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3. L’abscission des fruits au cours de la maturation des agrumes

3.3. Zones d’abscission

L’abscission se produit au niveau des sites prédéterminés nommées zones d’abscission

(AZs) constituées des cellules spécialisées (Sexton et Roberts, 1982 ; Estornell et al., 2013).

3.3.1. Localisation des zones d’abscission

Les fruits des agrumes ont généralement deux zones d’abscission : AZ-A située entre la brindille et le pédoncule et AZ-C située au niveau du calice (Figure 13A). Les zones

d’abscission ne sont pas actives tout au long de la vie de l’organe reproductif (Estornell et al.,

2013). Au cours des premières semaines du développement du fruit, l’abscission des bourgeons floraux et des fleurs se produit au niveau de la zone AZ-A. Au bout de 8 semaines, la zone AZ-A devient progressivement inactive. La désactivation de la zone AZ-A se produit parallèlement à l’activation de la zone AZ-C. Ainsi, la chute des petits fruits et des fruits matures a lieu au niveau de la zone AZ-C. Il est à noter que la chute des fleurs et des fruits qui ont moins de 8 semaines peut avoir lieu parfois au niveau de la zone AZ-C. Cependant l’abscission des fruits au cours de la maturation ne peut se produire qu’au niveau de la zone

AZ-C à cause de la forte lignification de la zone AZ-A (Goren et Huberman, 1976).

Figure 13. (A) Zones d’abscission chez les agrumes (Iglesias et al., 2007) (B) Coupe

longitudinale de la tige au niveau de la zone AZ-C (Burns, 1998).

La zone AZ-C est localisée au niveau de l’intersection entre les tissus du calice, du flavédo et d’albédo (Figure 13 B). La totalité des tissus vasculaires transportant l’eau et les

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carbohydrates passent par la zone AZ-C dont la rigidité est liée essentiellement à la présence de ces tissus vasculaires. Par conséquent, et suite à l’abscission tous les tissus vasculaires ventraux de la columelle centrale et les tissus vasculaires dorsaux et latéraux qui encerclent le

fruit sont rompus au cours de l’abscission (Cooper et Henry, 1968).

3.3.2. Morphologie, Anatomie et métabolisme des zones d’abscission

Au cours de l’abscission, les zones d’abscission reçoivent des signaux inter et intracellulaires spécifiques. Plusieurs preuves morphologiques et biochimiques montrent que les cellules constituant les zones AZs réagissent d’une façon différente par rapport à leurs

voisines qui reçoivent les mêmes signaux hormonaux (Brown, 1997).

Il est à signaler que l’abscission ne concerne pas toute la zone AZ. La séparation ne se produit qu’au niveau d’une couche cellulaire située au niveau de l’extrémité distale constituée

d’une à cinq cellules. Cette couche est nommée la couche de séparation (Racskó et al., 2006). Les

cellules constituant les AZ sont morphologiquement et anatomiquement différentes du reste des cellules. Elles sont plus petites, isodiamétriques, leur cytoplasme est dense, leur espace intercellulaire est étroit, elles contiennent beaucoup d’amidon et elles sont interconnectées

avec plusieurs plasmodesmes (Sexton et Roberts, 1982 ; Estornell et al., 2013).

La AZ ne se distingue pas uniquement par sa morphologie et son anatomie mais aussi par son métabolisme. Cette zone se caractérise par une division cellulaire intense, une

synthèse importante des protéines et des ARN, une consommation d’O2 très élevée et une

activité intense de peroxydase (Racskó et al., 2006). Le cytoplasme devient plus dense et il

contient beaucoup plus d’organites cellulaires. L’appareil de golgi et le réticulum

endoplasmique sont très visibles (Sexton et Redshaw, 1981). La lamelle moyenne qui permet aux

cellules de s’associer l’une à l’autre en tissus grâce à sa composition en pectines joue un rôle primordial au cours de l’abscission. En effet, suite à l’activation du processus d’abscission les enzymes telles que la cellulase, la pectine-estérase et la galacturonase dégradent les composés

pectiques de cette zone. Les cellules deviennent ainsi facilement séparables (Roberts et al., 2002).

A ce stade, un stress mécanique tel que le vent peut conduire à la chute du fruit (Racskó et al.,

2006).

Au cours de l’abscission, les tissus conducteurs ; le phloème et le xylème situés dans la zone d’abscission se bouchent. Ainsi, les métabolites ne peuvent plus circulés. En effet, une boursouflure interne appelée thyllose se forme suite à l’hypertrophie des cellules parenchymateuses dans l’xylème. La thyllose entraine l’éclatement des cellules transporteuses des métabolites. Le xylème localisé au niveau de la lamelle moyenne se fragmente mais les

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cellules constituant la lamelle restent intactes. Quant au phloème, il est obstrué par de la callose qui est un polysaccharide. Ces modifications restent localisées au niveau de la zone d’abscission qui construit « une digue » empêchant la propagation de ces processus dans les

zones voisines (Racskó et al., 2006).

Parfois le détachement du fruit mature au cours de la récolte ne se produit pas au niveau de la zone AZ-C. Ceci n’arrive que si le fruit n’a pas achevé sa maturation. Souvent, la récolte mécanique des fruits qui n’ont pas encore atteint leur maturité optimale engendre des blessures au niveau des fruits. En effet, avant maturation, la zone AZ-C n’est pas encore bien formée. Dans ce cas, la pression mécanique exercée au cours de la récolte conduit au détachement du fruit au niveau de la structure la plus fragile. Dans certains cas, quand il s’agit d’une variété qui se pèle facilement, la peau représente le point de détachement le plus

fréquent d’où l’obtention d’un fruit non commercialisable (Burns, 1998).

3.4. Etapes de l’abscission

Le phénomène d’abscission se déroule en plusieurs étapes. Selon Bonghi et al.(2000), il y

a trois étapes majeures: (A) la détermination génétique de la compétence cellulaire pour la réponse à l’abscission, (B) la différenciation de la zone d’abscission et (C) l’activation des

processus de séparation cellulaire. Cependant, (Estornell et al., 2013; Niederhuth et al., 2013) ont

défini quatre principales étapes dont l’ordre change un peu par rapport à ce qui été publié par

(Bonghi et al., 2000). La première étape consiste à la différenciation de la zone AZ au niveau du futur site de détachement. La deuxième étape consiste à l’acquisition de la zone AZ à une compétence lui permettant de réagir aux signaux d’abscission. Pendant la troisième étape on note une activation du processus d’abscission. Cette étape est suivie par l’étape de la différenciation d’une couche protectrice au niveau de la surface de la couche de séparation du

côté de la plante mère (Figure 14) (Estornell et al., 2013; Niederhuth et al., 2013).

Figure 14. Etapes d’abscission (Estornell et al., 2013)

Il est à noter que la plupart des informations moléculaires et biochimiques disponibles jusqu’à maintenant sont reliées à l’étape de l’activation du processus d’abscission alors que le

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reste des aspects demeurent très peu connus. Les études sur l’activation des zones d’abscission ont impliqué notamment des caractérisations anatomiques et structurelles, l’identification d’enzymes hydrolytiques responsables de la séparation des cellules, l’identification de gènes responsables de l’abscission et la détermination de l’implication

d’hormones, notamment les auxines et l’éthylène, dans ce processus (Bonghi et al., 2000).

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