• Aucun résultat trouvé

Allocation optimale de l'eau dans le bassin versant du fleuve Sénégal

N/A
N/A
Protected

Academic year: 2021

Partager "Allocation optimale de l'eau dans le bassin versant du fleuve Sénégal"

Copied!
84
0
0

Texte intégral

(1)

Allocation optimale de l’eau dans le bassin versant du

fleuve Sénégal

Mémoire

Ndèye Aïda Thiam

Maîtrise en génie des eaux

Maître ès sciences (M.Sc.)

Québec, Canada

© Ndèye Aïda Thiam, 2016

(2)

Allocation optimale de l’eau dans le bassin versant du

fleuve Sénégal

Mémoire

Ndèye Aida Thiam

Sous la direction de :

Mr Amaury Tilmant

(3)

iii

Résumé

Chaque état riverain du fleuve Sénégal fait face à des problèmes similaires de pénuries et de demandes croissantes en énergie. La production énergétique de la centrale de Manantali, seul aménagement hydroélectrique fonctionnel sur le bassin couvre moins de 18% des besoins. De même on note un besoin pressant de maitriser les affluents majeurs du fleuve pour réduire les impacts de la sècheresse et des fortes crues sur l’environnement et faciliter la pratique d’activité connexes telle l’irrigation et la navigation au niveau de la vallée et du delta. La gestion des ressources en eau reste donc un enjeu capital pour la croissance économique des états riverains du fleuve

L’objectif à long terme de l’Organisation pour la Mise en Valeur du fleuve Sénégal (OMVS) est de renforcer l’économie de ses états membre en plaçant la gestion et la mise en valeur collective des ressources en eau au centre de ses priorités. Il s’agit là, d’ici l’échéance fixé à 2025, d’étendre les aménagements hydroélectriques dans le haut bassin de manière à atteindre une puissance installée de 1050 MW et d’assurer un soutien d’étiage adéquat pour le développement de l’agriculture irriguée et de la navigation au niveau de la vallée et du delta.

Cette étude analyse les impacts de ces éventuels aménagements sur le régime hydrologique du fleuve. Une approche analytique par scénario a été testée dans le système d’aide à la décision Water Evaluation And Planning (WEAP). Il s’agit d’un modèle de simulation et de gestion des bassins hydrographiques qui réalise un bilan volumique conservatif des masses d’eaux entrantes et sortantes sur l’ensemble de la durée de la chronique des apports compte tenu des consignes de gestion et des contraintes physiques du système. WEAP permet l’édition et l’analyse des grandeurs utiles relatives au fonctionnement des bassins hydrographiques

Les résultats des simulations montrent que le contexte actuel d’aménagement du bassin permet de garantir (en moyenne 8 années sur 10) une production d’énergie annuelle de 700 GWh tout en satisfaisant les besoins en soutien des basses eaux de la vallée et du delta qui sont évalués à 1567 Mm3/an.

Toutefois l’extension des aménagements agricoles et la prise en compte de la navigation fluviale entre Kayes et Saint-Louis aura pour conséquence d’établir une compétition entre la production d’énergie à

(4)

iv

Manantali et le soutien d’étiage, particulièrement durant la saison des basses eaux entre décembre et mai. Les déficits d’allocation observés varient entre 8 et 20% selon que l’état d’hydraulicité du fleuve est humide ou sec.

Les impacts de l’aménagement du haut bassin par la mise en service des barrages de Koukoutamba, Boureya et Gourbassi dans le scénario 3 restent importants et positifs. En effet, autre l’accroissement de près de 410% de la production d’énergie hydroélectrique, Koukoutamba et Boureya régulent les débits entrants à Manantali durant la saison des basses eaux, se traduisant par une augmentation du niveau de fonctionnement du réservoir de Manantali et par conséquent une réduction de plus de 50% des déficits de soutien des basses eaux au niveau de la vallée et du delta. Durant la saison des hautes eaux, la réduction des volumes entrants à Manantali due au remplissage des retenues de Koukoutamba et Boureya réduit de près de 60% les déversements de Manantali durant les années humides et de 15% le niveau de fonctionnement de la centrale durant les années sèches consécutives.

(5)

v

Table des matières

Résumé ... iii

Table des matières ... v

Liste des tableaux ... vii

Liste des figures ... viii

Liste des acronymes ... ix

Liste des unités ... x

Liste des annexes ... xi

Remerciements ... xii

Introduction ... 1

1. Revue de littérature ... 3

1.1. Mise en contexte ... 3

1.2. La gestion des bassins versants: source de conflits ou de coopération ... 4

1.2.1. Les conflits ... 4

1.2.2. La coopération interétatique ... 7

1.3. Les modèles hydro-économiques pour la GIRE. ... 8

1.3.1. L’optimisation ... 10

1.3.2. La simulation ... 11

1.3.3. Les modèles génériques ... 12

2. Description de la zone d’étude ... 15

2.1. Caractéristiques physiques ... 15

2.2. Les enjeux géopolitiques ... 17

2.3. Les usages de la ressource ... 20

2.3.1. L’hydroélectricité ... 20

2.3.2. Le laminage des pics de crues à Bakel ... 22

2.3.3. Le soutien des basses eaux ... 23

3. Application de WEAP au bassin versant du fleuve Sénégal ... 27

3.1. Description du modèle ... 27

3.2. Données de paramétrage ... 30

(6)

vi

3.2.2. Caractéristiques physiques des centrales ... 32

3.2.3. Les besoins en eau ... 34

3.3. Description des scénarios ... 36

4. Analyse des résultats ... 38

4.1. Modélisation des données hydrologiques ... 38

4.2. La production d’énergie hydroélectrique ... 39

4.3. La régularisation des eaux du bassin ... 43

4.4. Variation du stock des réservoirs ... 46

4.5. La satisfaction du soutien d’étiage ... 50

4.6. L’évaporation ... 52

5. Conclusion ... 55

Références bibliographiques ... 57

Annexes ... 61

Annexe A: Articles de la charte relatifs au partage des eaux du fleuve Sénégal ... 61

Annexe B: Reconstitution des apports hydrologiques ... 62

Annexe C: transformation des débits journaliers en débits moyens mensuels ... 64

Annexe D: modèle de régression linéaire sur XlStat ... 67

Annexe E: Débits moyens mensuels des neuf stations hydrométriques étudiées ... 68

(7)

vii

Liste des tableaux

Tableau 1: Exemples de différends relatifs au partage des eaux ... 6

Tableau 2: Priorités des États riverains par rapport aux volets du programme actuel de l’OMVS ... 18

Tableau 3: Projets de centrales hydroélectriques sur le bassin du fleuve Sénégal ... 22

Tableau 4: Évaporation moyenne mensuelle sur le tronçon Bakel-Diama ... 32

Tableau 5: Prévisions d’évaporation moyenne mensuelle sur le tronçon Bakel-Diama ... 32

Tableau 6: Caractéristiques physiques des barrages existants et prévus à l’horizon 2040 ... 33

Tableau 7: Pertes par évaporation et apports pluviométriques sur le plan d’eau des réservoirs ... 33

Tableau 8: Variation de la hauteur de chute en fonction du volume stocké dans les réservoirs ... 34

Tableau 9: Besoins actuels en eau d’irrigation ... 35

Tableau 10: besoins futurs en eau d’irrigation ... 35

Tableau 11: évolution des besoins mensuels en eau d’irrigation ... 35

Tableau 12: Estimation des besoins pour l’AEP, les mines et l’industrie ... 36

Tableau 13: Analyse statistique comparative entre les débits observés et simulés aux stations hydrométriques du bassin ... 38

Tableau 14 : Production d’énergie annuelle simulée à Manantali ... 40

Tableau 15 : production d’énergie annuelle observée à Manantali... 41

Tableau 16: Analyse comparative de la production d’énergie annuelle observée et simulée à Manantali ... 41

Tableau 17: Productible moyen annuel des centrales hydroélectriques ... 43

(8)

viii

Liste des figures

Figure 1: Débits moyens annuels de la station de Bakel 1903-1980 ... 1

Figure 2: Optimisation versus Simulation ... 9

Figure 3: Structure de base de la programmation dynamique ... 11

Figure 4: le bassin du fleuve Sénégal ... 16

Figure 5: localisation des barrages du bassin du fleuve Sénégal ... 21

Figure 6: Représentation Schématique du bassin du fleuve Sénégal ... 28

Figure 7: Distribution statistique des apports des différents affluents... 31

Figure 8: Répartition du productible moyen mensuel des centrales – Scenario 3 ... 39

Figure 9: Débits observés vs simulés à Bakel - Scenario 1 ... 44

Figure 10: Débits simulés à Soukoutali vs Débits simulés à Bakel- Scénario 1 ... 45

Figure 11: Débits simulés Bakel: Scénario 1 vs Scenario 3 ... 46

Figure 12: Cycle de remplissage du réservoir de Manantali- Scenario 1 ... 47

Figure 13: Cycle de remplissage du réservoir de Manantali Scenario 2 ... 48

Figure 14: Courbe de la probabilité de dépassement des débits observés et simulés entrants à Manantali ... 49

Figure 15: Débits moyens naturels entrants à Manantali vs débits moyens entrants à Manantali influencé par Koukoutamba et Boureya ... 49

Figure 16: Niveau moyen de fonctionnement de Manantali seul et influencé par Koukoutamba et Boureya ... 49

(9)

ix

Liste des acronymes

ACDI: Agence Canadienne de Développement International AEP: Adduction / Alimentation en eau potable

BAD: Banque Africaine de développement

DSS: Decision Support System (Système D’aide à la Décision)

FAO: Food and Agriculture Organisation (Organisation des Nations Unies pour l’agriculture et

l’alimentation)

GIRE: Gestion Intégrée des Ressources en Eau GWP: Global Water Partnership

IRD: Institut de Recherche pour le Développement OMM: Organisation Météorologique Mondiale

DGPRE: Direction de la Gestion et de la Planification des Ressources en Eau du Sénégal CGLG: Conseil des Gouverneurs des Grands Lacs

ABN: Autorité du Bassin du Niger IBN: Initiative du Bassin du Nile

OMVS: Organisation pour la Mise en Valeur du fleuve Sénégal

PASIE:Programme d’Atténuation et de Suivi des Impacts sur l’Environnement PGIRE:Projet de Gestion Intégrée des Ressources en Eau

POGR: Programme d’Optimisation de la Gestion des Réservoirs SDAGE: Schéma Directeur d’Aménagement et de Gestion des Eaux SEI: Stockholm Environmental Institute

SOGEM: Société de Gestion De Manantali

UICN: Union International pour la conservation de la nature

UN water: The United Nations inter-agency mechanism on all freshwater UN: United Nation (Nations Unies)

UNESCO: Organisation des Nations Unies pour l’Éducation, la Science et la Culture WEAP: Water Evaluation and Planning

(10)

x

Liste des unités

GWh: Giga Watt Heure ha: Hectare

hm3 : hectomètre cube

Km: kilomètre

Km2: kilomètre carré

Km3: kilomètre cube

m3/s: mètre cube par seconde

Mm3 : Million de mètre cube

MW: Méga Watt TWh: Téra Watt heure

(11)

xi

Liste des annexes

Annexe A: Articles de la charte relatifs au partage des eaux du fleuve Sénégal ... 61

Annexe B: Reconstitution des apports hydrologiques ... 62

Annexe C: transformation des débits journaliers en débits moyens mensuels ... 64

Annexe D: modèle de régression linéaire sur XlStat ... 67

Annexe E: Débits moyens mensuels des neuf stations hydrométriques étudiées ... 68

(12)

xii

Remerciements

Je commence par rendre grâce à Dieu le tout miséricordieux le très miséricordieux pour m’avoir donné la force et la volonté d’achever ce travail. Je reste convaincue qu’il est le tout puissant et l’unique responsable de tout achèvement.

J’exprime mes sincères remerciements à Monsieur Amaury Tilmant pour avoir accepté de diriger ce travail. Je souhaite par la présente lui exprimer toute ma gratitude pour l’encadrement et surtout la patience qu’il a bien voulu m’accorder. Ses conseils pratiques m’ont permis de mener à terme ce travail. Je voudrai exprimer ma reconnaissance à Diane Arjoon et Thibaut Lachaut pour leur aide combien précieuse et spontanée, leurs conseils m’ont été d’un apport inestimable.

Mes remerciements vont aussi à l’endroit du personnel de l’OMVS. Ils m’ont permis d’accéder à leur base d’informations et de disposer de l’ensemble des données nécessaires au paramétrage de mon modèle.

Je ne peux finir sans remercier ma famille plus particulièrement mes parents. Si j’ai pu achever ce travail c’est en partie grâce à vous. Bien que la vie ait été difficile durant ces deux dernières années, vous n’avez cessé de m’encourager et de me soutenir sur tous les plans. Je ne trouve pas les mots pour vous exprimer toute ma gratitude, je sais tout de même que j’ai beaucoup de chance de vous avoir. Vous êtes juste des personnes exceptionnelles. Merci pour tout...

A mes trois frères bien aimés, Cheikh Ibrahima et Bachir, merci pour votre soutien et votre présence A mon petit frère Mohamed qui a rempli ma vie de bonheur et de joie durant son court séjour sur cette terre je lui souhaite un repos éternel.

(13)

1

Introduction

Le bassin versant du fleuve Sénégal dessert quatre pays qui sont le Sénégal, la Mauritanie, le Mali, et la Guinée. Ces pays forment depuis 1972, l’Organisation pour la Mise en Valeur du Fleuve Sénégal (OMVS) chargée de la gestion des ressources communes du bassin. Sa mise en place est liée à la réalisation d’ouvrages communs, au partage équitable des coûts et bénéfices encourus par les projets de développement et à la conciliation des priorités – navigation, hydroélectricité et irrigation – des pays d’amont et d’aval (Alam et al. 2009).

Le fleuve Sénégal a connu des cycles de sècheresse très marqués durant les cinq dernières décennies. Les constats sont une réduction de plus de 50% du module des débits à Bakel (à la confluence des trois affluents majeurs du fleuve). Les débits moyens annuels observés à Bakel sur l’intervalle allant de 1903 à 1950 sont de 1374 m3/s, bien supérieurs à la valeur moyenne mesurée sur la période

1951-1972, soit 840 m3/s (OMVS et OMM. 2007).

Figure 1 : Débits moyens annuels de la station de Bakel 1903-1980

Source : OMVS et OMM. 2007

A cela s’ajoute la forte croissance démographique du bassin. Avec un taux d’accroissement annuel avoisinant 3%1, la population qui est estimée à 12 millions d’habitants2 devrait doubler d’ici 2040. En

outre, de nouveaux projets d’aménagements agricoles et hydroélectriques devraient s’ébaucher au cours des vingt prochaines années et accroitre par un facteur de 3, les besoins en eau à l’horizon 2040.

1SENEGAL HYCOS. 2007 2World Bank. 2006 0 500 1000 1500 2000 2500 Déb its mo ye n s an n u el s ( m3 /s )

(14)

2

Ces changements des conditions hydrologiques et des exigences d’approvisionnement posent la problématique de la création de systèmes de gestion efficaces et adaptés afin que ceux-ci puissent maintenir l’équilibre perturbé et fragilisé de l’offre et de la demande. L’OMVS doit, à cet effet, s’assurer de pouvoir faire face aux nouveaux enjeux de développement et de changements climatiques des années à venir, pour coordonner efficacement le fonctionnement des projets d’aménagement et proposer une vision prospective de l’évolution de la disponibilité des ressources en eau.

Des concepts et modèles hydro-économiques sont développés pour prédire le comportement réel des systèmes hydrographiques suite à une altération des politiques de gestion. Des auteurs comme Yeh (1985), Mays et Tung (1996), Labadie (2004), Loucks (2005) ont fait une revue exhaustive des méthodes de modélisation couramment utilisées pour l’étude des systèmes hydriques et de leurs aménagements. Mujumdar (2005) estime qu’une politique de gestion standard n’existe pas et que le bon fonctionnement de tout système, réside dans la possibilité de choisir la politique d'exploitation appropriée parmi l'ensemble des méthodes disponibles

L’objectif de cette étude est d’évaluer les impacts de la mise en place des futurs aménagements sur la disponibilité à long terme des ressources en eau du bassin du fleuve Sénégal. A cette fin le logiciel Water Evaluation and planning (WEAP) sera utilisé.

WEAP simule le comportement du système sur la base d’un ensemble de règles de gestion régissant les allocations d'eau et l'exploitation des infrastructures. Il renseigne sur la performance du modèle qui représente ici le bénéfice social et économique net généré par le système et exprimé en termes de satisfaction des exigences en eau et de rendement énergétique.

(15)

3

1. Revue de littérature

1.1. Mise en contexte

Environ 40% de la population mondiale vivent dans les bassins fluviaux internationaux et 90% des nations du monde partagent des fleuves internationaux (Sadoff et Grey, 2002). De récentes études ont identifié un total de 279 bassins versants transfrontaliers (Bakker. 2006), 273 aquifères partagés (Unesco. 2003) et couvrant environ 50% de la surface totale de la planète (Wolf et Yoffe. 1999). De plus, neuf pays se partagent près de 60% des sources d’eau douces. Cette forte dépendance à cette ressource rare serait une source potentielle des conflits observés dans diverses régions de la planète. Au cours des cinquante dernières années, Wolf (2007) a recensé 43 conflits politiques et militaires liées au partage des ressources en eau dont trente-sept ont donné lieu à des négociations et sept se sont soldés en confrontations armées.

Le contexte actuel des changements climatiques, d’évolution des modes de consommation et d’accroissement démographique pose la problématique de la gestion et du partage efficace des ressources en eau. Certains bassins versants internationaux font face à des pénuries d’eau tandis que d’autres souffrent de la pollution.

D’importantes études (voir Wolf et al. 1999, 2001, 2003, 2007; Turton. 2000, Dinar et al. 2005) ont été effectuées pour identifier les facteurs pouvant causer, prévenir, voire même solutionner les problèmes de gestion des ressources hydriques. Il a été constaté que le principal problème de gestion des bassins versants partagés est l’absence de mécanisme d’allocation universellement accepté (Wolf. 1999). En effet une politique d’allocation n’est acceptée que si celle-ci est perçue comme «juste et raisonnable» par l’ensemble de parties prenantes.

La création d’organismes de dialogue et la ratification de conventions internationales ont toutefois contribué à réglementer le partage des ressources dans les bassins internationaux.

On peut citer les exemples de la création de l’Initiative du Bassin du Nile (IBN) en 1999, de la mise en place de l’Autorité du Bassin du Niger (ABN) en 1980, de la formation du Conseil des Gouverneurs des Grands Lacs (CGLG) en 1983, de la ratification de la déclaration de Stockholm sur l’environnement en 1972, de l’adoption de la charte des eaux du Niger en 2012.

D’un autre coté l’usage des méthodes de calcul analytiques, qui tiennent compte de l’ensemble des données et contraintes physiques des systèmes, sont depuis quelques années adoptés lors des processus de prise de décision complexes et de résolution de conflits.

(16)

4

1.2. La gestion des bassins versants: source de conflits ou de coopération

La banque mondiale (2003) définit la Gestion Intégrée des Ressources en Eau (GIRE) comme la perspective qui garantit que les dimensions sociales, économiques, environnementales et techniques sont prises en compte dans la gestion et le développement des ressources en eau.

Selon Global Water Partnership (2000), la GIRE est un processus qui favorise le développement et la gestion coordonnée de l’eau, des terres et des ressources connexes en vue de maximiser de manière équitable, le bien-être économique et social sans pour autant compromettre la pérennité des écosystèmes. En tout état de cause, l’eau doit être gérée pour de multiples objectifs et ceci doit prendre en compte l’ensemble des intérêts des usagers. Il n'est toutefois pas facile de s'entendre sur la meilleure façon de le faire car tout ce qui est proposé peut provoquer des conflits (Loucks et al. 2005).

1.2.1. Les conflits

Plusieurs auteurs se sont penchés sur la question des conflits liés au partage des eaux dans les bassins versants transfrontaliers (Wolf et al. 1999, 2003, 2007; Sadoff et Grey 2002; Bernauer. 2002). Ils ont pour la plupart confirmé que la rareté physique des ressources, l’évolution des modes de consommation et l’iniquité de la distribution des ressources seraient les principales causes de dissensions entre les états riverains.

À la racine de beaucoup de tensions et disputes autour de l’eau, on trouve souvent deux séries de facteurs (Voir Tableau 1): (a) un changement rapide et profond des conditions physiques du cours d’eau, par exemple la construction de barrages, la déviation d’une partie des ressources ou l’aménagement de périmètres irrigués comme ce fut le cas du bassin du Mekong en 1994; (b) l’incapacité des institutions existantes à absorber et gérer de façon efficace lesdits changements, par exemple à travers la mise en place d’organismes de bassin ou la ratification d’accords de coopération (Wolf. 2001).

Kemper (2001), a évoqué la question de la définition des droits d’utilisation. En effet, l’absence de permis formels d’utilisation de la ressource par les nations et l’inadaptation des plans de suivi en place peut altérer les droits coutumiers des usagers et favoriser les usagers souverains (Wolf et al. 2005); dans ce contexte, les doctrines de «souveraineté absolue, d’intégrité absolue ou de première approbation», qui donnent aux usagers la liberté d’utiliser l’eau disponible sur leur territoire, peuvent être revendiquées par certains états riverains. Ces doctrines excluant toute possibilité de gestion commune peuvent favoriser une utilisation inefficace de la ressource dans le sens où les usagers n’ont aucune garantie qu’économiser la ressource aujourd’hui leur permettrait d’en disposer ultérieurement

(17)

5

(Kemper. 2001). Les bassins du Tigre et de l’Euphrate incarnent parfaitement les résistances des États à adopter la coopération pour la gestion concertée des ressources parce qu’elle induit à une nécessaire renonciation d’une parcelle de souveraineté de la Turquie qui refuse catégoriquement de reconnaitre le caractère international des deux fleuves.

Bernauer (2002) a soulevé les problèmes d’externalités négatives induites par l’usage des ressources: c’est-à-dire lorsque les effets externes du développement de l’eau sur une partie du bassin se font sentir sur d’autres parties, dans une région éloignée sur le plan géographique, alors que la réciproque ne se produit pas

Parvenir à une gestion durable et pacifique de plus de 500 cours d'eau internationaux, dans diverses parties du monde, sera l'un des défis majeurs dans l'avenir immédiat et à long terme. L’équité est de manière générale considérée comme la clé de répartition des ressources en eau (Wolf. 1999). Toutefois d’autres facteurs (social économique, politique, climatique géographique et culturel) auront une influence considérable sur la mise en place des politiques de gestion des bassins transfrontaliers.

Lasserre (2013) soutient que l’eau n’est souvent qu’une des dimensions des litiges qui opposent les états. Elle est souvent mêlée à d’autres questions stratégiques et géopolitiques qui entravent leurs relations. En d'autres termes, un conflit autour de l’eau n'est presque jamais isolé d’une ossature enveloppée par d’autres dissensions. Dans le plus souvent des cas, les conflits pour l’eau viennent se greffer à d’autres questions sociales, ethniques, religieuses ou politiques. Dans d’autres cas, l’importance des autres conflits aura un impact considérable sur les rivalités autour de la ressource (Tamas. 2003).

Sur le Fleuve Nil par exemple, l’Égypte se situe au cœur des multiples tensions: ce pays est sans doute le seul parmi les États riverains du Nil à bénéficier d’un certain nombre d’atouts qui font défaut aux autres pays riverains à savoir la relative stabilité politique interne, la croissance économique, l’expertise en matière de gestion efficiente des ressources hydriques et aussi une armée qui surclasse celles des autres pays en compétition. Pour des raisons historiques, ce pays a toujours exploité la plus grosse partie du débit du fleuve. Le caractère particulièrement sensible de la question du Nil pour les Égyptiens s’explique à la fois par des raisons historiques et symboliques fortes et par des besoins tout aussi réels. L’Égypte refuse catégoriquement toute perspective de voir remettre en cause sa part des eaux du Nil et laisse régulièrement entendre qu’elle est prête à envisager des actions militaires pour faire respecter ce qu’elle estime comme ses droits.

(18)

6

Lasserre et Brun (2007) considèrent que la notion de gestion des ressources à l’échelle des bassins versants, qui semble aujourd’hui faire l’unanimité, n’implique pas pour autant qu’il soit inconcevable de faire preuve d’imagination dans les négociations. Il est donc du rôle des états riverains, qui sont différents d’un point de vue économique, culturel ou social, qui ne bénéficient certes pas des mêmes avantages comparatifs, de négocier une entente d’exploitation du bassin pour lequel ils ont un intérêt commun (Savenije et Zaag. 2000).

Location Principale

raison

Observations

La Kavery Quantité Le différend sur ce fleuve est né de la répartition de l'eau entre l'état du Tamil Nadu, situé en aval, qui utilisait les eaux du fleuve pour l'irrigation, et du Karnataka, en amont, qui désirait étendre l'agriculture irriguée. Les parties n'ont pas accepté la décision judiciaire du différend, ce qui a entrainé de la violence et des morts tout au long du fleuve

Bassin de L’Okavango

Quantité Dans le bassin de l'Okavango, les revendications du Botswana afin de maintenir le delta et son industrie lucrative d'écotourisme sont source d'un litige avec la Namibie située en amont, qui désire prélever de l'eau traversant le couloir de Caprivi, afin de fournir sa capitale en eau

Bassin du Mékong

Quantité A la suite de la construction par la Thaïlande du barrage de Pak Mun, plus de 25 000 personnes ont souffert de restrictions draconiennes dans les pêcheries situées en amont, associées à d'autres problèmes de moyens d'existence. Les communautés laisées se battent pour obtenir des indemnités depuis la fin de la construction du barrage en 1994

Le fleuve Incomati

Qualité et Quantité

Des barrages dans la partie sud-africaine du fleuve Incomati on réduit le débit de l'eau douce et accru la salinité de son estuaire, au Mozambique. Cela a altéré l'écosystème de l'estuaire et fait disparaitre la végétation et les animaux ne tolérant pas le sel, éléments importants pour la subsistance des populations Le Rhin Quantité Le port de Rotterdam était obligé de draguer fréquemment les fonds afin d'éliminer la vase déposée par le

fleuve. L'opération était extrêmement couteuse et provoquait des controverses sur l'indemnisation et la responsabilité des différents utilisateurs du fleuve. Alors que, dans ce cas, les négociations ont abouti à une solution pacifique, dans des régions ne bénéficiant pas de pareils dispositifs de solution des différends, les problèmes d'envasement ont pu entrainer des litiges entre utilisateurs de l'amont et de l'aval, comme dans le bassin du Lempa en Amérique centrale

Syr Daria Calendrier Les relations entre le Kazakhstan, le Kirghizstan et l'Ouzbékistan, riverains du Syr Darya, grand affluent de la mer d'Aral en voie de disparition, illustrent les problèmes dus au calendrier du débit de l'eau. Du temps de l'Union soviétique, le gouvernement central régulait l'utilisation d'hydroélectricité pour le chauffage en hiver par le Kirghizstan, situé en amont, afin de répondre également aux besoins d'irrigation au printemps et en été de l'Ouzbékistan et du Kazakhstan situés en aval. Aujourd'hui, les partenaires violent de temps en temps les accords qui remplacent le débit d'amont par d'autres sources de chauffage (gaz naturel, charbon et fioul) contre une irrigation en aval.

Tableau 1: Exemples de différends relatifs au partage des eaux

(19)

7

1.2.2. La coopération interétatique

Les travaux effectués par les chercheurs de l’Université d’État de l’Oregon sur les conflits et la coopération dans les bassins fluviaux internationaux montrent que jusqu’ici les relations entre pays riverains d’un fleuve international peuvent être tendues, des disputes et conflits peuvent survenir, mais que de façon générale ces pays arrivent presque toujours à trouver une formule de coopération plutôt qu’à opter pour la confrontation ouverte (Wolf, 2001; Postel et Wolf, 2001; Turton, 2000; Wolf et al 2003 cité par Niasse 2004). Les études réalisées par l’UNESCO et Green Cross International (2002) permettent de s’accorder sur le fait que les eaux partagées offrent plus d’opportunités de coopération que de conflits. Les États coopèrent quand il est dans leurs intérêts ou qu’on est dans un contexte de rareté de la ressource dans lequel les pays sont incapables de résoudre leurs problèmes de manière unilatérale et peuvent tirer profit de la coopération et de la coordination des usages de la ressource. Aussi les états optent pour la coopération si les solutions proposées, pour le partage des ressources et des bénéfices, sont perçues comme «justes et raisonnables» par toutes les parties prenantes (Dinar et al. 2005).

Un résultat distinctif est que la création d’institutions de dialogue et l’établissement d’accords de partage réduit considérablement les risques de tension. Le rôle de ces ententes internationales est de concilier les intérêts des pays riverains. Les principaux succès de ces ententes reposent sur le fait qu’elles sont fondées sur une approche participative incluant les décideurs, les planificateurs et usagers à tous les niveaux. Ils deviennent dès lors des moyens de transformer les conflits potentiels en une coopération constructive et de changer ce qui est souvent perçu comme une situation à somme nulle dans laquelle une prise de parti de l’un entraine la perte de l'autre en un jeu à somme positif dans lequel aucune partie ne subit de perte (Postel, 1992).

De la conférence internationale sur l’eau et l’environnement qui s’est tenu à Dublin en 1992 ont été émis la déclaration de Dublin et le rapport de la conférence sur l’eau et l’environnement. Les principes et recommandations de cette conférence ont été incorporés dans tous les rapports ultérieurs. Dans les Principes de Dublin adoptés, la communauté internationale a affirmé, au plus haut niveau politique, que l’eau fait partie intégrante des écosystèmes et qu’il s’agit d’un bien économique et social dont la quantité et la qualité devraient déterminer la nature de l’utilisation que l’on en fait. De même, il a été constaté qu’une: « action concertée est nécessaire pour inverser les tendances actuelles de la surconsommation, de la pollution et de l'augmentation des menaces de sècheresse et d’inondations »

(20)

8

(UN. 1992). La privatisation de l'eau et des services connexes et le contrôle monopolistique des droits d'eau constitueraient ainsi une barrière aux usages non contrôlés et par conséquent, une exigence d'utilisation efficace et bénéfique des ressources basée sur le principe universel du droit de l'eau - à la fois aux niveaux national et international (GWP. 1999).

La Convention des Nations Unies sur les cours d’eau Internationaux (1997) est un autre exemple d’instrument conçu pour régir les relations entre les États partageant un même bassin versant. Elle définit les normes, les obligations et les procédures essentielles de prévention des différends et d’incitation à la coopération pour le développement et la conservation des cours d’eau et de leurs écosystèmes (Loures et al. 2009). Le texte de cette convention gravite autour de trois principes de base (Lasserre et Brun. 2007) :

 Article 5. 1: « Les États du cours d'eau utilisent, sur leurs territoires respectifs, le cours d'eau international de manière équitable et raisonnable »

 Article 7. 1: « Lorsqu'ils utilisent un cours d'eau international sur leur territoire, les États du cours d'eau prennent toutes les mesures appropriées pour ne pas causer de dommages significatifs aux autres États du cours d'eau »

 Article 8. 1: « Les États du cours d'eau coopèrent sur la base de l'égalité souveraine, de l'intégrité territoriale, de l'avantage mutuel et de la bonne foi en vue de parvenir à l'utilisation optimale et à la protection adéquate du cours d'eau international ».

1.3. Les modèles hydro-économiques pour la GIRE.

La pression croissante exercée sur les ressources en eau durant les dernières décennies, la multiplicité des usages de la ressource, l’accroissement de la population et les changements climatiques ont des impacts directs et indirects sur la disponibilité des ressources en eau.

L’un des objectifs de l’analyse hydro-économique est d’intégrer ces considérations dans un outil pratique et robuste de manière à «simuler» des phénomènes observés ou des scénarios de planification, pour prévoir et proposer des méthodes d’adaptation. Les concepts et modèles hydro-économiques aident à la gestion globale, présente et future des systèmes hydrographiques, particulièrement en ce qui concerne les modalités d'évaluation et de partage des bénéfices (physiques, social économiques environnemental), d’adoption de mesures économiquement efficaces, et de résolution des conflits lors

(21)

9

des processus de négociation etc. (Loucks et al. 2005). Ils permettent d’élargir la gamme de politiques alternatives de gestion et d’apporter de l’information claire et compréhensible par toutes les parties prenantes.

Le choix d’un modèle dépendra essentiellement des paramètres à analyser, de la capacité d’analyse des modèles alternatifs et des attentes et préférences de l’analyste (Veluda et Mujumdar. 2005).

Concernant les problèmes de répartition des ressources en eau le choix du modèle est souvent basé sur trois principaux critères:

La priorité de satisfaction des usages: cette méthode d’allocation assigne une priorité ou un poids à chaque usage dans l’optique de satisfaire les demandes ayant une priorité plus élevée

Le rendement Marginal: cette méthode de répartition se base sur les coûts et bénéfices générés par les différentes utilisations de la ressource. Dans ce cas le gestionnaire peut choisir de prioriser les usages générant un revenu marginal

Multiobjectifs ou multicritères: lorsque la même priorité est accordée aux différentes demandes ou que les usages génèrent les mêmes bénéfices, dans un contexte où le système présente des usages conflictuels, il devient nécessaire d’établir des arbitrages ou compromis entre les utilisations

Les méthodes de modélisation se distinguent essentiellement par l’optimisation et la simulation.

Figure 2: Optimisation versus Simulation

Source: Water Resources systems planning and management (Loucks et al. 2005)

System design and operating policy

Water ressources system

Water ressources system

System design and operating policy

System inputs System inputs System outputs System outputs Simulation Optimization ● Exploratoire ● Plus détaillé ● Descriptive ● Qu'adviendra t-il si ? ●Plus efficient ●Moins détaillé ●Prescriptif

●Quelle est la solution

(22)

10

Un avantage distinct des modèles d'optimisation par rapport aux modèles de simulation est leur capacité à proposer des politiques de gestion.

1.3.1. L’optimisation

C’est un processus de prise de décision à plusieurs étapes. Elle donne la solution au plus haut niveau de performance du système (solution optimale) répondant à toutes les contraintes, tout en maximisant ou minimisant un ou des objectifs. Le modèle décrit, en termes mathématiques, le système à analyser et les conditions à satisfaire (Loucks et al. 2005).

Les modèles d’optimisation sont de plus en plus utilisés pour définir la stratégie d’allocation optimale lorsqu’on fait face à plusieurs objectifs souvent conflictuels (voir Quentin et al. 2010; Labadie 2004; Tilmant et al. 2007, 2010; Wang et al. 2005, 2007;). L’identification de ces objectifs est souvent la tâche la plus difficile. De plus ils peuvent rarement être pleinement satisfaits en raison de la présence de diverses contraintes, qui peuvent être de nature physique, juridique ou financier (Tilmant et al. 2007) L’optimisation est statique lorsque les variables à étudier n’évoluent pas au cours du temps. Par contre l’optimisation dynamique prend en compte des variables qui caractérisent des phénomènes étudiés sur plusieurs périodes.

Des langages de programmations générales comme Matlab, GAMS, Maple, AMPL peuvent simplifier la formulation du problème. L’utilisateur doit toutefois spécifier l’équation de la fonction objective, les contraintes, les détails des différentes composantes physiques du système ainsi que les relations existantes entre ces composantes. Ces méthodes sont bien adaptées pour des applications simples mais difficiles et fastidieuses à utiliser pour des situations plus complexes (Würbs, 1994).

Parmi les méthodes d’optimisation les plus couramment utilisées pour la modélisation des bassins versants on peut citer: la programmation linéaire (LP), la programmation dynamique (DP), la programmation linéaire stochastique (SLP), la programmation dynamique stochastique primale et duale (SDP et SDDP), les algorithmes évolutifs et les réseaux neurones. Loucks et al (2005), et Veluda et Mujumdar (2005) ont fait une revue exhaustive l’ensemble de ces méthodes.

La popularité de la programmation linéaire réside dans sa souplesse à intégrer plusieurs paramètres et variables, sa facilité à converger vers un optimum global et son large choix de logiciels de calculs des algorithmes (Excel, LINDO, LINGO, CPLEX, GAMS etc.).

(23)



 

La programmation dynamique stochastique (SDP) convient bien à l’étude du fonctionnement des réservoirs hydroélectriques. Cette méthode permet d’intégrer les caractères linéaire, non linéaire et stochastique (les états) qui varient au cours du temps (les étapes) et qui définissent un grand nombre de systèmes hydrographiques, dans la formulation du problème (Yeh. 1985). Elle est applicable aux problèmes respectant les conditions d’optimalité de Bellman: une sous-trajectoire d’une trajectoire optimale est

elle-même optimale pour la fonction objective restreinte aux trajectoires ayant pour origine celle de cette sous-trajectoire.

La programmation dynamique se base sur une approche ascendante c’est-à-dire que le calcul débute par la résolution des plus simples sous-problèmes pour remonter vers les sous-problèmes plus complexes. De cette façon, les problèmes vastes et complexes peuvent être résolus de manière récursive en combinant les solutions des sous-problèmes pour obtenir la solution du problème dans son ensemble.

Figure 3: Structure de base de la programmation dynamique

Source: Water Resources systems planning and management (Loucks. 2005)

1.3.2.  La simulation

La simulation est un processus itératif permettant la reproduction d'un phénomène physique basé sur un modèle mathématique. Bien qu’étant jugé moins efficace que l’optimisation dans le sens où elle ne fournit pas de solution optimale, les résultats des simulations sont beaucoup plus descriptifs et plus simples à interpréter. Si un modèle de simulation peut être développé pour représenter un prototype de système, il peut donner un aperçu réel sur la façon dont le système peut se comporter au fil du temps sous diverses conditions (Jain et al. 2003).

Les modèles de simulation ne sont pas limités par la plupart des hypothèses intégrées aux modèles d'optimisation. Par exemple, les intrants des modèles de simulation peuvent inclure des séries chronologiques beaucoup plus longues tout en tenant compte d’autres facteurs économiques et

(24)

12

environnementaux. Les sorties résultantes peuvent mieux identifier les variations de multiples indicateurs de performance du système.

Jain (2005) a simulé le transfert interbassin d’un système de quatre bassins versants comprenant treize barrages à usages hydroélectrique agricole et domestique. Les résultats ont montré que le système telle que configuré permettra d’optimiser la production hydroélectrique tout en satisfaisant les demandes des autres secteurs d’activité.

1.3.3. Les modèles génériques

Les systèmes hydrographiques sont constitués de plusieurs composantes à savoir des réservoirs, des stations de pompage, des sites de demande, des centrales hydroélectriques et d’autres phénomènes agissant sur les eaux de surface et les aquifères. La modélisation de ces systèmes complexes par l’optimisation ou la simulation peut, dans certains cas, nécessiter d’apporter des simplifications sur ces phénomènes (discontinues, non linéaires ou non convexes) interagissant et caractérisant le système. Des programmes informatiques plus polyvalents ont été mis en place depuis les années 70 dans l’optique d’aider à l’analyse approfondie des systèmes hydrographiques. Ces logiciels de simulation communément appelés système d’aide à la décision (DSS) sont des systèmes informatiques, intégrant des outils d'analyse mathématiques, employés pour représenter des processus concrets de prise de décision et qui ont la capacité de prédire le comportement du système sous différents conditions ou scénarios de gestion

Ils ont la capacité d’assister l’usager à différents niveaux, allant des travaux simples de collecte de données aux opérations complexes de gestion, de planification voire même d’identification d’objectifs contradictoires.

L’utilisation de ces programmes est aussi recommandée dans les processus de prise de décision ou de mise en place de politiques de gestion impliquant la participation des parties prenantes (Loucks. 2005). Ils ont la capacité d’évaluer la réponse du système face aux déséquilibres hydrologiques et d’identifier les conséquences de ces changements sur la disponibilité de l’eau dans les différents secteurs.

De nombreux modèles génériques ont été créés pour l’optimisation et la simulation des systèmes hydrographiques.

AQUATOOL développé par l’université polytechnique de valencia (UPV) est utilisé par plusieurs

organismes de bassin de l’Espagne (et de l’étranger notamment l’Argentine, le Brésil, le Maroc, le Pérou…) pour l’étude de la gestion des ressources hydrographiques et plus particulièrement la

(25)

13

prévision des stress hydriques susceptibles de se produire dans certains cours d’eau des pays. Ce système incorpore des modules destinés à traiter des problèmes spécifiques. Le module ECOGES est, par exemple, destiné à l’évaluation économique et à la mise en place de stratégies économiquement efficaces.

PSO-MODSIM (Shourian et al. 2008) est un modèle d’optimisation basé sur la simulation, développé

pour l’étude multicritère des bassins hydrographiques. Ce modèle jugé très efficace en termes de capacité de stockage des données combine une technique d’optimisation hybride (MODSIM) à un algorithme d’optimisation méta-heuristique (PSO) pour proposer des politiques d’allocation économiquement efficaces ou équitables des ressources en eau.

RIVERWARE développé pour le US bureau of reclamations et le Tennessee Valley Authority (TVA)

est destiné à la gestion et à la planification, à court, moyen ou long terme, de l’utilisation des systèmes hydrographiques (cours d’eau et aquifères) et de leurs composantes (réservoirs, sites de demande, station de pompage et d’épuration etc.). Il utilise les données des modèles de simulation d’un Système d’Information Géographique (SIG) intégré qui lui fournit les renseignements en temps réel. Le système est conçu autour d’une interface multimédia munie d’accès internet, de cartes géographiques, d’options d’aide hypermédia, d’éléments de schématisation et d’outils d’analyse de séries chronologiques. Le système intègre des modèles d’entrée et de calcul des composantes hydrographiques (pluviométrie, débits, évaporation, flux d’eau souterraine) agricoles (consommation en eau, type de culture, besoins futurs), environnemental (qualité de l’eau, pollution) etc.

RIBASIM (River Basin Simulation Model) est un modèle de simulation développé par Delft

Hydraulics qui convient bien à l’analyse des impacts de la mise en service de nouveaux aménagements sur l’hydrologie du bassin. Il permet d’évaluer une variété de mesures liées à la gestion opérationnelle des infrastructures et à la répartition des ressources entre les secteurs. L’outil calcule périodiquement le bilan volumique massique du système compte tenu des volumes entrants, des volumes sortants et des consignes gestion prédéfinies.

Delft hydraulics a développé d’autres logiciels dont certains peuvent être liés entre eux. RIBASIM peut se lier au système de gestion de données HYMOS et de gestion de la qualité de la ressource DELWAQ qui permettent d’élargir la gamme de variables pouvant être analysés (voir:

(26)

14

MIKE BASIN développé par L’Institut Hydraulique Danois (DHI) est une des applications du

package Water Ressources, de la suite Mike, destiné à analyser le partage des ressources en eau au niveau des bassins hydrographiques internationaux, nationaux et locaux. Il permet d’optimiser la répartition multisectorielle (domestique, industriel, agricole, énergétiques etc.) des ressources en eau compte tenu des contraintes techniques, économiques, sociales, et politiques et des priorités d’allocation entre les secteurs. Une macro de calcul adaptée permet d’optimiser chaque variable d’entrée. Le modèle est paramétré de manière à définir une solution quasi-stationnaire à chaque pas de temps

WEAP : développé par l’Institut Environnemental de Stockholm (SEI) fournit un cadre compréhensif,

flexible et convivial pour la planification et l'analyse des politiques de répartition des ressources en eau entre différents usages. Il simule une large gamme de composantes naturelles et anthropiques des systèmes, y compris les eaux de surface, les eaux souterraines, la répartition multisectorielle des ressources en eau. Le module d'analyse financière permet aussi à l'utilisateur d'explorer les comparaisons coût-bénéfices des projets.

Par ailleurs dans les situations où les modules proposés par WEAP ne suffisent pas pour analyser toutes les composantes des systèmes hydrographiques, des liens dynamiques vers d'autres modèles et logiciels, comme QUAL2K (analyse de la qualité des eaux), MODFLOW5 (modélisation des nappes et aquifères), PEST( Calibration des paramètres ), Excel et GAMS (importation des données) permettent d’approfondir l’étude des systèmes hydrographiques.

Dans le cadre de cette étude WEAP sera utilisé pour modéliser le bassin du fleuve Sénégal. Le chapitre 3 décrit de manière plus détaillée le modèle.

(27)

15

2.

Description de la zone d’étude

2.1. Caractéristiques physiques

Le bassin versant du fleuve Sénégal couvre une superficie totale de 300000 km²3. Il prend sa source à

750 m d’altitude dans les hauts plateaux du Fouta-Djallon et traverse successivement la Guinée, le Mali, la Mauritanie et le Sénégal avant de se jeter dans l’océan atlantique. Il se divise entre le haut bassin (56% de la superficie), la vallée (35% de la superficie) et le delta. Le haut bassin s’étend de la source à la station hydrologique de Bakel sur une distance de 980 Km. La vallée s’étend sur 600 Km à une altitude d’une centaine de mètres. Quant au delta, il va de Richard-Toll à l’embouchure du fleuve sur 170 Km.

Le fleuve Sénégal (Voir figure 4) est formé par la confluence de trois affluents majeurs : le Bafing, le Bakoye et la Falémé. Ils produisent ensemble près de 95% du débit total du fleuve. Le Bafing est considéré comme la branche mère et contribue pour près de 50% des apports du fleuve en année d’hydraulicité moyenne. Entre Manantali et Kayes et entre Kayes et Bakel, le cours d’eau reçoit successivement les apports de 2 affluents: le Bakoye, et la Falémé. Le débit moyen annuel du fleuve Sénégal est estimé à 650 m3/s à Bakel soit un apport annuel moyen de 22 Km3.

De Bakel à Diama, les apports deviennent très faibles et limités à la contribution de 3 affluents : l’Oued Garfa, le Gorgol et le Guélouar dont les apports sont négligeables (moins de 5% des apports totaux).

Le régime hydrologique du fleuve se caractérise par une importante irrégularité interannuelle et inter saisonnière qui a, pendant longtemps, constitué le principal handicap de la vallée avec une réduction considérable de ses potentialités exploitables. De la même manière que les hautes eaux exceptionnelles provoquaient des dégâts d’inondation, les déficits hydrologiques entrainaient une forte remontée des eaux salées provenant de l’océan atlantique, pénalisant ainsi l’économie global du bassin.

La volonté de maîtriser les ressources en eau a invité les états riverains à mettre en place, en 1972, un cadre de gestion concertée, à travers la création de l’Organisation pour la Mise en Valeur du Fleuve Sénégal (OMVS). Cette coopération a permis de mieux administrer les eaux frontalières du bassin.

(28)

16

Au cours des années quatre-vingt, un premier programme de développement multisectoriel a mis l'accent sur les secteurs majeurs de l'irrigation, de l'hydroélectricité, de la navigation et de la protection de l’environnement.

Le barrage hydroélectrique de Manantali mis en service depuis 1987 est destiné à réguler les débits du fleuve (laminage des pointes de crue et soutien des basses eaux pour la pratique de l’agriculture irriguée, de la navigation et pour le maintien de l’équilibre écologique) et à produire de l’énergie (200 MW de puissance installée, démarrage de production en 2002).

Le barrage de Diama situé à l’embouchure du fleuve a introduit une division artificielle entre l’océan atlantique et le delta du fleuve et permet aujourd’hui de rehausser (hors période de crue) le niveau d’eau amont à une hauteur de 2 m au-dessus de la mer empêchant ainsi la remontée des eaux salées. Il facilite par ailleurs l’irrigation gravitaire des périmètres aménagés du delta.

Figure 4: le bassin du fleuve Sénégal

Source: Prepared for the World Water Assessment Programme (WWAP) by AFDEC, 2002.

Le fleuve Sénégal est souvent cité comme exemple de coopération réussie en Afrique de l’ouest. En effet la mise en place d’institution de dialogue et d’accords de partage a grandement aidé à la gestion efficace et transparente des ressources communes du bassin.

La création de l’Organisation pour la Mise en Valeur du fleuve Sénégal (OMVS) en mars 1972 a permis aux pays riverains de se doter d’un cadre juridique et structurelle d’exécution des projets de développement économique et social. Ses principales fonctions sont de veiller à l’exploitation

(29)

17

rationnelle, intégrée et coordonnée des ressources en eau du bassin, de réduire la vulnérabilité des états membres face aux aléas climatiques, de sécuriser les revenues des populations locales et de maintenir l’équilibre écologique du milieu (OMVS. 1999).

La ratification de la charte des eaux du fleuve Sénégal en 2002 (Voir Annexe A) démontre la volonté des états riverains à assurer une gestion efficiente et durable conciliant le respect de l’environnement au développement socio-économique des états. Elle prend en compte, de façon harmonieuse, prospective, et à une échéance suffisamment lointaine, l’ensemble des usages de la ressource et indique en ce sens la volonté des parties prenantes à mettre en œuvre une politique solidaire, dans un cadre concerté, progressif, souple, réactif et ajustable (OMVS. 2010).

2.2. Les enjeux géopolitiques

Le bassin versant du fleuve Sénégal est une zone très contrastée du point de vue pluviométrique, avec une nette opposition entre régions bien arrosées (Guinée et Mali) et régions arides (Sénégal et Mauritanie). La Guinée fournit plus de 50% du débit total du bassin pendant que le Mali débite près de 40% du volume transitant à Bakel. La Mauritanie et le Sénégal qui sont les deux pays situés sur la partie aval du bassin ne disposent quasiment pas de sources d’eau locales. En saison des hautes eaux, hormis les volumes reçus par transfert interzonal, le sous bassin dispose d’une quantité limitée d’apports (-5% des apports du bassin). En saison des basses eaux qui s’étend sur une période relativement longue (7 mois) le sous bassin est totalement dépourvu de ressources.

Jusqu’en 2006, l’OMVS ne comptait que trois états membres: le Mali, la Mauritanie et le Sénégal. Les incitations à la coopération de la Guinée étaient limitées par sa position stratégique sur le fleuve (de part et d’autre des fleuves Sénégal et Niger), son fort potentiel hydraulique (les ressources en eau disponibles en Guinée sont estimées à 188 km3, soit plus 80% des ressources superficielles disponibles

à l'intérieur des autres pays membres de l’OMVS) et surtout par la difficulté de l’OMVS à trouver un canevas de développement mutuellement bénéfique aussi bien aux autres états membres qu’à la Guinée. Comme le montre le tableau 2, aucun des grands volets du programme de l’OMVS (irrigation, production d’énergie et navigation) ne revêtait un intérêt critique pour la Guinée (Niasse. 2004).

(30)

18

Tableau 2: Priorités des États riverains par rapport aux volets du programme actuel de l’OMVS

Source: The GEF International Waters Learning Exchange and Resource Network (IWLEARN): Strengthening

Transboundary Waters Management via information sharing and learning among stakeholders – Bangkok, Nov. 20th 2004

L’OMVS, malgré les nombreux projets multisectoriels réalisés, restait très prévoyant à des actions unilatérales de la Guinée sur la partie amont du fleuve. En effet l’aménagement unilatéral du bassin du haut Niger par la Guinée aurait engendré des répercussions alarmantes en termes de réduction des volumes reçus par les autres états riverains du fleuve Sénégal. Tous les pays membres reconnaissaient que l’adhésion de la Guinée était la meilleure solution et qu’elle ne pouvait être exclue de la planification du développement et de la gestion efficiente des ressources du bassin à long terme. Par conséquent, l'inclusion de la Guinée dans l’OMVS est devenue une priorité pour les pays riverains et crucial pour le développement régional et l'intégration économique (World Bank 2006). Si ce pays est aujourd’hui membre de l’OMVS il aurait fallu trouver d’autres programmes, autres à même de lui garantir une part équitable des gains de la coopération (Niasse. 2004).

La Guinée, grâce à l’appui de l’OMVS, envisage de développer son fort potentiel hydroélectrique (jusque-là inexploité par manque de ressources financières) et s’ériger une place de taille dans le marché énergétique ouest africain. En contrepartie, les pays en aval excluent toute incertitude concernant le développement d’actions unilatérales pouvant réduire la disponibilité de l’eau. La Guinée décide finalement de rejoindre l’OMVS pour participer, en collaboration avec les autres états membres, aux processus de prise de décision au sein de l’organisme et bénéficier de la gestion commune des ressources partagées du bassin.

La Mauritanie et le Sénégal restent les deux états riverains dont le facteur de dépendance, qui représente la part totale des ressources en eau produite hors de leurs frontières, reste des plus élevés sur le bassin. En effet contrairement au Mali et à la Guinée qui sont riverains du bassin du fleuve Niger et qui disposent de ressources en eau relativement abondantes, le fleuve Sénégal reste la seule source d’eau douce de la Mauritanie et du Sénégal qui exploitent près de 90% des aménagements agricoles du bassin. Cette situation a conduit à des rivalités pour le contrôle de la ressource et qui se sont soldées par

Pays hydroélectriqueÉnergie Irrigation Navigation Agriculture de décrue

Guinée Potentiellement haute Néant Néant Néant

Mali Haute Faible Très haute Faible

Mauritanie Très haute Très haute Haute Haute

(31)

19

l’installation d’un climat d’hostilité et de méfiance entre les deux pays voisins depuis maintenant plus de deux décennies.

Conflits autours des terres de la vallée et du delta

C’est lors du dernier trimestre de l’année 1988 qu’a commencé ce qui allait mener quelques mois plus tard à la plus grave crise dans les relations entre le Sénégal et la Mauritanie. La Mise en service du barrage de Manantali en 1988 a modifié la dynamique des écoulements de la vallée et altéré l’occupation des sols par une augmentation du potentiel irrigable de la vallée et du delta. La Mauritanie, désirant reprendre le contrôle de ses terres exploités par la population non maure (en l’occurrence les sénégalais) a exproprié et expulsé les agriculteurs vivant sur son territoire. La déportation des populations sénégalaise et mauritanienne vivant dans la vallée par les élites des deux pays a été l’un des conflits les plus sanglants. Elle a fait plus de 200 victimes, 75000 déplacés sénégalais et 150000 déplacés mauritaniens. Suite à ces frictions politiques, la Guinée menaçait lui aussi de dévier les eaux du fleuve en provenance de son sous bassin. Ce qui n’aurait pour conséquence que d’augmenter la compétition autours de la ressource et d’aggraver les tensions (Kipping. 2005).

Mise en eau des vallées fossiles du Sénégal

Une deuxième crise a été récemment suscitée par le projet de revitalisation des vallées fossiles présenté en 1997. Celui-ci consistait à dévier annuellement 10 Km3 d’eau, à partir du lac de Guiers, pour

alimenter 3000 Km d’anciennes rivières des vallées du centre nord du Sénégal. Le Sénégal considérait la remise en eau de cette vallée fossile comme un excellent moteur de développement des activités agro-pastorales de la région sahélienne du centre nord du pays.

La Mauritanie s’est fermement opposée à sa réalisation affirmant qu’il compromettait son propre « accès à la ressource » et qu’il contreviendrait à la convention de 1972. Abandonné pendant quelques temps, le projet a été relancé en 2000 dans un discours du chef d’état sénégalais nouvellement élu. Nouakchott accusa Dakar de « saper les intérêts mauritaniens » et donna un « délai de 15 jours aux ressortissants sénégalais pour quitter définitivement la Mauritanie ». Craignant une escalade similaire à celle de 1989 le Sénégal annonça finalement le gel du projet, ce qui fit baisser la tension en attendant le prochain incident (Boinet. 2013).

(32)

20

2.3. Les usages de la ressource

2.3.1. L’hydroélectricité

Sur l’ensemble de la zone OMVS, l’accès à l’électricité constitue un réel frein au développement. Les pays membre de l’OMVS sont, dans leur totalité, confrontés à des pénuries et à des demandes croissantes en énergie. Et pourtant le bassin versant dispose du potentiel hydroélectrique nécessaire pour couvrir les besoins de ses populations. La production actuelle d’électricité représente 16% de la capacité de production du bassin.

La demande actuelle des états riverains du bassin est évaluée à 4400 GWh/an. Si le taux d’accroissement se maintient sur l’ensemble des réseaux d’électricité des États membres, les besoins énergétiques seront de l’ordre de 15000 GWh en 2040. La centrale de Manantali, qui est à ce jour, le seul ouvrage opérant pour la production d’énergie permet de répondre à 18% des besoins énergétiques du Mali, de la Mauritanie et du Sénégal.

Depuis 2012, l’OMVS a entrepris de grands projets de construction de barrages hydroélectriques, l’objectif étant d’augmenter l’offre énergétique et de contrôler totalement les eaux du bassin. La figure 5 indique les emplacements des différents barrages en service et en projets sur le bassin.

En Guinée: la Guinée est considérée comme le château d’eau d’Afrique de l’ouest. Elle dispose du

plus fort potentiel hydroélectrique du fleuve Sénégal, celui–ci étant évalué à 6000 MW. Cette estimation concerne les grands bassins versants tels le Sénégal, le Niger et la Gambie et ne prend pas en compte les centaines de rivières et de cours d’eau qui serpentent et irriguent la grande zone forestière du pays et qui sont autant de sites potentiels pour la mini et la micro hydroélectricité.

Paradoxalement, la Guinée expose le plus bas taux d’électrification du bassin avec une exploitation hydroélectrique inférieure à 2%. Face à cette situation, la nouvelle politique énergétique de l’OMVS prévoit mettre en service trois grands aménagements d’ici 2025. Il s’agit des barrages de Koukoutamba et Boureya et la centrale au fil de l’eau de Balassa. Le fonctionnement de ses centrales devrait permettre, à long terme, de stabiliser l’offre énergétique du pays en garantissant une puissance installée de 625 MW.

(33)

21

Au Mali: Autour du barrage de Manantali jusqu’à Bakel se pose la problématique de la mise en services

des nouveaux barrages et centrales au fil de l’eau. Le Mali devra abriter l’essentiel des centrales hydroélectriques du bassin (7 + le barrage existant de Manantali). Ces aménagements prévus, pour la plupart, en amont de Manantali sur les affluents non contrôlés de la Falémé et du Bakoye auront pour rôles principaux de réguler les débits du fleuve à un minimum de 500 m3/s à Bakel et de produire de

l’énergie hydroélectrique pour le Mali, la Mauritanie et le Sénégal. Les centrales au fil de l’eau de Félou et Gouina prévues en aval de Manantali n’ont pas d’impact sur la régulation des débits du bassin mais permettent de transformer les chutes d’eau de Manantali et l’affluent du Bakoye en énergie hydroélectrique. La puissance installée du Mali devrait à terme atteindre 600 MW.

Au Sénégal: le barrage de Gourbassi prévu en amont de la Falémé a pour objectif de contribuer à la

régularisation des débits du fleuve Sénégal pour permettre l’agriculture irriguée, la navigation et la production d’énergie. Sa capacité de stockage de 2100 Mm3 et sa puissance installée de 30 MW restent

très faibles compte tenu de l’enjeu du contrôle des eaux de l’affluent. Les études d’avant-projet ont toutefois révélé que les conditions morphologiques et géologiques de la Falémé ne sont pas favorables à la mise en service d’un plus important aménagement et que Gourbassi est le seul ouvrage qui puisse être réalisé sur la Falémé (SNC-Lavalin. 2012).

Figure 5: localisation des barrages du bassin du fleuve Sénégal

Source: Développements hydrauliques et gestion d’un hydrosystème largement anthropisé. Le delta du fleuve Sénégal (2013)

(34)

22

Pays Barrage Cours d'eau stockage (Mm³) Capacité de Puissance installée

(MW) Fonctions

Mali

Manantali Bafing 11300 200 Hydroélectricité + Régulation Félou Sénégal 0 (au fil de l'eau) 70 Hydroélectricité Gouina Sénégal 0 (au fil de l'eau) 140 Hydroélectricité Moussala Bafing 3000 30 Hydroélectricité + Régulation Bindougou Falémé 2000 49,5 Hydroélectricité + Régulation Boudofora Bakoye à déterminer 30 Hydroélectricité + Régulation Maréla Bakoye 3000 21 Hydroélectricité + Régulation Badoumbé Bakoye 10000 70 Hydroélectricité + Régulation Guinée Koukoutamba Bafing Boureya Bafing 3600 5500 280 160 Hydroélectricité + Régulation Hydroélectricité + Régulation

Balassa Bafing 0 (au fil de l'eau) 180 Hydroélectricité Sénégal Gourbassi Falémé 2100 30 Hydroélectricité + Régulation

Tableau 3: Projets de centrales hydroélectriques sur le bassin du fleuve Sénégal

Hormis les centrales au fil de l’eau qui n’ont aucun impact sur la mobilisation des ressources, tous les projets de barrage du bassin tiendront compte de l’objectif de régulation des débits du fleuve. La réalisation de ces projets aura des répercussions aussi bien positives que négatives sur le fonctionnement global du système. En effet ces aménagements auront pour conséquence d’artificialiser le régime du fleuve. Bien qu’il ne soit pas évident de dissocier les modifications attribuables aux changements climatiques à celles dues à la mise en service des barrages hydroélectriques ni même de prédire l’état hydrologique du bassin en absence de ces aménagements, il est reconnu que la mise en service des barrages réduit la sévérité des étiages, les risques d’inondation et la remontée des eaux salines au niveau de la vallée et du delta.

Par ailleurs l’altération du régime hydrologique du fleuve va créer un corps d'eau douce permanent assez stable et qui pourrait favoriser la prolifération d’une végétation dense de plantes aquatiques envahissantes. Ces plantes prolifèrent sur le long du fleuve et dans les canaux d'irrigation, réduisant ainsi les vitesses d'écoulement, et augmentant le risque de développement de maladies liées à l’eau. Aussi, un meilleur contrôle des eaux de la vallée et du delta pourrait faire ressurgir la question de l’occupation foncière entre les populations locales sénégalaises et mauritaniennes qui ont de réels intérêts sur ce fleuve.

2.3.2. Le laminage des pics de crues à Bakel

La réduction des risques d’inondation au niveau de la vallée et du delta fait aujourd’hui partie intégrante de la politique de gestion des ressources en eau du bassin. Il constitue en ce sens la première consigne de déstockage et de gestion de stock des réservoirs.

Figure

Figure 1 : Débits moyens annuels de la station de Bakel 1903-1980  Source :  OMVS et OMM
Tableau 1: Exemples de différends relatifs au partage des eaux  Source: planète Science, Vol
Figure 2: Optimisation versus Simulation
Figure 3: Structure de base de la programmation dynamique
+7

Références

Documents relatifs

Plusieurs formulations trouvées dans la littérature ont été testées en vue de choisir celle pouvant s'adapter le mieux à notre zone d'étude, et d'estimer par la suite, à l'aide

C’est dans cette même perspective que le Mali a pris l’initiative de créer, en 2002, l’Agence du Bassin du fleuve Niger, dont la mission prioritaire est la

Concernant la grille finale, la carte des écoulements traduit bien les contrastes hydrologiques très marqués, résul- tat confirmé par la grande variabilité spatiale de

Pour ce qui est des comportements individuels, migrer fait passer le candidat au départ d’un espace fermé, limité à l’origine des migrations à celui du village, à un espace

Figure 6 : Performance du modèle en validation en fonction du type de WHC à Bafing Makana (découpage de 10 ans) ; pour chaque jeu de paramètres sont données les

À l’échelle mensuelle (Tableau 4), le test statistique de Pettitt indique, pour la station de Bakel, une rupture dans les séries des débits mensuels tantôt antérieure,

Figure 6 : Performance du modèle en validation en fonction du type de WHC à Bafing Makana (découpage de 10 ans) ; pour chaque jeu de paramètres sont données les

Partager des informations et confronter des expériences qui ont déjà démontré leur pertinence, tels sont les objectifs de la ren- contre régionale «Coopération internationale dans