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Conventions réglementées et intérêt social en droit comparé (Liban, France, USA)

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Academic year: 2021

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Texte intégral

(1)

(École doctorale de droit)

UNIVERSITÉ ST-JOSEPH (BEYROUTH)

(Faculté de droit et des sciences politiques)

Thèse en cotutelle

CONVENTIONS RÉGLEMENTÉES ET INTÉRÊT SOCIAL

EN DROIT COMPARÉ

(Liban Ŕ France Ŕ USA)

Thèse de Doctorat en droit

présentée et soutenue publiquement

le 4 mars 2011 par

Saba K. ZREIK

Jury:

M. Philippe MERLE

: Directeur de thèse

Professeur émérite de l'Université Panthéon – Assas (Paris II)

M. Richard CHEMALY

: Co-directeur de thèse

Professeur à la Faculté de droit et des sciences politiques (USJ, Beyrouth), Doyen honoraire.

M. Jean-Jacques DAIGRE :

Professeur à l’École de droit de la Sorbonne (Paris I)

M. Georges NAFFAH

:

Professeur à L’Université Libanaise, École doctorale, (Filière francophone de droit)

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L'UNIVERSITÉ PANTHÉON – ASSAS (PARIS II), École doctorale de droit, et L’UNIVERSITÉ ST-JOSEPH (BEYROUTH), Faculté de droit et des sciences politiques n'entendent donner aucune approbation ni improbation aux opinions émises dans cette thèse ; ces opinions devront être considérées comme propres à leurs auteurs.

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REMERCIEMENTS

Je tiens à exprimer ma sincère gratitude à mes éminents professeurs : Philippe Merle, qui, voilà plus de trente cinq ans, a éveillé en moi un penchant certain pour le droit des sociétés, qui est devenu par la suite mon pain quotidien, et Richard Chemaly, qui m’avait suivi dans mes travaux pratiques en droit commercial, consolidant aussi ce penchant, d’avoir bien voulu accepter de co-diriger ma thèse.

Je remercie également ma famille (épouse, enfants et petits-enfants) d’avoir toléré que je vaque à cette entreprise au prix de maintes privations qu’elle a dû subir.

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Résumé

L’intérêt social est la raison d’être principale de la règlementation des conventions réglementées. Il est délimité par des intérêts voisins et par l’intérêt personnel abrité par ces conventions, dont le jeu conflictuel peut léser la société. L’existence d’un conflit et de sa justification peuvent être présumées. L'intérêt social est désormais celui de l’entreprise vue dans son contexte économique large. Un intérêt de groupe est distinctement reconnu. La qualification des conventions sert à identifier celles qui doivent être contrôlées. La mise en œuvre de la protection de l’intérêt social s’opère à travers la prévention des conflits d’intérêts, moyennant une révélation de l'intérêt personnel. Cette révélation déclenche la procédure d'appréciation par les organes sociaux concernés. Des garanties législatives et jurisprudentielles assurent la primauté de l’intérêt social, par la limitation de l’exercice de certains droits et par l’application judiciaire stricte du respect des obligations légales qui pèsent sur les intéressés. La convention frauduleuse est nulle. Celle non autorisée qui est préjudiciable à la société est annulable; et ses conséquences sont supportées par l’intéressé qui engage sa responsabilité civile et même parfois sa responsabilité pénale. La comparaison du traitement de ce sujet dans les trois systèmes juridiques libanais, français et américains a dévoilé des failles dans les deux premiers ; des projets de réforme sont proposés.

Descripteurs

Intérêt personnel, équité intrinsèque, jugement d’affaires, rémunération, avantage particulier, commission aux conventions, qualification, révélation, rapport spécial, obligation fiduciaire, transparence, responsabilité, ABS.

Title

Related party transactions and corporate interest in comparative law (Lebanon, France, USA).

Abstract

The corporate interest is the main reason behind the regulation of related party transactions. Its limits are defined by similar interests and the personal interest embodied in these transactions. The inter-action of these conflicting interests may harm the company. The existence of a conflict and of its justification may be presumed. The corporate interest is from now on that of the enterprise seen within its wide economic context and the interest of a group of companies is distinctively acknowledged. The qualification of those transactions helps identify those that are subject to scrutiny. The protection of the corporate interest is achieved by the prevention of the conflicts of interests through the disclosure of the personal interest. This disclosure triggers the concerned corporate bodies’ evaluation process. Legislative and jurisprudential guarantees ensure the predominance of the corporate interest through limitations on the exercise of certain rights and a strict judicial enforcement of legal duties laid on the interested party. The fraudulent transaction is void. The unauthorized one that is damaging to the company is voidable and its consequences are assumed by the interested party who may be exposed to civil and, sometimes, criminal liability. The comparison of the treatment of this subject in the Lebanese, French and American legal systems revealed the weaknesses in the first two; amendment proposals are made.

Keywords

Personal interest, intrinsic fairness, business judgment, remuneration, private advantage, transactions, transactions committee, qualification, disclosure, special report, fiduciary duty, liability, waste of corporate assets.

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LISTE DES PRINCIPALES ABRÉVIATIONS

Al Adl Revue du Barreau de Beyrouth

ALI PCG American Law Institute Principles of Corporate Governance (Principes de gouvernement d’entreprise)

AMF Autorité des marchés financiers

Art. Article

BCNCC Bulletin du Conseil national des commissaires aux comptes BRDA Bulletin rapide de droit des affaires

Bull. civ. Bulletin des arrêts de la Cour de cassation - chambres civiles

Bull. crim. Bulletin des arrêts de la chambre criminelle de la Cour de cassation Bull. Joly Bulletin Joly sociétés

CA Cour d’appel

CE Conseil d’Etat

Cass. com. Arrêt d’une chambre commerciale de la Cour de cassation française Cass. crim. Arrêt d’une chambre criminelle de la Cour de cassation française Cass. soc. Arrêt d’une chambre sociale de la Cour de cassation française C.civ.fr. Code civil français

C.com.fr. Code de commerce français C.com.lib. Code de commerce libanais

C.com.lib.ann. Code de commerce libanais annoté (C. Fabia et P. Safa). CMCL Code de la monnaie et du crédit libanais

CNCC Compagnie nationale des commissaires aux comptes COCL Code des obligations et des contrats libanais

COB Commission des opérations de bourse C.pén.fr. Code pénal français

C.pén.lib. Code pénal libanais

DCLA Delaware Corporation Laws Annotated

DH Dalloz recueil hebdomadaire

DS Dalloz-Sirey, recueil de doctrine, de jurisprudence et de législation

fr. Français

Hatem Recueil de jurisprudence Hatem IAS International Accounting Standards JCP Juris-Classeur périodique

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JS Journal des sociétés

L. Loi

LCCG Lebanese Code of Corporate Governance LGDJ Librairie générale de droit et de jurisprudence

lib. Libanais

LLC Limited Liability Company (Société à responsabilité limitée)

POEJ Proche-orient études juridiques - Annales de la Faculté de droit et des sciences politiques de Beyrouth

Rép. soc. Répertoire sociétés Dalloz Rev. soc. Revue des sociétés

RJC Revue de jurisprudence commerciale RJDA Revue de jurisprudence de droit des affaires RJL Revue judiciaire libanaise

RMBCA Revised Model Business Corporation Act RTDC Revue trimestrielle de droit commercial S. Recueil de jurisprudence Sirey

SA Société anonyme de type classique

SACS Société anonyme avec conseil de surveillance et directoire (structure dualiste)

SARL Société à responsabilité limitée SAS Société par actions simplifiée

SEA Securities Exchange Act

SEC Securities and Exchange Commission

SOA Sarbanes-Oxley Act

T. com Tribunal de commerce TGI Tribunal de grande instance TPI Tribunal de première instance

USA Etats-Unis d’Amérique

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SOMMAIRE Page

INTRODUCTION 9

PREMIÈRE PARTIE: L'INTÉRÊT SOCIAL, RAISON D'ÊTRE PRINCIPALE DE LA RÉGLEMENTATION DES CONVENTIONS RÉGLEMENTÉES 29

Titre 1 Délimitation de l'intérêt social 31

Chapitre 1 Définition des intérêts en jeu 32

Section 1 Intérêt social et intérêts voisins 32

Section 2 Intérêt social et intérêts concurrents 42

Chapitre 2 Jeu conflictuel des intérêts 53

Section 1 Conditions de l'existence d'un conflit 53

Section 2 Preuve de l'existence d'un conflit 58

Titre 2 Champ de confrontation avec l'intérêt social 73

Chapitre 1 Actes juridiques visés par les trois réglementations 74

Section 1 Diversité des actes juridiques visés 74

Section 2 Qualification des actes juridiques visés 129

Chapitre 2 Personnes intéressées à l'acte juridique réglementé 152

Section 1 Personnes intéressées agissant directement 152 Section 2 Personnes intéressées agissant indirectement 182 DEUXIÈME PARTIE: LA MISE EN OEUVRE DE LA PROTECTION DE L'INTÉRÊT SOCIAL EN MATIÈRE DE CONVENTIONS RÉGLEMENTÉES 219

Titre 1 Prévention des conflits d'intérêts 220

Chapitre 1 Révélation de l'intérêt personnel 221 Section 1 Acteurs de la révélation 221

Section 2 Étendue de la révélation de l'intérêt personnel 236 Chapitre 2 Appréciation de l'intérêt social dans les conventions 250

Section 1 Décision des organes sociaux 250 Section 2 Effets de la décision sur les conventions 300

Titre 2 Garanties de la primauté de l'intérêt social 313

Chapitre 1 Garanties législatives et jurisprudentielles 314

Section 1 Exceptions aux principes généraux du droit 314

Section 2 Obligations inspirées des règles de gouvernement d'entreprise 349 Chapitre 2 Sanctions de l'atteinte à l'intérêt social 370

Section 1 Mise en cause de l'acte juridique préjudiciable à la société 370

Section 2 Mise en cause de la responsabilité personnelle des violateurs de la réglementation des conventions 406

CONCLUSION 457

LISTE BIBLIOGRAPHIQUE 460

LISTE CHRONOLOGIQUE DE JURISPRUDENCE 475 TABLES DES ANNEXES 487

TABLES DES MATIÈRES 546

(8)

« Nul serviteur ne peut servir deux maîtres ; car, ou il haïra l’un et aimera l’autre ; ou il s’attachera à l’un et méprisera l’autre.

Vous ne pouvez servir Dieu et Mammon » St. Luc XVI, 13

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INTRODUCTION

La société commerciale ne jouissant d’aucune faculté divine, St. Luc ne saurait être déçu outre mesure si le dirigeant d’une telle société, ou l’un de ses associés, se servait du patrimoine social sans veiller à maintenir un certain équilibre avec l'intérêt social. Une régulation se forge à coup de lois et règlements qui ne cessent d’affluer. Des préoccupations presque contradictoires font créer des normes et directives côtoyant des textes de lois, simples ou compliqués, clairs ou ambigus, mariés à des jurisprudences qui balancent entre le traditionnel, qui est rigoureux et conservateur, et le progressiste, qui se veut flexible et libéral, à l’image de la société civile et celle du monde des affaires entreprenant. L’élaboration d’une telle régulation met en valeur, entre autres, une meilleure transparence financière à travers une communication plus importante aux associés et aux commissaires aux comptes, et un contrôle plus permanent et étroit du comportement des organes sociaux, et surtout des dirigeants.

Il s’agit de protéger et la société et ses associés, sans ignorer les tiers de bonne foi. Un assainissement généralisé s’opère à travers la moralisation des pratiques commerciales et l’institutionnalisation de l’intégrité des mandataires sociaux. Des obligations relevant du droit naturel inspirent celles du droit positif subjectif.

Faut – il donner à l’initiative privée plus d’espace ? ou la sacrifier sur l’autel de ces géants, pour ne pas dire ces monstres, que sont les multinationales qui drainent l'épargne publique? Faut – il freiner des ambitions personnelles rien que pour valoriser l’intérêt social ? Cette dernière notion a fait couler beaucoup d’encre et ne semble pas être appréciée de la même manière par tout le monde.

Une chose est sûre et c’est que la personnalité morale de la société est une fiction1 créée

par la loi ; c’est une « creature of the law »2 . Elle jouit d’une autonomie par rapport aux associés ; une autonomie émanant de l’affectio societatis et consacrée par le contrat de société. Cette personnalité morale possède des droits3, et assume des obligations comme si elle était une personne physique. La société a donc un intérêt propre qui est différent de celui de ses associés. Cet intérêt, qu’on confondait jadis peut-être avec l’intérêt commun des associés, acquiert de nos jours une certaine autonomie, mise en relief par la nécessité de le protéger contre les abus des dirigeants ou associés indélicats dont les agissements ont été à

1. Ph. Merle, Droit commercial, Sociétés commerciales, Précis Dalloz, 14e éd., Dalloz, 2010, n° 75, p. 110 :

personnalité morale : « Réalité ou fiction ».

2. L. Solomon et A. Palmiter, Corporations, 3e éd., Aspen Law & Business, New York, USA, 1999, § 1.1.2,

p. 7.

3. Ph. Merle, Droit commercial, Sociétés commerciales, op. cit., n° 75, p. 109 : « la personnalité morale doit alors être dotée de tous les droits qui lui sont nécessaires pour que la société accomplisse sa mission ».

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l’origine de scandales financiers retentissants. Ce genre de scandales (ou de scandales politico-financiers) semble être toujours à la base des « retouches » législatives1 qui sont entreprises d’une manière accélérée, les atouts devenant beaucoup plus substantiels. Ces scandales menacent les investissements dans une ère de privatisation croissante.

Mais est-ce que la poursuite d’un intérêt personnel est toujours opposée à l’intérêt social ? Cette opposition crée-t-elle dans tous les cas un conflit d’intérêts préjudiciable à la société ? Autant de questions qui ont alimenté nos recherches en quête de réponses satisfaisantes.

La société, personne morale, est habilitée à contracter avec autrui, y compris ses associés et dirigeants. La conclusion de conventions entre une entité et l'un de ses dirigeants ou l'un de ses membres… est « inévitable »2. La société peut avoir avec ceux-là des rapports de droit, devenir leur créancière ou leur débitrice comme s’ils étaient des tierces personnes3.

Il est normal que les rapports de droit créés dans une convention, qui peuvent être noués entre la société et les parties qui sont censées la protéger, et qui peuvent générer des abus dont la société devient victime, soient une des préoccupations principales du législateur. Ainsi, c'est une question de principe, un dirigeant « partagé entre son intérêt personnel et les devoirs de sa charge »4 ne devrait point faire prévaloir cet intérêt sur celui de la société qu’il dirige et dont il est mandataire. « Nemo in rem suam auctor esse potest » : nul ne pouvant officier en sa propre cause5. Le conflit entre ces deux intérêts ne doit point être « résolu au détriment » de la société6. Un associé prédominant ne peut non plus profiter du poids que sa quote-part du capital fait peser sur les décisions sociales pour se faire accorder des avantages ou des valeurs aux dépens de sa société. Méfiant envers le « risque d’abus et de complaisance» que des conventions conclues entre un administrateur et sa société pourraient créer, et envers les conséquences « préjudiciables aux intérêts de la société » qui pourraient en résulter, le législateur a voulu faire subordonner ces conventions « à certaines conditions en vue d’assurer la protection desdits intérêts »7

. La doctrine est unanime, les dirigeants ne

1. Ph. Merle, Droit commercial, Sociétés commerciales, op. cit., n° 15, p. 28.

2. Compagnie nationale des commissaires aux comptes (CNCC), Les conventions entre les entités et les

personnes «intéressées», éd. CNCC, mai 2004, p. 7.

3. E. Tyan, Droit commercial, Tome premier, éd. Librairie Antoine, Beyrouth, 1968, n° 289, p. 297.

4. C. Malecki, Conventions réglementées, Rép. soc. Dalloz, septembre 2002, p. 3.

5. H. Roland et L. Boyer, Adages du droit français, 4e éd., Litec, Paris, n° 255.

6. C. Fabia, Les contrats des administrateurs de sociétés anonymes, Commerce du Levant, n° 113, Beyrouth,

1968, p. 16.

7. Gh. Mahmassani, Les contrats des administrateurs de sociétés anonymes avec leurs sociétés suivant l’article

(11)

peuvent profiter de leur « position dans la société » pour servir leurs propres intérêts ou ceux d’entreprises auxquelles ils seraient intéressés…1

Aux Etats-Unis, les devoirs des dirigeants envers leur société imposent «l’intégrité absolue, non seulement en cas de conflit entre leurs devoirs et leurs intérêts ils doivent faire prévaloir les premiers, mais ils doivent même éviter le plus possible ce genre de conflits »2. Les concepts de trust et de confidence (confiance) constituent le « cœur » du droit des sociétés relatif aux devoirs et obligations fiduciaires des dirigeants et des associés prépondérants des sociétés commerciales américaines3. Les self - dealing transactions , ou « transactions (contrats) avec soi-même » y sont également réglementées, tout comme au Liban et en France, avec toutefois une simplicité jugée « riche en exigences très sévères », qui « dispense d’une bonne partie de la réglementation que l’on trouve en France »4. Le devoir de disclosure (divulgation, révélation) de l'intérêt personnel du contractant visé avec la société est omniprésent en droit américain, en application des principes de transparence du gouvernement d'entreprise qui ont été une inspiration pour beaucoup de pays. La simplicité du système américain, fidèle aux préceptes du case law, soumet les conventions avec les

related parties (parties liées)5 à une certaine autopsie pour apprécier leur fairness pour la société.

* * *

L’intérêt social, étant celui de la personne morale qu’est une société, il est normal que tous les systèmes juridiques qui reconnaissent cette personnalité tentent de le protéger contre les abus et excès des dirigeants et / ou associés, surtout les associés majoritaires. Et pourtant, la jurisprudence a trouvé que les groupes de sociétés, qui n’ont pas de personnalité morale distincte de celles des sociétés qui les constituent, ont quand même un intérêt propre qui mérite d’être aussi protégé. C’est un intérêt supérieur à l’intérêt individuel des sociétés du groupe. La jurisprudence avait reconnu apparemment « un droit naturel des groupements à la personnalité juridique. La réalité juridique trouvait directement assise dans la réalité sociale»6.

1. I. Balensi, Les conventions entre les sociétés commerciales et leurs dirigeants, Collection Etudes juridiques

comparatives, Economica, Paris, 1975, p. 3.

2. A. Tunc, Le droit américain des sociétés anonymes, Paris, Economica, 1985, p. 10.

3. L. Solomon et A. Palmiter, Corporations, op. cit., p. 191.

4. A. Tunc, Le droit américain des sociétés commerciales, op. cit. p. 10. Cet ouvrage, publié en 1985, conserve

en ce qui concerne la constatation de son auteur quant à la simplicité de la législation américaine comparée à celle de la France, toute son actualité.

5. L’adjectif « lié » pour signifier « related » est le plus souvent retenu, surtout dans les rapports des

commissaires aux comptes ; dans le même sens peuvent-être utilisés les termes « apparenté » et parfois « associé » : v. B. Dhuicq et D. Frison, Dictionnaire de l’anglais juridique : Ed. BMS 2004, p. 365.

6. N. Fadel Raad, L'abus de la personnalité morale en droit privé, Thèse, Paris 2, dir. F. Terré, LGDJ, 1991,

(12)

C’est ainsi que le développement des groupes de sociétés apporte une nouvelle dimension à la définition de l’intérêt social, tant juridique qu’économique. Les conventions conclues entre sociétés appartenant au même groupe, et qui sont dirigées le plus souvent par des conseils d’administration à administrateurs communs ou par des dirigeants communs, sont courantes. L’intérêt social de la filiale ou de la société membre du groupe tend, en dépit de son caractère distinct, à se fondre en quelque sorte dans l’intérêt du groupe. Ces conventions portent sur un grand nombre de produits et services dont les sociétés du groupe ont besoin pour la réalisation de leurs objets sociaux respectifs, ou du moins pour assurer une meilleure appartenance au groupe et facilitent l’atteinte de l’objectif suprême de la société mère ou de la holding du groupe. Nous n’hésiterons pas à ajouter que parfois ces conventions sont conclues pour faire passer un bénéfice, du patrimoine d’une société du groupe dans le patrimoine d’une autre société du même groupe pour réduire les obligations fiscales de la première. Cette pratique acceptable dans les groupes soumis à un régime d’intégration fiscale, l’est moins dans les groupes qui ne le sont pas. Les conventions au sein du groupe constituent en soi un dispositif efficace de contrôle et de concentration qui empiètent sur l’indépendance des sociétés du groupe, la rendant plutôt relative, la société mère exerçant sur elles une influence prédominante. L’autonomie de ces sociétés cède la place à l’autonomie du groupe en tant qu’un ensemble lui conférant, en dépit de l’absence d’une existence juridique propre, une âme et un certain intérêt qu’on ne retrouve même pas dans certaines entités dotées d’une personnalité morale. A moins que ces conventions ne constituent des outils de concentration économique et ne dissimulent des pratiques anticoncurrentielles, elles sont soutenues aussi bien par la doctrine que par la jurisprudence.

Il s’agit donc de maintenir « un équilibre délicat entre des tendances parfois contradictoires »1. Certains auteurs concluent que l’intérêt social doit « primer » l’intérêt des actionnaires2; favorisant ainsi la définition de l’intérêt social comme étant non l’intérêt commun des associés, mais celui de l’entreprise. « La recherche de l’équilibre contractuel »3 pour la protection des intérêts divergents est la méthode suivie à quelques rares exceptions dans nos trois systèmes juridiques: libanais, français et américain. Les conventions conclues entre les personnes visées par la réglementation et leur société ne sont nulles de plein droit que si elles ont un objet particulier limitativement prévu4.

1. D. Bureau, actualisé par J.-J. Ansault, Contrats entre les administrateurs et la société, Sociétés Traité, Juris-

Classeur, Fasc. 130-50, LexisNexis 2005, n° 1, p. 3.

2. F. Peltier, La Corporate Governance au secours des conseils d’administration, Dunod, 2004, p. 92.

3. C. Malecki, Conventions réglementées, op. cit., p. 3.

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En somme, il faut trouver un compromis entre la relation institutionnelle créée entre un dirigeant et sa société, par son élection ou sa nomination par l’organe social compétent, et la relation contractuelle qu’il fait créer lui-même en tant qu’intéressé à une convention qu’il conclut, ou fait conclure, avec sa société. C’est cette dualité de qualités qui favorise les conflits d’intérêts. Cette dualité semble exister naturellement dans les groupes de sociétés. Une société holding maintient un lien de capital avec ses filiales, assorti d’un dispositif humain apte, non seulement à diriger et faire fructifier ce capital mais, surtout, à assurer une meilleure intégration de la filiale dans cette unité économique et sociale entre les sociétés qui forment le groupe. Cet objectif est atteint en nommant les administrateurs et autres dirigeants de la filiale, le plus souvent choisis au nombre des dirigeants de la holding elle-même, surtout dans les groupes d'importance moyenne. Cette pratique, en raison de la menace de partialité, place la holding et sa filiale dans le cœur de la réglementation des conventions. Un auteur avait jugé la procédure de contrôle des conventions de l’ancien art. 40 de la loi française du 24 juillet 1867, dans certains cas, comme « frappée d’une inefficacité totale», ce qui fait exclure les conventions intra-groupe de sociétés du contrôle, pourvu que certains critères soient remplis1.

Les conventions conclues par les personnes visées par la réglementation, et l'intérêt social qui en est la préoccupation principale, obéissent à deux normes presque contradictoires, comme nous l'avons signalé au début de cette introduction. Ils doivent parfois cohabiter, dans l'intérêt social lui-même. Dans un climat de liberté contractuelle accrue, il n'est pas souhaitable en principe d'alourdir la conclusion d'un contrat de conditions autres que celles que dictent les principes généraux du droit des contrats ; mais un intérêt supérieur, celui de la société elle-même, justifie l'instauration d’un régime strict de contrôle de ces conventions.

* * *

Face aux risques que posent les conflits d’intérêts au sein des sociétés commerciales, les législateurs au Liban et en France, vu la nécessité de ne pas faire perdre à la société une chance de conclure des conventions qui pourraient quand même lui être « utiles »2, ont méthodiquement et systématiquement catégorisé les conventions que peut conclure un dirigeant, ou (du moins en France) un associé, d’une société avec celle-ci en trois catégories distinctes, dépendant du degré du risque qui menace les intérêts de la société, permettant les unes, contrôlant et interdisant les autres3. Aux Etats-Unis cette distinction est moins évidente.

1. M. Vanhaecke, Les groupes de sociétés, LGDJ, 1959, p. 329.

2. Ph. Merle, Droit commercial, Sociétés commerciales, op. cit., nº 398, p. 469; Y. Guyon, Droit des affaires,

Tome 1, Droit commercial général et sociétés, 7e éd., Economica, 1992, nº 419, p. 426.

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Les trois catégories de conventions en question sont les suivantes : les conventions libres, ou celles qui n’ont besoin, pour être valablement conclues, d’aucune autorisation ou approbation préalable ; les conventions réglementées qui sont soumises au contrôle ; et enfin les conventions interdites qui sont prohibées1, du moins en droit libanais et en droit français.

* * *

L’étude comparative de notre sujet nous éclairera sans doute sur l’expérience des systèmes juridiques les plus avancés en la matière et leur contribution à une meilleure protection de l’intérêt social, prévenant les conflits d’intérêts entre les dirigeants, les associés et leur société.

Reste à savoir quels pays choisir pour que la comparaison puisse produire les résultats escomptés. Il s’agit pour l’auteur de cette thèse d’analyser des systèmes juridiques qui ont été éprouvés en la matière, ou qui ont eu l’occasion de légiférer sur le sujet. Le choix du Liban, de la France et des Etats-Unis d’Amérique s’est imposé sans aucune difficulté pour les raisons suivantes : leurs systèmes juridiques respectifs sont suffisamment représentatifs des modèles adoptés ailleurs2.

Le Liban est, pour plus d’une raison, dans un coma législatif dans nombre de domaines. Il n’a malheureusement pas suivi les développements qu'ont connus d’autres pays. L’évolution législative dans ces derniers aurait pu l’aider à mettre les textes de son Code de commerce en harmonie avec les exigences croissantes du monde des affaires. Cet état de choses plutôt statique a été encore plus figé par l’absence d’une véritable jurisprudence en la matière. La législation libanaise actuellement en vigueur et son application pratique affichent dans ce domaine une attitude d’indifférence à l’égard des dangers que peuvent susciter les conflits entre les intérêts personnels des dirigeants et associés et l’intérêt de leur société. C’est pourquoi le droit libanais a tout intérêt à voir de plus près ce qui se passe ailleurs.

En France, par contre, l’évolution législative présente une image d’un système juridique anxieux, qui ne cesse de tenter de combler, parfois maladroitement, les lacunes découvertes au prix de crises économiques ou problèmes surgissant dans des sociétés. Les Etats-Unis, en fidèles anglo-saxons, se sont contentés pendant longtemps des principes posés par la jurisprudence jusqu’au jour où l’Etat fédéral a trouvé indispensable d’intervenir, et

1. Le traitement des conventions interdites sort du cadre de la thèse présente. Ces conventions y seront quand

même évoquées, avec des détails limités aux besoins du contexte, et plus particulièrement, infra, à la section relative à la qualification des actes juridiques par la réglementation, p. 131.

2. En effet, au cours de nos recherches, nous avons réalisé que la plupart des pays qui ont adopté dans leur législation des dispositions relatives aux conventions réglementées y ont traité, avec plus ou moins de détails, et d'une manière plus ou moins complète, les mêmes questions que cette thèse évoquera.

(15)

récemment avec force, en légiférant dans un sens tranchant à plusieurs égards; les dirigeants profiteurs de leur position sociale devenant de plus en plus nombreux et cupides.

Au Liban, la matière est régie principalement par l’article 158 C.com.lib., pour les sociétés anonymes. Cet article, avant sa modification en 19681, transposait littéralement le texte du fameux art. 40 de la loi française du 24 juillet 1967. Il disposait ce qui suit :

« Ils doivent également se faire autoriser spécialement s’ils entendent prendre ou conserver un intérêt direct

ou indirect dans une entreprise ou un marché avec la société ou pour son compte »2.

Cette modification a élargi le champ d’application des conventions visées par la règlementation3. L’art. 158 nouveau C.com.lib. dispose ce qui suit :

« Toute convention entre la société et l'un des administrateurs, que cette convention intervienne directement ou indirectement ou par personne interposée, doit être soumise à une autorisation préalable de l'assemblée générale. Font exception à cette disposition les contrats usuels portant sur des opérations entre la société et ses clients.

Est pareillement soumise à l'autorisation préalable de l'assemblée générale, toute convention entre la société et une autre entreprise, si l'un des administrateurs est propriétaire, associé en nom collectif, directeur ou administrateur de cette entreprise. L'administrateur se trouvant dans l'un de ces cas doit en aviser le conseil d'administration.

Le conseil d'administration ainsi que les commissaires de surveillance soumettent séparément à l'assemblée générale un rapport spécial sur les conventions projetées. L'assemblée prend sa décision à la lumière de ces deux rapports, et les conventions autorisées ne peuvent être attaquées qu'en cas de fraude.

L'autorisation doit être renouvelée tous les ans si elle concerne des contrats comportant des engagements successifs à long terme.

Il est interdit aux administrateurs de la société, autres que les personnes morales, d'obtenir de la société, sous quelque forme que ce soit, un prêt au un découvert en compte courant en leur faveur, ou un cautionnement ou un aval de leurs effets de commerce envers les tiers. Toutefois, ladite interdiction ne s'applique pas aux banques si les opérations précitées constituent des opérations rentrant habituellement dans le cadre des activités de ces banques ».

Le Liban n’ayant malheureusement pas suivi les évolutions de la législation française relatives à ce sujet ; cet article est systématiquement bafoué. En l’absence d’un dispositif de contrôle adéquat, les lacunes existantes sont de véritables pièges pour les associés non avertis. En raison de son texte succinct, il constitue tout au plus un texte cadre. Aucune réglementation spécifique similaire à l’art. 158 du C.com.lib. n’existe pour les

1. Par le décret-loi nº 9798 du 4 mai 1968, publié au journal officiel du 19 mai 1968, p. 625.

2. Cet article, qui commence par « Ils » semble continuer le dernier alinéa de l’article précédent, art. 157, C.com.lib., qui dispose que : « La société est obligée par les actes de ses représentants accomplis dans la limite de leurs pouvoirs…». Le terme « représentants», à cause de se généralité, soumettait à l’autorisation spéciale une catégorie plus large de personnes visées.

3. Art. 1 du décret-loi n° 9798 du 4 mai 1968 a remplacé les « marchés et entreprises » par « toute convention », à l’alinéa 1 de l’art. 158 C.com.lib.

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conventions conclues entre un gérant ou un associé et une société à responsabilité limitée libanaise, à l’exception des conventions à caractère purement financier, qui sont prohibées1

. Hélas, la jurisprudence libanaise, avec un nombre non significatif d’arrêts rendus en la matière, n’a été d’aucun soutien. Heureusement que la doctrine n’ en a pas été aussi absente.

Nous ne partageons toutefois pas l’opinion, que nous jugeons plutôt sévère, qu’un éminent juriste libanais avait exprimée au sujet de ce texte, l’accusant d'avoir instauré « un système très lourd et manifestement incompatible avec les exigences de souplesse et de célérité, indispensables au bon développement de la vie commerciale »2. Il nous semble que le jugement critique que ce juriste avait porté repose uniquement sur le fait que la loi libanaise, n’ayant pas suivi les modifications apportées par le législateur français, qui a substitué le conseil d’administration à l’assemblée générale pour autoriser au préalable les conventions réglementées, accuse un recul au détriment de la célérité de la procédure.

L’évolution législative française, permet de mettre l’accent, sans trop d’efforts, sur les points de divergence avec le droit libanais, un droit qui accueillera volontiers certaines modifications inspirées du modèle français. En outre, la France a connu des crises qui ont aidé à faire mûrir sa législation et l’ont amenée à se pencher encore plus sur sa réglementation des conventions réglementées , surtout celles conclues par les dirigeants de sociétés cotées en bourse avec leur société, plus particulièrement en ce qui concerne les rémunérations de ses dirigeants et les avantages attachés à leur emploi. En France, ce sont les articles L.225-38 et s. C.com.fr., pour les sociétés anonymes, de type classique, avec conseil d’administration, les articles L.225-86 et s. pour les sociétés anonymes à structure dualiste, avec conseil de surveillance et directoire, les articles L. 223-19 et s. pour les SARL et L.227-10 et s. pour les SAS qui régissent cette matière. Les modifications législatives, espacées au début, et plus fréquentes récemment3, ne cessent d’actualiser la nécessité du contrôle des conventions réglementées. Une jurisprudence, relativement abondante, a permis d’éprouver l’efficacité de ces textes4

.

La réglementation des conventions réglementées a été introduite en France par la loi du 24 juillet 1867. L’article 40 de cette loi disposait comme suit :

1. Art. 18 du décret-loi n° 35 du 5 août 1967.

2. Gh. Mahmassani, Les contrats des administrateurs de sociétés anonymes avec leurs sociétés suivant l’article

158 nouveau du Code de commerce libanais, op. cit., p. 41 ; v. aussi pp 69 et 71. A notre sens, l’auteur déplore plutôt les dispositions du C.com.fr., beaucoup plus détaillées dans cette matière que le C.com.lib., car le texte en droit libanais, tout en n’étant pas complet, n’est pas vraiment lourd. Il est en tout cas bien plus « léger » que le texte correspondant, ou plutôt les textes correspondants, en droit français.

3. A cause des scandales financiers et des exigences croissantes du monde des affaires.

4. Plus de 540 arrêts recensés, dont le premier a été rendu déjà en 1845 :Cass. crim., 8 août 1845, D., 1845, I,

(17)

« Il est interdit aux administrateurs de prendre ou de conserver un intérêt direct ou indirect dans une entreprise ou dans un marché fait avec la société ou pour son compte, à moins qu’il n’y soit autorisé par l’assemblée générale ; il est chaque année rendu à l’assemblée un compte spécial de l’exécution des marchés et entreprises autorisés aux termes du paragraphe précédent ».

Tout en étant plutôt limitative en ce qui concerne les actes visés : « une entreprise » ou « un marché », nous soulignons que la portée de cet article, dans son ancienne rédaction, était plus expresse que le texte actuel en ce qui concerne la mention de la nature directe ou indirecte de l’intérêt personnel qui conditionne l’application de la procédure de contrôle, à savoir l’autorisation de l’assemblée générale. L’article 40 en question disposait expressément que la procédure est exigée quand l’intérêt est soit direct soit indirect.

Il a fallu au législateur français 75 ans pour réaliser que l’art. 40 était incomplet et ne produisait pas les résultats escomptés. Pour parfaire la protection qu’il entérine, le champ des actes visés a été par la suite élargi, en vertu de la loi du 4 mars 1943 dont l’article 10 dispose ce qui suit :

« L’article 40 de la loi du 24 juillet 1867 est abrogé et remplacé par les dispositions suivantes :

Toute convention entre une société et l’un de ses administrateurs, soit directement ou indirectement, soit par personne interposée, doit être soumise à l’autorisation préalable du conseil d’administration. Avis en est donné aux commissaires.

Il en est de même pour les conventions entre une société et une autre entreprise si l’un des administrateurs de la société est propriétaire, associé en nom, gérant, administrateur ou directeur de l’entreprise. L’administrateur se trouvant dans l’un de ces cas ainsi prévus est tenu d’en faire la déclaration au Conseil d’administration. Avis en est également donné aux commissaires.

Les dispositions qui précédent ne sont pas applicables aux conventions normales partant sur les opérations de la société avec ses clients.

Les commissaires présentent à l’assemblée générale un rapport spécial sur les conventions autorisées par le Conseil. L’assemblée statue sur ce rapport. Les conventions qu’elle approuve ne peuvent être attaquées qu’en cas de fraude. Celles qu’elle désapprouve n’en produisent pas moins leur effet. Mais les conséquences dommageables pouvant en résulter restent, en cas de fraude, à la charge de l’administrateur intéressé et, éventuellement, du Conseil d’administration.

Il est interdit aux administrateurs d’une société autres que les personnes morales de contracter, sous quelque forme que ce soit, des emprunts auprès de la société, de se faire consentir par elle un découvert en compte courant ou autrement, ainsi que de faire cautionner ou avaliser par elle leurs engagements envers les tiers. Toutefois, si la société exploite un commerce de banque, cette interdiction ne s’applique pas aux opérations

courantes de ce commerce ».

Avec cette modification, toutes les conventions (sans exception quant à leur nature) conclues, directement ou indirectement, ou par personne interposée, entre la société et l’un de

(18)

ses administrateurs, ou celles conclues entre la société et une autre entreprise dont l’un des administrateurs, propriétaire, associé en nom ou gérant est également administrateur de la société de référence sont soumises au contrôle spécial. Le dirigeant visé est cependant resté l’administrateur de sociétés anonymes, à l’exclusion de tout autre dirigeant. Cette modification législative de l’art. 40 a aussi consacré la prohibition absolue des conventions interdites et l’exclusion du contrôle des conventions libres, définies comme étant celles conclues à des conditions « normales portant sur les opérations de la société avec ses clients »1. Une autre nouveauté de cette modification de 1943 est que l’autorisation préalable

d’une convention doit désormais être donnée par le conseil d’administration et non plus par l’assemblée générale.

Vingt trois ans après, l’article 101 suivant de la loi du 24 Juillet 1966 :

« Toute convention intervenant entre une société et l’un de ses administrateurs ou directeurs généraux doit être soumise à l’autorisation préalable du conseil d’administration.

Il en est de même des conventions auxquelles un administrateur ou directeur général est indirectement intéressé ou dans lesquelles il traite avec la société par personne interposée.

Sont également soumises à autorisation préalable, les conventions intervenant entre une société et une entreprise, si l’un des administrateurs ou directeurs généraux de la société est propriétaire, associé indéfiniment responsable, gérant, administrateur, directeur général ou membre du directoire ou du conseil de surveillance de l’entreprise »

vint élargir encore plus le champ d’application de la procédure de contrôle spécial, en incluant les directeurs généraux de sociétés anonymes et en étendant l’application de la réglementation aux sociétés en commandite par actions et aux sociétés à responsabilité limitée. Cette loi a aussi instauré une interdiction de vote de la personne intéressée sur l’autorisation ou l’approbation de la convention. Enfin, cette loi a apporté une correction importante à la caractérisation des conventions libres qui ne seront plus celles conclues à des conditions normales « portant sur les opérations de la société avec ses clients » mais celles qui sont « courantes et conclues à des conditions normales »2.

La loi n° 2001-420, du 15 mai 2001, relative aux nouvelles régulations économiques (NRE) a, dans un souci croissant de transparence, inclus les actionnaires de sociétés par actions dans la catégorie des personnes visées, à condition qu’ils détiennent plus de 5% des droits de vote ; et, dans le cas où c’est une société qui est actionnaire, ce sont les actionnaires, personnes morales, qui la contrôlent3 qui sont également visées. L’art. 105 de cette loi

dispose que :

1. Un texte limitatif que le Code de commerce libanais a repris dans son art. 158.

2. Art. L. 102 de la loi du 24 juillet 1966.

(19)

« Toute convention intervenant directement ou par personne interposée entre la société et son directeur général, l’un de ses directeurs généraux délégués, l’un de ses administrateurs, l’un de ses actionnaires disposant d’une fraction des droits de vote supérieure à 5% ou, s’il s’agit d’une société actionnaire, la société la contrôlant au sens de l’article L. 233-3, doit être soumise à l’autorisation préalable du conseil d’administration.

Il en est même des conventions auxquelles une des personnes visées à l’alinéa précédent est indirectement intéressée.

Sont également soumises à autorisation les conventions intervenant entre la société et une entreprise, si le directeur général, l’un des directeurs généraux délégués ou l’un des administrateurs de la société est propriétaire, associé indéfiniment responsable, gérant, administrateur, membre du conseil de surveillance ou, de façon générale, dirigeant de cette entreprise ».

La loi NRE a aussi ajouté les sociétés par actions simplifiées (SAS) aux autres formes de sociétés déjà prévues par la réglementation et a étendu son application aux personnes morales non commerçantes ayant une activité économique ainsi qu’aux associations qui reçoivent des aides et subventions de l’Etat1.

Le législateur a dû se rendre compte plus tard que la procédure de contrôle était lourde et a profité de la loi de sécurité financière du 1er août 2003 pour l’alléger un peu. L’art. L. 225-38 C.com.fr. dispose, après sa modification par cette loi, comme suit :

« Toute convention intervenant directement ou par personne interposée entre la société et son directeur général, l’un de ses directeurs généraux délègues, l’un de ses administrateurs, l’un de ses actionnaires disposant d’une fraction des droits de vote supérieure à « 10% » ou, s’il s’agit d’une société actionnaire, la société la contrôlant au sens de l’article L.233-3, doit être soumise à l’autorisation préalable du conseil d’administration.

Il en est de même des conventions auxquelles une des personnes visées à l’alinéa précédent est indirectement intéressée.

Sont également soumises à autorisation préalable les conventions intervenant entre la société et une entreprise, si le directeur général, l’un des directeurs généraux délégués ou l’un des administrateurs de la société est propriétaire, associé indéfiniment responsable, gérant, administrateur, membre du conseil de surveillance ou, de façon générale, dirigeant de cette entreprise ».

C’est ainsi qu’en vertu de cette loi ne doivent plus être communiquées les conventions libres conclues avec une société anonyme qui ne sont pas significatives pour l’une ou l’autre des parties2. En outre, le seuil des 5% des droits de vote que doit détenir un actionnaire pour qu’il soit soumis au contrôle a été élevé à 10%3

.

1. Art. L. 612-4 et L. 612-5, C.com.fr.

2. Art. L. 225-39, al. 2, C.com.fr.

(20)

Le législateur a voulu par la suite mettre un accent spécial sur les conventions portant sur la rémunération des dirigeants, surtout les dirigeants de sociétés cotées en bourse. Effectivement, nombre de scandales avaient pour origine des rémunérations excessives consenties à des dirigeants peu scrupuleux. La loi pour la confiance et la modernisation de l’économie, du 26 Juillet 20051

est venue, en introduisant l’art. L. 225-42-1, au C.com.fr.,

réglementer les cas des rémunérations et avantages consentis à des mandataires sociaux à l’occasion des modifications qui peuvent affecter leur condition au sein de la société, ou à l’occasion de leur départ de la société. Cette loi a soumis au régime des conventions réglementées les engagements pris par des sociétés cotées en bourse au bénéfice de leurs présidents, directeurs généraux ou directeurs généraux délégués, par la société elle-même ou par toute société contrôlée ou qui la contrôle, correspondant à des éléments de rémunération, des indemnités ou des avantages dus à raison de la cessation ou changement de ces fonctions ou postérieurement à celles-ci. Par ailleurs, cette même loi a modifié l’art. L. 225-102-1, C.com.fr. en disposant que le rapport annuel du conseil d’administration à l’assemblée générale doit décrire les détails des rémunérations fixes, variables et exceptionnelles versées aux mandataires sociaux.

Cette loi n’a apparemment pas servi à limiter les abus, puisque deux ans plus tard, et à la suite d’une affaire médiatisée de retraite-chapeau2

, le législateur français a apporté des modifications, en vertu de la loi du 21 août 20073, en faveur du travail, de l’emploi et du pouvoir d’achat. L’art. L. 225-42-1 C. com. fr. dispose ce qui suit :

« Dans les sociétés dont les titres sont admis aux négociations sur un marché réglementé, les engagements pris au bénéfice de leurs présidents, directeurs généraux ou directeurs généraux délégués, par la société elle-même ou par toute société contrôlée ou qui la contrôle au sens des II et III de l’article L. 233-16, et correspondant à des éléments de rémunération, des indemnités ou des avantages dus ou susceptibles d’être dus à raison de la cessation ou du changement de ces fonctions, ou postérieurement à celles-ci, sont soumis aux dispositions des articles L. 225-38 et L. 225-40 à L. 225-42.

Sont interdits les éléments de rémunération, indemnités et avantages dont le bénéfice n’est pas subordonné au respect de conditions liées aux performances du bénéficiaire, appréciés au regard de celles de la société dont il préside le conseil d’administration ou exerce la direction générale ou la direction générale déléguée.

L’autorisation donnée par le conseil d’administration en application de l’article L. 225-38 est rendue publique selon des modalités et dans des délais fixés par décret en Conseil d’Etat.

1. Loi Breton, n° 2005-842.

2. Retraite-chapeau du président du conseil d’administration de Carrefour ; v. définition de cette retraite

complémentaire, infra, p. 93.

(21)

La soumission à l’approbation de l’assemblée générale en application de l’article L. 225-40 fait l’objet d’une résolution spécifique pour chaque bénéficiaire. Cette approbation est requise à chaque renouvellement du mandat exercé par les personnes mentionnées au premier alinéa.

Aucun versement, de quelque nature que ce soit, ne peut intervenir avant que le conseil d’administration ne constate, lors ou après la cessation ou le changement effectif des fonctions, le respect des conditions prévues. Cette décision est rendue publique selon des modalités et dans des délais fixés par décret en Conseil d’Etat. Tout versement effectué en méconnaissance des dispositions du présent alinéa est nul de plein droit.

Les engagements correspondant à des indemnités en contrepartie d’une clause interdisant au bénéficiaire, après la cessation de ses fonctions dans la société, l’exercice d’une activité professionnelle concurrente portant atteinte aux intérêts de la société ne sont soumis qu’aux dispositions du premier alinéa. Il en va de même des engagements de retraite à prestations définies répondant aux caractéristiques des régimes mentionnés à l’article L. 137-11 du Code de la sécurité sociale, ainsi que des engagements répondant aux caractéristiques des régimes

collectifs et obligatoires de retraite de prévoyance visés à l’article L. 242-1 du même code».

La loi interdit désormais les rémunérations, indemnités et avantages dont le bénéfice n’est pas subordonné au respect de conditions liées aux performances du bénéficiaire, requiert la publicité de la décision d’autorisation par le conseil d’administration et exige une résolution d’approbation par l’assemblée générale spécifique pour chaque bénéficiaire.

Pour parfaire la justice sociale, la loi n◦2008-1528, du 3 décembre 2008 , sur les revenus du travail a conditionné l’attribution des stock-options , un des éléments de rémunération importés en France des Etats-Unis1, à la distribution corrélative à l’ensemble des salariés et, à au moins 90% de ceux des filiales, d’options de même nature, d’actions gratuites ou d’autres dispositifs d’intéressement et de participation2

.

Les rémunérations et avantages visés par la réglementation revêtent de nombreuses formes et sont connus sous des appellations multiples. Nous évoquons ici les plus fréquentes, qui seront traitées en profondeur dans le corps de la thèse. Ce sont les stock-options, qualifiées de « miraculeuses » dans l’affaire Elf Aquitaine, les « golden parachutes » (parachutes dorés) des présidents de Valéo et de Vivendi Universal, et les « bonus » exorbitants du successeur de ce dernier, les « retraites-chapeau », « en or », du président de Carrefour, ou bien les « indemnités de départ » du président de Vinci.

Les textes régissant la matière dans le Code de commerce français sont complétés, du moins en ce qui concerne l’information, outil indispensable pour assurer une meilleure

1. V. infra, définition p. 94.

2. Ph. Houillon, Rapport d’information déposé par la Commission des lois constitutionnelles de la législation et

de l’administration de la République sur les rémunérations des dirigeants mandataires sociaux et des opérateurs de marchés, n° 1798, enregistré à la présidence de la République le 7 juillet 2009, recherche sur internet, google, « Houillon Ph. », p. 31.

(22)

transparence, par les directives et règlements de l’Autorité des marchés financiers, l'AMF qui, à partir du 24 novembre 2003, a remplacé la Commission des opérations de bourse (COB).

Il convient toutefois de signaler, d’ores et déjà, que la doctrine n’a pas accueilli d’un œil favorable la réglementation des conventions en France. Cette réglementation a été qualifiée de tous les noms : « mécanisme sinueux et turbide que les lois suivantes des 15 mai 2001 et 1er août 2003 n’ont pas su réformer»1; « Ce mécanisme complexe et laborieux marqué par le

caractère formel de la procédure2 ; « Législation impérative, formulaire tatillon, définitions

imprécises, risque accrue de contentieux…3

; « la protection des actionnaires est loin d’être efficace »4.

Pour certains, l’institution régulatrice de la loi NRE du 15 mai 2001, dans sa partie relative aux conventions réglementées, a été confrontée à la « fiction de la prévention des conflits »5. Le dispositif « largement inefficace» de l’art 40, renforcé par la loi 1966, n’a pu améliorer « la procédure de contrôle assez lourde »6.

Les Etats-Unis ont apporté à notre matière une nouvelle dimension. Ils ont connu, surtout durant cette décennie, beaucoup de scandales financiers qui ont été causés par des versements exorbitants à des dirigeants partants, à un moment où leurs sociétés restructuraient leurs finances et réduisaient leurs effectifs. L’année 2002 a été particulièrement éprouvante avec la chute d’Enron, Tyco, Global Crossing et Worldcom. Les règles de gouvernement d’entreprise, si chères aux Américains, ont été violées dans ces sociétés. La cupidité de leurs dirigeants manœuvrant dans l’ombre, avec une dangereuse opacité, a contribué aux désastres qu’elles ont essuyés. Des géants qui s’écroulent et secouent tout un monde autour d’eux. Le cabinet d’audit comptable Arthur Andersen n’est plus. Il a été la victime de ses propres dirigeants qui ont dissimulé, moyennant des pratiques frauduleuses et criminelles, les failles et déconfitures d’Enron. Un grand nombre de banques complices ont été touchées après avoir enregistré des transactions fictives pour dissimuler les dettes de cette malheureuse société. Les dirigeants financiers de Worldcom ont frauduleusement caché des dépenses pendant deux ans (2000-2002) pour embellir la situation financière de leur société.

1. D. Schmidt, Les conflits d’intérêts dans la société anonyme, éd. Joly, 2004, nº 100, pp. 110 et 111.

2. Idem., n° 102, p. 112

3. P. Le Cannu, Les conventions réglementées après le loi n° 2001 – 420 du 15 mai 2001, Bull Joly, juillet

2001, § 165, p. 720.

4. D. Bureau, actualisé par J.-J. Ansault, Contrats entre les administrateurs et la société, op. cit., p. 3.

5. La NRE et le droit des sociétés: Colloque-Université des Sciences sociales de Toulouse, le 5/10/2001: Centre

de droit des affaires, J.-F. Barbièri et M.H. Monserie – Bon, « Les conventions réglementées entre réalité de l’ambition régulatrice et fiction de la prévention des conflits », Monchrestien, 2003, p. 39.

(23)

La faillite d’Enron a inspiré la loi Sarbanes-Oxley Act (SOA), du 31 juillet 2002, sur la réforme de la compatibilité des sociétés cotées et la protection des investissements. Cette loi règlemente la destruction, la dissimulation, la modification et la falsification de toutes pièces et écritures qui sont sciemment entreprises dans le but d’entraver, d’obstruer ou influencer l’investigation ou la bonne administration de toute affaire : « knowingly alters, destroys,

mutilates, conceals, covers up, falsifies or makes a false entry in any record, documents or tangible object with the intent to impede, obstruct or influence the investigation or proper administration of any matter » 1.

Aux Etats-Unis, les conventions réglementées sont régies par un certain nombre de textes. En principe, chaque Etat de l’Union dispose de sa panoplie législative. Il n’y a pas de «loi sur les sociétés », au niveau fédéral, quoique certaines lois fédérales qui protègent l’épargne publique réglementent des aspects du droit des sociétés2. Etudier, pour les besoins de la présente thèse, toutes les législations étatiques aurait été une tâche plus qu’ardue. Le choix s’est porté sur l’Etat qui est le plus représentatif dans le domaine du droit des sociétés du climat général aux USA, à savoir le Delaware.

Un grand nombre de sociétés américaines sont immatriculées au Delaware, même si elles exercent leurs activités ailleurs. Cela est aussi vrai pour des sociétés de taille, cotées en bourse. En voici les raisons principales3, ajoutées aux avantages fiscaux que cet Etat offre :

- Les lois au Delaware permettent une flexibilité dans l’organisation et la gestion des affaires sociales, supérieure à celle des autres Etats;

- Le corps judicaire et le barreau sont expérimentés dans les affaires sociales ;

- La jurisprudence a abondamment interprété les lois sur les sociétés commerciales du Delaware et a pris des positions claires sur des points précis; ce qui confère une certaine stabilité au fonctionnement des sociétés à la lumière de ces positions;

- Le Delaware est un pionnier dans les réformes du droit des sociétés, le mettant constamment à jour, aussi fréquemment que la nécessité se manifeste.

Pour ces raisons-là, les Law Schools (écoles de droit) à travers les Etats-Unis consacrent au droit des sociétés de Delaware une place centrale dans leur cursus. Le Code des sociétés de Delaware annoté4 réserve un certain nombre d’articles aux transactions conclues entre les

1. § 802 SOA.

2. L. Solomon et A. Palmiter, Corporations, op. cit., §1. 2. 3, p. 10 ; on évoque ici, le SOA, à titre d’exemple.

3. Idem, § 3.2.3, p. 41

4. Delaware Corporation Laws Annotated, (DCLA), éd. 2007-2008 – LexisNexis, Matthew Bender Company

(24)

dirigeants et associés avec leurs sociétés sous des titres divers : « Interested Directors »1 (administrateurs intéressés), «Business combinations with interested stockholders »2 (combinaisons commerciales avec des actionnaires intéressés »), pour les sociétés anonymes, et « Business transactions of member or manager »3 (Opérations commerciales d’un associé

ou gérant) pour les sociétés à responsabilité limitée. Nous reproduisons ci-après le texte de base de la réglementation des conventions conclues entre les administrateurs intéressés et leur société, à savoir § 144 DCLA4:

“a) No contract or transaction between a corporation and one or more of its directors or officers, or between a corporation and any other corporation, partnership, association, or other organization in which one or more of its directors or officers are directors or officers, or have a financial interest, shall be void or voidable solely for this reason, or solely because the director or officer is present at or participates in the meeting of the board or committee thereof which authorizes the contract or transaction, or solely because his or their votes are counted for such purpose, if:

(1) The material facts as to his relationship or interest and as to the contract or transaction are disclosed or are known to the board or directors or the committee, and the board or committee in good faith authorizes the contract or transaction by the affirmative votes of a majority of the disinterested directors, even though the disinterested directors be less than a quorum; or

(2) The material facts as to his relationship or interest and as to the contract or transaction are disclosed or are known to the shareholders entitled to vote thereon, and the contract or transaction is specifically approved in good faith by vote of the shareholders; or

(3) The contract or transaction is fair as to the corporation as of the time it is authorized approved or ratified, by the board of directors, a committee thereof, or the shareholders.

(b) Common or interested directors may be counted in determining the presence of a quorum at a meeting of the board of directors or of a committee which authorizes the contract or transaction.”

Ce texte peut être traduit comme suit :

« a) Aucun contrat ou transaction entre une société et un ou plusieurs de ses administrateurs ou dirigeants exécutifs, ou bien entre une société et toute autre société anonyme, société en nom collectif, association, ou autre organisation dans laquelle un ou plusieurs de ses administrateurs ou dirigeants exécutifs ont un intérêt financier, sera nulle ou annulable uniquement pour cette raison, ou uniquement parce que l’administrateur ou le dirigeant exécutif est présent ou participe à la réunion du conseil ou du comité qui autorise le contrat ou la transaction, ou bien uniquement parce que ses ou leurs votes sont calculés à cette fin, si :

(1) Les éléments pertinents concernant sa relation ou intérêt et concernant le contrat ou la transaction sont révélés au conseil d’administration ou comité ou sont déjà connus par eux et le conseil ou comité autorise de bonne foi le contrat ou la transaction par un vote affirmatif de la majorité des administrateurs qui n’y sont pas intéressés, quand bien même les administrateurs non intéressés ne constituent pas un quorum ; ou

(2) Les éléments pertinents concernant sa relation ou intérêt et concernant le contrat ou la transaction sont révélés aux associés jouissant d’un droit de vote ou sont connus par eux et le contrat ou la transaction est spécifiquement approuvé de bonne foi par un vote des associés; ou

1. Titre 8, §144 DCLA, p. 42.

2. Idem, § 203, p. 76.

3. 6 §18 – 107 DCLA, p. 395.

4. Nous signalons que ce texte n’a subi aucune modification depuis des décennies. Sa généralité en fait un texte

(25)

(3) Le contrat ou la transaction est équitable pour la société au moment ou il a été autorisé, approuvé, ou ratifié par le conseil d’administration, un des comités du conseil ou des associés.

(b) Les administrateurs communs ou intéressés peuvent être calculés pour la détermination du quorum d’une réunion du conseil d’administration ou d’un comité qui autorise le contrat ou la transaction.

Cependant, le recours pour une bonne compréhension du droit américain uniquement au droit du Delaware (textes et jurisprudence) n’est pas suffisant1. Des tentatives, plus ou moins réussies, pour uniformiser et intégrer les concepts qui se retrouvent dans tous les Etats fédérés, ont abouti au niveau de l’American Bar Association (ABA) et de l’American Law

Institute (ALI) à l’élaboration d’un certain nombre de normes qui ont trait, entre autres, à

notre sujet. Ces normes sont réunies dans le Revised Model Business Corporation Act (RMBCA) (modèle d’une loi sur les sociétés commerciales) et les Principles of Corporate

Governance (ALI PCG) (Principes de gouvernement d’entreprise). Le volume du contentieux

impliquant le droit des sociétés commerciales aux Etats-Unis va au-delà de toute proportion. Cela a été bénéfique à la contribution du Barreau américain « au développement du droit Fédéral comme celui des Etats »2.

Le Model Business Corporation Act est sorti en 1946, dépassant les limites de son prédécesseur, le Uniform Business Corporation Act (UBCA). Il ne s’agit plus d’élaborer une loi « uniforme », mais de présenter un modèle inspirateur des législations étatiques. Ce nouveau texte, plus souple, est aujourd’hui connu sous le titre de « RMBCA » Sa dernière version a été adoptée en 1984 par le Committee on Corporate Laws of the Section of

Corporations ; Banking and Business Law of the American Bar Association3 et a connu depuis un certain nombre de retouches4. Les textes nous concernant figurent sous les titres suivants : « Standards of Conduct for Directors » 5 : (Critères de conduite – de comportement – des administrateurs); « Standards of Liability for Directors »6

(« Critères de la responsabilité des administrateurs); « Directors Conflicting Interest Transactions »7 (Opérations à intérêts conflictuels des administrateurs); « Judicial Actions »8 (Actions en justice); « Directors Actions »9 (Décisions des administrateurs) et « Shareholders Actions »10

(Décision des associés).

1. Nous avons eu recours à la jurisprudence d’autres Etats pour une plus complète assimilation du sujet.

2. A. Tunc, Le droit américain des sociétés anonymes, op. cit., p. 11.

3. Le comité du droit des sociétés de la section des sociétés, banques et commerces du Barreau américain.

4. La version utilisée par l’auteur de cette thèse est l’édition de 2004, avec mise à jour au 30 septembre 2003,

figurant à la § 2.25 du chapitre 1, Flecher Cyclopedia of the Law of Private Corporations; Westlaw, 2004.

5. § 8.30, RMBCA, sous – chapitre C, p. 42.

6. Idem, § 8.31, p. 43.

7. Idem, sous – chapitre F, § 8.60, p. 49.

8. Idem, § 8.61, p. 50.

9. Idem, § 8.62, p. 50.

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