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Maladie de parkinson et résolution de problèmes : apport des protocoles verbaux

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Academic year: 2021

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Université de Poitiers

UFR Sciences Humaines et Arts

Département de Psychologie

MALADIE DE PARKINSON ET RESOLUTION DE

PROBLEME

APPORT DES PROTOCOLES VERBAUX

Thèse de Doctorat de l’Université de Poitiers Mention Psychologie

Présentée par

Delphine Penny

Sous la direction de

Josiane Caron-Pargue

Jury

Madame Josiane Caron-Pargue, Université de Poitiers

Monsieur Roger Fontaine : Université de Tours, rapporteur

Monsieur Jean-Luc Houeto, Université de Poitiers

Monsieur Jacques Hugon, Hôpital Lariboissière

Monsieur Charles Tijus, Université de Paris 8, rapporteur

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REMERCIEMENTS

Je tiens avant tout à exprimer ma plus grande reconnaissance à Madame Caron-Pargue qui a, de par son savoir, su m’apporter une rigueur et une méthode de travail. Je la remercie de sa disponibilité, de son écoute et de sa patience pour toutes ces années….Je tiens également à remercier Monsieur Caron pour les bons conseils qu’il a su me prodiguer. Un très grand merci……

Je tiens également à remercier tous les patients Parkinsoniens, tous les volontaires, âgés et jeunes, qui ont bien voulu participer à cette recherche et sans qui ce travail n’aurait pas été possible. Un grand merci au Centre Hospitalier Universitaire de Poitiers et à tout le personnel médical qui m’a accueillie lors de mes premiers recueils de données.

Je tiens enfin à remercier tous mes proches : mon mari qui a toujours été à mes côtés dans mes moments de doute. Mon frère et surtout mes parents qui m’ont toujours soutenue et plus particulièrement mon père qui m’a toujours encouragée.

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TABLE DES MATIERES

Résumé de la thèse……… …………5

PARTIE 1 - CADRE THEORIQUE Objectif de la thèse……….………7

Chapitre 1.1. La maladie de Parkinson etla planification en résolution de problème………...…9

1.1.1. Caractéristiques communes au vieillissement normal et à la MP………..……...…10

1.1.2. Caractéristiques de la maladie de Parkinson………..15

1.1.3. Planification, résolution de problème et apprentissage………..20

1.1.4. Conclusion………..…24

Chapitre 1.2. Prise en compte des verbalisations……….……….25

1.2.1. Le langage, de la normalité au pathologique………...26

1.2.1.1. Le vieillissement normal………....26

1.2.1.2. Le vieillissement pathologique………..………27

1.2.2. La prise en compte des verbalisations………..………...29

1.2.3. L’approche énonciative………....32

1.2.4. Interprétation cognitive des opérations énonciatives..………...34

1.2.4.1. La fonction cognitive des marques linguistiques……….34

1.2.4.2. Les marques linguistiques comme marqueurs d’opérations cognitive….36 1.2.5 Conclusion………...39

Chapitre 1.3 = Organisation de la thèse……….40

PARTIE 2 : METHODE Chapitre 2.1. Méthode Générale……….…44

2.1.1. Sujets……….…..…45 2.1.2. Matériel………...45 2.1.3. Procédure………....46 2.1.4. Instructions……….47 2.1.5. Les sous-buts………...47 2.1.5.1. Les critères………..…47 2.1.5.2. Les Hypothèses………...48

Chapitre 2.2. Variables et Hypothèses………....52

2.2.1 Analyse comportementale (partie 3.)…..………..52

2.2.1.1. Variables dépendantes………...52

2.1.1.2. Hypothèses comportementales………..…52

2.2.2. Analyses linguistiques……….………..……….53

2.2.2.1. Variables dépendantes linguistiques (PROP)………..…53

2.2.2.2. Approche propositionnelle (ch. 4.1.)……….54

2.2.2.3. La répartition des marques linguistiques (ch. 4.2.)………...………..56

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3

2.2.2.5. Les variables d’interaction (ch. 4.4.)..………..59

PARTIE 3 : RESULTATS : ANALYSE COMPORTEMENTALES Chapitre 3.1. Effet de la verbalisation………..……….62

3.1.1. Le temps total (TpsT)……….63

3.1.2. Le temps par manipulation (TpsM)………..66

3.1.3. Le nombre de manipulations (NbrM)………68

3.1.4. Les violations de consigne (Vdc)………...69

3.1.5. En résumé………...69

3.1.4.1. Sur la stratégie entière………...69

3.1.4.1. Sur les sous-buts……….70

3.1.4.3. Dans chaque groupe………...71

3.1.5. Conclusion………..72

Chapitre 3.2. Approche comparative de la performance………..77

3.2.1. Le temps total (TpsT)……….77

3.2.2. Le temps par manipulations (TpsM)………79

3.2.3. le nombre de manipulations (NbreM)………81

3.2.4. Les violations de consigne (Vdc)………...82

3.1.5. En résumé………...83

3.1.4.1. Sur la stratégie entière……….…..82

3.1.4.1. Sur les sous-buts……….……84

3.1.4.3. Dans chaque groupe………..….85

3.1.5. Conclusion……….….86

PARTIE 4 : RESULTATS : ANALYSE LINGUISTIQUE Chapitre 4.1= Approche propositionnelle……….….90

4.1.1. La proportion des blocs………...….……….90

4.1.2. La Longueur des blocs………...…..………..95

4.1.3. Evolution des blocs…………...……….….98

4.1.4. Les réorganisations INTRA et INTER blocs………...………..100

4.1.5. En résumé…………...……… 104

4.2.5.1. Sur la stratégie entière……… 104

4.2.5.2.. Sur les sous-buts………. 105

4.2.5.3. Dans chaque groupe ……….. 107

4.1.6. Conclusion…...……… 110

Chapitre 4.2 Répartition des marques linguistiques………..….112

4.2.1 Les mots……….112

4.2.2 Les verbes………..115

4.2.3 Les expressions modales………...118

4.2.4 Les connecteurs……….121

4.2.5 Résumé………...123

4.2.5.1. Sur la stratégie entière……….123

4.2.5.2.. Sur les sous-buts………..124

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4

4.2.6 Conclusion……….128

Chapitre 4.3. La planification stratégique………...…….130

4.3.1. Les évaluations dans leur ensemble Ev………..……130

4.3.2. Les Evaluations-Situation EvSIT……….….. ..134

4.2.3. Les Evaluations-Détachement EvDET ..………...….137

4.3.4. Les différents types d’Evaluations-Détachement………..142

4.3.4.1. Les Evaluations-Planification EvPLAN……….142

4.3.4.2. Les Evaluations-Modales EvMD………...144

4.3.4.3. Les Interjections seules………146

4.3.5. Résumé………..147

4.3.2.1. Sur la stratégie entière……….147

4.3.2.2. Sur les sous-buts………...148

4.3.2.3. Dans chaque groupe……….…150

4.3.3 Conclusion……….153

Chapitre 4.4 Intéractions interne-externe………155

4.4.1 Les processus interne-externe………..155

4.4.2 Les processus déclaratif-procéduraux………158

4.4.3 Interactions entre interne-externe et déclaratif-procéduraux………..…164

4.4.4 Résumé………...169

4.4.4.1. Sur la stratégie entière……….169

4.4.4.2. Sur les sous-buts………...…170

4.4.4.3. Dans chaque groupe……….…173

4.4.5 Conclusion……….175

PARTIE 5 : DISCUSSION GENERALE Discussion générale……….177

5.1. Les caracttéristiues de l’apprentissage……….179

5.2. Questions méthodologiques………....185

5.3. Aspects théoriques………..186

5.4. Autres questions……….187

5.5. Limitations du travail. Prolongements……….191

BIBLIOGRAPHIE………....193 ANNEXES Annexes partie 3……….. -2- Annexes partie 4……..……… -11- Annexes chapitre 4.1………... -12- Annexes chapitre 4.2………... -25- Annexes chapitre 4.3……… -42-

Annexe Classification des évaluations……… -43-

Annexe Statistica………. -52-

Annexes chapitre 4.4……… -74-

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Résumé de la thèse

Les travaux sur les Parkinsoniens ont permis d’identifier différents types de

déficiences. Dès le début de leur maladie, les Parkinsoniens éprouvent des troubles de la mémoire de travail et des fonctions exécutives, pour manipuler des informations, surtout lorsqu’ils sont face à de nouvelles situations. On constate des déficits dans les processus de planification et dans la sélection de stratégies lors de tâches de résolution de problème. Cependant les processus cognitifs sous-jacents à cette diversité de symptômes restent encore à identifier.

L’objectif du travail est de caractériser ces processus cognitifs à partir de l’analyse des verbalisations simultanées à la résolution du problème de la Tour de Hanoï, souvent utilisé pour tester ce type de patients. On se propose d’effectuer une analyse comparative des verbalisations avec des sujets contrôles, et avec la performance des sujets. Pour cela, on se référera à la théorie énonciative de Culioli, les opérations énonciatives étant cognitivement interprétées en termes de marqueurs de processus cognitifs selon Caron-Pargue.

Les verbalisations de 10 sujets Parkinsoniens non déments ont été comparées à celles de 20 sujets contrôles (10 sujets Agés appariés, et 10 sujets Jeunes), et mises en relation avec la performance des sujets, non seulement sur la stratégie entière, mais aussi sur chacun des sous-buts de la résolution. Le problème choisi est une tour de Hanoï à quatre disques de tailles et de couleurs différentes avec quatre essais successifs. Par ailleurs, l’effet de la verbalisation a été contrôlé en comparant les performances de sujets verbalisant ou non, les non-verbalisant étant issus d’un autre groupe, composé de 10 Parkinsoniens, 10 Agés appareillés, et 10 Jeunes, qui résolvent le même problème quatre fois consécutives.

Au-delà de la caractérisation d’une large base commune entre l’apprentissage des

Parkinsoniens et celui des groupes contrôles, les résultats identifient les déficiences des

Parkinsoniens à des endroits très particuliers. L’apprentissage implicite, caractérisé à partir des contenus propositionnels montre une construction contextualisée, qui se prête à la dé-automatisation au fur et à mesure de sa construction. Mais c’est l’étude approfondie de la répartition de certains marqueurs linguistiques, qui permet de préciser et de qualifier ces effets en termes de processus cognitifs. Il semble que c’est un trouble dans la sélection des informations pertinentes qui entraîne une déficience au sein des interactions entre processus internes-externes et processus déclaratifs-procéduraux, ce mauvais fonctionnement entrainant par suite des processus de dé-automatisation.

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PARTIE 1

CADRE THEORIQUE

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Objectif de la thèse

La maladie de Parkinson (MP) est une maladie neurodégénérative fréquente, dont les principales lésions cérébrales se situent dans les structures sous-corticales et plus particulièrement dans la substance noire, elle-même composée d’un ensemble de cellules pigmentées situées à la base du cerveau, dans la partie supérieure du tronc cérébral (Agid, 1987). La MP est principalement une maladie motrice mais la survenue de troubles neuropsychologiques finit par affecter 40 à 80% des patients et l’essentiel de ces perturbations cognitives est représenté par des troubles partiels de la mémoire et des fonctions exécutives ; un dysfonctionnement frontal, induit essentiellement par des phénomènes de démodulation, est également fréquent (Dubois et al., 1991 ; Marié et al., 1995).

Le traitement de cette pathologie est surtout médicamenteux et repose principalement sur l’administration de lévodopa (ou L-Dopa), substance transformée en dopamine une fois absorbée, et dont le but est essentiellement de corriger les symptômes moteurs. Si la L-Dopa est bien efficace dans la plupart des troubles moteurs, elle reste peu efficace pour les troubles cognitifs. En raison du vieillissement de la population mondiale, l’importance de la MP comme problème de santé publique devrait s’accroître : il est important de chercher à mieux connaître cette maladie pour améliorer la prise en charge précoce des patients.

Pour étudier les troubles des fonctions exécutives de nombreux auteurs (Shallice, 1982 ; Taylor & al.,1990 ; Goel & Grafman,1995 ; Owen, 1997) ont utilisé le problème de la tour de Hanoï et ses variantes (tour de Londres ou de Toronto) afin de mettre en évidence un déficit dans les processus de planification et dans la sélection de stratégies chez des sujets ayant un syndrome frontal comparativement à des sujets sains, déficit généralement mis sur le compte d’une atteinte du système attentionnel superviseur ou « SAS » (Shallice, 1982). Aujourd’hui, l’épreuve de la tour de Hanoï (« Tower of Hanoi », ToH) est un test employé au même titre que des tests plus classiques comme le « Wisconsin Card Sorting Test » ou le « Stroop » pour évaluer plus particulièrement des troubles de la planification de l’action chez des sujets présentant un syndrome frontal. La résolution de la ToH implique la mise en place de stratégies car le principe général est de transformer un but en une série de sous-buts

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8 hiérarchisés. Les sujets confrontés à ce problème vont donc utiliser leurs ressources cognitives et leur mémoire pour formaliser des plans d’action, pour retenir des éléments et des séquences d’assemblages du plan, pour évaluer, réviser, et mettre en pratique ces plans.

Un autre des intérêts de la ToH est qu’elle permet, bien qu’étant un test non verbal, l’utilisation des verbalisations, et plus particulièrement des verbalisations simultanées : le fait de demander aux sujets de verbaliser durant la réalisation de la tâche n’interfère en rien avec les processus cognitifs mis en jeu par la tâche principale de résolution : tout au plus des effets réactifs liés au contexte peuvent intervenir (Ericsson & Simon, 1980 ; Anzai & Simon, 1979 ; Caron-Pargue & Caron, 1989 ; Bégoin-Augereau & Caron-Pargue, 2010). De plus, certaines étapes élémentaires, caractérisées à partir de l’analyse des verbalisations, permettent d’affiner la stratégie de résolution habituellement étudiée sur l’essai entier.

Le travail que l’on se propose d’effectuer dans le cadre de la thèse a pour but de préciser les différents processus de planification que peuvent mettre en place des sujets parkinsoniens non déments comparativement à des sujets sains (sujets âgés appariés et sujets jeunes), à l’aide d’une analyse fine des étapes intermédiaires de la résolution de la ToH. Notre idée est qu’une analyse des verbalisations prenant en compte les développements récents en linguistique cognitive devrait permettre d’apporter ces éléments et notamment en ce qui concerne la théorie énonciative de Culioli (1990, 1999). En effet, l’interprétation cognitive des opérations énonciatives devrait pouvoir permettre de remonter aux processus cognitifs sous-jacents aux détériorations cognitives, observées chez les sujets parkinsoniens.

Ainsi, deux façons de concevoir la planification seront considérées. L’une, très classique et à laquelle se réfère l’ensemble des travaux sur la déficience des fonctions exécutives des sujets âgés et des sujets parkinsoniens. L’autre, dans l’optique des travaux de Caron-Pargue (Caron-Pargue et Caron, 1989 ; Caron-Pargue et Fièvre, 1996 ; Bégoin-Augereau et Caron-Pargue, 2010) conçoit la planification en termes de traitement de l’information par des micro-processus, caractérisés à partir des opérations énonciatives de Culioli, interprétées cognitivement.

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Chapitre 1.1 : La Maladie de Parkinson

La Maladie de Parkinson (MP) touche quatre millions de personnes dans le monde et le nombre de parkinsoniens en France est estimé entre 100 000 et 120 000 personnes avec environ 8000 nouveaux cas par an. L’incidence varie, selon les études, de 5 à 25 pour 100000. Le risque d’être atteint par la maladie de Parkinson (MP) est égal pour les deux sexes. L’âge moyen de début se situe entre 40 et 70 ans, mais 5 à 10% des patients sont atteints plus jeunes (entre 30 et 40 ans). Si l’incidence de la MP est très basse avant 40 ans, elle augmente rapidement jusqu’à 80 ans puis décroît. L’origine de la MP reste encore inconnue mais plusieurs hypothèses sont avancées comme l’hypothèse virale, l’hypothèse auto-immune, le rôle du vieillissement, les facteurs environnementaux comme l’intoxication au manganèse, et l’hypothèse génétique. La MP est principalement une maladie motrice mais la survenue de troubles neuropsychologiques finit par affecter 40 à 80% des patients. Dés 1882, B. Ball rapportait plusieurs observations de démences et d’hallucinations chez des patients parkinsoniens. Aujourd’hui, l’essentiel des perturbations cognitives est représenté par des troubles partiels de la mémoire et des fonctions exécutives (Marié et al., 1995); un dysfonctionnement frontal, induit essentiellement par des phénomènes de démodulation, est également fréquent (Dubois et al.,1991 ). Le traitement de cette pathologie est surtout médicamenteux et repose principalement sur l’administration de L-Dopa (lévodopa), précurseur de la dopamine (substance transformée en dopamine une fois absorbée) et dont le but est essentiellement de corriger les symptômes moteurs. En effet, l’objectif principal de ce traitement est de restaurer l’activité de la dopamine déficiente dans le cerveau. Si la L-Dopa est bien efficace dans la plupart des troubles moteurs, elle reste peu efficace pour les troubles cognitifs. Les troubles neuropsychologiques sont fréquemment rapportés et ce, même en début de pathologie. Grâce à des explorations neuropsychologiques spécifiques, on a observé des troubles précoces portant spécifiquement sur les capacités d’attention, de mémoire et des fonctions exécutives. Toutes ces difficultés mettent en avant un dysfonctionnement sous-cortico-frontal.

En raison du vieillissement de la population mondiale, l’importance de la MP comme problème de santé publique devrait s’accroître : il est important de chercher à mieux connaître cette maladie pour améliorer la prise en charge des patients. Nous verrons, dans un premier

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10 temps, les caractéristiques cognitives communes au vieillissement normal et à la MP puis, les caractéristiques spécifiques des troubles engendrés par la MP.

Notre étude repose sur deux axes de recherche : le premier axe concerne les performances globales et intermédiaires obtenues principalement lors de la résolution du problème de la Tour de Hanoï tandis que le deuxième axe correspond à l’étude des protocoles verbaux de sujets en situation de résolution.

1.1.1. Caractéristiques communes au vieillissement normal et à la MP

Il est bien établi que le vieillissement normal a un impact sur les fonctions cognitives. De nombreuses hypothèses ont été avancées dans le but d’expliquer ces difficultés cognitives et notamment celles renvoyant à l’idée d’une mort neuronale, conséquence du vieillissement normal. Avec les progrès de la médecine mais aussi et surtout de l’imagerie, ces hypothèses se sont infirmées laissant petit à petit la place à l’idée qu’il serait plutôt question de changements neuro-anatomiques et principalement au niveau des modifications de la quantité et de la qualité des connexions neuronales. Il est également établi que le vieillissement normal s’accompagne d’une altération des phénomènes de neuro-médiation mono-aminergique, dont la plus marquée est celle du système dopaminergique qui se compose de trois grands circuits : le circuit nigro-strié (impliqué dans le contrôle des mouvements), le circuit méso-frontal (impliqué dans les processus cognitifs), et le circuit méso-limbique (impliqué dans la vie affective et dans les processus mnésiques). Le vieillissement normal génère une diminution de la puissance des afférences dopaminergiques se traduisant par une motricité ralentie (circuit nigro-stré), des difficultés cognitives (circuit méso-frontal) et la survenue de troubles affectifs et mnésiques (circuit méso-limbique). En cela, le vieillissement normal ressemble à la MP puisqu’il s’agit là aussi d’un dysfonctionnement du système dopaminergique. Vieillissement normal et MP ont des caractéristiques communes puisque les difficultés cognitives observables au sein du vieillissement normal se retrouvent également lors du vieillissement pathologique. La différence que l’on peut retrouver est que, pour le vieillissement pathologique dans le cadre de la MP, ces difficultés sont majorées.

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Les processus mnésiques

Avec l’avancée en âge, de plus en plus de personnes se plaignent de difficultés cognitives et plus particulièrement de problèmes mnésiques. Au cours du vieillissement normal, les systèmes cognitifs les plus perturbés semblent être ceux relevant du système central exécutif, c'est-à-dire la mémoire épisodique et la mémoire de travail (MT), alors que les mémoires procédurale et sémantique semblent mieux préservées (Giffard etal., 2001).

La mémoire épisodique, parfois appelée autobiographique, permet à un sujet de se souvenir des événements qu'il a personnellement vécus dans un lieu et à un instant donnés. C'est, par exemple, le souvenir de ce qu'on a mangé la veille ou la date d'un événement public marquant. La caractéristique la plus distinctive de cette mémoire épisodique c’est que l'individu se voit en tant qu'acteur des événements mémorisés. Par conséquent, le sujet mémorise non seulement l’événement qu'il a vécu, mais tout le contexte particulier de cet événement. De plus, la charge émotionnelle vécue par le sujet au moment des faits conditionne la qualité de la mémorisation épisodique. On considère, au sein de cette mémoire épisodique, que les informations suivent trois étapes qui sont l’encodage (inscription de l’information), le stockage (rétention de l’information) et la récupération (recherche de l’information). Avec l’âge, ce sont les étapes d’encodage et de récupération qui semblent devenir moins efficaces (Higginson & al., 2003). De plus, on assiste à certains phénomènes comme une diminution de l’attention sélective et une diminution de l’attention soutenue qui peuvent également rendre compte des difficultés de mémorisation. L’attention sélective correspond à l’action de centrer volontairement ses mécanismes de perception sur un stimulus particulier et de traiter activement cette information en négligeant les stimuli non pertinents. Cette fonction dépend de l'intégrité de la formation réticulaire activatrice et de ses voies ascendantes, du néocortex et du système limbique (Bérubé, 1991). L’attention soutenue correspond à la capacité de maintenir une performance sur une longue période de temps qui dépend du maintien de la vigilance, de la capacité de détection du stimulus et de la résistance à la distraction, donc du contrôle mental (ibid.). Le vieillissement serait associé à un dysfonctionnement des processus attentionnels inhibiteurs ce qui se traduit par la présence, en mémoire de travail (MT), d’informations distractrices pouvant interférer avec la réalisation d’une autre tâche en cours. Par rapport à des sujets jeunes, des individus plus âgés arrivent moins facilement à ignorer des informations non pertinentes lors d’une tâche cognitive

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12 complexe telle que la lecture et la compréhension de textes, ou la récupération d’informations en mémoire à long terme (MLT).

Le vieillissement affecte les capacités de la MT ce qui perturbe les sujets dans des tâches où ils doivent effectuer simultanément stockage et traitement (Marié et al., 1995). En se référant à Baddeley, on peut envisager une diminution de la capacité de l’administrateur central dans ses capacités à stocker et à traiter les informations. La mémoire de travail, quant à elle, permet d'effectuer des traitements cognitifs sur des éléments qui y sont temporairement stockés. Elle est plus largement impliquée dans des processus faisant appel à un raisonnement, comme lire, écrire ou calculer. C’est, par exemple, redonner, dans l'ordre inverse, une série d'items qui vient d'être énoncée.

Le vieillissement entraîne également une diminution de la vitesse de traitement de l’information. Le rappel de textes est moins bon chez des sujets âgés lorsque la présentation de ceux-ci a été faite de façon accélérée. Plus les sujets vieillissent et plus ils ont besoin de temps pour lire et comprendre des phrases, et d’autant plus selon leur densité propositionnelle (Chesneau et al., 2007).

Le contrôle exécutif joue un rôle dans le maintien de l’attention de façon soutenue sur de longues périodes de temps.

Le vieillissement normal s’accompagne d’une mosaïque de changements au sein desquels on observe la préservation de certaines fonctions cognitives comme le vocabulaire, la culture générale, le langage, la communication et les mémoires sémantique et procédurale, mais l’altération d’autres fonctions comme les mémoires épisodique et de travail, les capacités attentionnelles et les fonctions exécutives.

La mémoire de travail

La MT est traitée à part car nous ne la considérons pas comme un processus mnésique à part entière mais plutôt comme une interface entre les processus mnésiques et les processus exécutifs (Marié, 1999). Pour de nombreux auteurs, elle est étroitement liée aux fonctions exécutives et notamment par rapport à l’administrateur central (D’Esposito & Grossman, 1996). Baddeley (1986) utilise le modèle du SAS de Norman et Shallice (1980) pour définir cet administrateur central comme intervenant, avec deux autres systèmes esclaves, dans le

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13 fonctionnement de la MT. L’administrateur central fait alors référence non pas au premier niveau concernant les actions routinières, mais au deuxième niveau impliquant des actions nouvelles et les mises en place de stratégies. Le modèle du SAS avait été élaboré à l’origine à partir d’observations de patients frontaux ayant des performances déficitaires au niveau des capacités de planification et d’attention. C’est de par ces travaux qu’il nous parait plus adapté de voir la MT comme une interface entre les fonctions mnésiques et exécutives du fait que l’administrateur central lui-même soit à la fois mnésique et exécutif.

Il semble y avoir une atteinte de la MT au cours du vieillissement normal mais également au cours de la MP et ce, principalement à cause d’une atteinte de l’administrateur central.

Les processus exécutifs

Le trouble le plus fréquent dans le vieillissement est le ralentissement cognitif (Salthouse, 1996), mis en avant par de faibles performances à de nombreuses tâches cognitives et notamment celles relevant de la MT, de la vitesse d’exécution et des fonctions exécutives.

Les fonctions exécutives sont une des premières fonctions cognitives touchées par le vieillissement et il est généralement admis qu’on inclut notamment au sein des ces fonctions, la mémoire de travail et la planification. Les fonctions exécutives sont nécessaires pour initier de nouvelles séquences d’actions en inhibant les réponses habituelles (en fonction des exigences de l’environnement). Elles permettent de coordonner la réalisation simultanée de deux tâches, et elles permettent de maintenir son attention sur une longue période de temps. Le substrat neuronal des fonctions exécutives est attribué aux régions frontales et plus particulièrement au cortex préfrontal (CPF) et à sa région dorsolatérale. Avec l’âge, on observe certains changements neurobiologiques comme une atrophie cérébrale des lobes frontaux (Tisserand et al., 2002). Au niveau chimique, cela se traduit par une diminution de certains neurotransmetteurs au sein des lobes frontaux comme par exemple la diminution du taux de dopamine au sein du CPF .

De nombreuses études ont été menées et certaines d’entre elles ont montré, grâce à la résolution de la Tour de Londres, que des personnes adultes, de plus de 50 ans, en bonne santé manifestent des troubles de la planification (Andrès & Van Der Linden, 2000). D’autres

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14 études ont permis de préciser l’impact du vieillissement cognitif et son implication notamment au niveau des fonctions exécutives en montrant, avec deux groupes de sujets jeuneset plus âgés lors d’une tâche d’apprentissage de labyrinthe et lors de la résolution de la tour de Londres, que le groupe de sujets âgés a des difficultés caractérisées par un plus grand nombre de déplacements, par un temps de résolution plus long et par un plus grand nombre d’erreurs que le groupe des sujets jeunes (Boulanger et al., 2005). Ces résultats vont dans le sens d’un dysfonctionnement des fonctions exécutives lors du vieillissement normal.

Se référant à Norman et Shallice (1986), on envisage que ces difficultés au niveau des fonctions exécutives renvoient directement à un dysfonctionnement des lobes frontaux lors du vieillissement normal puisque pour eux, les fonctions exécutives sont sous la dépendance des lobes frontaux. Ces troubles exécutifs mis en avant chez les sujets âgés lors du vieillissement normal semblent indiquer des relations éventuelles avec des troubles plutôt d’origine frontale, que l’on retrouve dans la MP.

Pour de nombreux auteurs, les déficits cognitifs observables dans le vieillissement normal sont dus à la réduction normale du taux de dopamine nigro-striatal avec l’âge (Erixon-Lindroth et. al., 2005), ce qui s’observe avec l’imagerie morphologique (scanner, Imagerie par Résonance Magnétique = IRM, Tomographie par Emissions de Positrons = TEP), dans le sens où le vieillissement normal engendre une diminution de l’activation de certaines zones cérébrales dopaminergiques comme le putamen. Les zones dopaminergiques activés lors de tâches exécutives sont les mêmes chez les sujets jeunes et chez les sujets âgés, mais l’activation diminue quand l’âge des sujets augmente. La dopamine nigro-striatale (DNS) semble donc jouer un rôle essentiel au sein des fonctions cognitives. Ce rôle fonctionnel de la DNS dans les processus cognitifs a été mis en évidence par des expériences sur des animaux, notamment chez le singe, chez qui les lésions de cette voie dopaminergique entraînaient de multiples déficits en rapport avec les fonctions cognitives (mémoire, attention). Ce déclin des fonctions exécutives chez les singes augmente avec l’âge des animaux et leurs difficultés correspondent principalement à des erreurs de persévération (Moore et al., 2005). Chez les humains, l’administration d’agonistes à la dopamine (substances qui ont la même action que la dopamine) semble améliorer les performances cognitives alors que l’administration d’antagonistes dopaminergiques (substances qui s’opposent à l’action de la dopamine) semble diminuer les performances des sujets dans des tâches exécutives et concernant la mémoire de travail (Kimberg & D’Esposito, 2003). Ces résultats amènent à penser que la DNS est donc impliquée dans le vieillissement cognitif normal mais aussi dans le fonctionnement cognitif

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15 en général. En effet, des études menées avec des sujets âgés de 34 à 81 ans sur des tests cognitifs concernant la mémoire épisodique et les fonctions exécutives, laissent penser qu’il y a un rôle général du système dopaminergique sur les fonctions cognitives dans le vieillissement normal (Erixon-Lindroth & al., 2005). Un exemple révélateur de ce lien entre les fonctions cognitives et le système dopaminergique est représenté par la MP. En effet, la MP étant principalement caractérisée par un déficit dopaminergique en amont, il semble donc évident de trouver en aval un dysfonctionnement cognitif. Et si la MP n’était qu’une sorte de vieillissement normal mais qui se produit de façon accélérée ?

D’un point de vue purement cognitif, Stoltzfus, Hasher et Zacks (1996) ont mis en évidence un déficit des processus d’inhibition chez les personnes âgées. Cette recherche s’inscrit dans le cadre de la considération du contenu de la mémoire de travail – au lieu de sa capacité -, ce contenu étant plus ou moins lié au but de la tâche. Elle s’appuie sur des tâches très différentes, telles que le Stroop, des tâches d’identification de cibles visuelles, des tâches de lecture ou de compréhension de textes, des tâches de décision lexicale, et des tâches de « fan-effect ». Un déficit dans les processus d’inhibition gênerait la sélection des informations, et induirait un mécanisme de compétition entre informations pertinentes et non pertinentes, au sein des processus attentionnels.

Les difficultés que l’on peut rencontrer au sein du vieillissement pathologique et donc de la MP semblent être de même nature que celles observables lors du vieillissement normal, à une différence près, c’est qu’elles se retrouvent majorées. En plus de présenter les mêmes difficultés mais majorées, les parkinsoniens présentent également des difficultés cognitives spécifiques.

1.1.2. Caractéristiques de la maladie de Parkinson

C’est un médecin londonien du nom de James Parkinson (1755-1824) qui fut le premier à fournir une description cohérente de cette affection. Les principales anomalies anatomiques sont connues depuis le début du 20ème siècle, à savoir les inclusions neuronales qui sont décrites dès 1912 par Lewy et la présence de lésions au sein de la substance noire, soulignée en 1919 par Tretiakoff. L’essor de la neurochimie au début des années 1960 va permettre la découverte de la présence de dopamine dans le cerveau, et notamment dans le

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16 striatum, et son rôle de neurotransmetteur, ainsi que l’effondrement de ces taux de dopamine striataux et nigraux au cours de la MP. Parmi les nombreuses structures cérébrales lésées lors de la MP, se trouve notamment le noyau sous-thalamique mais aussi et surtout une structure appelée substance noire, un des éléments composant les ganglions de la base . Cet ensemble d’éléments est à l’origine de l’innervation dopaminergique du striatum (la voie nigro-striatale). L’action de la dopamine au sein de ce système est relativement complexe : ce sont les récepteurs dopaminergiques qui jouent un rôle important dans la MP car ils sont le site d’action de la dopamine. Il est généralement admis que la dopamine joue un rôle de régulation important au niveau des fonctions motrices et limbiques. Mais l’altération des fonctions cognitives et notamment exécutives dans la MP suggère également ce rôle de régulation de la dopamine au niveau de ces fonctions.

Au niveau anatomique, deux types de lésions cérébrales sont observables au cours de la MP à savoir, la mort neuronale et la présence de corps de Lewy. Ces types de lésions prédominent dans la substance noire et plus particulièrement au niveau des neurones dopaminergiques. La principale anomalie neurochimique de la MP est donc le déficit en dopamine striatale, résultant de l’atteinte sévère de la voie dopaminergique nigro-striée ( la voie entre la substance noire et le striatum). Même si d’autres systèmes peuvent être lésés comme les systèmes noradrénergique, sérotoninergique et cholinergique, les principales modifications neurochimiques de la MP concernent le déficit dopaminergique. Les principales atteintes des parkinsoniens sont donc avant tout au niveau moteur, mais également au niveau cognitif. En effet, de nombreuses études menées avec des parkinsoniens montrent que la plupart des patients présentent des troubles neuropsychologiques dès le début de la maladie. Cependant, toutes ces études insistent sur la variabilité interindividuelle importante. Il semble en effet assez difficile de pouvoir réunir un groupe uniforme de patients et ce, malgré des critères stricts de sélection. La démodulation striatale, provoquée par le déficit dopaminergique, s’exprime surtout par son influence sur l’activité des lobes frontaux car il existe de nombreuses connexions entre ces deux structures et notamment cinq circuits fronto-striataux dont un circuit moteur impliqué dans le contrôle du mouvement, un circuit oculomoteur et trois circuits impliqués dans des activités cognitives (Alexander et al., 1986). L’essentiel des perturbations cognitives de la MP se retrouve donc principalement au niveau de la mémoire de travail, des fonctions exécutives et du langage (Marié et Defer, 2003).

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La motricité

Les mouvements de notre corps sont habituellement contrôlés par la substance chimique appelée Dopamine. Cette substance transmet des signaux entre les nerfs de notre corps et notre cerveau. Lorsque les cellules qui produisent normalement la Dopamine meurent, les symptômes de la Maladie de Parkinson (MP) se manifestent. La MP est donc une affection neurodégénérative qui se caractérise par la présence d’une triade d’éléments, s’associant de manières différentes, qui sont un tremblement au repos, une akinésie (soit hypokinésie c'est-à-dire disparition ou rareté des mouvements, soit bradykinésie c'est-à-dire lenteur dans l’exécution des mouvements), et d’une hypertonie (résistance uniforme aux mouvements passifs). Ces difficultés motrices, dues à la réduction du taux de dopamine, observables chez les parkinsoniens ne se retrouvent généralement pas chez les adultes sains du même âge et ce, malgré la diminution de ce taux observable également chez eux.

Les processus mnésiques

Des déficits de mémoire sont fréquemment rapportés chez les parkinsoniens : les épreuves qui évaluent la mémoire à court terme (comme les tâches d’empan endroit qui évaluent la capacité du sujet à mémoriser puis redonner une succession de plus en plus importante d’items) sont généralement préservées mais leurs performances sont déficitaires en rappel et ce, lorsque les procédures nécessitent l’inhibition de stimuli concurrents comme c’est le cas dans le paradigme de Brown-Peterson (Cooper & Sagar, 1993 ; Marié et al., 1995). Dans des tâches qui évaluent la mémoire à long terme, les performances des parkinsoniens sont généralement déficitaires en situation de rappel libre mais elles sont nettement améliorées par l’indiçage et la reconnaissance (Dubois et al., 1991 ; Pillon et al., 1993). Les parkinsoniens présentent le même profil mnésique que des sujets frontaux, à savoir un défaut de récupération des informations stockées en mémoire. Dans les tâches de mémoire implicite, dans lesquelles l’acte de mémoire durant le rappel est inconscient, les résultats sont déficitaires et notamment dans des épreuves de complètement de mots (Pascual-Léone et al., 1993).

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La mémoire de travail

Les épreuves qui évaluent la mémoire de travail (MT) sont déficitaires et ce, même en l’absence de toute détérioration intellectuelle globale (Bradley et. al.,1989). Les parkinsoniens présentent souvent un effet de primauté diminué, contrairement à un effet de récence qui est préservé (Marié et al., 1995). Cooper et al. (1991) avaient mis en avant le fait que les parkinsoniens présentaient, en début de maladie, une préservation du rappel immédiat d’items mais des difficultés au niveau du contrôle attentionnel ou du traitement d’informations supplémentaires (lorsqu’il y a une charge supplémentaire en mémoire) ce qu’ils interprétaient comme le fait que ce ne soit pas la mémoire de travail dans son ensemble qui soit atteinte mais plutôt un dysfonctionnement d’une unité particulière de la MT qu’ils comparent à l’administrateur central. En effet, Bradley & al. (1989) avaient montré que des tâches de MT mettant en jeu la manipulation de données visuo-spatiales étaient particulièrement difficiles à réaliser pour les parkinsoniens et non pas à cause d’une diminution de leur capacité de stockage des informations mais par rapport à un défaut du traitement de ces informations. La MT ne semble donc pas déficitaire de la même façon au cours de l’évolution de la maladie. En effet, en début de pathologie, lorsque le déficit de dopamine n’est pas encore très important, le dysfonctionnement de la MT n’est pas général. Plus le déficit dopaminergique prend de l’importance, plus la maladie évolue, et plus le dysfonctionnement de la MT s’étend. Il semble donc que la qualité du fonctionnement de la MT soit liée à la dopamine. Une étude menée sur trois groupes de parkinsoniens présentant des troubles cliniques sévères, modérés ou nuls, montrent que les déficits en MT verbale, visuelle et spatiale sont corrélés positivement au degré clinique des troubles, ce qui montre que l’atteinte de la MT dépend de la gravité des troubles cliniques et donc de la progression de la perte dopaminergique (Owen & al., 1997).

Les processus exécutifs

Le terme de fonctions exécutives renvoie à plusieurs fonctions qui impliquent des processus cognitifs de haut niveau sous-tendus par des systèmes neuronaux importants dont les lobes frontaux (Allain & al., 2005). Une part importante des fonctions exécutives renvoie aux processus de planification. Si on se réfère à Luria (1978), la planification renvoie aux habiletés qu’ont les individus à adapter leurs comportements en fonction des différents buts qu’ils rencontrent. La planification est généralement définie comme une succession de

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19 séquences d’opérations afin de parvenir à un but et les déficits de planification sont en relation directe avec un dysfonctionnement des lobes frontaux (Allain & al., 2005). Chez les parkinsoniens, qui présentent un dysfonctionnement frontal de par le déficit dopaminergique nigro-striatal, leurs performances liées aux tests exécutifs sont généralemnt altérées (Dubois & al., 1991 ; Carbon & Marié, 2003). Des déficits sont plus spécifiquement observables au sein de tests évaluant la flexibilité mentale comme l’épreuve du Wisconsin ou du Stroop (Cools, 1984 ; Brown & Marsden, 1990), mais également au niveau de la planification (Taylor et al., 1990 ; Owen, 1997). Les déficits des fonctions exécutives sont généralement mis sur le compte de la démodulation des lobes frontaux (Taylor et al., 1990, Owen, 1997 ; Marié, 1999). Cooper et al. (1991), ont en effet montré que les sujets parkinsoniens étaient moins performants que des témoins appariés sur des épreuves renvoyant à l’ensemble des fonctions exécutives.

Des difficultés peuvent apparaître de façon précoce au cours de la MP et ce, au sein de certains domaines spécifiques de la cognition et notamment au niveau des fonctions visuo-spatiales, de la mémoire de travail (MT) et des fonctions exécutives et frontales (Brown et Marsden, 2003). Bien sûr, la détérioration de ces fonctions est plus importantes que celles observables au sein du vieillissement normal puisqu’il est question d’une pathologie neurodégénérative. Cependant, des études comparatives menées sur des patients Parkinsoniens non déments en début de pathologie (déficit dopaminergique) et des patients Alzheimer non déments en début de pathologie (déficit cholinergique) montrent que les détériorations au niveau des fonctions frontales sont plus importantes chez les parkinsoniens alors que les Alzheimer présentent un syndrome aphaso-apraxo-agnosique que les parkinsoniens n’ont pas. Les troubles généralement considérés comme particuliers à la MP sont des difficultés de rappel mnésique mais qui sont facilitées par l’indiçage, une diminution de la fluence verbale, des difficultés dans le domaine visuo-spatial, une altération des capacités à générer et maintenir une stratégie opérationnelle, et un ralentissement mis en évidence par des épreuves de temps de réaction retentissant sur la performance de tous les tests limités dans le temps quels que soient leurs contenus. Les difficultés des parkinsoniens font partie d’un ensemble de difficultés que l’on retrouve au sein d’un syndrome frontal.

Aucun désordre important n’affecterait les processus de perception, et notamment la localisation relative des objets dans l’espace (Taylor et Saint-Cyr, 1995). En fait, plus que les déficits d’ordre visuo-spatial, les déficits les plus caractéristiques pour les Parkinsoniens -et

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20 donc pour le syndrome frontal - concerneraient des difficultés dans la manipulation des informations en mémoire de travail (Goel et Grafman, 1995 ; Goel et al., 2001 ; Koerts et al., 2009). En particulier, un manque de flexibilité interviendrait quand les patients sont confrontés à de nouvelles situations alors que, les processus de planification et d’inhibition resteraient intacts ( Taylor et Saint-Cyr, 1995 ; Koerts et al. 2009). Enfin, Muslimovic et al. (2007) mentionnent des déficits en mémoire déclarative, qui seraient plus particulièrement dus à un déficit dans les liens entre mémoire déclarative et apprentissage procédural. Le problème restant étant de mieux caractériser les liens entre procédures et traitements exécutifs.

1.1.3 Planification, résolution de problème, apprentissage

Le concept de planification classiquement utilisé dans les travaux sur le vieillissement normal et pathologique, qui se réfèrent au problème de la tour de Hanoï et de ses variantes, s’inscrit dans la lignée classique des travaux de Simon et Anderson ( Anzai et Simon, 1979 ; Anderson, 1993). Le principe général est de transformer un but en une série de sous-buts hiérarchisés.

Pour Altman & Trafton (2002), la notion de but renvoie à la représentation mentale d’une intention d’accomplir une tâche. Dans la ToH, l’individu en situation de résolution garde en mémoire le but final, qui est de réaliser la pile de disques sur le piton C, tout en réalisant successivement les buts intermédiaires qui y mènent. La résolution de la tâche passe donc par la planification des sous-buts. Selon Cohen (1989), les individus confrontés au problème de la ToH prennent un moment de réflexion pour voir ce qu’il y a à faire, sur la meilleure façon d’arriver au but final, tout en envisageant le temps et l’effort qu’ils vont devoir allouer à cette tâche. Les individus vont donc utiliser leurs ressources cognitives et leur mémoire pour formaliser des plans d’action, pour retenir des éléments et des séquences d’assemblages du plan, pour évaluer, réviser, et mettre en pratique ces plans. Pour Anderson (Anderson et al., 2002), la planification intervient dans nos vies de tous les jours : planifier un travail à faire, une soirée, une route de vacances, l’organisation d’un mémoire de recherche…. La planification intervient également lorsqu’il faut résoudre un problème nouveau et complexe du type ToH. Dès 1975, Simon introduit la ToH comme une tâche pour étudier la planification et les mécanismes cognitifs de haut niveau. De nombreux travaux ont mis en avant le rôle du cortex frontal dans les mécanismes de planification. Un des plus récents est

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21 celui d’Anderson et. al. (2002) à l’aide de l’IRMF (imagerie par résonance magnétique fonctionnelle). Avant eux, d’autres auteurs se sont intéressés à la question.

Comme l’ont montré Goel et Grafman (1995, 2001), les parkinsoniens non déments, lors de la résolution de la tour, ont des difficultés pour mettre en place correctement une succession d’étapes intermédiaires (c'est-à-dire de planifier une série de sous-buts hiérarchisés) pour arriver au but final, qui est de placer la pile de disques sur le piton C. Ces déficits semblent ne pouvoir être observables que lorsque la pile de disques de la ToH se compose d’au moins quatre éléments, c'est-à-dire seulement lorsque la résolution du problème devient plus complexe (Brennan, Welsh et al., 1997). Les différents travaux faits avec la ToH comme test évaluant les capacités de planification ont permis de mettre en avant l’existence d’étapes stratégiques de la résolution. Ces recherches ont permis notamment de pouvoir représenter la résolution de la ToH sous forme d’un graphe de comportement retraçant les différents cheminements possibles que le sujet peut mettre en place lorsque il exécute le problème.

Allport et Ward (1997) ont étudié la mémoire de planification en se penchant sur les différentes façons possibles de résoudre le problème de la tour de Londres et ce, en relevant principalement des variables comportementales comme le temps nécessaire à la résolution, le nombre d’erreurs et le nombre de manipulations pour arriver à la solution. Ils ont réalisé trois manipulations, avec le problème de la tour de Londres (ToL), de complexité croissante dans le but de définir des unités de planification appropriées à la résolution. Ils décrivent l’existence d’étapes spécifiques à la résolution et notamment deux catégories principales de sous-buts (« subgoals ») : les « subgoal moves » qu’ils définissent comme des mouvements essentiels pour la résolution du problème mais qui ne peuvent placer un disque à l’endroit voulu par le sujet sans bouger préalablement un disque bloquant ; et les « subgoal chunks » qu’ils définissent comme des séries consécutives de « subgoal moves » nécessaires pour placer un disque dans la position voulue par le sujet. Ces expériences ont permis de montrer que l’ensemble des buts pour aller du départ de la ToL au but final peut être divisé en une série de « subgoal chunks » où chacun d’entre eux demande un certain nombre de « subgoal moves ». De plus, tous les « subgoal chunks » ne semblent pas avoir le même statut : ils diffèrent selon le nombre et la difficulté des « subgoal moves » qui les composent. Pour les auteurs, le nombre de mouvements à effectuer pour trouver la solution et le nombre de

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22 « subgoal chunks » qui composent la tour sont les meilleurs prédicteurs du temps de réalisation et du nombre d’erreurs : plus le nombre de « subgoal chunks » augmente (selon le nombre de disques qui composent la tour), c'est-à-dire plus la tâche se complexifie, et plus le nombre de mouvements nécessaires à la résolution augmente ainsi que le temps d’exécution et le nombre d’erreurs. Les « subgoal chunks » sont des unités mentales qui jouent un rôle prépondérant dans le processus de planification, tout comme le degré de complexité de la tâche.

Fireman (1996) s’est intéressé à la résolution de la ToH chez des enfants (136) âgés de 6 à 8 ans. La qualité de la performance des enfants est analysée grâce à différents points : la position du premier mouvement c’est-à-dire le déplacement du premier disque, le plus petit ; le nombre et la localisation des erreurs ainsi que la fréquence et la localisation des mouvements optimaux. Les résultats indiquent que les changements qualitatifs des représentations du problème par les sujets sont un aspect important de la réussite. Fireman détaille plus finement ces résultats en divisant diagonalement l’espace de problème selon la profondeur de traitement que nécessite la tâche. Mais ce n’est pas seulement qualitatif car au sein d’une même profondeur de traitement on peut observer différentes étapes. Fireman divise alors horizontalement l’espace de problème définissant ainsi trois sections. Chacune des sections représente une « sous tâche » essentielle durant la résolution et nécessaire pour parvenir à la solution. La première section représente les premières manipulations des disques sans que le sujet se trouve face à un obstacle ; la deuxième section représente les déplacements possibles qui rempilent les deux disques les plus petits ; et la troisième section implique le déplacement du disque le plus grand. Ces deux découpages, en diagonale et horizontalement, de l’espace de problème ont permis à Fireman de suggérer que la résolution du problème dépend plus d’un développement de stratégies, au sens où elles se construisent, que d’une sélection de stratégies pré-existantes, stockées en mémoire et récupérées comme telles. Selon ces résultats, le premier mouvement c’est-à-dire le déplacement du premier disque n’est pas crucial pour la bonne résolution du problème. De plus, la profondeur de traitement n’est pas le facteur essentiel qui mène à la solution mais ce serait plutôt l’organisation des séquences d’action au sein des mêmes profondeurs de traitement qui serait importante pour la résolution.

Caron-Pargue (Caron-Pargue et al., 1987, 1989 ; Bégoin-Augereau et Caron-Pargue, 2009) avait déjà défini des étapes stratégiques de la résolution de la ToH mais en s’appuyant principalement sur des variables verbales c'est-à-dire en utilisant les verbalisations des sujets,

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23 recueillies pendant la résolution. Elle décrit également deux types de sous-buts, dans une ToH à quatre disques, les « buts » et les « lots », qui sont des étapes spécifiques de la résolution. Les buts sont au nombre de quatre : le but 3 (B3) qui est obtenu lorsqu’il y a une libération des pitons B ou A de façon à permettre le positionnement du grand disque (le noir) sur le piton C ; le but 4 (B4) qui est obtenu lorsque le disque noir vient se placer sur le piton C ; le but « disque trois sur disque quatre » (B34) qui est obtenu lorsque le disque 3 (jaune) vient se placer sur le disque noir, et le but disque 1 sur disque 2 (B12) qui est obtenu lorsque les quatre disques se retrouvent placés sur le piton C. Les lots sont également au nombre de quatre : le lot 3 obtenu lorsqu’il y a libération et déplacement du troisième disque, jaune, aboutissant à le déplacer d’un piton à un autre (L3), et ne réalisant pas forcément le sous-but B3 ; le lot 4 (L4) qui est obtenu lorsqu’il y a libération et déplacement du disque noir aboutissant à le déplacer d’un piton à l’autre, mais ne réalisant pas forcément le sous-but B4 ; le lot « disque 3 sur disque 4 » (L34), obtenu lorsqu’il y a libération et déplacement du disque jaune aboutissant à le placer sur le disque noir ; et le lot « disque 1 sur disque 2 » (L12), obtenu lorsqu’il y a déplacement des disques vert et rose sur la pile formée des disques jaune et noir.

L’approche de Caron-Pargue permet non seulement de prendre en compte les étapes élémentaires qui permettent de réaliser les « subgoal chunks » mais également de rendre compte de l’articulation des « subgoal moves ». En effet, ce que Allport appelle « subgoal chunk » est à rapprocher de ce que Caron-Pargue appelle « lot », et ce que Allport appelle « subgoal move » est à rapprocher des trois notions « d’étalement-regroupement-substitution » définis par Caron-Pargue. Les étalements, regroupements et d’étalement-regroupement-substitutions sont en lien avec différents contextes de déplacements des disques 1 et 2 (les deux plus petits, rose et vert). L’étalement est ce qui arrive lorsque ces deux disques, initialement sur le même piton, sont étalés par le sujet sur deux pitons distincts pendant la résolution de la tour. Le regroupement est ce qui arrive lorsque ces deux disques sont de nouveau rassemblés sur le même piton. La substitution c’est ce qui arrive lorsque les deux disques sont déplacés par le sujet tout en restant sur deux pitons distincts (par exemple quand le rose va sur un piton et que le vert se met alors où était le rose).

La description fine de la résolution de la ToH à quatre disques, et notamment la résolution optimum, est donc décrite grâce au schéma représentant le graphe des comportements dans lequel se retrouvent ces notions de sous-buts. Ce graphe est intéressant car il permet de rapprocher les notions de buts et de lots des notions de « subgoal chunks » et de « subgoal moves » alors que ces concepts sont issus de deux cheminements bien différents : l’un se base sur un versant comportemental (Allport & Ward, 1997) et l’autre se

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24 base sur un versant verbal pour lequel un marqueur linguistique constitue la trace sémiotique de la constitution on-line de cette unité cognitive (Caron-Pargue et al., 1988, 1989). De ce fait, malgré leur rapprochement possible, ces deux approches ne peuvent être assimilées.

1.1.4 Conclusion

En conclusion de ce chapitre, on peut remarquer que les travaux sur le vieillissement pathologique et normal se limitent pour la plupart à une conception de la planification en termes de performance, reliée à une déficience des fonctions exécutives. De ce fait, ils n’utilisent qu’une fraction des possibilités offertes par les travaux de la résolution de problème. Ce sont ces possibilités que nous avons voulu développer. Elles font appel à une approche beaucoup plus fonctionnelle, qui met en jeu une analyse par sections, ou/et une analyse des processus représentationnels, constitutifs de la construction des chunks ou unités cognitives de traitement de l’information. Notre ligne de réflexion est qu’elles pourraient être prises en compte pour caractériser les processus cognitifs qui donnent lieu en fait à l’éventail de déficiences habituellement observées, comme le mentionnent certains travaux récents.

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Chapitre 1.2 : Prise en compte des verbalisations

Le langage et la cognition sont liés par des mécanismes complexes qui nous permettent de penser que le langage est une condition nécessaire au développement de certains processus cognitifs (Carruthers, 2002).

L’objectif de ce chapitre est de prendre en compte, au sein des verbalisations simultanées produites par différents sujets au cours de la résolution du problème de la ToH, certaines formes linguistiques représentant la trace d’opérations énonciatives dont l’interprétation cognitive peut nous permettre de détailler, au même titre que des indices comportementaux, les mécanismes d’apprentissage mis en jeu lors de la résolution d’un problème.

Le modèle énonciatif de Culioli (1990, 1999) propose l’existence d’un niveau de structuration spécifique intervenant lors de la linéarisation des énoncés. Il conçoit les composants linguistiques comme des déclencheurs de représentations, des marqueurs d’opérations mentales et non pas comme des structures stables au sein d’un énoncé.

D’autres travaux en psycholinguistique (Caron-Pargue & Caron, 1989, 2000 ; Bégoin-Augereau et Caron-Pargue, 2002), menés sur des sujets normaux (exempts de pathologie) ont permis de déterminer les marques linguistiques correspondant aux réorganisations de la représentation cognitive. Selon ces travaux, certaines marques linguistiques apparaissent comme des traces d’opérations des locuteurs sur leurs représentations, et comme des instructions procédurales concernant la construction de la représentation chez les auditeurs.

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26 Notre idée est que ces différents travaux peuvent nous permettre d’observer des différences lorsqu’il s’agit de sujets pathologiques comme des Parkinsoniens.

1.2.1. Le langage, de la normalité au pathologique

1.2.1.1. Le vieillissement normal

La plupart des travaux réalisés concernent l’étude du langage oral au cours du vieillissement normal. Dans la plupart des cas, il s’agit soit du langage descriptif (qui renvoie à des tâches où on demande aux sujets de décrire une image représentant une scène de la vie quotidienne), soit du langage narratif (qui renvoie à des tâches dans lesquelles on demande aux sujets de s’exprimer par rapport à un événement personnellement vécu).

Cooper (1990) à travaillé sur le langage descriptif. Il a demandé à des sujets âgés de 20 à 80 ans de décrire verbalement une série d’images en les regardant. Aucune relation significative n’apparaît entre l’âge des sujets et le nombre de mots verbalisés durant la description, ni entre l’âge des sujets et la fluidité verbale du texte produit, c’est-à-dire pas de différence significative concernant le nombre de pauses, les interjections et les autocorrections. Cependant, il objective une augmentation significative, chez les sujets âgés, du nombre de paraphasies ainsi que de la durée des pauses. Pour Cooper, ces différences s’expliquent plus par des difficultés de dénomination chez les sujets âgés c'est-à-dire des difficultés d’accès lexical engendré par le ralentissement cognitif global dû à l’âge.

Mc Namara et al. (1992), toujours avec des tâches de description d’images, n’objectivent pas de différence significative entre des sujets jeunes (30 ans) et âgés (70 ans) et ce, concernant le nombre de mots produit pour décrire l’image et les auto-corrections. La diversité du lexique semble rester assez stable au cours du temps et pourrait même s’améliorer (selon l’expérience et les connaissances plus ou moins importantes des sujets âgés). Par contre, même si la longueur moyenne des énoncés reste la même, le nombre de propositions par énoncés est significativement moins important chez les sujets âgés que chez les jeunes.

Concernant les travaux sur le langage narratif, Kemper et al. (1990) mènent une étude avec des sujets âgés de 60 à 90 ans à qui ils demandent de raconter une histoire personnelle (mariage, naissance des enfants…). Leurs résultats n’objectivent pas de différence

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27 significative entre les groupes d’âge concernant la fluence du discours (nombre de mots produits) et les connaissances lexicales (vocabulaire).

Hupet et al. (1992) réalisent une étude avec des sujets francophones jeunes (22 ans) et âgés (70 ans) à qui ils demandent de dire ce qu’ils pensent des programmes télévisuels. Ces groupes ont été sélectionnés à partir de leurs résultats à différents tests cognitifs comme des épreuves d’empan et des similitudes (items de l’échelle de la WAIS). L’analyse des 200 premiers mots de chaque échantillon à été réalisée indiquant que les sujets âgés produisaient en moyenne des énoncés plus longs que les sujets jeunes mais que ces derniers émettaient significativement plus d’interjections (« hein », « quoi »…) que les sujets âgés.

D’après ces différents travaux, la diversité lexicale ne diminue pas avec l’âge mais il y a une augmentation des paraphasies, des termes vagues, au sein de la production du langage spontané. Certaines fonctions linguistiques ne se modifient pas avec l’âge alors que d’autres diminuent. Mais les bonnes capacités langagières des âgés, objectivées dans ces études, ne sont-elles pas uniquement le reflet de bonnes capacités cognitives et mnésiques (tests de sélection des sujets). Hasher et Zacks (1988) pensent qu’une explication limitée à la simple notion de capacité néglige l’impact des aspects sociaux et affectifs, ainsi que des objectifs et intérêts qui y sont liés, sur les différences de traitement cognitif entre sujets jeunes et âgés. Très souvent, aucune différence significative n’est trouvée entre Jeunes et Agés, par exemple dans les associations intervenant dans des tâches diverses (production de mots, tâches de « priming », activation d’homographes). Dans certains cas, les Agés montrent même une plus grande capacité de « priming » que les Jeunes. Lorsque des différences sont observées, les variations dépendent des conditions de la tâche, aussi bien chez les Jeunes que chez les Agés. Les auteurs expliquent les faits en termes de processus d’inhibition, mais pensent qu’une meilleure caractérisation on-line des processus cognitifs qui interviennent dans le cadre d’une tâche particulière serait nécessaire pour clore le débat.

1.2.1.2 - Le vieillissement pathologique

Pour Mc Namara et Durso (2003) les habiletés de communication pragmatique (capacité à adapter son langage en fonction du contexte communicatif) dépendent de l’intégrité des lobes frontaux. En effet, ils montrent que les scores déficitaires des parkinsoniens sur certaines de ces épreuves d’habiletés pragmatiques sont corrélées significativement aux résultats obtenus aux tests frontaux du Stroop (dire la couleur de l’encre

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28 avec laquelle le mot est écrit et non pas lire ce mot) et de la tour de Londres (reproduire une configuration donnée à l’aide des disques en un minimum de coups). Pour eux, les déficits significatifs des parkinsoniens en ce qui concerne les habiletés pragmatiques sont à mettre en rapport avec leurs performances frontales déficitaires. Ainsi, ils montrent que des sujets parkinsoniens obtiennent significativement de moins bonnes performances que des sujets contrôles sur des épreuves verbales qui concernent l’initiation de la conversation et les temps de pause entre les phrases. Selon leurs résultats, les parkinsoniens mettent plus de temps à initier la conversation et les temps de pause sont plus longs que pour les sujets appariés.

L’élaboration d’un plan d’action, activité sous la dépendance des lobes frontaux, est fréquemment évaluée par des tâches dites de fluence verbale. Lors de ces tâches, on demande aux sujets de citer le plus possible de mots commençant par une lettre donnée (fluence phonémique) ou appartenant à une catégorie sémantique définie (fluence sémantique)et ce, dans un temps précis (le plus souvent 60 secondes). Ces mesures sont assez sensibles et les fluences phonémiques sont généralement perturbées lors de dysfonctionnement frontaux. En effet, celles-ci nécessitent le déploiement et le maintien de stratégies de récupération plus importantes que dans le cas de fluence sémantique.

D’autres types de tâches verbales s’appuient par exemple sur la fluence verbale. Des études d’imagerie chez des sujets sains ont montré une activation du cortex préfontal lors de tâches de génération de verbes et notamment lorsqu’il s’agit de verbes d’action ce qui démontre l’implication du lobe frontal dans des épreuves de restitution de verbes.

Peran et al. (2003), montrent que les sujets parkinsoniens ont des performances significativement moins bonnes que les sujets contrôles sur des tâches de fluence verbale et notamment dans le cas de génération de verbes. Les parkinsoniens produisent significativement moins de verbes en une minute que les sujets sains. Pour eux, ces performances moindres sont dues au fait que ces tâches de génération de verbes sont sous la dépendance des lobes frontaux et préfrontaux lesquels sont en dysfonctionnement chez les sujets parkinsoniens. Colman (Colman et al., 2009) suggère que la déficience des

Parkinsoniens dans la production de verbes est due à une déficience des fonctions exécutives,

notamment dans l’automaticité de leur traitement, automaticité qui caractérise notamment les sujets sains. La déficience dans l’automaticité serait une conséquence directe du déficit dopaminergique qui caractérise les Parkinsoniens.

Lee et al. (1989) ont comparé les performances de sujets parkinsoniens à celles de sujets sains appariés lors de tâches de fluence verbale phonémique, sémantique et alternée.

(30)

29 Cette dernière consiste à demander aux sujets de produire alternativement un mot d’une catégorie puis d’une autre catégorie (un mot qui commence par la lettre « P » puis un mot qui commence par la lettre « S », ou alterner un nom d’animal et un nom de légume). Alors qu’ils observent un déficit fluctuant aux épreuves de fluence phonémique et sémantique, ils montrent un déficit constant à l’épreuve de fluence alternée. Ce type d’épreuve engendre une mobilisation plus importante des ressources de traitement et permet de voir que les parkinsoniens ont plus de difficultés à utiliser spontanément des stratégies efficaces de recherche en mémoire

Illes et al. (1988) mentionnent que les Parkinsoniens produisent moins de modalisations et moins d’interjections que les sujets contrôles dans des situations de discours spontanés.

Plus récemment, Holtgraves et al.. (2010) établissent que, chez les Parkinsoniens, la complexité linguistique (mesurée en termes de production de verbes, de mots fonctionnels et de longueur de phrase) diminue à mesure que l’asymétrie du symptôme moteur augmente, ce qui relève d’un dysfonctionnement de l’hémisphère droit.

1.2.2. La prise en compte des verbalisations

Ericsson et Simon (1980, 1984, 1993) élaborent un modèle de traitement de l’information qui fournit un cadre théorique essentiel à l’analyse des verbalisations. La caractéristique principale de ce modèle est qu’il relie les verbalisations à un modèle mnésique et plus particulièrement à la mémoire à court terme, dans lequel seuls les traitements focalisés de type attentionnel (heeded activity) sont repérables. Pour les auteurs, les verbalisations simultanées expriment le contenu de la mémoire à court terme et elles ne peuvent pas rendre compte des processus automatisés qui dépendent de la mémoire à long terme. Ericsson et Simon (op.cit.) évoquent trois niveaux possibles de verbalisations durant la réalisation d’une tâche cognitive. Ces niveaux renvoient aux registres sensoriels, à la mémoire à court terme et à la mémoire à long terme dans le but de montrer la part essentielle de la mémoire de travail, où est stockée l’information immédiate.

Les informations proviennent d’un des trois niveaux, c’est-à-dire soit de la perception, soit de la mémoire à long terme, soit d’un traitement de l’information précédente et sont représentées sous forme de chunks qui se succèdent dans la mémoire à court terme. La production verbale permet d’exprimer verbalement, selon ce modèle, le contenu de la

Figure

Tableau 211 : Données démographiques et cliniques des patients parkinsoniens et des sujets contrôles âgés  (moyenne+- écart type)
Figure 2.1.2 : le problème de la ToH
Fig. 2.1.5.1a.  Graphe des états. Cas de la Tour de Hanoï
Fig. 2.1.5.1b. Positionnement des différents sous-buts B3, B4, B34, B12 sur le  graphe des états
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