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Chapitre 3. Méthodologie de l’étude

3.5 Biais de l’étude ostéologique

Il existe évidemment certains biais associés au réassemblage des éléments ostéologiques dont il faut absolument tenir compte. Cette étape comprend un seul biais sérieux et quelques considérations à garder en tête. Premièrement, le remontage des ossements n’est possible que si les tranches des os ne sont pas trop abîmées par toute perturbation extérieure (climat, rognage, etc.) survenue après le fracassement des éléments ostéologiques. La logique veut que les sections qui seront remontées soient en état non seulement pour être recollées, mais également pour permettre l’identification absolue des deux éléments appartenant à un même os. Dans notre cas, l’excellent état de conservation des ossements étant un critère du choix de sélection de cette collection, ce type de problème n’a pratiquement pas été rencontré. La présence de lichen sur les os, en raison d’un nombre important d’années passées sur le sol arctique, constitue l’élément se rapprochant le plus de la présence de ce biais dans la collection. Toutefois, une fois le lichen brossé, les tranches des os étaient nettes et en bon état de conservation, donc relativement facile à comparer.

Deuxièmement, il faut être conscient qu’il ne sera pas possible de remonter complètement tous les os en raison de la grosseur de l’échantillon, mais aussi de l’éparpillement des éléments ostéologiques. Il faut également procéder de manière

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systématique et ordonnée puisqu’il ne sera pas possible de recoller certains os sans la présence d’un troisième os. Il faut donc s’assurer de bien comparer les os les uns avec les autres sans oublier ceux pour lesquels des remontages ont déjà été identifiés. Il convient de mentionner la présence d’un biais dans la mise en pratique de la méthodologie pour la dernière étape de remontage des os, soit à l’échelle du site. En effet, la grande quantité de comparaisons nécessitées à ce point de l’analyse a engendré la prise d’une décision permettant de réduire ce nombre. Les fragments d’os longs (ceux sans identification plus précise) n’ont donc pas été comparés à tous les autres ossements individuellement. La comparaison s’est concentrée sur les os dont l’identification était déjà assurée. De cette façon, le temps alloué à cette étape a pu être réduit et une plus grande attention a été porté aux ossements comparés.

Tel que mentionné dans le premier paragraphe de cette description méthodologique, le biais le plus important relié à cette étude consiste en l’absence d’une collection ostéologique de référence pour le bœuf musqué (Ovibos moschatus). Il faut toutefois souligner que l’inventaire original a été réalisé avec l’aide d’une telle collection de référence, ce qui rend cette unique pièce de documentation encore plus utile. Une collection de référence aurait principalement servi, dans ce cas-ci, lors de l’étape de l’appariement des ossements en tant qu’étalon métrique et modèle anatomique afin de faciliter les comparaisons. En effet, dans les études sur lesquelles cette méthodologie est basée, une base de données de référence a été créée. Pour ce faire, ils utilisent plusieurs spécimens ostéologiques pour une même espèce afin d’évaluer les variations anatomiques attribuables à l’âge ou au dimorphisme sexuel. Ainsi, un coefficient de confiance permettant la validation de l’appariement peut être créé. Puisqu’il était impossible d’avoir accès à une telle collection de référence, l’appariement s’est fait en fonction des mesures prises sur les ossements mêmes de la collection archéologique à l’étude.

Un deuxième biais de cette étude se manifeste lors de l’étape de l’appariement des éléments ostéologiques et peut être directement relié au biais précédent. En effet, en raison de l’absence de collection de référence, les mesures prises lors de cette étape servent elles- mêmes de référence et sont comparées entre elles. Toutefois, la grosseur des os peut être altérée par différents facteurs de croissance ou être le résultat de maladies. De plus, certains

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os ont passé les cent années qui ont séparé leur déposition de leur récupération exposés aux éléments naturels et aux rayons du soleil. Cette exposition, observable par le blanchissement des os, entraîne une diminution de la masse des os et peut donc avoir entraîné le rapetissement de certaines de leurs caractéristiques. De ce fait, la taphonomie et les divers processus de croissance peuvent entraîner une variabilité intra-individus rendant ainsi la comparaison entre les éléments gauches et droits plus complexe. Pour pallier ce biais, la marge d’erreur a été établie à 2 mm. Cette marge d’erreur est plus grande que la norme. Toutefois, elle permet d’élargir la sélection des éléments à comparer visuellement après l’analyse métrique nous donnant ainsi la possibilité d’évaluer si des facteurs extérieurs sont visiblement responsables des différences dans les mesures.

Le troisième biais important de cette analyse résulte de la fouille originale de ce site archéologique. En effet, cette étude doit composer avec les différents choix faits lors des fouilles des années 1980, en particulier, les méthodes d’échantillonnage et l’importance de l’échantillon. Malgré plusieurs lectures des différents rapports, thèses et mémoires réalisés à partir des données du site de Kuptana (PjRa-18), il n’a pas été possible de comprendre toutes les décisions prises en ce qui concerne l’échantillonnage, principalement en ce qui concerne l’emplacement des zones d‘échantillonnage et leur nombre. Il est toutefois important de préciser que le biais le plus important concernant cet aspect reste la grosseur de l’échantillon. En effet, avec l’aide de la thèse de doctorat de Richard T. Will, il a été possible d’évaluer que le site entier comprenait un total d’environ 30 000 ossements. L’échantillon récupéré et disponible à l’étude comprend 1673 os, ce qui représente 5.58 % de l’ensemble d’ossements présents à l’origine sur le site. Il s’agit d’un échantillon plus petit que la normale et il est donc extrêmement difficile d’en tirer des généralités. Il faut toutefois noter qu’il n’a pas été possible de retourner sur le site de Kuptana (PjRa-18), en raison de contraintes de temps et de budget, ne nous permettant pas de réaliser une nouvelle collecte afin d’obtenir un échantillon plus représentatif. Un retour sur le site serait en effet nécessaire pour réaliser une étude plus approfondie.