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Démographie et société en Hainaut Gommegnies et Frasnoy

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Academic year: 2021

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Submitted on 9 May 2017

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Démographie et société en Hainaut Gommegnies et

Frasnoy

Michel Payen

To cite this version:

Michel Payen. Démographie et société en Hainaut Gommegnies et Frasnoy : fin du XVIIe siècle -milieu du XVIIIe siècle. Histoire. Université de Perpignan Via Domitia, 2013. Français. �NNT : 2013PERP1184�. �tel-01517023�

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UNIVERSITE DE PERPIGNAN VIA DOMITIA

DOCTORAT DE L’UNIVERSITE

DISCIPLINE : HISTOIRE MODERNE

THESE

PRESENTEE ET SOUTENUE PUBLIQUEMENT PAR

MICHEL PAYEN

DEMOGRAPHIE ET SOCIETE EN HAINAUT

GOMMEGNIES ET FRASNOY

FIN DU XVII

e

SIECLE - MILIEU DU XVIII

e

SIECLE

TOME 1

SOUS LA DIRECTION DU

PROFESSEUR GILBERT LARGUIER

MEMBRES DU JURY :

Monsieur le Professeur Antoine FOLLAIN (Université de

Strasbourg)

Monsieur le Professeur Hervé LEUWERS (Université de Lille III

- Charles de Gaulle)

Monsieur le Professeur Patrice POUJADE (Université de

Perpignan Via Domitia)

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UNIVERSITE DE PERPIGNAN VIA DOMITIA

DOCTORAT DE L’UNIVERSITE

DISCIPLINE : HISTOIRE MODERNE

THESE

PRESENTEE ET SOUTENUE PUBLIQUEMENT PAR

MICHEL PAYEN

DEMOGRAPHIE ET SOCIETE EN HAINAUT

GOMMEGNIES ET FRASNOY

FIN DU XVII

e

SIECLE - MILIEU DU XVIII

e

SIECLE

TOME 1

SOUS LA DIRECTION DU

PROFESSEUR GILBERT LARGUIER

MEMBRES DU JURY :

Monsieur le Professeur Antoine FOLLAIN (Université de

Strasbourg)

Monsieur le Professeur Hervé LEUWERS (Université de Lille III

- Charles de Gaulle)

Monsieur le Professeur Patrice POUJADE (Université de

Perpignan Via Domitia)

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REMERCIEMENTS

Mes remerciements vont tout d’abord au professeur Gilbert Larguier qui depuis plus de dix ans guide mes pas.

Ils vont également aux maires de Gommegnies et à leurs collaborateurs qui m’ont permis de consulter de nombreux documents et à tous ceux qui m’ont accueilli aux Archives départementales du Nord, et dans les bibliothèques des universités de Lille III et de Louvain-la-Neuve.

J’ai aussi une pensée pour mes grands-parents de Gommegnies, pour mes grands-oncles et grands-tantes et pour tous les fermiers de cette commune chez qui, enfant, j’ai passé de longues vacances dans les années 1940.

Et enfin, comment ne pas louer Claude Joseph Deropsie et Adrien Lescuier qui, de 1724 à 1737, « par les pluyes et dans les haies », s’en allèrent franchir le seuil de tant de masures de leur vaste paroisse !

L’idée m’est venue hier sur la route. Il tombait une de ces pluies fines qu’on avale à pleins poumons, qui vous descendent jusqu’au ventre. De la côte de Saint-Vaast, le village m’est apparu

brusquement, si tassé, si misérable sous le ciel hideux de novembre. L’eau fumait sur lui de toutes parts, et il avait l’air de s’être couché là, dans l’herbe ruisselante, comme une pauvre bête épuisée.

Que c’est petit, un village ! Et ce village était ma paroisse. C’était ma paroisse, mais je ne pouvais rien pour elle, je le regardais tristement s’enfoncer dans la nuit, disparaître… Quelques moments encore, et je ne la verrais plus. Jamais je n’avais senti si cruellement sa solitude et la mienne. Je pensais à ces bestiaux que j’entendais tousser dans le brouillard et que le petit vacher, revenant de l’école, son cartable sous le bras, mènerait tout à l’heure à travers les pâtures trempées, vers l’étable chaude odorante…

Et lui, le village, il semblait attendre aussi - sans grand espoir - après tant d’autres nuits passées dans la boue, un maître à suivre vers quelque improbable, quelque inimaginable asile.

Georges Bernanos (1888 - 1948) Journal d’un curé de campagne

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INTRODUCTION

Il est aux confins septentrionaux de l’hexagone, entre Valenciennes et Maubeuge, dans l’ancien comté de Hainaut, non loin du royaume de Belgique, une ville ceinte de remparts qui sont demeurés tels que Sébastien Le Prestre de Vauban les édifia voici plus de trois siècles. Le nom que porte cette cité est Le Quesnoy. A quelques kilomètres à l’est, s’étend sur plus de neuf mille hectares, le plus vaste massif forestier de la région Nord-Pas-de-Calais, la forêt domaniale de Mormal1, autrefois propriété des ducs de Bourgogne, puis des souverains d’Espagne. Autour de ce vaste massif bordé de villages et de hameaux, se dressent en Belgique et en France d’anciennes places fortes. La plus antique, Bavay, s’appelait Bagacum au temps où régnait Rome ; elle fut la capitale des Nerviens dont le courage fut vanté par César. Les autres villes se nomment Maubeuge et Valenciennes, autrefois sièges des intendants du Hainaut français, Landrecies, Avesnes-sur-Helpe et Condé-sur-l’Escaut en France, Binche, Charleroi et Mons en Belgique.

D’autres noms sont aussi célèbres ; ce sont ceux des combats qui se sont déroulés dans la région : Salis, Malplaquet, Denain, Jemappes, Wattignies. Plus éloignés, les champs de bataille de Bouvines, Rocroi, Fleurus, Fontenoy, Waterloo témoignent du fait que la région fut de tous temps convoitée par nombre de puissances européennes. Au temps de Louis XIV et de ses prédécesseurs, au même titre que la peste et la faim, la guerre était pour les Hennuyers* un mal avec lequel ils devaient composer.

Au voyageur qui, au milieu du vingtième siècle, parcourait les environs de Mormal, seuls les multiples fortins bâtis au crépuscule de la Troisième République et les bornes-frontières qui portaient l’aigle impérial à deux têtes rappelaient encore le temps des guerres. Les vaches qui paissaient sous le dense manteau des pommiers donnaient une apparence de paix au vaste bocage prisonnier de ses haies d’aubépines. L’odeur du lait chaud recouvrait l’épaisse couche de l’humus posée sur son socle d’argile.

A mi-distance du Quesnoy et de Bavay, sur le grand chemin qui reliait ces deux villes, il existait au XVIIe siècle, au lieu-dit “Le Heaume”, une barrière d’octroi qu’Adrien de Montigny et Jean Fréhault ont peinte au premier plan des deux tableaux représentant le village de Gommegnies2. Sur ces gouaches destinées au duc Charles de Croÿ, les maisons construites en torchis et couvertes de chaume entourent l’église et le château des comtes ; au loin, on

1

Le nom de la forêt de Mormal, à la fois protection et source de vie, a été un peu modifié par Robert-Louis Stevenson (1850-1894) sous la plume de qui nous avons découvert ce passage : « la forêt de Normal, un nom qui

sonne sinistrement à l’oreille, mais qui désigne un site fort agréable tant à l’odorat qu’à la vue ». 2

A vingt kilomètres de Valenciennes et de Maubeuge, Gommegnies avait 3048 habitants en 1846, 3486 en 1870, 3517 en 1900, 2679 en 1921 au terme du premier conflit mondial, 2043 en 1946 après le second.

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5 aperçoit la masse sombre de la forêt. Ce carrefour du Huyaume constitue toujours la principale entrée du “Villaige de gomegnÿ”.

Dans cette région qui n’a guère fait l’objet de recherches historiques, nous avons découvert dans la commune de Gommegnies le document qui constitue le socle de cette thèse. Il est l’un de ceux qui, nombreux, dorment inexploités dans les greniers de nos villes et de nos villages.

Il est l’œuvre de deux curés de la paroisse de Gommegnies et Frasnoy3

qui pendant quatorze années - de 1724 à 1737 - ont tenu à jour le dénombrement de leurs ouailles, maison par maison. Certes, plusieurs recensements avaient été effectués auparavant suite à des décisions d’autorités régaliennes ; celui-ci présentait la particularité d’avoir été constitué à l’initiative d’une personne privée, un curé de campagne nommé Claude Joseph Deropsie.

Quand ce prêtre arriva à Gommegnies en 1722, il prit conscience de l’étendue de sa paroisse. La distance était grande entre l’église et les hameaux les plus éloignés. Aussi, en 1724, dans le but de recenser l’ensemble des habitants, il prit la décision de se rendre chez eux. Avant cela, il ouvrit un livret qu’il intitula “Le nombre des familles et Communians de la Paroisse de Gommegnies colligé par Claude Joseph Deropsie curé de laditte Paroisse, L’An du Verbe Incarné Mil Sept cens vingt quattre” Il attribua une demi-feuille à chaque foyer et il établit la liste de ses paroissiens en les répartissant en 233 feux qu’il classa par rues et par hameaux.

Vers 1729, le chapelain Joseph François Farbu, « prêtre cantuariste dudit frasnoy » entreprit lui aussi de recenser ce petit village de soixante habitations. Les deux dénombrements furent par la suite regroupés en un seul volume qui se trouve à la mairie de Gommegnies. Sa copie microfilmée a été jointe à celles des registres de la paroisse. On peut la consulter à Lille, aux Archives départementales du Nord.

Nous n’avons pas trouvé de source semblable datant de cette époque en Hainaut. C’est dire l’intérêt que présente l’œuvre de Claude Joseph Deropsie. Aussi, il nous a paru intéressant de rechercher en quoi les informations détenues dans ce dénombrement complétaient les autres sources concernant les deux villages. Celles-ci sont en effet nombreuses ; ce sont, entre autres, les registres de catholicité, les actes notariés et d’échevinage, les rôles de capitation…

Les plus anciens documents concernant les baptêmes de la paroisse de Gommegnies et Frasnoy qui ont été conservés datent de 1705. Les informations qu’ils contiennent sont limitées à l’identité du nouveau-né et à celle de ses parents et de ses parrains. Le premier registre des sépultures date de 1711, on n’y trouve que le nom et le prénom du défunt. Ce n’est qu’à partir de 1719 qu'ont été notés dans les livrets les âges approximatifs des personnes décédées, et c’est seulement en 1729 que sont apparus les noms des parents et des conjoints.

Ce sont les actes de mariages qui sont les plus riches en renseignements. Cependant, bien que les plus anciens datent de 1710, ce n’est qu’à partir de 1719 qu’y sont mentionnés, outre le métier des chefs de feu, l’identité des parents des mariés ou celle de l’ancien conjoint.

Les « assiettes » de capitation sont également des documents précieux dans la mesure où elles permettent de déterminer approximativement la hiérarchie des patrimoines. Quant aux actes notariés et d’échevinage, on y trouve des informations qui complètent celles qui sont fournies par les registres de catholicité. Ainsi, les testaments et les successions nous révèlent souvent la liste des frères et des sœurs ; ils énumèrent, mesurent et situent les biens que possédaient les familles. Les contrats de mariage, quant à eux, décrivent entre autres, la nature des dots et celle des baux. Des ventes aux enchères, des inventaires après décès, enfin, nous ouvrent la porte des demeures les moins modestes ; ils dressent la liste des meubles,

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6 ustensiles, vêtements, parfois livres que possédaient les défunts. D’autres sources ne manquent pas d’intérêt. Ainsi, les plans dits du Consulat, bien que postérieurs à la période que nous étudions, révèlent non seulement la position des prés et des champs, le tracé des chemins, mais ils positionnent aussi les bâtiments le long des rues et au cœur des hameaux et vont jusqu’à dévoiler leurs contours et leur orientation.

Le document tenu de 1724 à 1737 par Claude Joseph Deropsie, puis par Adrien Lescuier, nous permet aussi de franchir le seuil de la micro-histoire du village et de descendre au niveau de celle du hameau. L'un des objectifs de cette thèse est de montrer que grâce à la localisation précise du lieu de résidence des habitants de la paroisse de Gommegnies et Frasnoy, il est possible d’approfondir la connaissance de ce que fut la vie des villageois entre 1724 et 1737. Afin de faciliter ces recherches, nous avons dressé, hameau par hameau, demeure par demeure, la liste des habitants de ces deux villages le 26.11.1737.

Nous avons noté en effet que c’est ce jour-là que la rédaction du dénombrement avait pris fin. Voilà pourquoi nous avons établi ce qui est peut-être en France le plus ancien recensement rural de l’époque moderne.

De même, nous avons reconstitué dans le second volume le recensement du 26.11.1727. Nous avons mentionné les liens de parenté, les âges, les métiers. Nous avons joint enfin dans le second volume 311 fiches dans lesquelles ont été reconstituées autant de familles.

Dans le but de montrer l’intérêt du dénombrement initié en 1724 par Claude Joseph Deropsie, nous avons conçu le plan suivant. Dans le premier chapitre, nous nous sommes efforcés de décrire ce qu’avait pu être la vie des habitants de la paroisse au cours des siècles qui ont précédé l'avènement de Louis XV. En particulier, nous avons recherché dans quelle mesure les conflits nombreux qui ont eu lieu dans cette région convoitée avaient concerné les Gommegnons et les Frasnoisiens.

Dans le second chapitre, nous avons analysé le contenu des sources qui ont alimenté cette thèse : dénombrements, assiettes de capitation, registres paroissiaux, cartes de Cassini et plans de l’an XII. 142 actes notariés et scabinaux riches en informations ont fait l’objet d’une étude approfondie ; certains ont été intégralement reproduits.

Au fil des pas de Claude Joseph Deropsie, nous avons entrepris enfin une première incursion dans les hameaux nombreux et parfois éloignés de la paroisse de Gommegnies et Frasnoy.

Le troisième chapitre nous éclaire en premier lieu sur l’évolution démographique des deux villages entre 1727 et 1737. Puis, nous nous sommes efforcés de décrire la société gommegnonne et frasnoisienne à cette époque.

L’identité, le lieu de résidence et le milieu social des mayeurs* et échevins ont été recherchés. Le clergé et la noblesse de Gommegnies et Frasnoy, de même que les censiers*, marchands, artisans, boutiquiers, cabaretiers, bergers, ouvriers de bois, veuves, pauvres et étrangers ont fait l’objet d’études spécifiques portant notamment sur la répartition de l’impôt entre les divers groupes sociaux. Les correspondances entre patagons*, patars*, florins*, écus* et autres monnaies ont aussi été étudiées ; ils ont fait l’objet d’une conversion en livres* et sols* de Hainaut et de France.

Le cadre de vie, l’habillement, le parler local et le coût de la vie ont également été étudiés. « De la naissance à la mort », c’est sous ce titre que nous avons ensuite suivi les différentes étapes de la vie des habitants. La sage-femme, la survie des jumeaux, les conceptions prénuptiales, le choix des prénoms, l’âge de la première communion, les jours de mariages, l’âge des jeunes époux, la maladie, la simultanéité de certains décès, le sentiment religieux…, tels sont les titres des articles que nous avons rédigés.

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7 Enfin, nous avons recherché si, grâce à ce dénombrement de Claude Joseph Deropsie, il était possible de passer de la micro-histoire du village à celle du hameau ; nous avons centré notre exploration sur l’un de ceux-ci, celui du Sarloton. Ce dernier a été choisi pour deux raisons, il était l’un des plus peuplés de Gommegnies ; proche de la forêt, il n’était contigu d’aucun village, à l’exception du vaste, forestier et peu habité Locquignol.

Puis, après avoir constaté que nombreux étaient alors les jeunes enfants qui perdaient l’un de leurs parents, nous avons recherché comment la collectivité villageoise et notamment le mayeur et les échevins réagissaient face à ce grand malheur qui s’abattait à cette époque sur beaucoup de familles. Cet aspect de la société d’Ancien Régime a été abordé dans le quatrième chapitre, sous le titre « La Fourmoture (1703-1736) ».

Dans le cinquième, nous nous sommes plongés dans les actes notariés et scabinaux afin de recueillir le maximum d’informations sur vingt-quatre femmes qui ont vécu à Gommegnies à la charnière des XVIIe et XVIIIe siècles. Les plus anciennes sont nées au temps de Louis XIII, les dernières à la fin du règne de Louis XIV.

Notre sélection a reposé uniquement sur les femmes dont les noms figuraient le plus souvent dans les actes notariés ; nous avons, de ce fait, exclu celles qui vivaient le plus modestement.

La femme tenait alors une place essentielle en milieu rural ; outre l’éducation des jeunes enfants, la confection des plats, l’entretien de la maison, elle avait bien souvent la responsabilité du jardin et celle du poulailler.

Nous avons consacré une fiche à chacune de ces vingt-quatre femmes et nous avons puisé dans les documents consultés nombre d’informations telles que les ustensiles, les meubles, les vêtements, les bijoux, les outils que l’on trouvait dans les demeures.

Puis, nous nous sommes efforcés de déterminer à partir de quand les filles ont fréquenté l’école paroissiale du Cavain et, devenues grandes, ont été en mesure de signer les actes notariés.

Nous nous sommes penchés également sur la capacité des veuves à gérer leur patrimoine et à cohabiter avec certains membres de leur famille. Dans les testaments, nous avons recherché quelle pouvait être l’intensité de la foi de chacune et pourquoi les fils de quelques-unes s’orientaient vers la cléricature.

Ces documents nous ont parfois fourni des indications sur la santé de certaines femmes, sur les litiges qui survenaient lors de l’établissement des successions, sur la loi de Gommegnies et sur la répartition des biens entre filles et garçons. Nous avons aussi tenté de trouver dans quelle mesure homogamies* et endogamies* influençaient la recherche des futurs époux dans les milieux relativement aisés.

Nous avons ensuite recherché dans les actes notariés si les femmes participaient aux activités rurales auxquelles nous avons consacré le sixième et dernier chapitre.

Dans ce pays exempt de gabelle et de taille personnelle, pratiquait-on un assolement avec jachère ? C’est la première question que nous nous sommes posée.

Puis, nous avons cherché ce que 39 actes notariés nous apprenaient sur l’élevage, les labours, l’entretien des terres et de leurs haies, les chemins et le voiturage, les prix de vente et de location des terres, la diversité des bénéficiaires de rentes, la localisation des lieux-dits.

Enfin, dans un article intitulé « Le paysage », nous nous sommes efforcés de déterminer en quoi le Gommegnies du XVIIIe siècle différait de celui qui existait encore voici quelques dizaines d’années quand les chevaux de trait et les antiques charrettes cédaient la place à de modernes tracteurs.

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CHAPITRE I

REPERES HISTORIQUES

UNE TERRE CONVOITEE ET MEURTRIE

Selon Diderot, le caractère des habitants d’une région est marqué fortement par le climat. Dans l’extrême nord de la France, le comportement des personnes l’est aussi par le passé de ce pays. Convoité par de nombreuses puissances, le Hainaut a souvent été un lieu de passage pour les armées. Fréquents y ont été les combats et les exactions des bandes de brigands.

Les villages de Gommegnies et de Frasnoy sont entre autres caractérisés par la présence depuis longtemps à proche distance de frontières et aussi par celle de la vaste forêt de Mormal, refuge omniprésent de populations menacées et source permanente de bois, de nourriture, mais aussi de travail.

Les évènements qui se sont passé sur la terre du Hainaut depuis l’antiquité nous ont incités à nous pencher sur son histoire afin de mieux comprendre le caractère et le comportement des Gommegnons et des Frasnoisiens du XVIIIe siècle.

Le nom de Gommegnies proviendrait d’un certain Gomer (nom d’origine germanique) qui, peut-être, posséda ici une villa. Le nom de Frasnoy témoigne d'une époque où il y avait des frênes.4

La région comprise entre le massif des Ardennes et l'Escaut était autrefois recouverte par la vaste forêt charbonnière qui tenait son nom du fait qu'on y produisait du charbon de bois. Au cours des siècles, des défrichements ont mité le tissu végétal et donné naissance à des clairières, à des essarts. C'est dans l’un deux, sans doute, qu'ont vécu les premiers habitants de Gommegnies. Là où se trouve aujourd'hui l'église, des fermiers et des artisans se sont installés. Avec le temps, leurs habitations se sont multipliées jusqu'à constituer un bourg5, trop petit pour porter le nom de ville, trop peuplé pour s’appeler village. C'est l'histoire de cette terre que nous nous proposons de reconstituer.

4 Une grande partie de ce chapitre a été puisée dans le document ci-dessous référé :

PAYEN (M.), En Hainaut, les villages de Gommegnies et de Frasnoy de 1724 à 1737 (Une approche de la

micro histoire du hameau), 2 volumes, Mémoire de première année de master, ADN, Série 3J 973 / 1 et 2, 2004,

269 et 295 p.

Il peut être consulté aux Archives départementales du Nord et à la mairie de Gommegnies.

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9 1 Antiquité et Haut Moyen Age : Belges, Romains et Germains :

A l'époque de César, le Hainaut actuel était habité par les Belges. Originaires de l’Europe du nord, ils s'étaient installés dans le nord de la Gaule avant la fin du IIe siècle avant J.-C. Peuples belliqueux, ils opposèrent une farouche résistance aux légions romaines qui les soumirent entre 57 et 51 avant Jésus-Christ.

Les Nerviens occupaient alors la région située entre l'Escaut et la Sambre ; leur capitale était Bagacum (aujourd'hui Bavay, petite ville située à sept kilomètres au nord-est de Gommegnies). Dans ses Commentaires, César insista sur l'isolement des Belges qui pratiquaient la culture du blé et exploitaient la forêt et le bocage. Chez les Nerviens, selon lui, ce paysage avait un rôle défensif. Il écrivit dans La guerre des Gaules : « Les haies semblables à des murs leur offraient une protection que le regard même ne pouvait violer ».6

La bataille du Sabis :

C'est en 57 avant J.-C. que se déroula la bataille du Sabis, cours d'eau qu'on identifie à la Sambre, à la Selle (près de Solesmes) ou à l'Escaut. Les Nerviens avaient pris position de l'autre côté du Sabis et attendaient avec leurs alliés l'arrivée des Romains. Protégés par leurs haies défensives7, ils avaient disposé leurs unités à l'intérieur de la forêt ; au début du combat, ils semèrent la panique au sein des légions romaines.8

En définitive, des 60.000 combattants nerviens, il ne serait resté que 500 hommes. César épargna les survivants et il se porta garant de leur territoire. Il laissa aux Nerviens leur statut de « cité libre », exempte de l'impôt.

Alors débuta la romanisation de la Belgique. Auguste chargea son gendre Agrippa de viabiliser cette région. Créée pour des raisons stratégiques, la chaussée Boulogne-Bavay-Cologne devint la grande artère commerciale de la Gaule du Nord. Vers la plaque tournante qu’était devenue Bagacum, convergeaient alors sept chaussées. Aux deux routes qui venaient de Boulogne par Cassel, Tournai et Etscaupont (Ponte Scaldis), et aussi par Thérouanne, Arras et Cambrai s'ajoutèrent, entre autres, celles qui se dirigeaient vers Cologne, Reims et Vermandunum (près de Saint-Quentin). Cette dernière constitue toujours la limite orientale de la terre de Gommegnies. Ces sept routes sont encore de nos jours appelées chaussées Brunehaut. Par sa position stratégique, Bavay devint alors une vaste cité.

C'est au IIIe siècle de notre ère qu'eurent lieu les premières incursions des Alamans et des Francs. En 275, ils accédèrent à Bavay par la chaussée qui venait de Cologne et ils mirent à sac une partie de la ville. Vers 430, Clodion, chef de la tribu des Francs Saliens s'empara de ce qu’on appelle aujourd’hui le Hainaut.

6 CESAR, La Guerre des Gaules, II, 17 et 15.

7 Ces haies « semblables à des murs » ont peut-être donné leurs noms à « Hainaut » ou « Haguenau », le « Pays des Bois ».

8 Sous la plume de César, on peut lire : « Avec une rapidité incroyable, les Nerviens descendirent au pas de course vers la rivière, si bien que presque en même temps, ils semblaient se trouver dans la forêt, dans la rivière et déjà aux prises avec nous. Avec la même rapidité, ils gravirent la colline opposée marchant sur notre camp et sur ceux qui étaient en train d'y travailler [...] Tous les Nerviens, en rangs serrés, sous la conduite de Boduognatos, leur chef suprême, marchèrent sur la partie du camp de César qui se trouvait à découvert. [...] Les soldats de la douzième légion [...] étaient pressés les uns contre les autres et se gênaient mutuellement pour combattre ; la quatrième cohorte avait eu tous ses centurions et un porte-enseigne tués. » Il fallut qu’arrivent

trois nouvelles légions pour que la situation soit rétablie et que la science guerrière des Romains ait raison de la bravoure des Nerviens. « L'ennemi montra un tel courage que lorsque les premiers étaient tombés, ceux qui les

suivaient montaient sur leurs corps (...) et les survivants, comme du haut d'un tertre lançaient des traits sur nos soldats et renvoyaient les javelots ».

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10 Bien qu’en 394, l’Empereur Théodose ait fait du christianisme la religion officielle, celle-ci ne se développa que lentement dans cette région marginale de l'Empire romain. Le premier évêque de Cambrai est attesté dès 614, il se nommait Géra. C’est à partir du VIIe

siècle que des monastères furent créés par des missionnaires le long de la Sambre, à Maroilles (saint Humbert), Maubeuge (sainte Aldegonde) et Hautmont (saint Maldegaire).

Selon la légende rapportée par Jacques de Guyse, la forteresse du Quesnoy aurait été fondée par un preux chevalier nommé Aymond. Voilà pourquoi Le Quesnoy s'appela d’abord « Haimon Caisnoit ».

Il semble que les Normands qui pillèrent vers l'an 842 l'abbaye de Maroilles et les abords de l'Escaut ne soient pas parvenus au Quesnoy. En effet, trop étroites, les rivières en amont de Valenciennes n’auraient pas permis à leurs embarcations de poursuivre leur navigation.

Une frontière linguistique se constitua entre le IXe et le XIIe siècle à une cinquantaine de kilomètres au nord de Gommegnies.

2 Des comtes de Flandre aux rois d'Espagne :

En 843, lors du traité de Verdun, l'empire créé par Charlemagne fut partagé et l’Escaut devint la limite entre la future France (à l’ouest), et la Lotharingie (à l’est) ultérieurement annexée par le Saint Empire romain germanique. Au XIe siècle, dans les campagnes, des signes d'expansion économique se manifestèrent, le matériel agricole se modernisa. La charrue succéda à l'araire, la herse fit son apparition. On utilisa désormais le collier d'épaule et les chevaux se substituèrent aux bovins. On assista à la diffusion des moulins à vent. Les abbayes accomplirent d’importants efforts pour mettre en valeur les « terres froides », argileuses et humides, favorables à l'herbe. Les essartages dilatèrent les terroirs préexistants.9 21 Les premiers comtes de Hainaut :

Selon Georges Bohy : “En 720, un moine de Rouen nommé Aigrard nous conte que Saint Aubert dont il écrit la vie, prêcha en une contrée nommée Pagus Haenonsis.”10

C'est dans ce document que pour la première fois apparaissait le nom du comté de Hainaut.

Ce n’est pas à un historien belge mais français, Pierre Pierrard, que nous empruntons les lignes qui nous décrivent la naissance de cette future province. Il écrit dans son Histoire du Nord : « De l’autre côté de l’Escaut (Mons, Maubeuge, Chimay, Valenciennes) s’étend le comté de Hainaut qui relève de l’Empereur. Donné par Lothaire Ier

à son gendre Gilbert (décès en 849), incorporé au duché de Basse-Lorraine, constitué en 959, le comté de Hainaut appartient, au début du XIe siècle, à la comtesse Richilde qui, vers 1035, épouse Herman.

Quand celui-ci meurt, Richilde épouse en secondes noces (1051) l’héritier du comte de Flandre - le futur Bauduin VI - qui devient ainsi Bauduin Ier de Hainaut.

Devenu aussi comte de Flandre en 1067, celui-ci meurt dès 1070 ; son fils Arnoul doit normalement prendre la double couronne ; mais son oncle, Robert le Frison, par sa victoire de Cassel (1071), élimine Arnoul et sa mère.

Richilde rompt alors l’union de la Flandre et du Hainaut, son autre fils Bauduin II (décès en 1098) devenant comte du Hainaut, principauté qui va se considérer en état de guerre constante avec la puissante Flandre. Ce qui amènera les comtes du Hainaut du XIIe siècle - Bauduin II, III, IV, V - à multiplier sur leurs frontières les places fortes : Le Quesnoy, Raismes, Bouchain, Berlaimont, Binche... ».11

9 WYTTEMAN (J. P.), Le Nord de la Préhistoire à nos jours, Saint-Jean-d’Angély, Bordessoulles, 1988,

381 p.

10

BOHY (G.), Hainaut ou l’épopée d’un peuple, t. 1 Des origines à Charles Quint, Mons, 1971, 279 p.

(15)

11 Au cours des siècles, de nombreux souverains ont régné sur le Hainaut.

C'est sous le règne de Bauduin III (1098-1120) qu'apparut pour la première fois le mot de Gommegnies sous le nom de son seigneur, « Alulfus de Gumenies » que l'on trouve, en 1117, dans une charte en faveur de Saint Denys de Brocqueroye12.

Gommegnies est mentionné également en 1131 dans un accord conclu entre l'abbaye de Crespin et Arnould de Quiévrain 13

Bauduin IV (1120-1171) dit le bâtisseur fonda en 1142 Aymond Quesnoy appelé aussi Quesnoy-le-Comte ; il y éleva la demeure féodale et les murailles à l'emplacement de l'actuel château de Marguerite de Bourgogne (1373-1441). Un vaste parc s'étendit bientôt en direction de la forêt ; il comprenait un bois nommé au XIVe siècle « Bois du Gard ». On y trouvait des cerfs, des daims, des vaches, des chevaux et du gibier sauvage. Le Gard était entouré de hauts murs destinés à en interdire l'accès aux loups et aux chiens.14

Dès lors, le château du Quesnoy devint une des résidences préférées des comtes de Hainaut, puis, des ducs de Bourgogne.

Ibertus de Gominiis est nommé dans un jugement de 1164 concernant l'abbaye d'Hautmont.15 En 1173, il acheta au monastère de Liessies tout ce que celui-ci possédait à Gommegnies.16 Liessies, aujourd'hui en ruines, fut jusqu’à la Révolution une puissante abbaye située à 32 kilomètres au sud-est de Gommegnies.

Cette vente nous amène à émettre l’hypothèse que ce sont des moines de Liessies qui, aux XIe et XIIe siècles, firent défricher la terre de Gommegnies. En effet, l’abbaye de Liessies est, à notre connaissance, la seule qui ait vendu des terres à un seigneur de Gommegnies.

C'est en 1173 aussi, que Pierre d'Alsace, « élu de Cambrai », donna les autels de Gommegnies et de Frasnoy à l'abbaye Saint-Sauveur d’Anchin17 fondée vers 107718 et bien plus récente que celles de Maroilles et de Liessies établies respectivement aux VIIe et VIIIe siècles.

En 1180, une charte fut octroyée à la ville du Quesnoy qui devint une cité prospère. Cette même année, Isabelle de Hainaut, petite-fille de Bauduin IV, épousa Philippe Auguste. Les alliances étant de ce fait renversées, la Flandre entra en guerre contre le Hainaut. En 1184, Philippe d'Alsace, comte de Flandre et de Brabant, et le sire d'Avesnes attaquèrent Le Quesnoy. Bauduin V fit brûler les faubourgs de la ville afin d'en interdire l'accès aux assaillants. Le comte de Flandre, après avoir renoncé à s'emparer du Quesnoy, se retira par Gommegnies vers Bavay. Ses troupes occupèrent la région jusqu'à Maubeuge où elles firent jonction avec les troupes de Brabant et celles de l'archevêque de Cologne. Le comte de Flandre fit ensuite brûler Landrecies dont un grand nombre d'habitants qui s'étaient réfugiés dans la forêt de Mormal furent massacrés.

Désiré MATHIEU écrit: « Le pays avait souffert cruellement de la guerre. Si de nombreux

prêtres du doyenné de Valenciennes, notamment les curés d' « Amfroipret, Gommeignies,

12

DEVILLERS (L.), Description de cartulaires, V. 110.

13

Bibl. Nat., Paris, Coll. Moreau, T. LV, f° 42.

14 DE GUISE (J.), Annales, T.12, p. 312.

15 DUVIVIER, Recherches sur le Hainaut ancien, p. 597. 16 Coll. Moreau, T. LXXVIII, f° 42.

17 L’abbaye d’Anchin sera citée à plusieurs reprises dans cette thèse. En effet, les « messieurs d’Anchin »

étaient au XVIIIe siècle propriétaires de plusieurs terres à Gommegnies. Ce monastère est mentionné également au chapitre III dans l’article 3 intitulé « Le clergé et la noblesse ».

(16)

12 Grant Wargny, Franoit, Petit Wargny, Potielles, Preux (au Sart* de Gommegnies), Orsineval, Villerel, Villers Sire Pol s'opposèrent aux tailles imposées au clergé par les évêques de Cambrai et d'Arras, et s'ils demandèrent l'appui du comte pour en être exonérés, il faut sans doute en voir la raison dans les ruines de ces villages. »19

En 1192, la paix conclue à Péronne avec Philippe-Auguste attribua une partie de la Flandre à Bauduin V. Les comtes de Hainaut se livrèrent à nouveau à la chasse dans la forêt de Mormal ; ils entretinrent une cour brillante au Quesnoy où un hôpital (la future abbaye Sainte-Elisabeth) fut construit alors qu'une maladrerie retenait hors des remparts les personnes atteintes de la lèpre.

Dans un acte de 1179, Renier de Trith est associé dans un don à l'abbé de Hautmont « par le

rameau et le gazon de sa part de l'alleu de Gommegnies. »20 22 Au temps de Guillaume et de Gérard de Gommegnies :

C'est au XIIIe siècle que la terre de Gommegnies est apparue dans certaines sources. Voici comment Désiré Mathieu décrit l'événement : « Lorsque cette terre de Gommegnies sort de

l'ombre au 13e siècle, elle semble un ancien comté s'étendant de la forêt actuelle jusqu'à Wargnies, et d'Amfroipret jusqu'à la Rhonelle. Frasnoy, parfois nommé Frasnoy au Sart, et Preux au Sart étaient alors des sarts de cette grande terre qui englobait, sur les hauteurs voisines de sa limite, de nombreux bois comme les Haies de Gommegnies et de Hourdeau, et, contre Mormal, les bois de Carnoy, dame Agnès, d'Erpion et des Défois. »21

Guillaume et Anfrede de Gommegnies participèrent de 1202 à 1205 à la IVe Croisade dirigée par Bauduin VI (1195-1205) de Constantinople (Bauduin IX de Flandre).

Guillaume de Gommegnies figura parmi les personnages qui jurèrent d'observer fidèlement les lois édictées dans la Grande Charte du Hainaut en 1200 par Bauduin VI.22 Villeharduin écrit que Guillaume de Gommegnies a été du nombre des chevaliers qui, après la levée du siège d'Andrinople par les Bulgares en 1206, quittèrent l'armée parce qu'ils étaient en désaccord avec Henri, frère et successeur de Bauduin sur le trône de Constantinople.

Froissart mentionne que Guillaume de Gommegnies fut un des plus intrépides compagnons d'armes du comte de Hainaut ; il précise que « une sœur de ce Guillaume porta la terre de

Gommegnies dans la maison de Jauche ».

Les documents les plus anciens dans lesquels on mentionne l'existence des lois de Gommegnies datent de 1232 et de 1278.23

En 1232, Gobert d'Orbais, sire de Gommegnies et son épouse Mainsende de Sassegnies, en présence du prêtre de Gommegnies et des échevins, promirent de maintenir la loi jurée par Renier de Jauche. Ils donnèrent aux habitants du Sart de Gommegnies le Carnoye moyennant la redevance d'une poule par feu que devaient payer ceux qui y coupaient du bois ou y conduisaient leurs bêtes.

En 1278, Wuillaume de Jauche, sire de Gommegnies, donna aux habitants les Joucquères sous le vivier de Gommegnies, les terrains vagues et les aisances communes aussi loin que

19 MATHIEU (D.), Histoire de la forêt de Mormal et de ses dépendances. ADN, 15 J, 771 p., p. 56.

20 Cette expression « par le ram et le gazon » a été mentionnée longtemps dans les actes de vente (Voir par

exemple les actes d'échevinage de Gommegnies). Déjà, au temps des Francs, le vendeur donnait à l'acquéreur une motte de gazon figurant la terre cédée sur laquelle on fixait un rameau représentant les arbres de la dite terre.

21

MATHIEU (D.), op. cit., p. 38.

22

DE SAINT-GENOIS (J.), Monuments anciens... I, 286.

(17)

13

s'étendaient les paroisses et les limites du Sart, moyennant un chapon par an dû par chaque habitant.24

Dans la loi du Sart de Gommegnies, les seigneurs déclarèrent avoir supprimé la mainmorte ; cependant, après la mort de l'homme et de la femme, les biens meubles devaient être attribués au seigneur.25

1244-1246 : Marguerite de Constantinople dite la Noire.

Elle épousa à onze ans en premières noces Bouchard d'Avesnes, et en secondes, en 1223, Guillaume de Dampierre. De cette double union naquit la longue querelle des d'Avesnes et des Dampierre qui, après avoir appauvri la Flandre et ruiné le Hainaut, conduisit à leur séparation.

1246-1257 : Jean d'Avesnes investi comte de Hainaut par le pape Innocent IV et par le roi Louis IX.

En même temps, ceux-ci attribuaient la Flandre à Guillaume de Dampierre. Charles d'Anjou, frère du roi de France, s'empara le 24.12.1253 de Valenciennes et, le 05.01.1254, il s'y proclama comte de Hainaut. Il conquit Berlaimont, Mons et Le Quesnoy qui fut repris en juillet 1254 par Guillaume de Hollande.

En 1292, Guy de Dampierre, comte de Flandre, prit d'assaut Le Quesnoy et dévasta les environs qui furent à nouveau pillés et incendiés le 04.10.1296 par Robert de Béthune.

Froissart cite le seigneur Gérard de Gommegnies parmi les personnages qui reçurent à Valenciennes, en juillet 1326, la reine Isabelle d'Angleterre, royaume où il se rendit deux mois plus tard. En 1327, il retourna dans ce pays afin d'aider le jeune roi Edouard III contre les Ecossais.

Le 17.11.1333, Gérard de Gommegnies fut témoin au déshéritement de la seigneurie de Blaton fait par Guillaume, le fils du comte de Hainaut, en faveur de Louis, comte de Flandre. Le 27.07.1334, il fut caution du duc de Brabant dans l'accord conclu par ce duc avec Guillaume Ier.

A cette époque, la forêt de Mormal dans laquelle on chassait le cerf, le sanglier et le héron, regorgeait de richesses. Elle livrait au château du Quesnoy du bois, du charbon et les récoltes des fermes comtales. Des loups, des renards, des blaireaux y vivaient. On y capturait des faucons, des éperviers, des autours, des hérons, des poissons de toutes sortes. La forêt nourrissait aussi de nombreux chevaux sauvages.26

23 La guerre de Cent Ans (1337-1453) :

Jean de Normandie, fils de Philippe VI de Valois ne parvint pas à s'emparer du Quesnoy et il incendia en 1340 Gommegnies et Frasnoy. Il détruisit les moulins à eau de Quelipont (aujourd’hui à Wargnies-le-Petit) qui appartenaient au sire de Gommegnies. Pendant ce temps, les habitants se réfugièrent dans les bois avec leurs animaux. Peu de temps après la bataille de Crécy (26.08.1346), le 15.10.1346, Jean de Gommegnies fut blessé lors d'une incursion en Cambrésis.

C'est sous le règne de Marguerite II d'Avesnes-Bavière (1345-1356) que le comté de Hainaut passa sous la domination de la Maison de Bavière. Margueritte s'installa au Quesnoy où elle mourut le 23.06.1356. Vers 1348, aux ravages de la guerre s'ajouta la peste noire.

24

A.D.N., Copies diverses, E 4190, C 7229.

25

MATHIEU (D.), op. cit., p. 88.

(18)

14 « Les bois étaient hantés par des meurtriers, des bannis, des hérétiques, des déshérites poussés par la misère ou l'épidémie. »27

En 1348, comme le seigneur de Gommegnies avait assailli les bourgeois de Valenciennes, ceux-ci menèrent une expédition contre ce village.28 « On vit le prévôt de Valenciennes, les jurés, les sergents de la paix, les arbalétriers, les archers, un médecin, des chars et des charettes, monter vers Gommegnies et y abattre la maison du seigneur. (...) En 1349, on brûla sur le marché de Bavay « III juys et II juizes » accusés de profits, qui reçurent comme de coutume « pain ols bure, froumatge et chiervoise » avant de subir le bûcher ».29

En 1359, suite à l'alliance que les seigneurs de Gommegnies avaient contractée avec Edouard III, roi d'Angleterre, le village fut brûlé par le duc de Normandie et saccagé par les Français après un héroïque combat soutenu à Herbignies par le sire de Gommegnies et six de ses écuyers face à 340 adversaires.30

En 1367, à Gommegnies, la maison du seigneur fut abattue une nouvelle fois par les Valenciennois.

En 1394, année où les glands furent abondants, 1.200 porcs d'habitants de Gommegnies ont profité de la glandée dans la forêt de Mormal.31 Si les moutons (« blancques biestes ») n'étaient pas admis dans le massif, car ils auraient commis trop de dégâts, les vaches (« biestes à

cornes ») l'étaient, et, en 1378, les habitants de Gommegnies et de Frasnoy en firent entrer

respectivement 75 et 109.32

En 1404, le duc de Bourgogne, Philippe le Hardi venait de mourir. Son successeur Jean sans Peur (1371-1419), beau-frère de Guillaume IV de Bavière, comte de Hainaut de 1404 à 1417, lui succéda comme comte de Flandre et maître de l'Artois. Entre ses Etats et ceux d'Antoine de Bourgogne, il n'y avait plus que le Hainaut et la Zélande qui fassent obstacle à ce que l'Escaut fut de sa source à la mer un fleuve bourguignon. Pour les ducs de Bourgogne, la tentation était donc grande d'en acquérir la maîtrise pour assurer la continuité de leurs Etats du Nord.

En 1413, Jean sans Peur s'étant réfugié en Hainaut, le roi de France l'y fit poursuivre par le duc de Bourbon. Le Bourguignon s'échappa et le duc passa son dépit sur les paysans hennuyers qu'il pilla, molesta et rançonna impitoyablement. Pendant que les seigneurs de Vertain et de Potelle (village limitrophe de Gommegnies) se faisaient la guerre, des bandes armées traversaient le pays en pillant des fermes.

Les loups étaient encore nombreux dans la forêt°; ainsi, en janvier 1409, au Gard du Quesnoy « un grant leu faisait grant destruction des daims ». Lorsqu'il se sentait découvert, il s'enfuyait en sautant au-dessus des murs du Gard hauts de plus de trois mètres°; tous les efforts pour l'abattre furent vains.33

L'office de louvetier de Hainaut était alors assumé par Jehan Kiénot de Gommegnies. Il touchait deux sols par centaine de moutons pour chaque « prinse de leu ».

27 MATHIEU (D.), ibid., p. 112.

28 CAFFIAUX (H.), Revue agricole de Valenciennes, T. XVI, p. 309, 1863. 29 MATHIEU (D.), ibid., p. 119.

30 Bulletin de la Commission historique du Nord, IX, 163. 31

A.D.N., B/7923.

32

A.D.N., B/7910.

(19)

15 L'assassinat de Jean sans Peur en 1419 au pont de Montereau sous les yeux du dauphin de France eut sur le sort du Hainaut une influence décisive. Philippe le Bon (1396-1467) qui lui succéda avait en effet l'ambition de devenir le souverain d'un état rival de la France en s'assurant la maîtrise des duchés, comtés et seigneuries des Pays-Bas.34 Le 21.05.1420, il signa à Troyes un traité d'alliance avec le roi d'Angleterre Henri V que le duc de Bourgogne proclama héritier légitime de la couronne de France. Le duc de Glocester, troisième époux de Jacqueline de Bavière (comtesse de Hainaut de 1417 à 1433) débarqua à Calais avec 5.000 hommes. Ses faibles forces se heurtèrent bientôt à l'armée brabançonne secondée de grands renforts bourguignons. « Et adonc commença de toutes parts la guerre du Haynaut, moult dommagieuse par feu et par espée, par quoy le pauvre peuple fut moult oppressé. »35

Jacqueline, assiégée à Mons, se rendit et fut assignée à résidence dans le sombre château de Gand. Les Etats de Hainaut réunis à Valenciennes affirmèrent leur fidélité à leur comtesse héréditaire. Ils consentirent cependant à reconnaître Philippe le Bon comme mambour, gouverneur et héritier présomptif du comté de Hainaut.

24 Les ducs de Bourgogne : 1433-1467 : Philippe le Bon.

C'est par le traité de La Haye signé le 12.04.1433 que Philippe le Bon devint comte souverain de Hainaut, Hollande, Zélande et Frise.

Pour Henri Pirenne,36 Philippe le Bon fut le politique avisé qui forgea l'unité nationale de la future Belgique. Héritier en 1419 d'un duché dont la situation économique et financière était déplorable, il apura ses dettes en quinze ans de règne. Quand il mourut en 1467, il était sans doute le plus riche prince de son temps. Philippe de Commynes (1447-1511) écrivit : « Pour lors estoient les subjects de ceste maison de Bourgogne en grande richesse, à cause de la longue paix qu'ils avoient eu et pour la bonté du prince soulz qui ilz vivoient, lequel tailloit peu ses subjects. »

En 1444, Philippe le Bon défendit Le Quesnoy contre les bandes de pillards appelés « écorcheurs, houspilleurs et tondeurs ». Cette année-là, il fixa au mardi le jour du marché hebdomadaire et décida que les deux foires annuelles auraient lieu le second lundi de Carême et le 25 octobre (fête de Saint-Crespin, patron des cordonniers, très nombreux au Quesnoy). La fabrication des draps et des serges était alors la principale activité de la ville. En 1449, un incendie ravagea la cité ; celle-ci fut reconstruite grâce au don de 356 chênes de la forêt de Mormal que Philippe le Bon fit abattre. De temps en temps, au château du Quesnoy, la « chambre de Monseigneur le Dauphin » accueillait le futur roi Louis XI.37

C'est en 1462 que l'on trouve mention de la rue Charlot de Gommegnies qui, alors, se nommait

« ruelle qu'on dist Charlet ». Cette information se trouve dans le cartulaire du domaine de

Quesnoy-le-comte « renouvellé l'an 1462 ».38

1467-1477 : Charles le Téméraire (1433-1477), duc de Bourgogne.

Sous son règne, le mouvement économique et social se poursuivit en Hainaut dans le même

34

BOHY (G.), op. cit.

35

BOHY (G.), ibid.

36

PIRENNE (H.), Histoire de Belgique, Bruxelles, Lamertin, 1922-1932, rééd. 1948-1952, 7 vol.

37

MATHIEU (D.), op. cit., p. 335.

38

Histoire du village d'Esnes, p. 68. Il est possible que dans l’expression « ruelle qu'on dist Charlet », c’est le mot « Charlot » qu’il fallait réellement lire.

(20)

16 sens que sous Philippe le Bon. Le drap léger, dit sayette, l'emporta de plus en plus sur la draperie flamande et fit la fortune de Valenciennes. L'exportation par Anvers gagna chaque jour en importance. Le duc fit curer et élargir l'Escaut, la Sambre et la Haine.

En 1473, la seigneurie de Gommegnies se composait de quatre villages : Gommegnies, Preux, Frasnoy et Petit-Wargny.39 Cette année-là, Philippe de Croy héritant de Jean, son père mort à Valenciennes en 1472, se vit échoir cette seigneurie en fief du duc de Bourgogne, comte de Hainaut. En 1469, Gommegnies, Frasnoy et Preux-au-Sart avaient respectivement 72, 45 et 36 feux.40

1477-1482 : Marie de Bourgogne, fille de Charles le Téméraire.

Louis XI rêvait de disloquer à son profit l'héritage bourguignon. Il représenta aux Wallons, assure Jean Molinet,41 l'intérêt qu'ils auraient à se séparer des Flamands pour se joindre à la communauté de langue française. Puis, en mai 1477, il pénétra en Hainaut à la tête d'une armée de 7.000 hommes. Après avoir ravagé les environs de Valenciennes, il se présenta le 23.05.1477 devant Le Quesnoy et il fut repoussé. Il revint avec ses douze « Pairs de France », douze canons qui envoyèrent sur les remparts plus de 900 boulets qui parvinrent à créer une brèche à travers laquelle s'élancèrent les archers. La résistance des assiégés aidée par une pluie torrentielle interrompit le combat. Cependant, le lendemain, la ville se rendit. Pour échapper au pillage, les habitants furent contraints de verser 900 écus d'or. Puis, le 11 juin, après un assaut sanglant, Louis XI s'empara d'Avesnes.

Valenciennes refusant toujours de capituler, le roi de France décida de faucher les blés du plat pays. Le 25 juin, il écrivit à Antoine de Chabannes, grand-maître de France : « Je vous envoie trois ou quatre mille faucheurs pour faire le gât que vous savez. Je vous prie, mettez-les en besogne, et ne plaignez pas cinq ou six pipes de vin à mettez-les faire bien boire et à mettez-les enivrer. Et lendemain bien matin, mettez-les en besogne, tellement que j'en oye parler. Monseigneur le grand maître, je vous assure que ce sera la chose au monde qui fera le plus tôt dire le mot capituler à Valenciennes. » Quelques jours plus tard, Chabannes lançait des milliers de faucheurs « à l'assaut des blés mûrissants ». Protégés par quatre cents lances et quatre mille archers, ceux-ci dévastèrent systématiquement les champs qui s'étendaient autour du Quesnoy et entre Valenciennes et Douai. Cependant ces deux dernières villes refusèrent de se rendre.

En septembre, Louis XI installa des garnisons dans les places qu'il avait conquises en Hainaut et, le mois suivant, il reprit le chemin de la Loire pour y passer l'hiver. En avril 1478, il se remit en campagne et, à l'étonnement général, il retira les garnisons qu'il avait placées à Cambrai, au Quesnoy et à Bouchain. Commynes explique : « Aucuns se ébahirent, vu que il ne cherchait aucun appointement [...] mais qu'il disait qu'il lui semblait qu'un roi a plus de force et de vertu en son royaume où il est oint et sacré, qu'il n'a dehors, et ceci (ces villes) était hors de son royaume. »42

Le 11.06.1478, toute la prévôté du Quesnoy était soumise à l'autorité de l'archiduc Maximilien d'Autriche. L'hiver 1479-1480 fut très rude et terrible pour les pauvres. Les « feuillars » (brigands abrités par le feuillage des bois) étaient nombreux dans le massif de Mormal.

39

Mons, Greffe féodal du Hainaut, Ier reg. de 1473, p. 476.

40

A.D.N., B/195 à 197.

41

Chroniques publiées par Georges Doutremont et Omer Jodogne, Académie royale de Belgique, Bruxelles, 1935.

42

(21)

17 1482-1506 : Philippe le Beau (De 1482 à 1493, régence de Maximilien d'Autriche).

Avec le décès de Marie de Bourgogne, le Hainaut passa à la Maison d'Autriche. Désormais, Le Quesnoy ne servit plus de résidence aux princes et ne connut plus les fêtes grandioses d'autrefois. La place forte fut placée sous l'autorité des châtelains, puis des capitaines gouverneurs. Le Quesnoy en dix ans passa de 800 à 200 feux.43 En 1492, ses environs furent mis à sac par une troupe armée. « Il ny avait personne demorés es villages du plat pays à lenthour de ladicte forest, mais s'estaient tous absentez et depaysiez. »44

En 1515, Charles-Quint fut émancipé et la régence de Maximilien s'acheva. Il s'entoura de princes et de seigneurs des Pays-Bas. Charles de Croy, prince de Chimay, fut son premier gouverneur. Les Hennuyers ignoraient qu'aux chaînes d'or bourguignonnes allaient succéder les chaînes de fer de leurs libertés perdues.

25 La domination espagnole : 1515-1555 : Charles-Quint.

Charles-Quint concentra en 1521 ses troupes à Valenciennes face à celles de François Ier qui occupaient la rive gauche de l'Escaut. Cependant l'affrontement n'eut pas lieu.45

De 1514 à 1518, la peste fit rage au Quesnoy, et au cours de l'hiver de 1517, dans le parc du château, en trois nuits, « leups et chiens (...) avaient estranglet et menget que bisses et daings (biches et daims) XX ou XXIII ».46

En 1522, après la chute de Landrecies, afin de protéger Le Quesnoy, les troupes impériales logèrent dans les villages voisins de Mormal. Elles enlevèrent « à lenthour dudit Quesnoy chevaulx kars karettes et chartons et laboureurs par forche. [...] (Ceux qui protestaient étaient) « tuez et batus et les aultres contrains se sauver en la dicte forest et aultres bois la enthour ». Elles détruisirent les cerfs, biches et daims du parc du Quesnoy. Des habitants furent emmenés comme prisonniers par les Français, tels « Colart Castain demeurant au Blan Cheval empres Gomegnye ».47 D'autres furent tués ou moururent de la peste. Dès 1522, un décret impérial fit de l'inquisition une institution d'Etat. On poursuivit les réformés de Valenciennes. En 1529, l'empereur décréta que tout hérétique périrait, les hommes par le fer et les femmes par la fosse.

Les biens des fugitifs furent confisqués et brûlés. Ainsi, à Gommegnies, les héritiers de Jehan Fontaine, « merrenier », furent dépossédés des terres qu'ils possédaient en un lieu « con dist le

blanc cheval ».48 La « cense » (ferme) de Nicolas Vivien, à Marchies, entre Gommegnies et Preux-au-Sart, fut brûlée. Il en fut de même, à Gommegnies, de la cense d'Hitonsart qui appartenait à Nicolas de la Fontaine, dit Wicart, et à Louis du Poncheau. Les prisons étaient tellement pleines de protestants, qu'après enquêtes à Frasnoy et Gommegnies, notamment, on fit, en 1568, à Bavay, le procès de 17 hommes et femmes que l'on n'arrêta pas « ne sachant ou

les mettre. »49

Charles-Quint ordonna le 26.04.1536 « pour le bien et fortiffication de sa ville du Quesnoy le Comte » que les arbres du parc du Gard soient abattus « et les terres du dit parcq mises à usance de labour ».50

43 GILOTEAUX (P.), op. cit. 44 A.D.N., B/8064.

45 GUARISSON (J.), Royaume, Renaissance et Réforme, 1483-1559, Paris Seuil, 305 p. 46 A.D.N., B/9098.

47 Ech. Gommegnies E 549. 48

Ech. Gommegnies E/960 (1541).

49

MATHIEU (D.), op. cit., p. 474.

(22)

18 En 1537, les troupes de François Ier ravagèrent le sud du Hainaut. En 1542, le roi de France tenta à nouveau de conquérir cette province ; il y pénétra par Valenciennes, fit raser le château d'Aymeries construit sur une île de la Sambre et celui de Berlaimont, mais ne put s'emparer de Mons. Charles-Quint logea au Quesnoy le 19 octobre pendant que ses troupes assiégeaient sans succès Landrecies.51 Il prit des mesures pour que les remparts soient entièrement entourés d'eau. De plus, il ordonna que ce qui restait du bois du Gard soit complètement défriché. Ainsi, la vision fut totalement dégagée jusqu'à la forêt.

En 1552, Henri II qui avait conclu un accord avec les protestants allemands ravagea lui aussi le Hainaut. Il s'empara de Maubeuge et de Bavay. Si les Français détruisirent les récoltes, dépouillèrent les églises, rançonnèrent, déportèrent ou massacrèrent les paysans, les Impériaux firent tout autant de dégâts, ils rasèrent les habitations pour établir leurs campements, volèrent le bétail, le charroi, le fourrage et les vivres et créèrent de telles dévastations, famines et morts que la peste s'en suivit.

Le 23.06.1554, « fust bruslé et destruit le beau bourg et chasteau de Gommigny » par les Français.52

Il fallut la paix du Cateau-Cambrésis, en avril 1559, pour que les Hennuyers puissent compter leurs pertes et leurs deuils.53

1555-1598 : Philippe II d'Espagne.

En 1559, Philippe II confia la régence des Pays-Bas à Marguerite de Parme et nomma le comte de Berghes au gouvernement du Hainaut. Les persécutions contre les protestants furent renforcées.

Philippe II envoya aux Pays-Bas une armée de 24.000 hommes commandée par Ferdinand de Tolède, duc d'Albe, longtemps « de sinistre mémoire » en Hainaut.

Le 24.08.1566, un millier de protestants appelés « gueux » ou « briseurs d'images » envahirent Valenciennes et dévastèrent les églises des environs. La menace fut telle que, le 24 novembre, la garnison du Quesnoy dotée de 80 canons attaqua les Huguenots retranchés dans Valenciennes. Ceux-ci se rendirent le 23.03.1567°; les Espagnols exercèrent une répression sévère qui mécontenta les habitants. Un grand nombre de protestants hennuyers s'enfuirent en direction de la Hollande. Ceux qui ne purent suivre le chemin de l'exil se réfugièrent dans les bois et, sous le nom de « Feuillards » terrorisèrent la région.

Prétextant la présence de 400 calvinistes français dans Valenciennes, le duc d'Albe abandonna la ville au pillage de la soldatesque espagnole. Le 12.11.1568, les troupes protestantes du prince d'Orange, agissant par surprise, mirent en déroute les soldats espagnols sous les murs du Quesnoy dont elles s'emparèrent.

Elles détruisirent les moulins et mirent le feu à de nombreuses fermes (Marchies, Hitonsart...) de Gommegnies et de ses environs. Celles du duc d'Albe en firent autant.54

En mai 1572, les Huguenots aidés par les Français reprirent Valenciennes. Puis, les Espagnols incendièrent une partie de la ville et, pendant huit jours, la mirent à sac.

51

L'expression espagnole « mas villaco que las trancheras de Landrecies » (plus mal construit que les tranchées de Landrecies) date de cette époque.

52

RABUTIN, Commentaires.

53

BOHY (G.), op. cit., T. II, p 22.

54

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19

Les contributions supplémentaires qui furent demandées aux Hennuyers pour reconstruire Valenciennes, furent mal accueillies par les habitants. Ceux du Petit Wargny déclarèrent qu' « ilz sont de la terre de Gommegnies et qu'ilz feront comme eulx, encoire qu'ilz soient rongez

jusques à l'estrains (la paille) ».

Le maire et les échevins de cette terre déclarèrent qu'ils n'avaient pas « auctorité d'accorder

aucune chose et qu'ilz ny oseraient consentir, d'autant plus que le prevost leur avait deffendu et que les mannans du village les assommerait parce que le plus (la plupart) sont povres bosquillons (bûcherons) ».55

Au bout de sept années de répression, le duc d’Albe n'était pas venu à bout de la résistance des habitants des Pays-Bas. Philippe II se résolut à le remplacer en novembre 1573 par Luis de Requesens qui instaura un régime plus humain. L'évêque de Namur salua le départ du duc d'Albe en proclamant que « il a fait plus de mal à la religion en sept ans que Luther et Calvin avec tous leurs suppôts ».

En avril 1574, des « pilleurs et voleurs mirent le feu à la cense de Philippe Prevost à

Gommegnies, réduisant en cendres meubles et ustensilz, deux cens blanches bestes, six chevaulx, unze pieces que vaiches que veaulx (...) escripts (...) argent (...) bledz* et bois ».56 Avec les années, le mécontentement des Hennuyers s'accrut. La révolte s'étendit et, en 1580, Guillaume de Hornes, grand ennemi des Espagnols, fut exécuté au Quesnoy pour crime de haute trahison, en présence de l'évêque de Cambrai. Pour rétablir l'ordre, deux armées espagnoles commandées par le comte de Mansfeld et Alexandre Farnèse sillonnèrent pendant deux ans les environs du Quesnoy.

En 1584, « Pasquier de lattre dit le brezetier natif de Gommegnies », voleur de chevaux, « vivant de proye et larchins grand jureur blasphemateur et renyeur du nom de dieu » fut pendu « à l'entrée de Mormal du costez du Jolimetz ».57

Vers 1592, Guichardin, dans sa Description des Pays-Bas décrit un bois de Mormault bordé de bois, de bosquets et de pâturages couverts d'arbres fruitiers.

Pour sa part, Désiré Mathieu précise qu'en 1575, le seigneur de Gommegnies avait donné à son prévôt le « trieu de Grant Sart » situé contre Mormal, au sud du bois d'Erpion. Ce « trieu » fut peu après défriché et divisé en petites portions louées à des habitants. Dès lors, le hameau de Grand-Sart pouvait se développer.

Désiré Mathieu écrit plus loin : « Si les défrichements ont paru aux historiens particulièrement

importants aux XVIe et XVIIe siècles, c'est parce qu'ils manquaient de renseignements sur les défrichements antérieurs. Mais il y avait au XIVe siècle aux carrefours et, ça et là, dans les vallées, des cultures, des prés, des viviers que les guerres ou les inondations transformèrent de temps en temps en « places vagues ».58

1598-1621 : Les archiducs Albert et Isabelle.

Née à Ségovie en 1566, Isabelle épousa l'archiduc Albert d'Autriche. Alors que celui-ci était d'une austère piété, la fille de Philippe II et d'Elisabeth de France avait un caractère aussi amène que jovial. Le 23.02.1600, « leurs Altesses firent leur entrée triomphale en la ville de Mons ».

Une garnison forte de 3.000 hommes fut placée au Quesnoy. Faute de caserne dans la ville, les hommes furent logés chez l'habitant.

55 A.D.N., B/8136 (1573). 56 A.D.N., B/8135. 57 A.D.N., B/10803.

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Au début du XVIIe siècle, les souverains ordonnèrent « la déclaration de tous les héritages

voisins de la forrest de Mormal ». Deux registres59 nous fournissent la liste et la position des propriétés riveraines.

Du sud vers le nord, on trouvait à Gommegnies : plus de 6 bonniers du baron de Gommegnies dits « la Haie* de Bailleu », le bois de Carnoy de la communauté de Gommegnies, le bois des maisnilz (bois dame Agnès) du dit baron, 11 mencaudées* de jardin de Louis Masure, 9 de Louis Liesnart, 7 de Nicolas Sontée, une partie du « trieu du grand sart » jusqu'au-delà du

« nouveau chemin du grand sart » (occupée par Philippe Lescouvet, J. Mathieu, la veuve De le

fosse et Dominicq Rousseau), le bois d'Erpion jusqu'au « chemin du blan cheval » et le « bois

des Ethfois » du dit baron.

C'est à cette époque, qu'à Gommegnies, le tiers de la Haie d'Hourdeau fut défriché.60

En 1613, Grobern de Helfenstein vendit la terre de Gommegnies à Guillaume de Hamal et de Moucheaux qui fut créé comte de Gommegnies en 1614.61

En 1617, la terre fut saisie puis vendue à Christophe van Etten.

En 1635, Vladislas, comte de Furstenberg, seigneur de Gommegnies, fit relief de sa terre pour son fils mineur François Christophe.

Cependant, les hypothèques et les obstacles dressés par la Cour de Mons l'obligèrent à céder Frasnoy à Josse de Hertoghe, le Petit Wargnies à Nicolas Brassart et le fief du Planty de Preux-au-Sart à Michel Balicq.

Ainsi fut définitivement démembrée la terre de Gommegnies.62

La Haie de Bailleul située contre Mormal fut divisée en parcelles qui furent transformées en terres labourables, jardins, prés et pâtures.63

1621-1665 : Philippe IV d'Espagne.

Le 01.12.1633, Isabelle, âgée de 67 ans, mourut. Elle n'avait pas de descendance, et, comme convenu, ses provinces revinrent à l'Espagne. De ses 35 années de présence aux Pays-Bas qui correspondirent à une période de paix, les habitants du sud du Hainaut ont gardé longtemps un heureux souvenir.

Pourtant, « quoique bien intentionnée, elle n'a, par sa totale soumission aux volontés de Madrid, apporté à nos maux aucun soulagement. [...] Le poids des impôts, la peste qui par deux fois ravage Mons, les déprédations des troupes espagnoles font le reste. En 1626, les vivres coûtent de trois à quatre fois plus cher que les années précédentes. Le prix du froment est si élevé que le peuple ne mange plus que du pain d'avoine dont il maraude les épis à demi mûrs. Le vagabondage prend des proportions effrayantes. Plus de la moitié du sol appartenant aux seigneurs et aux abbayes, la plupart des manants doivent vivre de la culture d'insuffisants courtils. [...]

Dans ce morne bilan, une seule œuvre constructive : la promulgation en mars 1619 des « chartes nouvelles du Pays de Haynaut », effort remarquable d'unification et de codification du droit hennuyer, tel qu'il restera en vigueur jusqu'en 1794 »64, année qui verra le nord de cette province intégré à la République française sous le nom de département de Jemappes.

C'est, sans doute, par contraste avec le temps des guerres qui, à partir de 1635, eut le Hainaut comme théâtre que ses habitants ont si longtemps regretté l'heureux temps des archiducs.

59 A.D.N., B/9683 et 9684. 60 A.D.N., B/9297. 61 A.D.N., B/12026. 62 A.D.N., B/10588, 10591 et 12110. 63 A.D.N., B/2683.

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