FACULTÉ DE MÉDECINE ET DE PHARMACIE DE BORDEAUX.
A-INTÏSTÈE 1897-98 N<> 90
DE
THESE POUR LE DOCTORAT EN MÉDECINE
présentée et soutenue publiquement le 3 Jnin 1898
FAR
Raoul-Jean-Marie-Michel-Camille VIZERIE
Néà Issigeac(Dordogne), le 22 août 1874.
!MM. LANELONGUE,
BOURSIER,professeur.... Président.
professeur.... iDATTCCOM , , .
POLISSON, agrégé : .luges.
BINAUD, agrégé 1
Le Candidat répondraaux questions qui lui seront faites sur les diverses parties de l'Enseignement médical.
BORDEAUX
MBRI ME RIE Y. CAD OR ET 17 HUS: MOMTMÉJAN —-17
1898
FACULTÉ
IIEMÉDECINE
ET DE PHARMACIE DE BORDEAUXM. DE NABIAS Doyen. | M. PITRES Doyen honoraire.
PROFESSEURS :
MM.
Clinique interne.
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Le Secrétaire de laFaculté: LEMAIRE.
Pardélibération du 5 août 1819, la Facultéaarrêtéqueles opinions émises dans les !hèsesqui lui sont présentées doivent être considérées comme propres à leurs auteurs, et qu'elle n'entend
leur donner ni approbation ni improbation.
A mon Président de Thèse
Monsieur le Docteur M. LANELONGUE
Professeur deClinique chirurgicale à la Faculté de Médecine, Chevalier de laLégion d'honneur,Officier de l'Instruction publique,
Membrecorrespondantde l'Académie de Médecine, Membre de l'Académie de Bordeaux.
M. le professeur Lanelongue nous a fait le très grand hon¬
neurd'accepterla présidence denotre thèse.Nous l'en remercions sincèrement. Nous le remercions de nousavoir, dans desleçons
aussi claires que brillantes, dirigédanslaclinique chirurgicale.
Durant notre vie d'étudiant, il s'est toujours montré à notre
égard dune grande bonté. Nous lui enconserveronsune recon¬
naissance éternelle.
M. le professeur A. Moussous nous a initié à la médecine in¬
fantile. Nous le remercions des excellents conseils qu'ilnous a
donnés.
A diverses reprises, M. le professeur Badal nousa donné des
témoignages de sympathie. Qu'il reçoive l'expression de toute
notre gratitude.
Enfin, à tous ceux qui ont contribué à notre éducation médi¬
cale, merci.
DE
CHAPITRE PREMIER
DEFINITION
Il existe, dans la pratique gynécologique, un pansement peu
connu en France, et qui, par sa simplicité et les lions résultats qu'il produit, mériterait la popularité. C'est la columnisation.
On peut la définir : un tamponnement méthodique du vagin
destiné à le transformer en une colonne rigide pour servir de
soutien aux organes génitaux internes. Son principal but est
d'exercer sur les lésions inflammatoires du bassin des actions modificatrices.
CHAPITRE II
HISTORIQUE
C'est à Bozeman que revient l'honneur d'avoir pratiqué
la
première columnisation. Toutefois,c'est Talliaferro d'Atlanta
qui aemployésystématiquement cetteméthode dès 1877,
connueen Amérique sousle nom de « méthode de
Talliaferro
».Voici
les conclusions de son ouvrage :
1° La pression diminue l'afflux du sang;
2° Elle accroîtl'absorption des exsudats;
3° Elle détruit les tissus hyperplasiques par métamorphose rétrograde;
4° Elle réduit tout déplacement.
Cette méthode se répandit avec rapidité aux
Etats-Unis
:Cœ.
Turker, Rewes-Jackson, Gray-Potter adoptent les conclusions
de Talliaferro. Potter reprend ce sujet et, complète les conclu¬
sions de Talliaferro par les suivantes :
La columnisation estun bon traitement pour la rétroversion
adhérente; elle arrête l'inflammation pelvienne pér-utérine.
C'est alors que Mundé vulgarise la méthode de
Talliaferro
dans son Manuelà l'usage des étudiants et des praticiens.
TrèspopulaireenAmérique, la
columnisation
paraîtenFrance,
comme dans le reste de l'Europe, àpeu près ignorée.
La plupart des traités de gynécologie sont muets sur
la
ques¬tion. Seul, M. Samuel Pozzi, dans la dernière édition de son ouvrage, consacre quelques lignes à la columnisation.
Peu de gynécologistes emploient ce procédéque l'école
lyon¬
naise, aveclesprofesseurs Laroyenne et Condamin, a
préconisé.
Sous l'impulsion du professeur Condamin,
deux
thèses ont étéécrites sur la columnisation, celle de Dewick (1894), celle de
- 13 —
Quincicn(1895). Nous avons faità cette dernière quelques em¬
prunts.
Dans cette taculté, M. le Professeurde clinique chirurgicale, Lanelongue emploie la coluninisation. Son interne, M. de Bou- caud, a bien voulu nous communiquer des observations ; nous l'en remercions vivement.
M. le professeur Boursier exécutefréquemmentla columnisa-
tion. L andernier, il a fait une leçon clinique sur ce sujet, et
son interne, M. Fraikin, a publié cette année un travail sur la coluninisation. 11 a eu la complaisance de nous en faire part,
et denouspermettredereproduire quelquesobservations deson
ouvrage ; qu'il acceptel'expression de notre reconnaissance.
CHAPITRE III
M A NUEL OPÉRATOIRE
Talliaferro pratiquait la columnisation de
la
façonsuivante
:Ilmettait la malade dans la position génu-pectorale, et intro¬
duisait aufond du cul-de-sac postérieur, à l'aide d'une pince,
2 ou 3 plumasseaux d'ouate trempés dans la
glycérine et
rem¬plissait le reste du canal avec des tampons secs
de laine fine¬
ment cardée et bien tassée ; ou bien il trempait lalaine dans
une solution phéniquée et l'exprimait
soigneusement avant de
l'introduire dans le vagin.
On a reproché à Talliaferro de ne point
stériliser la laine.
Ce reproche est dénué de fondement, attendu
qu'à l'époque où
cet auteur pratiqua la columnisation, la
stérilisation n'était
pasconnue.
Le vagin supporte mal l'acide phénique. Sou
emploi
estdan¬
gereux et peut amener des ulcérations de la muqueuse.
Un troisième reproche adressé à la méthode de
Talliaferro
est l'emploi de la positiongénu-pectorale.
On
adit
quecette
position, sans donner de gros avantages,blessait la pudeur des
femmes, et pour ce seul motif devait être
rejetée.
Auvard, dansles Archives de tocologie, aainsi décrit son pro¬
cédé : « On applique le spéculum, puis011 verse
dans l'intérieur
» du spéculum une certaine quantité de
glycérine,
un verre à» liqueur. O11 peut, si on le juge à propos, y
ajouter
un peu» d'iodoforme.
» Avec les pinces à pansement, on
introduit
unpremier
tam-)>
pou dans le cul-de-sac postérieur, puis un autre
dans chaque
» cul-de-sac latéral ; 1111 quatrième est appliqué dans le cul-de-
» sac antérieur. Ces tampons sont faits avec de l'ouate hydro-
» phile ; leur volume est celui d'un abricot. Il faut avoir soin
» de bien appliquer chaque tampon dans le cul-de-sac vaginal,
» afin de bien le distendre. Lorsque tous les tampons sont in-
» troduits, le col utérin est enserré entre eux, et l'utérus se
» trouve maintenu par unesortede coussin circulairesurlequel
» il repose.
» Lestampons s'imbibentdela glycérineverséedans le vagin,
» il doivent rester vingt-quatre heures en place et ne seront
» retirés que par le médecin ».
La méthode d'Auvard a soulevé plusieurs objections. A part
chez lesvierges, verser de la glycérine dans le vagin est tout
au moins inutile, sinon nuisible.
De plus, il est dangereux de serrertrop fortement le tampon appliqué dans le cul-dc sac antérieur. Ailleurs nous en avons
expliqué le motif.
Enfin le tamponnement du vagin, d'après le procédé.Auvard,
se fait un peu à l'aveugle et risque de ne pas être supporté.
Voici, d'après M. le Dp Quincien, le procédé employé à Lyon
par MM. Laroyennc et Gondamin.
La femmeestplacée dans laposition dorsale ou dorso-sacréc.
On pratique la désinfection du vagin et, cette opération accom¬
plie, 011 introduit un spéculum bi-valve, fortement écarté de façon à découvrir largement le col utérin et les culs-de-sac, si
cet écartement n'est pastrop douloureux.
Il faut quinze à vingt tampons pour le pansement. Ces tam¬
pons sont formés de ouate hydrophile imbibée de glycérine.
On exprime fortement ces tampons de façon àleur laisser le volume d'une noix, la forme d'un fuseau.
On introduit d'abord le tampon du cul-de-sac postérieur, puis ceux des culs-de-sac latéraux, enfin celui du cul-de-sac antérieur qui doit être peu volumineux et peu serré, afin de ne pas gênerle fonctionnementde la vessie. Ces premiers tampons
serontsaupoudrés d'iodofornie.A part le tampon du cul-de-sac antérieur, ils doivent être assez serrés pour remplir un rôle
utile.
Amesure que le fond du vagin se comble, 011 retire le spé-
— 16 —
culuni en ayant soin de refouler les tampons avec une
pince.
Les derniers bourdonnets imbibés de glycérine ne doivent pas dépasser le plan passant par l'axe de la symphyse.
Mieux
vautne pas mettre de tamponsjusqu'à l'orifice
vulvaire,
niais rester légèrement en arrière. On évite ainsi la compression de l'urè-tlire.
C'est une pratique facile à acquérir, c'est une
habitude,
un doigté à prendre pour le degré depression.
Lapression doit
être le plus énergique dans le cul-de-sac de
Douglas; c'est
par là, en effet, que l'on atteint les lésions du petitbassin
quela
coluninisation se propose de combattre. 11est un
inconvénient
à cette pratique : la femme est, en
général, constipée. Les
tam¬pons postérieurs exercent une
compression
du rectum,d'où
stase des matières fécales. On obviera à cet inconvénient en recommandant aux columnisées des lavements fréquents si cela
est nécessaire.
Si la malade éprouve de la gênede la miction,
l'ablation d'un
oudeuxtampons,ablationqu'elle peut faire elle-même,
viendra
àbout de ce malaise.
Combien une coluninisation peut-elle demeurer en place?
Quincien cite des femmes ayant gardé leur pansement quinze
etvingt jours, sans qu'il exhalât de mauvaise odeur.
Toutefois,
il reconnaîtqu'ilest bon de changerle pansement tous les
cinq
ou sixjours, plus souvent ne serait pas un mal. Les
malades,
fait-il remarquer, sont immédiatement soulagées;
mais
aubout
de deux ou troisjours, par suite de la réduction des tampons,
la marche redevient difficile. De plus, après quarante-huit heu¬
res, l'action de la glycérine semble épuisée, il 11e se fait
plus
de saignée blanche et ladouleur réapparaît.
Tel est, assez rapidement décrit, le procédé employé par l'école lyonnaise. C'est celui adopté parM. ie professeur Bour¬
sier. Toutefois, il y a ajouté quelques modifications. Ainsi, il rejette l'emploi de l'iodoformedont
l'odeur
repoussante et per¬sistante 11e peut être supportée par tout le monde. Ensuite, et
cette raison a plusde poids que la précédente,
l'iodofornie
pro¬voque"fréquemment de petites «
exulcérations
».Enfin,
untroi-
- 17 —
siènic motif milite contre ce médicament. Des personnes y sont
très sensibles et présentent des phénomènes d'intoxication.
M. Boursierne bourre pas tout le vagin de tampons glycéri-
nés. Seuls les tampons des culs-de-sac et les premiers qui les
suivent sont imprégnés de glycérine.Le reste duvagin estrem¬
pli de bourrelets d'ouate trempés dans du sublimé faible et exprimés. A sa clinique, M. le professeur Boursier nous a dit qu'il n'avait jamais constaté d'accidents d'intoxication par le
mercure ni aucune irritation de la muqueuse vaginale.
Voici la pratique de M. le professeur Lanelongue :
La malade est placée dans une position genu-pectorale, posi-
sition avantageuse dans lecas derétroversionsurtout. Lapesan¬
teur agissant, le vagin estmaintenu àpeu prèsbéant, l'utérus a
une tendance manifeste àtomber enavant, etle cul-de-sac pos¬
térieur, le plus difficile à bien combler, apparaît avec toute sa
netteté, permettant pour ainsi dire de prendre l'utérus par derrière.
Le tamponnement est assuré parcinq tampons glycérinés, de
volume variable suivant le cas, mais ne dépassant pas celui
d'une noix en moyenne. Quatredeces tamponssont placés dans
chacun des culs-de-sac, le cinquième vient appuyer surle col.
Le reste du vagin est bourré jusqu'au niveau de la fourchette
pardes tampons simples de ouate hydrophile.
Chaque tampon est muni d'un filque lemalade retrouve aisé¬
ment et qui lui servira à sortir ces tampons. En effet, lorsque la
colonne de tampons doit être changée, M. le professeur Lane¬
longue, avantd'en refaire unenouvelle, fait donneràlamalade,
aulit bienentendu, une abondanteinjection vaginaled'au moins
une dizaine de litres, à une températureaussi élevée que possi¬
ble, pratique qui aide à la régression des exsudais pelviens.
Le lavement chaud quotidien est également mis en pratique
concurremment avec la colunmisation.
Vizerie 2
CHAPITRE IV
MODE D'ACTION
La columnisationjoue le rôle d'un pilier d'une
colonne placé
dans levag'inpoursoutenir l'utérus et
les
annexes.Bien souvent,
lorsqu'on pratique lacolumnisation,
cesorganessont enflammés
par cette
opération, ils perdent toute mobilité et voient leur
inflammation disparaître ou s'atténuer.
L'immobilisation n'est-
elle pas en effet le
meilleur des antiphlogistiques?
De plus, ce pansement exerce une
compression élastique très
douce, régulière, généralisée.
C'est
une sortede
massage,mais
un massage constant. Cela
contribue
àla résorption rapide des
exsudats inflammatoires. Lesadhérences ayant amené desdévia¬
tions de l'utérus disparaissent et, par
suite, l'utérus reprend
sa position normale.A côté de l'action mécanique produite par la
columnisation,
il faut remarquer l'action de la
glycérine. C'est
unexcellent
antiphlogistique; étantavide d'eau, la glycérine amène
unflux
considérable de sérosité et par suitedécongestionne
les
organes génitaux.A sa clinique, M. le professeur
Boursier
nous afait observer
que la columnisation
était
unobstacle
aucoït,
causede récidive
fréquente des lésions
génitales inflammatoires de la femme. Des
femmes demandent àla columnisationune protection contre des
maris par trop affectueux.
Notons en passant qu'il est
nécessaire
quela columnisation
soit bien faite. Les échecs sifréquentsattribuablesàla
columni¬
sation résultent souvent d'un défaut dans la technique du pan¬
sement.
CHAPITRE Y
INDICATIONS DE LA COLUMNISATION
Voici les principales
indications de la coluninisation
:Annexites anciennes.
Douglassite des Lyonnais
(paramétrite postérieure).
Rétroversion avec adhérences.
Déviation utérine parune trompe
enflammée.
Prolapsus de l'ovaire
douloureux.
Les annexites anciennes sont très amélioréespar le bourrage
du vagin. A l'observation I, est
relatée l'histoire d'une femme
souffrant depuis huit ans. Des
applications de tampons glycé-
rinés, 011 peut l'affirmer, fort
mal faites
parla malade elle-
même, n'avaient produitaucun
résultat. On fait le curettage,
la malade continue à souffrir. Au «î décembre, 011 pratique la
coluninisation ; cinq jours après, les
douleurs sont moins vives.
Un traitement de deux mois par ce procédé
améliore
à ce point la malade qu'elle sort sedisant guérie.
Mais il n'y a pas que les
annexites chroniques qui bénéficient
de la coluninisation. Des annexites subaiguës en retirent un avantage 11011 moins
précieux. A l'observation Y,
nousvoyons
une femme ayant eu des douleurs
de ventre à plusieurs repri¬
ses. Elle rentre à l'hôpital pour
douleurs violentes siégeant
dans le côtégauche du bas-ventre.
L'examen permet de diag¬
nostiquer une
salpingo-ovarite ancienne
avecpoussée inflam¬
matoire. Sous l'influence du tamponnement, la femme est
très
rapidement améliorée.Ce
sontcertainement les
casdans les¬
quels cette pratique compte
les résultats les plus brillants.
La douglassite des
Lyonnais
est uneaffection caractérisée
surtout par une
rétraction des ligaments utéro-sacrés tendus
- 20 —
comme deux cordes des deux côtés du col, et
devenus très
sensibles. Le cul-de-sac postérieur est
oblitéré
enpartie
pardes exsudats qui passent à
l'état de brides filamenteuses. Le
col de l'utérus est attiré enarrière etpeutexercer une
pression
sur le rectum. Les brides peuvent être assez
puissantes
pourcréer une antéflexion.
Dans cette paramétrée
postérieure, il
y atoujours
unétat
congestif très marqué, que
la columnisation améliorera. De
plus, le bourrage du
cul-cle-sac postérieur amène
sadilatation.
Il en résulte un assouplissement des
brides rétractées et leur
allongementprogressif.
Les résultats sontimmédiatement bons. M.
Gondaniin asoigné
par ce procédé une
femme atteinte de douglassite, Elle ne
pouvait marcher tantétait vive la douleur
;après quelques
séances de columnisation, elle put, sans
souffrance, accomplir
un trajetde 5 kilomètres.
Larétroversion avec adhérences s'améliore par le bourrage
du vagin. Dans cette
affection, les malades accusent
unesensa¬
tion de gêne et de poids sur
le fondement,
untiraillement
douloureux dans l'aine d'un seul ou des deux côtés.
Les rétroversions qui se forment ont
été classées
enréducti¬
bles, difficilement réductibles,
irréductibles.
Dans le premier cas, la
réduction faite, la columnisation est
inutile. Dans les deux autres cas, la columnisation a
rendu des
services signalés. Elle agit comme massage,
mieux
encorepuis¬
qu'elle est un massage
de tous les instants. Elle agit aussi par
glycérine. Les
glandes sécrétant davantage, le courant sanguin
s'exagère. Cela facilite
le résorption des adhérences. Peu à
peu on arrive à
réduire l'utérus. Cette réductibilité obtenue,
on pourra utiliser
le port d'un pessaire.
Les déviations utérines par une trompe
enflammée bénéfi¬
cient de lacoluniiiisation. On sait combien estfréquente
l'inflam¬
mationde la trompe cliez lesjeunes
femmes
enparticulier. Par
suite de l'inflammation, la trompe peutse
recroqueviller, et
parsuite altérer l'utérus. Elle peut amener des
adhérences, des dé¬
viations de l'utérus. Dans l'observation IV, on
voit
unefemme
— 21 —
atteinte d'annexite amenant
la latéro-version. Cette femme, qui
éprouve
de vives douleurs, est promptement soulagée par la
columnisation.
Le prolapsus
de l'ovaire douloureux est avantageusement
traité par la
columnisation. Sous l'influence d'une affection des
ligaments larges ou
de l'utérus, par le fait de son inflammation
propre, ou
du développement d'une tumeur dans sa substance,
à la suite d'une
péritonite de voisinage, l'ovaire peut contracter
dans lepetit
bassin des rapports nouveaux. Quelquefois, sans
lésion
appréciable de l'ovaire
ondes annexes de l'utérus, l'or¬
gane
tombe dans le cul-de-sac recto-utérin et cause de violentes
douleurs pendant la
marche,
oule coït. Dervich, dans sa thèse,
rapporte
le fait d'une femme souffrant depuis neuf mois, chez
qui la
marche était impossible. La sensibilité du cul-de-sac pos¬
térieurest telle que le
toucher est rendu difficile. Toutefois, on
arrive à diagnostiquer un
prolapsus de l'ovaire droit dans la
cavité de Douglas. La
columnisation est instituée; cinq jours
après la femme
vaquait à ses occupations et avait pu fournir
une marche de deux heures.
La columnisation nous
paraît pouvoir être appliquée dans
deux cas bien tranchés
qui relèvent soit de la méthode lente,
soit de laméthode rapide.
Toutes les femmes, de par
leurs conditions sociales, ne peu¬
vent se soumettre à un
traitement qui, pour être efficace, doit
être
poursuivi durant de longs mois, sans trêve, et toujours
par des
mains compétentes. Malgré l'action incontestablement
favorable qu'il
produit
surl'état inflammatoire de l'utérus et
des annexes, cepansement ne
met
pasà l'abri de ces infections
secondaires qui
prennent naissance au niveau de la cavité uté¬
rine.
Il semble donc qu'il faille
souvent faire plus, et plus vite:
nettoyer
d'abord l'utérus, le débarrasser des produits septiques
qui
l'encombrent
parle curettage. Peu après, 011 s'adressera à
la columnisation, qui aura
d'autant plus d'effet qu'elle portera
sur un organe sain et
ramolli
parle curettage.
Curetter sans tamponner
dans la suite, et tamponner sans
__ ç>2
curettage préalable sontclésactions
thérapeutiques
incomplètes.Nous nous résumerons doncen disantque, dansles cassigna¬
lés plus haut (annexite, douglassite, etc.), sans manifestations
certaines de métrite, on appliquera la columnisation. Ce sera
la méthode lente.
Dans les autres cas, où l'inflammation utérine est évidente,
on pratiquera la columnisation, mais elle sera précédée du curettage. C'est la méthode rapide. Plusieurs de nos observa¬
tions en démontrent la valeur.
CHAPITRE VI
CONTRE-INDICATIONS DE LA COLUMNISATION
Il ne faut pas pratiquer la columnisation
clans les affections
aiguës. Dansces cas,la malade ne peut, par
suite de la douleur,
supporter le pansement. Est-il
besoin d'attendre,
pourinstituer
pareil traitement, que
l'affection soit passée à l'état chronique?
Non, M. le professeur Lanelongue utilise
la columnisation dans
les états subaigus, et n'a qu'à s'en féliciter.
C'est dans
cescir¬
constances qu'on obtient les meilleurs résultats.
Une autre contre-indication de la columnisation, c'est lagros¬
sesse. Quincien cite l'exempled'une femme ayanteu deuxgros¬
sesses. Elle estatteinte d 'une douglassiteet souffre depuis deux
ans. Outre la souffrance due à son affection, elle dit ressentir
les mêmes symptômes éprouvés par elle au
début de
sesdeux
grossesses précédentes. Légerretard
de règles. Quoique
présu¬mant une grossesse, Quincien instituela
columnisation. A l'épo-
oùil perd de vuecette femme,
les règles n'avaient point
reparu.Plus loin, l'auteur ajoute : « Le retard des règlesaumomentoù je perds de vue cette femme est
de 21 jours
».Quoique cette
femme ait eu ou cru avoir des symptômes de grossesse, avec
un retard de règles de 21 jours, on ne peut affirmer
qu'elle fût
grosse. Quand bien même cela serait, nous 11e croyons pas que
cet exemple soit à suivre.
L'utérus n'aime
pas, àcette période,
être gêné dans son développement. La
columnisation
peutet
doit, si elle est continuée un certain temps, amener sa révolte,
des contractions et parsuite l'avortement.
Avant de pratiquer une
columnisation, il serait bon d'envisa¬
ger la possibilité d'unegrossesseet
de s'abstenir si
on ades
pro¬babilités.
Lorsqu'onpourra
diagnostiquer
qu'un ovaire est scléro-kys- tique, on n'emploiera pas la columnisation. Les symptômesressentis par les malades atteints de cette affection se rappro¬
chent de ceux de la salpingite catarrhale et interstitielle : dou¬
leurs abdominales et irradiées, difficulté ou impossibilité de la
marche et de la station debout, douleurs pendant et après le
coït. Le toucher simple ou combiné permet de reconnaître sur
les côtés ou en arrière de l'utérus un
corps en général un peu
irrégulier, douloureux à la pression. C'est l'ovaire dont le volume n'est que faiblement accru, et qui ne paraît pas très
altéré. Au cours de la laparotomie, ou à l'autopsie, on peut se rendre compte que le parenchymede l'ovaire estenpartie rem¬
placé par du iissu fibreux, avec des petits kystes. Dans ces cas
la columnisation ne produit aucun fruit, ainsi que semble le démontrer l'observation VI. Il s'agit d'une femme atteinte d'ovarite scléro-kystique (?) et chezqui lacolumnisation fut mal
supportée.
Une contr'indication, celle-là momentanée, c'est l'apparition
des règles. Pendantleurdurée,ilfaut laisserla femme aurepos,
interrompre le pansement. Cette contrindicationposéeenprin¬
cipe par l'école lyonnaise ne nous paraîtpas absolumentvraie.
Dans les observations que nous signalons, cette pratique habi¬
tuelle a été suivie. Sans avoir d'expérience à ce sujet, il nous
paraîtcependant qu'en face de l'état fluxionnaire dont l'utérus et les annexes sont le siège pendant la menstruation, ilestpeut
être inutile sinonimprudentde suspendrela columnisation. Les organes deviennent plusgros, pluspesants; inutile doncde leur
supprimer le point d'appui qui leur est si utile. D'autant plus qu'un utérus que l'on soutient assezmal d'habitudeprofitera de
cet état physiologique pourreprendre le terrain qu'on lui afait perdre, si l'on peut employer cette expression.
Peut-êtremêmelacolumnisation, cpii, danscertains cas, a une
influence marquée sur l'apparition des règles, aura-t-elle une
action directe sur leur cours enles régularisant, en les rappro¬
chant de leur type normal.
On pourra nous répondre cpie le tamponnement gêne ou
arrête le cours des règles comme le tamponnement vaginal
arrête une hémorrhagie utérine; nous ne le croyons pas; il y a loin de la columnisation méthodique employée comme nous la
décrivons autamponnementforcéet serrédestinéàluttercontre l'hémorrhagie, qui nécessite, pour être efficace, « le plein cha¬
peau » ce tampon des accoucheurs. Un artifice quelconque pourrait rendre ces tampons imperméables et permettre au sang- menstruel de filer entre leurs interstices sans se coaguler.
C'est là une hypothèse que nous avançons. Peut-être dans la pratique pourrait-on en retirer de bons effets.
CHAPITRE VII
RÉSULTATS DE LA COLUMNISATION
La coiumnisation, lorsqu'elle est employée dans des condi¬
tions bien définies, produit unsoulagement immédiat. Des fem¬
mes ne pouvant supporter la moindre marche, éprouvant des souffrances, et ayant durant de longs mois subi le traitement
médical ordinaire, et cela sans en retirer de profit appréciable, peuvent après la coiumnisation se livrer à l'exercice. Quincien
cite plusieurs exemples de ce genre.
Donc, amélioration immédiate, soulagement, tels sont les
résultats de la coiumnisation.
Y a-t-il guérison?Non. Une femme nepeutêtre soumise per¬
pétuellement à la coiumnisation. Le traitement interrompu au bout d'un temps plus ou moins long, il arrive que les douleurs
et les difficultés de lamarche réapparaissent.
On doit, lorsqu'on interrompt le pansement, instituer le trai¬
tement médical vulgaire. Etpuis, si l'affectionréapparaît, pour¬
quoi ne pas reprendre la coiumnisation?
Le syphilitique très amélioré par le traitement, n'est-il pas
obligé, dans le cours de son existence, de refaire de temps à
autre le traitement de la syphilis ?.
CHAPITRE VIII
Observation I
Prise par M. deBoucaud, interne dans leservice de M. leprofesseur Lanelongue.
Endométrite. —Antéversion. —Annexitegauche.
Mm?G., 26 ans, sans profession.
Entre pour douleurs du bas-ventre depuis 8 ans.
Rien àsignaler commeantécédents.
Premières règlesà 11 ans et demi. Douloureuses le Prjour.
Mariée à 17 ans et demi.
1° Grossesse à 18 ans et demi. Grossesse et accouchements nor maux. Se relève au bout de 8jours, pertessanguinolantesdurant un mois. Pesanteur dans lebas-ventre, ténesme vésical. Règles réguliè¬
res.
2° Grossesse à 22 ans. Se releveaubout de 9jours, nourrit 4 mois.
Les douleurs du bas-ventre reparaissentet n'ont point cessé. Sensa¬
tion de poids : irradations dans la région lombaire, la partie supé¬
rieure des cuisseset tout le membre inférieurgauche.Ténesme vési¬
cal. Pas de troubles de la sécrétion urinaire. Pas de troublesdigestifs
sauf constipation. — Palpitations.
À beaucoup souffert de névralgies.
N'ajamais fait qu'un traitement par les injections et les tampons glycérinés.
Cavité utérine :7 centimètres et demi.
2 décembre. Curettage.Drainage. Tampons.
6décembre:Onenlève les tampons. Injections.
13 et 14décembre: Lamalade souffre du ventre.
15 décembre. Apparitition des règles.
30 décembre: Douleurs généralisées dans le bas-ventre. Annexes gauches trèsvolumineuses. Tamponnement.
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3 janvier:On continue le tamponnement qui resteenplace 5jours.
Dès le 5janvier, les annexesont diminué de volumesontmoins dou¬
loureuses. Lamaladea de la rétention d'urine.
On sonde et on enlève trois tampons. La malade se lève un peu;
douleurs vives dans les fosses iliaques.
Du 10 au 16, nouveau tamponnement. La malade garde le lit.
Quelques douleurs du 16 au 50.
Règles pasdouloureuses, mais beaucoup plus copieuses.
2 février : On enlève la tige intra-utérine fixée au moyen de fils d'argent.
10 février : Tamponnement.
15 février : Tamponnement.
Dèslors, le tamponnement est pratiqué d'une façon ininterrom¬
pue, etrenouvelé tousles quatre jours. La malade se lève etne souf¬
fre pas. Aumoment où l'on fait la columnisation, la malade se sent soulagée.
Du 19, au 22, règles normales et non douloureuses.
Sort le 24février.
Utérus non douloureux et parfaitement mobile.
Annexes droites : Rien.
Annexes gauches : Perceptibles mais non douloureuses.
Observation II
Recueillie parM. deBoucaud, inlernechez M. le professeur Lanelongue.
Métrite. — Annexite gauche. —Antéversion.
R..., 22 ans, couturière. Entréepourdouleurs du bas-ventre datant
de trois mois. Pas d'antécédents.
Réglée à 13 ans; depuis, règles régulières, durant trois à quatre jours, mais s'accompagnant de coliques durant toute la durée des règles.
11 y atrois mois, hémorrhagie abondante, avec coliques utérines.
Fièvre. Vomissements. Obligée de s'aliter. Se lève au bout de trois jours. Conserve douleurs dans le bas-ventre, des pertes teintées de
sang etfétides durant vingtjours.
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Depuis, règles irrégulières. Il y a un mois et demi quelamalade
n'a rien vu.
Lesdouleurs du bas-ventre ont augmenté. S'accentuentparlasta¬
tion deboutet la marche.
Miction devenue douloureuse.
Le 30novembre 1897, jour d'entrée de lamalade.
Pasde douleurs au niveau de l'utérus etdes annexesdroites.
Légerempâtement etdouleur vive de la fosse iliaque gauche.
Au toucher : colnormal, col de nullipare.
Le corps utérin n'estpas gros —il esten antéversion — non dou¬
loureux, mobile.
Culs-de-sac antérieur etdroit : rien.
Cul-de-sac gauche: annexes augmentéesde volume; il existe une tuméfaction de la grosseur d'une mandarine. Douleur trèsvive à ce
niveau.
Du 3 au 3décembre: la malade a sesrègles, peu de douleurs.
(i décembre: Tamponnement glycériné. Amélioration rapide.
Les annexes gauchesont sensiblement diminué de volume.
Les douleurs persistent.
10 décembre:Tamponnement.
20décembre: Plus d'empâtement des annexes.
La malade sort le 23décembre.
Observation III
Recueillie parM. deBoucaud,interne.
Métrite. — Antéversion.— Annexitsgauche.
C., 22 ans, sans profession.
Pasd'antécédents, nihéréditaires, ni personnels.
Premières règlesà 10 ans. Durée 8 jours, avec coliques les deux
premiersjours.
Mariée à 19 ans. Un mois aprèsson mariage, inlluenza. Elle reste
deux mois sans voir ses.règles, puis, ellea une hémorrhagie abon¬
dante avec coliquesutérines. Elle a de la fièvre, ensuite desdouleurs
dubas-ventre etdesreins.
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Pendant quatre mois, les règles se font régulièrement, puis elles disparaissentpendant deux mois. Au bout de cesdeux mois, survint
une nouvelle hémorrhagie aveccoliquesvives, et expulsionsde volu¬
mineux caillots.
Aprèscettedeuxièmehémorrhagie, la malade vint à l'hôpitaldans
le service de M.Gervais, oùelle futtraitée parlesinjectionsvaginales,
et le repos. Elle en sort guérie.
Pendant un an, la malade estbien, sesrègles normales.
Au commencementde décembre, est réglée pendantquatre jours ;
trois jours après la cessation de ses règles, elle est reprise de vives douleurs dans le bas-ventre etd'une abondantehémorrhagie. Depuis
dixjours, suintement sanguin contenu, mais les douleurs ont dimi¬
nué au toucher, le corps utérin esten antéflexion marquée. Le col
est normal.
Le 16 décembre, on pratique lacolumnisation.
Dès le 27, on constate une forte amélioration. Les pertes hémor- rgagiques ont cessé. Plus de douleurs. Etat général meilleur.
Le 31, on pratique à nouveau le tamponnement.
Le 2janvier, lamalade sort, elle ne souffre plus.
ObservationIV
Prise par M. deBoucaud,interne de M. leprofesseur Lanelongue.
Endométrite.—Antéfléxion. — Latéro-version droite. — Annexite gauche.
MmeP..., 23 ans, sans profession, entre le 11 janvier pour dou¬
leurs du bas-ventre existant depuis cinq ans.
Pas d'antécédents.
Réglée à 14 ans. Règles normales.
Mariée à 19 ans. Au bout d'un an quelques pertes jaunâtres.
Douleurs deinictioïKLeventredevientdouloureux, ballonné. Vomis¬
sements et fièvre. La malade garde trois mois le lit.
Pendant 9 mois, quelques douleurs du bas-ventre, exagérées par la marche.