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La participation des Premières nations à la gestion des forêts québécoises : l'exemple du Comité scientifique et d'aménagement de la Forêt Montmorency

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Academic year: 2021

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Texte intégral

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La participation des Premières nations à la

gestion des forêts québécoises

L’exemple du Comité scientifique et d’aménagement

de la Forêt Montmorency.

Mémoire

Édouard-Julien Blanchet

Maîtrise en anthropologie

Maître ès arts (M.A.)

Québec, Canada

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Résumé

Le présent mémoire traite de la participation des Premières nations à un processus de participation multi-acteurs dans le milieu forestier québécois. Il s’intéressera plus particulièrement au rôle joué par l’organisation sociale informelle, c’est-à-dire la pensée institutionnelle et les positions institutionnelles, sur la participation d’un acteur au sein d’un processus de participation publique. En s’appuyant sur une perspective interactionniste, cette recherche postule que l’action d’un acteur au sein d’un processus de participation publique ne peut être comprise qu’en étant resituée dans son contexte, dont l’organisation sociale informelle est constituante. Cette analyse des différentes dynamiques liées à la participation publique repose sur une étude de cas ethnographique, c’est-à-dire la participation de la Nation huronne-wendat au Comité scientifique et d’aménagement de la Forêt Montmorency. Forêt d’enseignement et de recherche de l’Université Laval, la Forêt Montmorency revêt également un caractère exemplaire au Québec puisqu’elle désire être un modèle pour la gestion du territoire forestier québécois. Il s’agissait donc d’un choix de terrain tout indiqué dans le cadre de cette recherche.

Mots clefs : participation publique, Premières nations, analyse des positions institutionnelles, Forêt Montmorency, étude de cas ethnographique.

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Abstract

First Nations' Participation in the Management of Quebec's Forests: The Case of the Scientific and Planning Committee of the Forêt Montmorency.

This study analyzes the participation of First Nations in a multi-stakeholder participation process in Quebec's public forest. In particular, it addresses the role played by informal social organization, that is to say, institutional thinking and institutional positions, on an actor's involvement in a public participation process. Drawing upon the interactionist approach, this study postulates that an actor's actions in a public participation process cannot be fully understood without reference to the contextual dynamics of an informal social organisation. This analysis of different dynamics related to public participation is based on an ethnographic case study: the Huron-Wendat Nation's participation in the Scientific and Planning Committee of the Forêt Montmorency. This study will therefore analyse the various components of informal social organizations, such as reciprocity, interdependence and inter-actor confidence, and the role that they can play in a flexible institutional framework process. Keywords: Public participation, First Nations, positional analysis, Forêt Montmorency, ethnographic case study.

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Table des matières

Résumé ... iii

Abstract ... v

Table des matières ... vii

Liste des abréviations ... xi

Remerciements ... xiii

Introduction ... 1

Chapitre 1 : Cadre contextuel ... 7

1.1 La Forêt Montmorency ... 7

1.1.1 La création d’une nouvelle institution : la Forêt Montmorency ... 7

1.1.2 De l’aménagement polyvalent à la gestion écosystémique ... 10

1.2 Les structures administratives de la Forêt Montmorency ... 14

1.2.1 Le Comité de direction ... 14

1.2.2 Le Comité scientifique et d’aménagement de la Forêt Montmorency ... 15

1.2.3 Un cadre flexible pour l’aménagement ... 18

1.3 Les Premières nations: des acteurs incontournables ... 18

1.3.1 Jalons historiques de la présence de la Nation huronne-wendat dans la région de Québec. ... 19

1.3.2 La chasse et les modes d’occupation du territoire ... 20

1.3.3 Les limites institutionnelles d’accès à leur territoire ... 21

1.3.4 L’arrêt Sioui et le « traité » de Murray ... 22

1.3.5 La Forêt Montmorency au centre du Nionwentsïo ... 25

1.3.6 Les caractéristiques visibles de la participation de la Nation huronne-wendat au CSAFM. ... 27

Synthèse de chapitre ... 28

Chapitre 2 : Revue de la littérature et approche conceptuelle ... 31

2.1 La participation publique : un outil d’acceptabilité sociale ... 32

2.1.1 Les répercussions d’une participation publique instrumentale ... 34

2.2 Une approche normative de la participation ... 37

2.2.1 Les capacités des Premières nations ... 38

2.2.2 Les conditions de la participation ... 40

2.3 L’organisation sociale informelle ... 44

2.3.1 La pensée institutionnelle ... 45

2.3.2 Les positions institutionnelles ... 46

Synthèse de chapitre ... 48

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3.1 Question et objectifs de la recherche ... 51

3.2 La collecte des données ... 53

3.2.1 Stratégie de collecte de données ... 53

3.2.2 La recherche documentaire ... 56

3.2.3 L’observation directe ... 57

3.2.4 L’entrevue semi-dirigée ... 59

3.2.5 Présentation des résultats préliminaires ... 61

3.3 L’analyse des données ... 62

3.3.1 Stratégie de l’analyse des données ... 62

3.3.2 L’analyse du discours social ... 62

3.3.3 L’analyse itérative ... 65

3.4 Positionnalité du chercheur et limite de la recherche ... 66

3.5 Éthique de la recherche ... 69

Synthèse de chapitre ... 70

Chapitre 4 : Résultats de la recherche ... 71

4.1 Les différentes représentations de la Forêt Montmorency pour les acteurs du CSAFM. ... 72

4.1.1 Un territoire universitaire dédié à l’enseignement et à la recherche ... 73

4.1.2 Un laboratoire d’innovation ... 76

4.1.3 Un laboratoire contrôlé ... 79

4.1.4 Un aménagement exemplaire et avant-gardiste à différents niveaux. ... 80

4.2 Les différentes catégories d’acteurs et de légitimité ... 85

4.2.1 Les acteurs experts ... 87

4.2.2 Les acteurs clefs ... 90

4.2.3 Les acteurs observateurs ... 93

4.3 La participation de la Nation huronne-wendat ... 97

4.3.1 Les représentations de la participation de la Nation huronne-wendat ... 97

4.3.2 Les dynamiques de la participation de la Nation huronne-wendat à la gestion de la Forêt Montmorency. ... 103

4.3.3 Les intérêts de la Nation huronne-wendat à participer au CSAFM ... 105

Synthèse de chapitre ... 112

Chapitre 5 : La discussion des résultats. ... 115

5.1 Une architecture institutionnelle flexible ... 115

5.2 La réalisation des intérêts de la Nation huronne-wendat au sein de la pensée institutionnelle du CSAFM ... 118

5.3 L’importance de l’organisation sociale informelle sur la réalisation des intérêts à long terme de la Nation ... 120

5.4 Le rôle de la réciprocité sur la participation de la Nation huronne-wendat au CSAFM ... 126

5.5 L’organisation sociale informelle et la flexibilité adaptative du processus ... 129

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Bibliographie ... 141

Annexes ... 155

Annexe 1 : Carte de la Forêt Montmorency et de son agrandissement ... 155

Annexe 2 : Carte de la Forêt Montmorency avec les territoires voisins ... 156

Annexe 3 : Carte des territoires ancestraux de la Nation huronne-wendat et de la Nation innue ... 157

Annexe 4 : Carte du territoire ancestral de la Nation huronne-wendat ... 158

Annexe 5 : Grille d’observation du CSAFM ... 159

Annexe 6 : Schéma d’entrevue semi-dirigé ... 160

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Liste des abréviations

CSAFM Comité scientifique et d’aménagements de la Forêt Montmorency

FM Forêt Montmorency

FER Forêt d’enseignement et de recherche

CD Comité de direction

MDDEFP Ministère du développement durable de l’environnement

de la faune et des parcs

FFGG Faculté de foresterie de géographie et de géomatique

TGIRT Table de gestion intégrée des ressources et du territoire

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Remerciements

La rédaction d’un mémoire est loin d’être un long fleuve tranquille et c’est parfois dans les tempêtes, les rapides et les remous que s’acquièrent l’expérience et la connaissance nécessaire à sa réalisation. Tout comme il n’existe pas deux fleuves identiques, deux navigateurs similaires, nul ne sait à quoi s’attendre avant de prendre le large et très difficile est la comparaison des trajets, des épreuves et des méandres traversés. Un mémoire est un acte d’humilité face à soi-même, qui soulève autant de questionnements intellectuels, que personnels et dont les réponses sont rarement aussi claires que les questions.

D’abord, j’aimerais remercier sincèrement tous les membres du Comité scientifique et d’aménagement de la Forêt Montmorency qui m’ont accepté parmi eux et qui ont su faire preuve d’ouverture durant tout mon processus de recherche. Définitivement, cette recherche n’aurait pas été possible sans votre généreuse collaboration! Un merci particulier à Madame Julie Bouliane pour son aide durant toute la durée de cette recherche.

La réalisation de ce mémoire aurait très certainement été possible, mais combien moins plaisante, sans ces personnes de qualité qui m’ont successivement soutenue et dirigée dans ce parcours de solitaire. D’abord, je tiens à souligner la présence au quotidien de ma copine Marie-Laurence qui sut m’encourager durant les bons moments comme dans les creux de vagues. Merci ma chouette, ton support fut inestimable. Mes parents, Edyth et Jacques, ainsi que ma sœur Maude ont toujours été, par leurs encouragements et leur confiance, d’un support moral essentiel pour moi. Je ne peux passer à côté de très bons amis avec qui j’ai traversé côte-à-côte ce processus et qui m’ont tout autant encouragé. Marc-Antoine, Caroline, Marie-Pierre, Florence, David, Ève; merci.

À mes collègues et amis du Centre de recherche le CIÉRA, Delphine, Vincent, Noémie, Amélie, Jean-François, vos discussions passionnantes et enrichissantes m’ont inspiré. Le CIÉRA fût pour moi un milieu de recherche enrichissant qui m’offrit un support constant, tant financier, moral, qu’académique. Merci particulièrement à Lise Fortin, l’adjointe administrative du CIÉRA qui fait bien plus que cela. Le groupe de recherche « Collaboration négociée » a aussi été pour moi un espace de réflexion inespéré. Merci à tous ceux qui y ont participé et plus particulièrement à Stephen Wyatt pour son ouverture et ses judicieux conseils dans le cadre de cette recherche.

Pour conclure, je tiens à remercier particulièrement mon directeur, Martin Hébert, pour m’avoir enrichi de ses précieux conseils et réflexions qui tout au long de ce processus de recherche ont su m’orienter et me guider.

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Introduction

La Forêt Montmorency est la Forêt d’enseignement et de recherche de l’Université Laval. Elle s’étend sur 416 km2 à moins de 100 km au nord de la ville de Québec. Soucieuse de

développer un aménagement écosystémique suivant les principes de la gestion intégrée et du développement durable sur son territoire, elle favorise la pratique d'une diversité d’activités allant de la récolte forestière aux sports de plein air. C'est le Comité scientifique et d’aménagement de la Forêt Montmorency (CSAFM) qui est chargé de l'administration de la Forêt. Ce Comité s’occupe principalement des orientations d’aménagement sur le territoire et des projets de recherche qui s’y déroulent. Au cours des dernières années, la gestion de la Forêt Montmorency a connu plusieurs changements majeurs, notamment suite à la mise sur pied de différents projets tels que le processus de certification forestière FSC, conclu le 4 juin 2013, et le projet d’agrandissement de son territoire. Dans le cadre de ces projets, et afin de se conformer aux principes de la gestion intégrée et du développement durable au Québec, la composition du CSAFM a subi quelques changements. Ce comité a notamment été élargi. Il inclut maintenant une diversité d’acteurs extérieurs à l’Université Laval et représentant des intérêts divers sur le territoire forestier.

En effet, à titre de processus de participation publique, le CSAFM regroupe maintenant des représentants des gouvernements provinciaux, municipaux et des Premières nations, des représentants du secteur privé, et des membres de la société civile, dont les organismes de bassins versants. C'est un lieu de rencontre entre ces différents acteurs qui participent conjointement à l’aménagement des ressources et du territoire (Martineau-Delisle et Nadeau 2010). À ces derniers s’ajoutent également les nombreux acteurs de l’Université Laval : professeurs, chercheurs et administrateurs. Le Comité1 représente ainsi un espace

et un processus de rencontre (Nadeau et al. 2004), au sein duquel une diversité d’acteurs aux valeurs, aux représentations des territoires et aux intérêts, divergents ou convergents, sont amenés à dialoguer (Gray 1969, Nadeau et al. 2004, Théberge 2012).

Au cours des dernières années, les changements dans la composition du CSAFM ont engendré de nouvelles dynamiques sociales particulièrement intéressantes. Il semble important de s’y intéresser pour mieux comprendre les effets et les impacts de ce processus

1 Le terme Comité sera utilisé pour faire référence au Comité scientifique et d’aménagement de la Forêt Montmorency

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de gestion écosystémique et d’aménagement (Endter-Wada et al. 1998, Grumbine 1994) qui implique nécessairement une composante sociale à la gestion du territoire forestier. Les chercheurs en sciences sociales s’intéressent depuis plusieurs décennies à la participation publique (par ex., Arnstein 1969). Aujourd’hui, cet intérêt est de plus en plus important pour le secteur forestier du Québec, du Canada et de plusieurs pays dans la mesure où se dessine une tendance marquée vers la décentralisation de la gestion des ressources et des territoires (Sabatier et al. 2005, Mansuri et Rao 2013), favorisant la participation d’une diversité croissante d’acteurs. Cette dynamique peut sembler simple en apparence, mais elle recoupe des questions et des problématiques variées. En effet, les enjeux liés à la participation publique sont multiples et complexes. Dans certains cas, les intérêts convergents entre les acteurs favorisent une collaboration aisée et un dialogue harmonieux. Dans d’autres, les relations peuvent demander des dialogues plus approfondis, des compromis, voir même être conflictuelles et alors susceptibles de se rompre à tout instant. Les chercheurs en sciences sociales se sont intéressés à ces contextes de crises relationnelles qui nécessitaient, dans l’urgence, une solution rapide. Peu de recherches ont néanmoins porté sur les processus de participation qui, à première vue, sont fructueux et harmonieux (Lertzman 2006, Halvorsen 2006, King 2007).

Deux principales raisons nous ont poussé à nous intéresser à un processus de participation tel que le CSAFM, processus qui se déroule sans conflits et dont les acteurs semblent, a priori, satisfaits. D’une part, étudier un processus de participation publique fructueux permet de ne pas faire graviter l’analyse autour d’un seul point névralgique, comme c’est le cas lorsque l’attention du chercheur est monopolisée par le besoin de comprendre un conflit au sein d’un processus. Ainsi, l’intérêt du chercheur n’est pas dirigé vers une seule dimension critique du processus de participation publique, mais peut porter sur la compréhension globale de ce dernier et sur l’organisation sociale qui y est intrinsèque. D’autre part, l’étude d’un phénomène harmonieux devrait permettre de mieux saisir les caractéristiques qui favorisent cet état du processus (Halvorsen 2006), de même que les caractéristiques qui sont susceptibles de le modifier. À ce titre, l’étude d’un processus non-conflictuel, où les dynamiques à l’étude sont a priori invisibles, s’avère souvent de prime abord plus complexe que l’étude de situations où le conflit est apparent, les enjeux explicites, et le point focal de la recherche évident.

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3 En ce qui concerne la Forêt Montmorency, la participation d’un acteur a particulièrement attiré notre attention, celle de la Nation huronne-wendat2. Nous aurons l’occasion dans la

section suivante d’observer en détail les particularités de la participation des Premières nations au sein du CSAFM. D'entrée de jeu, il importe toutefois de souligner que le choix de nous intéresser à la participation de la Nation huronne-wendat n’est pas arbitraire. Alors que la Nation huronne-wendat choisit de construire des chalets et de pratiquer des activités de chasse, de pèche et de piégeage, sur les territoires adjacents à la Forêt Montmorency, c’est-à-dire sans demander l’autorisation à la Réserve faunique des Laurentides, elle adopte une toute autre stratégie pour affirmer ses droits et ses intérêts sur le territoire de la Forêt Montmorency. Actuellement, la Nation n’a aucun chalet et ne pratique pas officiellement3

d’activités de chasse, de pèche et de piégeage sur le territoire de la Forêt. De plus, elle semble a priori satisfaite du processus de participation publique du CSAFM dans la mesure où nous n’observons pas de conflits apparents et que leur participation demeure harmonieuse. Dans un tel contexte une question demeure, comment la Nation huronne-wendat affirme-t-elle ses droits sur le territoire de la Forêt Montmorency et pourquoi n’y adopte-t-elle pas des stratégies d’occupations similaires à celles manifestées sur les territoires adjacents?

Les études portant sur des situations problématiques se trouvent, en quelque sorte, justifiées par le contexte dans lequel elles s'inscrivent et par leur prétention à trouver des pistes de « solutions ». Une recherche se penchant sur un contexte plus harmonieux demande un autre type de justification. Les membres du CSAFM se sont eux-mêmes interrogés sur la pertinence d’étudier le processus de participation publique de la Forêt Montmorency. À titre de forêt universitaire, le CSAFM inclut à majorité des professeurs-chercheurs. Il n’est donc pas représentatif des autres processus de participation institués sur le reste du territoire forestier québécois. Au même titre que les participants rencontrés dans le cadre de notre terrain, on peut dès lors s'interroger: pourquoi faire une étude sur la participation publique au CSAFM? Nous y voyons différents intérêts. D’abord, nous espérons que cette étude participera au perfectionnement du modèle de gestion de la Forêt Montmorency qui, à titre de Forêt d’enseignement et de recherche, est désireuse de développer les meilleures méthodes de gestion et d’aménagement possibles. Ensuite, la Forêt Montmorency s’inscrit dans un processus d’amélioration continue qui, en

2 La terminologie « Nation » sera utilisée pour faire référence à la Nation huronne-wendat afin d’alléger la lecture. 3 La Nation huronne-wendat n’encourage pas ses membres à aller sur le territoire de la Forêt Montmorency, mais ne peut

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aménagement écosystémique et durable, nécessite un retour réflexif sur le processus de participation en lui-même. Dans cette perspective, notre recherche s’inscrit au sein même de la mission et du projet de la Forêt Montmorency, c’est-à-dire être une Forêt d’enseignement et de recherche qui développe les meilleures méthodes de gestion en ce qui concerne tant les enjeux économiques et environnementaux que sociaux. Nous croyons, par ailleurs, qu’une telle étude peut avoir une portée plus large puisqu’elle aborde des dynamiques inter-acteurs qui sont largement susceptibles de se reproduire dans d’autres milieux forestiers, qu’il s’agisse de forêts universitaires ou non. Malgré tout, cette recherche comporte également un certain nombre de limites sur lesquelles nous reviendrons plus bas. Avant d’entrer à proprement parler dans la présentation de la présente étude, il est primordial d’en souligner le caractère foncièrement interdisciplinaire. Tout en s’inscrivant en anthropologie, chaque étape de cette recherche appliquée, du début du terrain jusqu’à la rédaction du mémoire, a également été pensée, avec modestie il va sans dire, avec la volonté d’être reçue et lue par les ingénieurs forestiers québécois qui seront de plus en plus amenés à collaborer avec une diversité d’acteurs sur le territoire forestier. Nous croyons qu’une étude de cas de cette ampleur, approfondissant nos connaissances à propos d’un processus, est pertinente pour comprendre, avec un certain degré de détails, les différents enjeux sociaux liés aux dynamiques de la participation publique (Ansell et Gash 2008, King 2007). En effet, les méthodes qualitatives développées en sciences sociales et en anthropologie sont toutes désignées pour analyser des dynamiques sociales complexes, qui demandent à la fois du temps et des ressources pour être cernées finement et décrites fidèlement (Reed et al.2009, Finnigan et al. 2003). À ce titre, ce mémoire se veut être un vecteur de dialogue, d’une part entre les différents acteurs du CSAFM, mais aussi entre deux champs disciplinaires, les sciences sociales et les sciences forestières, qui s’intéressent toutes deux aux rapports entre les êtres humains dans des contextes de gestion forestière, mais travaillent encore souvent en vases clos.

Plan du mémoire

Dans le cadre de ce mémoire, nous tenterons de comprendre les caractéristiques liées à la participation d’un acteur, les Premières nations, au processus de participation publique qu’est le CSAFM. Selon nous, la participation d’un acteur se construit foncièrement dans l’interaction avec les autres acteurs. Ainsi, la participation de ce dernier au sein de l’organisation est amenée à changer au fur et à mesure que cette dernière se modifie à travers le temps et que le contexte change. Dans cette perspective, une approche

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5 interactionniste de la participation est ici à propos. C'est cet axe d'analyse qui guidera chacun des chapitres, de l’introduction jusqu'à la conclusion. Le premier chapitre présente le contexte général de la participation de la Nation au CSAFM. Cette mise en contexte permettra, d'une part, de mieux cerner l’histoire ainsi que l’aménagement du territoire de la Forêt Montmorency, ainsi que ses structures administratives et plus particulièrement le CSAFM. D'autre part, elle nous aidera à mieux cerner la Nation huronne-wendat4, acteur

autochtone dont l’implication au sein du Comité a été la plus visible au cours de la période étudiée5. Nous nous intéresserons tant à la présence historique de la Nation sur le territoire,

qu'à ses droits particuliers et sa participation. Nous aurons aussi l’occasion de revenir plus spécifiquement sur les raisons qui ont dirigé notre intérêt vers le CSAFM et la participation de la Nation huronne-wendat comme cas d'étude. Les deux chapitres suivants abordent les outils théoriques et méthodologiques mis de l’avant afin de répondre à la problématique de recherche. Ils développent plus particulièrement le concept d’organisation sociale informelle afin de mieux comprendre le rôle qu’il joue sur la participation de la Nation huronne-wendat au sein du CSAFM6.

Le quatrième chapitre porte sur les résultats de la recherche. À partir des données recueillies par observation directe et par entrevues semi-dirigées, nous aborderons ce que nous nommerons la pensée institutionnelle de la Forêt Montmorency et les différentes positions institutionnelles qu’on retrouve au CSAFM, deux concepts qui seront d’abord précisés dans le cadre théorique et qui constituent l’organisation sociale informelle du Comité. Ensuite, nous présenterons différentes caractéristiques de la participation de la Nation huronne-wendat au CSAFM. Nous traiterons plus particulièrement de certaines représentations sociales de la Nation huronne-wendat qu’ont les acteurs du CSAFM. Les représentations seront présentées en fonction du rôle qu’elles jouent dans la participation

4 Le choix de l’orthographe de « Nation wendat » découle de celui fait par le Grand Chef de la Nation

huronne-wendat, Konrad Sioui, dans la lettre de présentation de la revue Histoire forestière du Québec. Société d’histoire

forestière, 2012, 4(numéro double) La Nation huronne-wendat et la forêt : 4.

5 Les Innus ont aussi commencé à envoyer un représentant à partir de 2014, mais la collecte de données était alors

terminée. Comme cette implication est tardive par rapport à cette recherche, tes données représentent la Nation huronne-wendat.

6 L’ordre des présents chapitres a été choisi afin de refléter le cheminement du chercheur. Il permet de d’abord se

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6

des acteurs du Bureau du Nionwentsïo7. Nous observerons aussi la participation concrète

de la Nation huronne-wendat ainsi que leurs intérêts à siéger au CSAFM.

Le dernier chapitre met en relation les résultats de la recherche afin de discuter du rôle qu’a joué l’organisation sociale informelle sur la participation des membres de la Nation huronne-wendat au sein du CSAFM. Il traitera notamment de l’architecture institutionnelle de la Forêt Montmorency, de la pensée institutionnelle et des positions institutionnelles des différents acteurs. Mise en parallèle avec les intérêts des acteurs sur le territoire, cette analyse interactionniste nous permettra de mieux comprendre les modalités de la participation de la Nation huronne-wendat. Ce chapitre se conclut enfin sur une discussion du rôle joué par la confiance inter-acteurs et l’interdépendance entre ceux-ci dans les dynamiques de la participation des membres de la Nation huronne-wendat.

7 Le Bureau du Nionwentsïo est le bureau de la Nation huronne-wendat qui s’occupe de différentes demandent de

collaboration, de consultation ou de participation publique dans le cadre de projet qui se déroule sur leur territoire revendiqué, le Nionwentsïo. Il rassemble un peu plus d’une dizaine d’expert de différents domaines.

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Chapitre 1 : Cadre contextuel

La Forêt Montmorency est située à 78 kilomètres au nord de la ville de Québec, au sein de la Réserve faunique des Laurentides (Annexe 1 et 2). Adossée aux terres du Séminaire de Québec (la Seigneurie de Beaupré), elle a été acquise par l’Université Laval en 1964 et sert depuis de Forêt d’enseignement et de recherche (FER). Cette forêt se situe principalement dans le bassin hydrographique de la rivière Montmorency, elle couvre environ 66 kilomètres carrée (25 milles carrée)8. Au cours des 20 dernières années, elle a mis sur pied différents

processus de participation publique afin d’impliquer différents acteurs qui ont des intérêts dans la gestion de son territoire. Le processus dont il sera question ici, soit le Comité scientifique et d’aménagement de la Forêt Montmorency (CSAFM) intègre une grande diversité d’acteurs, dont la Nation huronne-wendat, qui ont récemment renouvelé leur participation au sein de ce comité.

Outre la volonté de dresser un portrait global de la Forêt Montmorency, de son processus de participation - le CSAFM – et de la Nation huronne-wendat dans leur ensemble, la présente mise en contexte poursuit trois objectifs spécifiques. D’une part, tenter de mieux comprendre le processus d’institutionnalisation de la Forêt Montmorency et du CSAFM, de sa création à aujourd’hui, c’est-à-dire la mise en place du cadre formel, explicite et officiel qui la définit et qui est susceptible d’en orienter la gestion. D’autre part, par l’exploration de l’histoire de la Forêt Montmorency, il tentera de mettre en lumière les différentes interprétations de cette mission et comment elles se sont concrétisées au sein de différents projets, plus particulièrement au sein des plans d’aménagement. Enfin, nous explorerons certaines caractéristiques importantes de la Nation huronne-wendat qui sont susceptible d’influencer leur présence sur le territoire et leur participation au CSAFM.

1.1 La Forêt Montmorency

1.1.1 La création d’une nouvelle institution : la Forêt Montmorency

La Forêt Montmorency a été cédée à l’Université Laval en 1964 pour une durée de 99 ans. Elle appartenait depuis 1926 à la compagnie Anglo Canadian Pulp and Paper Mills Limited

8 Depuis 2011, la Forêt Montmorency a entamé des procédures pour agrandir son territoire, le faisant passer de 66 km2 à 416 km2. Or,

l’agrandissement de ce territoire ne sera pas géré par la même convention de gestion que celle du territoire initiale et l’entente qui en cède la responsabilité d’aménagement à la Forêt n’est pas encore finalisée. Ainsi, il ne sera pas dans cette recherche traité de l’agrandissement de la Forêt. À chaque fois qu’il sera fait référence à la Forêt Montmorency, il sera question de la Forêt Montmorency de 66 kilomètres carrée ou du processus de gestion s’y référant. Lorsqu’il sera question de la Forêt Montmorency agrandie ou de la gestion de l’agrandissement, il le sera mentionné dans le texte.

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8

qui y détenait une concession forestière et qui avait procédé à une coupe totale sur l’entièreté du territoire de la Forêt. C’est Edgar Porter, doyen de la Faculté de Foresterie et de Géodésie de l’époque, et ancien cadre à la Anglo Canadian Pulp and Paper Mills Limited, qui suggéra à ses confrères universitaires ce territoire en pleine forêt boréale. Ayant participé à l’élaboration du dernier plan d’aménagement pour la compagnie en 1946, il connaissait bien les caractéristiques de ce territoire. La compagnie accepta de rétrocéder au gouvernement du Québec ses droits de coupe en échange d’un territoire de la même superficie sur la Côte-Nord. Sur le territoire de 200 milles carrés rétrocédé au gouvernement, ce dernier en céda 25 milles carrés à l’Université Laval. Le doyen Louis-Zéphirin Rousseau considérait qu’il serait inutile d’acquérir un territoire trop grand pour les besoins de la faculté (Gélinas 2010 : 271). Le 2 mai 1963 le gouvernement entérina une loi qui allait poser les bases de la future Forêt Montmorency :

Attendu que pour faciliter l’enseignement des sciences que donne l’Université Laval, il y a lieu de la pourvoir d’une forêt assez grande et facile d’accès où les professeurs puissent donner des cours pratiques de sylviculture, d’aménagement forestier, de protection et d’exploitation forestière et s’adonner à des travaux de recherche (11-12 Elisabeth II, chapitre 28, dans Côté, 1966 : 10).

« Cette loi donnait au ministre le pouvoir de négocier un contrat d’affermage avec l’Université Laval, qui abandonnerait à cette dernière l’usufruit du site » (Gélinas 2010 : 272). Il s’écoula 13 ans entre la promulgation de cette loi et la signature du contrat d’affermage, en raison d’un conflit lié à la forme de l’arrêté ministériel de 1965. Comme l’explique Cyrille Gélinas, l’arrêté ministériel qui allait activer le contrat d’affermage précisait que la gestion de Forêt Montmorency serait confiée à la Faculté de Foresterie et Géodésie alors que la loi de 1963 en attribuait la gestion à l’Université Laval. L’entourage du rectorat vit l’Université dépossédée de ses droits, ce qui créa un conflit entre les trois partenaires soit : la Faculté, l’Université et le gouvernement. Cette situation donna lieu à de multiples discussions jusqu’en 1976, jusqu’au moment où le ministère émit un arrêt qui retirait toute allusion à la Faculté et attribuait la responsabilité de la gestion et de l’administration à l’Université Laval, qui elle était chargée de déléguer cette gestion à la Faculté. Le 7 avril 1976, le contrat d’affermage de Forêt Montmorency était signé avec un effet rétroactif jusqu’au 13 août 1964. Avec la mise en place du régime forestier en 1987, la loi ayant constitué la Forêt Montmorency fut abrogée et cette dernière devint une « Forêt d’enseignement et de recherche attribuée à l’Université Laval suivant une convention de gestion qui remplace maintenant le contrat d’affermage » (Bélanger et Bouliane, 1992 : 1). La convention de

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9 gestion ne changea rien au contrat d’affermage, à l’exception du fait que dorénavant la Forêt Montmorency n’aurait plus à payer de droits de coupe associés aux bénéficiaires de contrat d’approvisionnement et d’aménagement forestier (CAAF) (Forêt Montmorency 2013). Ainsi, la loi de 1963, tout comme le contrat d’affermage de 1976, furent déterminants pour la Forêt Montmorency dans la mesure où ils identifiaient les balises qui, bien que donnant une certaine latitude, allaient orienter la gestion et l’administration au cours des années à venir. L’énoncé de loi du 2 mai 1963 stipule déjà deux caractéristiques de la Forêt Montmorency qui demeureront présentes jusqu’à nos jours. D’une part, elle doit être consacrée à l’enseignement pratique pour les étudiants en sciences forestières de l’Université et, d’autre part, elle doit être un lieu de recherche. Elle devient le « laboratoire grandeur nature» (Gélinas 2010 : 281) des professeurs, chercheurs et étudiants de la Faculté de foresterie et de géomatique; « Michel Maldague9 prédisait que Forêt Montmorency deviendrait le

prolongement naturel de la Faculté » (Gélinas 2010 : 274). Le contrat d’affermage reprit quant à lui plusieurs énoncés réaffirmant les orientations de la loi de création. Il stipule que « La Forêt Montmorency, à compter du 13 août 1964, est affermée gratuitement à l’Université pour des fins de l’enseignement et de la recherche, particulièrement dans les sciences forestières » (Côté 1966 : 14). Il précise notamment « qu’il sera possible d’y poursuivre des travaux de recherche en foresterie, en photogrammétrie, en géodésie, et accessoirement, en biologie, en pisciculture et en cynégétique » (Côté 1966 : 13). De plus, il énonce plusieurs conditions sous lesquelles la gestion du dit territoire devra être faite. J’en recenserai trois qui sont particulièrement importante pour comprendre le cadre de la Forêt à sa création. D’abord, quoi que ce contrat précise que l’Université ne sera pas exempte des droits de coupes sur les terres affermés, il stipule que :

L’Université, sauf pour les exceptions précisées, est exempte de l’application des règlements des bois et forêts, mais en retour s’engage à aménager la Forêt Montmorency suivant les meilleurs méthodes sylvicoles connues de la science forestière et à conduire dans cette forêt des expériences et des travaux de recherche destinés à améliorer et à augmenter le champ des réalisations des sciences forestières, géodésiques et photogrammétriques (Côté 1966 : 15).

Cet énoncé fait déjà mention d’une notion qui nous suivra tout au long de ce travail et qui fût repris intégralement dans le dernier Plan général d’aménagement, c’est-à-dire la notion des « meilleurs méthodes sylvicoles connues » qui encourage une amélioration constante

9 Michel Maldague était un ingénieur agronome et un professeur à la Faculté de foresterie et de géomatique de

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de la Forêt et de son aménagement. Nous reviendrons ultérieurement sur la compréhension actuelle de cette notion.

Le contrat d’affermage précise également que « À la demande du ministre, l’Université devra lui soumettre, pour approbation, les plans d’aménagement et de recherches qu’il se propose de faire et, en temps et lieu, de lui faire part des résultats des travaux effectués tant en foresterie, en dendrométrie et en exploitation forestière, qu’en géodésie et en photogrammétrie » (Côté 1966 : 15). On remarque ici le lien fort qui unit la Forêt au ministère de l’époque, et ce tant au niveau de l’aménagement que de la recherche. Enfin, le contrat d’affermage précise que « La Forêt Montmorency reste assujettie aux dispositions de la Loi des parcs provinciaux (.S.R. 1941, chap. 156) telle que modifiée à date, ainsi qu’aux règlements édictés en vertu de ladite loi concernant l’aménagement du parc des Laurentides pour les fins de la chasse, de la pêche, de la conservation et de la protection du gibier et du poisson » (Côté 1966 : 15). Étant située à l’intérieur des limites du Parc des Laurentides, devenu par la suite la Réserve Faunique des Laurentides, la Forêt se doit de se soumettre à ses règlements. Dans la mesure où la Forêt cesserait d’être utile pour les raisons de sa création, l’Université aurait l’obligation de l’abandonner au gouvernement sans indemnité avec toutes les constructions et les améliorations qui s’y trouvent.

Le contrat d’affermage et la loi de création illustrent déjà assez bien les usages multiples qui seront faits de la Forêt Montmorency, soit à des fins de recherche, d’enseignement, mais aussi à des fins d’exploitation forestière. Cette diversité des usages se cristallisera dans la notion de « l’aménagement polyvalent » (Côté 1966 : 3) qui apparaitra dès la création de la Forêt Montmorency, c’est-à-dire dans le premier plan d’aménagement de la Forêt Montmorency et qui y restera jusqu’à nos jours.

1.1.2 De l’aménagement polyvalent à la gestion écosystémique

On peut lire dans le premier plan d’aménagement de la Forêt Montmorency, et ce juste sous le rappel de sa mission principale que : « cette forêt sera aménagée suivant les principes de l’aménagement polyvalent qui vise l’ensemble des ressources forestières et non pas seulement les ressources ligneuses. En conséquence, outre ces dernières, les ressources hydrauliques, touristiques et récréatives y seront également aménagées » (Côté 1966 : 3). Comme la Forêt venait tout juste d’être créée, le premier plan général d’aménagement avait plusieurs objectifs : D’une part, il dressa un portrait général de la forêt qui devait servir à

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11 l’aménagement futur. D’autre part, il décrivait brièvement certaines prescriptions d’aménagement et dressait un premier calcul de la possibilité forestière10. Outre ces deux

objectifs explicites, le plan général d’aménagement tentait aussi, de manière plus implicite, de définir les caractéristiques politiques et légales de la Forêt. Il y était question des responsabilités et obligations que la Forêt aura tant envers les étudiants et les professeurs qui en étaient les principaux utilisateurs, qu’envers ses nouveaux voisins, le Parc des Laurentides, mais aussi le gouvernement du Québec. En reprenant intégralement les termes de la loi de création et du contrat d’affermage préliminaire, ce plan voulait ainsi positionner la Forêt Montmorency dans le paysage forestier de la région de la Capitale-Nationale.

L’aménagement polyvalent faisait partie du premier plan d’aménagement et fût repris aussi dans le second. Par la division du territoire en 37 unités territoriales, appelées « compartiments », l’aménagement polyvalent était vu non seulement comme la meilleure méthode permettant de pratiquer différentes activités de recherche et d’enseignement sur le territoire, mais aussi pour y intégrer d’autres activités. À ce titre, lors de sa création, la majorité des compartiments étaient attribués à la recherche en sylviculture et en écologie forestière. Trois compartiments étaient attribués à la recherche sur les bassins versants et deux aux études et activité récréotouristique en développement de sentiers et de lieux panoramiques (Bernier 1975). Par contre, la majorité de ses activités se concentrent autour de la formation pratique des étudiants et de la recherche sur la sylviculture telle que définie dans la loi. Cette division existe toujours aujourd’hui, mais ne revêt pas autant d’importance. Selon Cyrille Gélinas (2010), les gestionnaires de la Forêt Montmorency, dès les débuts, avaient une volonté d’utiliser toutes les facettes de la Forêt afin d’en faire un lieu où se pratiquerait des activités de recherche, d’enseignement, d’éducation du grand public, mais aussi des activités récréotouristiques et sportives. Dès les années 70, la Forêt ouvre un sentier d’interprétation de la nature et une piste de ski de fond (Sansregret et Bélanger 2009). Le second plan d’aménagement, fait en 1976, se présente comme « la révision du Premier Plan général d’aménagement de la Forêt Montmorency de l’Université Laval préparé en 1966 » (Bouliane et al. 1976 : 1). Ce second plan est structuré relativement de la même manière que le premier, outre le fait qu’il fait un retour sur les 10 années passées,

10 La possibilité forestière, ou possibilité annuelle de coupe à rendement soutenu, correspond au volume maximum de

bois qui peut être prélevé annuellement et à perpétuité, dans une aire donnée, sans en réduire la capacité de production. (Gouvernement du Québec 2014 :

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et poursuit le projet d’aménagement polyvalent de la Forêt Montmorency. Ce plan s’arrimait aux instructions formulées par le Services de Plans d’Aménagement du ministère des Terres et Forêts et tient compte des recommandations formulées dans le document

d’Orientation de la production forestière défini pour le bassin de la rivière Montmorency

(ibid. : 13). De plus, étant données les dépenses encourues par la construction des infrastructures et que la Forêt elle-même devait subvenir en grande partie à ses propres frais de fonctionnement, il fut décidé de récolter le peu qui avait été laissé par la compagnie, c’est-à-dire les vieilles forêts. Cependant dès les années 60, et ce pendant 20 ans, les fondateurs eurent le projet de normaliser la structure d’âges de la forêt, étant donné que 90% avait moins de 50 ans. Ils développèrent peu à peu le concept de forêt mosaïque en morcelant le territoire en peuplements d’âges différents, avec l’objectif de reproduire autant que possible la forêt laurentienne naturelle et les perturbations normales qu’elle subit. C’est à partir des années 85 et plus particulièrement avec le plan général d’aménagement de 1988, reconduit en 1992, que la gestion de la Forêt prend un virage important. D’une part, la Loi sur les forêts entra en vigueur en 1987 et d’autre part, des professeurs de la Faculté de foresterie et de géodésie11 développent alors différents concepts qui sont mis en

application à la Forêt Montmorency. La Loi sur les forêts suggère un aménagement polyvalent et intégré (Fortier 2007, Gélinas 2010) du territoire forestier qui se refléta directement au sein du plan d’aménagement qui se proposait d’être un modèle de gestion intégrée. À l’image de la Faculté, qui était vue comme le « bras latéral du ministère » (Gélinas 2010 : 240), « Les fonctionnaires du MER [Ministère de l’Énergie et des Ressources] voyaient la [Forêt Montmorency] comme un champ d’expérimentation dont les résultats pourraient inspirer les administrateurs des terres publiques » (Gélinas 2010 : 282). De plus, on peut lire dans l’avis au lecteur du plan que: « Le Plan d’aménagement intégré de la Forêt Montmorency se veut un plan modèle d’aménagement qui dépasse largement les besoins de cette forêt expérimentale » (Bélanger et Bouliane 1992 : i). Il est constitué de neuf chapitres dont six sont des plans d’aménagement particulier : deux sont délégués à la production de bois, un plan d’aménagement faunique, un plan général d’aménagement récréo-éducatif, un plan de développement de l’enseignement et de la formation et un plan de développement de la recherche. Le chapitre deux traite aussi des orientations

11 La Faculté conserva le nom de Faculté de foresterie et de géodésie jusqu’en août 1989 ou elle le troqua pour celui de

Faculté de foresterie et de géomatique (Gélinas 2010 : 294). Depuis 2009, la Faculté s’appelle Faculté de foresterie, de géographie et de géomatique. Pour plus d’information :

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13 d’aménagement et identifie deux principes éthiques que doit respecter la Forêt Montmorency : une éthique de la conservation et une éthique de la terre. Ces deux sections rassemblent ce qui étaient alors de nouveaux concepts, dont celui de l’aménagement intégré des ressources forestières : « Le développement de la Forêt Montmorency doit reposer sur un processus d’aménagement intégré dans lequel les décisions d’aménagement sont prises en tenant compte de l’ensemble des ressources du territoire et de leurs usagers. » (Bélanger et Bouliane 1992 : 77) Le terme d’aménagement polyvalent est progressivement remplacé par d’autres termes tels que l’aménagement intégré, l’utilisation durable des écosystèmes forestiers et l’harmonisation des usages. Le plan note que: « Le développement d’un territoire tel que la Forêt Montmorency doit reposer sur la recherche d’un consensus entre les divers intervenants de manière à harmoniser et concilier leurs demandes et aspirations respectives. » (Bélanger et Bouliane 1992 : 78) Les administrateurs consultèrent alors des chercheurs en biologie forestière, mais également certains issus d'autres disciplines afin de tenir compte des différentes constituantes de la forêt naturelle (Gélinas 2010).

Le mode d’aménagement par fonction dominante, qui guide l’aménagement polyvalent, identifie alors clairement la production de bois comme étant la fonction la plus importante à laquelle les autres fonctions doivent s’intégrer ou non (Bélanger et Bouliane 1992 : 88). Cette fonction permet à la Forêt de s’autofinancer, tout comme le fera le développement important des activités récréotouristiques dans les années 90.

Les années 2000, et ce jusqu’au dernier plan d’aménagement en date, ont été l’occasion pour la Forêt Montmorency de développer différents projets. Ils ont amélioré le volet récréotouristique et éducatif par le développement de sentiers pédestres et de différents sports d’hiver, dont le ski-raquette qui fît son entrée en 2012. De plus, le Plan général d’aménagement de 2013 exprime la volonté de la Forêt Montmorency de s’arrimer avec le nouveau régime forestier de 2013. Cette volonté s’observe d’abord dans l’énoncé de sa mission qui, tout en se situant en continuité avec les aménagements passés, mets aussi l’accent sur certains concepts essentiels du nouveau régime forestier que sont l’aménagement durable et la gestion écosystémique.

La Forêt Montmorency à pour mission d’être un milieu d’accueil visant l’excellence dans les domaines de l’enseignement, de la recherche et de l’éducation du grand public en relation avec l’aménagement durable des forêts. Pour y parvenir, on vise y développer un modèle viable d’aménagement forestier durable des ressources ligneuses, fauniques, hydriques, récréatives,

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touristiques et paysagères d’une manière qui conserve la productivité des forêts, leur capacité de régénération ainsi que leur vitalité. Aussi, le modèle devra faire en sorte de maintenir la biodiversité en sauvegardant les traits écologiques distinctifs de la forêt naturelle régionale, suivant en cela les principes d’un aménagement écosystémique (Forêt Montmorency 2013 : 9).

Le plan d’aménagement exprime aussi la volonté de répondre aux exigences de la norme boréale nationale de la certification du Forest Stewardship Council (FSC). En 2012 le gouvernement avait le projet de faire certifier l’entièreté des forêts publiques lorsqu’il allait en reprendre officiellement la responsabilité de gestion en avril 2013. Malgré le fait que les projets gouvernementaux de certifications aient changé, la Forêt Montmorency, elle, entama le processus de certification en 2010 afin de s’arrimer au nouveau régime forestier. C’est pourquoi le plan actuel inclut explicitement plusieurs éléments de la norme boréale FSC. Le projet de certification, mené à terme en juin 2013, amena aussi plusieurs changements au sein des structures administratives et plus particulièrement au sein du CSAFM.

1.2 Les structures administratives de la Forêt Montmorency

L’administration de la Forêt Montmorency relève de trois paliers de la structure universitaire. Le Comité scientifique et d’aménagement de la Forêt Montmorency (CSAFM), qui est assujetti au Comité de direction (CD) de la Faculté de foresterie, de géographie et de géomatique, qui lui-même est sous l’autorité du Comité exécutif (CE) de l’Université Laval. Le Comité exécutif, quoique peu mentionné dans les documents ici étudié, reflète surtout la volonté de signifier que la Forêt Montmorency est sous l’autorité ultime de l’Université Laval et non pas de la Faculté. Étant donné le peu de mentions explicites qui sont faites du lien avec le CE de l’Université Laval dans les documents administratifs du CSAFM, il n’en sera pas question ici. Ce lien est certes très important dans l’organigramme général de l’Université Laval, mais la présente section vise à mieux comprendre le cadre formel qui touche plus concrètement le fonctionnement de la Forêt Montmorency et plus particulièrement du CSAFM. Nous nous concentrerons donc sur cette structure telle qu’elle se révèle à travers les pratiques concrètes de ce comité.

1.2.1 Le Comité de direction

Le Comité de direction est officiellement composé du doyen de la faculté, du directeur du département de science du bois et de la forêt, du directeur des opérations de la Forêt (aussi membre du CSAFM) et du président scientifique du Comité scientifique et d’aménagement qui est un professeur (aussi membre du CSAFM). S’y adjoint aussi lors des rencontres la

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15 directrice exécutive (aussi membre du CSAFM) ainsi qu’un membre de l’administration de l’Université. Ce comité se rencontre 2 à 3 fois par année et est l’instance décisionnelle de la Forêt Montmorency. Il s’occupe de « voir à la gestion, au contrôle des opérations administratives de la Forêt Montmorency et à son développement en tenant compte de sa mission particulière vis-à-vis l’enseignement et la recherche (…) » (Forêt Montmorency 2013). Le Comité de direction a autorité sur le Comité scientifique et d’aménagement.

Considérant que les objectifs, indicateurs et cibles adoptés par le CSAFM peuvent avoir des impacts économiques, sociaux et environnementaux majeurs, le CD se réserve le droit de décision finale sur les plans d’aménagement. Ce dernier doit s’assurer de faire un retour au CSAFM lorsqu’une décision contraire aux recommandations du CSAFM est prise (Forêt Montmorency 2012).

Par contre, aux dires des membres du Comité scientifique, le Comité de direction ne s’est encore jamais servi de sa prérogative de renverser des décisions du CSAFM. Les décisions qu’il prend suivent généralement les recommandations émises par le CSAFM, compte tenu que de par son statut de forêt d’enseignement et de recherche, elle doit être gérée par le corps professoral de la Faculté de foresterie, de géographie et de géomatique.

1.2.2 Le Comité scientifique et d’aménagement de la Forêt Montmorency

Avant de traiter du comité scientifique et d’aménagement de la Forêt Montmorency (CSAFM) tel qu’il existe aujourd’hui, il semble nécessaire de faire un bref retour sur la gestion de la Forêt à ses débuts. Étant donné son caractère particulier, la Forêt Montmorency devait être gérée par le corps professoral de l’Université Laval. Le Comité des forêts expérimentales, formé antérieurement à la création de la Forêt Montmorency, était composé de quelques professeurs et du doyen de la Faculté et s’occupait d’abord de sa gestion jusqu’en 1987. La loi sur les Forêts, qui instituait la Forêt Montmorency comme une forêt modèle pour le gouvernement (Gélinas 2010), incita la Forêt à transformer le comité. En 1991, un comité relevant du directeur de la Forêt en eut la responsabilité. Il était constitué de deux sous-comités; un portant sur des questions générales de gestion et l’autre sur les questions scientifiques. Ce dernier était composé de douze professeurs nommés par la Faculté de foresterie et géomatique de l’Université Laval, qui étaient considérés comme des experts reliés aux différentes ressources de la forêt, soit la matière ligneuse, la faune, la récréation, les sols et l’hydrologie (Valeria Echegoyen 1999 : 12). La Forêt Montmorency poursuit l’agrandissement de la constitution du Comité lorsque qu’elle entreprend de développer des indicateurs qui répondent à la certification de l’Association canadienne des

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normes (CSA) en matière d’aménagement forestier durable (AFD) (Valeria Echegoyen 1999).

À la fin des années 1990, l’arrivée des systèmes de certification environnementale a fait en sorte que pour répondre aux exigences en matière de participation du public, le comité s’est élargi pour devenir un Comité scientifique et d’aménagement de la Forêt Montmorency (CSAFM) en 1998. Ainsi, les parties intéressées au territoire ont été invitées à se joindre au comité, dont notamment les proches voisins et les instances municipales et provinciales (Forêt Montmorency 2012 : 3).

1.2.2.1 La structure actuelle du CSAFM

Il est important de mentionner que, outre les documents officiels les régissant, les structures administratives de la Forêt Montmorency n’ont que très peu été documentées tant de la part de l’administration que dans la littérature scientifique. D’abord, dans le cadre de la certification forestière FSC et afin de s’arrimer au nouveau régime forestier, l’administration de la Forêt Montmorency a soumis au CSAFM le 13 décembre 2012 un document se nommant « Règles et modalités de fonctionnement du Comité scientifique et d’aménagement de la Forêt Montmorency »12 qui précisa la structure administrative et les

procédures du comité. Il fût discuter et entériné à le rencontre du 26 février 2013. Tant par sa forme que son fond, ce document est similaire à celui produit par les Conseil régionaux des élus (CRÉ) pour les Tables de gestion intégrés des ressources et du territoire (TGIRT). Ce document précise les responsabilités, la composition et les différents rôles des membres du comité. Comme les TGIRT, le CSAFM est un comité permanent favorisant la participation des différents acteurs ayant un intérêt sur le territoire de la Forêt Montmorency pour y développer un aménagement durable du milieu et des ressources. Il est indiqué notamment que le CSAFM est responsable d’élaborer le plan général d’aménagement forestier, de coordonner le processus de consultation sur ce plan, de s’assurer de l’harmonisation des usages, d’assurer les relations avec les ministères, de coordonner la planification des activités de recherche et d’enseignement et de collaborer au maintien d’une certification en aménagement forestier. Compte tenu de son caractère particulier, une majorité de sièges (12) peut être attribuée à des professeurs de toute faculté et relié à différents domaines d’expertise. Par contre, dans les faits ces sièges sont à majorité occupé par des membres de la Faculté de foresterie, de géographie et de géomatique. On retrouve aussi deux postes délégués à des étudiants, trois à des membres de la Faculté de foresterie de géographie et de géomatique (la directrice exécutive, l’aménagiste et le directeur des opérations de la

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17 Forêt Montmorency), un chercheur externe de la direction de la recherche forestière du Ministère des ressources naturelles, un représentant d’organisme récréatif qui est en fait un membre de l’administration de la Forêt, un représentant d’un bénéficiaire de garantie d’approvisionnement qui est papier White Birch, un représentant de la Nation huronne-wendat, un représentant de la Réserve Faunique, un représentant d’un organisme environnementaux qui est Canards Illimités Canada, un représentant de l’Organisme de bassins versants Charlevoix-Montmorency, un représentant du secteur municipal de la MRC de la Côte-de-Beaupré et trois personnes ressources qui viennent du Ministère des Ressources naturelles, du Ministère du Développement durable, de l’Environnement, de la Faune et des Parcs et une personne retraités. Les retraités qui participent aux rencontres proviennent soit de la FFGG ou des anciennes administrations de la Forêt Montmorency. Un représentant de la Nation innue c’est aussi ajouté au comité à la rencontre d’avril 2014 alors que mon étude était sur le point de se conclure. Lors des rencontres, le nombre de personnes venant de chaque catégorie varie selon les thématiques et les disponibilités de chacun. Ainsi, quoi que la composition du CSAFM est institutionnalisée formellement, la composition empirique du comité à une réunion donnée est amenée à fluctuer. En outre, parfois certaines personnes sont invitées à participer à une réunion du comité en raison de leur expertise sur un dossier important pour la Forêt.

Le comité est composé d’une majorité de chercheurs en sciences forestières et de représentants des ministères. De plus, trois membres CSAFM ont des fonctions particulières, c’est-à-dire celle de président d’assemblée, de secrétaire d’assemblée et de président scientifique. Quoi que les deux premières fonctions soient assez évidentes, la troisième, elle, est celle de porte-parole du CSAFM auprès des instances locales comme le CD, ou encore auprès des instances régionales (Forêt Montmorency 2012). Le président scientifique a par ailleurs la responsabilité d’assurer la mise à jour de la stratégie d’aménagement forestier écosystémique selon les délais prescrits. Les membres du CSAFM se réunissent trois à quatre fois par année et sont convoqués aux rencontres au minimum sept jours à l’avance. Les rencontres se déroulent habituellement durant un avant-midi à l’Université Laval dans les pavillons de la Faculté de foresterie, de géographie et de géomatique. Tous les membres du Comité ont une voix et les prises de décision sont faites par consensus ou par vote à main levée si ce dernier est demandé.

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1.2.3 Un cadre flexible pour l’aménagement

Ces deux sections sur la Forêt Montmorency et sur le CSAFM nous ont permis d’observer deux caractéristiques essentielles de la Forêt Montmorency. Premièrement, il fût possible d’observer le lien fort qui uni la Forêt Montmorency à l’Université Laval, mais plus particulièrement à la Faculté de foresterie de géographie et de géomatique. Ce lien s’illustre tant historiquement, au sein de la Loi de création, que dans les plans d’aménagement et dans la composition du CSAFM. Toutefois, cette proximité n’empêche pas un second constat. Il nous a été possible de voir comment la Forêt Montmorency a évolué et s’est transformée aux rythmes des changements qui sont survenus dans la politique forestière québécoise. De la création de ce territoire, aux changements de régimes forestiers de 1987 ou plus récemment de 2013, des liens forts d’inter-influence se sont tissés entre les politiques forestières provinciales et les décisions d’aménagement prises à la FM. Ces changements et cette évolution qu’a vécus la Forêt sont dus à deux éléments clefs : d’une part, à une interprétation large de la loi de création et du contrat d’affermage de la Forêt, cadres qui lui permettent de pratiquer différents types d’aménagements sur son territoire. D’autre part, cette flexibilité est aussi attribuable au statut particulier de Forêt d’enseignement et de recherche (FER) qui lui est conféré par son cadre légal et qui l’amène à être en constant changement afin de toujours appliquer ce qu’elle considère être les meilleures méthodes d’aménagement forestier. À ce titre, elle entama un processus de certification forestière FSC qui l’amena à réinviter13 les Premières nations à siéger au

CSAFM. La Nation huronne-wendat répondit la première à l’appel en déléguant un représentant au Comité dès 2010. Plus récemment, la Nation innue y délégua aussi un représentant.

1.3 Les Premières nations: des acteurs incontournables

Tant à l’échelle québécoise qu’à l’échelle de la Forêt Montmorency, les Premières nations jouent un rôle particulier au sein de l’aménagement du territoire forestier québécois. Le nouveau régime forestier ou encore la certification forestière FSC, par l’intermédiaire de son principe 314, reconnaissent une place distincte aux Premières nations, même si toutefois,

dans les faits, cette place ne leurs est pas toujours accordée à la mesure de leurs attentes

13 À la fin des années 90, les Premières nations avaient déjà été invitées à venir siéger dans le cadre du processus de

certification de l’Association canadienne des normes (CSA). Il n’a pas pu nous être expliqué clairement pourquoi elles avaient arrêtées d’y siéger.

14 Le « Principe 3 : droits des peuples autochtones » de la certification FSC concerne spécifiquement les droits et la

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19 (Teitelbaum et Wyatt 2013, Tikina et al. 2010 ). La date exacte à laquelle la Nation huronne-wendat a commencé à siéger au Comité de gestion de la Forêt Montmorency reste incertaine. Toutefois, dès la création du CSAFM, en 1998, la Nation huronne-wendat vient siéger au comité. La Nation y siègera jusqu’autour des années 2005. L’invitation renouvelée lancée en 2010 par la Forêt Montmorency à la Nation huronne-wendat et à la Nation innue s’inscrit dans ce contexte d’une importante accrue des Premières nations dans les décisions d’aménagement forestier. La Forêt Montmorency est située à la fois au centre du territoire revendiqué de la Nation huronne-wendat et sur la partie sud d’un territoire faisant l’objet d’une entente de principe entre la Nation innue et les gouvernements provincial et fédéral. L’annexe 3 présente la carte des territoires ancestraux des deux nations.

La raison pour laquelle la présente recherche se concentre presqu’uniquement sur la participation de la Nation huronne-wendat, même si les Innus ont aussi des revendications concernant ce territoire est double. D’une part, la recherche s’intéresse spécifiquement à la « participation » concrète d’un acteur au sein d’une organisation de participation publique, c’est-à-dire le CSAFM. Or, malgré l’intérêt que portent les Innus au territoire, et le fait qu’ils sont actifs dans nombre d’autres processus touchant l’aménagement du territoire (Beaudoin; 2014), et malgré l’invitation qui leur a été lancée dans le cadre de la certification FSC, aucun représentant de cette nation ne siégeait sur le comité au moment de la réalisation de ma recherche. Cette situation a changé une fois que notre collecte de données a été complétée, mais au final, il ne nous aura pas été possible de documenter les caractéristiques de la participation de ces acteurs comme il nous a été possible de le faire pendant trois années avec la Nation huronne-wendat. Une recherche sur la non-participation d’une Première nation au processus aurait pu être tout aussi intéressante que pertinente, mais dans le cadre de ce mémoire il nous a été impossible d’étudier en profondeur la diversité des modes de collaboration de deux nations bien distinctes pour y situer la place qu’y occupe le CSAFM. Nos ambitions ont donc été plus modestes et centrées sur l’observation du comité lui-même. Pour cette raison, nous nous concentrerons ici sur la participation de la Nation huronne-wendat.

1.3.1 Jalons historiques de la présence de la Nation huronne-wendat dans la

région de Québec.

L’histoire de la Nation huronne-wendat ante 1650 comporte deux versions. Une première mentionne que le territoire d’origine des Hurons, c’est-à-dire la Huronnie était situé en Ontario à proximité des Lac Huron et Érié (Tanguay 1998, Vaugeois 1996). Toutefois, la

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Nation huronne-wendat ne partage pas complètement cette interprétation. Comme nous l’explique Jean-François Richard :

« Dans la conception huronne-wendat de l’histoire, c’est-à-dire leur ethnohistoire proprement dite, les gens de la Nation sont les héritiers des Onwe qui habitaient la vallée du Saint-Laurent au 16e siècle. On constate qu’au sein

de la tradition orale huronne-wendat, les membres de la collectivité constituent les descendants directs des premiers Amérindiens que Jacques-Cartier rencontra au début des années 1530. » (Richard 2012 : 8)

Basé sur des preuves écrites (Tanguay 1998), leur installation permanente est datée dans la région de Québec entre 1630 et 1650 (Gérin 1900). Alors, qu’ils vécurent pendant plusieurs années la famine et les attaques répétées des Iroquois, un petit groupe de Hurons-Wendat accompagné de jésuites décidèrent de quitter leur petit village de Sainte-Marie en direction de Québec. Un groupe de trois cent Hurons-Wendat arrivèrent à Québec le 28 juillet 1650 après 50 jours de voyage. Bien que 1650 ait été retenue par l’histoire comme étant la date de l’arrivée des Hurons-Wendat dans la région de Québec, ils vécurent avec les Français moult contacts dès 1609 par l’intermédiaire du commerce des fourrures. De plus, les preuves écrites d’une présence huronne à Québec font remonter leur première installation à 1637 alors qu’une maison y fût installée pour eux et pour les autres indiens (Tanguay 1998 : 10). Selon Léon Gérin, les Hurons-Wendat étaient en assez grand nombre et s’étaient bien installés dès 1648 (Gérin 1900). À ce moment, plusieurs autochtones parlaient déjà français et s’était convertis au christianisme. Suite à plusieurs déplacements, c’est en 1697 que les Hurons-Wendat s’installèrent définitivement à l’emplacement qu’ils occupent actuellement à Lorette.

1.3.2 La chasse et les modes d’occupation du territoire

La chasse a été importante pour une diversité de raisons et a joué une variété de rôles pour la Nation huronne-wendat tout au long de son histoire. Alors qu’en Huronnie ils pratiquaient l’horticulture, la chasse et le commerce, différents facteurs, dont la prise des bonnes terres par les colons, la proximité de Québec, et l’impossibilité de déplacer le village sur d’autres terres arables, fit diminuer de beaucoup l’importance passée de l’agriculture au profit de la chasse (Gérin 1996). La proximité de la région forestière au nord de Lorette favorisa la pratique de la chasse, de la trappe et de la pêche. Dès leur installation, elles deviennent un moyen important de subvenir à leurs besoins, que ce soit pour la viande ou pour le commerce (Paul 2000).

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