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Géographie Économie Société: Article pp.189-210 of Vol.18 n°2 (2016)

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géographie économie société géographie économie société

*Auteur correspondant : bouvier@univ-tln.fr

doi:10.3166/ges.18. 189-210 © 2016 Lavoisier, Paris. Tous droits réservés.

Géographie, Économie, Société 18 (2016) 189-210

Vers la coordination interne et externe de la PME

« banale » localisée dans un contexte d’innovation et de développement durable

Paul Bouvier-Patron

Maître de Conférences - HDR, CERGAM Aix Marseille Université CERGAM – Aix Marseille Université, Clos Guiot – Puyricard, CS 30063, 13089 Aix en Provence Cedex 2

Résumé

Pour aller au cas le plus extrême -lors d’un changement majeur- (tel un nouveau cadre législatif en matière d’environnement), même un Acteur Faible d’une industrie (généralement une PME LowTech, qualifi ée de banale) doit engager, tant dans une logique de coordination interne (intra-fi rme : mobilisa- tion de compétences pour générer les conditions d’une concurrence hors-prix) qu’externe (inter-fi rmes par la voie qualitative contractuelle client-fournisseur), une démarche proactive de changement à un coût raisonnable plutôt que de subir une réorganisation inéluctable (et probablement préjudiciable, voire fatale) induite par d’autres. L’exposé de nature théorique s’appuiera sur l’esquisse illustrative d’un fait stylisé. Par suite, sera proposée une série de préconisations managériales réalisables pour obtenir la coor- dination. Au-delà, le résultat principal consistera à proposer une grille d’analyse sur la faiblesse appli- cable à différents secteurs industriels. On s’interrogera ainsi sur la densité des PME banales (PMEb) sur un même espace territorial en posant l’hypothèse d’une corrélation positive entre cette densité et la pauvreté ou le déclin d’un territoire. © 2016 Lavoisier, Paris. Tous droits réservés

Mots clés : coordination, environnement, innovation, partenariat, PME, territoire.

Summary

Towards Internal/External Coordination of localised Basic Small and Medium Firms within a sustai- nable development context. Towards a new radical change, like an environmental protection act, so cal- led Weak Actors within an industry (most of the time, some Small and Medium Low Tech fi rms; we call

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them Basic) have to generate themselves, thanks to a double coordination process (intra-firm as well as inter-firms coordination), a proactive evolutionary process at a sustainable cost rather than to undergo a global and destructive reorganization induced by strong actors. Partly based on a stylised fact, the given analysis will be mainly highlighted by managerial considerations concerning coordination. One of the principal results is a comparative tool fit for investigating weakness of many industrial sectors. We also formulate an hypothesis about a positive correlation between density of Small and Medium Basic Firms and economic poverty within a single territory. © 2016 Lavoisier, Paris. Tous droits réservés

Keywords: coordination, environment, innovation, partnership, SME, territory.

Introduction

La mondialisation est une preuve directe du prisme a-géographique de l’Économie et du Management : usage global des ressources, mobilité des capitaux, flux de main- d’œuvre qualifiée (ou non), degré élevé d’ouverture des marchés. Néanmoins, les inci- dences négatives en sont locales et territorialisées (fragilisation ou fermeture d’entreprises ou d’industries, destructions de compétences et d’emplois, pollution). Dans la concur- rence globale, les entreprises peuvent rechercher, individuellement1, leur propre solution par le haut grâce à l’innovation ; voire, en conjuguant Innovation et Volet Écologique du Développement Durable (VEDD) (analysé dès les années 1990 : Roome, 1992 ; Irwin et Hopper, 1992 ; Porter et Linde, 1995) ; et, plus encore, en conjuguant Inter-Organisation, Innovation et VEDD (Bouvier-Patron, 2007, 2011, 2014). Or, ceci n’est pas une priorité de la Nouvelle Géographie Économique (Krugman, 1991) même dans les compilations ouvertes et récentes (Sheppard et Barnes, 2000).

La Dynamique d’Innovation Territoriale en DD est un champ pluridisciplinaire ouvert aux frontières de l’Économie Industrielle, du Management de l’Innovation et des Sciences Territoriales (se construisant au-delà de la Géographie Physique et Humaine, de l’Urba- nisme ou de l’Aménagement du Territoire). Sans minimiser les phénomènes essentiels de polarisation et d’agglomération2 (Veltz, 1996, 2010) ou de diversité des richesses territoriales (Davezies, 2010 dont l’Économie Résidentielle), notre analyse se centrera exclusivement sur les acteurs industriels privés en difficulté. Territorialisées ou non et indépendamment de la pertinence de leur stratégie, les entreprises n’ont pas les mêmes atouts au départ. La recherche d’Avantages Concurrentiels (Porter, 1985) accentue encore les écarts et l’innovation (Dhont-Peltrault, 2010) permet même à des PME3 HighTech de rivaliser avec les Grandes Entreprises (GE). L’économie Allemande (Stoffaës, 2008),

1 Clivant et limitatif, le couple Entreprise/Environnement Marchand (et/ou Non-Marchand), généré en Économie et Management, s’est imposé y compris pour la prise en compte l’écologie (comme chez Hart 1995).

2 La polarisation urbaine a notamment été mise en évidence par le rôle des infrastructures de communication (Tornqvist 1968). L’agglomération (externalités positives urbaines), selon Duranton et Puga (2004), augmente la triple probabilité vertueuse Sharing, Matching, Learning : partage d’effets positifs, interactions positives entre acteurs et apprentissage.

3 Les PME (moins de 500 salariés : ancienne classification INSEE), en 2004, constituent 90 % des entre- prises ayant une activité interne R&D. Les entreprises industrielles inférieures à 50 salariés s’avèrent particu- lièrement intensives en R&D avec 6,5 % de part Dépense Interne R&D (DIRDE)/CA, Dhont-Peltrault (2010).

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souvent citée en exemple, se caractérise ainsi par de nombreux secteurs spécialisés à l’ex- portation avec des PME axées sur l’innovation et/ou la Concurrence Hors-Prix (Qualité, Marque, Innovation). Quoi qu’il en soit, indépendamment de la densité industrielle d’une zone considérée, du secteur d’activité d’appartenance et de l’intensité technologique mobilisée, les statistiques officielles SESSI montrent, de façon stable depuis 1990, que plus de 50 % des salariés français le sont au sein de PME (le redécoupage actuel INSEE par taille avec apparition des Entreprises de Taille Intermédiaire ETI, entre PME et GE, n’infirme évidemment pas ce constat).

Si l’appartenance d’une entreprise à un territoire4 peut conduire à envisager ce dernier comme le ressort potentiel d’une dynamique endogène de croissance durable, les entre- prises ancrées territorialement peuvent cependant être majoritairement des TPE et PME faiblement innovantes et à main-d’œuvre peu qualifiée. Ces entreprises (et, au-delà, le ter- ritoire où elles se situent), par leur banalité, sont vulnérables à la concurrence directe des pays émergents. Du coup, sur un même espace territorial, sans nier les inégalités d’atouts flagrantes entre les entreprises, la question est de savoir s’il n’y aurait pas un potentiel à valoriser pour celles perçues a priori comme les Acteurs Économiques Faibles mais susceptibles de proposer des emplois accessibles à la majorité de la population (non qua- lifiée, faiblement qualifiée ou avec des qualifications inadaptées par rapport aux besoins perçus). Représentative de ce qu’est un Acteur Économique Faible, la Petite ou Moyenne Entreprise banale5 (PMEb) sera définie (négativement) par la facilité, du point de vue des compétences disponibles, à la remplacer par une autre sur le marché prestataire où elle se positionne ; caractérisant ainsi une absence de spécificité (Williamson, 1975) ou d’idio- syncrasie (Hayek, 1945). Pour cerner les contours typiques de la faiblesse de la PMEb, on se basera notamment sur l’esquisse illustrative d’un fait stylisé6. La faiblesse n’est pas irrévocable au sens où l’action d’amélioration est envisageable en parvenant à transfor- mer une contrainte en atout potentiel et/ou effectif. Cela passe par une incitation générant moins de substituabilité. Ce gain de spécificité est notamment accessible par la prise en compte du VEDD. D’abord, (1.) nous expliciterons ce qu’est la PMEb puis nous (2.) la caractériserons via une illustration avant d’envisager (3.) une solution via la coordination (Schelling, 1956, 1960 ; Richardson, 1972 ; Aoki, 1986, 1988) interne/externe/mixte par transformation de la gouvernance stratégique (comportant un coût d’adaptation interne

4 Levy et Lussault (2013) suggèrent huit définitions pour Territoire. Nous proposerons celle-ci : le Territoire est un système incomplet endogène ouvert d’interactions (inter-individuelles et collectives) portée par une dyna- mique spatio-temporelle articulant géographie, histoire, culture, ressources, acteurs et changements. Ici, il sera réduit abusivement à un espace économique dont la métrique est relationnelle entre pôles (firmes) selon F.Perroux.

5 Banal, du Francique ban au XII° (proclamation publique : ordre), c’est, en Droit Féodal, ce à quoi les vas- saux appartenant à ce ban – circonscription du suzerain –, sont tenus d’user moyennant redevance au seigneur (ex : four, moulin, etc.). Ainsi, ce qui est commun est advenu, par extension au XIX°, ce qui est communal. Par dérivation, ce qui appartient à tous : banal car sans originalité, ordinaire (non-spécifique).

6 Un fait stylisé repose soit sur un constat tiré d’une régularité statistique soit d’une étude monographique caractérisant une situation courante. La monographie est désormais considérée comme une méthodologie perti- nente (Pettigrew 1987 ; Yin 1989) pour explorer qualitativement hypothèses ou voies d’analyse nouvelles. Nous ne présenterons ici qu’une esquisse comme simple illustration. La généralisation est un pas méthodologique supplémentaire (proposée de façon purement projective, cf.4.).

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ou Governance Costs, Williamson, 1985) et en intégrant les différentes parties prenantes (Donaldson et Preston, 1995) tout en relativisant la rentabilité financière à court terme.

Par extension (4.), nous proposerons l’ébauche d’un outil comparatif d’analyse sectorielle territoriale ciblant les Acteurs Économiques Faibles puis le moteur de changement poten- tiel accessible à tous qu’est l’Économie de la Connaissance.

1. Faiblesse de la PME banale

Plus les prestations proposées sont non-spécifiques (Williamson, 1975,1985), donc fortement imitables et substituables (Wernerfelt, 1984 ; Porter, 1985) autour générale- ment d’une technologie arrivant à maturité, plus la faiblesse de l’entreprise est grande.

Sur un même territoire, si la majorité des PME est de ce type, il existe alors (cf.4.) un effet de structure. Nous caractériserons d’abord, (1.1) la fragilité du tissu des PME puis nous insisterons (1.2) sur le risque principal encouru par la PMEb : sa substituabilité.

1.1. Fragilité du tissu des PME

La PME se situe dans un univers à multiple contraintes :

– Hyper-Concurrence mondialisée impulsée par de grands groupes internationaux condui- sant, en France, aux fermetures de sites et/ou à la délocalisation7 (Chastenet et Carentenay, 1998 ; Stoffaës, 2008) au lieu, comme en Allemagne, de permettre une logique durable mobilisant d’emblée une croissance stable assise sur la combinaison d’un noyau financier et industriel territorialisé (accompagné éventuellement d’une externalisation8 partielle) ; – Avantage Concurrentiel fondé préférentiellement sur la course à l’innovation technolo-

gique ;

– Existence d’un niveau d’incertitude économique élevé.

Du coup, les revenus ainsi que les perspectives à moyen et long terme des entreprises occidentales sont affectés mais, plus encore, les PME et, notamment, les PMEb.

Différents rapports ou synthèses sont disponibles (Hecquet et Lainé, 1999 ; Fontagné et Gaulier, 2007 ; Domens, 2007 ; Stoffaës, 2008 ; Banque de France, 2010 ; COFACE, 2010) sur les défaillances d’entreprises, ces dernières étant fonction de différents paramètres :

– conjoncture économique : niveau du taux de croissance ;

7 La Délocalisation (externalisation hors du pays d’origine) revient à renoncer à un investissement local pour privilégier, souvent en fermant un site, une (re)localisation à l’étranger pour s’approcher d’un nouveau marché et/ou rapatrier ensuite les biens réalisés à l’étranger dans le pays d’origine. La mesure statistique demeure floue malgré l’estimation du Ministère de l’Économie, depuis les années 1990, à partir de l’Investis- sement Direct à l’Étranger.

8 L’Externalisation (Outsourcing) est, conceptuellement, fondée sur l’arbitrage transactionnel Make or Buy (Coase 1937) et la mise en évidence du Métier via les Core Competences (Teece 1980, 1988 ; Prahalad et Hamel 1990, Quinn et Hilmer 1994 ou Womack et Jones 1996). Externaliser est la conséquence directe du recentrage du périmètre jugé stratégique d’activité d’entreprise. L’Allemagne mobilise sa zone d’influence en Europe de l’Est à cet effet mais garde, généralement, l’assemblage final et le contrôle qualité.

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– incidence d’exposition9 à la concurrence mondialisée : risque de disparition et/ou de délo- calisation élevé si le coût de main-d’œuvre d’une activité est déterminant dans les coûts de l’entreprise et que cette activité peut être réalisée, autrement ou ailleurs, à un coût moindre ;

– effet de taille d’entreprise : TPE et PME étant plus affectées que les GE10 ;

– effet d’âge d’entreprise : risque élevé de défaillance quand existence inférieure à 3 ans ; – faible performance économique et financière : faible taux de marge ainsi que faible dyna-

misme du secteur d’activité (niveau critique) ; plus encore lorsque le taux de valeur ajoutée et les qualifications sont également faibles.

Cependant, les PME constituent l’essentiel du tissu inter-organisationnel (le spectre de qualité relationnelle étant large, Bouvier-Patron, 2011, 2013). Au ban des fournisseurs, car occupant le rang hiérarchique le plus bas, les PMEb se focalisent exclusivement sur le travail à façon banale pour le compte du Donneur d’Ordres (DO) en aval ; et ce en utilisant, par ailleurs, des ingrédients ou matières renfermant parfois un haut degré de technologie mais réalisés par d’autres en amont de filière. Autrement dit, le simple façon- nier qu’est la PMEb risque de se trouver pris entre le marteau du DO et l’enclume du fournisseur.

Selon l’adage qui peut le plus peut le moins, en s’intéressant à la PMEb comme cas limite de sous-traitance (Houssiaux, 1957), on pourra tenter de proposer un outil d’ana- lyse descriptif général destiné à prévenir le déclin des territoires tout en proposant des solutions (cf. 3,4).

1.2. Risque de Substituabilité de la PMEb

Les DO jouent sur un différentiel de prix de revient pour compenser une concurrence inégale mais la délocalisation en résultant équivaut, en fait, à contourner la législation ou à échapper à la réglementation (fiscale, sociale, sanitaire ou environnementale) existante dans le territoire où se situe la PMEb. Le risque principal pour cette dernière est celui de sa potentielle substitution par une autre a priori localisée ailleurs dans un pays à bas coûts de main-d’œuvre. Or, par la concurrence de proximité11, il y a déjà un risque de forte mortalité de PMEb car la sélection intra-territoriale s’opère sur la base du critère du

9 À distinguer de l’ouverture concurrentielle et du rôle positif (Fontagné et Gaulier 2007 ; Domens 2007 ; Stoffaës 2008) du nombre d’entreprises exportatrices et/ou de la part Exportation/CA.

10 Ceci dit, le contrôle de PME par des GE place les premières comme une variable d’ajustement, Chastenet et Carentenay(1998) ou Hecquet et Lainé(1999).

11 La proximité géographique n’est, a priori, pas le critère le plus important dans une économie ouverte mondialisée. Dans une optique concurrentielle (y compris qualitative), le concept adapté est celui de proximité relationnelle (Bouvier-Patron 2007) – ne préjugeant pas la proximité géographique sans en interdire la possibi- lité –. C’est d’ailleurs en cohérence avec les externalités positives des Districts Industriels (Marshall 1890). En outre, les externalités négatives se constatent (pollution, destruction de sites ou d’emplois) mais les externalités positives sont souvent indirectes, difficiles à mesurer et plus encore à restaurer une fois détruites (d’où l’enjeu de la coordination). Avec la proximité relationnelle, se nouent les relations inter-entreprises coopératives (parte- nariats, réseaux) cruciales pour innover mais pouvant ignorer la géographie ; la figure du réseau pour penser le territoire devient alors suspecte aux géographes (Lussault 2007).

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moins-disant parmi toutes les PME encore localisées12. Sur le même espace territorial, les PME substituables entre elles sont concurrentes et se fragilisent mutuellement. Cette concurrence locale est encore intensifiée par la présence (opportuniste et tactique) de prestataires nomades : entreprises basées dans le même espace économique (ex : CEE) mais disposant d’un différentiel compétitif avantageux du point de vue du coût de revient (réglementation moindre, absente ou défaillante car non appliquée).

Le nomadisme s’inscrit aussi dans une course aux contrats assise, nécessairement, sur la logique du moins-disant en contournant, plus ou moins légalement, la réglementation nationale13.

2. Caractérisation de la faiblesse de la PMEb

Un fait stylisé, même brièvement esquissé car illustratif, est un moyen d’envisager la voie exploratoire d’une piste de recherche nouvelle : l’étude de la faiblesse de la PMEb.

L’illustration proposée vise seulement à caractériser la nature de cette faiblesse.

Pour ce faire, on s’appuiera sur la synthèse d’entretiens qualitatifs non directifs auprès d’experts scientifiques d’un secteur : celui des revêtements anticorrosion en milieu mari- time (secteur de la Peinture Anti-Corrosion : PAC).

Après (2.1) une description de la filière, nous envisagerons (2.2) la question de l’har- monisation des intérêts des acteurs économiques concernés.

2.1. Description de la filière PAC

Le Client-DO est propriétaire, privé ou public, d’une structure métallique (ponts ou navires). L’exécutant est le façonnier appliquant une tâche précise et circonscrite dans le temps (la pose, à un moment t, de revêtements anticorrosion sur des structures métal- liques en milieu maritime). Le fournisseur est le fabricant du revêtement anticorrosion.

Un constat de départ s’impose :

– des fournisseurs peu nombreux : moins d’une dizaine de GE implantées mondialement formant une structure oligopolistique ;

– des façonniers nombreux et localisés dans les zones urbaines ou périurbaines côtières ; – des clients en nombre restreint : des opérateurs privés ou publics tenus à maintenir l’inté-

grité des infrastructures dont ils sont propriétaires.

Les appels d’offres lancés par les clients sont, traditionnellement, tranchés par le cri- tère du moins-disant. La législation Européenne sur l’environnement a certes imposé une modification formelle du cahier des charges pour y inclure des Procédures Qualité lors de la pose du revêtement anticorrosion. Cependant, dans les faits, les façonniers fonctionnent toujours avec une simple contrainte d’objectif (résultats techniques opé-

12 La mondialisation atteint une limite concernant les activités de proximité localisées et, a fortiori, ancrées.

C’est une raison pratique de prendre en compte la dimension territoriale mais la valeur du territoire va bien au-delà (cf.4).

13 La Directive Européenne Bolkestein de 2006 vise à légaliser la mobilité de main-d’œuvre au sein du même espace européen (constitué pourtant de règles fiscales, sociales, sanitaires, environnementales différenciées), et ce en organisant des flux croissants de travailleurs non nationaux loués comme prestataires.

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rationnels) sans nécessairement avoir à respecter la réglementation, perçue comme non contraignante car la vérifiabilité in situ des travaux réalisés n’est pas une priorité du client (y compris public) qui sait, a priori, pouvoir dégager sa responsabilité et/ou s’affranchir des pénalités pourtant prévues en cas d’infraction.

La lente prise de conscience sociétale en matière environnementale rend toutefois appréhendable les conséquences des risques14 industriels (pollution de sites) et/ou natu- rels (cyclones ou crues rapides de rivières, dont la fréquence d’apparition et d’intensité augmente).

Du reste, la distinction logique risque industriel/risque naturel s’estompe car, in fine, les activités initiées par l’homme sont de plus en plus causales15 dans la dévastation de vastes zones urbaines, périurbaines et naturelles.

Pratiquement, la gestion des conséquences de la filière PAC sur l’environnement mari- time se limite surtout à des préconisations formelles. Aussi, la pollution de l’eau reste un problème récurrent. La protection de l’environnement, connue et intégrée par les Acteurs Forts (fournisseurs en amont et, voire, Clients en aval), relève concrètement des Acteurs Faibles subissant les chocs adaptatifs sans les anticiper : efficaces dans un temps imparti pour réaliser des tâches limitées, ils ne sont pas initiés, dans leur pratique, à la protection environnementale.

2.2. Problème d’harmonisation des intérêts des différents acteurs de la filière Dans une démarche positive, en cohérence avec la prise en compte des parties pre- nantes (Donaldson et Preston, 1995), l’objectif stratégique pour tous les acteurs serait donc de privilégier trois éléments essentiels :

– la sensibilisation des façonniers aux nouvelles normes environnementales ;

– la concertation entre les acteurs : du fournisseur-fabricant devant optimiser les formules chimiques et/ou les ingrédients incorporés de sorte à minimiser le degré de pollution ; au

14 Le concept de risque implique, préalablement, une connaissance exhaustive des phénomènes, causes et facteurs mais aussi une capacité à déterminer les probabilités d’occurrence. On se heurte à l’étude des consé- quences de probabilités faibles. De petites probabilités peuvent avoir des conséquences redoutables. Les inte- ractions de petites probabilités peuvent conduire à des catastrophes majeures : un tsunami frappant une centrale nucléaire comme à Fukushima (quand Tchernobyl résultait d’une expérience mal maîtrisée dans un site peu sûr).

La seule recherche du profit peut engendrer un dysfonctionnement industriel impactant gravement l’humain ou l’environnement (Seveso, Bohpal). La causalité simple linéaire (implication) est aussi une possibilité expli- cative, tout autant que l’existence d’une cause première ou encore la simple prévisibilité (après défaut/refus de maintenance : naufrage d’un pétrolier ou bien d’une plateforme pétrolière/gazière avec anéantissement de la faune/flore à grande échelle). La prévisibilité diminue avec des interactions entre phénomènes (surtout si ceux-ci ont de probabilités faibles). Plutôt qu’au risque, la faible prévisibilité renvoie à une incertitude. La mutation climatique à des causes et effets complexes difficiles à maîtriser. On peut distinguer précaution et pré- vention (Kast 2003) : Prévention de risques avérés (probabilité d’horizons proches et vulnérabilités connues) ; Précaution concernant de nouveaux risques (incertitude pour des horizons lointains avec des vulnérabilités controversées). Le Principe de Précaution anticipe l’éventualité d’un risque vraisemblable de dommages graves et irréversibles pour l’environnement.

15 D’où le besoin d’un corps d’inspection vigilant (ex : sanitaire, sûreté nucléaire, dégazage en mer).

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client imposant un cahier des charges strict mais désormais en en vérifiant l’application ; jusqu’au façonnier ayant à s’inscrire dans une démarche de certification contraignante en Management Environnemental (ISO14000) et/ou Éthique DD (ISO26000, Gabriel et al., 2011) pour garantir, a minima, une activité en pointe conforme à la législation anti-pollution ; – la contractualisation qualitative dans la filière neutralisant l’effet pervers du moins-disant.

Ces points concordent mais peut exister un conflit d’intérêt majeur au sens où : l’intérêt du fournisseur est de maximiser son Chiffre d’Affaires en vendant la quantité la plus élevée possible de revêtement ;

– l’intérêt du façonnier est de réaliser sa tâche dans un temps imparti, sans contrôle des rejets et pertes de matières, ou gaspillages divers, mettant en péril l’environnement ;

– l’intérêt du client est d’optimiser le rapport efficacité/quantité, pour une surface à couvrir, via un cahier des charges incluant bien des normes protégeant l’environnement sans tou- tefois vouloir en vérifier l’application ;

– l’intérêt de la puissance publique est de lutter contre la pollution ou de prévenir celle-ci sans se soucier des incompatibilités stratégiques entre les différents acteurs et/ou parties prenantes.

Vu le conflit potentiel entre acteurs de la filière PAC, l’harmonisation des intérêts s’impose et passe par une nécessaire coordination entre acteurs concernés : la solution par la coordination est la clef d’évitement des conflits et de stabilité à long terme.

3. Coordination et perspectives d’évolution endogène

Du point de vue de l’efficacité collective, une solution doit être trouvée de façon endo- gène pour harmoniser les intérêts contradictoires des différents acteurs impliqués : ceci passe par la coordination (3.1 externe, 3.2 interne, 3.3 mixte).

3.1. Logique Externe de Coordination d’Entreprises

Théoriquement, la préconisation de coordination généralement faite par les experts économistes consiste (proposition 1) à recourir à l’Intégration Verticale chaque fois que le contrat est trop complexe à écrire (Williamson, 1975, 1985 ; Klein et al., 1978 ; Grossman et Hart 1986 ; Hart et Moore, 1990 ; Riordan, 1990). Dès lors, avec cette hypothèse de travail, quel serait l’acteur susceptible de conduire cette stratégie coordinatrice tout en préservant l’environnement ?

– Si l’on pense au client public, cela reviendrait à préconiser une nationalisation (ou, une prise de contrôle majoritaire en amont) de tous les façonniers : c’est peu probable quand on sait, en France, même avec une politique industrielle volontariste en 1981, que les secteurs industriels sinistrés d’alors (mines, sidérurgie, textile ; malgré les aides massives et restructurations engagées dès les années 1970) n’auraient tous pu bénéficier d’une telle mesure extraordinaire.

– Si l’on pense, soit au fournisseur de revêtement en amont soit à un client privé en aval, cela revient à l’acquisition (en totalité ou en majorité) des façonniers ! Dans les cas dif- ficiles, le privé ne sachant pas surenchérir sur le public, la crédibilité d’une telle action privée repose sur une entente avec répartition géographique entre membres de l’oligo- pole des fournisseurs afin de sécuriser, durablement et à moindre coût, des débouchés

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tout en certifiant la qualité des prestations. S’il était réalisé, le rachat systématique des façonniers viserait, éventuellement, à leur faire déposer le bilan chaque fois que trop éloi- gnés des critères retenus a priori pour la mise à niveau souhaitée. L’enjeu serait, quoi qu’il en soit, de construire, par la sélection, un réseau de franchisés réputés fonctionnant avec tous les niveaux de certification requis (Assurance Qualité ISO9000 ; Management Environnemental ISO14000 et Éthique DD ISO26000).

Pour ce faire, l’appel à un organisme certificateur indépendant (dont la qualification, la rigueur et la notoriété sont avérées) serait coûteux mais nécessaire. En effet, pratiquer cette quasi-intégration avale en appliquant des critères purement maison pourrait générer un Greening complaisant peu crédible sur le marché et préjudiciable à long terme.

Alternativement au rachat, la solution immédiate est darwinienne : laisser opérer la sélec- tion naturelle par laquelle les Acteurs Faibles vont disparaître. Ceci dit, ce processus de casse sociale volontaire, s’il est répandu (car moins impliquant et plus économe en ressources finan- cières internes que le rachat), n’est pas nécessairement payant à long terme (sauf si les rigidités perçues sont telles que le vide permet seul d’envisager un nouveau départ).

Ceci dit, du point de vue stratégique et pratique, le façonnier (doté au moins de son adaptabilité, de son savoir-faire et de sa main-d’œuvre motivée) a un meilleur potentiel d’action vivant que liquidé. Du coup, l’attitude proactive d’anticipation et de remode- lage dynamique des ressources (Penrose, 1959, Teece, 1988 ou Doz, 1994) pourrait être payante pour tout Acteur Faible sous réserve d’une remise en question et de s’inscrire dans un processus actif de coordination.

Ainsi, au vu de la complexité des contrats et compte tenu des savoirs et savoir-faire requis sur le plan de la protection environnementale, tout porterait, théoriquement, à pré- coniser le recours à l’intégration verticale (Williamson, 1985). Or, les faits réels infirment déjà assez systématiquement cette orientation (même pour les activités très stratégiques et spécifiques). Mais l’intégration verticale n’étant, au fond, qu’une première manière de générer une coordination entre différents acteurs, la coordination s’avère être un principe nécessaire mais différentiable : coordination par les prix (Marché versus Firme : Coase, 1937) ; coordination organisationnelle interne (Intégration Verticale, donc Hiérarchie : Williamson 1985), coordination inter-organisationnelle (collaboration-coopération : Schelling 1956, 1960 ; Richardson, 1972 ; Hakansson, 1982, 1988, 1989) où les contrats, en renonçant à l’Intégration Verticale, sont les outils de pilotage de la coordination dans la chaîne verticale entre acteurs juridiquement distincts mais détenteurs de savoir, savoir- faire, ressources, compétences spécialisés et complémentaires (Aoki, 1986, 1988 ; Farrell et al., 1988 ; Ring et VandeVen, 1992, 1994). Ce processus commence dans l’entreprise par identification puis mobilisation dynamique (au besoin par création) de certaines res- sources (Penrose 1959) et/ou compétences (Teece, 1980, 1988) : spécifiques (Williamson, 1975), complémentaires (Richardson, 1972), non remplaçables (Hart et Moore, 1990) ; donc rares et non transférables sur le marché car non substituables. En termes mana- gériaux, ces ressources sont difficiles à imiter Barney (1991) et là réside le vecteur de la construction d’Avantages Concurrentiels Durables (Wernerfelt, 1984 ; Porter, 1985), surtout lorsque les compétences sont redéployables (Teece, 1988 ; Doz, 1994).

Ainsi (proposition 2), la coordination nécessaire pour élaborer des compétences com- plémentaires spécifiques passe par des contrats clients-fournisseurs (par essence, de qua- lités différentes) en amont et en aval de la filière.

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La négociation contractuelle peut être profitable aux parties devant se coordonner mais le résultat dépend, en fait, des rapports de force respectifs. S’affranchir des rapports de force revient à construire (cf.3.2) un Pouvoir de Négociation (PN) relativement équilibré à défaut d’être égalitaire (Asanuma 1989). Le PN du fournisseur16 (PNf) détermine direc- tement le choix des qualités et modalités relationnelles clients-fournisseurs.

Or, l’enjeu environnemental renforce l’importance et le besoin de la coordination par- tenariale, pour au moins trois raisons :

– prise en compte environnementale dans la stratégie d’entreprise en tant que démarche innovante porteuse (Roome, 1992 ; Irwinet Hopper, 1992 ; Porter et Linde, 1995) ; – nécessité de demeurer proactif17 dans le contexte concurrentiel actuel pour construire un

Avantage Concurrentiel durable s’appuyant sur le VEDD (la question subsidiaire, pour bâtir cet avantage, est celle du degré d’innovation ainsi que de la nature de l’innovation à réaliser) ;

– contrôle du respect d’un cahier des charges, de plus en plus contraignant en matière de VEDD pour chaque entreprise, sachant que les maillons économiques de filière ne sont plus sécables.

La réglementation imposée par la loi est une contrainte externe s’appliquant à tous les acteurs, contrainte internalisée dans un cahier des charges dont la vérifiabilité ex post, par un organisme de contrôle, est préférable à toute déclaration éthique individuelle d’entreprise.

Les façonniers sélectionnés et contractualisés seront seulement ceux susceptibles de satisfaire toutes les exigences de façon vérifiable (ex ante et ex post). Parallèlement, les fournisseurs de revêtements chercheront à assurer leurs débouchés en garantissant la qua- lité environnementale de la pose de revêtements (via les façonniers). Pratiquement, la logique souhaitable de coordination partenariale vise à faire correspondre la courbe de cycle de vie du produit (ex : revêtement anticorrosion) avec la celle de l’activité indus- trielle de la filière (déterminée au départ par l’identification du besoin via le cahier des charges stratégique, Bouvier-Patron (2013) ; et fixant prix, délais, longévité de protection, maintenance, conditions sociotechniques de réalisation, respect de la réglementation, renouvellement, renégociation).

3.2. Logique Interne de Coordination d’Entreprise

La prise en compte environnementale devient source de valeur (Porter 1985 ; Porter et Linde 1995) et cette valeur s’obtient préférentiellement par une coordination favorisant les relations client-fournisseur partenariales. La mise en œuvre d’une telle coordination externe dans la filière implique, préalablement, une coordination interne via un processus stratégique minimal d’innovation organisationnelle pour que chaque PME, initialement banale, soit en mesure d’évoluer et de s’inscrire, positivement, dans la chaîne externe.

Pour la PMEb, une stratégie ambitieuse de sortie de sa condition n’est possible qu’en

16 Le PNf (Bouvier-Patron 2011 synthétisant des travaux antérieurs sur ce point) est lié, positivement, au niveau de compétence détenue, à sa rareté et à la difficulté de remplacer celle-ci (non-substituabilité) par une autre concurrente.

17 Weick (1977, 1979) met en évidence le fait que les entreprises génèrent leurs propres handicaps et, a contrario, disposent de moyens d’acteurs proactifs.

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accédant d’abord aux capacités de différenciation, selon ses compétences intrinsèques, à travers un véritable niveau de professionnalisme porteur de réputation (vitale pour une compétition hors-prix) reposant sur :

– un effort satisfaisant pour assurer un niveau de qualité de prestations (certification ISO requise) vérifiable ex post (Stoffaës, 2008) ;

– un engagement minimal en termes de veille stratégique R&D puisqu’il faut une compé- tence générique interne minimale et effective pour appréhender, comprendre et s’adapter, voire absorber, les connaissances générées ailleurs (Cohen et Levinthal, 1990) notamment chez le fournisseur ;

– une politique active de communication institutionnelle, sur le marché et auprès des clients ou des usagers (BtoB et BtoC), suffisamment adéquate pour que l’acteur soit perçu comme crédible18 en matière de prise en compte environnementale (Porter et Linde, 1995).

Ainsi, l’effet positif pour les acteurs de la filière peut résulter, simultanément, d’un effet de compatibilité de réseau (Katz et Shapiro, 1985 ; Farrell et Saloner, 1986) impulsé par des initiatives privées décentralisées et/ou par le cadre législatif global lui-même (rele- vant de l’intérêt général). Il y a là, mise en place d’une convergence privée et publique.

Plus encore, outre une concordance entre les cycles de vie d’activités des entreprises impliquées, existe une logique de prestation globale dans la chaîne verticale au sein d’un cadre légal homogène. Et l’appropriation de la question environnementale par le mana- gement de chaque entreprise puis sa traduction stratégique (Shrivastava, 1995a, b, c) est l’étape préalable à une modification profonde de la culture interne ainsi que du style de management.

Un tel pari économique est a priori coûteux pour des résultats se mesurant surtout à moyen et long terme tandis que l’anticipation proactive nécessaire d’une telle démarche n’est elle-même pas sans embûches (Aggeri et Pallez, 2003), ne serait-ce que parce qu’une annonce prématurée peut générer plus de problèmes qu’en résoudre. C’est pour- quoi la coordination doit être mixte.

3.3. Coordination Mixte Interne et Externe

Malgré des handicaps apparents, les PME initialement banales peuvent valoriser certaines ressources internes potentielles en interrogeant leurs pratiques et la qualité de leurs connaissances et ce, pour une finalité : la coordination externe. Les façonniers ont une impérieuse nécessité d’évoluer et, si possible, de manière proactive plutôt que de demeurer de simples exécutants menacés et précarisés. L’adaptation, par valorisation des connaissances et compétences concernant la pose de revêtement anticorrosion de qualité environnementale, est créatrice de valeur : la certification ISO14000 environnementale devrait constituer une compétence clef. La reconnaissance de cette compétence par autrui est un enjeu fondamental et permettra d’envisager, de façon crédible, la possibilité (pro- position 2’) d’un fonctionnement en coordination partenariale dans une dynamique de réseau mutuellement avantageuse.

18 Tout effort à réaliser est un franchissement de barrières mais l’effort d’engagement en VEDD est sures- timé (Trepanier et Gosselin 2011) : la conception écologique (produits, procédés, méthodes et fonctionnement organisationnel) est plus question de volonté qu’une contrainte liée aux ressources.

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Notons que, parmi les entreprises banales d’un même secteur d’activité, toutes ne dis- posent pas des mêmes aptitudes et ne pourront opérer une stratégie de relèvement réussie.

Plus encore, sans préjuger de la plasticité entrepreneuriale, l’innovation interne requise étant d’abord de type organisationnelle, ceci permet d’éviter l’imitation conforme.

L’identité de situation entre de nombreuses entreprises, en difficulté au départ mais opé- rant simultanément leur transformation, pourrait conduire in fine à une certaine re-banali- sation (désormais, avec un standing qualitatif plus élevé et des capacités supplémentaires) sauf prise en compte (Caves et Porter, 1977) des barrières à la mobilité : l’enjeu n’est pas seulement de se (re)dresser mais de construire un Avantage Concurrentiel différencié tout en gardant une avance par rapport aux suivants.

4. Ébauche d’un outil descriptif et enjeu territorial

L’existence de PME territorialisées, par leur nombre et leur vitalité, va de pair avec des emplois de proximité. De ce fait, l’ébauche (4.1) d’ un outil de détection des Acteurs Faibles sera explicité avant d’envisager (4.2) les enjeux du lien au territoire pour, enfin, (4.3) examiner l’insertion ultérieure dans l’Économie de la Connaissance.

Nous partons du principe qu’PN significatif induit l’existence d’un potentiel de coordi- nation favorable à l’acteur qui en dispose, indépendamment de sa place dans la décompo- sition19 technique fonctionnelle (i à v) de la filière : (i) Fournisseur ; (ii) Transformateur- Assembleur et/ou Façonnier ; (iii) Centrale d’Achat et/ou Grossiste ; (iv) Distributeur ; (v) Client et/ou DO.

4.1. Outil de Détection d’Acteurs Faibles par Filière

Le comptage des Acteurs Faibles, comme on pourrait le faire pour les espèces dans les Sciences Naturelles, combine une logique qualitative et quantitative.

Le quantitatif (comptage numérique) est moins pertinent à ce stade. Le principe est l’ap- proche comparative résumée par un tableau (Tableau 1) où se trouve explicitée la décom- position de plusieurs filières industrielles ainsi que le PN respectif des acteurs. La démarche proposée est analogique sans nul besoin de précisions quantitatives ou bibliographiques : les éléments retenus relevant a priori de la connaissance commune sur les différentes filières.

Excluons volontairement de l’analyse les Services de Proximité, générateurs impor- tants d’emplois et par essence non-délocalisables (ex : services aux personnes ; aides aux personnes handicapées ou âgées ; artisans et commerçants en boutiques ; accueil touris- tique). Plaçons-nous au niveau méso-économique et retenons les filières industrielles sui- vantes : Peinture (PAC) ; Marques de Distributeurs (MDD) ; Fabrication d’Ordinateurs Personnels (PC). Pour l’étalonnage, on figurera aussi le cas abstrait d’une filière classique de Transformation Industrielle. Le choix retenu est arbitraire comme peut l’être un échan- tillon de confort, l’objectif n’étant pas la représentativité ou la preuve statistique mais de crédibiliser une voie d’analyse.

19 Cette décomposition implique une linéarité des étapes d’élaboration d’un produit. Or, soit des étapes n’existent pas toujours, soit elles se confondent, soit elles sont sources de valeur dans un secteur uniquement. Quoi qu’il en soit, la marge de manœuvre de chaque acteur et la coordination dépendent directement du PN détenu.

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Tableau 1 : Pouvoir de Négociation respectif des Acteurs par Filière (source : auteur) Filière

Acteurs Filière PAC Distribution

Alimentaire Informatique PC Secteur

Type Indus.

(i)Fournisseur

ingrédient ++ ++ si Marque:M

+ si MDD innovante - si MDD 1er prix

++ M. Équipementier -

++ M.Équipementier -

(ii)Transformateur

et/ou Façonnier - + si qualité/innov.

- si 1er prix -/+ (+ si assemblage sur mesure)

+ (Transf.) - (Faç.) (iii)Centrale Achat

et/ou Grossiste Ø +++ (Centrale A)

+ (Grossiste) ++

++ ++

(iv)Distributeur Ø +++

Enseigne et Centrale ++

(«- » avec Dell) ++

(v)Client + - - -

Le PN existant (+ ou -) d’acteur, dans chaque filière, est matérialisé par une notifica- tion symbolique (-,+,++,+++ ; et Ø signifiant l’absence d’un type d’acteur). Ainsi, le PN externe, lié aux efforts internes pour asseoir une réputation (cf.3.2), autorise une contrac- tualisation (i,ii,v) positive : passer de la séquence « ++,-,+» à une séquence au moins de type « ++,+,+» montrant que le façonnier (ii), faible (-) au départ, s’améliore (+).

Ce qui importe donc, au niveau économique et managérial, est que la coordination interne, en tant qu’impulsion, permette également d’engendrer une coordination externe favorable à chacun des acteurs de la filière : le « + » de (ii) étant bénéfique à tous au sens de l’optimum de Pareto.

Ainsi, à partir de l’usage d’un outil comparatif assez rudimentaire, les Acteurs Faibles de chaque filière (repérables par leur faible PN:«- ») sont connus et une stratégie coordi- natrice bénéfique à tous, pour toutes les filières d’un territoire (généralisation quantita- tive), peut être mise en œuvre.

4.2. Enjeu Local/Territorial des PME

L’entreprise coordonnée s’inscrit dans un collectif en réseau par proximité relationnelle (bien au-delà du club d’entreprises comme c’est le cas pour la mise en place des normes de certification). De façon nécessaire et cohérente avec le VEDD (Bouvier-Patron, 2007, 2011, 2014), cette proximité relationnelle (modalité normale de fonctionnement des entreprises) doit se combiner et s’articuler à la proximité géographique ; cette dernière renvoyant à l’ancrage territorial et à un fonctionnement20 d’affaires inter-organisationnel au moins partiellement localisé (le territoire étant lui-même acteur collectif agissant et en devenir, Pecqueur 1996).

Si la globalisation des marchés et la mondialisation des économies transgressent les logiques nationales de régulation et engendrent des délocalisations massives, elles font

20 Mendez et Mercier (2006) donnent une illustration managériale du rôle de l’inter-organisation territorialisée.

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apparaître – après éclatement – les disparités territoriales ainsi que des hiérarchies d’espaces (entre les différentes nations mais plus certainement encore, aujourd’hui, au sein des espaces nationaux) : les comparaisons à réaliser le sont entre territoires de même importance. Assez paradoxalement donc, la mondialisation révèle bien les territoires par leurs capacités diffé- renciées à la résilience, à la création et/ou à la valorisation dynamique des ressources.

Comme les territoires recèlent des Acteurs Faibles (et des Acteurs Forts) en quantités et qualités différentes, la proportion d’Acteurs Faibles sur un même territoire est, de notre point de vue, plus négativement discriminante.

Ceci justifie aussi l’établissement préventif d’un diagnostic au niveau territorial (Chastenet et Carentenay, 1998) pour anticiper et/ou gérer les évolutions potentielles plutôt que de les subir. La question de la gouvernance territoriale et de sa dynamique (Pecqueur 2003) devient dès lors fondamentale. Corrélativement, il faut déterminer dans quelle mesure le territoire peut être pensé comme acteur collectif (Pecqueur, 1996).

Au stade entrepreneurial et industriel, notre réponse est que l’effectivité d’une gouver- nance repose sur un collectif d’acteurs en coordination formant des réseaux (renvoyant aussi, en cas de forte densité de liens, à la notion de groupe, au sens de Olson 1978 et plus encore de Granovetter 1994). Aussi, la coordination (Schelling, 1956, 1960 ou Richardson, 1972) s’opère ici dans une complexité et une densité d’interactions et/ou de liens entre des acteurs aux activités complémentaires spécifiques évolutives. Pour caractériser la den- sité d’interactions et de liens, Granovetter (1985)21 développe plus précisément le concept Embeddness (enchâssement) par des intrications non nécessairement formalisées. Au-delà de l’initiative privée, la dimension collective (Olson, 1978), par intrication des relations (Granovetter, 1985), génère une forte épaisseur relationnelle ainsi qu’une dynamique d’ac- tion située (temporalisée et ancrée). Cette épaisseur agit comme liant institutionnel22. Les Institutions Économiques au sens large (North, 1990) comprennent les initiatives privées avec leurs forces asymétriques à un moment t (de la StartUp à la GE dominante jusqu’aux entreprises en survie/déclin). Or, si les initiatives privées sont essentielles dans la dyna- mique territoriale, elles sont minorées quant à la reconnaissance de leur contribution effec- tive au développement territorial comparativement à celle prêtée aux acteurs institutionnels publics (État, Collectivités Territoriales, Centres de Recherche, Universités). Et, dans le meilleur des cas, on se focalise sur le rôle des Acteurs Forts privés.

Or, le marqueur déterminant de Crise Territoriale est le poids intrinsèquement élevé d’Acteurs Économiques Faibles privés. C’est aussi une clef d’intervention pour générer une action de revitalisation et enrayer ou voire prévenir le déclin. Ainsi, à ce titre, la proximité territoriale (Pecqueur et Zimmermann 2004) est un liant (relatif) engendrant un lien réciproque potentiel – en proximité organisée – si toutefois ce territoire est bien source d’un ancrage (et non d’une simple localisation pour une analyse de l’arbitrage nomadisme/ancrage de l’entreprise, cf. Zimmermann 2001).

Un bon exemple d’ancrage est donné par l’AOC (devenue AOP par la Réglementation Européenne) : procédure de coordination décentralisée lors de la définition du Cahier des Charges, c’est une illustration positive d’une gouvernance (en coordination) d’acteurs liés

21 En management, Nahapiet et Ghoshal (1998) ou Tsai et Ghoshal (1998) développent le concept de Capital Social ; la source étant le travail séminal de P.Bourdieu.

22 Ceci élargit la base conceptuelle admise depuis Coase (1937) : alternative Marché/Firme pour baisser les coûts.

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territorialisés (de différentes tailles et de différentes natures). Le développement territo- rial, par l’interdépendance-proximité-coordination autour de compétences et de savoir-faire originaux, induit une spécificité d’actif territorial durable. Ainsi, à la logique de terroir se superpose une stratégie d’intelligence de coordination par les acteurs privés et publics sur une base principalement endogène : les signes de qualité agro-alimentaire (Label Rouge, AOP, AB) s’appuient donc sur des formes endogènes d’innovation territoriale (Sylvander 1995). C’est là une illustration concrète de l’analyse proposée par Pecqueur et Colletis (1995, 2005) partant du concept de spécificité de Williamson (1975) mais territorialisé : ces auteurs pointent la distinction entre une ressource existante à l’état latent et la valorisation de celle-ci sous forme d’actif. Avec le territoire comme actif collectif spécifique, Pecqueur (2004) et/ou Gumuchian et Pecqueur (2006) montrent notamment combien la culture terri- toriale constitue un facteur économique spécifique à prendre en compte23.

En France, l’accompagnement par l’État ou les Collectivités Publiques est utile et néces- saire mais trop prépondérant24 ainsi que basé assez exclusivement sur la logique du Push de la Techno-Structure technologique (publique/semi-publique) financée quasi-intégralement sur fonds publics (Minatec-GIANT ou, à une plus grande échelle, Paris-Saclay) quand le modèle25 de référence mythique, celui de la Silicon Valley, est une alchimie décentralisée d’initiatives privées autour d’au moins une université de référence et de l’injection massive et répétée dans le temps de crédits militaires. Ainsi, la focalisation sur le HighTech au détri- ment du LowTech et sur le Push centralisé par rapport au Pull décentralisé peut s’avérer être une faute du point de vue du (re)développement économique des territoires.

D’abord, toutes les entreprises existantes sur un territoire particulier ne peuvent être ou devenir des GE de taille mondiale. Ensuite, toutes les entreprises dynamiques et inno- vantes sont indifféremment implantables dans les lieux attractifs concurrents26 et s’avèrent potentiellement nomades. L’atout territorial est alors une variable supplémentaire plus ou moins bien valorisée.

Un technopôle27 actif repose sur sa dynamique de développement endogène liée à des conditions initiales de localisation et/ou d’ancrage territorial. Veltz (1996) montre ainsi l’importance de la qualité urbaine, au sens large, comme vecteur d’externalités positives (préexistantes et/ou construites) : Écoles d’Ingénieurs de haut niveau, infrastructures scientifiques, infrastructures de transport, etc. Cependant, ces externalités positives pré- existent généralement et si les favoriser permet d’encourager l’excellence, cela empêche aussi de saisir le point faible du raisonnement : les solutions pour les territoires non-orga-

23 Soit une remise en question de la vision métrique et plane de l’économie construite comme a-géogra- phique et linéairement efficace sur l’espace planétaire calculé en distance dans une temporalité sans cesse accé- lérée. Le concept de distance économique est un simple chemin efficace, minimal et rentable, mais jamais un cheminement topologique et, a fortiori, une nouvelle topographie qualitative complexe pourtant incontournable pour appréhender le potentiel des ressources territoriales.

24 Sous le prisme opérant de la distance économique, les secteurs traditionnels sont mis à mal (sauf celui des Machines-Outils Allemand, sollicité par/pour la croissance de Pays en Développement).

25 La comparaison demeure pertinente malgré l’écart culturel effectif entre Europe Continentale et USA.

26 Disposer de territoires attractifs est satisfaisant dans l’absolu (sauf que l’on n’y trouve qu’assez peu les PMEb recrutant localement et susceptibles de générer des emplois accessibles à tous et non délocalisables).

27 A fortiori, pour un Pôle de Compétitivité où s’associent les acteurs scientifiques et industriels du territoire.

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nisés, désorganisés et/ou dévitalisés. Penser le développement territorial, via une focali- sation sur la Techno-Structure, désigne automatiquement des territoires riches et/ou privi- légiés (car bien dotés sur le plan éducatif, scientifique, technologique, industriel, culturel) en misant/postulant tout sur le seul effet d’entraînement potentiel. Ce qui manque est rela- tif aux solutions endogènes de revitalisation des territoires (comparativement pauvres) où les atouts et Acteurs Forts sont rares ou absents mais les Acteurs Faibles nombreux.

La classification de filières (cf.3. et 4.) ainsi que le repérage d’Acteurs Faibles (ex : PMEb susceptibles néanmoins de fournir des emplois accessibles à tous) conduit à une hypothèse (pouvant être testée empiriquement par le comptage d’Acteurs Faibles sur un espace territorial donné) : l’existence d’une corrélation entre la Carte Économique des types de filières (sur le modèle générique présenté supra) et leur localisation sur la Carte Géographiques des territoires. Le résultat attendu est d’enregistrer une densité d’Acteurs Faibles très supérieure sur les territoires repérés comme pauvres.

Lorsqu’elle existe, l’industrie traditionnelle (donc non-HighTech)28 repose sur le cœur historique de la Révolution Industrielle locale29. Or, la Révolution Industrielle, suivie de nombreuses phases de conversions/reconversions civiles puis de l’ouverture des écono- mies, du rôle structurant des logiques de guerre (1914-1918 ; 1939-1945) et/ou des crises successives (organisationnelles, productives, pétrolières, voire concurrentielles consécu- tives au Dumping social et fiscal), a engendré l’épuisement de ces forces traditionnelles.

Le déclin s’amorce par non-renouvellement dans un espace géographique limité et parfois enclavé où l’attrait d’installation industrielle privée est moindre (comparativement à d’autres espaces accessibles et dotés d’atouts apparents). Sauf exception, l’impulsion et/ou le renou- veau autour du Push HighTech (avec la puissance de moyens situés engagés), favorisé par le développement des Nouvelles Technologies de l’Information et de la Communication (NTIC), ne résout pas en soi la question du déclin économique des industries traditionnelles.

L’enjeu est donc bien de faire exister, territorialement, des acteurs privés diversifiés en mobilisant, pour tous, le Management de l’Innovation par appropriation adaptée permet- tant l’accessibilité à des marchés finaux (et mieux encore en s’inscrivant dans des circuits courts). La clef de succès réside finalement moins dans l’excellence technologique, les moyens ou les produits proposés que dans la capacité à générer des flux positifs d’argent (Cash) : générer des liquidités est un aspect crucial de l’activité d’entreprise pour per- mettre une survie puis une pérennité à moyen/long terme par l’investissement (tangible et intangible). Pour les activités non délocalisables, ces flux sont envisageables, en activant, de façon parfaitement accessible, les connaissances spécifiques existantes et/ou en les construisant (si manquantes), pour générer un portefeuille de compétences clefs respec- tueux de l’environnement.

28 Le HighTech pouvant presque toujours s’imposer partout, par volontarisme, entre territoires concurrents ; le plus souvent sous condition de la préexistence d’une bonne base culturelle, éducative et scientifique.

29 Par exemple, dans le Sillon Alpin : autour de la Houille Blanche et de ses fournisseurs amont (BTP, Constructions Mécaniques et Électriques, Turbines) ou de ses clients historiques aval (Papeterie, Cimenterie, Chimie, Textile, Tanneries, Ganterie).

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4.3. Enjeu d’une Économie de la Connaissance pour le Territoire

À la base, l’Économie de la Connaissance se fonde (Machlup 1983) sur la distinction entre information – véhicule plus ou moins fiable et plus ou moins stable – et connais- sance – stock spécifique cumulatif ordonné et évolutif – (pour une présentation concep- tuelle, Dibiaggio, 1999). L’Économie de la Connaissance se définit comme la combinai- son articulée de trois éléments clefs (générant des externalités positives conjuguées par accumulation) : Compétences en termes de Savoir et de Savoir-Faire ; Capital Intangible et/ou Droits de Propriété Intellectuelle ; Technologies passant notamment par les NTIC.

Ce nouveau vecteur de croissance va au-delà de la seule industrie HighTech et/ou d’ins- titutions de la Techno-Science (via l’injection de finances publiques vers le bas : Push Top- Down)30. Il s’agit aussi d’une démarche ouverte où chaque acteur a sa place et sa chance, selon ses moyens de départ et ses besoins, il accepte de s’engager dans une dynamique de changement. L’enjeu est l’agrégation de savoir et savoir-faire décentralisés par dynamisa- tion des initiatives privées inter-agissantes en phase avec les besoins locaux.

La dynamique d’acquisition de compétences et/ou leur renouvellement, en s’appuyant sur l’effort de connaissance, est accessible pour tout acteur privé sur un territoire donné.

C’est bien l’articulation d’ensemble, par la coordination, qui donne une place à tous31 : collaborations étroites entre Universités, Écoles d’Ingénieurs, Entreprises privées inno- vantes (avec effets induits positifs sur des créations de StartUp susceptibles de devenir PME) ; mobilisation de PME déjà existantes et moins pointues technologiquement en tant que fournisseurs d’ingrédients de base, lesquelles mobilisent des PMEb (notamment celles sur trajectoire évolutive). S’engage alors une logique de développement/restruc- turation, ancrée territorialement. Et ce, y compris sur les espaces a priori pauvres : en valorisant des connaissances et compétences déjà existantes, en en créant et/ou, parfois, par transplantation mais avec acclimatation locale. Globalement, le cadre de l’Écono- mie de la Connaissance implique la décentralisation créative, jusqu’au niveau indivi- duel (Von Hippel, 1976), dont on soupçonne à peine le potentiel : avec les Communautés de Pratique (Brown et Duguid, 1998 ; Wenger et Snyder, 2000) ; notamment au sein de FabLab (Gershenfeld, 2005 ; Bouvier-Patron, 2014) ouverts a priori à tous. Au-delà, le

30 La tradition de Champions Nationaux (avec des résultats positifs dans la mondialisation) a des effets pervers : priorité à la rentabilité à court terme associée à un aveuglement dans la conduite de la Politique Industrielle et/ou des subventions accordées, non prise en compte des mutations industrielles nécessaires ou inexistence même d’une réflexion sur la nature du développement d’une entreprise et/ou de son utilité pour la collectivité.

31 La focalisation sur le seul HighTech, parfois le temps d’une vague éphémère n’engendrant que le besoin d’anticiper un prochain incrément mineur, peut être un leurre destructeur sauf à trouver un positionnement de technologie générique (toujours requise quelles que soient les technologies en cours) ou à disposer d’un métier aux confluences des évolutions (comme c’est le cas par l’inter-organisation innovante). La question des appli- cations (marchés intermédiaires et finaux) futurs s’effectue sans penser le risque de déclassement industriel.

L’implicite de cette démarche repose sur le concept Ricardien de « travail déplacé » où l’on ne s’occupe que du nouveau secteur (censé absorber et/ou remplacer les salariés déclassés). Or, les offres nouvelles ne peuvent être satisfaites faute des qualifications requises, freins à la formation et/ou mobilité des salariés. Ainsi, la Gestion Prévisionnelle des Compétences apparaît justement être un point aveugle des dynamiques territoriales (Defelix et Picq 2013).

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LivingLab, territorial par définition, est destiné à tester, en grandeur réelle par toutes les parties prenantes (y compris les Acteurs Faibles a priori), tout nouveau dispositif régle- mentaire et/ou technique.

Conclusion

Pour sortir d’une survie précaire ou du déclin, la PMEb doit s’inscrire dans une coordina- tion mixte interne/externe : interne en mobilisant des connaissances et compétences permet- tant, en externe, une démarche contractuelle qualitative inter-organisationnelle de filière.

La coordination externe hisse la stratégie industrielle des acteurs vers le haut pour per- mettre, individuellement et collectivement, de créer un Avantage Concurrentiel durable et, notamment, intégrant la prise en compte environnementale. La coordination interne permet et/ou renforce le PN pour, notamment, permettre d’engendrer, au-delà de la fron- tière de la firme, une logique contractuelle favorable (la plus favorable étant – proposi- tion 2’ – : le partenariat). Notons que, même à préconisation identique, toutes les PMEb ne parviendront pas, par simple imitation, au même résultat : l’appropriabilité de l’informa- tion pertinente dépend de capacités d’absorption internes ouvertes sur l’externe. À capa- cités égales, dans le même secteur, les entreprises évoluent et réussissent différemment en fonction essentiellement de la qualité des compétences et de la stratégie mobilisée.

L’aide potentielle à apporter à l’entreprise peut relever du conseil managérial : aide à la décision et à sa mise en œuvre stratégique (innovation organisationnelle et/ou produit, mar- keting, certification qualité). En matière de management environnemental, ce qui est nou- veau réside moins dans les principes conceptuels que dans les mentalités et/ou le contexte légal bouleversant les conditions de concurrence. Les conséquences pénales doivent être effectives en cas d’infraction mais l’action appropriée du régulateur doit être prioritairement incitative, préventive et éducative. En matière d’Innovation et VEDD, l’ancrage territorial et l’insertion dans l’Économie de la Connaissance s’avèrent des leviers d’action puissants pour des PME. Si la dynamique HighTech n’est pas à minorer, les PME initialement banales ont leur carte à jouer : la distinction par la spécificité est une voie de sortie de la concur- rence des banalités. Le concept d’Acteur Faible, porteur d’un potentiel de spécificité valori- sable (envisagé ici sous l’angle économique), est d’ailleurs extensible à d’autres catégories (Collectivité Locale, etc.). L’avantage de la mise en œuvre d’un principe de coordination micro et méso-économique (interne/externe) est d’être, relativement, peu coûteux (notam- ment en termes d’argent public requis), décentralisé et privé mais les effets positifs collec- tifs globaux sont considérables en termes de préservation dynamique du tissu économique territorial. Au-delà des moyens, la coordination est la réponse – à fort impact mais à faible coût – de restauration des territoires en déclin.

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