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Comment l'architecture des écoles maternelles peut-elle influencer le développement des enfants ?

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Comment l’architecture des écoles maternelles peut-elle

influencer le développement des enfants ?

Emma Feller

To cite this version:

Emma Feller. Comment l’architecture des écoles maternelles peut-elle influencer le développement des

enfants ?. Architecture, aménagement de l’espace. 2017. �dumas-01625333�

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Emma Feller

Illustration

: Christian Lechtenfeld

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emeRciements

La réalisation de ce mémoire n’aurait pu aboutir sans l’aide de nombreuses personnes.

Je tiens à remercier tout d’abord mes directeurs de mémoire : Virginie Meunier et Christian Ma-renne, tous deux architectes DPLG, enseignants-chercheurs à L’École Nationale Supérieure d’Ar-chitecture de Nantes. Ils m’ont accompagné et guidé tout au long de cette année. Je les remercie pour leur engagement dans l’aboutissement de ce travail et pour m’avoir consacré de longues heures de discutions qui m’ont permis peu a peu de préciser mon sujet et d’affiner mes recherches. Je remercie ensuite, toutes les personnes qui ont eu la gentillesse de prendre de leur temps pour me recevoir sur leur lieu de travail, et qui, grâce à leurs précieux témoignages, ont donné corps et sens à ce mémoire, à commencé par Dominique Bonnot, architecte DPLG de l’agence SABA. Je re-mercie Laurence Rouillon directrice de l’école ma-ternelle du Ménez de Larmor-Plage pour m’avoir fait visiter les lieux, puis Pascal Aubin et Mary-vonne Guédès, enseignants de cette même école pour leur investissement.

Je remercie également Christine Tostain, ensei-gnante à l’école primaire Notre-Dame de Lar-mor, pour ses précieux conseils et sa relecture attentive.

Enfin je remercie ma famille pour m’avoir soute-nue et plus particulièrement ma mère et Chantal pour les corrections qu’elles m’ont apporté et puis mon grand-père, André Feller avec qui les échanges ont nourri intensément ma reflexion.

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aRchitectuRe des écoles mateRnelles peut

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le développement des enfants

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Fig. 1 [ à gauche] Enfant rêveur.

Mémoire de master rédigé par Emma Feller sous la direction de Virginie Meunier & Christian Marenne // Séminaire: Bien-vivre: milieu, architecture, matière // ENSAN Nantes 2017.

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Fig. 2

Chapitre 1

Introduction

I.1

L’ÉVoLuTIoN DE LA PLACE DE

L’EN-FANT ET LA RÉCENTE PRÉoCCuPATIoN DE SoN DÉVELoPPEMENT

I.2

LE DÉVELoPPEMENT DE L’ENFANT

SuIVANT DEux DIMENSIoNS : PhySIquE ET PSyChoMoTRICE

I.2.1 Le développement Physique

I.2.2 Le développement Psychique

I.2.2.1 Le développement moteur I.2.2.1 Le développement sensoriel I.2.2.1 Le développement cognitif I.2.2.1 Le développement affectif et social

I.3 LE RôLE DE L’ENVIRoNNEMENT

I.3.1 un facteur d’interaction et de

confort

I.3.2 Le milieu familial

23

L’enfant de 2 à 6 ans :

une période de développement intense

27 29 30 31 33 35 47 49 49 50 9

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Chapitre 2

II.1

LE RôLE DE L’ÉCoLE MATERNELLE

II.2

ExPLoRER LE MoNDE

II.2.1 Les repères spatiaux temporels

II.2.1.1 Le temps II.2.1.2 L’espace

II.2.2 Le monde du vivant, des objets et de la

matière

II.3 LES ouTILS PÉDAGoGIquES

II.3.1 Le numérique

II.3.2 Le jeu

II.4

DES PÉDAGoGIES EN MARGE

II.4.1 Approche Montessori

II.4.2 Approche Steiner

II.4.3 Approche Freinet

L’école , l’expérience de toute une vie

57 58 58 58 61 64 67 67 70 73 75 87 91

Chapitre 3

III.1

PRÉSENTATIoN DES ÉTuDES DE CAS

III.1.1 L’école maternelle du Ménez

III.1.2 L’école maternelle Jean Carrière

III.2

DES ESPACES EN RELATIoN AVEC LES

BESoINS DE L’ENFANT

III.2.1 Le hall d’entrée, un espace d’accueil

III.2.2 Le vestiaire, un espace de transition

III.2.3 La classe, un espace d’apprentissage

III.2.4 La bibliothèque

III.2.5 La salle de sommeil

III.2.6 Les espaces de circulation

III.2.7 Les sanitaires

III.2.8 Le restaurant scolaire

III.2.9 Les espaces de dépenses physiques

III.2.9.1 La salle de motricité III.2.9.2 La cour, un terrain de jeu

III.3

CLoVER houSE

III.4

uN ENVIRoNNEMENT STIMuLANT

III.4.1 Le contact avec la nature

III.4.2 Les enjeux spatiaux

III.4.3 Formes et matériaux

Conclusion

Bibliographie

Sitographie

Iconographie

L’architecture des écoles maternelles,

une forme d’apprentissage silencieuse

103 103 107 111 111 113 115 125 127 128 130 133 133 134 139 142 148 148 150 153 161 168 170 173

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Introduction

L’enfant en construction, est très souvent discrédité par sa fragilité et sa petitesse. Pourtant, repose sur lui, inconsciemment, une lourde responsabilité qui est celle d’assurer la meilleure évolution possible de notre société. L’Organisation Mondiale de la Santé, annonce que « l’avenir de nos sociétés repose sur la possibilité pour les enfants d’avoir un développement physique et

psychologique optimal »1.

En effet, la petite enfance est une période de développement intense au cours de laquelle l’enfant voit son corps et son esprit se transformer à vive allure. Le développement de l’enfant est d’autant plus important qu’il conditionne en partie le comportement futur de chaque être humain. C’est une période de découverte et de grande vulnérabilité, au cours de laquelle, l’enfant va multiplier ses connexions cérébrales en étant influencé par ce qui l’entoure (cf. illustration de gauche).

Dès lors, il revient en grande partie, à son environnement le plus proche de lui offrir des conditions d’évolution et de développement optimales. D’après L’OMS, « pour chaque individu, le cours que suit le développement dépend de manière décisive de la qualité des stimulations, du soutien, de l’éducation et de l’accompagnement dont l’enfant bénéficie dans sa famille, son voisinage et dans les structures de soins qui l’entourent. Lorsque ceux-ci sont déficients ou peu soucieux du bien-être de l’enfant, son développement peut s’en ressentir

gravement, voire de manière irréversible »2.

Ainsi, le développement des enfants dépendrait donc d’un certain niveau de bien-être assimilé à un environnement stimulant. Lorsque l’on pense à la lumière, aux matériaux, aux couleurs, aux formes, aux volumes, à l’espace, aux ambiances comme des facteurs permettant de jouer sur l’éveil, l’apprentissage, et le confort de l’enfant, alors le rapport à l’architecture devient évident.

Fig. 3. [à gauche] Représentation mentale de l’environnement de l’enfant vu comme un écosystème influençant son développement.

1. « OMS | Développement du jeune enfant », consulté le 17 juin 2017, http://www.who.int/

maternal_child_adolescent/topics/child/development/fr/. 2. Ibid.

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Le docteur Suzanne Déoux, présidente de Médiéco et instigatrice du colloque des défis bâtiment santé, s’exprime à ce sujet en affirmant la chose suivante: « les enjeux de santé environnementale et de qualité de vie sont liés aux facteurs chimiques, physiques, biologique, psychiques, architecturaux et sociaux des milieux de vie qui peuvent affecter de manière adverse le bien-être des générations

présente et future »3.

Les différents milieux de vie avec lesquels interagit, évolue et grandit l’enfant, influencent ainsi son développement physique, cognitif et psychologique, nécessaire à sa maturité. Si l’enfant est tant réceptif et vulnérable face à son environnement, c’est parce qu’il effectue dans les premières années de sa vie, toutes les connexions cérébrales indispensables lui permettant de mieux comprendre le monde qui l’entoure: chaque contact, mouvement et émotion provoquent une activité chimique et électrique dans le cerveau. Dans un milieu stimulant, ses apprentissages et son développement seront, de fait, beaucoup plus importants.

L’environnement bâti à l’intérieur duquel, figure l’ensemble des bâtiments auxquels l’enfant a été mis en contact depuis sa naissance, regroupe à lui seul un certain nombre de dimensions essentielles contenues dans les indicateurs du bien-être énoncé par L’OCDE (l’Organisation de Coopération et de Développement Économiques) telles que : la santé, la sécurité, la qualité de vie scolaire, le logement et l’éducation. Effectivement, nous passons une bonne partie de notre vie dans un bâtiment, dont toute cette période de l’enfance, partagée entre l’enveloppe de la maison et celle de l’école. Par conséquent, l’environnement du milieu éducatif joue un rôle considérable sur le développement et le comportement futur de l’enfant et mérite un intérêt particulier lors de sa conception puis de sa réalisation mettant ainsi les architectes face à de réels enjeux.

En France, la scolarisation des enfants débute inéluctablement par l’école maternelle, l’établissement accueille les enfants de trois à six ans qui sont 3. Suzanne Déoux et Véronique Girard, Bâtir pour la santé des enfants: maternités, crèches,

écoles, cantines, gymnases, piscines, patinoires, hôpitaux (Andorra, Andorre: Medieco Edi-tions, 2010).

répartis ensuite en trois niveaux : petite, moyenne, et grande section. En effet, pour beaucoup d’entre eux, c’est le point de départ, la première expérience scolaire. Une découverte d’un nouveau lieu dans lequel s’effectue la transition - qui peut être parfois difficile et perturbante pour certain enfant - du passage de la maison à l’école, de la famille aux copains, de l’intime au public. De fait, l’atmosphère qui se dégage de ce lieu joue un rôle imminent dans l’adaptation de l’enfant au milieu éducatif. Celle-ci résulte de plusieurs facteurs combinés : humains principalement, mais également architecturaux dont on se préoccupe depuis peu.

Georges Mesmin, homme politique français, relève que « la psychologie de l’enfant s’est jusqu’ici assez peu préoccupée des relations entre l’enfant et l’espace construit dans lequel il évolue. Autant est riche la somme des observations accumulées sur la découverte par l’enfant de l’espace immédiat, celui des objets et des personnes qui l’entourent, autant apparaissent rares, surtout en France, les

préoccupations concernant ses relations avec l’architecture »4.

Dès lors, on peut être amené à se demander comment l’architecture des écoles maternelles peut-elle influencer le développement des enfants ?

En s’inscrivant dans le séminaire Bien-vivre : milieu, architecture, matière, ce mémoire propose d’analyser l’environnement bâtis de l’école maternelle tout en explicitant les rapports qu’entretient l’architecture avec les pédagogies rencontrées dans le milieu de la petite enfance.

L’école maternelle, s’insère dans le prolongement de l’éducation familiale et la complète autant que possible. Pour se faire, L’OCDE recommande d’offrir aux enfants « un équipement éducatif de qualité, un espace propice à

l’apprentissage non polluant en harmonie avec l’environnement »5.

Tout ce qui relève de l’architecture au sein du bâtiment doit être pensé et réfléchit dès la conception afin d’accompagner l’équipe pédagogique dans

4. Georges Mesmin et Jean Balladur, L’enfant, l’architecture et l’espace (Tournai, Belgique: Casterman, 1979), p 36.

5. OCED, « économies interconnectées: comment tirer parti des chaînes de valeur mon-diales », s. d.

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leur travail et leur faciliter le quotidien. Par exemple, accorder une attention particulière à l’agencement et l’ergonomie du mobilier de manière à rendre l’espace modulaire et adaptable aux différentes activités. En configurant l’espace, les architectes imaginent alors des lieux de vie rassurants, le plus possible en interaction avec l’extérieur - vecteur de découverte et d’expérimentation - ou les enfants se sentent à l’aise et en sécurité. D’autre part, l’école maternelle doit permettre à l’enfant d’acquérir une certaine autonomie tout en encourageant ses relations sociales et affectives. Ainsi, se dessinent, se conçoivent et s’organisent des espaces, propices à l’épanouissement, stimulants, incitant la curiosité, favorisant le développement d’un imaginaire, éveillant les sens, par la rencontre des matières, des formes, des couleurs, etc.

Afin de mieux comprendre comment l’architecture exerce une influence sur le développement des enfants dans les écoles maternelles, il conviendra dans un premier temps, à partir travaux sur la psychologie de l’enfant, d’en comprendre l’origine et d’en proposer une analyse théorique. Puis, nous nous intéresserons, dans un second temps, aux réponses pédagogiques mises en œuvre aujourd’hui pour accompagner l’enfant dans son développement. Enfin nous révélerons des enjeux architecturaux d’une école maternelle, en analysant plusieurs espaces, issue principalement de deux études de cas : l’école maternelle du Ménez située à Larmor-Plage (56) et l’école maternelle Jean Carrière à Nîmes (30). La première émerge d’une visite personnelle de l’école au cours de laquelle j’ai pu rencontrer des enseignants et la seconde naît d’un documentaire de Mercadal : Une architecture qui construit aussi des

enfants.6

Ainsi nous aurons l’occasion d’entendre à plusieurs reprises Dominique Bonnot architecte de l’agence SABA à Saint-Brieuc (22) dont les propos ont été recueillis à l’issue d’un entretient sur son lieu de travail et Max Roland, architecte de l’agence Tectoniques à Lyon (69).

Tous deux apporterons des explications à certains de leurs choix 6. Thierry Mercadal, Une architecture qui construit aussi des enfants: école Jean Carrière de

l’agence Tectoniques (On stage, 2013).

architecturaux en nous confiant leur point de vue de maître d’oeuvre. À ceux-ci, s’ajouteront les avis des usagers qui nous partagerons leur ressenti à savoir trois enseignants de l’école du Ménez : Maryvonne Guédes, Marielle Toumelin et Pascal Aubin, accompagné de l’Atsem Romane Bourvic ; puis, à l’école Jean Carrière, l’enseignant Thierry Benoît, et la directrice Hélène Garrel. Enfin nous profiterons des explications de Lucas Goy, concepteur lumière chez Les Éclaireurs et des observations de Philippe Meirieu, professeur à l’université Lumière Lyon 2 qui nous proposera un regard extérieur en tant qu’acteur du milieu éducatif.

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Fig. 4 Enfant joueur

l’

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de

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à

6

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:

une

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développement

intense

Chapitre 1

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« L’enfance est l’acheminement vers l’état adulte. L’enfant est une force qui progresse, un mouvement en avant. Il tend vers l’adulte de tout son être. C’est cette tension qui

le caractérise »7 .

Georges Mesmin

Fig 5. [à gauche] L’enfance.

7 Georges Mesmin et Jean Balladur, L’enfant, l’architecture et l’espace (Tournai, Belgique: Casterman, 1979) p 19.

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notions, de facultés. C’est un phénomène naturel qui peut être singulier et instinctif sur quelques points. Il intervient dès la naissance pour se prolonger sur toute la période de l’enfance.

En effet, au fil du temps, l’enfant se construit et s’enrichit en accumulant progressivement des compétences et des habiletés, comme la propreté, le langage, l’autonomie, etc. D’après l’institutrice Céline Alvarez, passionnée des sciences cognitives, nous ne sommes pas nés avec ces compétences mais nous sommes nés avec le potentiel de les développer. Cette conception innéiste du potentiel était déjà partagée il y a bien longtemps par le philosophe Platon et le sera également plus tard par un autre philosophe, Jean Piaget. D’après ce dernier, « le nourrisson part d’un niveau de conscience « primitif » et son développement intellectuel évolue au cours de stades distincts, motivé par

un désir inné de connaissance du monde »8. En effet, Jean Piaget, également

l’un des plus célèbres psychologues du développement de l’enfant, conçoit l’intelligence comme une activité qui lui permet d’interagir en permanence avec le monde, plutôt qu’une capacité. Du point de vue de Céline Alvarez, l’enfant est le seul maître de son développement, on ne peut pas choisir de le faire à sa place. Nous, les adultes, tout comme l’ensemble de son entourage proche, avons l’unique pouvoir d’encourager ou de freiner ce développement. On distingue par ailleurs deux formes de développement : le développement physique qui se réfère à la croissance du corps et le développement psychomoteur propre à l’esprit. L’ensemble participe à l’affirmation du comportement et de la personnalité de l’individu. La période de l’enfance et du développement conditionne donc en partie le comportement futur de l’individu. D’après le docteur Maria Montessori, célèbre pédagogue italienne

8. CEMEA-Pays de la Loire, « Psychologie et développement de l’enfant », s. d., consulté le 20 mars 2017.

e développement de l’enfant est un processus au cours duquel l’être humain acquiert une certaine indépendance, une matura-tion du corps et de l’esprit en assimilant un certain nombre de

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« l’enfant est le constructeur de l’homme »9. Ainsi, tous les travaux réalisés sur l’enfance nous révèlent les prémices de notre future société. Jean Piaget énonce la chose suivante : « L’enfant explique l’homme autant, et souvent plus,

que l’homme n’explique l’enfant »10. Est-ce l’une des raisons pour laquelle il

suscite tant l’attention des adultes ?

Aujourd’hui, médecins, psychologues, éducateurs, architectes et bien d’autres professionnels s’impliquent profondément dans le développement de l’enfant, même s’il s’agit d’un intérêt récent. La vulnérabilité et la candeur de l’enfant en construction représentent une aide précieuse pour analyser, à une plus grande échelle, le psychisme de l’être humain en comprenant ses particularités. D’après le naturaliste anglais Charles Darwin, qui a travaillé sur l’évolution des espèces vivantes, « une étude du développement de l’enfant permettrait de mieux comprendre la psychologie humaine en général

»11. D’autre part, la situation de l’enfant dans la dimension de l’espace et

du temps nous offre la possibilité en tant qu’adultes, de prendre le recul nécessaire afin d’adopter une posture critique sur les études que l’on a pu lui consacrer. Cette attitude permettra de vérifier ou non certaines hypothèses ou d’émettre des constats à partir des premières observations qui ont pu être menées.

À l’issue de ces observations, on a relevé un certain nombre de constantes, de récurrences au niveau des attitudes et des conduites enfantines qui ont permis de dresser un schéma indicateur du processus de développement. Celui-ci n’est pas figé, il s’affine et s’enrichit au fil des découvertes scientifiques. Il s’adapte, se réajuste en fonction de l’évolution de notre société. Il n’est ni bon, ni mauvais, il est seulement le résultat d’observations. Au niveau de la structure du développement, Jean Piaget, prétend à « une conception stadiste du développement, c’est-à-dire le passage de l’enfant par des stades successifs

9. « Pédagogie », consulté le 20 mars 2017,

http://www.montessori-lyon.com/pedagogie/maria-montes-sori/pedagogie/.

10. « Psychologie de l’enfant : 150 ans d’histoire », consulté le 20 mars 2017, https://www.

scienceshumaines.com/psychologie-de-l-enfant-150-ans-d-histoire_fr_1739.html.

11. Ibid.

et différenciés »12. En effet, on peut dissocier le développement en un certain

nombre d’étapes consécutives qui découlent les unes des autres avec une certaine cohérence.

George Mesmin, lui aussi estime que « lorsque l’enfant a assimilé la marche, il peut se déplacer plus librement dans un espace et compléter la compréhension de celui-ci en mettant en œuvre d’autres sens que celui de la vue, par exemple le

toucher, la proprioception, la mesure du temps, etc »13. En regroupant les enfants

par tranches d’âges, on peut ainsi décomposer l’enfance en définissant des périodes caractéristiques du développement. Nous serons amenés à les développer par la suite.

Par ailleurs, le psychologue et pédagogue français, Alfred Binet, apparaît comme « l’un des premiers à proposer une description des capacités des enfants

selon leur âge »14. Selon la théorie de Piaget, « ces stades de développement

infantile se produisent dans un ordre fixe chez tous les enfants de toutes les origines

ou cultures différentes. Seul l’âge peut parfois varier d’un enfant à l’autre »15.

On peut donc observer des régularités, même si, à une plus petite échelle, chaque enfant se développe de manière tout à fait singulière par rapport à l’axe du temps. Si l’on se concentre sur une période, on peut constater des divergences d’un enfant à l’autre. Par exemple, au même âge, un enfant peut avoir plus de facilités à parler, à s’exprimer qu’un autre enfant. Mais tel enfant qui aura un niveau de développement plus avancé dans le domaine du langage, pourra connaître plus de difficulté à marcher qu’un autre et vice versa. Ceci fera effectivement l’un des objets de remise en question de la théorie de Piaget que nous évoquerons. À partir d’une structure stable, commune, les intervalles d’âges attitrés aux périodes caractéristiques du développement, apparaissent plutôt à titre indicatif, et ce, de manière subjective. George Mesmin se prête à cette ambivalence en prenant soin 12. CEMEA-Pays de la Loire, « Psychologie et développement de l’enfant ».

13. Mesmin et Balladur, L’enfant, l’architecture et l’espace.

14. Michèle Guidetti, Les étapes du développement psychologique (Armand Colin, 2002). 15. « Théorie de Piaget : les stades de développement infantile selon l’âge », consulté le

25 mars 2017, https://blog.cognifit.com/fr/theorie-de-piaget/.

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de nuancer ses propos, il parlera de périodes sensibles : « la psychologie de l’enfant distingue des âges critiques, « des périodes sensibles » au cours desquelles certains obstacles sont franchis et de nouvelles possibilités, de nouveaux

caractères sont acquis »16.

Le risque encouru est celui de l’uniformisation : une tendance actuelle à l’élaboration d’un modèle type de « développement idéal » nous incite à rejeter la différence. Celle-ci est pourtant fondamentale dans la construction de la personnalité. Cette volonté de standardisation induit déjà très tôt un phénomène de comparaison, d’évaluation, et de jugement auxquels on sera confronté toute notre vie. En effet, l’entrée à l’école maternelle est le premier moment où l’on est sujet à cette comparaison. Le développement est en plein essor et on peut déjà entendre parler de quelconque « retard » (tel ou tel enfant est en retard sur le groupe). Cette situation représente un facteur de stress pour les parents d’enfants qui ne rentrent pas dans ce « cadre » prédéfini.

Une chose est certaine, l’enfant progresse à son rythme, et développe plus ou moins vite telle ou telle compétence en fonction de son métabolisme, de ses opportunités, et de son environnement proche. À ce sujet, « les historiens et les sociologues insistent donc sur la nécessité d’observer l’enfance en le situant dans son univers spécifique: dans son contexte social, religieux, économique et

démographique »17. L’environnement est effectivement un facteur important

à prendre en compte, puisqu’il influence directement le développement de l’enfant et permet d’observer des disparités au sein de chaque individu et plus largement au sein de différents pays, de différentes cultures.

16. Mesmin et Balladur, L’enfant, l’architecture et l’espace, p 19.

17. Fédération des Associations de Parents de l’Enseignement Officiel, « L’évolution de la place de l’enfant dans la société », s. d.

I.1

L’ÉVoLuTIoN DE LA PLACE DE L’ENFANT ET LA RÉCENTE PRÉoCCuPATIoN DE SoN DÉVELoPPEMENT « L’histoire de l’enfance est, avant tout, une histoire du regard que les adultes

ont porté sur les enfants »18

Longtemps mises de côté, les études relatives à l’enfance et celles consacrées à son développement, ont débuté tardivement. « L’Antiquité et le Moyen Âge ont plutôt été des époques maltraitantes pour le petit de l’Homme. L’enfant, c’était «l’infans», c’est-à-dire non doué de parole, que l’on voit représenté sur les bas-reliefs romains des musées chaussé de sandalettes comme les esclaves

»19. On voit que l’enfant ne suscitait à l’époque que très peu d’intérêt et, de

nos jours, le simple fait de s’intéresser à son développement témoigne d’une importante évolution du regard. Une évolution de l’intérêt que lui porte la société aujourd’hui.

« Jusqu’à la fin du XIXème siècle, l’enfant représente une force de travail très utile

dans une Europe occidentale rurale et agricole. Quand les parents vieillissent et ne peuvent plus travailler, ce sont les enfants qui prennent en charge la survie

de la famille »20. Il n’y a pas encore de grande considération du petit être.

Celui-ci, né parfois alors qu’il n’était pas attendu, ou alors dans de terribles conditions. À l’inverse, lorsque la naissance était désirée, elle avait pour but d’assurer l’héritage de la famille. Pourtant, une fois maître de son corps on ne sous-estime pas pour autant ses capacités, bien au contraire, puisque très tôt, on lui accorde d’importantes responsabilités. Inéluctablement, la place de l’enfant ne cesse de croître dans les familles et dans la société, même si celui-ci est toujours défini par son état de dépendance. « Peu à peu, dans les pratiques 18. Ibid.

19. « APORIA, La nouvelle revue du Réseau National des Communautés Éducatives. -

Recherche Google », consulté le 9 juin 2017, http://www.rnce.fr/wp-content/uploads/2012/04/APORIA-20.

pdf

20. Fédération des Associations de Parents de l’Enseignement Officiel, « L’évolution de la place de l’enfant dans la société ».

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et les mentalités, on voit émerger le petit enfant comme sujet plus autonome, plus

résistant »21. D’après les analyses de la FAPEO (la Fédération des Associations

de Parents de l’Enseignement Officiel) : « La notion d’enfance est une notion

plutôt moderne, née aux XVIIème et XVIIIème siècles, lorsqu’on a commencé à sortir

des grandes famines et de la mortalité infantile sévère et que l’on a considéré que l’enfant n’était pas seulement un risque ou une charge, mais aussi une source

d’espérance »22.

Les premières préoccupations qui étaient portées aux enfants pour que ceux-ci puissent prétendre à devenir adulte étaient : le soin et l’éducation. Dès lors, on a commencé à s’intéresser à la survie de l’enfant : institutions, hôpitaux chargés de recueillir les enfants abandonnés, etc. Ceux-ci représentaient une première forme d’intérêt générée par la société. Plus tard, au siècle des Lumières, on a vu émerger le phénomène d’individualisation de l’enfant qui s’explique par plusieurs facteurs. Avec les progrès de la médecine, il y a moins de femmes et d’enfants qui meurent lors des accouchements, ce qui diminue considérablement le taux de mortalité infantile. Ceci a eu pour conséquence de diminuer les naissances, (on a moins procrée car la probabilité que l’enfant reste en vie devenait plus importante), la vie de l’enfant a été, petit à petit, valorisée. Ce qui explique pourquoi jusqu’ici, les parents n’accordaient pas la même attention aux enfants car ils n’étaient pas certains de les garder en vie. Puis, d’autres découvertes médicales ont vu le jour, comme celles de Louis Pasteur, qui ont donner naissance aux mouvements de santé publique et à l’élaboration de règles d’hygiène, ayant pour conséquence l’amélioration des conditions et d’espérance de vie des enfants.

Mais, les premières véritables réflexions portées sur l’enfance ont émergé des philosophes. Ils ont été, en effet, les premiers à s’y intéresser et plus particulièrement à l’éducation qu’il fallait leur apporter. Celle-ci a fait, par la suite, l’objet d’une plus grande attention. En effet, d’après les philosophes, c’était à l’école que revenait la fonction éducative. Son rôle était d’inculquer

21. Ibid.

22. Pierre Verdier, « De l’intérêt de l’enfant aux droits de l’enfant - Cairn.info », Enfances & Psy, no 43 (2009): 85-92.

la discipline, l’obéissance, et le respect. Ainsi, « Jusqu’au XVIIIème siècle, la

psychologie de l’enfant n’existe pas, et les écrits sur l’enfance sont principalement pédagogiques. […] Jean Jacques Rousseau est le premier à reconnaître l’importance de la psychologie dans l’éducation. En 1762, il déclare aux pédagogues, dans la préface de l’Emile : « commencez donc par bien étudier vos élèves, car, très

assurément, vous ne les connaissez point » »23.

Jusqu’alors, l’enfant était perçu comme une réduction de l’adulte : le

philosophe Platon disait, « l’enfant est un adulte en miniature »24. Cette vision

de l’enfant perdurera jusqu’à ce que Jean-Jacques Rousseau propose une nouvelle représentation de l’enfant comme un être singulièrement différent

de l’adulte dans sa manière d’agir et de penser. À partir du XVIIIème siècle,

on ne verra donc plus l’enfant comme une miniature de l’adulte mais plutôt comme un être en transformation avec une réalité psychologique bien définie, qui suscitera par ailleurs un vif intérêt. Cette nouvelle posture a changé radicalement le regard qui se portait sur l’enfant et a contribué, plus tard, à la fin des années 1800, à donner naissance à la psychologie enfantine. Il faudra tout de même attendre 1879, pour que la psychologie ne soit plus rattachée à la philosophie mais devienne une discipline scientifique. « Les premiers travaux scientifiques sur la psychologie de l’enfant sont attribués à l’Allemand William T. Preyer, publiés dans The Mind of the Child (1882). Celui-ci

a procédé à une observation systématique du développement de l’enfant »25.

La psychologie scientifique et les premiers discours systématiques sur l’enfant sont à l’origine de la psychologie du développement, elle-même proche de la psychologie de l’enfant. Les travaux et les expérimentations de Charles Darwin sur la théorie de l’évolution des espèces vont eux aussi influencer ces types d’approches. Ce dernier va notamment réaliser des observations sur ses propres enfants.

La psychologie du développement de l’enfant intéressera des philosophes et psychologues du monde entier puisque l’américain G. Stanlay Hall en sera 23. « Psychologie de l’enfant : 150 ans d’histoire ».

24. Ibid. 25. Ibid.

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lui aussi un précurseur. Il créera en 1883 un laboratoire de psychologie de l’enfant où il consacrera son temps à l’étude systématique du développement de l’enfant. « Aux États-Unis les premiers articles paraîtront en 1891 dans le

Pedagogical Seminary »26. D’autres associations de psychologie de l’enfant

verront le jour, par exemple en France, celle d’Albert Binet créée en 1900 (la Société libre pour l’étude de l’enfant). Albert Binet proposera la notion d’échelle métrique d’intelligence, ou une certaine hiérarchie sera établie en fonction de la difficulté, comparé à l’ordre chronologique des âges d’enfant. Ces éléments de réflexion seront repris plus tard par le célèbre psychologue Jean Piaget.

Par ailleurs, l’intérêt pour l’enfance transparaîtra peu à peu à travers les lois

érigées à son égard, mais il faudra tout de même attendre la fin du XIXème

siècle pour que la notion du « droit de l’enfant » apparaisse.

« Ce n’est que depuis le XXème siècle qu’il va être au centre des politiques

d’éducation et de soins, et aussi des enjeux économiques et de consommation »27.

Aujourd’hui, « l’enfant n’est plus un inconnu, ni même un incompris. La question sociale de l’enfant, dont parlait Maria Montessori, est en grande partie résolue, tout au moins dans les esprits. Nous avons fait de nombreux progrès depuis les temps qu’elle évoquait, où l’adulte considérait l’enfant comme un dérangeur. Les principes d’éducation sont entrés dans la voie de la douceur, de la compréhension, de la tolérance. On pense beaucoup plus volontiers à l’enfant et à ses besoins,

même si l’on est encore très loin de savoir ou de pouvoir les satisfaire »28.

26. Mesmin et Balladur, L’enfant, l’architecture et l’espace, . 27. « Psychologie de l’enfant : 150 ans d’histoire ».

28. Mesmin et Balladur, L’enfant, l’architecture et l’espace p 19.

I.2

LE DÉVELoPPEMENT DE L’ENFANT SuIVANT DEux DIMENSIoNS : PhySIquE ET PSyChoMoTRICE

Durant les premières années de sa vie, l’enfant subit un développement intense, tant sur le plan psychologique que physique. À l’âge de deux ans, l’enfant a déjà acquis une certaine autonomie qui lui permet de se déplacer librement dans l’espace. Il part à la découverte de son environnement en exaltant ses sens et se désintéresse petit à petit des jeux « d’éveil » qu’il avait jusqu’ici. Il va plutôt revendiquer un besoin d’espace, et de sécurité affective pour appréhender l’espace du dehors (extérieur au corps) en toute confiance.

En élargissant peu à peu son domaine d’exploration, il va également élargir son champ de socialisation qui était jusqu’ici uniquement réservé à la famille et aux proches. Il existe plein de formes de développement qu’il est difficile de traiter séparément puisqu’elles s’influencent toutes les unes les autres. Cependant, pour cette étude, nous analyserons de manière distincte les différents domaines de développement pour identifier leurs caractéristiques principales et ainsi comprendre les différents enjeux qui auront plus tard leur importance dans les intentions architecturales.

Dans un premier temps, le développement se divise en deux parties, avec d’un côté, le développement physique, rationnel que l’on peut observer et quantifier. De l’autre, le développement psychomoteur plus subjectif, plus informel, plus difficile à codifier. Ce dernier comprend d’une part le développement moteur, c’est la mobilité du corps, et d’autre part, le développement du psychisme. Mais l’un ne fonctionne pas sans l’autre. Enfin, le développement du psychisme comprend les développements sensoriels, cognitifs, affectifs et sociaux.

L’étude de ces différents développements permettra d’identifier les besoins nécessaires au développement de l’enfant.

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I.2.1

Le développement physique

Le développement physique de l’enfant concerne essentiellement ce qui se rapporte à sa croissance. Durant les deux premières années de sa vie, l’enfant connaît une croissance physique impressionnante ; d’après certaines observations, on dit qu’à l’âge de deux ans, il mesure environ la moitié de sa future taille adulte et pèse le quadruple du poids de sa naissance.

Entre deux et six ans, le poids, la taille, la maturation osseuse, et la dentition sont des paramètres qui nous permettent d’apprécier et d’évaluer la croissance. De manière générale, on se préoccupe principalement de l’évolution de la taille et du poids, en comparant les mesures faites sur l’enfant à des moyennes statistiques. C’est de loin, la méthode de surveillance la plus pratiquée puisque ce sont de très bons indicateurs de l’état de santé de l’enfant. Cependant, il peut arriver que l’on évalue spécifiquement la maturation osseuse lorsqu’un enfant rencontre un souci de croissance par exemple. De deux à quatre ans, le squelette est encore souple, la souplesse de l’enfant est importante. On observe néanmoins des points d’ossification qui permettent à l’enfant d’acquérir peu à peu plus d’équilibre. La croissance physique peut varier d’un enfant à l’autre, en fonction de son potentiel génétique, mais également en fonction de son hygiène de vie, (alimentation, exercice physique) et de son environnement social.

L’activité physique a une influence sur sa maturation osseuse. « Les activités qui demandent à l’enfant de supporter son poids, comme lorsqu’il grimpe, où qui le font sauter, permettent d’augmenter la densité de ses os et donc leurs résistances. Ce type d’activité améliorerait également l’organisation interne des

os, ce qui les rendrait plus solides »29.

Enfin, le sommeil a une importance considérable sur la croissance de l’enfant. D’après certains chercheurs, « le manque de sommeil a également une incidence sur plusieurs hormones, y compris la leptine, la ghréline, l’insuline,

Fig 6. [à gauche] Développement physique.

29. « L’activité physique chez les enfants d’âge scolaire », consulté le 1 avril 2017, http://

naitreetgrandir.com/fr/etape/5-8-ans/jouer-bouger/fiche.aspx?doc=activite-physique-enfants-age-scolaire.

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le cortisol et l’hormone de croissance. Ces changements hormonaux pourraient

contribuer au déséquilibre énergétique et donc au surpoids ou à l’obésité »30.

Pour les enfants de trois à cinq ans il est conseillé de dormir entre onze et treize heures par jour.

I.2.2

Le développement psychomoteur

« Chacun de nos actes témoignent de la manifestation conjointe de nos fonctions intellectuelles, affectives et motrices : nous sommes des êtres psychomoteurs »31. Le développement psychomoteur recouvre le développement moteur d’une part, et les développements responsables de la construction du psychisme d’autre part. L’un ne fonctionnant pas sans l’autre.

Le développement psychomoteur est rendu possible grâce à un jeu d’allers-retours multiples entre l’esprit et le corps. Le cerveau ordonne l’action d’un mouvement, l’expérience de ce mouvement lui revient, il l’analyse et l’enregistre pour ensuite pouvoir ajuster et préciser ses futurs mouvements. L’activité du cerveau est essentielle pour le fonctionnement moteur et inversement, le moteur est d’une aide précieuse à la construction du psychisme. L’exercice répété de ce processus engage le développement du psychisme à plusieurs niveaux : l’enfant accroît son intelligence en apprenant de ses expériences (les actions immédiates impulsives deviendront plus contrôlées, réfléchies) mais il augmente également sa confiance en soi en évaluant petit à petit ce qui est possible ou potentiellement dangereux. Il exerce également sa sensibilité. D’après le psychologue et médecin Henri Wallon, le mouvement représente l’émotion extériorisée, donc l’émotionnel est étroitement lié au fonctionnement moteur.

30. « Les conséquences grandissantes du manque de sommeil - AboutKidsHealth »,

consulté le 2 avril 2017,

http://www.aboutkidshealth.ca/Fr/News/NewsAndFeatures/Pages/Growing-conse-quences-of-not-enough-sleep.aspx.

31. « Structure de l’enfant - Compte Rendu - Tacha973 », consulté le 1 mai 2017, http://www.

etudier.com/dissertations/Structure-De-l%27Enfant/451293.html.

La maturation du système psychomoteur s’effectue suivants deux lois : la loi céphalo-caudale et la loi proximo-distale. La première implique une progression du développement du haut du corps vers le bas, c’est-à-dire de la tête vers les pieds (« par exemple, les muscles du visage sont contrôlés en premier, puis l’enfant peut soulever sa tête avant de parvenir à

s’asseoir »32). D’autre part, la loi proximo-distale assure une progression du

développement depuis le centre vers les extrémités du corps. C’est-à-dire que l’enfant développera en premier la motricité de son bras, puis celle de sa main et enfin celle de ses doigts. On l’appelle aussi motricité fine, celle-ci se met en place vers l’âge de trois ans.

I.2.2.1 Le développement moteur

Nous venons de voir que l’élaboration d’une fonction motrice est intimement liée au cerveau et plus particulièrement au système nerveux central. Sans rentrer dans le détail, la myélinisation est un des phénomènes qui permet la maturation du système nerveux central. En augmentant la vitesse de propagation de l’influx nerveux, la gaine de myéline induit également l’amélioration de la capacité de coordination.

Jusqu’à l’âge de deux ans, l’enfant a appris à se mettre debout et il a commencé à marcher. L’âge préscolaire (entre deux et six ans) est un âge où il va considérablement enrichir son développement moteur en grande partie par le jeu. Le jeu, de plus en plus physique, (courses et poursuites) l’amène à développer de nouvelles compétences motrices. Il apporte énormément de précision dans ses gestes. Progressivement, il apprend à monter et descendre les escaliers, taper dans une balle, puis faire du tricycle, marcher sur le bord d’un muret, etc. À l’âge de deux ans il cherche déjà à se déshabiller et dès l’âge de quatre ans il réussit à s’habiller tout seul.

32. « FMPMC-PS - Psychomotricité : Développement psychomoteur de l’enfant - Première

année », consulté le 8 avril 2017, http://www.chups.jussieu.fr/polysPSM/psychomot/devPSMenf/POLY.TDM.

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I.2.2.2 Le développement sensoriel

Les capacités sensorielles se développent plus rapidement que les habiletés motrices, c’est pourquoi, très tôt, avant même sa naissance, l’enfant est capable de ressentir des choses. On dit qu’un bébé peut reconnaître la voix de sa maman à l’intérieur de son ventre. Le développement sensoriel accompagne et appuie le développement moteur. Tous deux sont essentiels dans l’éveil de l’enfant au monde ils se développent en premier dans le cortex cérébral. La première année de sa vie est une période où l’enfant subit un développement impressionnant de ses capacités sensorielles pour appréhender et explorer au plus près son environnement proche. D’après Céline Alvarez, « cette période érige les fondations sur lesquelles l’intelligence

humaine va prendre appui pour se déployer »33. À deux ans, l’enfant continue

de développer ses sens mais l’essentiel est déjà là (sa maturation est achevée vers l’âge de six mois).

Fig 7. [en haut à gauche] Développement du sens de la vue. Fig 8. [en bas à gauche] Développement du système olfactif.

Fig 9. [graphique ci-dessus] Évolution du développement langagier et sensoriel au cours de la première année de vie.

33. Céline Alvarez et Meyer Catherine, Les lois naturelles de l’enfant (Paris: les Arènes, 2016). NIVEAU DE CONNEXIONS DE NEURONES CHEZ L’ADULTE SENSO RIEL LAN GAGE ANNÉES MOIS 5 ANS 1 AN NAISSANCE -4 MOIS

PREMIÈRE ANNÉE DE VIE

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Il apparaît donc nécessaire de donner à l’enfant les moyens de développer son activité sensorielle au cours de cette période, car au-delà de six ans, il s’orientera davantage vers des activités intellectuelles. Après trois ans, et en grandissant, le développement sensoriel est plus difficile à visualiser car il est bien moins « spectaculaire ». À l’âge de six ans, qualitativement on n’entend, ne voit, ne sent et ne touche pas beaucoup mieux qu’à l’âge de deux ans, mais par contre grâce à la mémoire des sens, on remarque l’évolution de la capacité d’assimilation, de reconnaissance et de perception. Les enfants sont capables de reconnaître et de nommer plus de senteurs, leur goût et leur odorat sont plus exercés. De même pour l’ouïe, à l’âge de trois ans l’enfant sait reconnaître un très grand nombre de cris d’animaux par exemple. Il faut bien différencier la sensation de la perception, ce sont deux phénomènes différents d’un point de vue psychologique et neurologique. La sensation est interprétée par le cerveau pour rendre compte de la perception. Par exemple, grâce au sens du toucher et de la vue, l’enfant commence à percevoir les reliefs, la profondeur, le proche, le lointain, le vide, le plein ; il appréhende la distance, mais il n’est pas encore capable de le retranscrire dans ses dessins. Il perçoit la notion de perspective vers l’âge de sept ans et essaye de la dessiner vers l’âge de huit ans. Entre deux et six ans, à l’âge préscolaire, il a surtout besoin de pratiquer et d’entraîner sa mémoire des sens en expérimentant de nouveaux espaces et en découvrant de nouvelles matières, de nouvelles senteurs. L’enfant doit être invité à regarder, palper, sentir, goûter afin d’éveiller sa curiosité, et il est nécessaire de l’inviter à s’intéresser au monde, à le saisir, à le comprendre pour que plus tard il puisse en construire sa propre perception.

I.2.2.3 Le développement cognitif

Le développement du cerveau et du système nerveux (maturation neurologique) Le phénomène de myélinisation, dont nous avons parlé, dure environ quinze ans et permet d’établir de plus en plus de connexions cérébrales, il accélère la transmission de l’information vers le cerveau. Le cerveau est composé de différentes parties que l’on nomme les lobes. Il existe quatre lobes : le lobe frontal, le lobe pariétal, le lobe temporal et le lobe occipital. Dès l’âge de quatre ans, l’enfant possède dans son lobe frontal, une densité de synapses suffisantes. Les régions frontales du cerveau sont responsables de l’apparition de la parole, du langage, de la prise de décision, de la personnalité, du jugement, du raisonnement et de la mémoire. C’est pourquoi un enfant de trois à six ans privilégie leurs développements. La période d’âge préscolaire est une période de développement intense pour le cerveau, puisqu’à l’âge de six ans, le cerveau possède déjà 95 % de son volume maximal et à quinze ans on dit qu’il a atteint sa taille adulte.

La mémoire La mémoire est essentielle au développement cognitif. On distingue deux formes de mémoire : la mémoire à court terme et celle à long terme. La mémoire de travail est une forme de mémoire à court terme, active qui permet en effet de retenir des informations pendant une période de quelques secondes. Nous exerçons cette mémoire quotidiennement par exemple lorsque nous lisons un texte pour comprendre le sens d’une phrase nous devons garder en mémoire le début de la phrase.

La mémoire de travail, d’après Céline Alvarez, est l’une des trois fonctions cognitives, avec le contrôle inhibiteur et la flexibilité cognitive, qui nous permet d’agir de manière organisée, de réaliser tout ce que notre cerveau nous ordonne de faire. D’après elle, la croissance de la mémoire de travail permet le développement de compétences exécutives telles que la planification d’une action. Par exemple, lorsqu’un enfant souhaite entreprendre quelque chose, comme faire un exercice. Le développement de ces compétences exécutives va connaître de trois à cinq ans une période intensive.

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La mémoire à long terme nous permet de garder des souvenirs tout au long de notre vie et de pouvoir se les remémorer. Elle est composée de deux types de mémoire : la mémoire implicite et la mémoire explicite. La première apparaît très tôt, presque dès la naissance, mais ne fait pas appel à notre conscience, elle permet par exemple à un nourrisson de reconnaître des visages qu’il a déjà vu même s’il ne s’en souvient pas physiquement, c’est ce qu’on appelle aussi le phénomène d’habituation.

À l’âge préscolaire, la mémoire implicite permet de nombreux apprentissages complexes, principalement moteurs comme monter les escaliers, faire du tricycle, etc. Vers l’âge de trois ans et demi, un enfant peut commencer à se constituer des souvenirs, c’est la partie explicite de la mémoire à long terme qui en est principalement responsable.

On distingue deux formes de mémoire explicite : la mémoire épisodique, correspondant à la mémoire des événements ponctuels et la mémoire générique correspondant aux événements quotidiens. Elizabeth Loftus est une psychologue cognitiviste américaine qui va longuement étudier ce sujet de la mémoire à long-terme chez l’enfant, très présent dans l’étude de la psychologie de l’enfant. C’est un domaine d’étude qui est en permanence sollicité, encore aujourd’hui par exemple dans des affaires de viol sur mineurs.

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NIVEAu DE MAîTRISE DES CoMPÉTENCES ExÉCuTIVES PAR âGE Le recueil de témoignages de personnes ayant été victimes d’abus sexuel

durant leur enfance, remet cette question de la mémoire à long-terme au cœur du débat. Très récemment, un rapport préconise de rallonger de dix ans le délai de prescription (qui est jusqu’à présent de vingt ans). En effet, ce délai est assez subjectif car il est difficile d’évaluer le temps qui s’écoule entre l’acte de violence commis sur un enfant et le moment où les souvenirs

resurgissent de la mémoire de cet enfant désormais adulte. « En 2009, mes

souvenirs sont revenus de façon brutale et précise »34 témoigne Mie Kohiyama victime d’abus sexuels dans son enfance. Cette personne n’a malheureusement pas pu porter plainte car il y a eu prescription des faits dont elle s’est rappelée trop tardivement.

La mémoire intrigue encore aujourd’hui bien des scientifiques, c’est un vaste champ d’investigations et d’explorations avec de nombreuses questions sans réponses. La mémoire et le système de mémorisation amènent également beaucoup d’autres cognitivistes à s’intéresser et à tenter de donner une explication au processus d’apprentissage chez les enfants. Le premier chercheur à s’être intéressé très sérieusement à l’analyse et à l’interprétation du phénomène d’apprentissage est Jean Piaget. Il va même plus loin puisqu’il étudie également la réflexion des enfants sur leur propre activité mentale, il interroge et évalue leur état de conscience.

Fig 10. Niveau de maîtrise des compétences exécutives par âge.

34. « Crimes sexuels sur mineurs : mieux écouter les victimes, et pour plus longtemps »,

consulté le 10 avril 2017,

https://www.franceinter.fr/justice/crimes-sexuels-sur-mineurs-mieux-ecouter-les-vic-times-et-plus-longtemps.

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La théorie du développement de Jean Piaget

« Influencé par sa formation de biologiste, J. Piaget conçoit l’intelligence comme une fonction qui permet à l’individu de s’adapter à son environnement »35. Le projet de Jean Piaget résulte dans l’analyse du développement de l’intelligence chez un individu. Il s’intéresse à la genèse des fonctions cognitives, c’est pourquoi il tente de comprendre et de décrypter le processus d’évolution de la connaissance, son mode de construction, comment l’on passe d’une forme de connaissance moins élevée à une forme de connaissance plus complexe. C’est la raison pour laquelle il se tourne vers les enfants, car ceux-ci traversent une période de développement intense.

Le questionnement profond et philosophique qui se cache derrière toutes ces années d’expérimentations et de recherches résulte dans l’appréhension, de manière plus globale, de « l’histoire des sciences et des sociétés à travers

l’évolution des structures logiques de la pensée »36.

Selon lui, l’intelligence serait une sorte de réponse à l’adaptation de l’individu à son milieu, c’est à dire une traduction possible du dialogue entre le sujet et son environnement. L’activité mentale qui est générée pour permettre ce dialogue, c’est ce que Jean Piaget appelle le schème (Le schème est la structure où l’organisation des actions telles qu’elles se transfèrent ou se généralisent lors de la répétition

de cette action en des circonstances semblables ou analogues37). On peut noter deux

processus essentiels à l’évolution des schèmes: la phase d’assimilation et la phase d’accommodation.

L’assimilation : C’est le phénomène qui traduit l’intégration aux schèmes déjà existants d’une nouvelle situation rencontrée par l’enfant avec laquelle il est familier.

L’accommodation : « si les nouvelles informations sont incompatibles avec les

Fig 11. [à gauche] Portrait de Jean Piaget. 35. « Psychologie de l’enfant : 150 ans d’histoire ». 36. Ibid.

37. Olivier Houdé, La psychologie de l’enfant, 5e édition mise à jour, Que sais-je ? (Paris: Presses universitaires de France, 2011).

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anciennes représentations alors il y aura un réajustement (une accommodation des schèmes). Par exemple le bébé qui veut prendre un nouvel objet dans sa main devra accommoder le mouvement de sa main en fonction de la forme ou

grosseur de l’objet convoité »38.

Ainsi, pour que l’enfant s’adapte à son environnement, il doit d’abord trouver un équilibre entre assimilation et accommodation.

Jean Piaget développe sa théorie à partir d’observations systématiques d’enfants suivant une méthode bien particulière qui vise à expliciter la vision du monde de l’enfant. La méthode clinique consiste à interroger de manière instantanée l’enfant en le confrontant à des situations de différentes complexités pour analyser sa réponse. Jean Piaget s’intéresse davantage au raisonnement que se construit l’enfant pour répondre à l’exercice demandé, et à l’explication qu’il donne de ce raisonnement qu’à la réponse en elle-même.

Pour retracer l’histoire du développement et de l’évolution de la connaissance, Jean Piaget réalisait son interrogatoire guidé sur des enfants de tranches d’âge successives et notait les points communs aux réponses d’un niveau à l’autre. Il conclue de ces observations une forme de construction de l’intelligence linéaire et stadiste.

Déjà, du temps des Lumières, Jean Jacques Rousseau, philosophe précurseur de la psychologie enfantine, avait déjà introduit la notion « d’étapes ordonnées chronologiquement ». Jean Piaget poursuit cette pensée en substituant ces étapes à des paliers d’équilibre correspondant à différents niveaux d’adaptations de plus en plus complexes du sujet à son milieu. Chaque niveau est atteint grâce à l’activité des processus d’assimilation et d’accommodation, ce qui entraîne l’évolution des schèmes et de la capacité cognitive de l’enfant. L’accumulation et l’évolution des schèmes amènent l’enfant à se transformer : on dit qu’il atteint un stade lorsque ces transformations correspondent aux différentes caractéristiques de ce stade. Ainsi les différents stades se superposent mais entretiennent des relations étroites les uns aux autres puisque l’activité cérébrale, elle, est continue (les 38. CEMEA-Pays de la Loire, « Psychologie et développement de l’enfant ».

schèmes existants continuent de se réajuster en fonction des nouveaux). C’est la raison pour laquelle, selon Piaget, « la connaissance est fabriquée

et non découverte »39. Les différents stades ne sont pas vraiment figés dans

le temps, comme nous l’avons vu précédemment, il existe des « périodes sensibles » au cours desquelles chacune des habilités cognitives trouve une place.

La théorie de Jean Piaget identifie quatre stades de développement cognitif chez l’enfant : le stade sensori-moteur (de la naissance à deux ans), le stade préopératoire (de deux à sept ans), le stade des opérations concrètes (de sept à onze ans) et le stade des opérations formelles (de onze à quinze ans).

Le stade sensori-moteur : l’enfant utilise ses sens et ses capacités motrices

pour se déplacer physiquement dans l’espace et explorer l’environnement ou pour déplacer un objet. Durant les neuf premiers mois de sa vie, le bébé va exercer les réflexes innés dont il dispose. Il observe qu’une même action produit une même conséquence donc il s’amuse à la répéter. À ce stade, la seule façon qu’il a de communiquer c’est de pleurer car il n’a tout simplement pas encore la capacité physique d’émettre tout autres sons.

Le stade préopératoire : caractérisé par la relation qu’entretient l’enfant

avec le monde. L’enfant est dominé par l’égocentrisme car il pense dans un premier temps à travers ses seules expériences individuelles et sensorielles ; il n’est pas encore capable de prendre en compte le point de vue d’autrui. Il n’est pas non plus encore capable de se mettre à la place de l’autre. Cette habilité cognitive, selon Piaget, se développe autour de quatre/cinq ans. C’est pourquoi la pensée manque encore de logique et l’enfant ne maîtrise pas encore toutes les opérations telles que la conservation ou la réversibilité. Cependant, il peut exercer une pensée symbolique, et se représenter des choses sans qu’elles ne soient présentes, il peut donc faire preuve d’imagination. Vers l’âge de trois ans, l’enfant commence à jouer à des jeux où il se projette dans un monde imaginaire et fait semblant pour le jeu. Il est alors capable de faire la distinction entre les événements qui sont réels et ceux qui ne le sont pas.

39. Michèle Guidetti, Les étapes du développement psychologique (Armand Colin, 2002).

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Le stade des opérations concrètes : à ce stade, le développement psychique et la maturation du cerveau de l’enfant le prédisposent à exercer sa faculté de « raisonner ». Celui-ci est capable de résoudre des problèmes d’un niveau plus complexe grâce à la logique. Les deux notions caractéristiques importantes de ce stade sont la réversibilité (par exemple transvaser de l’eau d’un verre à un autre) et la conservation (par exemple la conservation d’un liquide dans un volume variable). L’enfant peut désormais se mettre à la place d’une autre personne et s’imaginer ce qu’elle ressent.

Stade des opérations formelles : ce stade est associé à la pensée hypothético-déductive. L’enfant est capable d’émettre une hypothèse abstraite, puis de tenir un raisonnement logique pour permettre de vérifier (ou non) cette hypothèse et d’en tirer une conclusion.

La théorie du développement cognitif de Jean Piaget va avoir une réelle influence sur la psychologie de l’enfant. Pour en parler, il préfère le terme « d‘épistémologie génétique » (c’est-à-dire une recherche des mécanismes de

l’organisation psychique et de l’évolution des connaissances en général40), plutôt

que celui de « psychologie ». Ces travaux vont tout de même faire l’objet de nombreuses critiques dans les années soixante-dix.

En effet, les progrès de la recherche sur les sciences cognitives, les techniques d’imagerie cérébrale et les méthodes de la psychologie expérimentale (qui tente de comprendre les mécanismes biologiques impliqués dans les processus cognitifs de l’enfant) apportent de nouvelles données. Celles-ci alimenteront les recherches sur le développement cognitif de l’enfant et remettront en question certaines hypothèses. Par exemple, on se questionne beaucoup sur le caractère universel de l’organisation de la pensée cognitive, qui conduit au développement. Selon Piaget, il existerait une structure opératoire commune, qui amènerait l’enfant à atteindre les différents stades.

Cependant, on constate des divergences de niveaux dans les différents domaines que l’enfant doit développer pour atteindre un stade (c’est à dire un niveau de développement auquel on peut assimiler un changement de Fig 12. [à gauche] Une enfant qui se projette en tant que chanteuse.

40. « Psychologie de l’enfant : 150 ans d’histoire ».

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