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Agathocle de Sicile : titres et pouvoir d’un acteur politique méditerranéen de la haute époque hellénistique (330-289 a.C.)

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Agathocle de Sicile. Titres et pouvoir d’un acteur

politique méditerranéen de la haute époque

hellénistique (330-289 a.C.)

Mémoire

Stéphanie Audet

Maîtrise en études anciennes - avec mémoire

Maître ès arts (M.A.)

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Agathocle de Sicile

Titres et pouvoir d’un acteur politique méditerranéen de la

haute époque hellénistique (330-289 a.C.)

Mémoire

Stéphanie Audet

Sous la direction de :

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Résumé

Agathocle de Sicile fut politiquement actif entre 330 et 289 a.C. Après un coup d’État en 317/316 a.C., il obtint un pouvoir politique particulier qui lui permettait de gouverner seul. Ses ambitions politique et militaire ont dépassé le cadre géographique de la Sicile et se sont étendues en Afrique du Nord, en Italie du Sud et même, à Corcyre. Les sources littéraires qui rapportent un récit historique de la vie du personnage sont peu nombreuses : Diodore de Sicile et Justin. D’autres auteurs, grecs et latins, rapportent parfois le nom du Syracusain. Celui-ci fut associé à des titres de pouvoir qui relevaient d’un régime autocratique. L’un de ces titres était typique d’un modèle politique constant en Sicile, le titre de τύραννος ou tyrannus. Un autre découlait plutôt du contexte particulier de la haute époque hellénistique, celui de βασιλεύς ou rex. En plus de ces termes, les auteurs anciens utilisent les lexiques de la δυναστεία et de l’imperium. La multitude des titres utilisés rend complexes l’étude du rôle du personnage et la compréhension de sa position politique. Dans ce mémoire, nous recensons donc les ouvrages anciens dans lesquels Agathocle figure avec un titre de pouvoir particulier et nous dressons un bilan des connaissances sur l’utilisation de la terminologie politique par les Anciens. Enfin, nous effectuons une analyse lexicologique et thématique du cas particulier d’Agathocle afin de comprendre la façon dont les auteurs rapportèrent le pouvoir autocratique d’un acteur politique occidental à la haute époque hellénistique.

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Table des matières

Résumé ... ii

Table des matières ... iii

Remerciements ... vii

Introduction ... 1

Chapitre 1 : Agathocle de Sicile dans la littérature ancienne ... 26

Sources grecques ... 28

Callias de Syracuse (ca 350 à 270 a.C.) ... 28

Timée de Tauroménion (ca 350 à 260 a.C.) ... 29

Douris de Samos (ca 340 à 270 a.C.) ... 31

Polybe (ca 203 à 120 a.C.) ... 32

Diodore de Sicile (ca 90 à 20 a.C.) ... 33

Plutarque (ca 46 à 125 p.C.) ... 39

Appien d’Alexandrie (ca 90 à 170 p.C.) ... 40

Sources latines ... 40

Plaute (ca 254 à 184 a.C.) ... 41

Cicéron (106 à 43 a.C.) ... 42

Tite-Live (ca 64 a.C. à 17 p.C.) ... 43

Trogue Pompée (ca 50 a.C. à 40 p.C.) et Justin (IIIe ou IVe siècle p.C.) ... 44

Valère Maxime (Ie siècle p.C.) ... 47

Lactance (ca 250 à 325 p.C.) ... 48

Ammien Marcellin (ca 330 à 395 p.C.) ... 49

Ausone (ca 310 à 394 p.C.) ... 50

Conclusion ... 51

Chapitre 2 : Vocabulaire du pouvoir autocratique dans la littérature ancienne ... 54

Dans la littérature grecque ... 56

Évolution historique ... 56

Polybe ... 61

Diodore de Sicile ... 62

Plutarque ... 64

Dans la littérature latine ... 65

Époque républicaine ... 66

Époque impériale ... 69

Conclusion ... 71

Chapitre 3 : Titres politiques et pouvoir ... 75

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Recension ... 76

Cadre géographique ... 76

Thème de l’opposition politique ... 78

Cadre comparatif ... 80

Les termes associés à δυναστ- ... 82

Recension ... 82

Cadre géographique ... 83

Cadre d’opposition politique ... 83

Thème de l’inattendu ... 86

Le vocabulaire de la βασιλεία ... 88

Recension ... 88

Cadre comparatif ... 89

Cadre géographique ... 91

Thème de l’ascension extraordinaire ... 92

Hérédité de la βασιλεία et la problématique de la succession ... 94

Le rex, son regnum et son imperium ... 96

Recension ... 96

Cadre géographique ... 97

Ascension et Fortune exceptionnelles ... 99

Guerre contre Carthage ... 100

Cadre d’opposition et de comparaison ... 102

Cadre de la succession ... 103 Conclusion ... 104 Conclusion ... 109 Bibliographie ... 113 Sources littéraires ... 113 Études ... 118 Annexe 1 – Carte ... 129

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Παλαιός τις παραδέδοται λόγος ὅτι τὰς δημοκρατίας οὐχ οἱ τυχόντες τῶν ἀνθρώπων, ἀλλ᾿ οἱ ταῖς ὑπεροχαῖς προέχοντες καταλύουσι.

« Selon un vieux dicton parvenu jusqu’à nous,

ce ne sont pas les hommes du commun qui détruisent les démocraties, mais ceux qui occupent une position supérieure ».

Diodore de Sicile, livre XIX, chap I, ligne 1. Traduction de Françoise Bizière.

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« Du passé faisons table en marbre ».

Karadoc de Vannes, Kaamelott, livre IV. Écrit par Alexandre Astier.

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Remerciements

Les années difficiles qui ont ponctué ma maîtrise m’amènent à sincèrement remercier les gens qui m’entourent, car leur soutien a été plus qu’important dans la réussite de ce mémoire. Les gens qui m’ont accompagné pendant mon parcours méritent ces éloges

Tout d’abord, je remercie mon directeur, M. Patrick Baker, de m’avoir gardé sous son aile et d’avoir commenté mon travail de façon constructive. Tout ce labeur a fait de moi une chercheuse disciplinée dont la rigueur est reconnue par les pairs. Ces compétences développées à vos côtés contribueront à la poursuite de mes projets. J’exprime aussi ma reconnaissance envers tous les membres de l’Institut d’études anciennes et médiévales dont la coopération avec les étudiantes et étudiants favorise nettement notre apprentissage et notre avancement. Un remerciement spécial va à M. Alban Baudou, non seulement pour la révision de mon mémoire, mais aussi pour son soutien indéfectible envers les étudiantes et étudiants. Je remercie chaleureusement Mme Anne-France Morand qui m’a donné l’occasion de travailler sur le campus et m’a permis de me sentir simplement bien dans mon milieu. Votre rire, votre écoute et votre passion demeureront parmi mes plus beaux souvenirs de l’Institut. Je suis aussi très reconnaissante envers M. Louis Painchaud qui a cru en moi et m’a permis de vivre une expérience extraordinaire avec l’University Loyola Chicago. Vous m’avez emmené à me dépasser intellectuellement et à m’impliquer différemment dans le monde scientifique. Grâce à la bourse du GRANT, j’ai pu vivre ces moments incroyables.

Voglio ringraziare Edmondo Lupieri per avere partecipato anche a questa esperienza. Spero di poterti rivedere a Chicago. Ringrazio la signora Hélène Couture che mi ha permesso di vivere un'esperienza incredibile allo Scuola Leonardo Da Vinci di Siena usando la sua borsa di studio. Probabilmente non avrei potuto scrivere questa tesi senza la conoscenza della lingua italiana che mi hai permesso di acquisire.

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Je remercie M. Philippe Roy-Lysencourt pour la confiance et les occasions qu’il m’a offertes. Vous avez rendu mon parcours universitaire exceptionnel. Je vous remercie d’avoir reconnu mes qualités et mes capacités. Je suis très heureuse de continuer à évoluer dans ces projets de recherche et de pouvoir bénéficier de vos conseils et de votre soutien.

J’exprime ma gratitude envers mes parents, Maryse et Patrick, pour leur soutien, mais plus spécialement pour le caractère qu’ils m’ont donné. La détermination de ma mère et la patience de mon père ont fait de moi une personne possédant une persévérance à toute épreuve.

Je remercie mon conjoint Étienne pour son soutien constant. Même si tu ne comprenais pas toujours ce que je disais, tu as su comprendre à quel point c’était important pour moi. Je te remercie de m’avoir accompagnée dans ces nuits blanches d’études et d’avoir été à mes côtés dans les luttes sociales. J’ai apprécié chacune de ces discussions où nos études mutuelles nous menaient toujours à refaire le monde.

Je veux remercier spécialement Zoé et Cynthia. Deux femmes absolument remarquables qui ont pu comprendre le processus par lequel je passais et dont l’amour ainsi que l’humour ont été plus qu’essentiels à ma réussite et à ma santé mentale. Je suis particulièrement reconnaissante à Emeric pour toutes ces fois où il est venu m’apporter support et nourriture à n’importe quelle heure du jour et de la nuit. J’exprime aussi ma gratitude à Joey, qui m’a permis de décrocher autour de repas toujours plus délicieux les uns que les autres. Les moments avec toi ont été de véritables ressourcements. Merci à Alex qui, en me faisant découvrir le monde du whisky, m’a permis de décrocher de l’université et de voir la vie autrement. Je veux remercier mon amie Audrey C. qui m’a toujours aidé à ne pas me prendre trop au sérieux. Ces fous rires restent tellement précieux. Je remercie tous mes

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amis du baccalauréat en histoire qui m’ont accordé une oreille attentive lorsque j’en ai eu le plus besoin. Merci à mes collègues de l’Institut qui ont pu me comprendre, mais aussi rire de mes folies dans les bureaux de l’Institut. Un merci spécial va à André-Philippe, Marianne, Audrey et Lucille. Vous êtes des personnes incroyables. Enfin, je suis reconnaissante envers mes collègues de la Faculté de théologie et sciences religieuses, surtout Maxime et Richard. Les moments passés ensemble sont très précieux et nos conversations toujours enrichissantes. J’ai hâte de continuer de passer du temps à vos côtés.

Je suis excessivement chanceuse d’être entourée de personnes aussi extraordinaires qui veulent me donner de ce précieux temps qui manque à tous.

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Introduction

Although the Hellenistic period has become increasingly popular in research and teaching in recent years, the western Mediterranean is rarely considered part of the ‘Hellenistic World’ ; instead the cities, peoples and kingdoms of the West are usually only discussed insofar as they relate to Rome. This book contends that the rift between the ‘Greek East’ and the ‘Roman West’ is more a product of the traditional separation of Roman and Greek history than a reflection of the Hellenistic-period Mediterranean1.

Ces propos, qui ouvrent le collectif récemment édité par J. R. W. Prag et J. C. Quinn, posent le problème historiographique actuel de l’Ouest méditerranéen des IVe et IIIe siècles a.C. En effet, les ouvrages généraux traitant de la période hellénistique

proposent une séparation moderne du monde antique, divisant le bassin méditerranéen en deux : les territoires orientaux qui furent conquis par Alexandre le Grand et les régions occidentales sous l’influence de la République romaine. Cette façon de diviser l’histoire et le territoire néglige quelques régions ainsi que la part historique qu’elles ont pu jouer pendant ces deux siècles. L’historiographie méconnaît dès alors certains personnages et offre un portrait parfois limité de ceux-ci.

L’histoire d’une partie du monde hellénisé bien avant les conquêtes d’Alexandre le Grand, la Sicile, semble être moins connue, particulièrement pendant la période qui sépare la guerre du Péloponnèse de l’intervention militaire des Romains sur l’île. Pourtant, si la Sicile fut impliquée dans les conflits de la fin du Ve siècle a.C., notamment

avec l’expédition d’Athènes en 415 a.C., c’est bien parce que des liens unissant les colonies grecques siciliennes à la Grèce propre étaient encore vivants et utiles pour les deux parties à plusieurs égards : économique, politique et militaire. Plus précisément, la cité de Syracuse maintenait des liens avec l’Orient tout en alimentant des rivalités avec les autres cités de la

1 Jonathan R. W. Prag et Josephine C. Quinn, « Introduction », The Hellenistic West : Rethinking the Ancient Mediterranean, Cambridge, Cambridge University Press, 2013, p. I.

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Sicile et de nombreuses forces étrangères : la République romaine, les Carthaginois et les populations indigènes de l’île. Après la guerre du Péloponnèse, Denys l’Ancien, dirigeant de Syracuse, s’assura de garder des relations avec Sparte, mais aussi, après l’affaiblissement de celle-ci, avec Athènes. Mort en 367 a.C., Denys l’Ancien laissa Syracuse, ainsi que les agglomérations sous son autorité, entre les mains de son fils, Denys le Jeune, qui lutta contre Dion pour conserver le pouvoir2.

À ce moment, Syracuse, tout comme les autres cités de l’île, entra de nouveau dans une période de changements politiques. Cette période vit la montée de certaines revendications comme la redistribution des terres et l’abolition des dettes. Les demandes étaient associées à des groupes politiques dits démocratiques qui s’opposaient aux partisans de l’oligarchie. La division en deux factions s’étendait partout dans le monde grec occidental3. Dans ce contexte,

plusieurs τύραννοι prirent le pouvoir en Sicile jusqu’à l’intervention, en 344 a.C., de Timoléon. Envoyé par la cité de Corinthe à la demande de Hikétas de Léontinoi, Timoléon fut victorieux dans ses combats tant contre des τύραννοι que devant les Carthaginois. En 338 a.C., un traité entre les forces carthaginoises et celles de Timoléon avait organisé les forces en présence sur l’île. Il prévoyait que l’île serait répartie entre les Carthaginois et les Grecs à partir du fleuve Alico4. La partie à l’ouest du fleuve constituait l’epikrateia

carthaginoise, englobant les populations indigènes sicane et élyme. Les Grecs conservaient la partie orientale de l’île en incluant la population sicule. Le traité timoléonien prévoyait aussi une symmachia de cités grecques et sicules libres sous la direction militaire de Syracuse5. Une démarche de recolonisation fut entreprise avec octroi de la citoyenneté aux

2 Sur Denys l’Ancien, consulter les monographies de Brian Caven, Dionysius I : War-Lord of Sicily,

New Haven, Yale University Press, 1990, 272 p. et Pietrina Anello, Dionisio il Vecchio. I Politica Adriatica e Tirrenica, Palerme, Boccone del povero, 1980, 161 p. Sur Dion, voir Helmut Berve, Dion, Wiesbaden, Steiner, 1957, 141 p. et Marta Sordi, « Dione e la symmachia siciliana », Kokalos, 13 (1967), p. 143‑154.

3 À Syracuse, la demande de la redistribution des terres est avancée par le parti d’Héraclide en

356 a.C. Voir Sebastiana Consolo Langher, Agatocle. Da capoparte a monarca fondatore di un regno tra Cartagine e i Diadochi, Messine, Di.Sc.A.M, 2000, p. 35‑37. Sur ces factions dans la littérature ancienne, voir Plutarque, Dion, 75, 5 ; Timoléon, 23 et Diodore, XVI, 70, 5.

4 Aussi nommé Halycus ou Platani. Voir la carte de la Sicile en annexe 1.

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Grecs souhaitant s’installer ou revenir à Syracuse afin de reconstruire un corps civique affaibli par des décennies de guerres. Timoléon semble avoir demandé la réécriture de la constitution syracusaine et il mit au pouvoir, en 336 a.C., le Conseil des Six Cents6. Ce

changement favorisa les partisans de l’oligarchie dans un contexte de tension entre oligarques et démocrates7. La disparition de l’homme politique plongea Syracuse en situation de stasis,

le parti des démocrates s’opposant aux partisans oligarques du Conseil des Six Cents8.

Alors que le chaos réapparaissait à Syracuse, en Orient, Philippe II de Macédoine créait un précédent en se rendant maître de la Grèce européenne. Il rendit l’âme en 336 a.C., alors qu’il était reconnu comme monarque macédonien. Commença alors l’ascension d’Alexandre le Grand, puis ses conquêtes orientales. La mort de celui-ci, en 323 a.C., suscita un contexte d’instabilité politique qui marqua le début de la période hellénistique. Les premiers officiers d’Alexandre prétendirent à sa succession et se disputèrent son empire. Outre l’expansion de la culture grecque, cette période vit apparaître les grandes monarchies hellénistiques ainsi que leur mode de légitimation et d’expression. Les Diadoques revêtirent rapidement les attributs de la royauté, notamment en revendiquant le titre de βασιλεύς et en

6 Sur la période d’instabilité jusqu’à l’intervention de Timoléon, voir Pietrina Anello, « La pace e la

guerra nella Sicilia di IV secolo a.C. », Guerra e pace in Sicilia e nel Mediterraneo antico : Arte, prassi e teoria della pace e della guerra, Pise, Ed. della Normale, 2006, p. 91‑105. À propos de Timoléon, se référer à Pierre Lévêque, « De Timoléon à Pyrrhos », Kokalos, 14‑15 (1968), p. 135‑156 et Stefania De Vido, « Timoleonte Liberatore. Appunti per una biografia », Timoleonte e la Sicilia della seconda metà del IV sec. a.C., Rome, Salvatore Sciascia Editore, 2011, p. 9‑20. Pour les évènements de Denys l’Ancien à Agathocle, voir eadem, « La Sicilia nel IV secolo : dai Dionisi ad Agatocle », Storia d’Europa e del Mediterraneo. IV. Grecia e Mediterraneo. Dall’età delle guerre Persiane all’Ellenismo, Rome, 2008, p. 397‑431. Sur l’histoire de Syracuse, se référer à Sebastiana Consolo Langher, Siracusa e la Sicilia greca : tra età arcaica ed alto ellenismo, Messine, Società Messinese di Storia Patria, 1996a, 796 p. et eadem, Un imperialismo tra democrazia e tirannide : Siracusa nei secoli V e IV a.C., Rome, G. Bretschneider, 1997, 285 p. En ce qui concerne l’histoire sicilienne, voir John Serrati, « Sicily From Pre-Greek Times to the Fourth Century », Sicily from Aeneas to Augustus : New Approaches in Archaeology and History, Édimbourg, Edinburgh University Press, 2000a, p. 9‑14 ; Moses I. Finley, La Sicile antique. Des origines à l’époque byzantine, Paris, Macula, 1986, 215 p. et Claude Mossé, « Plutarch and the Sicilian Tyrants », Ancient Tyranny, Édimbourg, Edinburgh University, 2006, p. 188‑196.

7 Sebastiana Consolo Langher, op. cit., 2000, p. 36.

8 Sur la période d’instabilité politique entre la mort de Timoléon et l’arrivée d’Agathocle au pouvoir,

cf. Riccardo Vattuone, « Fra Timoleonte e Agatocle. Note di storia e storiogra a ellenistica », Diodoro e l’altra Grecia. Macedonia, Occidente, Ellenismo nella Biblioteca storica, Milan, Vita e Pensiero, 2005, p. 283‑326.

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frappant monnaie. L’une des façons de faire reconnaître le pouvoir était la guerre et la conquête par la lance. Les qualités de chef de guerre d’un diadoque légitimaient son pouvoir et son titre du successeur d’Alexandre le Grand. Les territoires, considérables et souvent non grecs à l’origine, furent soumis à ces souverains de culture gréco-macédonienne. En ces circonstances, le sort de l’autonomie des cités grecques autour de la mer Égée était incertain et celles-ci se regroupèrent parfois en fédérations influentes comme la Ligue achéenne. Les relations interétatiques, multiples et complexes, s’étendirent sur un espace beaucoup plus vaste ainsi que sur une population multiculturelle hellénisée. L’accroissement des armées royales ou fédérales, de plus en plus constituées de mercenaires, s’imposa par les perpétuels conflits pour le gain de territoires et la défense pour certains États d’un domaine beaucoup plus grand9. Ce schéma de caractéristiques fit de la moitié du monde connu de l’époque ce

que J. G. Droysen qualifia d’Hellenismus10.

Alexandre le Grand ayant poursuivi son aventure en Orient jusqu’à l’Indus, l’Occident fut tenu à l’écart des revendications territoriales des Diadoques. Ces régions n’en ont pas moins été le théâtre d’une vitalité politique, diplomatique et militaire influencée par le nouvel ordre mondial en formation. C’est dans cette effervescence touchant la Méditerranée d’Est en Ouest qu’Agathocle de Sicile commença sa carrière à Syracuse. Encore méconnu de l’historiographie hellénistique, Agathocle eut une implication politique et militaire dès 330 a.C. et jusqu’à sa mort en 289 a.C. Il s’était d’abord démarqué par ses dons pour la guerre dans ses implications militaires tant en Sicile qu’en Italie du Sud. Rapidement, il prit la tête du parti démocratique qui affrontait les différents groupes oligarchiques installés dans les cités grecques occidentales. Après la réussite de son coup d’État à Syracuse en 317/316 a.C., il reçut une fonction politique qui lui assurait des pouvoirs considérables, autant dans la cité

9 Une référence dans le domaine demeure Édouard Will, Histoire politique du monde hellénistique (323-30 av. J.-C.), Paris, Seuil, 2003 (1979-1982), 650 p. Voir aussi Pierre Cabanes, Le monde hellénistique : de la mort d’Alexandre à la paix d’Apamée, Paris, Seuil, 1995, 276 p. et François Chamoux, La civilisation hellénistique, Paris, Arthaud, 1982, 634 p. Sur la guerre à l’époque hellénistique, consulter Angelos Chaniotis, War in the Hellenistic World : A Social and Cultural History, Oxford, Blackwell, 2005, 308 p. Enfin, voir Michel M. Austin, « Hellenistic Kings, War, and the Economy », CQ, 36 (1986), p. 450‑466.

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que dans la symmachia grecque. Il utilisa ses fonctions militaires afin de poursuivre les membres de l’opposition oligarchique qui s’étaient réfugiés dans d’autres cités grecques. Les Carthaginois intervinrent dans le conflit en prenant parti pour l’oligarchie et en se basant sur les clauses du traité timoléonien de 338 a.C. Agathocle débarqua en Libye en 310 a.C. et combattit les Carthaginois sur leurs propres terres. Après quelques victoires en Afrique du Nord, il suivit l’exemple des généraux d’Alexandre le Grand et prit ou reçut le titre de βασιλεύς. Il frappa aussi de la monnaie qui portait son nom et son titre11. De retour en Sicile,

son pouvoir s’agrandit et, par les guerres successives, il sembla devenir la tête dirigeante de la région occidentale de l’île. Après s’être investi à Syracuse, en Sicile et en Afrique du Nord, il agrandit son influence sur le pourtour de la Méditerranée, notamment en Italie du Sud. Pendant les guerres des Diadoques, il intervint dans la guerre de Corcyre contre Cassandre et l’armée macédonienne. Il entretint aussi des relations avec Démétrios Poliorcète et Ptolémée Sôter12. Tout au long de son activité politique et militaire, Agathocle semble avoir

porté plusieurs titres qui s’inspirent de l’histoire particulière sicilienne et qui, dans le même temps, sont influencés par les changements politiques en Orient. Ses nombreux titres

11 Sur les émissions monétaires d’Agathocle, voir Maria Caccamo Caltabiano, « La Nike / Nymphe

di Agatocle e l’ideologia della Vittoria », Tyrannis, Basileia, Imperium. Forme, prassi e simboli del potere politica nel monde greco e romano, Messine, Di.Sc.A.M, 2010, p. 277‑302 ; Maria Beatriz Borba Florenzano, « Political Propaganda in Agathocles’ Coins », Actes du XIe congrès international de numismatique organisé à l’occasion du 150e anniversaire de la Société royale de numismatique de Belgique, Bruxelles, 8-13 septembre 1991, Louvain-la-Neuve, Association Professeur Marcel Hoc, 1993, p. 71‑77 ; Sebastiana Consolo Langher, « Il messaggio monarchico sulle monete di Agatocle », idem., p. 79-81 et Vittoria Buda, « Le emissioni siracusane negli ultimi due decenni del sec. iv. a.C. ed il significativo della riforma monetaria di Agatocle », Helikon, 9-10 (1969), p. 193‑231.

12 Pour la reconstruction la plus précise de l’histoire d’Agathocle à partir du legs des sources

anciennes écrites, archéologiques et numismatiques, voir Sebastiana Consolo Langher, op. cit., 2000. Sur les relations interétatiques qu’entretint Agathocle, cf. Stefania De Vido, « Il re Agatocle nello spazio ionico : prospettive e modelli », Prospettive corciresi, Pise, ETS, 2015, p. 169‑190 ; Giovanna De Sensi Sestito, « Magna Grecia, Epiro e Sicilia fra IV e III sec. a.C », Sulla rotta per la Sicilia : l’Epiro, Corcira e l’Occidente, Pise, ETS, 2011, p. 361‑390 ; Franca Landucci Gattinoni, « L’interesse di Agatocle per l’Adriatico nella tradizione storiografica antica », Aevum Antiquum, 12 (1999), p. 113‑131 ; Sebastiana Consolo Langher, « Da Agatocle a Ieronimo : la dinamica dei rapporti tra Sicilia, Cirenaica ed Egitto », Atti della Accademia Peloritana dei Pericolanti, Classe di Lettere, Filosofia e Belle Arti, 69 Suppl. 1 (1993b), p. 431‑452 ; eadem, « Macedonia e Sicilia nell’eta del Diadochi e di Agatocle : linee della politica occidentale di Cassandro, Tolomeo, Demetrio », Ancient Macedonia V, 1 (1993c), p. 345‑372 ; Riccardo Vattuone, « Linee della politica di Agatocle in Magna Grecia », RSA, 17‑18 (1987), p. 55‑72 ; C. A. Giannelli, « Gli interventi di Cleonimo e di Agatocle in Magna Grecia », CS, 11 (1974), p. 353‑380 et Eugenio Manni, « Agatocle e la politica estera di Siracusa », Kokalos, 12 (1966), p. 144‑162.

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traduisent cette réalité particulière : il était à la tête d’un régime politique dans lequel il représentait l’unique dirigeant, à la fois comme les anciens τύραννοι de Sicile et les nouveaux βασιλεῖς des monarchies hellénistiques. Ses aspirations à étendre son pouvoir et les relations qu’il entretint avec d’autres États ont laissé une trace dans l’histoire du monde hellénistique.

L'auteur E. Zambon invite à reconsidérer l’importance de ce personnage dans la dynamique politique de son époque tout en évoquant son titre politique : « By assuming the

royal title, Agathocles gave his own authority a new significance, which integrated him — and his homeland as well — in the new world which had been created by the conquests of Alexander »13. Bien qu’il ait porté le titre de βασιλεύς en même temps que les

Diadoques, Agathocle est peu considéré dans l’historiographie de la période hellénistique. Lorsqu’il est mentionné, il est souvent tenu pour un tyran grec de Sicile qui n’avait de βασιλεύς que le nom. Les termes τύραννος et tyrannus sont effectivement utilisés dans les sources anciennes, mais au côté d’autres mots comme βασιλεύς, δυνάστης et rex. Pourtant, les traductions des textes anciens qui mentionnent Agathocle ne concordent parfois pas avec les termes utilisés dans la langue originale ou avec le sens historique du lexique. Lorsque nous comparons la traduction de la Bibliothèque historique de Diodore de Sicile à celle de la de la collection Loeb Classical Library, nous constatons que cette dernière tend à rendre le plus souvent δυναστ- par tyranny ou bien par despotism14. Pourtant, Agathocle de Sicile fut

appelé βασιλεύς dans la littérature grecque et rex dans plusieurs sources romaines. Il fut aussi considéré positivement par certains anciens. L’utilisation de termes péjoratifs pour les modernes au lieu de rendre la diversité réelle du vocabulaire antique peut engendrer une mécompréhension de l’histoire politique ancienne. Sur le problème de la traduction et sa difficulté à rendre la justesse historique de la pensée politique ancienne, R. K. Balot écrit ainsi : « we can easily distort the ancients’ own political vocabulary and outlook. Such

13 Ephrem Zambon, « From Agathocles to Hieron II : The Birth and Development of βασίλεια in

Hellenistic Sicily », Ancient Tyranny, Édimbourg, Edinburgh University Press, 2006, p. 83.

14 Le nombre de fois où le lexème δυναστ- est traduit par tyrant et tyranny est assez important :

XIX, 2, 1 ; XX, 4, 4 ; 4, 7 ; 13, 4 ; 57, 2 ; 62, 2 ; 63, 6 ; 63, 7 ; 68, 4 ; 69, 2 ; 77, 2 ; 77, 3. Ce genre de traduction peut influencer la conception que le lecteur a du pouvoir d’Agathocle plutôt que de présenter la réelle diversité et la signification du vocabulaire utilisé par les auteurs anciens.

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distortions inevitably blunt the force of any theoretical challenges or provocations offered by the ancients. This happens all too frequently, as when scholars have anachronistically imported the modern language of sovereignty or social contract theory into study of ancient political ideas or ideology »15.

Un fait demeure : Agathocle de Sicile est présenté par les sources comme jouissant d’un pouvoir de type autocratique. Au livre XIX de la Bibliothèque historique de Diodore de Sicile, après le coup d’État d’Agathocle à Syracuse, un premier témoignage dépeint la nature autocratique du pouvoir qu’endossa Agathocle à partir de ce moment. Après les meurtres et pillages résultant du renversement politique, Diodore rapporta qu’Agathocle fit un discours à l’Assemblée où il disait rendre l’αὐτονομία au peuple et il remplaça son vêtement militaire (χλαμύδιον) par une tunique civile (ἱμάτιον). Toutefois, l’Assemblée en décida autrement : Εὐθὺ γοῦν οἱ διαπεφορηκότες τὰ τῶν ἠτυχηκότων ἐβόων μὴ καταλιπεῖν ἑαυτούς, ἀλλὰ προσδέξασθαι τὴν τῶν ὅλων ἐπιμέλειαν. Ὁ δὲ τὸ μὲν πρῶτον ἡσυχίαν εἶχεν, εἶτα τοῦ πλήθους βιαιότερον ἐγκειμένου προσδέχεσθαι μὲν ἔφησε τὴν στρατηγίαν, μὴ μέντοι γε μετ᾿ ἄλλων ἄρξειν· οὐ γὰρ ὑπομενεῖν, ὧν ἂν ἕτεροι παρανομήσωσι, τούτων αὐτὸν συνάρχοντα λόγον ἀποδιδόναι κατὰ τοὺς νόμους. Συγχωρήσαντος δὲ τοῦ πλήθους μοναρχεῖν οὗτος μὲν ἐχειροτονήθη στρατηγὸς αὐτοκράτωρ καὶ τὸ λοιπὸν φανερῶς ἐδυνάστευε καὶ τῆς πόλεως ἐπιμέλειαν ἐποιεῖτο (ΧΙΧ, 9, 3-4)16.

L’Assemblée du peuple, après des décennies de guerres entre les partisans oligarques et démocratiques, décida de laisser Agathocle gouverner seul (« μοναρχεῖν ») et lui donnèrent

15 Ryan K. Balot, « Rethinking the History of Greek and Roman Political Thought », A Companion to Greek and Roman Political Thought, Oxford, Blackwell, 2009, p. 6‑7.

16 « En tout cas, sur le champ, ceux qui avaient pillé les biens des victimes lui crièrent de ne pas les

abandonner et d’accepter au contraire la direction suprême des affaires. Lui, tout d’abord, de garder le silence, puis, comme la foule le pressait davantage, il déclara accepter la stratégie, mais à condition de l’exercer seul. Il n’acceptait pas, en effet, pour des fautes commises par d’autres, d’avoir à rendre des comptes en tant que collègues, comme le voulait la loi. Comme la foule lui avait accordé de commander seul, il fut élu stratège avec pleins pouvoirs et désormais il était clair qu’il détenait le pouvoir et qu’il dirigeait la cité » (traduction de Françoise Bizière).

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un titre particulier qui ne revient plus dans la littérature, celui de « στρατηγὸς αὐτοκράτωρ »17.

Une confusion naît en raison de la pluralité des titres que la littérature nous transmit pour les régimes autocratiques et de la méconnaissance de la signification de ces termes dans leur contexte littéraire. Il est dès lors légitime de se demander : dans les circonstances politiques particulières de la prise du titre de βασιλεύς par Agathocle ainsi que le contexte de la diversité des titres que la littérature antique nous a léguée et de la polysémie de ce vocabulaire, comment les titres et le pouvoir autocratique d’Agathocle furent-ils rapportés par les sources littéraires anciennes ?

L’objectif de ce mémoire est dès lors d’étudier le lexique employé par les auteurs anciens lorsqu’ils rapportent la fonction politique qu’occupait Agathocle. Pour ce faire, les ouvrages mentionnant un titre politique d’Agathocle doivent d’abord être recensés, présentés et replacés dans leur contexte. Ensuite, nous devons établir l’état de l’historiographie à propos de la terminologie du pouvoir et son sens dans l’histoire de la littérature grecque et latine. Une fois que nous aurons une meilleure compréhension de la signification des termes pour les auteurs anciens, nous procèderons un inventaire des titres politiques attribués à Agathocle dans les ouvrages sélectionnés de la littérature grecque et latine ancienne et analyserons l’évolution de l’utilisation de ces termes.

Dans le but de répondre à notre question de recherche et d’atteindre les objectifs du mémoire, les méthodes historique et analytique sont privilégiées. La méthode historique dans

17 La question du régime autocratique d’Agathocle a été traitée par Stefania De Vido, « Immagini di

re e paradigmi de regalità. L’esempio dell’ultimo Agatocle », Sulle sponde della Ionio : Grecia occidentale e Greci d’Occidente, Pise, ETS, 2016a, p. 339‑354 ; Ephrem Zambon, op. cit., 2006, p. 77-92 ; Matthias Haake, « Agathokles und Hieron II : zwei “ basileis ” in hellenistischer Zeit und die Frage ihrer Nachfolge », Διάδοχος τῆς βασιλείας : la figura del sucesor en la realeza helenística, Madrid, Universidad Complutense, 2005, p. 153‑175 ; Sebastiana Consolo Langher, op. cit., 2000, 446 p. et eadem, 1993a, p. 79-81.

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le cadre des études anciennes prévoit le dépouillement des sources antiques relatives au sujet de recherche ainsi que l’enrichissement de la connaissance du sujet par l’exploration des études scientifiques réalisées dans les dernières décennies. Comme notre objectif est d’éclairer la façon dont la littérature a rapporté certains termes, seules les sources écrites sont examinées. La rareté des sources littéraires qui caractérise l’étude de l’Antiquité nous oblige à considérer tous les textes qui mentionnent un titre de pouvoir pour Agathocle entre la fin du IVe siècle a.C et le IVe siècle p.C., même si le personnage y est présenté en dehors de son

contexte historique. La fin du IVe siècle p.C. est utilisée comme délimitation terminale du

corpus puisque l’étude analyse la littérature de l’Antiquité et qu’au-delà, les sources prennent une distance chronologique importante avec la période d’activité politique du sujet de

ca 330 à 284 a.C.18.

La méthode analytique prend la forme d’une analyse lexicologique et thématique. Les termes reliés aux radicaux τυρανν- pour le grec et tyrann- pour le latin, les mots associés à δυναστ-, le vocabulaire de la βασιλεία ainsi que le champ lexical de rex et imperium sont les principaux objets de l’analyse lexicologique pour réaliser la recherche. Ils ont été choisis en fonction des termes utilisés à l’égard d’Agathocle dans la littérature antique. La recension des termes a été effectuée à partir des bases de données Thesaurus Linguae Graecae pour les sources grecques et la Cross Databases Searchtool hébergé par Brepols Publishers Online pour les auteurs latins. Les résultats obtenus lors de ce premier recensement ont chacun été contrevérifiés dans les éditions parues aux Belles Lettres, aux Éditions du Cerf ou dans la collection Loeb Classical Library selon l’édition utilisée de chaque ouvrage ancien. L’inventaire exhaustif de ces titres autocratiques pour Agathocle de Sicile n’a jamais été fait auparavant. Le lecteur est donc renvoyé directement aux textes des auteurs anciens. L’analyse thématique consiste, quant à elle, à « repérer des expressions verbales ou textuelles, des thèmes généraux récurrents qui apparaissent sous divers contenus plus concrets »19. Elle s’applique au vocabulaire du pouvoir autocratique d’Agathocle et porte sur

18 Voir surtout la troisième partie « Le métier d’historien » dans François Cadiou et al., Comment se fait l’histoire : pratiques et enjeux, Paris, La Découverte, 2005, p. 187-194 particulièrement. 19 Alex Mucchielli, Dictionnaire des méthodes qualitatives en sciences humaines et sociales, Paris,

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des cadres thématiques spécifiques identifiés : le cadre comparatif, le cadre géographique et divers thèmes en lien avec les cadres politique et militaire. À noter que le cadre comparatif inclut la comparaison des vices et vertus des dirigeants. Ce type d’analyse n’a été fait que de façon limitée, surtout en ce qui concerne l’activité politique d’Agathocle. Il ne s’agit pas ici de procéder à l’analyse complète des œuvres, mais plutôt d’effectuer des relevés ponctuels des éléments de vocabulaire nécessaires à la construction du portrait politique d’Agathocle dessiné par les auteurs anciens. Dans cette étude, le latin et le grec ancien sont utilisés avec des traductions françaises en note de bas de page lorsque cela est jugé nécessaire. Sauf mentions contraires, les traductions françaises sont empruntées aux éditions de la Collection des Universités de France, aux Belles Lettres.

Parmi les mentions éparses dans les sources antiques, le portrait d’un homme politique actif se dessine pour Agathocle de Sicile. Les auteurs anciens, favorables ou hostiles au personnage, lui accordèrent des caractéristiques qui le lièrent au comportement militaire et politique de l’époque, c’est-à-dire le moment où les successeurs d’Alexandre le Grand menèrent des guerres de territoires et des alliances jetant les bases politiques de la nouvelle réalité méditerranéenne. Toutefois, ces sources proviennent principalement de contextes tout autres que celui des guerres des Diadoques. Leur datation s’étale de la seconde moitié du IVe siècle a.C. à la fin du IVe siècle p.C. et leur cadre géographique va de l’Orient hellénisé

à la Gaule romaine. Ces sources littéraires sont brièvement présentées ici, mais elles font l’objet d’une discussion plus importante dans le premier chapitre.

Afin de faire la lumière sur le portrait du pouvoir autocratique d’Agathocle dans la littérature, la recherche doit s’opérer d’abord dans la Bibliothèque historique de Diodore de Sicile. L’étude plus particulière des livres XIX, XX et des fragments du livre XXI est l’élément central du corpus littéraire du fait que l’auteur y traite de l’histoire de l’île après la mort d’Alexandre le Grand. Le choix des éditions Les Belles Lettres pour cet

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auteur s’explique par la volonté de l’éditeur de respecter le texte manuscrits20. Pour le

livre XIX, le texte grec de F. Bizière se fonde sur deux manuscrits et une source indirecte du texte de Diodore en appliquant des interventions minimes. De plus, la traduction rend un texte fidèle à la langue grecque en mettant au second plan les préoccupations relatives à l’esthétique du texte21. Pour le livre XX, C. Durvye a suivi les manuscrits : elle a ignoré les

corrections des précédentes éditions pour suivre le texte original dans la mesure où il est compréhensible. Il n’y a que six corrections apportées au texte et l’auteure explique dans sa notice les choix qu’elle a faits lorsque le texte des manuscrits ne concordait pas. Pour son édition méticuleuse et son apparat critique, son édition du texte grec de Diodore de Sicile est une référence22. Pour les fragments du livre XXI de la Bibliothèque historique, l’édition et la

numérotation des fragments de P. Goukowsky ont été privilégiées. L’édition de F. R. Walton dans la Loeb Classical Library, quoique érudite, propose une classification qui ne représente pas la façon dont l’œuvre originale de Diodore devait être regroupée. P. Goukowsky offre un nouveau système de référence qui range les fragments, « en respectant l’ordre primitif du récit, dans la mesure où il est susceptible d’être établi, mais aussi en indiquant leur degré de fiabilité »23. L’auteur utilise pour son édition les deux sources indirectes disponibles pour les

fragments, soit les Excerpta Constantiniana et les Excerpta Hoescheliana. Les corrections apportées aux sources sont indiquées clairement et permettent de constater le sérieux du travail d’édition24.

20 Les références complètes sont fournies dans la bibliographie.

21 Le manuscrit du XIe siècle, Parisinus gr. 1665, est une version lacunaire non corrigée par le copiste.

Le manuscrit Laurentianus 70,12 datant du XVe siècle comporte des corrections avec commentaires

du copiste. Cette version concorde la majorité du temps avec le premier manuscrit. La source indirecte, les Excerpta Constantiniana, est en accord avec le premier manuscrit et comporte parfois des corrections du deuxième. Voir les principes d’éditions de Françoise Bizière, « Notice », Bibliothèque historique, Tome XIV, Livre XIX, Paris, Les Belles Lettres, 2002 (1975), p. XXII-XXIII.

22 Pour les principes d’édition, cf. Cécile Durvye, « Notice », Bibliothèque historique, Tome XV, Livre XX, Paris, Les Belles Lettres, 2018, p. CXXXVIII-CXL.

23 Paul Goukowsky, « Introduction », Bibliothèque historique. Fragments, Tome II, Livres XXI-XXVI,

Paris, Les Belles Lettres, 2006a, p. IX.

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L’Abrégé des histoires philippique de Justin est le deuxième ouvrage d’importance dans notre analyse. Il s’agit d’un florilège des Histoires philippiques disparues de Trogue Pompée. L’Abrégé de Justin rapporte l’histoire d’Agathocle dans les livres XXII et XXIII. Nous utilisons l’édition de B. Mineo, commentée par G. Zecchini parue aux éditions Les Belles Lettres. Des plus de deux cents manuscrits qui rapportent l’Abrégé, B. Mineo a choisi les manuscrits les plus anciens combinés avec des manuscrits tardifs, mais plus complets. Dans l’introduction du premier tome, l’auteur présente ses choix par rapport à la traduction en comblant les lacunes du texte. Au moyen d’un apparat critique très clair, il indique tout au long de la traduction les différences de manuscrits et d’interprétation des chercheurs qui l’ont précédé dans l’étude du texte25.

Treize autres auteurs anciens s’ajoutent à Diodore de Sicile, Trogue Pompée et Justin. Trois auteurs grecs dont les œuvres ont disparu sont étudiés, car ils furent contemporains d’Agathocle et écrivirent des ouvrages à son sujet qui ont influencé les textes des auteurs suivants. Il s’agit de Callias de Syracuse, de Timée de Tauroménion et de Douris de Samos26.

Deux auteurs grecs ont mentionné Agathocle à plusieurs reprises dans leurs ouvrages, mais sans traiter spécifiquement de l’histoire du Syracusain. Polybe nomma Agathocle et un titre politique dans cinq chapitres de son œuvre, les Histoires. Le Syracusain se retrouve aussi à huit reprises dans des ouvrages des Vies et des Œuvres morales de Plutarque27. Une dernière

source en langue grecque signale Agathocle : Appien d’Alexandrie. Toutefois, les deux citations sont très ponctuelles et intégrées dans l’Histoire romaine au moment où l’auteur relate l’histoire de Pyrrhos (Livre samnitique) et des guerres puniques (Livre africain)28. Les

25 Les tomes des livres de Justin sont présentés dans la bibliographie. En ce qui concerne les principes

d’éditions, voir Bernard Mineo, « Introduction », Abrégé des histoires philippiques de Trogue Pompée. Tome I, Paris, Les Belles Lettres, 2016, p. LXIX‑LXXXII.

26 Pour ces références, nous ne pouvons que renvoyer les lecteurs à Jacoby (564 pour Callias, 566 pour

Timée et 76 pour Douris) et aux notices de Brill’s, cf. Duane W. Roller, « Kallias of Syracuse », Brill’s New Jacoby, Brill, 2011 ; Craige B. Champion, « Timaios », Brill’s New Jacoby, Brill, 2010 et Frances Pownall, « Duris of Samos », Brill’s New Jacoby, Brill, 2009.

27 Les éditions Les Belles Lettres sont aussi utilisées pour les ouvrages de Polybe et Plutarque,

cf. bibliographie.

28 Pour le Livre samnitique, qui est fragmentaire, il n’existe pas de version dans Les Belles Lettres.

Nous utiliserons donc l’édition de 2019 de la collection Loeb Classical Library. L’édition de 2001 des Belles Lettres est toutefois utilisée pour le Livre africain, cf. bibliographie.

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sept autres sources sont en langue latine et ne mentionnent Agathocle que de façon secondaire. L’auteur comique Plaute n’avait pas d’ambition historienne lorsqu’il mentionna quelques fois Agathocle. Il fait référence au personnage, qui devait être assez connu pour que le public l’identifie, dans ses pièces Mostellaria, Pseudolus et Maneachmi29. Le texte d’une

plaidoirie figure dans notre liste de sources, le Contre Verrès de Cicéron, ainsi que l’œuvre historique de Tite-Live, Histoire romaine30. Dans son ouvrage Faits et dits mémorables, au

livre VII, Valère Maxime utilisa Agathocle comme exemplum de stratégie martiale31.

L’auteur Ammien Marcellin aborda Agathocle de façon indirecte dans le livre XIV de ses

Histoires datant du IVe siècle p.C.32. À ces auteurs païens se joignent deux sources d’auteurs

chrétiens : les Institutions divines de Lactance33 et les Épigrammes d’Ausone34. Même si les

témoignages de ces auteurs sur Agathocle sont minimes, les traces qu’ils ont laissées peuvent à tout le moins servir de comparaison avec les auteurs qui ont abordé son histoire de façon plus directe.

Sur les auteurs anciens, en plus des ouvrages généraux, mais bien documentés à propos de la littérature grecque (S. Saïd et al. 1997)35 et des auteurs latins (M. P. Arnaud-Lindet,

2001 ; H. Zehnacker et J.-C. Fredouille, 1998 ; J. Bayet, 1992)36, les ouvrages des éditions

29 Éditions Les Belles Lettres, voir la bibliographie. 30 Ibid.

31 Aucune édition du livre VII des Faits et dits mémorables de Valère Maxime n’est disponible dans

Les Belles Lettres. L’édition de D. R. Shackleton Bailey, dans la collection Loeb Classical Library a donc été utilisée. Consulter la bibliographie.

32 Pour l’édition des Belles Lettres, cf. bibliographie.

33 Pour les Institutions divines de Lactance, nous avons utilisé les Éditions du Cerf avec le texte édité

et présenté par Pierre Monat, voir la bibliographie.

34 En ce qui concerne les Épigrammes d’Ausone, nous avons préféré l’édition récente du texte par

Bernard Combeaud parue dans les éditions Mollat, cf. bibliographie. Cette nouvelle édition modifie l’ordre des textes : l’épigramme où figure Agathocle est nouvellement répertoriée dans le livre XXV, épigramme 10. Dans l’édition de 1921 de la Loeb Classical Library, la même épigramme se trouve dans Epigrams on Various Matters, livre XIX, épigramme 2.

35 Suzanne Saïd, Alain Le Boulluec, et Monique Trédé-Boulmer, Histoire de la littérature grecque,

Paris, PUF, 1997, 720 p.

36 Marie Pierre Arnaud-Lindet, Histoire et politique à Rome : les historiens romains IIIe siècle av. J.-C.-Ve siècle ap. J.-C., Rosny, Bréal, 2001, 383 p. ; Hubert Zehnacker et Jean Claude Fredouille, Littérature latine, Paris, PUF, 1998 (1993), 517 p. et Jean Bayet, Littérature latine, Paris, Armand Colin, 1992 (1965), 541 p.

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Les Belles Lettres37 et de la collection Loeb Classical Library38 offrent souvent des

introductions et notices sur les auteurs et leur œuvre au début de leur traduction. Ces avant-propos sont toujours fort utiles et pertinents pour l’étude des auteurs anciens.

L’examen de la terminologie du pouvoir dans les sources anciennes a été bonifié par les études sur la pensée politique ancienne. Deux collectifs assez récents présentent de nouvelles études sur les concepts entourant le pouvoir dans la littérature ancienne, soit

A Companion to Greek and Roman Political Thought (2009) et The Cambridge History of Greek and Roman Political Though (2000). Dans le premier, P. Garnsey expose la transition

entre le pouvoir autonome des cités-États de l’époque classique et les pouvoirs monarchiques de l’époque hellénistique. Il aborde aussi l’expansion romaine et son impact sur le monde grec39. T. Wiedemann étudie plutôt la pensée politique chez les historiens latins40. Dans le

collectif de 2009, l’histoire de la pensée politique chez les auteurs grecs et romains est révisée par R. Balot41. Le pouvoir royal et son expression furent en outre clairement exposés dans un

37 Cécile Durvye, op. cit., 2018 ; Édouard Galletier, « Introduction », Histoire. Tome I. Livres XIV-XVI, Paris, Les Belles Lettres, 2018 (1968), p. 7‑53 ; Guy Lachenaud, « Introduction », Fragments, Paris, Les Belles Lettres, 2017, p. IX‑LXVIII ; Bernard Mineo, op. cit., 2016 ; Paul Goukowsky, op. cit., 2006a ; Françoise Bizière, op. cit., 2002 ; Jean Claude Carrière, « Notice », Œuvres morales. Tome XI, 2e partie. Traités 52 et 53. Préceptes politiques. Sur la monarchie, de la démocratie et de l’aristocratie, Paris, Les Belles Lettres, 1984, p. 3‑69 ; Robert Flacelière, « Introduction », Vies. Tome 1, Paris, Les Belles Lettres, 1957, p. IX‑XXXI et Jean Bayet, « Introduction », Histoire romaine. Tome I, Livre I, Paris, Les Belles Lettres, 1940, p. VII‑LXXVI.

38 Brian McGing, « Introduction », Roman History. Volume I. Livres 1-7, Cambridge, Harvard

University Press, 2019, p. IX‑XXXV ; John C. Rolfe, « Introduction », History, Volume I : Books 14-19, Cambridge, Harvard University Press, 1950, p. IX‑XLVII ; Leonard Hugh G. Greenwood, « Introduction », The Verrine Orations, Volume I : Against Caecilius. Against Verres, Part 1, Books 1-2, Cambridge, Harvard University Press, 1928, p. IX‑XIX et Hugh G. Evelyn-White, « Introduction », Ausonius. Volume I, livres 1-17, Cambridge, Harvard University Press, 1919, p. VIII‑XLI.

39 Peter Garnsey, « The Hellenistic and Roman Periods », The Cambridge History of Greek and Roman Political Thought, Cambridge, Cambridge University Press, 2000, p. 397‑414. Sur l’Empire romain, voir aussi Peter Garnsey et Richard Saller, L’empire romain : économie, société, culture, Paris, La Découverte, 1994, 359 p.

40 Thomas Wiedemann, « Reflections of Roman Political Thought in Latin Historical Writing », The Cambridge History of Greek and Roman Political Thought, Cambridge, Cambridge University Press, 2000, p. 517‑531.

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article récent de A. M. Eckstein dans lequel il distingue l’application théorique et réelle de la royauté hellénistique42. Sur l’histoire romaine, C. F. Noreña et P. A. Stadter étudient la

manière dont les auteurs latins peuvent concevoir le pouvoir d’un seul homme en fonction des vices et des vertus de l’homme politique43. Le pouvoir et sa présentation dans

l’historiographie sont aussi le sujet de l’ouvrage collectif en langue italienne Storiografia e

regalità nel mondo greco : colloquio interdisciplinare. Cattedre di Storia della Storiografia Greca e Storia (2003). Y sont abordés l’idéologie royale développée autour de la personnalité

d’Alexandre le Grand (L. Braccesi), la façon dont Pausanias utilisa une terminologie diversifiée pour le pouvoir (E. Camarra), le débat historiographique sur la royauté d’Agathocle de Sicile (S. Consolo Langher), la βασιλεία de Démétrios Poliorcète (L. G. Lo Presti) ainsi que la royauté hellénistique en général dans l’historiographie ancienne (B. Virgilio)44.

Pour la période hellénistique, O. Murray publia en 1970 une monographie sur la βασιλεία et sa légitimation à l’époque hellénistique45. Il faut ensuite souligner le travail de

M. M. Austin sur la royauté hellénistique et son rapport à la guerre ainsi qu’à l’économie46.

C. Bearzot (2003) s’est quant à elle concentrée sur le terme δυναστεία et l’évolution de son utilisation jusqu’à l’époque hellénistique47. La diversité du lexique et la réappropriation

42 Arthur M. Eckstein, « Hellenistic Monarchy in Theory and Practice », A Companion to Greek and Roman Political Thought, Oxford, Blackwell, 2009, p. 247‑265.

43 Carlos F. Noreña, « The Ethics of Autocracy in the Roman World », A Companion to Greek and Roman Political Thought, Oxford, Blackwell, 2009, p. 266‑279 et Philip A. Stadter, « Character in Politics », idem., p. 456‑470.

44 Lorenzo Braccesi, « Alessandro tredicesimo dio : ideologia, sepoltura, regalità », Storiografia e regalità nel mondo greco : colloquio interdisciplinare, Cattedre di Storia della Storiografia Greca e Storia Greca : Chieti, 17-18 gennaio 2002, Alexandrie (It.), Ed. dell’Orso, 2003, p. 279‑285 ; Erminia Camarra, « Il vocabolario del potere in Pausania », idem., p. 341‑350 ; Sebastiana Consolo Langher, « Gli storici e il potere : la regalità di Agatocle e il dibattito storiografico del suo tempo », idem., p. 287‑301 ; Lavinia Grazia Lo Presti, « Aspetti della regalità di Demetrio Poliorcete (l’assunzione del titolo regale ; gli onori divini) », idem., p. 351‑354 et Biagio Virgilio, « Storiografia e regalità ellenistica », idem., p. 303‑330.

45 Oswyn Murray, Peri Basileias. Studies in the Justification of Monarchic Power in the Hellenistic Period, Oxford, Oxford University Press, 1970.

46 Michel M. Austin, op. cit., 1986.

47 Cinzia Bearzot, « Il concetto di “dynasteia” e lo stato ellenistico », Gli stati territoriali nel mondo antico, Milan, Vita e Pensiero, 2003, p. 21‑44.

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particulière des anciens termes pour définir les nouvelles réalités de l’époque hellénistique par rapport au concept de cité-État ont été abordées par M. Mari (2009)48. La conception du

pouvoir d’un seul homme dans la pensée grecque eut un regain d’attention en 2013 lors de la parution des deux publications de N. Luraghi et de la monographie de L. G. Mitchell49. En

ce qui concerne la tyrannie, E. Lévy, dans son article de 1996, tenta de rendre le sens que prenaient chez Polybe certains termes reliés à celle-ci50. Polybe et son interprétation du

pouvoir ont aussi été étudiés par C. Bearzot et A. Erskine51. La tyrannie a fait l’objet d’une

monographie complète (2006) et d’un article (2000) de S. Lewis où il traite de la continuité du terme dans la littérature et des thèmes qui sont associés à son lexique52.

En ce qui concerne la littérature latine, le terme imperator et son utilisation à l’époque de la République ont fait l’objet d’une monographie de R. Combès dès 196653. Son travail

fut bonifié en 1982 par l’ouvrage de P. M. Martin qui traite spécifiquement de la royauté à Rome de l’époque royale à la République puis, dans un deuxième volume paru en 1994, de la royauté pendant la République jusqu’au Ier siècle a.C.54. En 1994, P. M. Martin publia

aussi un article défendant l’idée que le terme imperator a pu équivaloir à celui de rex à une

48 Manuela Mari, « La tradizione delle libere “poleis” e l’opposizione ai sovrani : l’evoluzione del

linguaggio della politica nella Grecia ellenistica », Ordine e sovversione nel mondo greco e romano : atti del convegno internazionale : Cividale del Friuli, 25-27 settembre 2008, Pise, ETS, 2009, p. 87‑112.

49 Nino Luraghi, « One-Man Government : The Greeks and Monarchy », A Companion to Ancient Greek Government, Chichester, Wiley-Blackwell, 2013, p. 131‑145 ; idem, éd. The Splendors and Miseries of Ruling Alone : Encounters with Monarchy from Archaic Greece to the Hellenistic Mediterranean, Stuttgart, Steiner, 2013, 284 p. et Lynette G. Mitchell, The Heroic Rulers of Archaic and Classical Greece, London, Bloomsbury Academic, 2013, 207 p.

50 Edmond Lévy, « La tyrannie et son vocabulaire chez Polybe », Ktema, 21 (1996), p. 43‑54. 51 Cinzia Bearzot, « Il lessico dell’opposizione politica in Polibio », Parole in movimento : linguaggio

politico e lessico storiografico nel mondo ellenistico. Pise, Serra, 2013, p. 175‑183 ; eadem, « Polybius and the Tyrants of Syracuse », Polybius and His Legacy, Berlin-Boston, De Gruyter, 2018, p. 43‑54 et Andrew Erskine, « Expressions of Power in Polybius Histories », Parole in movimento. Linguaggio politico e lessico storiografico nel mondo ellenistico. Pise-Rome, Fabrizio serra editore, 2013, p. 81‑92.

52 Sian Lewis, « The Tyrant’s Myth », Sicily from Aeneas to Augustus : New Approaches in Archaeology and History, Édimbourg, Edinburgh University Press, 2000, p. 97‑106 et idem, Ancient Tyranny, Édimbourg, Edinburgh University Press, 2006a, 282 p.

53 Robert Combès, Imperator : recherches sur l’emploi et la signification du titre d’imperator dans la Rome républicaine, Paris, PUF, 1966, 489 p.

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certaine époque jusqu’à ce que l’utilisation d’imperator devienne méliorative. Plus récemment, J.-F. Thomas publia un article où il fait une analyse lexicologique du pouvoir dans la littérature latine55.

Pour la Sicile même, S. Consolo Langher s’est penchée dans une monographie sur la différenciation du type de pouvoir à Syracuse aux Ve et IVe siècles a.C. Pour la période

hellénistique en Sicile, l’utilisation des termes reliés au pouvoir et la distinction entre les diverses appellations des acteurs politiques siciliens ont principalement été étudiées à partir de la seconde moitié du XXe siècle et au XXIe siècle (S. I. Oost, 1976 ; E. Lévy, 1996 ;

C. Mossé 2006 ; S. De Vido, 2013)56. S. Collin-Bouffier a analysé le vocabulaire

caractérisant les élites politiques siciliotes jusqu’au IVe siècle a.C. dans les écrits de

Diodore de Sicile et de Plutarque57.

Beaucoup d’ouvrages traitent d’un thème ou d’un auteur en particulier dans son approche de la pensée politique ancienne. Les publications sur le lexique politique dans l’Antiquité sont donc multiples, mais éparses. Cette dispersion des données exige que nous élaborions une vue d’ensemble sur l’utilisation de ce vocabulaire et son sens dans les sources des deux langues anciennes. L’analyse de sa signification et son évolution permettent une

55 Jean François Thomas, « Sur le champ lexical du pouvoir en latin », VL, 185‑186 (2012),

p. 237‑249.

56 Stewart Irvin Oost, « The Tyrant Kings of Syracuse », CPh, 71, 3 (1976), p. 224‑236 ;

Edmond Lévy, op. cit., 1996 ; Claude Mossé, op. cit., 2006 et Stefania De Vido, « Τύραννος, στρατηγός, αὐτοκράτωρ, δυνάστης. Le ambigue parole del potere nelle Sicilia di IV secolo », Parole in movimento. Linguaggio politico e lessico storiografico nel mondo ellenistico, Pise-Rome, Fabrizio serra editore, 2013a, p. 45‑60, 2013.

57 Sophie Collin-Bouffier, « Les élites face au tyran en Sicile grecque à l’époque classique », La cité et ses élites : pratiques et représentation des formes de domination et de contrôle social dans les cités grecques : actes du colloque de Poitiers, 19-20 octobre 2006, Paris, de Boccard, 2010, p. 291‑305. Le terme « siciliote » est utilisé avec cette orthographe par l’auteure pour désigner les populations hellénophones de la Sicile et les distinguer des peuples autochtones sicanes, sicules et élymes. Le mot est parfois aussi orthographié « sicéliote » et se retrouve chez Thucydide sous la forme « Σικελιώτης » (IV, 64 et VII, 32, entre autres).

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meilleure approche afin de rendre de façon adéquate la valeur d’un terme et les réalités politiques de la période évoquée.

L’histoire de la Sicile a longtemps été envisagée par les chercheurs comme une histoire isolée. Ceux qui s’y intéressèrent traitèrent donc de la Sicile spécifiquement. Les interactions entre les Grecs, nouveaux arrivants sur l’île, et les colonies phéniciennes déjà en place furent le sujet de plusieurs études dans le courant historiographique du XXe siècle qui examinait les

rapports de colonisation. Il faut mentionner l’article de Ph. Gauthier (1960) qui différenciait l’image construite par les Grecs de ces interactions et la réalité des débuts coloniaux58. Ces

études, non moins pertinentes, car elles ont le mérite d’avoir amorcé l’intérêt historique pour l’île, ont commencé à laisser la place à des analyses qui considèrent que l’histoire de la Sicile s’imbriqua dans le contexte beaucoup plus vaste et complexe de la Méditerranée. L’historiographie sicilienne doit beaucoup au travail de R. Vattuone. Cet auteur a récemment publié plusieurs articles (2002, 2005, 2007) portant tous sur l’Occident grec59. En 2014 et

2015, il publia deux articles portant spécifiquement sur la place de l’Occident grec dans

l’Abrégé de Justin60. Il a été le directeur d’un ouvrage collectif (2002) qui traite de l’histoire

des Grecs dans leur aventure occidentale61. S. De Vido a aussi traité de l’histoire de la Sicile

du Ve au IIIe siècle a.C. en se concentrant sur les thèmes de la diplomatie, la politique et la

guerre62. Ses études permettent de mieux connaître le contexte politique complexe de la Sicile

58 Philippe Gauthier, « Grecs et Phéniciens en Sicile pendant la période archaïque », HH, 224 (1960),

p. 257‑274.

59 Riccardo Vattuone, « La necessità del tiranno. Tendenze della storiografia greca di IV secolo a.C.

sulla dinastia dionigiana. », La Sicilia dei due Dionisi. Atti della settimana di studio, Agrigento 24-28 febbraio 1999, Rome, L’Erma di Bretschneider, 2002, p. 533‑553 ; idem, 2005 et idem, « Western Greek Historiography », A companion to Greek and Roman historiography. Oxford, Blackwell, 2007, p. 189‑199.

60 Idem, « Giustino e l’Occidente greco 1 : VI-V secolo a.C. », Studi sull’epitome di Giustino. Dagli Assiri a Filippo II di Macedonia, Milan, Vita e Pensiero, 2014, p. 261‑277 et « Giustino e l’Occidente greco 2 : IV-II secolo a.C. », Studi sull’epitome di Giustino. Da Alessandro Magno a Filippo V di Macedonia, Milan, Vita e Pensiero, 2015, p. 55‑67.

61 Idem, éd., Storici greci d’Occidente, Bologne, Il Mulino, 2002, 588 p.

62 Stefania De Vido, Le guerre di Sicilia, Rome, Carocci, 2013b, 188 p. et eadem, « Guerra e battaglie

nella storia di Sicilia : uno sguardo d’insieme », Le grandi battaglie della storia antica di Sicilia, Rome, Salvatore Sciascia Editore, 2016b, p. 7‑17. Voir ses ouvrages déjà cités de 2008, 2011, 2013a, 2015 et 2016a.

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avec des analyses récentes de l’histoire. Elle travaille d’ailleurs sur les populations indigènes de l’île et les contacts avec la civilisation grecque. En ce qui concerne les liens qui unissaient la Sicile avec d’autres états occidentaux, l’Épire et la Grande-Grèce furent aussi abordées dans l’historiographie (E. Lepore, 1964-1965 ; C. A. Giannelli, 1974 ; G. De Sensi Sestito, 2011)63, tout comme Rome (J. Serrati, 2000)64. De cette façon, plusieurs historiens du monde

méditerranéen se rejoignirent dans l’affirmation de l’inclusion de la Sicile dans le vaste réseau de relations entre États. Cependant, des lacunes demeurent en ce domaine pour la fin du IVe siècle et début du IIIe siècle a.C. d’autant plus que le nombre de recherches est plutôt

restreint.

La communauté scientifique n’a pu que recevoir avec joie un ouvrage collectif qui, pour la première fois, est entièrement consacré au thème de la guerre en Sicile (M. A. Vaggioli, 2006)65. Il s’y trouve une réflexion très pertinente sur le particularisme des

conflits dans le contexte multiculturel et insulaire de la Sicile (M. Moggi)66. P. Anello y

explique aussi les principes de guerre et paix dans l’île au IVe siècle a.C. et G. Prestianni

apporte une contribution sur le rôle qu’y tenaient les mercenaires du Ve au IIIe siècle a.C.67.

Cette dernière vient compléter adroitement l’article de S. Péré-Noguès (1999) qui se concentrait sur le développement du mercenariat sur l’île au IVe siècle68.

63 Ettore Lepore, « Il problema storico dei rapporti fra l’Epiro e la Sicilia », Kokalos, 10‑11 (1964),

p. 489‑502 ; C. A. Giannelli, op. cit., 1974 et Giovanna De Sensi Sestito, op. cit., 2011.

64 John Serrati, « The Coming of the Romans : Sicily from the Fourth to the First Centuries BC », Sicily from Aeneas to Augustus : New Approaches in Archaeology and History, Édimbourg, Edinburgh University Press, 2000b, p. 109‑114.

65 Maria Adelaide Vaggioli et Chiara Michelini, dir. Guerra e pace in Sicilia e nel Mediterraneo antico : Arte, prassi e teoria della pace e della guerra. Atti delle quinte giornate internazionali di studi sull’area elima e la Sicilia occidentale nel contesto mediterraneo a Erice nel 2003. Pise, Ed. della Normale, 2006b, 2 volumes.

66 ibid et Mauro Moggi, « Peculiarità della guerra in Sicilia ? », Guerra e pace in Sicilia e nel Mediterraneo antico : Arte, prassi e teoria della pace e della guerra, Pise, Ed. della Normale, 2006, p. 67‑90.

67 Pietrina Anello, op. cit., 2006 et Anna Maria Prestianni Giallombardo, « Il ruolo dei mercenari nelle

dinamiche di guerra e di pace in Sicilia tra Fine V e metà del III sec. a.C. », Guerra e pace in Sicilia e nel Mediterraneo antico : Arte, prassi e teoria della pace e della guerra, Pise, Ed. della Normale, 2006, p. 107‑130.

68 Sandra Péré-Noguès, « Mercenaires et mercenariat d’Occident : réflexions sur le développement

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