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L'apport des stratégies dans l'apprentissage du solfège chez les étudiants en musique de niveau collégial

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Academic year: 2021

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Texte intégral

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L’apport des stratégies dans l’apprentissage du solfège

chez les étudiants en musique de niveau collégial

Thèse

Guillaume Fournier

Doctorat en musique

Philosophiæ doctor (Ph. D.)

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L’apport des stratégies dans l’apprentissage du solfège

chez les étudiants en musique de niveau collégial

Thèse

Guillaume Fournier

Sous la direction de :

Maria Teresa Moreno Sala (UL), directrice de recherche

Susan O’Neill (SFU), codirectrice de recherche

Claire Durand (UM), codirectrice de recherche

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Résumé

Cette thèse s’inscrit dans la perspective de faciliter la mise en place de l’enseignement explicite dans les cours de solfège de niveau collégial. Bien que l’efficacité de cette approche pédagogique soit largement démontrée dans la littérature en éducation, les connaissances disponibles pour la mettre en œuvre dans les cours de formation auditive demeurent très limitées. Les recherches précédentes ont laissé de nombreuses questions en suspens : 1) un seul cadre stratégique a été proposé aux enseignants, mais n’a jamais été validé empiriquement ; 2) nous ne connaissons pas quelles sont les principales approches stratégiques des étudiants ; 3) nous ne comprenons pas bien la contribution des expériences musicales dans la réussite en formation auditive ; 4) nous ne savons presque rien au sujet des relations qui existent entre les stratégies utilisées, les caractéristiques des étudiants et la réussite en solfège.

Pour répondre à ces quatre problèmes, nous avons mené un projet de recherche auprès de 285 étudiants en musique de niveau collégial s’étant inscrits dans un cours de formation auditive jazz ou classique. Durant deux semestres, tous les participants ont été invités à remplir trois questionnaires visant à documenter leurs expériences musicales ainsi que leur utilisation de stratégies d’apprentissage en solfège. Leurs réponses ont ensuite été analysées à la lumière des renseignements apparaissant dans leur dossier scolaire (habiletés scolaires générales, tests d’admission en musique). Quarante-et-un participants ont également pris part à une rencontre individuelle supplémentaire comprenant un test de lecture à vue chantée, une tâche de classification de stratégies (Q Method) ainsi qu’une courte entrevue. Ces données ont ensuite été analysées pour caractériser les approches stratégiques des étudiants.

Afin de valider le cadre stratégique proposé aux enseignants, nous avons réalisé des analyses factorielles à partir des deux questionnaires relatifs aux stratégies. Elles ont révélé l’existence de onze regroupements de stratégies et nous ont conduit à proposer un nouveau cadre pédagogique comprenant les catégories suivantes : mécanismes de lecture (décodage des hauteurs, modèles schématiques, analyse musicale, aides extérieures) ; lecture à vue chantée (préparation, performance) ; répétitions individuelles (gestion des répétitions, techniques de répétition, intériorisation) ; soutien à l’apprentissage (métacognition, socio-affectivité).

Afin de caractériser les approches stratégiques des étudiants, nous avons ensuite réalisé des analyses factorielles à partir des classements de stratégies réalisés par les étudiants (Q Method).

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Elles ont révélé l’existence de trois approches stratégiques distinctes reposant sur trois conceptions complémentaires des finalités du solfège : acquérir des habiletés techniques, comprendre la musique, et développer une oreille musicale. Aucune de ces approches n’est liée à la performance en solfège, mais elles entretiennent néanmoins des liens significatifs avec les habiletés scolaires, les connaissances théoriques et l’expertise musicale. Ces résultats suggèrent que l’adoption de ces différentes approches pourraient évoluer avec l’entraînement musical. Afin de mieux comprendre la contribution des expériences musicales dans la réussite en formation auditive, nous avons aussi réalisé des régressions multiples avec introduction séquentielles des prédicteurs. Elles ont montré que les expériences musicales influençaient la réussite en formation auditive principalement par l’intermédiaire d’habiletés musicales acquises en analyse musicale, en lecture musicale ainsi qu’en représentation des hauteurs sonores. Les résultats suggèrent que ces habiletés se développeraient à travers les expériences musicales formelles, notamment les leçons individuelles d’instruments faisant usage de la lecture musicale ainsi que par l’intermédiaire des expériences musicales collectives. La plupart des différences observées entre les instrumentistes sont attribuables au niveau d’expertise musicale ainsi qu’à la connaissance de la notation musicale.

Afin d’étudier les relations qui existent entre les stratégies utilisées, les caractéristiques des étudiants et la réussite en solfège, nous avons enfin réalisé des analyses bivariées ainsi que des analyses multivariées. Les analyses bivariées ont montré que l’utilisation des stratégies était liée à plusieurs caractéristiques individuelles : genre, habiletés scolaires, oreille absolue, expériences musicales informelles, expériences musicales collectives, connaissances en théorie musicale, connaissance de la notation musicale et instrument principal. Les analyses multivariées ont révélé que les stratégies contribuaient faiblement mais significativement à la réussite en solfège. Les stratégies de lecture à vue chantée relatives à la situation de performance étaient directement liées à la réussite en solfège, tandis que les stratégies métacognitives et les stratégies d’analyse jouaient un rôle de médiation dans la relation entre certains prédicteurs de la réussite et les résultats obtenus en solfège.

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Abstract

This doctoral dissertation reflects the desire to sustain the implementation of explicit strategy instruction in sight-singing pedagogy. Over the last decades, educational research has shown many benefits of strategy instruction, but only a few studies have focused on sight-singing strategies. The have left several outstanding issues : 1) the one framework for strategic instruction that have been proposed relies chiefly on qualitative analysis and has not yet been validated empirically with a larger population; 2) no study has yet managed to fully investigate the strategic approaches of music students in the learning of sight-singing; 3) we know very little about the strategies employed by college music students in the context of sight-singing acquisition, the factors contributing to their use, and their relationships with sight-singing outcomes; 4) current literature does not allow to fully appreciate the contribution of music experiences in the aural skills competence. This doctoral dissertation addresses these issues. A total of 285 college-level music students were recruited from jazz and classic aural skills classes. Over two semesters, all participants were required to fill out three questionnaires intended to assess their music background and their use of sight-singing strategies. Answers they give were combined with school records data (academic and music achievement) to predict the sight-singing grades. Forty-one of these students also volunteered to attend 90-minute individual meeting where they were asked to perform a sight-singing test, to carry out a Q Sort strategy classification task, and to conduct a short interview. Data were analysed to characterise the strategic approaches used to learning sight-singing.

Factor analysis revealed eleven components grouped in four major themes: reading mechanisms (pitch decoding, external support, common melodic patterns, music analysis), sight-singing (preparation, performance), personal practice (practice management, internalization, rehearsal techniques), and learning support (socio-affective, metacognition).

Q Method analysis revealed three main strategic approaches: sight-singing as a technical skill, sight-singing as a means to foster musical understanding, and sight-singing as a tool to develop a musical ear. Post-hoc analyses indicated that these strategic approaches do not provide a valid typology of music students; rather, they represent underlying conceptions of sight-singing learning goals that are likely to evolve according to an individual’s musical training.

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Multiple regressions revealed that the influence of music experiences on aural skills were mostly mediated through music theory, notational knowledge, and absolute pitch. These music skills were more likely to be acquired in formal music learning settings, such as individual instrument lessons involving music notation and enriched collective music programs. Most aural skills differences found among instrumentalist groups were accounted by music background. However, better aural skills performance in pianists were not fully accounted by the background factors investigated.

Bivariate analysis shown that strategy use is related to several individual characteristics: gender, academic achievement, absolute pitch, informal music experiences, collective music experiences, piano playing, knowledge in music theory, and notation knowledge. Multivariate analysis indicated that spontaneous strategy use offers a small but significant contribution to the overall prediction of sight-singing grades. Strategies relative to sight-singing performance were directly related to sight-singing grades while other strategies were mediating the relationships between individual characteristics and sight-singing grades.

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Table des matières

Résumé ... ii

Abstract ... iv

Table des matières ... vi

Liste des figures ... viii

Liste des tableaux ... ix

Remerciements ... x Avant-propos ... xi Introduction ... 1 Objectifs ... 2 Structure de la thèse ... 3 Définitions ... 5 Chapitre 1 ... 7 Pédagogie ... 7 Facteurs de réussite ... 13

Habiletés essentielles en solfège ... 21

Stratégies d’apprentissage ... 25

Mesure de la lecture à vue chantée ... 28

Problématique ... 32

Schéma du projet de recherche ... 34

Chapitre 2 ... 36 Résumé ... 36 Abstract ... 37 Introduction ... 38 Method ... 41 Results ... 44 Discussion ... 49 Conclusions ... 51 References ... 52 Chapitre 3 ... 55 Résumé ... 55 Abstract ... 56 Introduction ... 57 Method ... 59 Results ... 63 Discussion ... 73

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Conclusion ... 76 References ... 77 Appendix A ... 80 Chapitre 4 ... 81 Résumé ... 81 Abstract ... 82 Introduction ... 83 Method ... 85 Results ... 87 Discussion ... 101 Conclusions ... 104 References ... 105 Conclusion ... 108 Implications pédagogiques ... 116 Limites ... 123

Avenues pour les recherches futures ... 125

Remarque conclusive ... 126

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Liste des figures

Figure 1. Schéma du projet de recherche ... 35

Figure 2. Answer matrix ... 61

Figure 3. Hypothesized model of relationships ... 99

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Liste des tableaux

Table 1. Descriptive statistics ... 43

Table 2. Bivariate relationships between predictors and aural skills ... 45

Table 3. Regression models explaining aural skills at the placement test ... 46

Table 4. Descriptive statistics ... 64

Table 5. Individual loadings on each account ... 65

Table 6. Comparison of individual characteristics according to their most defining account ... 71

Table 7. Relationships between individual characteristics and individual loadings on each account ... 72

Table 8. Descriptive statistics ... 88

Table 9. Factor structure of reading mechanisms strategies ... 89

Table 10. Factor structure of sight-singing strategies ... 90

Table 11. Factor structure of personnal practice strategies ... 91

Table 12. Factor structure of learning support strategies ... 92

Table 13. Relationships between strategy use and individual characteristics ... 93

Table 14. Predictive model of sight-singing performance ... 100

Tableau 1. Comparaison des cadres stratégiques avant et après la validation empirique ... 109

Tableau 2. Description des trois approches stratégiques ... 112

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Remerciements

À mon équipe de direction de thèse, Maite Moreno, Susan O’Neill, Francis Dubé et Claire Durand, merci d’avoir été présents à chacune des grandes étapes de cette recherche. Vous avez contribué à en rehausser la valeur scientifique.

À toute l’équipe d’enseignants de formation auditive du Cégep de Saint-Laurent, merci de m’avoir ouvert les portes de vos classes et d’avoir suscité l’engouement de vos étudiants pour ce projet. Leur participation a été exceptionnelle et vous y avez grandement contribué.

À tous les participants de cette étude, merci d’avoir si généreusement accepté de retracer les grands moments de vos parcours d’études musicales et d’avoir partagé vos réflexions stratégiques au sujet de l’apprentissage du solfège. Vous avez contribué à révéler plusieurs secrets de la réussite en formation auditive.

À tous les membres de ma famille, merci pour votre bonne compagnie, votre écoute, vos encouragements et le bon whisky. Vous m’avez aidé à garder le moral jusqu’à la fin.

À mes filles, Florence et Delphine, merci pour vos rires, vos histoires, votre enthousiasme, vos excellents cafés et vos bols de fruits coupés. Vous m’avez aidé à décrocher après des journées de travail trop chargées et m’avez donné la force de continuer quand j’étais épuisé.

À ma femme, Dominique, merci pour ton soutien total et inconditionnel, ta franchise, tes réflexions pédagogiques, tes conseils, tes critiques, tes découvertes musicales et ta présence positive, jour après jour. Grâce à toi, ce projet est devenu une formidable aventure familiale. Je tiens à remercier la faculté de musique de l’université Laval, le Laboratoire de recherche en formation auditive et didactique instrumentale (LaRFADI), ainsi que le Cégep de Saint-Laurent pour les bourses de réussite, l’aide à la diffusion et le soutien à la recherche. Je reconnais également la chance que j’ai d’avoir bénéficié du soutien du Conseil de recherches en sciences humaines du Canada (CRSH) qui, par l’intermédiaire de son programme de bourse de doctorat, a levé les principaux obstacles financiers associés à la poursuite de mes études doctorales. Sans son appui, il m’aurait été impensable de concrétiser ce projet de recherche. C’est un véritable privilège d’habiter dans un coin du monde où les aspirations scolaires sont encore encouragées et où l’éducation demeure largement financée par l’ensemble de la société.

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Avant-propos

Voici la liste des articles préparés et soumis dans le cadre du programme de doctorat en éducation musicale. Pour chacun des articles, l’auteur principal a réalisé l’essentiel des travaux suivants : construction de la problématique de recherche, recension des écrits, choix de la méthode, élaboration des instruments de mesure, collecte de données, analyse des données, interprétation des résultats et rédaction du manuscrit. Les coauteurs ont principalement contribué aux analyses, à l’interprétation des résultats et à la révision du manuscrit.

Article 1

Fournier, G., Durand, C., Moreno Sala, M. T. et O’Neill. Factors influencing aural skills at College entrance. État de publication : manuscrit soumis le 28 juin 2019 à la revue Journal of

Research in Music Education.

Article 2

Fournier, G., O’Neill, S. et Moreno Sala, M. T. Strategic approaches to learning sight-singing at college-level. État de publication : manuscrit soumis le 26 juin 2019 à la revue Psychology of

Music.

Article 3

Fournier, G., Moreno Sala, M. T., Durand, C. et O’Neill. Strategy use, individual characteristics, and sight-singing achievement in college-level music students. État de publication : manuscrit soumis le 28 juin 2019 à la revue Musicae Scientiae.

Renseignements sur les auteurs

Guillaume Fournier, Faculté de musique de l’Université Laval (Canada)

guillaume.fournier.11@ulaval.ca

Maria Teresa Moreno Sala, Faculté de musique de l’Université Laval (Canada)

maite.moreno@mus.ulaval.ca

Susan O’Neill, Faculté d’éducation, Simon Fraser University

sao@sfu.ca

Claire Durand, Faculté de sociologie de l’Université de Montréal

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Introduction

Chaque année, des milliers d’étudiants apprennent à chanter à première vue des mélodies dans le cadre de leur formation musicale. La maîtrise de cette compétence, qui s’intègre traditionnellement aux cours de solfège, est obligatoire dans les programmes de musique collégiaux et universitaires, notamment parce qu’elle contribue au développement de la pensée musicale et qu’elle favorise l’acquisition d’habiletés utiles à la vie professionnelle (Carlson, 2016 ; DeBellis, 2005 ; Floyd et Bradley, 2006 ; Karpinski, 2000 ; Ottman, 1956 ; Rogers, 2004 ; Scripp, 1995 ; Scripp et Davidson, 1994 ; Thompson, 2003).

Malheureusement, une forte proportion des nouveaux étudiants admis dans ces programmes présente des faiblesses importantes en solfège (Fournier, 2015 ; Thompson, 2004 ; Vujović et Bogunović, 2012). Cette situation peut s’accompagner de conséquences diverses, telles que des échecs scolaires, des retards dans le cheminement académique, des atteintes à la confiance et des niveaux de stress élevés. Elle peut même motiver l’abandon des études.

Devant l’importance qu’on accorde au solfège dans le parcours des musiciens, les connaissances scientifiques actuelles paraissent nettement limitées. Les études portant sur les habiletés essentielles, les approches pédagogiques et les facteurs de réussite sont peu nombreuses et ne visent que très rarement la population étudiante de niveau collégial ou universitaire. Cette situation laisse les enseignants de formation auditive sans véritables ressources pour informer leurs choix pédagogiques et pour répondre de façon éclairée aux difficultés de leurs étudiants. Au cours des dernières décennies, une approche pédagogique particulièrement efficace s’est taillé une place dans le monde de l’éducation : l’enseignement explicite. Elle s’inscrit dans le courant cognitiviste et consiste à enseigner de manière explicite les démarches requises pour résoudre les diverses tâches qu’on propose aux étudiants. Elle figure parmi les approches pédagogiques les plus efficaces, particulièrement auprès des étudiants les plus faibles.

Pour la mettre en œuvre, les enseignants doivent posséder une bonne connaissance des stratégies et démarches pouvant être employées, et être en mesure de choisir celles qui sont les plus appropriées pour résoudre les tâches d’apprentissages. Or, c’est précisément ces connaissances qui font défaut en solfège. Les rares recherches publiées sont essentiellement de nature qualitative et visent surtout à décrire la nature des stratégies employées, sans pour autant mettre

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en évidence les meilleures approches à privilégier. Devant ce constat, nous avions développé un cadre pour mieux étudier les stratégies dans notre mémoire de maîtrise (Fournier, 2015 ; Fournier, Moreno Sala, Dubé et O’Neill, 2019), mais nous avions aussi laissé en suspens bon nombre de questions, notamment au sujet de l’utilisation réelle des stratégies, de leur acquisition et de leur potentiel pour soutenir l’apprentissage du solfège.

C’est donc dans cette perspective, celle de faciliter la mise en œuvre de l’enseignement explicite dans les cours de formation auditive, que cette thèse de doctorat propose d’utiliser le cadre d’analyse développé dans notre mémoire de maîtrise pour étudier plus systématiquement les stratégies d’apprentissage du solfège chez les étudiants en musique de niveau collégial. Ces stratégies seront examinées sous deux angles complémentaires : celui de l’utilisation spontanée, auprès d’une large population (n = 285), et celui de l’importance que les étudiants y accordent, auprès d’une population plus réduite (n = 41).

Objectifs

Sous le premier angle d’investigation, nous atteindrons deux objectifs. D’abord, nous testerons empiriquement la validité du cadre que nous avons développé dans notre mémoire de maîtrise (Fournier, 2015 ; Fournier et al., 2019). Les analyses multivariées que nous emploierons nous aideront à apporter des améliorations à ce cadre et permettront également de mettre au point un questionnaire valide pour mesurer les stratégies dans les contextes pédagogique et scientifique. Ensuite, nous explorerons les relations entre les stratégies employées, les principaux facteurs de réussite et les résultats obtenus dans les cours de solfège. Ceci nous conduira à déterminer quelles stratégies sont les plus susceptibles d’avoir une influence sur la réussite, à explorer les principales expériences qui les façonnent et à mieux comprendre leur rôle dans l’apprentissage du solfège. Le deuxième angle par lequel nous étudierons les stratégies, celui de l’importance qu’on leur accorde, nous conduira au cœur des représentations mentales des étudiants. La méthode mixte employée nous permettra d’étudier la perspective des étudiants, sans a priori, pour en faire émerger les principales approches stratégiques, en saisir la cohérence interne et en cerner les principales valeurs. En travaillant avec une population plus réduite, nous serons à même d’évaluer plus précisément le niveau de performance des étudiants en solfège et pourrons ainsi comparer l’influence de leurs approches stratégiques sur leur réussite.

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Structure de la thèse

Le chapitre 1 dressera d’abord un état des connaissances scientifiques sur les habiletés essentielles en solfège, l’efficacité des approches pédagogiques qui ont été étudiées, les facteurs de réussite connus, les stratégies répertoriées et les différentes mesures de la lecture à vue chantée. Cet état des connaissances sera suivi de l’énoncé des objectifs de cette recherche, puis d’une présentation générale des méthodes retenues.

Le chapitre 2 constituera le premier article de cette thèse et portera sur les facteurs de réussite en formation auditive. Il s’intéressera particulièrement aux expériences musicales précollégiales des nouveaux admis et déterminera dans quelle mesure ces informations permettent d’expliquer les résultats qu’ils obtiennent au test de classement en formation auditive. Les données de 260 participants seront l’objet d’analyses multivariées et permettront d’identifier les expériences et habiletés spécifiques qui sont les plus susceptibles de favoriser la réussite en formation auditive. Compte tenu des limites observées dans la littérature existante, ce chapitre constitue un préalable incontournable pour apprécier la contribution des stratégies dans la réussite en solfège. Les conclusions de cet article prépareront ainsi le chapitre suivant.

La conception d’un questionnaire mesurant l’utilisation des stratégies sera au cœur du chapitre 3 et constituera le deuxième article de cette thèse. La collecte de données fera participer un total de 273 étudiants pendant deux semestres. Afin de développer ce questionnaire et de valider empiriquement le cadre d’analyse évoqué plus haut, nous emploierons d’abord des analyses factorielles. Des régressions linéaires multiples avec entrées séquentielles nous permettront ensuite d’explorer les relations entre les stratégies employées, les facteurs de réussite et les résultats en solfège. Ces analyses montreront notamment quelles stratégies sont les plus susceptibles d’influencer la réussite en solfège.

Le chapitre 4 s’intéressera aux approches stratégiques adoptées par les étudiants en musique et constituera le troisième article de cette thèse. Nous y emploierons une méthode mixte — la Q Method — qui a été développée en sciences politiques afin d’étudier de manière rigoureuse des questions de nature subjective. Quarante et un étudiants en musique (n = 41) de deuxième et de troisième année décriront les stratégies qu’ils emploient et réfléchiront au rôle qu’elles ont joué dans leur apprentissage du solfège. Les analyses nous permettront de présenter trois approches

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stratégiques distinctes et de mieux comprendre les conceptions qui les animent. Elles mettront notamment en lumière la nécessité de mener une réflexion plus large sur les finalités du solfège. Enfin, la conclusion constituera une synthèse critique des résultats de cette recherche, nous permettant d’en reconnaître ses limites et d’en apprécier les contributions pour les domaines de la recherche et de la pédagogie de la formation auditive. Nous y présenterons les différentes implications pédagogiques qui en découlent et nous discuterons des retombées scientifiques possibles pour la recherche en formation auditive.

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Définitions

Afin de favoriser une meilleure compréhension des principaux termes employés dans ce projet, voici le sens que nous accordons aux mots suivants.

Dictée musicale. Composante écrite du cours de formation auditive sollicitant la transcription en notation musicale d’éléments musicaux perçus à l’audition.

Formation auditive. Matière scolaire visant l’éducation de l’oreille musicienne par l’étude d’idiomes musicaux, l’entraînement perceptuel, l’imagerie sonore, l’utilisation fonctionnelle de concepts théoriques et l’acquisition d’habiletés inhérente à l’utilisation de la notation musicale. Lecture à vue. Action d’interpréter une partition musicale inconnue avec un minimum de préparation.

Lecture à vue chantée. Action d’interpréter vocalement une partition musicale inconnue avec un minimum de préparation.

Lecture à vue instrumentale. Action d’interpréter à l’instrument une partition musicale inconnue avec un minimum de préparation.

Lecture à vue intériorisée. Action d’interpréter silencieusement une partition musicale inconnue avec un minimum de préparation.

Solfège. Composante du cours de formation auditive sollicitant l’interprétation vocale d’éléments musicaux notés sur une partition musicale.

Solfier. Exécuter une lecture à vue chantée en nommant les notes.

Stratégie cognitive. Outil intellectuel contribuant à la réalisation d’une tâche, à la résolution d’un problème ou à l’acquisition d’une nouvelle connaissance. La stratégie cognitive joue un rôle clé dans l’apprentissage, puisqu’elle est responsable de l’utilisation fonctionnelle des informations stockées en mémoire, sollicite des habiletés automatisées et active des processus cognitifs inconscients. Dans une perspective éducative, elle constitue une connaissance de nature procédurale dont l’utilisation consciente contribue à réaliser tout objectif.

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Système de solmisation. Système employé pour solfier. Traditionnellement, on en distingue deux : le do-fixe, qui consiste à solfier les notes en nommant les sons réels ; et le do-mobile, qui consiste à solfier les notes en relation avec la tonique. Il existe plusieurs variantes au do-mobile, notamment celle consistant à solfier les degrés mélodiques à l’aide de chiffres.

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Chapitre 1

Recension des écrits

Dans ce chapitre, nous présenterons de manière détaillée la littérature pertinente pour contextualiser et comprendre les différents éléments de cette thèse. Cette recension des écrits a d’abord été rédigée de façon à permettre au lecteur d’apprécier la contribution de l’actuel projet de recherche au domaine de la pédagogie de la formation auditive. Mais, connaissant les besoins actuels des enseignants de formation auditive, nous avons aussi tenté d’aller au-delà du simple exercice académique ; nous nous sommes efforcés de vulgariser les résultats de recherche de façon à nourrir la réflexion pédagogique des praticiens.

Nous prendrons d’abord un moment pour détailler les études relatives à la pédagogie, notamment celles s’intéressant aux habiletés essentielles pour chanter à première vue ainsi que celles se rapportant aux principales approches pédagogiques en solfège. Nous verrons que ces connaissances demeurent fragmentaires et offrent peu de réponses pour la pédagogie collégiale et universitaire. Nous introduirons ensuite la littérature relative aux stratégies en solfège. Elles nous permettront d’en mesurer leur potentiel pour l’enseignement du solfège tout en mettant en évidence les lacunes observées dans les études existantes. Afin de définir les variables qui composent notre projet et de concevoir le questionnaire sur les expériences musicales, nous poursuivrons ensuite notre recension avec les publications se rapportant aux facteurs de réussite en formation auditive. Enfin, pour élaborer nos instruments d’évaluation, nous présenterons les études se rapportant à l’évaluation de la lecture à vue chantée.

Pédagogie

Matériel pédagogique

Est-il préférable d’enseigner le solfège en employant uniquement des mélodies tirées du répertoire ou en utilisant plutôt des exercices composés pour les besoins du cours ? Pour répondre à cette question, Danflet (1970) a mené une étude quasi expérimentale auprès de 41 étudiants en musique de première année. Durant un semestre, les étudiants du groupe expérimental (n = 21) ont suivi leurs cours de solfège en utilisant exclusivement les exercices tirés du Solfège des Solfèges (Lavignac, 1910). Pendant ce temps, les étudiants du groupe contrôle

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(n = 20) ont travaillé à partir des mélodies du répertoire rassemblées dans le Music for Sight-Singing (Ottman, 1967). À la fin du semestre, le matériel utilisé n’avait eu aucune influence sur la performance en lecture à vue chantée. Ainsi, les deux manuels se sont donc révélés être équivalents sur le plan de la réussite en solfège.

Laboratoire de clavier

L’initiation au clavier à même les cours de formation auditive est une pratique assez répandue dans les programmes de musique. On estime généralement que la connaissance du clavier faciliterait l’étude du solfège et de la théorie musicale. Plusieurs recherches corrélationnelles ont établi des liens entre l’étude du piano et la réussite en formation auditive (Brown, 2001 ; Emig, 1978 ; Harrison, 1990a ; Harrison, 1990b ; Lehmann, 2014 ; Rodeheaver, 1972), mais les raisons pour expliquer cette relation demeurent inconnues. L’apprentissage du piano favorise-t-il en lui-même la réussite en solfège ?

Une seule recherche a été menée sur ce sujet et vient remettre en question les vertus qu’on attribue habituellement à l’apprentissage du piano. Lueft (1974) a mené une étude auprès de 75 étudiants en musique répartis en deux groupes. Pendant 20 séances de 45 minutes, les étudiants du groupe expérimental (n = 40) ont suivi leurs cours de solfège en intégrant le clavier, tandis que ceux du groupe contrôle (n = 35) ont poursuivi leur programme habituel, sans clavier. À la fin du semestre, les analyses n’ont révélé aucune différence significative entre les deux groupes sur le plan de la performance en lecture à vue chantée. Ceci indique que l’intégration du clavier dans les cours de formation auditive n’a apporté aucun bénéfice à court terme sur la réussite en solfège. Toutefois, comme l’a suggéré l’auteur de l’étude, il est possible que l’apprentissage du clavier ait été une source de distraction au moment de son introduction. Si elle procure certains bénéfices, ce serait à plus long terme.

Systèmes de solmisation

Malgré le débat qui court depuis longtemps sur le meilleur système de solmisation à adopter pour apprendre le solfège, nous n’avons trouvé que deux seules études s’étant intéressées à cette question auprès d’une population de niveau collégial. Brown (2001) a comparé la performance en solfège de 70 étudiants en fonction du système de solmisation (fixe ou mobile) qu’ils avaient utilisés pour apprendre le solfège. Les analyses ont montré que le choix du système de solmisation n’avait globalement eu aucun effet sur le niveau de performance en solfège.

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Toutefois, les étudiants ayant adopté le système du do-mobile avaient mieux réussi les mélodies simples.

Dans une étude au design similaire, Hung (2012) a vérifié si la performance en solfège différait en fonction des systèmes de solmisation appris. Il a recruté 85 étudiants de niveau collégial ayant acquis de l’expérience en piano avant l’âge de 12 ans et leur a fait chanter neuf mélodies de niveaux de complexités variés. Les analyses montrèrent un avantage très clair en faveur des étudiants ayant employé le système do-fixe pour apprendre le solfège. Cette étude paraît bien construite dans l’ensemble, mais ses résultats demeurent tributaires du choix des autres variables introduites dans les analyses. En outre, il est possible que les différences observées ne soient pas attribuables au système de solmisation employé.

Les deux études que nous venons de présenter suggèrent que le système de solmisation fixe pourrait être plus approprié lorsque le niveau de complexité est plus élevé, mais elles comportent trop de limites pour nous permettre de conclure en faveur d’un ou l’autre des systèmes. Pour comparer l’efficacité de ces systèmes auprès d’étudiants de niveau collégial, il faudrait conduire une véritable étude expérimentale.

Enseignement programmé et intégration des technologies

À partir de la fin des années 60, quelques chercheurs se sont intéressés aux effets de l’enseignement programmé et de l’intégration des technologies pour soutenir l’apprentissage du solfège. Bien que ces études soient désuètes en regard des technologies actuelles, elles indiquent que les programmes développés présentaient peu d’avantages pour la réussite en solfège ; certains se sont même révélé être nuisibles pour les étudiants les plus faibles.

En 1968, dans une étude quasi expérimentale, Smith a mesuré l’efficacité du « Program for auto-instruction in Sight Singing »1 de Betty Kanable. Cinquante-trois participants de niveau collégial

ont été recrutés et quatre groupes ont été formés. Durant six semaines, les étudiants du groupe expérimental (n = 16) se sont entraînés exclusivement en utilisant le programme de Betty Kanable. Pendant ce temps, les participants du second (n = 13) et du troisième (n = 8) groupe

1Ce programme comprenait un manuel d’auto-instruction (explications, exercices et corrigé) ainsi qu’un enregistreur audio permettant de lire des extraits audios et d’enregistrer sa voix. Chaque concept était d’abord expliqué, puis mis en application à l’aide d’exercices théoriques, de reconnaissance auditive ou de solfège. La réussite des exercices guidait la progression dans le manuel.

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ont reçu un enseignement traditionnel en classe. Enfin, les participants du quatrième (n = 15) groupe n’ont reçu aucun enseignement et ont servi de véritable groupe contrôle. À la fin de l’expérience, aucun des quatre groupes n’avait progressé en lecture à vue chantée. Cette absence d’effet nous appelle à mettre en doute certains aspects méthodologiques, notamment la courte durée des interventions. Mentionnons au passage que le programme de Kanable s’est révélé être inefficace dans une autre étude, cette fois-ci réalisée auprès de 30 élèves du secondaire (Kanable, 1969).

Dans une étude expérimentale, Thompson (1973) a développé et testé l’efficacité d’un programme informatique pour l’apprentissage de la lecture à vue chantée. En plus d’offrir une progression individualisée d’exercices (intervalles, rythmes et mélodies), le logiciel permettait aux étudiants d’écouter les bonnes réponses pour s’autoévaluer. Vingt participants de niveau collégial ont été répartis aléatoirement en deux groupes. Sur une période de 3 semaines, les étudiants du groupe expérimental ont participé à 6 séances d’entraînement à l’ordinateur d’une durée de 30 à 40 minutes, tandis que ceux du groupe contrôle ont travaillé les intervalles en groupe. Après trois semaines, les étudiants du groupe expérimental avaient progressé davantage que ceux du groupe contrôle.

Dans une autre étude portant sur l’efficacité d’un programme d’enseignement informatisé, Platte (1981) a vérifié si l’entraînement à la reconnaissance des intervalles mélodiques à l’aide du logiciel « Melodious dictator » pouvait avoir des effets positifs sur le niveau de lecture à vue chantée. Pour ce faire, 41 participants ont été classés en deux niveaux (forts ou faibles) en fonction des résultats qu’ils avaient obtenus à un prétest de lecture à vue chantée. Ensuite, pour chacun des niveaux, deux groupes distincts ont été aléatoirement formés. Les participants des groupes expérimentaux se sont entraînés pendant 8 semaines à raison de trois séances de 15 minutes par semaine. De leur côté, les étudiants des groupes contrôles ont continué à recevoir l’enseignement habituel en classe. Les analyses ont montré que le programme d’entraînement informatique avait eu des effets positifs et significatifs sur la reconnaissance auditive des intervalles mélodiques, mais que cet apprentissage n’avait pas amélioré la performance des étudiants en lecture à vue chantée. Ce programme s’est donc révélé être efficace pour améliorer la reconnaissance auditive des intervalles mélodiques, mais cette habileté ne s’est pas transférée dans la lecture à vue chantée.

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Enfin, le programme informatique « Perceive » a été l’objet d’une étude publiée en 1991 (Ozeas, 1991). Pour en vérifier les effets sur la réussite en lecture à vue chantée, l’autrice a recruté 58 étudiants en musique qu’elle a affectés aléatoirement à l’une ou l’autre des conditions prévues à la recherche. Les étudiants du groupe contrôle devaient suivre leurs leçons habituelles de solfège, à raison de 3 séances de 50 minutes par semaine, alors que ceux du groupe expérimental remplaçaient la troisième leçon par une séance d’entraînements individuels de reconnaissance auditive au laboratoire informatique. Les analyses révélèrent que l’utilisation du programme « Perceive » en remplacement des cours habituels avait nui à la lecture à vue chantée. Cet effet était encore plus prononcé chez les étudiants qui étaient les plus faibles au départ.

Les recherches que nous venons de présenter nous invitent à demeurer prudents devant l’attrait que peuvent présenter certains programmes d’auto-instruction pour l’apprentissage de la lecture à vue chantée. D’une part, le travail sous la supervision de l’enseignant demeure précieux, particulièrement chez les étudiants les plus faibles, et la décision de consacrer du temps de classe aux exerciseurs informatiques ne doit pas être prise à la légère. D’autre part, elles suggèrent que les habiletés de reconnaissance auditive développées hors contexte ne se transfèrent pas facilement dans la performance en lecture à vue chantée.

Bien entendu, les études que nous avons rapportées s’intéressaient à des outils qui ne sont plus d’actualité. Certains argumenteront avec raison que de nombreuses applications de qualité ont été développées depuis et que leur potentiel mérite d’être pleinement évalué. Néanmoins, la littérature en éducation nous indique que les bénéfices apportés par l’intégration des technologies informatiques demeurent généralement assez modestes (Hattie, 2009). Rappelons que l’intégration réussie de l’informatique repose sur plusieurs conditions : les technologies s’ajoutent à une diversité d’autres stratégies d’enseignement ; les enseignants qui les mettent en œuvre possèdent une bonne connaissance des logiciels et de leur potentiel pédagogique ; l’utilisation des logiciels permet de multiplier les occasions d’apprentissage ; la progression et le rythme d’apprentissage demeurent sous le contrôle de l’apprenant ; l’utilisation de la technologie se fait en contexte collaboratif plutôt qu’individuel ; le logiciel fournit des rétroactions fréquentes sur l’apprentissage (Hattie, 2009).

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« Comprehensive musicianship »

La « comprehensive musicianship » est une approche pédagogique très répandue aux États-Unis qui préconise l’enseignement intégré de l’ensemble des matières musicales traditionnelles : théorie, littérature, solfège, dictée, connaissance du clavier, etc. Ses adeptes estiment qu’elle est la plus appropriée pour développer la pensée musicale et qu’elle permet, notamment, de mieux respecter le rythme des apprentissages en formation auditive (Rogers, 2004).

Dans l’étude corrélationnelle de Brown (2001) présentée plus haut, on a vérifié si un lien existait entre la performance en lecture à vue chantée et le fait d’avoir participé à un programme musical adoptant cette approche. Les analyses ont montré que ceux qui avaient employé la « comprehensive musicianship » avaient eu une moins bonne performance en solfège que les autres étudiants. Toutefois, comme les étudiants provenaient d’établissements différents, cette étude ne permet pas de conclure que les différences observées sont attribuables à l’approche pédagogique employée.

Dans la seule étude expérimentale que nous ayons trouvée sur ce sujet, Bogard (1983) a mesuré l’effet du « Comprehensive Musicianship » auprès de seize étudiants répartis aléatoirement en deux groupes. Durant toute une année scolaire, les étudiants du groupe expérimental ont suivi leurs cours de théorie, de formation auditive et de clavier dans un programme intégré, tandis que ceux du groupe contrôle ont suivi tous leurs cours séparément. Les analyses ont montré que ces deux approches avaient été équivalentes sur le plan des résultats scolaires en solfège.

Ces deux études suggèrent que la « comprehensive musicianship » ne favoriserait pas les performances en solfège. Néanmoins, elles ne remettent pas en question les fondements de l’approche, puisque celle-ci vise des apprentissages plus généraux qui n’ont pas été évalués dans le cadre de ces recherches.

Synthèse

Aucune des approches pédagogiques recensées ici n’a encore clairement démontré son efficacité pour l’enseignement du solfège. Le choix du matériel pédagogique (Danfelt, 1970) et l’inclusion du piano dans les cours de formation auditive (Lueft, 1974) n’ont apporté aucun bénéfice pour les apprentissages. Les études relatives au système de solmisation suggèrent que le do-fixe serait plus approprié que le do-mobile auprès des étudiants avancés (Brown, 2001 ; Hung, 2012), mais

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les méthodes employées n’ont pas permis de trancher définitivement la question. L’intégration des technologies ne s’accompagne pas de bénéfices plus évidents non plus. La plupart des recherches ont conclu à leur inefficacité (Kanable, 1969 ; Platte, 1981 ; Smith, 1968) ou ont engendré des résultats négatifs (Ozeas, 1991). Une seule étude a rapporté des effets positifs pour le solfège (Thompson, 1973), et la portée de ses résultats est limitée par la taille de sa population ainsi que par la courte durée de ses interventions. Enfin, la comprehensive musicianship s’est révélée être néfaste pour les performances en solfège (Bogard, 1983 ; Brown, 2001). La littérature scientifique relative à la pédagogie ne permet pas de formuler de recommandations claires pour les enseignants en formation auditive. Elles mettent surtout en lumière la nécessité de poursuivre les recherches en vue de développer de nouvelles approches pédagogiques favorisant davantage la réussite.

Facteurs de réussite

Dans cette section, nous avons réalisé une recension des recherches corrélationnelles et expérimentales ayant étudié l’influence de variables ou d’interventions pédagogiques sur la performance en lecture à vue chantée, les résultats en solfège, et les résultats en formation auditive. Nous avons répertorié une vingtaine d’études contenant des résultats d’analyses nous permettant d’apprécier l’influence de différents facteurs de réussite pour l’une ou l’autre des mesures de la lecture à vue chantée. Nous présenterons d’abord ces différentes études de manière chronologique, puis nous les synthétiserons par principaux facteurs de réussite.

Des facultés innées aux habiletés acquises

Les premières recherches qui ont étudié les prédicteurs de la réussite en solfège s’inscrivaient dans une perspective déterministe. Dans la mire des chercheurs : l’influence de l’intelligence et du talent musical sur la réussite en solfège. Chadwick (1933) a recruté 39 étudiants en musique de niveau collégial, et leur a fait passer des tests d’intelligence, de talent musical et d’habiletés scolaires. À l’aide de régressions multiples, il calcula l’influence de ces trois variables sur la performance en lecture à vue chantée. Les analyses révélèrent que les résultats étaient en grande partie liés aux mesures du talent musical et de l’intelligence. Ensemble, ils expliquaient près de 70 % de la variance observée dans les résultats. Dans ce modèle, les performances scolaires ne contribuaient aucunement à l’explication. À la vue du faible nombre de participants, les résultats

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spectaculaires observés dans cette étude sont à prendre avec précautions. Néanmoins, elles démontrent que le solfège fait appel à de nombreuses aptitudes musicales et intellectuelles. Avec des objectifs similaires, et une population beaucoup plus grande, Dean (1937) étudia les prédicteurs de la réussite en solfège chez deux cohortes d’étudiants inscrits dans un programme de pédagogie musicale (n = 294). En plus de mesurer l’intelligence et le talent musical des participants, il s’intéressa aussi à leurs expériences musicales, nommément au nombre total d’années de leçons individuelles et collectives qu’ils ont accumulées. Tout comme Chadwick, les analyses montrèrent que les résultats en solfège étaient principalement liés aux mesures du talent musical, particulièrement à celles relatives à la perception des hauteurs et à la mémoire mélodique. Mais contrairement à l’étude précédente, l’intelligence semblait n’exercer qu’une très faible influence. Il détecta en revanche des relations de force modérée entre les expériences musicales et la performance en solfège. Avec cette étude, on introduit l’idée que l’expertise en musique pourrait aussi jouer un rôle dans la réussite en solfège.

Ottman (1956) mena une étude exploratoire auprès de 52 étudiants en musique de niveau collégial afin d’étudier de nouveaux facteurs susceptibles d’influencer la réussite en lecture à vue chantée. Il mesura notamment l’intelligence, la littératie, le talent musical, ainsi que diverses habiletés musicales nécessitant la reconnaissance auditive d’éléments musicaux (dictée, modulations, intervalles, erreurs). Les analyses indiquèrent que le niveau de lecture à vue chantée était principalement lié à deux habiletés musicales : la détection d’erreurs et la reconnaissance des modulations. Dans le modèle de régression utilisé, les mesures du talent musical, de l’intelligence et de la littératie se sont toutes révélées être non significatives. Cette étude suggérait donc, pour la première fois, que les habiletés musicales développées à travers l’entraînement pourraient être plus importantes que l’intelligence, le rendement scolaire et le talent musical. La portée de ces résultats est cependant limitée par plusieurs faiblesses méthodologiques, notamment la nature exploratoire de l’étude, le faible nombre de participants et la présence de variables mesurant des concepts trop similaires.

Quelques années plus tard, Roby (1962) renforça les conclusions de cette recherche lorsqu’il étudia l’influence des habiletés musicales, du talent et du rendement scolaire sur les résultats finaux obtenus dans les matières théoriques chez 77 étudiants en musique de niveau collégial. Tout comme l’avait observé Ottman, les habiletés musicales se sont révélé être modérément liées

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aux résultats obtenus dans les matières théoriques, tandis que le talent musical n’exerçait aucune influence. Quant au rendement scolaire général, il demeurait significativement lié aux résultats finaux. Malgré le fait que cette étude ne portait pas directement sur le solfège, elle renforce cette idée que les habiletés acquises l’emportent sur le talent.

Thostenson (1967) s’est intéressé aux liens entre le solfège, la dictée et les expériences musicales. Deux cent quatre-vingts participants, recrutés dans six collèges et universités, ont complété l’ensemble des tests de solfège et de dictée musicale. Les analyses ont révélé de fortes corrélations entre le solfège et la dictée musicale. Des différences significatives de performance en solfège ont aussi été observées entre les instruments principaux. Les étudiants jouant du piano ou un instrument de la famille des cordes réussissaient mieux en solfège que la plupart des autres familles d’instrument. À l’opposé, ceux jouant un instrument de la famille des bois ou des cuivres étaient plus faibles que la plupart des autres instrumentistes. Contrairement à Dean (1937), l’auteur n’a toutefois observé aucune relation entre le résultat au test de solfège et le nombre d’années de leçons individuelles. Bien que cette recherche n’établît aucun lien entre les expériences musicales et la performance en solfège, elle annonçait pour la première fois que le solfège et la dictée musicale constituaient deux compétences fortement liées entre-elles.

Jones (1968) a étudié l’influence des habiletés langagières, de l’empan perceptuel, de l’intelligence et des expériences musicales sur les habiletés de lecture à vue chantée de 100 étudiants en musique de niveau collégial. Contrairement aux attentes, les analyses n’ont révélé aucune relation significative entre les divers prédicteurs et le niveau mesuré de la lecture à vue chantée. Il est possible que ces résultats discordants à l’égard de la littérature découlent d’une mesure inadéquate de la lecture à vue chantée. En fait, le test employé accordait plus de la moitié des points à l’exécution d’exercices mélodiques sans notation musicale, comme des gammes et des motifs chantés à l’aide de chiffres.

Depuis que Dean (1937) avait découvert une association entre la lecture à vue chantée et le nombre d’années de leçons individuelles et collectives, le rôle des expériences musicales demeurait peu étudié. Seulement deux recherches s’étaient intéressées à ce sujet depuis et aucune n’avait encore réussi à en répliquer les résultats (Jones, 1968 ; Thostenson, 1967). Afin d’étudier plus en détail la contribution des expériences musicales, Rodeheaver (1972) a mené une étude exploratoire auprès de 260 étudiants en musique de niveau collégial, répartis dans 12

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établissements. Comme dans les études précédentes, il mesura les habiletés musicales et les habiletés scolaires, mais il y inclut cette fois-ci une grande variété d’expériences musicales formelles et informelles. Les données analysées montrèrent d’abord que les habiletés musicales et scolaires, telles que mesurées par les tests d’admission, étaient modérément liées à la lecture à vue chantée. Ensuite, des différences significatives ont été observées en fonction des familles d’instruments. Les instrumentistes de la famille des cordes et des bois de même que les pianistes avaient eu de meilleures performances en solfège que les instrumentistes de la famille des cuivres et les chanteurs. Du côté des expériences musicales formelles, plusieurs liens significatifs ont été observés, les plus importants étant le nombre d’années de leçons individuelles de piano, le nombre d’années d’expérience d’orchestre au secondaire et le fait d’avoir joué dans un orchestre à l’école élémentaire. En ce qui concerne les expériences musicales informelles, les analyses ont révélé plusieurs relations faibles et significatives, notamment en ce qui concerne la pratique du chant à la maison. Cette étude indique qu’une diversité d’expériences musicales formelles et informelles est susceptible de contribuer à la performance en solfège. Toutefois, les statistiques rudimentaires employées dans cette recherche ne permettent pas de vérifier si cette contribution était différente de celle apportée par les habiletés musicales et scolaires.

Dans une étude de plus grande envergure, Emig (1978) s’est intéressé aux liens entre les expériences musicales, les habiletés musicales, le rendement scolaire et les résultats en formation auditive. Le chercheur a analysé les données de 1 308 étudiants récoltés sur une période de 5 ans. À l’aide de régressions statistiques, il a observé que les résultats en formation auditive étaient essentiellement liés aux habiletés musicales, telles que mesurées dans les tests d’admission en musique. De leur côté, les habiletés scolaires n’expliquaient qu’une faible proportion de la variance. Dans les modèles retenus, aucune des expériences musicales (année de leçons individuelles, années de leçon de piano, cours de théorie, orchestre, histoire) ne contribuait à la prédiction. Cette étude indique que les performances en formation auditive sont principalement liées aux habiletés musicales. Toutefois, certaines limites inhérentes à la méthode employée doivent être mentionnées. D’une part, les tests d’admission mesuraient essentiellement les habiletés relatives à la dictée musicale. Étant donné que les corrélations entre le solfège et la dictée sont très élevées (Thostenson, 1967), il est possible qu’elles aient éclipsé toute autre relation importante. D’autre part, les techniques d’analyse employées visent à déterminer quels sont les meilleurs prédicteurs, sans égard aux relations qui existent entre les variables. Ainsi, elles

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ne permettent pas de vérifier si les expériences musicales jouent un rôle dans l’acquisition des habiletés. En somme, cette étude réaffirme la prépondérance des habiletés musicales dans la prédiction du rendement en formation auditive, mais ne permet pas d’apprécier la contribution des expériences musicales.

Afin d’améliorer les tests d’admission employés dans un programme d’études musicales, Arenson (1983) a étudié dans quelle mesure les habiletés musicales et scolaires pouvaient prédire les résultats obtenus en formation auditive à la fin du premier semestre. Les données de 84 étudiants en musique de niveau collégial ont été analysées à l’aide de corrélations et de régressions multiples. Les analyses ont montré que les résultats obtenus en formation auditive à la fin de la première session étaient principalement liés aux habiletés scolaires en langue. En ce qui concerne les habiletés musicales, seul le test d’admission en formation auditive est demeuré significativement lié à la réussite en formation auditive. Cette recherche réaffirme une fois de plus l’importance des habiletés scolaires et musicales dans la réussite en formation auditive. Vers un modèle de la réussite en formation auditive

Alors que l’importance des habiletés musicales acquises semblait s’imposer dans la littérature, Schleuter (1974) demeurait insatisfait des tests utilisés dans les processus d’admission en musique. Il estimait d’une part que l’Aliferis Music Achievement Test et l’Iowa Tests of Music Literacy ne mesuraient que les connaissances musicales théoriques des candidats et qu’ils ne nous renseignaient pas sur leur potentiel musical véritable. D’autre part, il déplorait que le seul test mesurant le talent musical, le Musical Aptitude Profile de Gordon, soit trop facile pour les étudiants de niveau collégial (Lee, 1967 ; Schleuter, 1974). Schleuter développa donc une version plus avancée du test de Gordon, le Collegial Musical Aptitude Test (CMAP). Ce test fut employé pour développer un modèle explicatif de la réussite en formation auditive.

Schleuter (1983) a d’abord testé le potentiel du CMAP pour prédire les résultats en solfège et en dictée musicale auprès d’une petite population. Les données de 23 étudiants en musique de niveau collégial ont été analysées sur une période de deux ans. À la fin de la première année, toutes les composantes du CMAP se sont révélées être modérément liées aux résultats en solfège. Toutefois, les résultats obtenus en deuxième année n’ont pas pu être prédits par le CMAP. Malgré cela, les résultats positifs obtenus justifiaient la poursuite des recherches autour du CMAP.

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En 1987, Harrison (1987a) répliqua cette recherche auprès de 135 étudiants en musique de niveau collégial. Les analyses montrèrent que les composantes tonales et rythmiques du test CMAP étaient faiblement liées aux résultats en solfège et expliquaient entre 8 % et 14 % de la variance observée. Les données de cette cohorte pour le semestre suivant ont été publiées dans un second article (Harrison, 1987b). Elles montrèrent que seule la composante rythmique du test CMAP demeurait liée aux résultats en solfège. Ces deux recherches indiquent que les aptitudes musicales mesurées dans le CMAP sont faiblement liées à la performance en solfège et suggèrent que ce lien s’affaiblit à compter du deuxième semestre.

Harrison (1990) réalisa une nouvelle étude auprès de 160 étudiants en musique de niveau collégial afin de découvrir les variables prédisant le mieux le niveau de réussite en formation auditive. En plus du test d’aptitudes musicales CMAP utilisé plus haut, elle intégra différentes mesures des habiletés scolaires ainsi que certaines questions relatives aux expériences musicales. Pour le premier semestre, les analyses montrèrent que les résultats en solfège étaient principalement prédits par les habiletés scolaires en mathématique, les aptitudes rythmiques et les leçons instrumentales individuelles totales. Les analyses relatives au second semestre conduisirent à des résultats assez similaires, mais les relations étaient plus faibles. Harrison (1991) publia une nouvelle étude où elle analysa les mêmes données à l’aide d’équations structurales. Les méthodes statistiques employées permirent d’améliorer la qualité de la prédiction en formation auditive, mais ne révélèrent aucune nouvelle relation d’importance.

Enfin, Harrison et al. (1994) ont testé un modèle prédictif des résultats scolaires en formation auditive auprès de 142 étudiants en musique. Les auteurs y ont étudié spécifiquement l’influence des aptitudes musicales, des résultats scolaires, des expériences musicales et de la motivation pour la musique. La performance en formation auditive à la fin du premier semestre était principalement liée aux aptitudes musicales (tonales et rythmiques). Pour leur part, les habiletés scolaires et les expériences musicales se sont révélées être faiblement liées à la performance en formation auditive. Quant à la nouvelle variable étudiée, la motivation pour la musique, elle n’apportait aucune contribution au modèle prédictif. Avec 77 % de la variance expliquée, ce modèle était particulièrement bien adapté pour prédire les résultats en dictée musicale à la fin du premier semestre. En revanche, les résultats obtenus en solfège étaient un peu moins bien expliqués par ce modèle (44 %).

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Néanmoins, le modèle proposé par Harrison et al. (1994) demeure nettement incomplet. D’abord, il n’a été testé qu’avec les résultats du premier semestre en formation auditive. Comme nous l’avons vu plus tôt, les mesures tirées du CMAP étaient faiblement liées aux résultats des autres semestres. Il ne serait donc pas étonnant que ce modèle soit inadapté pour expliquer la performance en solfège à plus long terme. Ensuite, les recherches ayant étudié simultanément l’influence du talent et des habiletés musicales avaient montré que les habiletés acquises l’emportaient généralement sur le talent. Nous ne savons donc pas si l’usage d’un test d’admission plus classique, mesurant les habiletés, aurait mené à des résultats similaires. Enfin, malgré la diversité des expériences musicales associées à la réussite en formation auditive, le seul indicateur retenu dans le modèle d’Harrison et al. (1994) est celui du nombre d’années de leçons individuelles. Ce modèle n’explique toujours pas de quelle manière les expériences musicales influencent la réussite en solfège.

La nécessité d’étudier la diversité des parcours individuels

Depuis la publication d’Harrison et al. (1994), peu de recherches ont été menées sur les facteurs de réussite en formation auditive. Des études de plus faible envergure ont néanmoins mis en évidence la nécessité d’étudier la diversité des parcours individuels.

Dans une étude portant principalement sur les effets du système de solmisation en solfège, Brown (2001) a récolté des données relatives aux caractéristiques individuelles ainsi qu’aux expériences musicales de 35 participants. Trois caractéristiques individuelles se sont révélées être positivement liées au test de lecture à vue chantée : le fait de posséder l’oreille absolue, le fait d’étudier en piano, et le fait d’avoir étudié le solfège dans un programme séparé plutôt qu’intégré. Sans mesurer les habiletés musicales et scolaires, ces trois variables réunies expliquaient 41 % de la variance observée dans la performance en solfège, à peine moins que le modèle proposé par Harrison et al. (1994). Cette étude démontre la nécessité de poursuivre les recherches sur les facteurs de réussite, notamment sur l’oreille absolue et les expériences musicales.

Furby (2008) s’intéressa aux liens entre les expériences musicales et le niveau en lecture à vue chantée chez 40 choristes de niveau collégial. Les analyses de régressions montrèrent que le niveau en lecture à vue chantée était mieux prédit par le nombre total d’années de participation dans une chorale ainsi que par le nombre d’années d’expérience dans un orchestre. Les analyses ne décelèrent cependant aucun effet relativement au nombre d’années de leçons individuelles.

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Ces deux facteurs réunis expliquaient 28 % de la variance totale. Ceci indique que les expériences musicales collectives sont aussi susceptibles de contribuer à la réussite en solfège. Néanmoins, nous ne savons pas si cette contribution dépasse celles des habiletés musicales ou scolaires. Prédire la réussite à plus long terme

Alors que les études précédentes se sont surtout concentrées sur la prédiction de la réussite à court terme, Bergby (2013) étudia la valeur de différents tests d’admission pour prédire le rendement en formation auditive à la fin du cheminement scolaire. Les données de 307 étudiants ont été analysées et ont montré que les résultats en formation auditive étaient modérément prédits par les tests d’admission en formation auditive ainsi qu’en théorie musicale. Les résultats obtenus à l’audition instrumentale n’étaient que très faiblement liés à ceux de formation auditive. Les résultats des tests d’admission réunis expliquaient entre 33 % et 39 % de la variance. Lehmann (2014) est l’étude la plus récente s’étant intéressée aux liens entre les habiletés musicales et la réussite en formation auditive. Les analyses, réalisées à partir des données de 93 étudiants, montrent que les résultats en formation auditive à la fin du programme d’études étaient liés aux tests d’admission en formation auditive, au test de classement en théorie musicale, au test de connaissance du clavier, ainsi qu’au rendement scolaire au secondaire. Toutefois, l’étude ne rapporte que des relations bivariées et nous ne connaissons pas leur contribution propre. Néanmoins, à lui seul, le test d’admission en formation auditive expliquait 48 % de la variance dans les résultats finaux.

Synthèse

La littérature démontre que la performance en solfège s’explique principalement par les habiletés musicales acquises, mais elle n’établit pas toujours clairement lesquelles. Les meilleurs prédicteurs de la réussite en solfège ont surtout été les tests d’admission en formation auditive et en théorie musicale (Arenson, 1983 ; Bergby, 2013 ; Emig, 1978 ; Lehmann, 2014 ; Ottman, 1956 ; Rodeheaver, 1972), mais les composantes précises n’ont généralement pas été identifiées. Certaines études suggèrent que ces habiletés pourraient être liées aux aptitudes rythmiques, à la mémoire mélodique, au sens tonal et la musicalité (Arenson, 1983; Chadwick, 1933; Dean, 1937 ; Harrison, 1987a ; Harrison, 1987b ; Harrison, 1990 ; Harrison, 1991; Harrison et al., 1994 ; Lueft, 1974 ; Ottman, 1956 ; Roby, 1962 ; Rodeheaver, 1972 ; Schleuter, 1983).

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Les habiletés scolaires se sont aussi révélées déterminantes pour prédire les résultats obtenus dans les cours de formation auditive. Plusieurs associations entre la performance en formation auditive et les habiletés scolaires ont été rapportées, avec des mesures telles que la moyenne générale au secondaire (Harrison, 1990; Harrison, 1991; Harrison et al., 1994; Lehmann, 2014) et les résultats obtenus dans différentes matières scolaires (Arenson, 1983; Chadwick, 1933; Emig, 1978; Ernest, 1970; Harrison, 1990; Harrison, 1991; Harrison et al., 1994; Ottman, 1956; Roby, 1962; Rodeheaver, 1972). Ces relations indiquent que la formation auditive, dès qu’elle est intégrée dans un programme d’études musicales, constitue une matière scolaire comme toutes les autres.

Au fil de la recension, plusieurs variables relevant des expériences musicales ont été associées à la performance en solfège, notamment l’instrument principal (Arenson, 1983 ; Thostenson, 1967), le fait de jouer du piano (Brown, 2001; Harrison, 1990; Harrison, 1991), le nombre d’années de leçons individuelles (Brown, 2001; Dean, 1937; Emig, 1978; Harrison, 1990; Rodeheaver, 1972; Thostenson, 1967), le nombre total d’années d’expérience instrumentale (Harrison, 1990; Harrison, 1991), les expériences de chant choral (Furby, 2008; Rodeheaver, 1972), les expériences d’orchestre (Emig, 1978; Furby, 2008; Rodeheaver, 1972) et les expériences musicales informelles (Rodeheaver, 1972). Dans leur ensemble, ces études suggèrent qu’une diversité de parcours musicaux pourrait favoriser la réussite en solfège, mais, comme la plupart des études recensées n’ont rapporté que des associations bivariées, nous ne pouvons pas encore apprécier leur véritable contribution dans la réussite en solfège. Exercent-elles une influence directe sur la réussite ou contribuent-elles plutôt à expliquer les habiletés musicales acquises ? La littérature sur les facteurs de réussite a soulevé de nombreux questionnements et plusieurs seront abordés dans le cadre de cette recherche doctorale. Mais avant d’aller plus loin, il nous importe de tenter de préciser davantage la nature des habiletés essentielles en solfège.

Habiletés essentielles en solfège

Deux habiletés musicales ont particulièrement retenu l’attention des chercheurs en formation auditive : la maîtrise des intervalles et la lecture rythmique. Voyons ce que les recherches ont trouvé.

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