muséologues intègrèrent à leur tour la vie quotidienne comme signe de société, et élargirent leur champ d’investigation au-delà d’une mode exceptionnelle

43

. Ainsi c’est un fait acquis par tous aujourd’hui que le vêtement se trouve au cœur d’un phénomène de société. Et c’est dans ce sens que s’orientent les recherches actuelles sur ce thème, mais qui restent encore très lacunaires sur le Moyen- Age.

C’est ce qu’a compris Françoise Piponnier, qui signa avec sa thèse soutenue en 1969, le point de démarrage d’une nouvelle forme d’étude dans l’histoire du costume : l’univers plus ou moins restreint d’une cour princière était reconstitué grâce à la mise en série de données économiques. L’exploitation systématique de la comptabilité des ducs d’Anjou devait lui

collections : on a établi des listes standardisées de vêtements (et non d’ensembles de costumes), en fonction des éléments que l’on veut voir apparaître dans l’inventaire (typologie du vêtement, morphologie, matières et techniques, aspects culturels). Ces listes sont conçues pour servir de modèles à d’autres institutions muséographiques, pour la mise en série des collections, applicable à un grand nombre de collections diverses.

C’est pourquoi on a choisi de développer la nomenclature des vêtements à partir d’un diagramme de description.

Les vêtements sont définis en fonction de leur positionnement sur le corps. Le corps devient ainsi un ensemble divisé en sections numérotées, et le vêtement un objet couvrant une ou plusieurs de ces sections. C’est seulement ensuite qu’on le désigne par le nom générique ou d’appellation qu’il porte habituellement, ou le plus fréquemment. Voir DUFLOS-PRIOT M.T., RICHARD P., Un système descriptif du costume traditionnel français : typologie du vêtement, morphologie, matières et techniques, aspects culturels, Centre d’ethnologie française et M.N.A.T.P., Paris , 1984.

41BARTHES Roland, Système de la Mode, Paris, 1967. L’auteur dans son essai basé sur l’analyse du discours de mode dans la presse des années 60, utilise la méthode structurale de Saussure, en partant du postulat que le costume est un langage.

42 BARTHES Roland, Système de la Mode, Paris, 1967 ; DESCAMPS M.A., Psychosociologie de la mode, PUF, Paris, 1979 ; BELL Quentin, Mode et société : essai sur la sociologie du vêtement, PUF, Paris, 1992 ; BUTAZZI G., La mode, art et société, Hachette, Paris, 1983 ; LIPOVETSKI Gilles, L’Empire de l’éphémère, Gallimard, Paris, 1987 ; DESLANDRES Yvonne, Le costume, image de l’homme, Albin Michel, Paris, 1976.

43C’est le principe qui a prévalu dans la création du musée de la Mode au Louvre en 1986.

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permettre de reformuler une conjoncture de cour autour du costume. Tout en montrant son relatif échec dans cet objectif, faute de données suffisantes conservées, elle signa la première étude d’un fait social total concernant le costume de cour. Les formes et les couleurs des vêtements étaient précisées, les étapes du processus de fabrication et d’utilisation de l’habillement décrites et replacées dans leur contexte matériel et social

44

.

A sa suite, peu d’historiens se sont penchés de cette manière sur le costume de cour : une seul ouvrage sur ce thème précis est paru à Lausanne en 1993. Agnès Page a travaillé sur la cour de Savoie. La période étudiée de façon systématique est très courte (trois ans, de 1444 à 1447), et c’est sans doute pour cette raison que, par excès de prudence, elle ne donne pas entièrement satisfaction : dès les premières pages, le lecteur est mis en garde : « une étude vraiment représentative ne prendrait son sens que dans la longue durée et reposerait sur un inventaire systématique des sources disponibles. Ce travail ne peut donc donner qu’un aperçu synchronique des pratiques vestimentaires à la cour de Savoie

45

». Ainsi, à l’issue de l’analyse des tissus, des couleurs de la cour, des hiérarchies et appartenances, on reste effectivement un peu frustré : si l’auteur a posé les problèmes que représente un tel sujet (manque de précision des sources, difficultés d’interprétation et de représentation), elle a esquivé les réponses majeures, au profit d’une soigneuse énumération, au demeurant très utile. Son ouvrage comprend une grande série d’annexes particulièrement heureuses pour une étude comparative : listes des draps en fonction de leur provenance, leur prix, la quantité achetée ; tableau synoptique des fournisseurs, éditions de pièces comptables. Bref, bien que ce travail reste partiel, il a le mérite de se placer dans une perspective comparative (donc préliminaire à une recherche plus profonde). Depuis les travaux de Françoise Piponnier, le laboratoire le plus actif en France est celui de l’école des Hautes Etudes en Sciences Sociales, qui a ouvert un séminaire spécifique sur l’histoire du costume.

Outre l’étude du vêtement et de la mode, et parallèlement, se sont développées des recherches sur la représentation, la théâtralité des manifestations festives de l’époque médiévale, la mise en scène du pouvoir. Georges Doutrepont

46

et Josèphe Chartrou

47

furent parmi les premiers à s’intéresser au faste des entrées solennelles, mais il fallut attendre 1968,

44Costume et vie sociale : la cour d’Anjou, XIVe-XVe siècle, Mouton, Paris-Lahaye, 1970.

45Vêtir le Prince : Tissus et couleurs à la cour de Savoie (1427-1447), Lausanne, 1993.

46 « A la cour de Philippe le Bon : le banquet du Faisan et la littérature de Bourgogne », dans Revue Générale, n°70, Bruxelles, 1899.

47Les entrées solennelles et triomphales de la Renaissance, 1484-1551, Paris, 1928.

(22)

avec Bernard Guénée et Françoise Lehoux

48

pour voir les prémices d’une relecture des textes, d’un ré-examen des images dans un sens plus social et symbolique. Noël Coulet

49

présenta pour la Provence en 1977 ses nouvelles approches pour une autre vision des entrées princières, et des fêtes médiévales en général : la perspective n’est plus de donner à voir les belles scènes que proposaient nos ancêtres, mais d’analyser les conceptions qui prévalaient dans le protocole de ces fêtes (notions de hiérarchie, de couleurs, expression religieuse détournée au profit du roi

50

). Dans les analyses, la dimension festive passe au second plan derrière les préoccupations politiques et surtout sociales. La mise en scène est redéfinie comme un puissant outil de propagande et de manipulation sur le peuple. Les livrées (distribution de vêtements aux couleurs du prince pour une occasion particulière), par le poids du nombre, en font partie au XVe siècle

51

. Michel Pastoureau et son équipe viendront compléter ces recherches par une étude approfondie de la couleur, et notamment héraldique

52

. Depuis la fin des années 1980, l’activité dans ce domaine de recherche est florissante, autant en France que de l’autre côté de la Manche. L’accent est mis sur le rapport de force entre gouvernants et gouvernés, sur les significations réelles des entrées princières

53

, sur le rôle que chacun doit tenir dans le

48Les entrées royales françaises de 1328 à 1515, Sources d’histoire médiévale, Institut de recherche et d’histoire des textes, n°5, Paris, 1968.

49 « Les entrées solennelles en Provence au XIVe siècle, Aperçus nouveaux sur les entrées royales françaises au bas Moyen-Age », dans Ethnologie Française, t. VII, 1977, p. 63.77.

50Noël Coulet, en comparaison avec l’ouvrage de Bernard Guénée et Françoise Lehoux sur les entrées françaises, analyse de façon détaillée la présence du dais sous lequel le roi est accueilli en Provence, et avec lequel il parcourt la ville. Ce nouvel attribut royal, dont la diffusion à travers l’Occident se fait probablement par des étapes à clarifier, renforce et enrichit une coloration religieuse déjà présente. L’entrée est ainsi pour l’auteur un héritage d’un cérémonial antique christianisé et transfiguré par le modèle évangélique du jour des Rameaux. Elle deviendra un temps fort de la « religion royale ».

51 Pour Frédéric Lachaud, les livrées pratiquées à la cour d’Edouard Ier Plantagenêt n’avaient pas encore les significations emblématiques qui prévaudront au XVe siècle. Elles faisaient partie de ce qu’un membre de la cour recevait pour son service, au même titre que ses gages. La signification était liée à la fidélité, non encore à la mise en scène du pouvoir. « Les livrées de textiles et de fourrures à la fin du Moyen-Age : l’exemple de la cour du roi Edouard 1er Plantagenêt (1272-1307) », dans Le vêtement, histoire, archéologie et symbolique vestimentaire au Moyen-Age, Le léopard d’Or, Paris, 1989, p. 169-180. ; DELORT Robert, « Notes sur les livrées en milieu de cour au XIVème siècle », dans Commerce, finances et sociétés, XIème - XVIème siècle, recueil de travaux d'histoire médiévale offert à M. le professeur Henri Dubois, Paris, 1994, p.361-368.

52 PASTOUREAU Michel, « Aux origines de l'emblème, la crise de l'héraldique européenne aux XIVème et XVème siècle », dans l'Hermine et le sinople, Etudes d'héraldique médiévale, Paris, 1982. ; Figures et couleurs, études sur la symbolique et la sensibilité médiévales, Paris, Le léopard d'or, 1986 ; Couleurs, images, symboles, études d'histoire et d’anthropologie, Paris, Le léopard d'or, 1989 ; « Images du pouvoir et pouvoir des princes », dans Genèse de l'état moderne : bilan et perspectives, éditions du C.N.R.S., Paris, 1990, p. 227-234 ; Rayures : une histoire des rayures et des tissus rayés, Seuil, Paris, 1991 (réed. 1995) ; Traité d'héraldique, 2è éd, Paris, 1993 ; (dir.), La couleur, regards croisés sur la couleur du Moyen-Age au XXème siècle, Le léopard d'or, Paris, 1994.

53ARNARDE Peter J., « Sécular charisma, sacred power : rites of rebellion in the Ghent entry of 1467 », dans Handelingen van Maatschappij voor oudheidkunde en geschiedenis te Gent, n.s., t. XLV, Gand, 1991, p. 69-94. ; Citizens, souvereingns and ritual behavior, Ghent and the Burgundian court, Ann Arbor, UMI, dissertation information service, 1992 ; Realm of rituals. Burgundian ceremony and civic life in the late medieval Ghent, Ithaca - London, 1996 ; CAUCHIES Jean-Marie, « La signification politique des entrées princières dans les Pays

(23)

protocole

54

, ou rituel festif

55

, et sur l’idée de représentations théâtrales

56

. La cour des ducs de Bourgogne attire évidemment par sa réputation les chercheurs sur ce sujet, en témoignent le colloque de Lille-Arras sur le banquet du vœu du Faisan

57

, un numéro spécial des publications du centre européen d’études bourguignonnes sur les « Fêtes et Cérémonies au XIVe -XVe siècle

58

» et d’autres articles récents

59

. Il faut citer également dans ce cadre l’essai de Michel Pastoureau sur les « Emblèmes et symboles de la Toison d’Or

60

», où l’auteur donne sous forme de liste les principaux signes de la Bourgogne, en signalant qu’il s’agit d’une première esquisse à compléter.

En revanche, sur le costume à la cour de Bourgogne, les études sont pour le moins particulièrement rares et fragmentaires. Aucun historien n’a osé pour l’instant s’attaquer à la longue série des comptes de la recette générale des finances de façon systématique, promettant pourtant une perspective très riche en enseignements. En fait, les études se comptent presque sur les doigts de la main : au XIXe siècle, le comte de Bastard d’Estang a recueilli les images de quelques « costumes de la cour de Bourgogne sous le règne de Philippe III, dit le Bon (1455-1460) » (1881). Jules Finot

61

et le comte de Laborde

62

ont publié des textes dans

Bas. Maximilien d’Autriche et Philippe le Beau », dans Fêtes et cérémonies aux XIVe et XVe siècles, op. cit., p.

19-35.

54SOMME Monique, « La participation de la duchesse Isabelle de Portugal et des femmes au banquet du faisan », dans Le banquet du Faisan 1454 : l’Occident face au défi de l’Empire Ottoman, (CAUCHIES Jean-Marie et CARON Marie-Thérèse éd.) Arras, Artois Presses Université, 1997, p 258-271.

55BAK Janos M. (éd.), Coronations, Médiéval and Early Modern Monarchic Ritual, Berkeley, 1990 ; BRYANT Lawrence M., « The medieval entry ceremony at Paris » dans Coronations, medieval and early modern monarchic ritual, op. cit, traduit de l’anglais dans Annales ESC, année 41, n° 3, mai-juin 1986, p. 513-543. ; BRYANT Lawrence M., The king and the city in the parisian royal entry ceremony : politics, ritual, and arts in the Renaissance, Genève, 1986 ; SOENEN Micheline, « Fêtes et cérémonies publiques à Bruxelles aux temps modernes », dans Bijdragen tot degeschiedenis, t. LXVIII, 1985, pp. 47-102.

56BALANDIER Georges, Le pouvoir sur scène, Ballard, Paris, 1980 ; MERINDOL Christian de, « Théâtre et politique à la fin du moyen âge : les entrées royales et autres cérémonies. Mises au point et nouveaux aperçus », dans Théâtre et spectacles d'hier et d'aujourd'hui, Moyen Age et Renaissance. Actes du 115ème congrès national des sociétés savantes, Avignon, 1990, Paris, 1991, pp. 179-212.

57Deux capitales princières face au défi de l’Empire Ottoman (Lille et Arras, 21-24 juin 1995), actes parus sous le titre : Le banquet du Faisan 1454 : l’Occident face au défi de l’Empire Ottoman, op. cit.

58Fêtes et cérémonies aux XIVème-XVème siècle, op. cit., ; en particulier CHEVALIER A., « Le Brabant à l’aube du XVe siècle : fêtes et solennités à la cour des ducs de la branche cadette de Bourgogne Valois (1406-1430), le mariage d’Antoine de Bourgogne et d’Elisabeth de Goerlitz », p. 175-186.

59 HURLBUT J.D., « The city renewed : decorations for the « Joyeuses entrées » of Philip the Good ans Charles the Bold », dans Fifteenth-Century Studies, vol. 19, 1992 ; Cérémonial entries in Burgugndy : Philip the Good and Charles the Bold (1419-1477), thése inédite, Indiana University, 1990 ; LECUPPRE-DESJARDIN Elodie,

« Les lumières de la ville : recherche sur l’utilisation de la lumière dans les cérémonies bourguignonnes (XIVe - XVe siècles », Revue Historique, 605, 1999, 23-43 ; MOSSELMANS N., « Les villes face au prince : l'importance réelle de la cérémonie d'entrée solennelle sous le règne de Philippe le Bon », dans Villes et campagnes au Moyen-Age, Mélanges offerts à Georges Despy, J-M DUVOSQUEL et A. DIERKENS éd., Liège, 1991, pp. 533-548.

60dans L’ordre de la Toison d’Or : idéal ou reflet d’une société ?, Brepols, Turnhout, 1996, p. 99-106.

61Les bijoux, joyaux et pierreries de l’Empereur Maximilien, Paris, 1901.

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lesquels apparaissaient les vêtements et bijoux fastueux de la cour. En 1947, Henri Wescher a produit un premier article sur le costume et la mode à la cour de Bourgogne, donnant les premières impressions de son organisation vestimentaire

63

, dans un numéro des cahiers CIBA.

Le premier livre sur « Le costume en Bourgogne de Philippe le Hardi à la mort de Charles le Téméraire » est signé par deux historiennes, Jeanne Baylé et Michèle Beaulieu

64

en 1956. Ouvrage basé sur la comptabilité et les images, il décrit les tissus et les vêtements, indique les fournisseurs, mais l’analyse n’est pas basée sur des données sérielles. Leur but avoué n’était pas de reconstituer une conjoncture du vêtement, non « pas d’expliquer le costume, mais de le mettre en lumière, afin que l’on puisse s’en servir comme source de datation

65

». Il était donc conçu avant tout comme un outil de travail, et non comme une étude en soi du phénomène vestimentaire. De Schryver l’année suivante, dans ses « Notes pour servir à l’histoire du costume au XVe siècle dans les anciens Pays-Bas et en Bourgogne

66

», signale dans son compte rendu de l’ouvrage ses principales limites et ce qui pourrait être envisagé : pour lui, la publication de l’intégralité des sources comptables serait un préliminaire indispensable pour approfondir ce domaine, et ainsi mieux connaître la vie quotidienne à la cour de Bourgogne.

Après cet ouvrage resté unique, plusieurs articles témoignent d’un intérêt latent pour ce sujet de recherche : Simonne Abraham-Thissé en 1994 offre une des premières réflexions rénovées sur le thème, en reconstituant les étapes de l’approvisionnement en draps à partir de la comptabilité, sous le règne de Philippe le Hardi

67

. Très récemment, Marie Thérèse Caron s’est intéressée au costume dans sa dimension sociale et festive

68

. Mais son essai, basé sur une seule déclaration de confection de broderie, est essentiellement descriptive, et replace mal le costume dans un contexte général.

62Les ducs de Bourgogne, Paris, 1849-1851.

63« Modes et tissus à la cour de Bourgogne », « Mode et élégance à la cour de Bourgogne », p.301-309, « Etoffes et couleurs dans le cérémonial de la cour de Bourgogne », Cahiers CIBA, n°9, 1947, p. 310-316.

64Paris, 1956.

65 BEAULIEU Michèle, BAYLE Jeanne, Le costume en Bourgogne, op. cit., p. 188.

66 Annales de Bourgogne, n° 39, 1957,. p 29-42

67 « Achats et consommation de draps de laine par l’hôtel de Bourgogne, 1370-1380 », dans Commerce, finances et sociétés, XIe-XVIe siècles, recueil de travaux offerts à M. le professeur H. Dubois, Paris, 1994, p. 27-70.

68 CARON Marie -Thérèse, « La noblesse en représentation dans les années 1430 : vêtement de cour, vêtement de joutes, livrées », dans Fêtes et cérémonies aux XIV-XVe siècles, op. cit., p. 157-172.

(25)

Enfin, on peut citer cinq mémoires de recherche consacrés à l’étude du costume ou de ses accessoires à la cour de Bourgogne

69

. Au regard des nombreuses publications entreprises chaque année sur les ducs de Bourgogne, le petit nombre d’études consacrées au costume dénote assurément un intérêt moindre des universitaires pour ce thème qui offre pourtant des possibilités très riches, pour lesquelles il serait très intéressant de réfléchir en équipe afin de couvrir l’intégralité de la période

70

. On pourrait notamment envisager un travail collectif comparable à celui qui a été réalisé sur les images à partir de 1985 par l’équipe dirigée par Michel Pastoureau. Ce constat est d’autant plus étonnant que par ailleurs, la cour de Bourgogne apparaît partout plus fastueuse, plus dépensière que les autres cours, et que, surtout, la documentation parvenue jusqu’à nous permet tout à fait d’approfondir ce genre de recherches.

Enfin, la draperie, et notamment celle des Pays-Bas a été déjà bien étudiée, et ceci sous plusieurs formes : édition de documents

71

, études monographiques

72

, recherches sur le

69 CONDUCHE Dominique, Les fournitures d’étoffes et de fourrures à la cour de Philippe le Bon, duc de Bourgogne, 1419-1467, mémoire de DES de l’Université de Lille III, 1962 ; GRAPOTTE Cécile, Symbolique et signification des biens mobiliers à la cour de Bourgogne, mémoire de maîtrise de l’Université de Bourgogne, Dijon, 1994 ; JOLIVET Sophie, Le couvre-chef à la fin du Moyen-Age : histoire, symboles et métiers, l’exemple bourguignon, mémoire de maîtrise de l’Université de Bourgogne, Dijon, 1995 ; JOLIVET Sophie, Le costume masculin à la cour de Bourgogne sous Philippe le Bon, mémoire de DEA de l’Université de Bourgogne, Dijon, 1996 (L’exemple développé dans cette étude est parue sous le titre « Se vêtir pour traiter, données économiques du costume de la cour de Bourgogne dans les négociations d’Arras de 1435 », Annales de Bourgogne, n° 273- 274, t. 69, 1997, p 5-35) ; TROLET Anne-Sophie, Le vêtement de cérémonie à la cour de Bourgogne sous Philippe le Bon (1451-1467), mémoire de maîtrise de l’Université de d’Arras, 1999.

70voir la méthode décrite par Michel Pastoureau dans son article « Images du pouvoir et pouvoir des princes », dans Genèse de l’Etat Moderne, Bilans et perspectives (Paris, 19-20 septembre 1988), Editions du CNRS, Paris, 1990, p. 227-234. Outre la rapidité de constitution de bases de données multicritères, la confrontation et la mise en commun des points de vue et des méthodes de travail sont apparues comme extrêmement riches et stimulantes pour toute l’équipe.

71 DESCAMPS G., Documents inédits concernant les tapissiers de Bruxelles au 15e siècle et au commencement du 16e siècle, Bruxelles, 1882 ; ESPINAS Georges, Documents relatifs à la draperie de Valenciennes au Moyen- Age, Loviton, Paris, Raoust, Lille, 1931 ; FAVRESSE Félicien., « Dix règlements intéressant la draperie Bruxelloise (1376-1394) », Bulletin C.R.H., t. 111, 1946, p. 143-166 ; DUBOIS M (éd.), « Textes et fragments relatifs à la draperie de Mons au XIVe siècle », Annales du cercle archéologique de Mons, 61, p. 131-135, 1950 ; id, « Textes et fragments relatifs à la draperie de Tournai au Moyen-Age », Revue du Nord, 32, 125, p. 145-147 et 32, 128, p. 219-235, 1950 ; DE SAGHER Henri-E., DE SAGHER Johan-H., VAN NERVEKE Hans., WYFFELS Carlos. (éd.), Recueil de documents relatifs à l’histoire de l’industrie drapière en Flandre, IIe partie, Bruxelles, 1951.

72 COORNAERT Emile, La draperie-sayetterie d’Hondschoote, Paris, 1930 ; ESPINAS Georges,

« L’organisation corporative des métiers de la draperie à Valenciennes dans la seconde moitié du XIVe siècle », Revue du Nord, t. 18, 71, 1932, p. 200-201 ; ESPINAS Georges, « La draperie de Valenciennes au Moyen-Age », Revue du Nord, t. 15, 59, 1929, p. 249-281 ; COORNAERT Emile, « Draperies rurales, draperies urbaines.

L'évolution de l'industrie flamande au Moyen-Age et au XVIème siècle », dans Revue Belge de Philologie et d'Histoire, 1950 ; CLAUZEL Denis, CALONNE S., « Artisanat rural et marché urbain : la draperie à Lille et dans ses campagnes à la fin du Moyen-Age », Revue du Nord, t. 72, n° 287, juillet-septembre 1990, p. 531-575.

Références

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Les draps de soie les moins consommés à la cour étaient aussi les moins chers, vendus à des prix dérisoires en comparaison avec les autres : le cendal, le samit, le taffetas, le tiercelin Outre l’agneau, communément utilisé, on a employé épisodiquement du mouton : les déguisements du traité de Lille en 1437 employèrent des peaux de moutons, dont certaines Enfin, une dernière remarque doit être faite concernant le matériau restitué grâce à la comptabilité : tous les vêtements portés par les membres de la cour ne figurent pas dans les Plus souvent, les couturiers ont apporté des renseignements concernant la forme, portant sur l’ensemble ou une partie du vêtement, notamment les manches et les plis, ainsi que des Le haincelain, répandu à la fin du XIVe siècle et au début du XVe siècle, est une variété de la houppelande245 courte, dont le nom est emprunté au fou de Charles VI, Haincelin Coq, de Les gants, dont la forme, à cinq doigts était déjà probablement fixée, étaient destinés soit à protéger du froid, soit à servir à la chasse, soit au sport : le jeu de paume nécessitait un Les combinaisons vestimentaires n’étant pas fournies par les registres comptables qui se contentent en général de donner strictement les quantités achetées ou confectionnées de Les jeunes filles avaient aussi des vêtements qui correspondaient à ceux des adultes. Nous n’avons pas repéré de termes spécifiques applicables à leur âge A la fin du mois, à Dijon se tint le troisième chapitre de la Toison d’Or, qui prit une connotation particulière, car il devait se tenir en la chapelle de Dijon, que le duc avait établie Sous l’influence d’Anne de Chypre, des négociations furent à nouveau engagées, à Pont de Veyle autour du 15 novembre, puis à Mâcon où le duc de Bourgogne se trouvait à partir du

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