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Propositions pour une politique de soutien des indépendants en difficulté

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Academic year: 2021

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Texte intégral

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Propositions

pour une politique

de soutien

des indépendants

en difficulté

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Propositions

pour une politique

de soutien

des indépendants

en difficulté

Février 2012

Studiecentrum voor Ondernemerschap (SVO),

Hogeschool-Universiteit Brussel

Centre d’Etude de la Performance des Entreprises (CEPE),

HEC Ecole de Gestion de l’Université de Liège

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Propositions pour une politique de soutien des indépendants en difficulté

Deze publicatie bestaat ook in het Nederlands onder de titel: Beleidsaanbevelingen ter ondersteuning van ondernemers in moeilijkheden

Une édition de la Fondation Roi Baudouin, rue Brederode 21 à 1000 Bruxelles

AUTEURS Johan Lambrecht, directeur du Studiecentrum voor Ondernemerschap - Hogeschool-Universiteit Brussel

Didier Van Caillie, directeur du Centre d’Etude de la Performance des Entreprises - HEC Ecole de Gestion - Université de Liège

Co-auteurs :

Diane Arijs, Vincent Molly et Wouter Broekaert, chercheurs, Studiecentrum voor Ondernemerschap

Sophie Arnould et France Riguelle, chercheurs, Centre d’Etude de la Performance des Entreprises

TRADUCTION Michel Teller

COORDINATION POUR LA FONDATION ROI

BAUDOUIN

Françoise Pissart, directrice

Johan Alleman, responsable de projet Anne-Françoise Genel, responsable de projet Ann Vasseur, assistante de direction

CONCEPTION GRAPHIQUE PuPiL

MISE EN PAGE Tilt Factory

PRINT ON DEMAND Manufast-ABP asbl, une entreprise de travail adapté

COLOPHON

Cette publication peut être téléchargée gratuitement sur notre site www.kbs-frb.be

Une version imprimée de cette publication électronique peut être commandée (gratuitement) sur notre site www.kbs-frb.be, par e-mail à l’adresse publi@kbs-frb.be ou auprès de notre centre de contact, tél. + 32-70-233 728, fax + 32-70-233-727 Dépôt légal: D/2848/2012/04 ISBN-13: 978-2-87212-664-4 EAN: 9782872126644 BESTELNUMMER: 3035 Février 2012

Avec le soutien de la Loterie Nationale

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Toute activité indépendante n’est pas forcément un long fleuve tranquille. Les aléas de la conjoncture économique font que les bonnes années alternent avec les moins bonnes. Les indépendants doivent donc régulièrement faire face à des périodes plus difficiles. En soi, ce n’est pas un drame. Mais cela peut le devenir si les difficultés s’accumulent et que les bonnes années ne reviennent plus. Une récente étude du Studiecentrum voor Ondernemerschap révèle que 15% des indépendants vivent depuis au moins six ans sous le seuil de pauvreté. C’est pour améliorer la situation de ces indépendants en difficulté que la Fondation Roi Baudouin a jugé utile de mener un travail de réflexion. Non pas que rien n’ait été entrepris jusqu’ici. Mais cela reste largement insuffisant pour les quelque 40.000 indépendants qui, en Belgique, se trouvent aujourd’hui en permanence sous le seuil de pauvreté.

Par le biais de son Réseau d’écoute des nouvelles injustices sociales, la Fondation Roi Baudouin a été interpellée par des témoignages mettant en évidence cette problématique encore trop méconnue, en raison notamment de l’isolement dans lequel s’enferment beaucoup d’entrepreneurs indépendants confrontés à des difficultés professionnelles et/ou personnelles.

C’est pourquoi elle a souhaité stimuler un débat bien informé sur des propositions susceptibles de prévenir les situations de pauvreté chez les indépendants et d’y remédier. Pour ce faire, début 2011, la Fondation a confié à deux chercheurs – Johan Lambrecht, directeur du Studiecentrum voor Ondernemerschap, Hogeschool-Universiteit Brussel, et Didier Van Caillie, directeur du Centre d’Etude de la Performance des Entreprises, HEC Ecole de Gestion, Université de Liège – la mission de formuler et d’étudier une série de recommandations. Il leur a été demandé d’élaborer ces propositions de manière aussi concrète, pratique et réaliste que possible, car il est aujourd’hui illusoire de compter sur d’importants budgets supplémentaires pour mener des politiques nouvelles.

La Fondation a mis sur pied un Comité d’accompagnement afin de suivre la mission confiée aux chercheurs, en suggérant des pistes et en émettant des critiques. Ce Comité, placé sous la présidence d’Annick Floreal, conseillère générale, SPF Sécurité Sociale, Direction générale Indépendants, était composé de représentants d’organisations publiques et privées - du Nord et du Sud du pays - qui connaissent bien la problématique. Les chercheurs ont intégré beaucoup des remarques émises par le Comité, ce qui a très certainement enrichi le rapport. Les échanges ont permis de dégager un large consensus sur l’importance

AVANT-PROPOS

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des thématiques abordées et sur les problèmes qu’il s’agit de résoudre. Au final, la plupart des recommandations avancées par les chercheurs emportent l’adhésion des membres. Sur certains points néanmoins, et en particulier la question du mode de calcul et de paiement des cotisations sociales, il n’a pas été possible d’arriver à une mesure faisant l’unanimité. Il avait été précisé au départ que le Comité ne devait pas nécessairement valider le contenu de chaque proposition, dans la mesure où le rapport reste celui des chercheurs.

Les propositions ont été regroupées en sept grands thèmes ou chantiers. Certaines visent essentiellement à améliorer des dispositifs existants (par exemple, la procédure de paiement des cotisations sociales ou la loi sur la continuité des entreprises), d’autres portent sur des mesures nouvelles à concrétiser (comme l’indemnité de cessation d’activité). Tous les niveaux de pouvoir en Belgique sont concernés par ces recommandations.

Elles ont été présentées et débattues à l’occasion d’une table ronde organisée le 14 décembre 2011. Cette rencontre a donné l’occasion aux différents acteurs concernés d’exprimer leur point de vue. Ce rapport final intègre les différentes réactions et suggestions exprimées lors du débat.

La Fondation Roi Baudouin tient à remercier très chaleureusement les experts, la présidente du Comité d’accompagnement et l’ensemble des membres de ce Comité pour leur contribution constructive, concrète et pratique.

Elle espère que le rapport, qui prend effectivement en compte le contexte d’austérité budgétaire, inspirera des initiatives politiques concrètes.

Fondation Roi Baudouin Février 2012

Fondation Roi Baudouin ProPositions Pour une Politique de soutien des indéPendants en difficulté 6 Avant-propos

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COMITé

D’ACCOMPA GNEMENT

‘PRéCARITé CHEZ

LES INDéPENDANTS’

Présidente

Annick Floreal, conseillère générale, SPF Sécurité Sociale - Direction

générale Indépendants – Service Prestations

Membres

Chris Botterman, coordinateur Affaires sociales, Boerenbond Christine Engelen, directrice de l’Action sociale, CPAS de Liège

Gabrielle Eymael, chef de service, Caisse d’assurances sociales de l’Union des Classes Moyennes (UCM)

Riccy Focke, coordinateur, Boeren op een kruispunt

Muriel Galerin, secrétaire, Comité général de gestion pour le statut social des travailleurs indépendants - Institut National d’Assurances Sociales pour Travailleurs Indépendants (INASTI)

Olivier Kahn, coordinateur, Centre pour Entreprises en difficulté, expert-comptable et conseil fiscal, Cabinet Olivier Kahn & Partner

Frédéric Lernoux, administrateur-délégué, Centre de Connaissances du Financement des PME - Fonds de Participation

Benoit Lescrenier, conseiller financier, Chambre de Commerce et d’Industrie du Luxembourg Belge

Christine Mattheeuws, présidente, Syndicat Neutre pour Indépendants (SNI)

Jean-Paul Pruvot, juge consulaire, Tribunal de Commerce de Liège Benoit Rousseau, directeur juridique, Syndicat des Indépendants et des PME (SDI)

Luc Soens, directeur, Liberaal Verbond voor Zelfstandigen (LVZ)

Bernadette Thény, directrice générale, Chambre de Commerce et d’Industrie du Luxembourg Belge

Aleydis Uyttendaele, juriste, adjointe de la direction, CPAS de Gand - Service juridique

Anne Vanderstappen, conseillère Affaires sociales, UNIZO-service d’étude

Pol Vermoere, porte-parole, Tussenstap Dirk Verschoore, directeur, Efrem

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SOMMAIRE

AVAnt-pRopoS . . . . 5

COMITé D’ACCOMPA GNEMENT ‘PRéCARITé CHEZ LES InDépEnDAntS’ . . . . 7

SyntHèSE . . . . 11

INTRODUCTION . . . . 15

LES SEpt CHAntIERS . . . . 19

I. moDIFICAtIon DU moDE DE pAIEmEnt DES CotISAtIonS SoCIALES: poUVoIR AntICIpER DE mAUVAISES SURpRISES . 19

Contexte . . . 19

Proposition des auteurs . . . 20

Le débat . . . 20

II. AmELIoRAtIon DE LA pRoCéDURE DE DISpEnSE DU pAIEmEnt DES CotISAtIonS SoCIALES poUR InDépEnDAntS: poUR UnE pLUS gRAnDE SéCURIté jURIDIqUE . . . . 23

Contexte . . . 23

Propositions des auteurs . . . 23

Le débat . . . 25

III. pASSAgE DU StAtUt D’InDépEnDAnt à Un AUtRE StAtUt oU VICE VERSA: Un pAS VERS UnE pLUS gRAnDE ContInUIté 27 Contexte . . . 27

Propositions des auteurs . . . 27

IV. FAVoRISER LA ContInUIté DE L’ACtIVIté oU DE L’EntREpRISE . . . . 29

Contexte . . . 29

Propositions des auteurs . . . .31

Le débat . . . 33

V. FACILItER LE RègLEmEnt CoLLECtIF DE DEttES . . . . 35

Contexte . . . 35

Propositions des auteurs . . . 36

VI. InDEmnIté DE CESSAtIon D’ACtIVIté: ARRêtER à tEmpS poUR éVItER LA CAtAStRopHE . . . . 39

Contexte . . . 39

Proposition des auteurs . . . 39

Le débat . . . 41

VII. HARmonISER L’ACCompA gnEmEnt DES InDépEnDAntS En DIFFICULté Et REnFoRCER Son FInAnCEmEnt StRUCtUREL pAR L’AUtoRIté pUBLIqUE . . . . 43

Contexte . . . 43

Propositions des auteurs . . . 47

Le débat . . . 49

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SyNTHèSE

Les experts qui ont été chargés par la Fondation Roi Baudouin d’élaborer des propositions pour venir en aide à des travailleurs indépendants en situation de précarité ont réfléchi à des mesures d’action aussi bien préventives que curatives. Certaines d’entre elles visent essentiellement à améliorer des dispositifs existants, d’autres portent sur des mesures nouvelles, en tout cas dans notre pays. Dans leur mission, les chercheurs ont pu bénéficier des remarques et critiques d’un Comité d’accompagnement composé de dix-huit représentants d’organisations publiques et privées qui connaissent bien la problématique.

Une première mesure de type préventif concerne la réforme du mode de paiement des cotisations sociales. Comme celles-ci sont calculées sur les revenus perçus trois ans auparavant et que l’activité indépendante peut être soumise à de fortes fluctuations annuelles, le système actuel produit un décalage aux effets souvent néfastes: il arrive que ce soit justement dans une période difficile pour lui que l’indépendant doive payer des cotisations plus élevées, consécutives d’une ‘bonne année’ antérieure. Il y a consensus sur la nécessité de faire davantage coïncider le moment où les revenus de l’indépendant sont perçus et le versement des cotisations sociales. Mais pour parvenir à cet objectif, le débat confirme que deux options différentes ont chacune leurs défenseurs: soit un système de versements anticipés des cotisations sociales (la proposition des auteurs), soit un système de paiement des cotisations dans l’année même, sur la base d’une estimation des revenus.

Les indépendants qui se trouvent carrément dans l’incapacité de payer leurs cotisations sociales peuvent par ailleurs introduire une demande de dispense. Ils doivent pour cela prouver leur ‘état de besoin’ auprès d’une commission administrative spéciale. Mais celle-ci est débordée, ce qui rend les délais extrêmement longs. Dans l’intervalle, non seulement l’indépendant est laissé dans l’incertitude, mais il ne peut pas non plus bénéficier de certains droits sociaux. De plus, la procédure manque de transparence. L’établissement de critères clairs, objectifs et connus de tous permettrait d’anticiper dans une large mesure les décisions de la commission. Il est également proposé d’étendre le rôle des caisses d’assurances sociales en les autorisant à traiter elles-mêmes les demandes de dispense dans les cas où il n’y a pas de discussion sur la preuve de l’état de besoin. Le rapport prévoit aussi que l’indépendant qui obtient une dispense de paiement des cotisations sociales soit tenu de bénéficier d’un accompagnement individuel (gratuit dans la phase initiale), assuré par une organisation agréée pour exercer cette mission.

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Cette obligation de suivi contribuerait à ce que l’indépendant en difficulté se fasse accompagner à temps, alors qu’aujourd’hui les demandes de soutien arrivent souvent trop tard, et aurait un effet dissuasif auprès de certains indépendants qui sollicitent une dispense non justifiée.

Après un échec professionnel, il est également important de pouvoir rebondir, sans qu’une faillite ne devienne un boulet qu’il faut traîner derrière soi pendant toute une carrière. La déclaration d’excusabilité, qui atteste de la bonne foi de l’indépendant failli, doit être délivrée beaucoup plus rapidement. Elle doit aussi pouvoir être accordée à des indépendants qui dirigeaient une société, ce que la législation ne permet pas aujourd’hui. Si la faillite n’est pas frauduleuse, elle ne doit pas non plus laisser de traces dans des fichiers comme ceux de la Centrale des Bilans, car c’est une pratique qui hypothèque la réinsertion professionnelle de l’indépendant.

En vertu d’une législation récente, le tribunal de commerce peut quant à lui jouer un rôle déterminant lorsqu’une entreprise connaît des difficultés. Il dispose de plusieurs alternatives au traditionnel jugement déclaratif de faillite (désignation d’un médiateur, négociation d’un accord à l’amiable, plan de redressement, réorganisation judiciaire...) afin d’assurer autant que faire se peut la continuité de l’entreprise. En outre, il peut aussi exercer une action préventive au travers de ses chambres d’enquête commerciale: celles-ci peuvent convoquer tout entrepreneur identifié comme étant en difficulté et examiner avec lui les mesures à prendre. Mais ces possibilités restent beaucoup trop méconnues, y compris de nombreux professionnels du chiffre et du droit. Et on observe de grandes disparités d’un tribunal à l’autre dans l’application de ces dispositions légales. Le rapport préconise plusieurs mesures pour remédier à ces problèmes, comme des campagnes d’information et de sensibilisation adressées aux indépendants et aux professionnels qui les conseillent, une uniformisation et un partage des meilleures pratiques entre les différents tribunaux de commerce ou encore la désignation dans chaque tribunal d’un juge consulaire spécifiquement formé à l’accompagnement des indépendants en difficulté.

Un cinquième chantier concerne le règlement collectif de dettes. Cette procédure judiciaire de médiation doit permettre de briser la spirale infernale de l’endettement dans laquelle est pris l’indépendant en difficulté et doit l’aider à rétablir sa situation financière. Mais les professionnels de terrain pointent un certain nombre de lacunes, à commencer par le champ d’application beaucoup trop restreint de cette législation qui, en fait, se limite essentiellement aux professions libérales. Par ailleurs, il faudrait lever les ‘freins à la seconde chance’, autrement dit les éléments qui empêchent une personne en règlement collectif de dettes de lancer une nouvelle activité pour assurer sa réinsertion dans le tissu économique. Comme pour le domaine précédent, il y a également des améliorations à apporter sur le plan de la transparence de la procédure et de l’harmonisation des pratiques entre médiateurs de dettes qui souvent n’ont qu’une connaissance partielle des spécificités de l’activité indépendante.

Quand il s’avère qu’une activité n’est pas ou plus viable, le mieux est bien sûr d’arrêter les frais – dans tous les sens du terme – le plus tôt possible, avant qu’une faillite inéluctable n’intervienne. Mais faute d’alternative, bon nombre d’indépendants qui sont dans cette situation sont contraints de poursuivre leur activité envers et contre tout, avec pour seule conséquence que leurs dettes continuent à s’accumuler. Le paradoxe de notre législation actuelle est en effet qu’il faut faire faillite pour pouvoir bénéficier d’un revenu temporaire de remplacement ! C’est pourquoi le rapport suggère l’instauration d’une indemnité de cessation d’activité, assortie de conditions strictes, à l’instar de ce qui existe déjà dans d’autres pays européens.

Fondation Roi Baudouin ProPositions Pour une Politique de soutien des indéPendants en difficulté 12 Synthèse

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Enfin, le manque d’uniformité des pratiques apparaît encore plus criant au niveau des dispositifs d’accompagnement des indépendants en difficulté. L’approche en la matière privilégie tantôt l’appui d’un nombre restreint de structures spécialisées aux compétences élargies (cas de la Flandre et de Bruxelles), tantôt le soutien de structures à dimension essentiellement locale, proches du terrain, mais dont la plupart ne sont pas uniquement spécialisées dans l’accompagnement des indépendants en difficulté ou sont actives sur une dimension spécifique de cet accompagnement (cas de la Wallonie). Le rapport plaide pour un financement structurel et durable d’un nombre limité d’initiatives spécialisées dans l’aide aux indépendants en difficulté. Ce mécanisme financier doit être conçu de manière à encourager le partage des ressources, de l’information et des expériences réussies. Des partenariats doivent également être développés, notamment sur le plan de la formation, avec des CPAS et des services sociaux locaux, dont beaucoup connaissent mal la problématique spécifique des indépendants en difficulté.

Fondation Roi Baudouin ProPositions Pour une Politique de soutien des indéPendants en difficulté 13 Synthèse

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INTRODUCTION

En 2002, le Centre d’Etude pour l’Entreprenariat de la K.U.Brussel a, pour la première fois en Belgique, mené une étude de grande envergure sur la pauvreté des indépendants1. Cette étude a révélé qu’environ un

tiers des indépendants exerçant leur activité à titre principal se retrouvait chaque année sous le seuil de pauvreté (soixante pour cent du revenu médian). Elle a également mis en évidence une répartition très irrégulière des revenus de ces indépendants à titre principal: 70 % d’entre eux se partagent un tiers des revenus, ce qui ne laisse donc que les deux tiers du gâteau aux 30 % restants. La recherche a démontré que la pauvreté des indépendants était un problème réel, mais encore largement méconnu. Cette méconnaissance résulte à la fois de certaines images erronées présentes dans l’opinion publique et de l’isolement des indépendants qui vivent en situation de pauvreté. L’opinion publique associe encore trop souvent l’indépendant à une image de prospérité. L’isolement des indépendants pauvres naît du fait qu’ils dissimulent leurs problèmes, qu’ils considèrent l’échec de leur activité comme un échec personnel, qu’ils fuient l’endroit où cette activité était implantée et que la pauvreté n’est pas un lien qui les unit. En 2010, Année européenne de la lutte contre la pauvreté et l’exclusion sociale, le Centre d’Etude pour l’Entreprenariat a actualisé, à la demande de l’UNIZO, l’étude sur la pauvreté des indépendants2. Cette

mise à jour a confirmé qu’environ un tiers des indépendants à titre principal vivait sous le seuil de pauvreté. Pour avoir une image plus précise de la ‘véritable’ pauvreté des indépendants, le Centre a cherché à savoir pendant combien de temps cette situation s’était prolongée. En effet, comme les revenus des indépendants peuvent connaître des fluctuations importantes d’une année à l’autre, ce n’est pas parce qu’un indépendant se retrouve un an sous le seuil de pauvreté qu’il connaît forcément une situation de pauvreté, alors que c’est sans doute le cas pour celui qui reste plusieurs années sous ce seuil. En 2006, parmi tous ceux qui avaient retiré pendant au moins sept années consécutives un revenu d’une activité indépendante principale, 15 % se sont trouvés pendant au moins six ans sous le seuil de pauvreté. Cela représente plus de 40.000 indépendants en Belgique. Ces indépendants dans le besoin souffrent en particulier de difficultés financières et de problèmes de santé, notamment de troubles psychiques. Ils se plaignent aussi d’être mal encadrés.

1 Lambrecht, J. en Beens, E. (2003). Zelfstandige ondernemers in nood. Ook zij kennen armoede. Tielt, Uitgeverij Lannoo.

2 Lambrecht, J. en Broekaert, W. (2011). Armoede bij zelfstandigen. Een kwantitatief en kwalitatief beeld. Brussel, UNIZO, Studiecentrum voor Ondernemerschap.

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Des mesures politiques concrètes s’imposent pour remédier à ces problèmes. Nous en développons sept dans ce rapport réalisé à la demande de la Fondation Roi Baudouin. Elles sont volontairement très réalistes, cherchant à produire un impact maximal avec un minimum de moyens supplémentaires. Sept propositions de mesures politiques

Un Comité d’accompagnement a été mis sur pied afin de suivre la mission confiée aux deux chercheurs, à savoir l’élaboration de propositions pour une politique de soutien des indépendants en difficulté. Ce Comité était composé de dix-huit représentants d’organisations publiques et privées qui connaissent bien cette problématique (la composition du Comité est reprise en début de brochure).

Lors de la première réunion du Comité d’accompagnement, en mars 2011, les chercheurs ont présenté une matrice de propositions politiques (voir le tableau ci-dessous) en se basant sur leur travail de recherche dans ce domaine. Cette matrice distingue des mesures préventives, visant à éviter de graves difficultés aux indépendants, et des mesures curatives, qui cherchent à y remédier. Ces deux types de mesures ont ensuite été elles-mêmes réparties en deux catégories: des améliorations de dispositifs existants et des mesures nouvelles.

matrice des mesures proposées

Mesures préventives mesures curatives

Amélioration de dispositifs

existants Paiement des cotisations sociales Paiement des cotisations sociales et des impôts Politique préventive des difficultés de

l’entreprise Législation sur les faillites Loi sur la continuité des entreprises Assurance faillite

Accompagnement/formation Accompagnement/formation

Nouvelles mesures Accompagnement/formation Accompagnement/formation

Indemnité de cessation d’activité Entreprenariat de la seconde chance Passage à un autre statut que celui

d’indépendant Sensibilisation

Travail après la retraite

Le débat mené avec les membres du Comité d’accompagnement au sujet de cette matrice a permis de dégager sept chantiers de mesures politiques (nous indiquons entre parenthèses les mesures de la matrice qui correspondent à chacun de ces sept chantiers):

1. Modification du mode de paiement des cotisations sociales (paiement des cotisations sociales). 2. Amélioration de la procédure de dispense du paiement des cotisations sociales pour indépendants

(paiement des cotisations sociales).

3. Passage du statut d’indépendant à un autre statut ou vice versa (législation sur les faillites, entreprenariat de la seconde chance).

Fondation Roi Baudouin ProPositions Pour une Politique de soutien des indéPendants en difficulté 16 INTRODUCTION

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4. Continuité de l’activité ou de l’entreprise (législation sur les faillites, sensibilisation) 5. Règlement collectif de dettes (législation sur les faillites).

6. Indemnité de cessation d’activité (politique préventive des difficultés de l’entreprise, assurance faillite).

7. Accompagnement par les pouvoirs publics (accompagnement/formation, sensibilisation).

L’équipe de recherche a développé ces différentes mesures et a présenté le résultat de ses travaux au Comité d’accompagnement à deux reprises, en juin et en octobre 2011. A l’occasion de ces deux réunions, les membres du Comité ont formulé des critiques constructives, dont la plupart ont été prises en compte par les chercheurs.

Les recommandations ont donc fait l’objet de discussions approfondies avec les membres du Comité. Ces échanges ont permis de dégager un large consensus sur l’importance des sept chantiers considérés, sur la mise en avant des problèmes rencontrés par les indépendants en situation de précarité dans chacun de ces domaines et sur les finalités des propositions à élaborer pour y apporter des réponses; et ce, même si les membres du Comité d’accompagnement ne se sont pas toujours exprimés d’une seule et même voix quand il s’agissait de préciser les modalités de mise en œuvre des recommandations.

A l’automne 2011, les chercheurs ont remis à la Fondation Roi Baudouin leur rapport, qui reflète le consensus du Comité sur les problèmes relevés et sur la plupart des propositions. Ce texte provisoire a été présenté et débattu, le 14 décembre 2011, lors d’une table ronde qui a réuni un très large éventail d’acteurs concernés: décideurs politiques, responsables d’organisations représentatives des indépendants, chercheurs, experts… Tous ceux qui se sont exprimés à cette occasion ont souligné la qualité générale du rapport et l’intérêt des recommandations qu’il contient. Cependant, certaines d’entre elles ont fait l’objet de réflexions, de critiques, de suggestions ou de propositions alternatives. Le texte définitif du présent rapport se veut le reflet aussi fidèle que possible de ces échanges.

La Fondation Roi Baudouin et les auteurs du présent rapport tiennent à remercier chaleureusement les membres du Comité d’accompagnement pour leurs commentaires pertinents, leur feed-back et leurs apports constructifs à la réflexion qui a conduit à la rédaction de ce rapport.

Les sept chantiers pour une politique de soutien des indépendants en difficulté sont présentés ci-dessous. Pour chacun de ces thèmes, les propositions sont détaillées ainsi que le contexte dans lequel elles s’inscrivent.

Professeurs Johan Lambrecht et Didier Van Caillie Au nom des équipes de recherche

Fondation Roi Baudouin ProPositions Pour une Politique de soutien des indéPendants en difficulté 17 INTRODUCTION

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LES SEPT

CHANTIERS

Le texte initial du rapport a été enrichi de diverses contributions formulées lors de la table ronde du 14 décembre 2011. Les noms des auteurs de ces interventions sont mentionnés en gras, sous l’intitulé ‘Le débat’.

I. MODIFICATION DU MODE DE PAIEMENT

DES COTISATIONS SOCIALES:

POUVOIR ANTICIPER DE MAUVAISES

SURPRISES

Contexte

Les caisses d’assurances sociales perçoivent les cotisations sociales des indépendants, calculées sur le montant du revenu net communiqué par l’administration fiscale. Ce revenu net équivaut au revenu professionnel brut, diminué des coûts d’exploitation, des charges et des pertes. Les cotisations sociales trimestrielles que paie l’indépendant sont basées sur le revenu net de l’année de référence, c’est-à-dire trois ans auparavant. En 2012, l’indépendant paie donc des cotisations sociales calculées sur son revenu net de 2009.

Quant aux nouveaux indépendants, ils paient des montants provisoires tant que leur revenu net n’est pas connu pour leurs trois premières années complètes d’activité. Ils peuvent cependant payer des cotisations plus élevées pendant ces trois ans s’ils prévoient des revenus supérieurs à l’estimation qui sert au calcul des cotisations provisoires (soit un revenu annuel net d’environ 12.130 euros en 2011 pour une activité indépendante exercée à titre principal).

Le paiement des cotisations sociales peut constituer un problème pour les indépendants les années où leurs affaires marchent moins bien alors que leurs revenus durant l’année de référence (trois ans auparavant) étaient relativement élevés. Ce risque est d’autant plus réel que les revenus d’un indépendant peuvent connaître de fortes fluctuations d’une année à l’autre. C’est pourquoi Sabine Laruelle, Ministre des PME, des Indépendants, de l’Agriculture et de la Politique Scientifique, a proposé en 2010 de fixer désormais le montant des cotisations sociales d’une année sur les revenus effectivement perçus durant cette année, et non plus sur les revenus de l’année -3. Cette proposition a fait l’objet d’un accord de principe en Conseil des Ministres du 29 avril 2010, mais n’a pu être concrétisée par la suite, en raison de la chute du gouvernement.

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Proposition des auteurs

Niveau de compétence et modalités de mise en œuvre: initiative législative au niveau fédéral

Notre proposition pour le paiement des cotisations sociales repose sur deux principes à réconcilier. D’une part, l’indépendant doit pouvoir payer des avances sur ses cotisations sociales avant la troisième année qui suit celle où il a perçu les revenus en question. Cela lui permet de les payer anticipativement durant de bonnes années. D’un autre côté, il faut éviter qu’il soit obligé de payer toutes ses cotisations sociales à un moment (par exemple, durant l’année de référence) où il ne connaît pas encore parfaitement ses revenus nets. En effet, il risquerait ainsi d’avoir payé trop peu de cotisations et de se voir ensuite sanctionné. C’est pourquoi nous proposons qu’il puisse payer des avances sur ses cotisations sociales l’année de perception des revenus et/ou la première année qui suit et/ou la deuxième année qui suit, ou bien encore payer ses cotisations la troisième année qui suit. Il ne bénéficierait d’un avantage fiscal (comme pour les versements anticipés d’impôts sur les revenus) que sur les cotisations payées avant cette troisième année, puisque c’est à ce moment-là que les revenus nets sur lesquels sont calculées les cotisations sociales sont entièrement connus. De plus, nous voulons permettre à l’indépendant de payer davantage de cotisations sociales. Il pourrait ainsi constituer une réserve qu’il pourra solliciter une année où ses revenus seront moins élevés. Les caisses d’assurance sociale se chargeraient d’effectuer le décompte.

Cette proposition n’a pas fait l’objet d’un consensus au sein du Comité d’accompagnement. Certains défendent en effet une autre option et proposent que l’indépendant paie l’année même les cotisations dues sur les revenus de cette année.

Le débat

De l’avis général, l’obligation de payer des cotisations élevées dans une période de conjoncture économique plus difficile est un facteur de précarisation pour un certain nombre d’indépendants. Il y a consensus sur la nécessité de faire davantage coïncider le moment où les revenus de l’indépendant sont perçus et le versement des cotisations sociales. Mais pour parvenir à cet objectif, le débat confirme que deux options différentes ont chacune leurs défenseurs: soit un système de versements anticipés des cotisations sociales (la proposition des auteurs), soit un système de paiement des cotisations dans l’année même, sur la base d’une estimation des revenus (le système dit ‘N sur N’ – année sur année - retenu par Sabine Laruelle dans la proposition qu’elle avait fait adopter par le Conseil des Ministres du 29 avril 2010).

Denis Ducarme (député fédéral MR), muriel gerkens (députée fédérale Ecolo), Christine Lhoste (cabinet de la ministre Laruelle), Christine Mattheeuws (NSZ/SNI) et Christophe Wambersie (UCM) sont favorables au système ‘N sur N’ parce qu’il est à leurs yeux celui qui colle le plus près à la réalité économique et aux fluctuations des revenus des indépendants. Dans ce système, l’indépendant paie directement des cotisations sociales qui correspondent à la hauteur de ses revenus estimés pour l’année en cours. Le décompte final est établi au moment de la fixation définitive du revenu par l’administration fiscale. La proposition de la ministre Laruelle prévoyait un certain nombre d’incitants (bonus-malus, déductibilité fiscale) et de balises (montants proposés) ainsi qu’un accompagnement par les caisses

Fondation Roi Baudouin ProPositions Pour une Politique de soutien des indéPendants en difficulté 20 I. MODIFICATION DU MODE DE PAIEMENT DES COTISATIONS SOCIALES : POUVOIR ANTICIPER DE MAUVAISES SURPRISES

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d’assurances sociales afin d’assurer des versements adéquats par chaque indépendant. Une enquête menée en 2009 par l’UCM auprès d’un échantillon d’indépendants avait d’ailleurs montré que ce système recueillait l’adhésion de 93% d’entre eux.

Pour ces intervenants, la formule de versements anticipés qui est proposée dans le rapport ne fait qu’assouplir les modalités de paiement, mais sans supprimer réellement le décalage de trois ans. Ils craignent dès lors que seuls les indépendants les plus aisés et les mieux informés ne profitent des avantages fiscaux qui y sont liés et que cette réforme ne soit donc pas une vraie réponse au risque de précarisation des indépendants les plus fragilisés: ces derniers auront du mal à payer à la fois leurs cotisations de l’année et des avances sur des cotisations futures. En revanche, comme tout indépendant doit faire une estimation de ses revenus de l’année en cours pour le calcul de la TVA et les versements anticipés d’impôts, il lui sera aussi facile de le faire pour ses cotisations sociales. Des garde-fous doivent éviter les risques de dérives en fixant un niveau minimal de cotisation.

Chris Botterman (Boerenbond) et Karel Van Eetvelt (UNIZO) soutiennent pour leur part la proposition défendue par johan Lambrecht parce qu’elle a le mérite de la clarté et de la transparence: en effet, il est préférable pour eux que le calcul se fasse sur des revenus définitifs et connus que sur des estimations provisoires, qui exigeront inévitablement des réajustements. Ils sont convaincus que l’estimation des revenus nets est quasiment impossible à faire en cours d’année, contrairement à la TVA, qui est liée au chiffre d’affaires brut.

De plus, comme personne n’aime payer trop, ils redoutent que le système ‘N sur N’ ne soit une incitation à ne payer provisoirement que le strict minimum. Non seulement beaucoup d’indépendants seraient ainsi pénalisés au moment du décompte final, mais ces versements insuffisants risqueraient aussi de compromettre la viabilité financière du régime de sécurité sociale des indépendants. En somme, estime johan Lambrecht, la grande différence entre les deux propositions est que l’une oblige l’indépendant à payer ses cotisations au cours de l’année même alors que l’autre lui permet seulement de le faire, mais avec la possibilité d’étaler les versements sur trois ans.

Pour Denis Ducarme (député fédéral MR), le principe du paiement des cotisations sociales des indépendants dans l’année même afin de mieux coller aux réalités du terrain a été négocié lors de l’accord de gouvernement et est inscrit dans la déclaration gouvernementale. Bruno tobback (président du sp.a) estime au contraire qu’il s’agit d’une interprétation abusive de ce texte: la déclaration gouvernementale parle seulement de simplifier le mode de calcul des cotisations sociales des indépendants, sans prendre parti pour un système ou pour un autre.

I. MODIFICATION DU MODE DE PAIEMENT DES COTISATIONS SOCIALES : POUVOIR ANTICIPER DE MAUVAISES SURPRISES

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II. AMELIORATION DE LA PROCéDURE DE DISPENSE

DU PAIEMENT DES COTISATIONS SOCIALES POUR

INDéPENDANTS: POUR UNE PLUS GRANDE SéCURITé

JURIDIQUE

Contexte

Lorsque, dans le système actuel, un indépendant sollicite une dispense du paiement de ses cotisations sociales, il doit d’abord prendre contact avec sa caisse d’assurances sociales. Celle-ci lui fait parvenir un formulaire de renseignements qui doit lui permettre de démontrer qu’il se trouve ‘dans le besoin’ ou ‘dans une situation voisine de l’état de besoin’. L’évaluation de cet état de besoin doit se faire entre autres sur la base des revenus et des charges du ménage. Le formulaire de renseignements contient à cette fin des données détaillées sur la composition du ménage de l’indépendant et ses activités professionnelles. Il faut aussi y mentionner les revenus, les charges et les créances ainsi que l’aide éventuelle du CPAS et le revenu cadastral, aussi bien pour l’indépendant lui-même que pour les personnes qui vivent sous le même toit que lui.

Une fois le formulaire complété, l’indépendant doit le renvoyer à la caisse d’assurances sociales, qui le transmet ensuite au greffe de la Commission des Dispenses de Cotisations du SPF Sécurité sociale. Le greffe le fait parvenir à la Commission elle-même, qui se prononce après un délai d’au moins six mois – mais, de plus en plus souvent, de douze mois. Dans l’intervalle, non seulement l’indépendant est laissé dans l’incertitude, mais il ne peut pas non plus bénéficier de certains droits sociaux.

Pour l’instant, la Commission des Dispenses de Cotisations peut se prononcer sur une période de cotisations d’un an précédant la demande de dispense.

Propositions des auteurs

Niveau de compétence et modalités de mise en œuvre: initiative législative au niveau fédéral

a . mieux définir ‘l’état de besoin’

Pour pouvoir être dispensé du paiement de ses cotisations sociales, l’indépendant doit démontrer qu’il se trouve ‘dans le besoin’ ou ‘dans une situation voisine de l’état de besoin’. Mais à ce jour, la loi ne donne pas plus de précisions sur ces termes, ce qui entraîne une incertitude juridique non négligeable puisque les indépendants concernés peuvent difficilement anticiper la décision finale.

Nous relevons pourtant que le formulaire de renseignements que l’indépendant est tenu de remplir contient des données détaillées sur sa situation personnelle et financière. Cet élément, combiné au grand nombre de dossiers – près de 30.000 – que la Commission doit traiter chaque année donne à penser que la Commission utilise bel et bien des critères clairs pour prendre une décision. Pour justifier le refus du législateur et de la Commission de rendre ces critères publics, on invoque l’argument selon lequel la Commission doit pouvoir conserver la flexibilité nécessaire pour évaluer les demandes. Cela lui

Fondation Roi Baudouin ProPositions Pour une Politique de soutien des indéPendants en difficulté 23 II. AMELIORATION DE LA PROCéDURE DE DISPENSE DU PAIEMENT DES COTISATIONS SOCIALES POUR INDéPENDANTS :

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permettrait donc de se montrer plus souple dans certains cas particuliers, mais aussi plus sévère face à des demandes illégitimes.

Mais cet argument ne pèse guère face aux longs délais d’attente et à la grande incertitude due au manque de transparence de la procédure. C’est pourquoi nous plaidons pour l’instauration de critères clairs devant permettre de prendre une décision rapide dans la grande majorité des cas. L’actuel formulaire de renseignements peut continuer à servir de base, mais les critères précis qui déterminent si un indépendant a droit ou non à une dispense de cotisations (par exemple le fait qu’il bénéficie déjà d’une aide du CPAS ou qu’il se situe sous un certain seuil de revenus) doivent être rendus publics. Cela n’empêche pas le législateur de laisser à la Commission la marge de manœuvre indispensable pour pouvoir mener une enquête plus poussée dans certains cas exceptionnels. Des critères plus clairs aideront aussi à motiver les décisions prises par la Commission. Les choses seront ainsi plus transparentes non seulement pour les indépendants dont la demande a été entièrement ou partiellement refusée, mais aussi pour les demandeurs potentiels.

b . Acteurs

Nous proposons d’étendre le rôle des caisses d’assurances sociales en les autorisant à traiter elles-mêmes les demandes de dispense dans les cas où il n’y a pas de discussion sur la preuve de l’état de besoin ou d’une situation proche de l’état de besoin (par exemple lorsque l’indépendant perçoit un revenu d’intégration).

Tous les autres cas seraient traités par l’actuelle Commission des Dispenses de Cotisations.

L’indépendant qui obtient une dispense de paiement des cotisations sociales serait alors obligé de bénéficier d’un accompagnement individuel (gratuit dans la phase initiale), assuré par une organisation agréée pour exercer cette mission. Cette obligation présente les avantages suivants: d’une part elle contribuerait à ce que l’indépendant en difficulté se fasse accompagner à temps, alors qu’aujourd’hui les demandes de soutien arrivent souvent trop tard; d’autre part elle aurait un effet dissuasif auprès de certains indépendants qui sollicitent une dispense non justifiée.

c. Maintien des droits à la pension

Aujourd’hui, les indépendants qui bénéficient d’une dispense de paiement des cotisations sociales perdent aussi leurs droits à la pension pour les périodes concernées par cette dispense. Cette situation comporte une discrimination injustifiée par rapport aux travailleurs salariés qui se retrouvent au chômage et qui conservent, eux, leurs droits à la pension pendant leur période d’inactivité. C’est pourquoi nous proposons que les indépendants conservent eux aussi leurs droits à la pension au cas où ils sont dispensés du paiement des cotisations sociales.

Fondation Roi Baudouin ProPositions Pour une Politique de soutien des indéPendants en difficulté 24 II. AMELIORATION DE LA PROCéDURE DE DISPENSE DU PAIEMENT DES COTISATIONS SOCIALES POUR INDéPENDANTS :

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d . Cotisations minimales obligatoires pour les nouveaux indépendants

Afin d’éviter les abus et les demandes peu fondées, nous proposons de limiter les possibilités de dispense pour les indépendants en début d’activité. Ceux-ci devraient attendre au moins quatre trimestres avant de pouvoir introduire une demande de dispense.

e . Raccourcissement des délais

L’instauration de critères d’évaluation clairs et la modification de la procédure selon la description faite ci-dessus doivent permettre, selon nous, de réduire à un mois le délai normal d’attente entre la réception du dossier (complet) de demande de dispense par l’instance chargée de le traiter et la décision.

f . possibilité de se prononcer sur une plus longue période

Les caisses d’assurances sociales et la Commission pourraient se prononcer sur une période de cotisation de deux ans, au lieu d’un an aujourd’hui, précédant la demande de dispense.

Le débat

Bruno Wattenbergh (Agence bruxelloise pour l’Entreprise) se félicite que le rapport de la Fondation Roi Baudouin soulève la question du fonctionnement de la Commission des Dispenses, qui constitue pour lui une source d’injustice depuis de longues années. Il rappelle que l’on avait envisagé d’installer cet organe dans les tribunaux du travail, au sein desquels les organisations de travailleurs indépendants nomment des juges sociaux, et il se demande pourquoi cette option a visiblement été abandonnée. Bruno tobback (président du sp.a) s’interroge sur l’impact financier de certaines de ces mesures, comme le maintien des droits à la pension pendant la période de dispense des cotisations (mesure c) en combinaison avec l’allongement de la période sur laquelle la Commission peut se prononcer (mesure f): sera-t-il possible de financer cela? Et est-ce opportun: si la dispense ne porte que sur quelques trimestres, l’incidence sur la pension sera assez limitée; et si elle porte sur plusieurs années, cela a-t-il encore un sens de poursuivre l’activité indépendante?

johan Lambrecht lui répond que la proposition consiste à porter cette période à deux ans, pas plus. Et surtout, l’obligation d’un accompagnement individuel pour l’indépendant dispensé des cotisations devrait constituer un frein pour dissuader les demandes non fondées.

Fondation Roi Baudouin ProPositions Pour une Politique de soutien des indéPendants en difficulté 25 II. AMELIORATION DE LA PROCéDURE DE DISPENSE DU PAIEMENT DES COTISATIONS SOCIALES POUR INDéPENDANTS :

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III. PASSAGE DU STATUT D’INDéPENDANT à UN AUTRE

STATUT OU VICE VERSA: UN PAS VERS UNE PLUS

GRANDE CONTINUITé

Contexte

Les indépendants qui sont contraints de cesser leur activité connaissent inévitablement une période d’incertitude, tant sur le plan émotionnel que financier. Pourtant, il est important qu’ils parviennent à reprendre le dessus d’une manière ou d’une autre, que ce soit sous le statut de travailleur salarié ou en conservant le statut d’indépendant. La pratique montre que le passage d’un statut à l’autre n’est pas si évident. Concrètement, le travailleur indépendant peut être confronté à trois types de problèmes.

Lorsque l’indépendant fait faillite sans être en société, il existe la possibilité que cette faillite soit déclarée excusable. Cela implique que le failli ne peut plus voir sa responsabilité engagée pour les créances en cours et qu’il peut donc repartir avec une ardoise vierge. Bien qu’en principe cette demande puisse être faite dès le sixième mois après le jugement de faillite, les tribunaux attendent souvent plus longtemps avant de déclarer la faillite excusable. Ils estiment qu’ils n’ont pas encore suffisamment d’informations pour juger si les conditions nécessaires (le failli a été ‘malheureux’ et a agi ‘de bonne foi’) sont remplies. Dans la plupart des cas, la faillite n’est donc déclarée excusable que lorsque toute la procédure est close. Comme celle-ci peut prendre plusieurs années, cela compromet considérablement la réinsertion professionnelle de l’indépendant failli.

Les indépendants qui dirigeaient une société peuvent eux aussi être victimes de préjugés de la part de banques, d’employeurs etc. après une faillite. Toutefois, la loi sur les faillites ne permet pas l’excusabilité pour les personnes morales. Le gérant d’une société faillie a donc toutes les peines du monde à prouver sa bonne foi. L’absence d’excusabilité touche tout particulièrement cette catégorie de travailleurs indépendants lorsqu’ils tentent de se réorienter vers une nouvelle activité professionnelle.

Enfin, les indépendants constatent trop souvent qu’une faillite laisse des ‘traces’. Une société faillie est par exemple indiquée en rouge, avec la mention ‘Situation juridique: faillite’, dans la Centrale des Bilans, qui est entièrement consultable en ligne par le public. Ces traces restent visibles même une fois que la faillite a été prononcée. Il va de soi que c’est un obstacle supplémentaire pour l’indépendant qui essaie de se lancer dans une nouvelle carrière.

Propositions des auteurs

Niveau de compétence et modalités de mise en œuvre: adaptation de la loi sur les faillites au niveau fédéral

La déclaration d’excusabilité est un pas important pour l’indépendant failli parce qu’elle lui donne l’occasion de prendre un nouveau départ dans la vie. Rien n’est plus décourageant que de vouloir lancer une nouvelle activité indépendante lorsque la plus grande partie des revenus de celle-ci est saisie par le curateur. C’est pourquoi nous plaidons pour que l’excusabilité soit accordée dans l’année qui suit la

Fondation Roi Baudouin ProPositions Pour une Politique de soutien des indéPendants en difficulté 27 III. PASSAGE DU STATUT D’INDéPENDANT à UN AUTRE STATUT OU VICE VERSA : UN PAS VERS UNE PLUS GRANDE CONTINUITé

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déclaration de faillite d’une affaire personnelle (adaptation de la loi sur les faillites), à moins que le juge dispose d’indices clairs de fraude. D’autre part, les conséquences directes de l’excusabilité doivent être davantage uniformisées. Dans certains cas, l’excusabilité a pour effet de mettre un terme à la saisie sur salaire alors que dans d’autres cas, la saisie sur salaire se poursuit tant que la procédure de faillite n’est pas entièrement close.

En cas de déclaration de faillite d’une société, il faut établir une distinction plus claire entre les faillites frauduleuses et non frauduleuses. Nous proposons d’introduire dans la loi sur les faillites une procédure consistant, pour le tribunal de commerce, à remettre au gérant une ‘attestation de bonne foi’ (en cas de faillite non frauduleuse) au plus tard un an après la déclaration de faillite de la société. Cette attestation permet à l’indépendant failli de prouver sans équivoque sa bonne foi et de ne plus devoir invoquer pour cela les quelques moyens de preuve dont il dispose aujourd’hui (en montrant par exemple qu’il n’a pas été condamné à une interdiction professionnelle ou en se basant sur le rapport du curateur). Bien qu’une telle mesure ait déjà fait l’objet d’un accord en 2008, dans le cadre du plan d’action fédéral sur les PME, elle n’a pas encore été mise à exécution.

Enfin, pour donner réellement une deuxième chance aux indépendants faillis, il faudrait effacer le passé en cas de faillite non frauduleuse. Dès le moment où la procédure judiciaire est achevée, les autorités publiques doivent supprimer toute référence à une faillite (par exemple ‘Situation juridique: faillite’, dans la Centrale des Bilans). Sinon, la réinsertion professionnelle de l’indépendant risque d’être fortement compromise dans une société où la faillite continue à être stigmatisée.

Fondation Roi Baudouin ProPositions Pour une Politique de soutien des indéPendants en difficulté 28 III. PASSAGE DU STATUT D’INDéPENDANT à UN AUTRE STATUT OU VICE VERSA : UN PAS VERS UNE PLUS GRANDE CONTINUITé

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IV. FAVORISER LA CONTINUITé DE L’ACTIVITé

OU DE L’ENTREPRISE

Contexte

Au plan légal, la thématique de la continuité de l’entreprise ou de l’activité économique exercée sous statut d’indépendant est régie par la loi relative à la continuité des entreprises du 31 janvier 20093.

Cette législation, relativement récente, apporte une vision renouvelée et modernisée de la problématique de la continuité des entreprises, en mettant l’accent de manière complémentaire sur deux volets clairement identifiés:

• Un volet ‘préventif’, centré sur une reconsidération du rôle des chambres d’enquête commerciale créées au sein de chaque tribunal de commerce du pays et organisées à l’initiative de son/sa Président(e). Ces chambres invitent tout entrepreneur (indépendant ou en société) dépisté comme étant en difficulté sur base de certains clignotants (retards ONSS et TVA, protêts, incidents de solvabilité, ...), à se présenter, seul ou accompagné, pour expliquer l’origine de ses difficultés et la manière dont il compte réagir pour empêcher que ces difficultés nuisent à la collectivité.

• Un volet ‘curatif’, centré sur le développement d’alternatives concrètes au traditionnel jugement déclaratif de faillite et sur le développement de solutions de relance d’activités en situation de discontinuité, assistées par le tribunal de commerce. En l’état actuel de la législation, ces solutions prennent concrètement et schématiquement les formes suivantes:

- Soit la nomination d’un médiateur, désigné dès que la continuité de l’entreprise est menacée (cessation ou difficulté de paiement) et que l’organisation de l’entreprise apparaît être à l’origine de ses problèmes. Il a alors pour missions de repenser la stratégie de l’entreprise, de faciliter la réorganisation de celle-ci en éludant les points critiques de nature à la rendre impossible et de faciliter les contacts entre l’entreprise et ses créanciers.

- Soit la négociation d’un accord amiable lorsque l’entreprise se trouve en difficulté de paiement avec deux ou plusieurs créanciers et que sa continuité est menacée sans que son organisation soit nécessairement à l’origine de ses problèmes. Cet accord amiable permet à l’entreprise de bénéficier d’un sursis légal couvrant l’ensemble de ses dettes et d’annihiler l’exigibilité des créances pendant la période légale.

- Soit, dans les cas les plus graves, la réorganisation judiciaire, lorsque la continuité de l’entreprise est sérieusement menacée et la rend proche d’une faillite formelle au sens légal du terme. Elle permet la conclusion d’un accord amiable avec l’ensemble des créanciers, l’obtention d’un accord de tous les créanciers sur un plan de réorganisation, le transfert de tout ou partie de l’entreprise sous contrôle judiciaire ou une combinaison alternée de ces diverses solutions. Plusieurs problèmes ont été identifiés en matière de soutien à la continuité d’une activité. Ils sont bien évidemment conditionnés par le caractère encore récent d’une législation complexe, dont la volonté de

3 Telle que publiée au Moniteur Belge du 9 février 2009 et telle que complétée et amendée par l’Arrêté Royal du 30 septembre 2009 fixant les règles et barèmes relatifs aux honoraires et frais des mandataires de justice et des administrateurs provisoires et l’Arrêté Royal du 3 mars 2011 retirant les articles 9, 10, 23, 30 à 34, 77 et 78 de l’arrêté royal du 19 décembre 2010 portant exécution de l’article 84 de la loi du 31 janvier 2009 relative à la continuité des entreprises.

Fondation Roi Baudouin ProPositions Pour une Politique de soutien des indéPendants en difficulté 29 IV. FAVORISER LA CONTINUITé DE L’ACTIVITé OU DE L’ENTREPRISE

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privilégier la continuité de l’activité dans le respect de la protection des intérêts des tiers4 rompt avec

l’esprit des précédentes législations, axées quasi exclusivement sur le souci de protéger les intérêts des tiers face à tout risque de défaillance.

Ces problèmes s’articulent autour de quatre thèmes récurrents:

• Un manque d’information quant au contenu et aux possibilités offertes par les textes légaux.

En effet, il apparaît vite que de nombreux indépendants5 ne connaissent pas la loi et ses possibilités

ou en ont une connaissance très limitée. Ils y recourent souvent trop tard et font trop peu appel aux différentes options possibles. Il en est de même paradoxalement pour les professionnels du chiffre, voire même du droit, alors qu’ils figurent parmi les premiers conseillers consultés par l’indépendant en passe de s’enliser dans une situation de défaillance récurrente. Le caractère récent de la législation, sa richesse (mais aussi sa complexité) et le fait qu’elle soit encore relativement peu intégrée dans les parcours de formation professionnelle continue des professionnels du droit et du chiffre expliquent en partie cette situation.

• Un manque d’innovation dans la mise en œuvre de solutions de continuité conformes au cadre légal nouvellement établi.

Un examen statistique sommaire des décisions prises par les différents tribunaux de commerce du pays depuis l’apparition de la nouvelle loi montre en effet que rares sont les professionnels du droit qui utilisent les possibilités nouvelles offertes en matière de réorganisation judiciaire: les plans de redressement alternatifs ne dépassent pas la dizaine (au mieux) par tribunal de commerce6.

• Un manque de réalisme et de prise de conscience de la part des indépendants eux-mêmes quant à l’état réel de leur situation financière.

De nombreux indépendants ont en effet une connaissance très limitée et approximative de leur situation financière exacte, notamment en termes de solvabilité, de liquidité et de capacité à générer de la trésorerie (cash-flow). Souvent, ils ne comprennent pas l’importance de ces éléments aux yeux de leur banquier ou du monde judiciaire, alors que la conjonction de difficultés récurrentes de liquidité et de solvabilité habilite le tribunal de commerce à intervenir et que la plupart des fournisseurs de crédit bancaire (de court ou de long terme) fondent essentiellement leurs décisions d’octroi ou de suspension de crédit sur le critère du volume de cash-flow généré. Ce manque de réalisme a pour conséquence que bon nombre d’indépendants en situation de pré-précarité n’ont pas conscience d’être en difficulté, car ils sont généralement trop englués dans le court terme et ont du mal à prendre du recul par rapport à la situation réelle de leur entreprise, surtout s’ils ne sont pas confrontés à un quelconque signal d’alerte.

• Des imperfections persistantes dans le cadre légal et réglementaire établi.

Les textes excluent notamment explicitement du champ d’application de la loi les titulaires d’une profession libérale, considérés comme étant régis exclusivement par les règles en vigueur au sein de leur propre ordre professionnel. Par ailleurs, le coût total de la procédure de réorganisation judiciaire reste très difficile à anticiper et à maîtriser pour plusieurs raisons: parce que le cadre légal n’est pas explicite, que l’expérience acquise reste faible vu le caractère récent de la nouvelle loi et

4 Et plus seulement sur la volonté d’assurer la protection des intérêts des tiers et de la communauté, comme c’était le cas pour les précédentes législations.

5 Pour ne pas dire la très grande majorité! 6 Données arrêtées au 30 juin 2011.

Fondation Roi Baudouin ProPositions Pour une Politique de soutien des indéPendants en difficulté 30 IV. FAVORISER LA CONTINUITé DE L’ACTIVITé OU DE L’ENTREPRISE

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qu’une grande latitude est laissée aux Présidents des différents tribunaux de commerce dans la manière dont ils vont organiser et structurer leurs services et leurs procédures de fonctionnement7.

Propositions des auteurs

Logiquement, les propositions formulées pour rencontrer les difficultés mentionnées ci-avant ont trait tantôt au volet curatif du cadre légal actuel (dimension de court terme), tantôt au volet préventif de ce cadre légal (dimension de long terme).

En matière curative

• Proposition 1: Uniformisation des pratiques entre les différents tribunaux de commerce et partage systématique des ‘bonnes pratiques’ de ces tribunaux.

• Niveau de décision concerné: Niveau fédéral (obligation de partage) et corps judiciaire (modalités d’organisation).

• Modalités de mise en œuvre: Dans le cadre des organes de collaboration et d’échange existant actuellement entre tribunaux de commerce au niveau fédéral et régional8, développement de

procédures formalisées permettant d’identifier les ‘bonnes pratiques’ développées au sein de ces tribunaux et d’assurer leur transposition et leur diffusion au sein des autres tribunaux de commerce. Ce partage des multiples ‘bonnes pratiques’ développées de manière éparse pourrait suivre le processus suivant: recensement, intégration dans une ressource documentaire unique (multilingue) et diffusion via les instances chargées de la formation des juges consulaires (en faire l’objet d’une formation annuelle obligatoire).

• Proposition 2: Sensibilisation accrue, via une information simple et accessible, des indépendants, des comptables et des professionnels du droit quant aux possibilités offertes par le cadre légal actuel et quant aux droits et obligations de l’indépendant soumis au contrôle du tribunal.

• Niveau de décision concerné: Niveau fédéral (obligation d’information et budget de moyens estimé en première approximation à une centaine de milliers d’euros) et corps judiciaire (modalités de mise en œuvre).

• Modalités de mise en œuvre: Dans le cadre des organes de collaboration et d’échange existant actuellement entre tribunaux de commerce au niveau fédéral et régional, identification des sources documentaires et des pratiques d’information considérées comme adéquates, simples et pertinentes au sein des différents tribunaux de commerce et organisation de la diffusion effective de l’information via les greffes des tribunaux de commerce.

• Proposition 3: Obligation de signalement plus rapide aux tribunaux de commerce des retards de paiement et des retards de versement à l’égard des créanciers légaux nationaux (notamment en matière de paiement à l’ONSS, à la TVA et à l’Impôt des Personnes Physiques).

7 Ce qui conduit à observer concrètement une grande diversité de pratiques entre tribunaux de commerce et engendre un sentiment de disparités comportementales peu propice au développement d’un socle commun et partagé de ‘bonnes pratiques’, sentiment qui peut influencer négativement la confiance qu’un indépendant en situation de discontinuité peut avoir en son tribunal de commerce et sa perception du soutien qu’il pourrait légitimement obtenir de la part de ce tribunal.

8 Généralement évoqués par les acteurs de terrain sous le terme générique ‘Conférence des Présidents de Tribunaux’.

Fondation Roi Baudouin ProPositions Pour une Politique de soutien des indéPendants en difficulté 31 IV. FAVORISER LA CONTINUITé DE L’ACTIVITé OU DE L’ENTREPRISE

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• Niveau de décision concerné: Niveau fédéral (obligation d’information).

• Modalités de mise en œuvre: Intégration explicite dans les objectifs (voire, à terme, les obligations) assignés aux créanciers légaux précités d’une obligation de signalement effectif auprès des tribunaux de commerce de tout retard de paiement excédent une durée effective de 9 mois à dater de l’échéance la plus ancienne non honorée.

• Proposition 4: Obligation de désignation, au sein de chaque tribunal de commerce, d’au moins un juge consulaire sensibilisé et formé à l’accompagnement spécifique des indépendants en difficulté, tant en termes juridique que social.

• Niveau de décision concerné: Niveau fédéral (Arrêté Royal d’exécution) et corps judiciaire. • Modalités de mise en œuvre:

- Intégration explicite, dans un Arrêté Royal d’exécution de la loi sur la continuité des entreprises, de l’obligation d’affecter au moins un juge consulaire au suivi et à l’accompagnement des indépendants en situation de discontinuité.

- Au sein des organes en charge d’assurer la formation et la coordination entre tribunaux de commerce, développement d’activités de formation des juges consulaires affectés au suivi spécifique des indépendants en situation de discontinuité.

• Proposition 5: Insertion systématique annuelle, dans le programme de formation continuée des professionnels du chiffre et des professionnels du droit, d’une journée spécifiquement consacrée à l’accompagnement de l’indépendant en difficulté dans une perspective curative.

• Niveau de décision concerné: Corps professionnels en charge respectivement de l’encadrement et de la formation des comptables, experts-comptables, expert-fiscaux, avocats et magistrats. • Modalités de mise en œuvre: Intégration formelle d’au moins une journée de formation continue

en matière d’accompagnement de l’indépendant en situation de précarité et/ou de discontinuité et valorisation de cette journée dans les obligations de formation continue des professionnels précités. Cette journée de formation a notamment pour but de clarifier et d’expliciter par des exemples concrets le rôle et l’étendue exacte des responsabilités de chaque acteur impliqué dans la procédure (en ce compris le rôle du médiateur) et de traduire le cadre légal en des termes concrets et opérationnels, éclairés par des cas récents issus de la pratique des tribunaux de commerce.

En matière préventive

• Proposition 6: Mise à disposition des indépendants et de leurs conseillers d’outils d’autodiagnostic simples, modularisés et anonymes, cautionnés par des professionnels de l’accompagnement d’indépendants et accompagnés de commentaires et de suggestions de règles de ‘bonne gestion’, idéalement accessibles via Internet.

• Niveau de décision concerné: Instances régionales et/ou nationales des organismes habilités légalement ou réglementairement pour accompagner le développement des indépendants, en situation de difficulté ou pas.

• Modalités de mise en œuvre:

- Conception, développement, mise en ligne et suivi/supervision d’un outil d’autodiagnostic utilisable par un indépendant et couvrant les aspects essentiels de la gestion de son activité (gestion stratégique, gestion financière, gestion commerciale, gestion des

Fondation Roi Baudouin ProPositions Pour une Politique de soutien des indéPendants en difficulté 32 IV. FAVORISER LA CONTINUITé DE L’ACTIVITé OU DE L’ENTREPRISE

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opérations, gestion des ressources humaines) et ses interactions avec sa vie personnelle et familiale.

- Dans des circonstances particulières (telles qu’une re-création d’activité suite à une faillite ou une cessation d’activité), des mesures réglementaires et/ou légales pourraient ensuite être prises pour obliger un indépendant en situation de précarité à se soumettre à un tel outil d’autodiagnostic, avec l’aide et l’accompagnement d’un professionnel de l’accompagnement de PME dont le coût serait alors pris en charge par l’autorité publique (dans le cadre des missions déjà attribuées à ce jour à de nombreux organismes dans toutes les régions du pays). Le but final de cette obligation de moyens est alors d’amener l’indépendant en situation de précarité à prendre du recul et à réfléchir avec un professionnel de la gestion aux raisons qui ont conduit son activité à connaître des difficultés tellement importantes qu’il se retrouve en situation de précarité, tant à titre personnel qu’à titre professionnel. Si l’indépendant bénéficie d’une dispense de cotisations sociales, nous plaidons aussi pour un accompagnement individuel obligatoire (voir mesure II).

Le débat

En termes de prévention, Frédéric Lernoux (Centre de connaissance et de financement des PME) souligne le problème de l’accès au crédit pour les petites entreprises. Celles-ci ont aujourd’hui beaucoup de mal à trouver des partenaires financiers prêts à prendre des risques, que ce soit pour les aider à surmonter des difficultés passagères ou pour lancer dans un projet innovant. Quand on sait que 40% des entrepreneurs interrogés répondent que leurs liquidités se dégradent, on se rend compte à quel point l’accès à des financements à court terme est un élément crucial pour permettre la continuité de l’entreprise. Frédéric Lernoux signale aussi qu’un outil d’auto-diagnostic mis au point avec HEC-Université de Liège sera bientôt disponible en ligne.

muriel gerkens (députée fédérale Ecolo) abonde dans le même sens et ajoute que la confusion entre le patrimoine professionnel et privé complique encore cet accès au crédit, en particulier pour les micro-entreprises: le risque est d’autant plus difficile à estimer que les banques ont tendance à globaliser les dossiers à caractère professionnel et privé. Par ailleurs, elle signale qu’elle avait déposé une proposition permettant à un indépendant failli d’avoir une deuxième fois recours au Fonds des Faillites.

Fondation Roi Baudouin ProPositions Pour une Politique de soutien des indéPendants en difficulté 33 IV. FAVORISER LA CONTINUITé DE L’ACTIVITé OU DE L’ENTREPRISE

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Références

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