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CHAPITRE V : LE CAS DE LA GÉRIATRIE

V. 4.1.1 – Une volonté commune de réviser le modèle d’organisation des soins existant

Au cours de l’automne 1998, la période de transfert provisoire sur le site de B, prend fin et c’est dans une unité rénovée d’une capacité de 28 lits d’hospitalisation, que l’équipe récemment fusionnée, prend ses fonctions. Le gériatre, l’infirmière chef, la physiothérapeute, l’ergothérapeute et deux travailleurs sociaux de A, sont venus grossir l’équipe existante. Même si le transfert de l’équipe initiale de gériatrie de A n’est pas complet puisque les infirmières de cette unité n’ont pas suivi, des tensions émergent entre les différents professionnels de A et C, confrontés à des modes d’organisation et des façons de faire différents, donnant lieu à quelques mois d’intervalle, au départ des deux travailleurs sociaux et d’une ergothérapeute.

« C’est sûr, ce n’était pas évident parce que c’était un transfert, c’était 2 équipes qui se fusionnaient. On devenait 2 physiothérapeutes au lieu d’une, deux ergothérapeutes au lieu d’une. Moi, j’étais habituée toujours à prendre les requêtes hein. Les requêtes arrivaient, je les prenais, c’était mes patients (rires), là, il fallait les diviser alors là il y a eu des conflits. » (P)

« Qu’est ce qui a déclenché tout ça, c’est peut-être les conflits, c’est notre façon de travailler qui posait question là, il y avait des insatisfactions de la part des membres…Comme je vous disais, on était une équipe multi ici (à C), plus multi, on ne travaillait pas en interdisciplinarité. » (I)

« Tout de suite après le déménagement en fait, il y a eu des conflits (…) Les travailleuses sociales de A sont parties. Il y a eu des conflits entre moi, le Dr X., la travailleuse sociale d’ici, sur des pratiques qui …Parce qu’on s’en venait une grosse équipe, c’était difficile ça, parce qu’on partait de deux petites équipes où il y avait un professionnel de chaque discipline alors que là, on tombait à 3 ergo, 2 physio qui n’avaient pas les mêmes façons de faire, tout de suite en partant, avec des médecins qui n’avaient pas les mêmes façons de faire. » (P)

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« Nous autres, on avait une façon de rentrer, c’était du 1 à 1. Ça allait vite… vite, vite. C’était toujours les mêmes personnes…Go! Go! Go! (…) Mais, ici, c’était pas ça là…tu sais, il y avait beaucoup de lits, beaucoup d’admissions électives (…) Naturellement c’était plus mon personnel, c’était le personnel de 5 ou 6 docteurs. Fait que là, moi je voulais que ça roule, je voulais que ça donne des congés. Et puis, ça…ça ne marchait pas… » (M)

Lors d’une réunion du comité interprofessionnel – mis en place par le chef de service dès les premières étapes de la réorganisation – l’urgence à améliorer la communication entre les membres de l’équipe, mise à mal lors des réunions multidisciplinaires notamment, et celle de préciser les rôles de chacun, font consensus.

« Donc, dans les trois quatre premiers mois, il y a eu une crise…surtout avec le service social…puis au niveau du rôle de chacun. Et, on s’est assis à ce moment là, on a fait une réunion plus interdisciplinaire parce qu’on voyait que tout le monde était stabilisé, l’infirmière de clientèle était nommée, tout le monde avait été nommé dans les postes. L’équipe était recomposée et on trouvait qu’il y avait du potentiel mais il fallait faire quelque chose pour améliorer notre travail…le climat. À ce moment là, dans les réunions interdisciplinaires on s’est mis à parler de nos forces et de nos faiblesses et puis ça a donné finalement qu’on s’est dit qu’il fallait qu’on renforce ça. » (M)

Rapidement, le mandat administratif du comité interprofessionnel se transforme. D’une plate-forme de revendications et d’information à l’usage de chacun des groupes professionnels représenté auquel préside le chef de service, ce lieu d’échanges devient celui d’un apprentissage à travailler ensemble que les membres qui vont s’impliquer souhaitent redéfinir, à partir d’une conception commune de la prise en charge gériatrique.

« Le 1er comité interprofessionnel a été formé en 1998 et la volonté pour les

gens qui se sont investis dans ce comité, c’était vraiment d’apprendre à travailler ensemble, de mettre en commun toutes ces expertises qu’on avait ici et qu’il fallait comme ramasser après tous ces changements. » (M)

Un sous-groupe prend forme en marge du comité interprofessionnel initial. Sur une base volontaire, deux gériatres dont le chef de service, trois infirmières, dont l’assistante au poste, une ergothérapeute, une physiothérapeute, une travailleuse

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sociale vont se réunir mensuellement. La constitution du groupe est représentative de l’équipe multidisciplinaire recomposée puisque des intervenants des deux équipes préexistantes sont présents. Rapidement un acteur extérieur vient rejoindre le groupe. Il s’agit d’une conseillère en développement des ressources humaines du CHUά qui aidera le groupe à cheminer tout au long du processus. Son rôle est déterminant puisqu’elle assure tout à la fois une fonction de leadership institutionnel en maintenant un lien formel entre la communauté et la hiérarchie officielle de l’organisation, mais aussi celle de leader interpersonnel, puisqu’elle sera également une médiatrice au sein du groupe.

« On a eu une accompagnatrice qui était là à toutes les rencontres et qui a développé un lien extraordinaire avec l’équipe (…) De par sa formation et puis elle était plus au courant aussi de tout ce qui touche les ressources humaines. Donc quelque chose qui va plus loin que les choses administratives là. Donc, elle était une ressource vraiment…Elle était la personne neutre parmi nous. Parce que veut, veut pas, il émergeait quand même des conflits à travers ce comité là, pas des gros là, mais quand même, elle était la personne neutre, elle était la médiatrice si on veut même si ce n’était pas son rôle au départ, elle devait être là plus en support à l’équipe, et elle est devenue partie intégrante. » (P)

V.4.1.2 – L’interdisciplinarité : un modèle structurant pour la communauté en