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Ionisation des diélectriques liquides. Application aux
rayons cosmiques
C. Bialobrzeski
To cite this version:
IONISATION DES
DIÉLECTRIQUES
LIQUIDES.
APPLICATION AUX RAYONSCOSMIQUES
Par M. C. BIALOBRZESKI
(1).
Sommaire. 2014 L’auteur donne un aperçu des résultats des travaux récents sur l’ionisation des
diélec-triques liquides appartenant à la série des carbures d’hydrogène.
On a réalisé des mesures précises de la mobilité et du cofficient de recombinaison des ions : produits par les rayons X dans ces liquides. Il y existe trois sortes d’ions: deux ions positifs et un ion négatif de
mobilité intermédiaire.
La relation entre la mobilité u et le coefficient de viscosité ~ est de la forme $$ u =
A~ - 3/2.
Les diélectriques liquides ont été appliqués aussi à l’étude des « sauts » d’ionisation provoqués par les rayons cosmiques.
1. Introduction. - Dans le laboratoire de
physique
théorique
de l’Université de Varsovie sontpoursuivies
depuis
trois ans des recherches sur l’ionisation desdiélectriques liquides
par les rayons X. Onpeut
les considérer comme ledéveloppement
des travaux quej’avais
faits,
il y aplus
d’unquart
desiècle,
au labora-toire duCollège
deFrance,
sous la direction de moncher maître et ami M. Paul
Langevin,
et ensuite à l’Université deKieff,
oùj’étais
professeur
de 1914jus-qu’à
1919. Ainsi se formèrent les liens d’admiration et de reconnaissancequi
me rattachent à la sciencefrançaise.
C’estpourquoi,
lorsque
les dites recherchesont abouti à des résultats
dignes
d’intérêt,
je
me suisproposé
de venir les exposer à la SociétéFrançaise
de
Physique
dontj’ai
l’honneur d’être membredepuis
1909.J’exprime
maprofonde gratitude
auConseil de la Société de l’honneur
qu’il
m’a fait enm’invitant de
prendre
part
aux Conférences dePâques
comme conférencier. Mes remerciements vont tout
particulièrement
à M.Darmois,
le trèsdistingué
etactif secrétaire de la
Société, qui
apris
l’initiative de cette invitation.Sir J. J.
Thomson,
au début de ses recherchesmémorables sur le passage de l’électricité à travers les gaz, a observé que la conductibilité des
diélectriques
liquides
et solidesaugmente
sous l’action des rayons X.Cette observation a été contestée par d’autres
expéri-mentateurs. La
première
étude réussie de l’ionisation desliquides
par les rayons X et ceux deBecquerel
est due à PierreCurie,
qui,
à l’aide d’undispositif simple
et
efficace,
montra le caractèreionique
de la conducti-bilité d’une série deliquides
isolants tels que l’éttler depétrole,
l’airliquide,
le sulfure decarbone,
le tétra-chlorure decarbone,
lebenzène,
l’amylène,
l’huile deparaffine ($).
Ces recherches ont été
reprises
d’unefaçon
systéma-que par lephysicien
allemand M.Jaffé,
dont lepremier
(1) Conférence faite devant la Société française de Physique le 21 avril 1936.(2) P. CuRiz. C. R. 1903,134, 420.
-travail a été fait à Paris au laboratoire de Curie
(’).
M. Jaffé a établi entre le courant et lechamp
élec-triques
une relation de la forme : i-- f (E) +
c F(1),oû
f (E)
devient constante àpartir
d’une certaine valeur élevée duchamp E,
c est un coefficient constant. On adonc aux
champs
élevés : i = a+
cE( ~),
a,correspon-dant au courant de saturation dans les gaz ionisés. Ainsi le courant dans les
liquides
ionisés consiste endeux
parties,
dont l’une estanalogue
au courant dans les gazionisés,
l’autre suit la loi d’Ohm. La nature de laconductibilité,
dontdépend
cette deuxièmepartie
ducourant,
restejusqu’ici
peu éclaircie.M. Jaffé se servait d’une
préparation
contenant20 mg de chlorure de radium comme source de
rayon-nement : -. l’action ionisante était due
uniquement
auxrayons y.
Vers l’année 1908 commencent les
premières
tenta-tives de mesure de la mobilité des ions dans lesdiélec-triques liquides.
Des mesures exactes avaient été faitesen 1910 par M. Jaffé dans l’hexane
(CbH1 J
à l’aide de la méthode de M.Langevin (2).
La mobilité de l’ion po-sitif s’esttrouvée égale
à 6,03.10-4
cm ~ sec
celle devolt : cm,
l’ion
négatif
à~,17.9.0-l~.
Ainsi les mobilités d’ions for-més dans l’hexane sous l’action des rayons y sont-ellesdu même ordre de
grandeur
que celles d’ionsélectro-lytiques,
c’est-à direquelques
milliers de foisplus
petites
que les mobilités des ions gazeux souspression
normale.On
peut
mentionner encore le travail de van derBijt,
qui
étudiaitprincipalpment
le coefficient de recombi-naison des ionsproduits
par les rayons y dansl’hexane ;
il trouva que la loi de recombinaison deJ. J. Thomson
dn - -
an 2(3)est
exactementremplie,
dtn
signifiant
le nombre d’ions àl’instant t,
a le coeffi-cient de recombinaison(3).
(J) G. JAFFÉ. J. Physique, 1906, 5, 262
(2) G. JAFFÉ. Ann. Physik, 1910, 32, 148.
(3) V. DER BIJL. Ann. Physik, 1912, 39, 183.
330
Après
lagrande
guerre laquestion
de l’ionisation desliquides
n’a presque pas été abordée par lesexpé-rimentateurs. On a
prêté,
enrevanche, plus
d’attentionà la conductibilité naturelle des
liquides isolants,
sur-tout dans des buts
techniques (4).
La conductibilité enquestion
est extrêmement sensible auximpuretés.
Lesspécimens
dits purs du commerce ont une conductibilité de l’ordre de 10-10 à 10-12 Q-1 cm -1. A l’aide des pro-cédéschimiques
depurification joints
aux distillationsrépétées,
onpeut
réduire la conductibilité de 1hexane,
par
exemple,
jusqu’à
cm-’. Pour achever lapurification
il est souvent nécessaire de soumettre leliquide
à l’actionprolongée
d’unchamp
électrique
intense
qui
en extrait les restesd’impuretés
électro-lytiques.
En 1908 M. Jaffé s’estproposé
de savoir si la conductibilité résiduelle de l’hexane estindépendante
des actions ionisantes extérieures. Il a conclu de sesexpériences qu’au
moins 69 p. 100 de la conductibilité naturelle de l’hexanesoigneusement purifié
a sonori-gine
dans l’influence des radiations extérieures(2).
Maintenantje
diraiquelques
mots de mes recher-chespersonnelles
sur lesujet
qui
nous occupe. Durantmon
séjour
au laboratoire de M.Langevin j’étudiais
l’ionisation des
diélectriques
solideset,
enparticulier,
celle de la
paraffine
dure extraite de l’ozokérite auvoisinage
deson point
defusion (") .
Lesexpériences
surl’ozokérite
ont conduit à la conclusion que lesvaria-tions
du courant d’ionisation avec latempérature
etpendant
lechangement
d’étatproviennent
presque exclusivement dechangements
de mobilités des ionsqui
letransportent.
A Kieffj’ai
fait en 1911 un travailsur l’ionisation des
diélectriques liquides
appartenant
à la série des carburesd’hydrogène
saturés,
dont la formulechimique
est(’).
Mon but était de comparer les mobilités des ions dans les
liquides analogues,
àtempérature
d’ébullition deplus
enplus
élevée et de lesrapporter
à des valeurscorrespondantes
de la viscosité. Je n’ai pas pu faire des mesuresprécises
à défaut de moyensexpérimen-taux suflisants :
je
nedisposais,
parexemple,
comme sourced’ionisation,
que d’uudemi-milligramme
de bromure de radium. aNéanmoins
les résultats obtenusétaient
très encou.rageants.
La sommedes
mobilités desions,
queje
déduisais de la
comparaison
du courant de saturationavec le courant d’ionisation sous une
petite
différence depotentiel,
diminuerégulièrement
à mesure que la vis-cositéaugmente ;
la diminution cstplus rapide
que l’inverse du coefficient de viscosité.2.
Expériences
sur la mobilité des ions dans la série des carburesd’hydrogène liquides.
-- Cetravail a été le
point
dedépart
des recherchesqui
ont(i) Voir par ex. : A. NiKURADSE. Das 1934,
Berlin.
(2) G. JAFFÉ. An?2. Physik, 1908, 25, 263.
(3) C. BIALOBJERKI. Le RadiuTn, 19tO, 7, 48,16.
(4) C. BiALOBjERKt. Le Radiul1l, 1911, 8, i Voir aussi :
L’ionisa-tion des diélectriques solides et Kieff, 1911, (i2s p.) [en russe].
été
poursuivies
par mon élève M. I. Adamczewskien 1933 et 9 934
~1).
Leur but était
précisément
ladétermination,
à l’aide d’une méthode aussiperfectionnée
quepossible,
de la mobilité des ionsproduits
par les rayons X dans la série des carburesd’hydrogène
liquides comprenant
5membres,
à savoirpentane
(Cr)I12),
hexane(C6II14)’
Fig. >l.
hcptane
(C-’H")’
octane(CsH,8),
nonane(C,H,,).
Les mobilités devaieul t êtrecomparées
aux coefficients deviscosité
correspondants.
Lesliquides
ont étépurifiés
et débarrassés d’eau avec un extrêmesoin,
cequi
est la condition essentielle pour l’obtenlion d’une conducti-bilité résiduelle minime(de
l’ordre
de 10-19 Q-1cm-1).
Fig. 2.
Pour la mesure des mobilités M. Adamczewski se
servait
principalement
de la méthode de M.Langevin.
Quelques
mesures ont été faites par deux méthodes auxiliairesdéjà appliquées
auparavant
par MM. Jafféet v. d.
Bijl.
Je vais
rappeler
leprincipe
de la méthodeingénieuse
de M.Langevin
(’).
Supposons
qu’un
gaz estionisé,
à l’aide desrayons X
(’) .hDAMCzBM.sKi. Rull. de l’ cad. Pol., mai-juillet 1934, p. 217. Ilhys. Polonica, 3, p. 225. L’exposé plus détaillé vapdl’aiLre dans les J/// //t/$î’M.
par
exemple,
entre les armatures A et B d’unronden-sateur
plan.
Nousparlons
d’un gazpuisque
lephéno-mène d’ionisation dans les
liquides
comme nous ver-rons tout àl’heure,
est un peuplus compliqué
quedans les gaz.
Fib. 3.
Lorsque
l’état d’ionisation stationnaire estatteint,
on
supprime
l’action ionisante et onapplique,
à uninstant que nous prenons comme initial
(t == 0),
unedifférence de
potentiel
entre les électrodes z1 et B. Lesions se mettent en mouvement dans des directions
opposées
et transmettent leurcharge
aux électrodes :admettons que l’électrode B reliée à l’électromètre
reçoive
unecharge
positive.
Au bout d’untemps
variable t renversons le sens duchamp électrique
et laissons-leagir
assezlongtemps
pour que tous lesions encore
présents
dans le gaz en suient éliminés sur les électrodes. Faisons le bilan de lacharge
reçue par l’électrode B ennégligeant
l’influence de la recombinaison et de la diffusion ainsi que du manque d’uniformité d’ionisation. Soient n le nombre d’ions dans l’unité devolume,
L? l’intensité duchamp
électrique,
e lacharge
d’union,
ut et U2 les mobilitésdes ions
positifs
etnégatifs respectivement.
L’électrode B recevra
pendant
letemps
t unecharge
positive
neu,Et
par unité de surface. Lacharge
néga-tivetransportée
dans lemême
temps
à l’électrode Asera
neu2Et
et il il en restera encore ne(1 -
u2Et)
entre les électrodes(par
unité desurface), 1
étant la distancedes
électrodes :
cettedernière
charge, après
renverse-ment du
champ,
sera recueillie par l’électrode B.La
charge
totale mesurée parl’électromètre
relié à cette électrode aura la valeurSoit en
augmentant
letemps t
nous attein-drons le momentti = l , ,
(
où tous les ionsnégatifs,
plus rapides,
seront recueillis par l’électrode A.Alors,
pour les
temps
lacharge
de Bs’exprimera
par(6)
l
Enfin,
au moment t2== _1"’
7)
toute lacharge
posi-u, L
tive nel
produite
par les rayons X esttransportée
surl’électrode B et l’accroissement du
temps
n influeplus
sur sa valeur
{)3
= nel(8).
Portons lestemps
t del’application
duchamp
dans la directionprimitive
en abscisses et la
charge
Q
correspondante
en ordonnées. Les trois stades discernés par nous serontreprésentés,
eu vertu deséquations (4), (6)
et(8)
par troissegments
droits d’une
ligne
brisée,
dont le troisièmesegment
estparallèle
à l’axe des abscisses(fig. 1, 2, 3).
La mesure des
temps t1
et t2
correspondant
auxpoints
d’intersection de cessegments
nous donned’aprés
(5)
et(7)
les valeurs ug et 2c~ des mobilités desions. S’il y avait
plus
de deux sortes d’ions de mobi-litésdifférentes,
nous aurions de nouveaux coudes surla
ligne
brisée et nos considérationss’appliqueraient
sans modification.
En ce
qui
concernel’application
de la méthode deM.
Langevin
auxdiélectriques
liquides
1VI. Adam-czewski y a introduit desperfectionnements
impor-tants. - M. Jaffé seservait pour la mesure des
temps
t,et t,
d’unpendule
de Helmholtz à l’aideduquel
il1
pouvait
mesurer les intervalles nedépassant
pas 10
sec. 10 Il enrésultait,
en tenantcompte
des valeurs des mobilités dans les formules(5)
et(7),
la nécessitéd’augmenter
lechamp E
et de diminner la distance des électrodes. M. Jaffé a dû faire usage dechamps
del’ordre de 10 0u0
volt,
les
distances des électrodes ne cmdépassant
pas un milimètre etdemi,
cequi
n’était pasavantageux:
d’unepart,
le nombre d’ionsproduits
dans des couches minces duliquide
devient insuffisant etl’influence de la diffusion se
fait sentir ;
d’autrepart, les
champs
élevés sontsusceptibles
de provoquer des per-turbations de la conductibilité desliquides
isolantes.--Après
quelques
essais M. Adamczewski a eu recours à la machine d’Atwoodqui
se montra excellente pourla mesure d’intervalles de
temps
allant de0, t
sec à 10 sec,particulièrement avantageux
dansl’application
de la méthode de M,Langevin
auxdiélectriques
liquides.
En
mêmetemps l’emploi
de la machined’Atwood
permettait
l’exécutionautomatique
desphases
d’unemesure, notamment
la
suppression
de l’actionioni-sante,
l’établissement
duchamp,
renversement de sadirection,
etc, A ce but servait lejeu
des
interrupteurs
et des relais
disposés
lelong
de
l’échelle
de lamachine.
La durée de la mesure visant
à l’obtention d’un
point
sur laligne
brisée deLangevin
étaitd’environ
25 sec, la lecture de l’électromètre incluse. L’ac-tion des
champs
de deux directionsopposées
avait la durée de3,6
sec dans laplupart
des mesures. Pour éviter les déviationslarges
et violentes del’aiguille
de l’électromètre au moment del’application
duchamp,
lacharge
était recueillie dans un condensateur auxiliairequ’on
reliait,
à laphase
finale d’une mesure, à l’électro-mètre. L’ensemble dudispositif
estreprésenté
sur lafigure
4.Le condensateur contenant le
liquide
étaitidentique
à celui dontje
m’étais servi dans mon travail surl’ioni-sation des carbures
d’hydrogène.
332
cylindrique
en laiton. L’armaturesupérieure
commu-niquant
avec l’électromètre consiste en undisque
d’aluminium rivé au bord d’un
cylindre
de laiton creuxentouré d’un
cylindre
degarde
avec anneau. Leliquide
étudiéremplit
une cuvette de verre, dont lefond est traverqé par une
tige métallique
munie d’unpas de vis sur chacune de ses extrémités. L’extrémité
supérieure supporte
undisque
de laitonqui
constitue 1 armature inférieure du condensateur. Par sonextré-mité inférieure, la
tige
se visse dans un bouchon d’am-broïde. Celui-ci se trouve fixé sur une vismicromé-trique
traversant le fond de la boîte.Fig. 4. _
Le
long
de son axe estpercé
uncanal,
par où passe un filmétallique,
à l’aideduquel
oncharge
l’armature inférieure. Ce fil est isolé de la vis par uncylindre
d’ambroïde. En tournant la vis on
déplace
la cuvetteet,
parconséquent,
la distance des deux armaturespeut
varier d’unefaçon
continue. Un cerclegradué
etune échelle
permettent
decompter
les tours et les fractions d’un tour de la vis. Dans lecylindre
extérieurse trouve une fenêtre de verre laissant passer, sans
absorption
notable,
lerayonnement
X ou y,qui
ioni-sait leliquide parallèlement
aux électrodes. Onpeut
naturellement faire passer lerayonnement
dans la directionperpendiculaire
aux électrodes.Le
rayonnement
X était fourni par un tube deSee-mann
métallique
démontable avec une anticathode de cuivre. Legénérateur
de haute tension était de laCom-pagnie
générale
deradiologie
etcomportait
undispo-sitif
autorégulateur
qui permettait
de maintenir à 1 pour 100près
la constance de la tension dans le cir-cuit du tube à rayons X. Pendantl’expérience,
le tube était évacué par deux pompes : l’une rotative àpa-lettes,
l’autre à condensation de vapeur de mer-cure.L’utilisation des rayons X comme
agent
ionisantpré-sente des
avantages
considérables. Avec les rayons ydu
radium,
dont on se servait presque exclusivementjusqu’ici,
il est difficile d’éviter l’actionperturbatrice
durayonnement
diffusé. Deplus,
onpeut
atteindreavec les rayons X des ionisations
incomparablement
plus
puissantes.
Avec lapréparation
contenant 10 mg de bromure pur deradium,
M. Adamczewski a observédans
l’hexane un courantqui
était environ 300 foisplus grand
qu’en
l’absence durayonnement,
tandis que les rayons Xproduits
à la tension de 41 kV et avecle courant de 5 mA dans le circuit du tube
augmen-tent le courant naturel 160 000 fois. Aucune
perturba-tion
provenant
des rayons diffusés n’estperceptible
avec le tube de Seemann.
Considérons maintenant les résultats des recherches. Le
perfectionnement
techuique
de la méthode acon-duit immédiatemeut à une découverte
inattendue,
à savoir l’existence dans tous lesliquides
étudiés de trois sortes d’ions de mobilitésdifférentes ;
deux ionspositifs
et un ionnégatif,
dont la mobilité est intermé-diaire entre celles des ionspositifs.
L’existence du troisième ion se traduit par laprésence
du troisième coude sur laligne
briséereprésentant
lacharge
en fonction dutemps
dans la méthode deLangevin.
_ Fig. 5.
On
pourrait
être tenté d’attribuer ce nouveau coude à l’influence de la recombinaison.Or,
M. Adam-czewski a moditié de diverses manières les condi-tions del’expérience :
parexemple,
dans une série de mesures, il ionisait leliquide
dans la directionperpen-diculaire aux armatures du condensateur : les résul.
tats restaient exactement les
mèmes.)
Pour la détermination du
signe
desions,
M. Adam-czewski a fait usage d’une des deux méthodes auxi-liaires dont nous avons fait mention.Sur les
figures
on voit lesspécimens
delignes
deLangevin
tracées avec lespoints
obtenusexprimenta-lement. On y
distingue
nettement trois coudes danstous les
liquides
étudiés.Il est à noter que les
lignes
brisées deLangevin
sontplus régulières
dans le cas deliquides
que dans celuiDans le tableau sont réunies les données
expérimen-tales obtenues pour
cinq liquides
étudiés.Lorsqu’on
passe d’un membre de la série ausuivant,
la molécules’agrandit
parl’adjonction
d’un groupeCII ; il
s’en-suit l’accroissementsystématique
de latempérature
d’ébullition,
de la densité et du coefficient de visco-sité. En mêmetemps
la mobilité des trois sortes d’ions créées par lerayonnement
diminueplus
vite que croissent lesgrandeurs
énumérées.M. Adamczewski a trouvé que la relation entre la
mobilité de tous les ions et la viscosité du
liquide
3
est bien
exprimée
par la formule : u =A r 2
(9),
udé-signant
lamobilité, -1
le coefficient de viscosité et A uneconstante dans la série des
liquides
ayant
des valeurs dif-férentes pour trois sortesd’ions,
à savoir :Ai==i ,5.10"~ ~
1A, == 0,85.10-7, A3
=0,53.10-7
(u
étantexprimée
en
- ;
il est intéressant de noter queA,-3A3.
sec~
cm
(Remarquons
que dans notre série desliqvides,
le coefficient de viscosité -1 varie entre0,0025
et0,008.)
Le
problème
se pose de vérifierl’applicabilité
de cette relation dans des limitesbeaucoup plus
larges
de variationsde "14 :
le manque des donnéesexpérimen-tales ne
permet
pas de faireprésentement
cettecom-paraison.
M. Adamczewski a trouvé une indication en
prenant
la valeur de la somme des mobilités des ions dans l’huile de vaseline
=
Î
0,97. ~0-~
qui
a étésec/
cm
/
déterminée par moi dans le travail de
1911 ;
MM. Szi-vessy et Schâfer ont trouvéplus
tard une valeur dumême ordre. La viscosité de l’huile de vaseline
est,
comme ordre de
grandeur,
1 000 foisplus
grande
encomparaison
de l’hexane parexemple.
L’accord avecla formule
(9)
s’est trouvébon,
mais l’incertitude des donnéesnumériques
nepermet
pas de tirer descon-clusions hâtives.
Il est
possible,
enanalysant
leslignes
brisées deLangevin,
d’évaluer lerapport
des nombres d’ionspositifs ayant
des mobilités différentes.Cependant
l’exactitude de cette détermination est faible. M. Adam-czewski trouve que lerapport
ni
du nombre d’ionsn3
rapides
à celui d’ions lentsparaît augmenter
àme-sure que la molécule du
liquide
devientplus
com-pliquée
etparaît
diminuer a,vec l’accroissement d’in-tensité durayonnements
ionisant. Enappliquant
hypothétiquement
au mouvement des ions la for-mule bien connue de Stokes pour la vitesse du mou-vement d’unesphère
dans unliquide
sous l’actiond’une force constante on
peut
calculer le rayon des ions en admettantqu’ils
ont la formesphérique.
Combinons. e
les formules de Stokes et d’Adamczewski : u =
-6
3
AI
il en résulte que pourchaque
sorted’ions,
le rayon l’estproportionnel
à la racine carrée du coefficient de viscosité.b’ig. 6.
Il serait intéressant d’examiner si
l’apparition
du troisième ion dans lesliquides
étudiésdépend
de lalongueur
d’onde durayonnement
X ionisant. M. Adam-czewski croitpouvoir
conclure de sesexpériences
quela
dépendance
enquestion
n’a paslieu,
mais,
pour enêtre
sûr,
on devraitentreprendre
une recherchespéciale.
3. Etude de la recombinaison
caractéristi-que du courant dans les
liquides
isolants.-M. Adamezewski a
complété
ses recherches sur les ions dans les carburesd’hydrogène liquides
par l’étude de leur coefficient de recombinaison. Il s’est servi dans334
Le
liquide
est ionisépendant un temps assez long pour
que lerégime
stationnaire s’établisse(30
secondes suffissent pourl’atteindre) ;
onsupprime
ensuite l’action ionisante etaprès
un intervalle detemps
va-riable t, danslequel
le nombre d’ionsprésents
diminue par suite de larecombinaison,
onapplique
unchamp
fort
qui
amène,
dans untemps
très court, tous les ionsrestants d’un
signe
sur l’électrode du condensateur de mesure relié à l’électromètre. On détermine lacharge
recueillie
Q
en fonction dutemps
1. Si la loi derecom-binaison
de J. J.Thomson,
exprimée
par la relation(~i),
est
valable,
cette fonction doit avoir la forme1;’Q -z
11Q,
-~- x’t,
oùQo
désigne
lacliarge
totale des ions d’unsigne
au moment t = 0 et i’ =-.
e
Fig. 7.
Ainsi
i/0est
une fonction linéaire dutemps.
L’expé-rience confirme
pleinement
cette relation : elle estreprésentée
sur lafigure
7pour 5
liquides
étudiésdis-tingués
par le nombre d’atomes de carbone dans unemolécule. La
tangente
del’angle
que faitchaque
droiteavec l’axe d’abscisses donne la valeur du coefficient
x’,
tandis que l’inverse de la
charge
initiale estreprésenté
par l’ordonnée dupoint
d’intersection avecl’axe d’ordonnées. Ces deux
grandeurs
diminuentrégu-lièrement,
lorsqu’on
s’avance dans la série des carburesd’hydrogène
étudiés. Enpassant
dupentane
au nonaneon voit a’ diminuerde
2,13
àD’accord avec la théorie M. Adamczewski trouva que
le coefficient de recombinaison est lié avec le coefficient
3
de viscosité par la
relation : a== B-r, 2
(10)
de la même forme que la relatiun(9).
Il y a
pourtant
unléger
écart de laproportionnalité
entre le coefficient de recombinaison et la mobilité
quand
on passe aux deux derniers membres de lasérie,
l’octane et le nonane.
D’autre
part
la diminution de1 JQo
montre que le nombre d’ions n l’état stationnaire dans les mêmes conditions par les rayons X croit à mesure que lamolécule du
liquide
devientplus complexe.
Il ne fant pas
perdre
de vue que nos considérations concernant le coefficient de recombinaison ont uncaractère
approximatif
à cause de l’existence du troisième ion. Les deux ionspositifs
ont des coefficients de recombinaison différents cequi
fait que lecoeffi-cient moyen
qui figure
dans nos formulesdépend
dutemps.
D’ailleurs le calcul montre que les limites de lavariation
de a’ avec letemps
sont assez restreintes pourque la validité de nos conclusions ne soit pas compro-mise.
Fig. 8.
M. Adamczewski a fait encore une étude de la
carac-téristique
du courant dans lesliquides
ionisés par les rayons X. Il a confirmé la formule(2)
de M. Jaffé valable pour despotentiels
élevés. Il résulte de sesexpériences
que le coefficient cpeut-être
représenté
par la formule : c =
,1
qll,
où q
est la densité d’ionsproduits
par la
source ionisanle dans l’unité detemps,
~ la distance des électrodes.On voit donc que la conductibilité du
liquide
corres-pondant
à lapartie
ducourantqui
suit la loi d’Ohm estproportionnelle
au carré de la distance des électro-des. Reste à trouver 1explication
de cecomportement
remarquable
du courant dans desliquides diélectrique
ionisés.Je mentionnerai encore, sans entrer en détails que
ci-dessus
l’applicabilité
de la théorie de similitudedéye-loppéc
par M. Il. Mache pour des gaz ionisés.4.
Application
à l’étude des rayonscosmiques.
- En assistant aux discussions sur les rayons
co-miques
à la Conférence de Londres enseptembre
1 93fij’aperçus qu’il
seraitavantageux,
au moins dans certains cas, de se servir dediélectriques liquides
pour l’étude de ces rayons.Le
phénomène
de « sauts d’ionisation «(fonisation-stôsse)
découvert par
Hofmann,meparaissaitfacilement
accessible à cette méthode. Au cours de l’année suivante
j’ai
réalisé,
avec le concours de M.Adam-czewski, quelques
expériences
réussies,
dontje
don-nerai unexposé
sommaire(1).
Le
phénomène
enquestion
se manifestelorsqu’ou
étudie le courant d’ionisation dû aux rayons
cosmiques
à l’aide d’un
appareil enregistreur :
il seproduit
detemps
entemps
des déviationsbrusques
et considé-rables del’organe
sensible del’appareil
se traduisant par des discontinuités bienmarquées
de la courbed’enregistrement
etindiquant
la formation d’un trèsgrand
nombre depaires
d’ions(jusqu’à
7 . 101d’après
MM.A.
Compton
et R.Bennett).
Pouraugmenter
lafréquence
de ces « sauts » on fait usage de chambresd’ionisation de
grande capacité remplie
de gaz à hautepression.
Fig. 9.
Par
exemple,
les auteurs citésemployaient
unechambre en acier d’une
capacité
devingt
litresconte-nant de
l’argon
pur souspression
de 50atmosphères.
Les chocs d’ionisationpourtant
seproduisent
rare-ment : un choc auplus
en une heure si l’on tientcompte
que de chocs fournissant au moins 2.10~ ions.Dans une série
d’expériences
nous nous sommesservis
d’hexane,
dont la conductibilitéspécifique
natu-relle était de
2,3.10~~
o-i et ne variaitguère
pendant plusieurs
semaines.Je
remarquerai
que la conductibilité a diminuéjus-(1) C. BIALOBR’LESKI et I. ADAMCZEWSKI. Bill. de l’Acad. /loi,’.,
mars-avril 1935, i20.
qu’à 8,6.10-2"
0.-1 cm-i, à cause del’absorption
des rayonscosmiques, quand
on a entouré la chambrecl’ionisation,
contenant leliquide,
de blocs deplomb
ayant 5
cmd’épaisseur.
Cette chambre consiste
(fig. 9)
en un condensateurcylindrique
dont l’électrode extérieure est consti-tuée par un vase en laiton relié à unpôle
d’une batteriel~3
depetits
accumulateurs.L’électrode intérieure est un
cylindre
creux e2communiquant
avec l’électromètre à travers un bou-chon d’ambroïdeb,
fixé dans le couvercle.L’espace
entre les deuxélectrodes,dont
le volume était d’environ 800cm3,
étaitoccupé
par l’hexane.Le creux du
cylindre
intérieurpouvait
ctrerempli
parune
substance,
dont on cherchait l’influence sur la fré-quence de sauts(menu
plomb, cylindre pleiu
d’alumi-nium).
Le
plus
souvent oncompensait
le courant résiduelau moyen d’un
compensateur
de Bronsonk2
àoxyde
d’uranium(U3
0,).
Ledispositif
n’était passuffisam-ment sensible pour ce genre de recherches.
C’est
pourquoi
nous n’avons pas pu étudier les sautsfournissant moins de 3.106 ions.
’
Fig. 10.
La méthode
employée
consistait en l’observation del’accroissement
graduel
de lacharge
due au courantrésiduel dans l’hexane. Au début on notait
(toutes
les 5min)
laposition
duspot
lumineux surl’échelle;
ensuite nous avons eu recours à un
procédé
d’enregis-trement en utilisant le mécanisme
d’horlogerie
et le tambour dumicrophotomètre
couvert dupapier
photo-graphique,
surlequel
était concentrée la lumièreréflé-chie du miroir de l’électromètre. Eu
égard
à la faible mobilité des ions dans l’hexane nous avons dûappli-quer des tensions considérables allant
jusqu’à
1800 V. Dans ces conditions undéplacement
duspot
était de2 à 4 mm par
minute;
lecompensateur
permettait
de leréduire
jusqu’à
zéro ou deproduire
undéplacement
trèslent en sens
inverse,
cequi
étaitavantageux
pour l’étude des sauts. Ceux-ciprovoquaient
ledéplacement
rapide
duspot
dans le sens de l’accroissement de lacharge provenant
de la conductibilité résiduelle duliquide.
336
reprendre après
avoir monté undispositif
plus
efficace. Je donnerai les résultats d’une séried’enregistre-ments, dont la durée totale était de 51 h. Au total on a
enregistré,
dans des conditionsvariées,
65sauts,
auxquels
correspondaient
desdéplacements
duspot
supérieurs
à 2 mm.On voit que la
fréquence
des sautsest,
pour lesvolumes,
égaux, incomparablement
plus grande quand
on utilise des
liquides
diélectriques
au lieu des gaz.Cela
provient
sans doute de ce que les sauts moins fortssont
enregistrés.
Le
plus
grand
saut observé était de 25 mm(corres-pondant
à5,85.10’
ions)
Il faut tenircompte
de ce quele nombre d’ions parvenus à l’électrode reliée à l’élec-tromètre diminue à’ cause de la
recombinaison,
étant donné que letemps
du parcours de l’ion leplus
lententre les électrodes était d’environ 12 sec.
Les chiffres suivants donneront une idées de
l’in-f luence
qu’exerce
l’ambiance sur lafréquence
des sauts. 1" La chambre d’ionisation n’étant pasprotégée
et l’électrode interne restantvide,
le nombre des sautsn’était
que 2
enh;
2°Lorsqu’on
a mis autour dela chambre d’ionisation une couche d’aluminium de 5 cm
d’épaisseur
etrempli
d’aluminium l’électrode interne le nombre de sauts a atteint 13 en6,9 h;
3° Dans les conditions
analogues,
l’aluminium étantremplacé
par leplomb
on a obtenu 6 sauts en8,7
h. On voit nettement I*activitéfrappante
de l’alumi-nium dans laproduction
duphénomène
enquestion.
J’ajouterai quelques explications
concernant lesfigu-res. La
figure
10représente
la marche del’électromè-tre avec
compensation
du courant résiduel. La courbea été obtenue par l’observation directe.On voit
qu’après
2 hd’application
duchamp
le courant decompensation
l’emportait
sur le courant résiduel. La chambre d’ioni-sation était entourée deplomb
et l’électrode internegarnie
d’aluminium. Il scproduisit
7 sautsindiqués
par lesnuméros;
il y a encore deux discontinuités dontl’apparence
est moins sûre. Lacharge
Q
estexprimée
en unités
électrostatiques
X10-5 ;
ainsi le deuxièmesaut est t de
8,5
mm, cequi
correspond
à 2.10’paires
d’ions.Fig. 1 L
La
figure
11présente
desspécimens
de courbesobte-nues par
l’enregistrement
de la déviation del’aiguille
del’électromètre ;
les flèchesindiquent
respectivement
les directions :(a)
des déviations dues au courantrési-celles du courant de
compensation,
(c)
dumou-vement du
papier
photographique.
On y voit trois sauts : n° 1 de 25
mm, no2
de 14 mm, n° :1 de 15 mm.En terminant
je
croispouvoir
conclure que le pro-blème de l’ionisation desliquides
présente
unchamp
de recherches peu
cultivé,
maisapte
à fournir des résultats intéressants et desapplications
qui
ne sontpas banales.