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L'analyse spatiale des restes fauniques d'un site d'habitation des Inuits du Cuivre, au XIXe siècle, sur l'île Banks (T.N.O.), Canada

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Texte intégral

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© Roxane Lévesque, 2019

L'analyse spatiale des restes fauniques d'un site

d'habitation des Inuits du Cuivre, au XIXe siècle, sur l'île

Banks (T.N.O.), Canada

Mémoire

Roxane Lévesque

Maîtrise en archéologie - avec mémoire

Maître ès arts (M.A.)

(2)

L’analyse spatiale des restes fauniques

d’un site d’habitation des Inuits du

Cuivre, au XIX

e

siècle, sur l’île Banks

(T.N.O.), Canada

Mémoire

Roxane Lévesque

Sous la direction de :

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iii

Résumé

Ce mémoire examine les modèles de distribution de nourriture et d’échange réciproque des Inuits du Cuivre à travers l’analyse spatiale de restes fauniques, principalement des sections de bœufs musqués (Ovibos moschatus). La collection ostéologique du site de Kuptana (PjRa-18), excavée au début des années 1980 par Clifford Hickey, a été utilisé afin d’identifier des preuves des pratiques de partage. En raison de sa diversité taxonomique limitée et du degré de préservation des ossements, le site de Kuptana a été jugé comme un contexte parfait pour identifier les modèles de partage de nourriture grâce aux techniques de remontage des os et de l’analyse spatiale.

L’analyse faunique a permis d’identifier les étapes de dépeçage, de mise en cache et de consommation sur le site tout en établissant des liens entre ces étapes grâce au remontage des ossements, au réassemblage des articulations, à l’identification de paires d’éléments et finalement à la cartographie de leur distribution sur le site. Ces éléments ont fourni un moyen de documenter les chemins que peuvent prendre les carcasses sur un site résidentiel et d’interpréter la mobilisation des ressources alimentaires dans une communauté de chasseurs-cueilleurs.

Cette analyse présente une étude empirique détaillant la manière dont les sections de carcasses de bœufs musqués étaient partagées entre les membres d’un campement d’été inuit du XIXe siècle. Cette étude a permis de donner des preuves d’un échange de nourriture structuré entre les unités familiales composants le groupe résidentiel ainsi que d’évaluer l’égalitarisme des relations sociales dans une société de bandes. Finalement, elle permet l’évaluation d’une méthodologie capable de réaliser ce type de recherche en zooarchéologie.

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Abstract

This study examines Copper Inuit food distribution and reciprocal exchange practices through a spatial analysis of archaeological faunal remains, namely musk ox (Ovibos moschatus) osteological remains. A faunal collection from the Kuptana site (PjRa-18), excavated in 1981-82 by Clifford Hickey, Banks Island (N.W.T.), Canada, was used to provide evidence of food sharing practices. Because of it’s preservation and limited taxonomic diversity, the Kuptana site was deemed to be an ideal context for the application of bone refitting and spatial analysis techniques used to reveal food sharing patterns.

The faunal analysis identifies butchering, storage and consumption areas on the site and established links between them by refitting comminuted bone, by rejoining articulated bones and through the identification of matched pairs of elements and by mapping their spatial distribution. These elements provide a means of documenting the complex paths carcasses may take at a residential site and of interpreting the mobilisation of food resources in a foraging community.

The analysis provides an empirical case study detailing how parts of musk ox carcasses were shared amongst members of a 19th century Inuit summer camp. The study provides evidence of structured food exchange between family units comprising the residential group, and characterises egalitarian social relationships in a band society. Finally, it contributes an evaluation of methods available to zooarchaeologist for pursuing these goals.

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Table des matières

Résumé ... iii

Abstract ... iv

Table des matières ... v

Liste des figures ... viii

Liste des tableaux ... x

Remerciements ... xi

Introduction ... 1

État de la question ... 2

Objectifs de recherche ... 2

Zooarchéologie et analyse spatiale ... 4

Intérêt du sujet ... 6

Approches conceptuelles et théoriques... 7

L’anthropologie économique ... 7

Middle-Range Theory... 12

Syntaxe spatiale ... 16

Résumé ... 19

Problématique ... 20

Présentation du plan de rédaction du mémoire ... 23

Chapitre 1. Bilan historiographique ... 25

1.1 L’organisation sociale des sociétés de bandes ... 25

1.1.1 Variations de l’organisation sociale des groupes de chasseurs-cueilleurs ... 26

1.1.2 Égalité versus Hiérarchie ... 28

1.2 Les Inuits du Cuivre et l’île Banks ... 31

1.2.1 Pourquoi choisir d’étudier les Inuits en général et les Inuits du Cuivre en particulier ... 32

1.2.2 Inuits du Cuivre : histoire, occupation du territoire et caractéristiques ... 34

1.2.3 Pourquoi étudier l’île Banks (T.N.O.) et le site de Kuptana (PjRa-18) ... 39

1.2.4 Cadre spatio-temporel : Occupation de l’île Banks au XIXe siècle ... 40

1.2.5 Biologie et comportements du bœuf musqué : principale espèce de mammifère de l’île Banks ... 41

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vi

2.1 Sélection du site à l’étude ... 44

2.2 Kuptana (PjRa-18) ... 47

2.3 Collecte primaire des données ... 49

2.4 Données utilisées pour l’étude présente ... 51

2.5 Recherches antérieures ... 54

2.6 Études pionnières ... 56

2.6.1 Pincevent ... 56

2.6.2. L’étude d’Anne Stevens Henshaw, Île de Baffin ... 58

2.7 Sélection de la méthodologie employée ... 59

2.8 Sommaire ... 62

Chapitre 3. Méthodologie de l’étude ... 63

3.1 Identification des espèces et des éléments ostéologiques ... 63

3.2 Assemblage des éléments ostéologiques correspondants ... 65

3.3 Identification des éléments articulatoires adjacents ... 67

3.4 Appariement des éléments ostéologiques ... 68

3.5 Biais de l’étude ostéologique ... 71

3.6 Statistiques ... 73

3.7 Représentation graphique des résultats ... 74

3.7.1 L’application des SIG en archéologie ... 74

3.7.2 Création de cartes « d’os » pour chacune des zones d’échantillonnage ... 78

3.7.3 Cartes de distribution spatiale... 81

3.8 Analyse spatiale ... 83

3.9 Sommaire ... 84

Chapitre 4. Résultats ... 85

4.1 Description de l’inventaire étudié et interprétation économique et sociale du site réalisée par R. Will ... 85

4.2 Résultats de l’analyse ostéologique ... 88

4.2.1 Assemblage des éléments ostéologiques correspondants ... 90

4.2.2 Appariement des éléments articulatoires adjacents ... 96

4.2.3 Identification des paires d’éléments ... 101

4.3 Résultats des statistiques ... 105

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4.3.2 Comparaison de la présence des os gauche et droit ... 112

4.4 Résultats de l’analyse spatiale ... 122

4.5 Sommaire ... 126

Chapitre 5. Interprétation des résultats et discussion ... 127

5.1 Interprétation de l’analyse ostéologique combinée à l’analyse spatiale ... 127

5.1.1 Données et preuves de la saisonnalité de la chasse ... 130

5.2 Organisation sociale grâce à l’analyse spatiale ... 131

5.2.1 Uniformité ... 131

5.3 Discussion sur les divers résultats obtenus ... 133

5.3.1 Contemporanéité ... 136

5.3.2 Fragmentation des ossements pour la récupération de la moelle ... 138

5.3.3 Identification des schémas de partage ... 139

5.3.4 Réciprocité maintenue ... 144

5.4 Efficacité de la méthode ... 144

5.4.1 Avantages de l’utilisation de la méthode ... 145

5.4.2 Désavantages de l’utilisation de la méthode... 146

5.5 Sommaire ... 147

Conclusion ... 148

Retour sur la problématique ... 148

Recommandations ... 151

Bibliographie ... 154

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Liste des figures

Figure 1 : Carte du territoire ancestral des Inuits du Cuivre (source : Damas 1984 : 398) .. 35 Figure 2 : Sledge party leaving HMS Investigator in Mercy Bay under the command of Lieutenant Gurney Cresswell, 15 April 1853; Library and Archives Canada, Acc. No. R9266-774 Peter Winkworth Collection of Canadiana ... 41 Figure 3 : Carte de l’île Banks illustrant la position des sites archéologiques de Haogak (PhPo-3), Nasogaluak (PgPw-3) et Kuptana (PjRa-18) (source : Will 1985 : 93) ... 45 Figure 4 : Carte du site archéologique de Kuptana (PjRa-18), illustrant l’emplacement des différentes saisons de fouilles et des diverses composantes du site (source : à partir des cartes de Will (1985 : 116, 201) et Hickey (1981 : 7)) ... 48 Figure 5 : Carte de la section cartographiée de Kuptana (PjRa-18) illustrant l’emplacement des zones d’échantillonnage, des regroupements de pierres et des anneaux de tentes ... 53 Figure 6 : Méthodes utilisées pour recoller les différents ossements (Photo : R. Lévesque) ... 66 Figure 7 : Représentation du squelette de bœuf musqué adaptée de celle de Simon Parfitt (Parfitt 1985 : 26) ... 79 Figure 8 : Carte originale tirée de la thèse de doctorat de Richard Will (1985) ... 82 Figure 9 : Carte retravaillée pour mieux illustrer l’emplacement des structures de pierres et des zones d’échantillonnage ... 82 Figure 10 : Carte illustrant l'emplacement des concentrations d'os étudiées par Will et leur proximité avec les anneaux de tentes et les zones d'échantillonnage ... 87 Figure 11 : Carte illustrant l’emplacement des 6 zones d’échantillonnage sur le site de Kuptana (PjRa-18) ... 89 Figure 12 : Exemples de remontages effectués, les remontages proviennent de la zone 1 (A et B) et de l'unité 48 (C) A) Métatarse, B) Tibia, C) Tibia (Photos : R. Lévesque) ... 95 Figure 13 : Exemple d’éléments articulatoires adjacents formant les articulations des extrémités des membres (À gauche : métacarpe et carpes, À droite : métatarse et tarses) (Photo : R. Lévesque) ... 100 Figure 14 : Exemple d’éléments articulatoires adjacents pour deux des types les plus communs(À gauche : articulation formée d’un humérus, d’un radius et d’un ulna; À droite : articulation formée par les trois phalanges) (Photos : R. Lévesque) ... 101 Figure 15 : Paire d'humérus composée d'ossements provenant des unités 43 et 44 (Photos : R. Lévesque) ... 103 Figure 16 : Paire d'humérus composée d'ossements provenant des unités 11, 17 et 36 (Photos : R. Lévesque) ... 103 Figure 17 : Les deux paires de tibias qui ont été identifiées dans la collection du site de Kuptana (PjRa-18) (Photos : R. Lévesque) ... 104 Figure 18 : Paire de métatarses composée d'ossements provenant des unités 17 et 44 (Photo : R. Lévesque) ... 104

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Figure 19 : Paire de métatarses composée d'ossements provenant de l’unité 44 (Photos : R.

Lévesque)... 104

Figure 20 : Représentation de la présence des os de la zone 1 ... 108

Figure 21 : Représentation de la présence des os de la zone 2 ... 108

Figure 22 : Représentation de la présence des os de la zone 3 ... 109

Figure 23 : Représentation de la présence des os de la zone 4 ... 109

Figure 24 : Représentation de la présence des os de la zone 5 ... 110

Figure 25 : Représentation de la présence des os de la zone 6 ... 110

Figure 26 : Représentation de la présence des os sur le site entier ... 111

Figure 27 : Répartition des os gauches de la zone 1 ... 115

Figure 28 : Répartition des os droits de la zone 1 ... 115

Figure 29 : Répartition des os gauches de la zone 2 ... 116

Figure 30 : Répartition des os droits de la zone 2 ... 116

Figure 31 : Répartition des os gauches de la zone 3 ... 117

Figure 32 : Répartition des os droits de la zone 3 ... 117

Figure 33 : Répartition des os gauches de la zone 4 ... 118

Figure 34 : Répartition des os droits de la zone 4 ... 118

Figure 35 : Répartition des os gauches de la zone 5 ... 119

Figure 36 : Répartition des os droits de la zone 5 ... 119

Figure 37 : Répartition des os gauches de la zone 6 ... 120

Figure 38 : Répartition des os droits de la zone 6 ... 120

Figure 39 : Répartition des os gauches pour le site entier ... 121

Figure 40 : Répartition des os droits pour le site entier ... 121

Figure 41 : Carte illustrant les liens entre les zones où l’on trouve des éléments qui remontent ... 123

Figure 42 : Carte illustrant les liens entre les zones grâce au remontage des articulations 124 Figure 43 : Carte illustrant les liens entre les zones après l’appariement des ossements gauches et droits ... 125

Figure 44 : Carte de répartition des pattes postérieures de différents individus du site de Pincevent illustrant la majorité de partages effectués entre les zones (flèches rouges) versus les partages réalisés à l’intérieur d’une même zone (flèche jaune) (Source : à partir du graphique de Enloe et David 1989 : 279) ... 135

Figure 45 : Représentation schématique des aires d'occupation et des aires d'activités et des relations qui existent entre ces secteurs ... 143

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Liste des tableaux

Tableau 1 : Exemple d’enregistrement d’un os pour l’inventaire en suivant les

spécifications et les abréviations du code NABONE ... 65

Tableau 2 : Tableau comparatif du nombre de restes par espèce (NRE) entre l’inventaire de Will (1985), celui de Woollett (1991) et celui disponible à l’étude ... 86

Tableau 3 : Réassemblage des éléments adjacents (Unités) ... 93

Tableau 4 : Réassemblage des éléments adjacents (Zone) ... 94

Tableau 5 : Réassemblage des éléments adjacents (Site) ... 94

Tableau 6 : Identification des éléments articulatoires adjacents (Unité) ... 99

Tableau 7 : Identification des éléments articulatoires adjacents (Zone) ... 100

Tableau 8 : Identification des éléments articulatoires adjacents (Site) ... 100

Tableau 9 : Identification du nombre d’éléments ostéologiques présents par zone et pour le site au complet ... 106

Tableau 10 : Identification des éléments ostéologiques pour chaque zone et par côté ... 113

Tableau 11 : Représentation graphique des différents modèles de partage possibles à partir d’une zone de dépeçage (étoile) ... 140

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Remerciements

La réalisation de cette recherche de maîtrise n’aurait pas été possible sans l’aide et la participation de plusieurs instances et individus. Je tenais donc à remercier mon directeur de recherche, James Woollett, pour son temps et ses précieux conseils tout au long des processus d’analyse et d’écriture de ce mémoire. Je tiens également à le remercier pour son soutien et sa compréhension qui m’ont permis de surpasser les diverses embûches rencontrées au cours de cette recherche. Je veux également remercier Allison Bain pour la prélecture et pour les conseils avisés.

Je ne peux pas passer sous silence la collaboration du Musée canadien de l’histoire à Gatineau qui m’a généreusement prêté la collection archéologique qui a servi à cette étude. Je tenais aussi à remercier mesdames Stacey Girling-Christie et Christine Rivest qui m’ont permis d’aller visiter les collections sur place et qui ont autorisé le prêt et le renouvellement du prêt de la collection au fil des années.

Je remercie également mes collègues du laboratoire de zooarchéologie, soit Véronique Marengère et Stéphane Noël, pour leur appui, mais aussi pour avoir répondu à mes multiples questions, pour m’avoir aidée à y voir plus clair dans mes analyses et pour m’avoir permis d’explorer de nouvelles pistes de réflexion. Je veux aussi remercier tous mes collègues des différents laboratoires d’archéologie d’avoir rendu cette expérience des plus enrichissante. Un merci spécial à Laurence Pouliot pour son soutien moral et sa présence tout au long de cette aventure. J’espère avoir été capable de te rendre la pareille.

Finalement, je veux remercier toute ma famille pour leur soutien sans failles et leurs encouragements. Je sais que vous ne comprenez pas toujours où je m’en vais avec mes recherches, mais votre soutien inconditionnel vaut tout l’or du monde. Je tiens finalement à remercier mon copain, Jean-Simon, qui m’a aidée à passer à travers les hauts et les bas de cette recherche. Merci de ta présence, de tes encouragements et de ta patience à m’écouter ressasser les mêmes problèmes sans fin.

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L’analyse spatiale des restes fauniques d’un site

d’habitation des Inuits du Cuivre, au XIX

e

siècle, sur l’île

Banks (T.N.O.), Canada

Introduction

Les sociétés de bandes constituent, selon Elman Service (1962 : 107), le modèle d’organisation sociale fondamentale de l’humanité. Elles ont perduré durant des périodes de temps diverses partout autour du monde, de la préhistoire jusqu’au XXe siècle. Le passé autochtone du Canada est caractérisé par la présence étendue et continue d’une vaste majorité de sociétés de bandes. C’est d’ailleurs dans les territoires du nord où l’on retrouve exclusivement ce type d’organisation sociale. Toutefois, une vision trop simpliste de la littérature classique anthropologique a entraîné la minimisation de l’importance de la variabilité que ces sociétés de bandes démontrent à travers leur organisation sociale, leur démographie, leur économie, et ce, aux quatre coins du monde et au sein même du territoire canadien (Whitelaw 1994 : 217-218). Une meilleure compréhension des modalités des diverses variations discernables à l’intérieur de ce modèle d’organisation sociale constitue une nécessité pour l’étude de ces sociétés de bandes.

Selon la conception anthropologique traditionnelle (Hill et al. 2011 ; Renfrew et Bahn 2000 ; Service 1962), les sociétés de bandes se composent d’associations de cellules familiales nucléaires regroupant typiquement entre vingt-cinq et cent individus. Ces sociétés sont notamment caractérisées par une organisation sociale égalitaire, une économie de chasse-cueillette ou d’horticulture, ou d’un ensemble des deux, une mobilité typique du nomadisme ou de la transhumance, une autorité informelle et aucune organisation religieuse standardisée. Il s’agit d’ailleurs du type dominant d’organisation sociale pour la majorité des chasseurs-cueilleurs du présent ethnographique, et ce, depuis les débuts de l’humanité jusqu’à l’origine de la production de nourriture. L’élément clé sous-jacent à ce modèle de société réside dans son égalitarisme et plus précisément, dans son éthique de réciprocité. Selon Burch (1991 : 95) : « […] generalized reciprocity is not only present in all

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hunter-2

gatherer societies, but that it is virtually the only form of material exchange that takes place in such societies ».

Cependant, l’arrivée de certains évènements peut entraîner la transformation de l’exécution de cette réciprocité et modifier le degré d’égalitarisme d’un groupe de bande. Les différents types de systèmes d’échange établis par Woodburn (1991 : 32-33), soit le système de retour immédiat et le système de retour différé, permettent d’identifier le lien entre les organisations sociale et économique. Ils permettent également d’observer la variabilité possible des relations égalitaires en contexte où les réseaux de réciprocité sont limités. La distinction établie par Binford entre les chasseurs, les cueilleurs et les collecteurs a également permis de faire la lumière sur la variabilité possible pour ce type d’organisation sociale (Rowley-Conwy 2001 : 40). Cette recherche étudie l’économie des chasseurs-cueilleurs en général en raison de l’importance de ce type de société parmi les sociétés de bandes du Canada. Elle tente aussi d’établir l’organisation sociale découlant de l’économie de réciprocité chez les Inuits du Cuivre en particulier.

L’introduction à cette recherche de maîtrise dressera l’état de la question en présentant les différents objectifs de recherche, la méthode et l’intérêt du sujet. La problématique de recherche ainsi que la présentation du plan de rédaction du mémoire de maîtrise seront par la suite présentées.

État de la question

Objectifs de recherche

L’organisation sociale constitue la base de toute société. En effet, chaque interaction, entre individus ou entre groupes, chaque division sociale, chaque relation économique, etc. est régie par un code de croyances, de droits et de devoirs qui permettent aux individus de s’organiser en groupes et de maximiser l’utilisation de leur territoire. Un regroupement d’individus, qu’ils soient deux ou une centaine, possède une organisation sociale qui lui est propre et que l’on se doit de comprendre afin de pouvoir replacer les différentes actions et interactions des gens dans leur juste contexte. Puisque cette organisation régit tous les aspects et les activités d’une société, les traces laissées par cette dernière comprendront forcément des indices permettant de reconstituer cet agencement social. Reconnaître les traits

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caractéristiques de l’organisation sociale d’un groupe de par leurs activités permet d’étudier le groupe concerné selon leurs propres barèmes et de mieux identifier les différentes interactions entre les individus.

Une des activités essentielles des groupes de chasseurs-cueilleurs comprend les activités de subsistance, soit la récupération de nourriture. Ces activités comprennent la chasse, la pêche, la cueillette et ultimement le partage de ces ressources. Un des buts sous-jacents de cette recherche est d’étudier l’intégration économique des sociétés de bandes dans les institutions de réciprocité qui ont lieu sur une base journalière dans l’économie de subsistance. Pour ce faire, l’accent sera mis sur les données zooarchéologiques d’un camp saisonnier des Inuits du Cuivre de l’île Banks (T.N.O.) dans le but de reconstruire les pratiques de partage de denrées entre les habitations. Il sera ainsi possible de réaliser une étude axée sur l’organisation sociale de cette société de bandes à l’aide de la zooarchéologie en se basant sur l’analyse spatiale.

Le nord de l’île Banks, territoire à l’étude, a été occupé par les Inuits du Cuivre dans le seul but de récupérer le matériel provenant du navire britannique échoué, le HMS Investigator. Ce contexte historique quelque peu particulier des sites de l’île Banks favorise un questionnement concernant l’évolution de la notion d’égalitarisme parmi les individus habitant ces lieux. En effet, la présence de culture matérielle et de matière première étrangères crée une pression sociale qui entraîne l’accumulation de biens encourageant un déséquilibre dans l’organisation sociétale (Hickey 1984 : 24, 30). Il est donc possible d’observer des individus ayant accumulé une certaine quantité de matériaux enviés imposer leurs propres règles d’échange, créant ainsi une instabilité entre le receveur et le donneur et modifiant les relations entre les individus. Ce déséquilibre est-il visible en ce qui concerne les ressources accessibles de manière égale à tous, soit les denrées de subsistance? L’objectif est donc de tenter d’observer si le maintien de l’égalitarisme peut être identifié dans les contextes d’activités de subsistance alors qu’il y a possiblement présence d’instabilité sociale dans les autres aspects de cette culture.

Le but de cette recherche étant donc de comprendre l’organisation sociale d’un groupe par l’analyse spatiale de leurs restes fauniques. Diverses études ont été consultées afin d’identifier la meilleure méthode pour y parvenir. Certains éléments semblaient essentiels à

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la réalisation de cette analyse. Premièrement, la collection faunique devait être restreinte en terme de diversité d’espèces afin de porter l’accent sur l’organisation spatiale des éléments ostéologiques plutôt que sur leur identification. En deuxième lieu, il nous a paru plus avisé de traiter d’un groupe culturel dont l’organisation sociale serait simple, mais non simpliste. De ce fait, les groupes de chasseurs-cueilleurs présentent un ensemble d’organisations sociales et économiques complexe, mais les éléments qui les composent sont simples et souvent uniques. Il nous a en effet semblé que d’étudier une société urbaine ou un contexte historique entraînerait trop de facteurs extérieurs inconnus et qu’il serait difficile de créer des comparaisons et de reproduire l’expérience. Finalement, il était nécessaire de travailler avec des collections ostéologiques en bon état pour pouvoir mener à bien les étapes de la méthodologie sélectionnée. De plus, cette dernière ayant été utilisée dans très peu de recherches précédentes, il nous a semblé plus qu’approprié de porter notre attention de ce côté et d’évaluer sa pertinence. De cette façon, cette recherche de maîtrise est une exploration de la pertinence et de l’efficacité d’une méthodologie dans un contexte où l’on tente d’identifier l’organisation sociale d’un groupe culturel.

Zooarchéologie et analyse spatiale

Sans présenter immédiatement les différentes étapes de la méthodologie qui a été retenue pour réaliser les analyses, ce qui sera fait dans une section subséquente, il convient de clarifier l’utilisation de la méthode générale, soit la zooarchéologie. Cette dernière étudie les restes fauniques en contexte archéologique et offre plusieurs avantages dans l’analyse de l’organisation sociale d’un groupe.

Tout d’abord, cette sous-discipline de l’archéologie représente un des moyens les plus efficaces pour étudier les pratiques de subsistance d’un ensemble d’individus. En effet, elle permet d’identifier les divers animaux chassés, les sections consommées, les diverses techniques de chasse et de dépeçage par les marques laissées sur les os, l’utilisation tertiaire des différentes parties d’une carcasse, etc. La zooarchéologie est ainsi en mesure d’établir un portrait assez fidèle des activités de subsistance et de l’utilisation des produits animaliers dans une société (Reitz et Wing 2010 : 6-7). De plus, les ressources animales peuvent être acquises par tous de manière égale. Tout individu se doit de participer aux activités d’approvisionnement en nourriture pour subvenir aux besoins alimentaires de sa famille et,

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à plus grande échelle, de son groupe. Dans les sociétés de chasseurs-cueilleurs, la chasse des grands animaux, tâche demandant une certaine mobilité et des compétences particulières, est généralement l’affaire des hommes. Toutefois, les femmes, les enfants et les aînés peuvent participer à la collecte de nourriture en s’adonnant aux activités de trappe, de chasse au petit gibier, de pêche et de cueillette. Ces activités de subsistance visent donc toute la communauté et sont l’affaire de tous. La zooarchéologie est une méthode intéressante pour étudier le fonctionnement d’une société en considérant que son objet d’étude est sensiblement le point central des activités d’un groupe.

La zooarchéologie a également été utilisée pour étudier plusieurs sociétés de bandes préhistoriques et historiques, dans différents contextes. James G. Enloe et Françoise David (1989, 1994) ont étudié le site de Pincevent en France, alors qu’Anne Henshaw (1995, 1999) a étudié des sites d’habitation du Nord Canadien, plus spécifiquement dans la baie de Frobisher, sur l’île de Baffin. Ces études ont permis d’établir que la méthode peut être utilisée pour étudier l’organisation sociale d’un groupe d’individus et plus particulièrement le concept d’égalitarisme présent dans une société.

En parallèle avec la zooarchéologie, l’utilisation de l’analyse spatiale, quant à elle, permet d’apporter des bénéfices certains dans l’étude de l’organisation sociale d’une société de chasseurs-cueilleurs. La vision humaine du monde est souvent basée sur une notion d’espace. En effet, chaque individu, chaque société, vit et habite à l’intérieur d’un espace physique et mental qui est lui-même défini et compris selon certains concepts sociétaux. L’espace doit donc être observé et analysé en tant que variable sociale à part entière. L’analyse spatiale permet de complémenter plusieurs autres types d’analyse. Cette analyse permet, entre autres, d’observer le déplacement des objets, ou dans ce cas-ci des ossements, sur le site étudié (Binford 1983 : 298-300). Il est également possible d’identifier les liens qui existent entre les différentes unités d’habitation ou les différentes aires d’activités. Il s’agit en général de tenter de recréer le chemin parcouru par les ossements dans l’ensemble de l’espace occupé par le site archéologique. De cette façon, il est donc possible de recréer l’organisation sociale d’un groupe en observant les relations entre les diverses structures d’habitation et les artefacts présents à l’intérieur de celles-ci (Renfrew et Bahn 2000 : 190).

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Cette méthode a été utilisée en combinaison avec la zooarchéologie dans les deux études mentionnées plus haut, soit sur le site de Pincevent en France (Enloe et David 1989) et dans la thèse de doctorat d’Anne Henshaw (1995). Ces deux études ont démontré que la combinaison de ces deux techniques permettait d’obtenir des résultats concluants dans l’analyse de l’organisation sociale des sociétés de chasseurs-cueilleurs. Pour résumer, notre recherche tente de comprendre l’organisation sociale d’un groupe d’individus par l’analyse de l’utilisation de l’espace qu’ils occupent en utilisant les restes fauniques comme objet d’étude.

Intérêt du sujet

L’organisation sociale constitue la base de toute société et même sans en être conscient, tout un chacun suit ses lois, souvent non écrites. Pour sa part, l’archéologie tente de comprendre les différentes facettes des habitudes de vie souvent oubliées de peuples qui n’existent plus ou qui ont eux-mêmes oublié leurs façons de faire ancestrales. Une des difficultés de l’archéologie est d’identifier les normes sociales qui régissaient l’action des gens afin d’étudier les groupes humains dans leur propre contexte social. Il est donc intéressant d’évaluer une méthodologie permettant de retracer l’organisation sociale d’un groupe culturel. Cette recherche permet également de voir l’impact de la dispersion des ossements sur un site. Il ne s’agit pas simplement d’une analyse zooarchéologique, mais plutôt d’une analyse spatiale se servant des ossements comme objet d’étude. Les chasseurs-cueilleurs étant souvent en mouvement par petits groupes familiaux, il est intéressant de tenter de comprendre le niveau d’interaction entre ces cellules familiales. On essaie aussi d’établir si les lois régissant l’organisation sociale sont générales ou déterminées par chaque famille élargie. En utilisant cette méthodologie dans un environnement possédant des caractéristiques particulières bien définies dans le temps et l’espace, il est possible d’évaluer sa validité. Il serait donc possible, lors d’études futures, de réutiliser cette méthode dans d’autres contextes complètement différents et d’obtenir des résultats assez fiables. Finalement, la courte occupation des sites, la faible diversité faunique et l’excellente préservation des ossements rendent ces sites archéologiques parfait comme territoire d’étude permettant de mettre à l’épreuve cette méthodologie spécifique.

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Le site archéologique à l’étude a déjà fait l’objet de recherches par différents chercheurs et étudiants aux cycles supérieurs. Toutefois, aucune analyse spatiale ayant pour objectif la documentation de la distribution de la nourriture n’a été effectuée sur aucun des sites de l’île Banks. Cette recherche permet donc d’étudier un aspect encore non exploré pour ce site et d’apporter de nouvelles connaissances sur ce groupe culturel. L’identification des diverses facettes de l’organisation sociale de ce groupe culturel par rapport à leurs manifestations spatiales constitue la motivation première de la réalisation de ce projet.

Approches conceptuelles et théoriques

Dans l’élaboration d’un projet de recherche et d’une problématique, diverses avenues théoriques s’imposent d’elles-mêmes comme base de travail en fonction du type de recherche, de la méthode employée, des questions de recherche, etc. En ce qui concerne le présent projet, l’anthropologie économique, la Middle-Range Theory et la syntaxe spatiale sont toutes trois appropriées afin de fournir l’assise nécessaire au développement et à la compréhension de cette étude.

La sélection de ces trois théories a été réalisée en se basant sur certains de leurs concepts clés, qui sont par la suite devenus les thèmes centraux sur lequel s’appuie cette recherche. Pour l’anthropologie économique, les notions de partage et de réciprocité ont été principalement retenues. L’utilisation des analogies et de l’ethnographie est ce qui nous a amenés à utiliser la Middle-Range Theory. Finalement, la volonté de comprendre les mouvements des individus dans un espace donné a conduit à l’utilisation de la syntaxe spatiale.

L’anthropologie économique

L’anthropologie économique, selon Francis Dupuy (2008 : 9) : « vise à saisir, dans une perspective comparée, la gamme des dispositifs mis en œuvre par les sociétés de manière à produire et à échanger les biens matériels nécessaires à leur consommation et à leur reproduction en tant que groupes ». Alors que Plattner (1989 : 1) la décrit comme étant : « the study of economic institutions and behavior done in anthropological places and in

ethnographic style ». L’anthropologie économique, telle qu’utilisée aujourd’hui, est le fruit

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du XXe siècle. Le travail de Bronislaw Malinowski, par l’étude des habitants des îles Trobriand, a, en grande partie, permis l’amélioration de la discipline grâce à sa critique de l’ethnocentrisme des Européens. De fait, sa volonté d’utiliser l’anthropologie comme une science plus globale et de comprendre une économie différente de celle occidentale a grandement favorisé l’expansion de cette dernière (Wilk 1996 : 33).

L’anthropologie économique consiste principalement en une façon de voir le monde et d’analyser les sociétés présentes et passées. Les comportements et les institutions économiques peuvent être analysés indépendamment en matière de paramètres économiques. Cependant, ce type d’étude ignore tous les paramètres non économiques pertinents, qui à leur façon, influencent l’économie. L’anthropologie économique permet, quant à elle, d’interpréter l’économie comme un tout intégré dans la société (Plattner 1989 : 3-4). Elle porte une attention particulière à ce que l’homme produit, en mettant l’accent sur les différentes relations liants les hommes entrent eux de par leurs objets. Ce champ de recherche tente de déterminer pourquoi les individus veulent certaines choses, pas seulement comment ils les obtiennent (Wilk 1996 : 32).

Un des grands buts de l’anthropologie économique est d’identifier ce qui rend les gens égoïstes, sociaux ou moraux (ibid. : 40). L’anthropologie économique traite des relations entre l’économie, la parenté et l’écologie et fluctue en fonction des changements historiques et socioculturels qui affectent ces relations (Gregory 2009 : 292). Le défi principal de cette approche est de convertir les concepts formels de l’économie pour les libérer des biais culturels sous-jacents (Plattner 1989 : 12).

Ce sujet d’étude est aussi ancien que diversifié puisque les scientifiques, les voyageurs et les administrateurs coloniaux ont écrit à propos des institutions économiques des peuples autochtones et non occidentaux depuis des centaines d’années (Plattner 1989 : 1). L’anthropologie économique a pris son essor dans la deuxième moitié du XXe siècle, durant l’apogée de la Guerre froide, période de grand développement de la théorie économique et de l’expansion économique des sociétés occidentales (Hann et Hart 2011 : 2). Il s’agit, en effet, d’une période où les conflits politiques sont structurés et ancrés dans les conflits économiques et idéologiques qui font rage. Durant les années 1970, l’anthropologie économique, combinée à l’étude de la parenté et de l’anthropologie écologique, était perçue

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comme le cœur de la discipline de l’anthropologie (Gregory 2009 : 285). Dans l’ère pré-1970, plusieurs chercheurs, tels Mauss, Polanyi, Lévi-Strauss et Sahlins, définissaient le paradigme dominant de cette approche comme la réciprocité. Par la suite, plusieurs théories furent développées sous le thème de l’échange. L’évolution de l’anthropologie économique des années 1970 entraîna la recherche vers une approche plus marxiste et l’accent est désormais mis sur les théories de production. La fin de la guerre du Vietnam amena de nouveaux changements socioculturels qui transformèrent encore une fois l’orientation théorique de l’anthropologie économique, qui comme beaucoup d’autres sciences sociales, dirigea son attention vers le concept d’Agency (ibid. : 286-292). Autant l’économie varie en fonction des différents paramètres socio-économiques des sociétés dans lesquelles elle est intégrée, autant la discipline qui étudie ces relations est également propice à subir les changements imputés au développement historique.

Tout d’abord, trois approches principales sont présentes dans cette théorie et un grand débat entre deux de celles-ci a alimenté les publications de cette discipline durant plusieurs années. On retrouve donc le formalisme, le substantivisme et le marxisme (Dupuy 2008 : 19). La thèse des formalistes consiste en « l’étude de cette variété de comportements humains qui consistent à combiner le mieux possible des moyens déterminés et rares pour atteindre des fins spécifiques » (Godelier 1973 dans Dupuy 2008 : 20). Le cœur de cette approche réside dans la supposition que les individus de chaque culture pratiquent le choix rationnel dans un contexte de contraintes et d’opportunités. Pour leur part, les substantivistes croient l’économie intégrée dans chaque culture et qu’une théorie uniforme basée sur les sociétés industrialisées et occidentales ne peut refléter la réalité économique étrangère. Ils argumentent que l’économie des premières nations est basée sur les notions de parenté et qu’elle est intégrée dans les relations sociales, morales et politiques des groupes (Plattner 1989 : 13, 14).

La définition simple du substantivisme interprète l’économie en terme de « production, échange et consommation » (Wilk 1996 : 29). Pour ce faire, elle a introduit dans l’anthropologie économique trois concepts, soit la réciprocité, la redistribution et l’échange (Dupuy 2008 : 23). La réciprocité correspond à des rapports économiques qui se font en fonction des liens de parenté et autres institutions non économiques. Malinowski

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voyait la réciprocité comme la règle principale des transactions interpersonnelles dans chaque société. Trois types de réciprocité sont observables. D’abord, la réciprocité généralisée est définie comme à l’extrême du spectre de la solidarité et apporte un bénéfice certain pour les infirmes et les pauvres. La réciprocité balancée, quant à elle, fait référence à l’échange direct, c’est-à-dire au commerce, et la réciprocité négative détermine les tentatives d’obtenir quelque chose sans rien donner en retour, aussi perçue comme une appropriation de biens (Baal 1975 : 30-37). La redistribution est caractérisée par l’afflux de produits vers un centre, puis du centre vers l’extérieur en suivant des règles sociales selon une autorité centralisée. Il s’agit également d’une forme de réciprocité généralisée. Les échanges, eux, sont caractérisés par des mouvements de produits et de biens entre individus à l’intérieur d’un système marchand (Dupuis 2008 : 23).

Le marxisme constitue la troisième école de pensée et il s’agit en réalité d’utiliser les enseignements de Marx pour repenser les sociétés non occidentales (Dupuy 2008 : 25). Le principe central de Marx sur lequel sont basées les réflexions des anthropologues marxistes est que « le mode de production de la vie matérielle conditionne le processus de vie sociale, politique et intellectuelle dans son ensemble » (Marx 1977 dans Dupuy 2008 : 29). Une théorie économique marxiste traite d’une approche identifiant la distribution de la fortune matérielle et du pouvoir économique à travers les classes socio-économiques d’une société (Plattner 1989 : 6).

Un autre concept important de l’anthropologie économique est le communisme primitif. Lewis Henry Morgan est le premier à y faire référence dans son volume Houses and House Life of the American Aborigines paru en 1965 où il présente ce concept comme une extension de la loi de l’hospitalité (Lee 1991 : 254). Leacock (1983 : 394 dans Lee 1991) définit ce concept comme le droit collectif aux ressources de base, à l’absence de statut héréditaire ou de règle autoritaire, aux relations égalitaires qui précèdent l’exploitation et la stratification économique de l’histoire humaine. Trois principes de base forment le noyau du communisme primitif. Ceux-ci sont la loi de l’hospitalité, le droit à la terre et aux moyens de subsistance et le filet de sécurité communautaire. Ce dernier est l’idée que personne dans une communauté ne devrait être dépourvu de nourriture si un autre membre en possède (Lee 1991 : 263).

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La notion de surplus occupe également une place importante dans l’anthropologie économique puisqu’elle permet souvent de déterminer deux types de biens, ceux de subsistance et ceux de prestige (Dupuy 2008 : 40). Il s’agit d’une notion importante autant en anthropologie qu’en économie et elle contribue à la définition des sociétés et les hiérarchies qui les composent.

Finalement, il semblait important de définir et de distinguer deux autres termes, soit économie et écologie. L’écologie est l’étude des milieux où vivent les êtres vivants ainsi que les rapports de ces êtres entre eux et avec le milieu (Steward 1977 : 44). Il revient donc à dire qu’il s’agit de l’étude de divers systèmes. L’économie, quant à elle, est l’étude de comment l’homme et la société choisissent, avec ou sans argent, d’employer des ressources productives rares pour produire des commodités diverses et de les distribuer pour consommation immédiate ou non, parmi les différents individus et groupes formant une société (Samuelson et Nordhaus 1985 dans Plattner 1989 : 6). En d’autres termes, l’économie peut être définie comme l’organisation d’un système. Il est donc facile de voir comment ces deux termes sont inter reliés et d’une grande importance pour l’anthropologie économique.

L’anthropologie économique rencontre quelques problèmes. Premièrement, si l’on considère que l’économie est intégrée dans la société, il devient difficile de l’étudier à huit clos. En effet, la séparation des domaines de comportement pose problème, par exemple, lorsqu’il s’agit d’analyser ce qui semble être une production économique, mais qui possède clairement un caractère religieux (Plattner 1989 : 11). Un autre problème auquel les anthropologues économistes se sont butés est l’articulation des modes de production et le débat a évolué autour des termes « tribu, paysan et capitaliste » (Gregory 2009 : 285).

Il revient donc à dire que l’anthropologie économique est basée sur les écrits de plusieurs anthropologues, économistes, philosophes et autres qui ont fait en sorte que cette approche soit reconnue et mieux utilisée. Dans l’étude d’une société de bandes, la compréhension de leur économie, soit leur production, consommation et distribution de biens matériels, sociaux et spirituels (Dupuy 2008 : 18), permet de mieux définir leur identité. C’est de ce point de vue que l’anthropologie économique présente un intérêt dans le cadre de cette recherche de maîtrise. En utilisant les concepts élaborés par cette discipline, il sera possible de mettre en lumière les liens qui existent entre l’économie des Inuits du Cuivre et leur

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organisation sociale. De cette façon, il sera possible de faire ressortir l’importance de la parenté dans ces sociétés par les échanges qui pourront être observés entre les individus. Middle-Range Theory

La Middle-Range Theory (MRT), malgré son appellation de théorie, est une façon d’interpréter les processus de formation du document archéologique, une épistémologie archéologique. Son but premier est de renforcer nos connaissances du passé à l’aide d’instruments et de moyens précis pour mesurer les propriétés spécifiques des systèmes culturels passés (Binford 1981, 1983). Elle tente donc de déduire les comportements humains à partir des données archéologiques. Pour ce faire, elle subsume la recherche des processus culturels et naturels de formation des sites, comprenant l’étude des régularités autant dans les processus physiques que dans les processus culturels (Trigger 2006 : 415).

La Middle-Range Theory a vu le jour grâce au débat théorique qui a animé les années 1960 à 2000. Durant les années 1960, on observe une croissance dans la conscientisation de l’importance de l’interdisciplinarité, de la pertinence de la théorie dans les autres disciplines et de la place de l’archéologie au sein de la structure académique. En effet, les relations entre l’archéologie et le monde social, culturel et politique sont de plus en plus discutées et reconnues ouvertement après 1960 (Johnson 2009 : 72). En 1962, Binford publie un article intitulé Archaeology as Anthropology où il préconise une coupure radicale par rapport à l’approche historique culturelle, qu’il considère comme non scientifique et non anthropologique, et suggère de voir la culture comme un système (ibid. : 74).

Durant la décennie suivante, on observe le développement de l’étude de cas et de l’expérimentation de nouvelles idées et positions. C’est également à cette période que la Nouvelle Archéologie voit le jour. Cette dernière favorise la prise en compte, par les archéologues, de problèmes jusque-là ignorés. Elle permet de tester de nouvelles idées en ce qui a trait au document archéologique, permettant ainsi de réaliser que la compréhension de ce dernier était plutôt faible, principalement lorsqu’il s’agissait de le relier au comportement humain (ibid. : 77).

Un des défis de l’archéologue est d’essayer d’expliquer les mécanismes sous-jacents utilisés dans le passé par les traces qu’ils ont laissé. De part cette théorie, on cherche donc à

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construire un modèle de référence afin de donner un sens à des caractéristiques spécifiques du document archéologique plutôt que d’accepter la connaissance folklorique comme base pour décrire le passé. Pour ce faire, le contenu du document archéologique doit être vu comme le produit d’un système complexe de cause à effet (Binford 1981 : 22, 25-26). Afin de pouvoir convertir de manière fiable les observations faites sur des données statiques vers des déclarations à propos de données dynamiques (Binford 1983 : 49), la Middle-Range Theory s’est penchée vers l’ethnoarchéologie. En effet, la MRT se sert des données ethnographiques pour établir des corrélations fiables entre les phénomènes archéologiques observables et les comportements humains associés, non observables archéologiquement (Trigger 2006 : 33). Binford croyait qu’il était nécessaire d’établir des relations de causes constantes et uniques entre les processus et leurs résultats afin de pouvoir utiliser les résultats des études ethnographiques efficacement (ibid. : 414). Cette épistémologie archéologique implique donc de définir les modèles de comportements humains puisque ces derniers peuvent être associés à divers aspects des communautés passées, soit les activités de subsistance, les organisations familiales, la structure communautaire et les relations politiques.

Deux conditions sont essentielles pour pouvoir émettre des hypothèses basées sur la MRT. La MRT doit être indépendante du développement de la théorie générale, de manière à éviter qu’une théorie soit basée sur une théorie et que la justification soit un circuit sans fin. Elle doit aussi être basé sur des hypothèses uniformitaristes ou actualistes (Leone 2007 : 23). En effet, on ne peut observer les relations de causes à effet des processus dynamiques que dans le présent (Binford 1981 : 29). En résumé, la Middle-Range Theory cherche à développer des théories générales à propos des dynamiques des sociétés du passé, à déterminer la façon dont les systèmes culturels passés fonctionnaient, évoluaient et se transformaient (Johnson 2010 : 51).

En tentant de connecter l’archéologie des chasseurs-cueilleurs du passé à leurs homologues du présent, Binford amène la Middle-Range Theory dans l’archéologie préhistorique. Il met l’accent sur les différences entre les données archéologiques et ethnographiques et cherche à définir ce qui justifie ces différences (Leone 2007 : 21, 23). Il tentait de mettre sur pied une théorie lui permettant de faire des liens entre les statiques,

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données fixes du document archéologique, et les dynamiques, comportements et processus du passé. En effet, il cherchait à clarifier les relations entre l’archéologie et l’ethnographie en conceptualisant le cadre de référence afin de permettre l’élaboration d’interprétations comportementales des données archéologiques. Durant les années 1970, on définit les termes « archéologie processuelle » et « processualisme » pour désigner l’évolution de la Nouvelle Archéologie qui a laissé derrière elle les polémiques et les expérimentations initiales pour mettre en place une philosophie et une méthodologie. Ce changement de nom reflète également la montée du concept de processus culturel (Johnson 2009 : 78).

Quelques concepts sont importants à comprendre pour bien mettre de l’avant la MRT. Premièrement, la MRT repose sur des analogies, soit l’utilisation de l’information dérivée d’un contexte, dans ce cas-ci le présent, pour expliquer les données trouvées dans un autre contexte, dans ce cas-ci le passé. On peut déterminer des analogies formelles et relationnelles. Les premières reposent sur le fait que si des éléments dans deux situations différentes sont similaires, alors d’autres éléments doivent l’être aussi. Pour ce qui est des analogies relationnelles, elles reposent sur une connexion culturelle ou naturelle entre deux contextes et où des connexions basées sur la continuité culturelle peuvent être suggérées (Johnson 2010 : 50, 63). Les analogies tentent donc d’établir des liens entre la statique et la dynamique, deux autres concepts importants pour la MRT. La statique représente ce qui est fixe et qui n’évolue pas. Dans le cas présent, la statique représente, la plupart du temps, le document archéologique déterré aujourd’hui et présentant par exemple une image immobile d’un campement humain. La dynamique, elle, représente la manière dont les systèmes culturels passés fonctionnaient, se développaient et ont été transformés (Johnson 2010 : 51). Il s’agit donc de définir les processus sociaux, culturels et politiques qui ont été mis en œuvre par le passé pour créer l’image fixe archéologique retrouvée aujourd’hui. Finalement, on mentionne que des études et des hypothèses actualistes ou uniformitaristes sont essentielles pour la réalisation de la MRT. Il s’agit de termes scientifiques associés à la théorie et à la méthode géologique et ces derniers consistent à admettre que les processus dynamiques qui étaient en action par le passé opèrent toujours aujourd’hui de la même manière (Binford 1983 : 36).

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La Middle-Range Theory présente quelques problèmes dont il faut être conscient et tenir compte lors de son utilisation. Premièrement, une analogie en elle-même, soit dans le contexte de cette théorie ou dans tout autre contexte, ne prouve et ne teste rien (Johnson 2010 : 62). Aucune analogie n’est plus valide qu’une autre, il s’agit seulement d’un degré de force de l’argument, sans pour autant permettre d’affirmer avec certitude la présence du comportement dans les sociétés passées. Le deuxième problème de cette théorie est issu du concept de continuité culturelle. Les individus sont influencés dans leurs comportements par les idées culturelles. Les objets, les pratiques et l’organisation sociale et spatiale en sont également influencés (ibid. : 64). Cette influence doit être prise en compte dans l’analyse de l’assemblage archéologique, de même que dans l’élaboration des hypothèses émises par le biais de la Middle-Range Theory concernant le développement et les caractéristiques de ces cultures. Finalement, un autre biais à prendre en compte est le fait que le comportement humain est généralement moins uniforme que ce que Binford veut bien croire. En effet, une généralisation universelle ne peut pas être établie pour plusieurs aspects du comportement humain et il est donc difficile d’élaborer des parallèles entre les sociétés passées et celles d’aujourd’hui.

L’applicabilité de la Middle-Range Theory dans cette recherche peut être trouvée dans l’utilisation sous-jacente des concepts de zones d’activités, de zones de dépôt (drop zone) et de zones de rejet (toss zone). Des études actualistes, menées entre autres par Binford (1978, 1981), ont permis de démontrer qu’il est possible de distinguer des zones de dépôt et des zones de rejet spécifiques pour les différentes zones d’activités présentes sur un site. En se basant sur ces constatations, il est possible d’émettre une hypothèse qui considère que chaque activité individuelle crée un modèle unique de déposition et de rejet des déchets. De ce fait, les résultats des activités de démembrement des carcasses et d’extraction de la moelle devraient être identifiables et distinguables les uns des autres (Binford 1981 : 95). On considère également comme vraie l’hypothèse actualiste supposant que différentes aires sont associées à la réalisation de différentes activités (Binford 1978 : 350). De plus, statistiquement parlant, les mêmes zones seront utilisées pour les mêmes activités, créant ainsi un modèle de rejet des débris spécifiques à l’exécution d’une activité particulière (ibid. : 352). De plus, il est considéré que les étapes de démembrement des carcasses et de fractionnement des os pour la récupération de la moelle laissent des traces différentes sur les

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ossements et que par les étapes de remontage, il serait possible d’identifier les zones associées à ces étapes de la chaîne opératoire (Binford 1981 : 91, 96, 107, 148). Grâce à ces suppositions, il devient possible d’inclure le caractère social des différentes zones d’activités et de tenter d’interpréter les relations qui unissent les individus utilisant ces zones (Whitelaw 1991 : 139). La MRT peut donc être utilisée pour évaluer les relations qui existent entre les comportements sociaux et spatiaux afin de comprendre comment l’espace est utilisé par des gens différents et comment l’interaction et l’organisation sociale sont contrôlées, générées et amplifiées parmi une variété de cultures (ibid. : 140). C’est dans cette optique que s’inscrit la recherche présente où on tente de comprendre les variables sociales qui causent la déposition et la mobilité des éléments ostéologiques.

Syntaxe spatiale

La syntaxe spatiale est une théorie scientifique ayant pour but la modélisation des villes à travers les relations qui existent entre la disposition spatiale de ces dernières et une variété de phénomènes sociaux, économiques et environnementaux (Hillier et Stonor 2010 ; « Space Syntax Network » 2018). Elle fournit un ensemble de théories et de méthodes afin d’analyser les configurations spatiales de tous types et sur tous les plans (Environment and Ecology 2018 ; « Space Syntax Network » 2018). Il s’agit d’un programme de recherche enquêtant sur la relation entre les sociétés humaines et l’espace, en se basant sur une théorie générale de la structure de l’espace habité dans toutes ces formes (Bafna 2003 : 17). Un des points majeurs à comprendre est que la syntaxe spatiale analyse la structure d’un endroit et non son caractère ou sa spiritualité (Van Nes 2014 : 237, 255). Son objet d’étude principal reste l’espace configuré, soit les plans urbains et les bâtiments (Bafna 2003 : 18). Cette théorie se base donc sur le fait que la structure sociale est fondamentalement spatiale et qu’inversement, la configuration de l’espace habité possède une logique fondamentalement sociale. De ce fait, on conçoit que les sociétés humaines utilisent l’espace comme une ressource pour s’organiser elles-mêmes (ibid. : 17-18). La force de cette méthode réside dans son habileté à synthétiser la gamme entière des facteurs urbains dans un langage commun et dans sa capacité à traiter à plusieurs échelles tout en n’étant pas restreinte par le type d’environnement ou de société (Hillier et Stonor 2010 : 286).

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En théorie, cette méthode divise l’espace en composantes qui sont analysées comme des réseaux de choix. Ces réseaux sont ensuite représentés en tant que cartes ou graphiques permettant de décrire la connectivité et l’intégration relative de l’espace étudié (Environment and Ecology 2018). En pratique, toutefois, la syntaxe spatiale fournit un ensemble de principes permettant de planifier et de concevoir. Des outils pour la production et l’évaluation d’idées sont aussi générés par cette théorie (« Space Syntax Network » 2018).

Cette théorie a été développée dans les années 1970 et au début des années 1980 par Bill Hillier, Julienne Hanson et leurs collègues à l’University College London (Environment and Ecology 2018 ; « Space Syntax Network » 2018). Aujourd’hui, monsieur Hillier est professeur à la University of London en Morphologie urbaine et architecturale. Il est également directeur du laboratoire de syntaxe spatiale à la University College London et président de la Bartlett School of Graduate Studies. Il est l’un des pionniers dans l’étude et l’analyse des modèles spatiaux grâce à l’élaboration de la syntaxe spatiale (« Space Syntax » 2018). Durant les années 1980, plusieurs tentatives d’établir une théorie et une méthode qui traitent des relations entre la société et les formes urbaines et architecturales ont été entreprises, mais aux yeux de Bill Hillier et de ses collègues, aucune ne traite de l’espace en lui-même et comme un tout. Selon eux, le problème des autres théories réside dans le fait qu’elles ne conceptualisent pas les bâtiments comme portant une détermination sociale en raison de leur forme d’objet. Ils considèrent également que plusieurs théories, telle celle de la territorialité, très répandue à cette époque, ne permet pas une théorie convaincante de l’espace et ne fournit pas d’outils pour l’analyser (Hillier et Hanson 1984 : 5 à 14). La volonté de créer une théorie traitant de l’espace spatial comme vecteur social a comme origine une volonté d’aider les architectes à stimuler les effets sociaux de leurs designs de manière mathématique et non plus par la seule supposition (« Space Syntax » 2018). Grâce à l’élaboration d’une telle théorie, plusieurs buts ont été mis de l’avant, mais tous peuvent se retrouver sous la même grande bannière et peuvent être résumés comme suit : « The aim of space syntax research is to develop strategies of description for configured, inhabited spaces (of buildings, settlements, or built complexes) in such a way that their underlying social logic can be enunciated. » (Bafna 2003 : 18).

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Cette théorie se base sur différents concepts et mesures qui permettent de calculer les relations entre chaque espace dans un même système et tous les autres espaces de celui-ci. On retrouve trois conceptions de base de l’espace. Premièrement, l’isovist fait référence au champ de vision d’un observateur à partir d’un point donné. L’espace axial ou linéaire représente la plus longue ligne droite ou voie possible. L’espace convexe, quant à lui, est un espace vu comme un polygone à l’intérieur duquel tous les points sont visibles depuis tous les autres points (Environment and Ecology 2018). Par la suite, on ajoute les trois concepts de distance, soit le chemin le plus court, le chemin comprernant le moins de virages et le chemin possédant le moins de changement d’angle (Hillier et Stonor 2018 : 284). Finalement, on peut identifier trois méthodes d’analyse. La première méthode est la méthode d’Intégration (to movement) qui consiste à mesurer le nombre de tournants qu’une personne doit emprunter à partir d’un segment de rue pour rejoindre tous les autres segments de rue, utilisant la voie la plus directe. La deuxième méthode consiste à mesurer la possibilité de passer à travers les espaces entre les paires de segments ou de polygones. On nomme cette méthode Choix ou through movement et elle est très utile pour prédire l’écoulement du trafic. Finalement, on retrouve la méthode de la Distance de profondeur. Avec cette dernière, on mesure la distance linéaire du point central de chaque segment de rue vers le point central de tous les autres segments de rues (Environment and Ecology 2018). En combinant ces différents types de concepts et d’analyses, on obtient une grande variété de mesures possibles nous permettant de mieux comprendre l’environnement physique spatial.

Cette théorie a aujourd’hui plusieurs applications et elle est de plus en plus utilisée en archéologie. On l’utilise entre autres afin de décrire à quel point un espace est facilement navigable et d’établir des corrélations entre la disposition spatiale et les effets sociaux. En plus d’être de plus en plus combinée à l’analyse d’accessibilité géographique présente dans les SIG, elle est maintenant utilisée comme outil de planification (Environment and Ecology 2018 ; Hillier et Stonor 2010). Cette théorie a permis la compréhension des structures spatiales des villes en tant qu’objet modelé par la société. Cette dernière a aussi permis de comprendre comment ces structures spatiales peuvent générer ou affecter certains processus socio-économiques (Van Nes 2014 : 252). Dans le cadre de cette recherche de maîtrise en particulier, la syntaxe spatiale semble toute appropriée puisque l’identification de la configuration spatiale reproduit non seulement les relations hiérarchiques, mais permet

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également de créer un modèle des relations sociales (Bafna 2003 : 20). L’applicabilité de cette théorie se reflète aussi dans l’identification des modèles des aires de dépositions autour des différentes aires d’activités et dans les interactions qu’il est possible de reconnaître entre ces zones. En effet, les relations hiérarchiques, générationnelles et de genre sont souvent exprimées dans la disposition générale du site (Whitelaw 1994 : 229-230), alors que le caractère unique de chaque maisonnée peut être reconnu dans l’aire de déposition associée à chaque habitation. Cette disposition permet de distinguer le général du particulier et de créer des modèles de comportement caractéristiques au groupe culturel étudié (ibid. : 221). Résumé

Les trois théories, ou plutôt manières de voir le monde qui nous entoure, qui servent de base théorique pour cette recherche se recoupent de façon à créer un réseau sur lequel il est possible de s’appuyer pour évaluer les hypothèses relatives à ce mémoire. En effet, l’anthropologie économique et la syntaxe spatiale traitent des notions de partage, de hiérarchie et de relations sociales. De plus, les trois visions du monde se recoupent en ce qui concerne l’utilisation des données ethnographiques pour comprendre le passé. Les liens qui existent entre ces théories et les parallèles qu’il est possible d’observer permettent de créer un corps théorique solide dans lequel tous les aspects du problème peuvent être débattus et explorés selon différents angles tout en conservant un fil conducteur.

Comme mentionné au tout début de ce chapitre, certains éléments de chacune de ces théories ont favorisé leur choix comme base méthodologique pour cette recherche de maîtrise. Une fois connectés entre eux, ce sont ces éléments qui permettront d’analyser et de comprendre les résultats obtenus. En ce qui concerne l’anthropologie économique, on utilisera principalement les concepts de réciprocité et de partage au sein d’un groupe. La méthode de travail, de même que les liens concrets qu’il est possible d’observer entre les gestes, la chaîne opératoire et les traces taphonomiques, représentent la contribution de la Middle-Range Theory. Finalement, on ressortira de la syntaxe spatiale les connexions concrètes qu’il est possible d’établir entre les zones, de même que la possibilité de déterminer autant les chemins empruntés que les routes évitées. Il sera donc possible d’illustrer les chemins empruntés grâce aux actions de réciprocité et de partage dans une communauté en

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analysant les différents gestes qui ont mené à la formation de la chaîne opératoire et du document archéologique.

Problématique

Ce mémoire de maîtrise comporte plusieurs aspects de recherche qui se recoupent entre eux et apportent des questionnements intéressants. Robert W. Preucel et Lynn Meskell (2004 : 3) décrivent l’archéologie comme étant : « […] the discipline that reveals the details of past human existence, including how people made their living, how they organized themselves into social groups, how they worshiped their gods, how they mourned their dead ». Ainsi, l’archéologie tente de comprendre l’humain à tout moment dans le temps et dans toute sa complexité. L’organisation sociale des chasseurs-cueilleurs est un des thèmes qui ont été abordés par plusieurs dans l’espoir d’en comprendre toutes les facettes. Malgré plusieurs recherches réalisées sur divers groupes, dans plusieurs contextes différents, il est toujours possible de trouver de nouvelles avenues de recherche ou de nouveaux angles à aborder. L’organisation sociale est un phénomène complexe et son étude tente de comprendre comment les gens conceptualisent leurs relations avec les autres individus d’un groupe. Elle permet aussi de saisir les liens présents entre la société et l’histoire dans des contextes présents et passés (Preucel et Meskell 2004 : 3).

Durant les dernières années, la méthode de l’analyse spatiale est devenue de plus en plus utilisée pour comprendre comment les gens construisent leur compréhension du monde (Blake 2004 : 230). La relation entre l’homme et l’espace dans les camps de chasseurs-cueilleurs est de plus en plus étudiée et Whitelaw (1983 : 63) fait remarquer qu’il y a des différences de degré dans la cartographie des relations sociales dans l’espace d’un site. Au début des années 1990, l’absence de théorie permettant d’expliquer l’organisation d’un comportement dans l’espace, a fait en sorte que l’archéologie n’a produit que des interprétations simplistes (Whitelaw 1991 : 139). À la même période, Anne Henshaw (1995), a démontré qu’il était possible de comprendre l’organisation sociale d’un groupe en combinant deux approches, soit l’analyse des restes fauniques présents sur les sites et l’analyse spatiale de ces restes. D’une part, l’étude de l’organisation spatiale des vestiges sur un site permet de mettre en lumière les relations sociales sous-jacentes. D’autre part,

Figure

Figure 2 : Sledge party leaving HMS Investigator in Mercy Bay under the command of Lieutenant Gurney  Cresswell, 15 April 1853; Library and Archives Canada, Acc
Figure 3 : Carte de l’île Banks illustrant la position des sites archéologiques de Haogak  (PhPo-3), Nasogaluak (PgPw-3) et Kuptana (PjRa-18) (source : Will 1985 : 93)
Figure 7 : Représentation du squelette de bœuf musqué adaptée de celle de Simon Parfitt  (Parfitt 1985 : 26)
Tableau 2 : Tableau comparatif du nombre de restes par espèce (NRE) entre l’inventaire de Will (1985), celui de Woollett  (1991) et celui disponible à l’étude
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