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4.6.3 – La visibilité de la CoP à l’intérieur du comité interprofessionnel central

CHAPITRE V : LE CAS DE LA GÉRIATRIE

V. 4.6.3 – La visibilité de la CoP à l’intérieur du comité interprofessionnel central

Lors des séances de travail du groupe interprofessionnel, la visibilité des membres actifs de la communauté de pratique initiale de C, est tangible et plusieurs éléments viennent en favoriser l’expression.

En premier lieu, l’exercice d’autoévaluation qui constitue une étape essentielle de la démarche d’agrément implique que le groupe porte un jugement sur son degré d’excellence en matière de soins et de services. Dans ce contexte, les critères de qualité retenus par le CCASS et qui portent sur des éléments tels que : la réponse aux besoins des usagers, la compétence du milieu, l’approche centrée sur le client ou encore le milieu de travail, sont autant d’éléments qui permettent à l’équipe noyau de la CoP de C, de faire montre de l’expertise qu’elle a développée dans ce domaine. À cette occasion, la référence aux formes réifiées d’une co-construction de pratique interdisciplinaire telle qu’une « formation systématique à l’interdisciplinarité » ou encore « la clarification des rôles et responsabilités des membres de l’équipe » constituera un argument fort pour affirmer les compétences de ce groupe et mettre l’accent sur son identité collective. Bien que les membres de B revendiquent

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également de travailler selon cette approche, La pratique en interdisciplinarité apparaît ici plus implicite et n’a pas fait l’objet d’un questionnement spécifique de la part de l’équipe.

En second lieu, nous constaterons à de nombreuses reprises que certains acteurs dominent les débats qui s’instruisent dans le cadre de la démarche d’autoévaluation. Dans la prise de position qui s’instaure pour mettre en avant ses propres compétences et expertises ou pour justifier le recours à telle ou telle pratique, les échanges mettent en avant deux formes d’autorité que l’entité « groupe », ne remet pas en question. Celle des médecins spécialistes d’abord, porteurs d’un projet médical intégré, mais à qui l’exercice d’autoévaluation donne l’occasion d’affirmer des prérogatives ou spécificités locales - qui d’ailleurs apparaîtront en toute lettre dans le rapport final23 :

« À B, il y a un dépistage systématique et les patients admis sont vus en gériatrie » (p.24)

« À C, il y a un médecin gériatre disponible tous les jours à l’urgence. » (p.24)

Celle de l’équipe noyau de la communauté de pratique ensuite, dont le leadership collectif s’active lors des séances de travail. Ici, médecin, infirmier, professionnels non médecins, interviennent à de nombreuses reprises, ayant recours aux interactions narratives pour expliquer leurs façons de faire, justifier l’approche retenue dans leur service ou encore négocier autour de la cote à s’accorder sur un critère spécifique. Ici, le storytelling met en activité la mémoire de la CoP et une fois de plus, sa production sert de porte-étendard à l’identité sociale et collective qu’elle a su développer. Les hochements de tête pour appuyer les dires d’une collègue, la façon de surenchérir à l’exposé d’une « bonne pratique», citée en exemple, sont autant d’occasion de repérer la dynamique de l’équipe noyau de la CoP.

« Nous à C, c’est notre point fort ça, on est bon là-dedans… l’approche client…c’est sûr que pour nous c’est interdisciplinaire, puis on a mis nos énergies là-dessus… (M) … Et ça a donné tout ça, le PAFI, le livret

23 - Extraits du document préparé par la DGIQP, relatif à la procédure d’autoévaluation réalisée par l’équipe de gériatrie dans le cadre de la procédure d’agrément 2004.

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d’accueil, l’unité ambulatoire. On a fait un gros travail dans le comité…puis dans l’équipe. » (P)

« Notre document sur le fonctionnement et le rôle de l’équipe interdisciplinaire, on est plusieurs ici à y avoir travaillé…ça a été quelque chose…l’organisation, puis tout ça ...hein M. (interpelle une l’infirmière chef

du groupe). Nous on pense vraiment que ça a amélioré notre pratique, notre

communication…nos services ici. » (M)

Leurs interventions fréquentes dans le groupe, portent également sur la meilleure connaissance disponible ou la bonne information qu’il faut se donner les moyens d’aller chercher pour documenter sa réflexion, reproduisant ainsi certaines des façons de faire de la CoP initiale.

« En tant qu’équipe interdisciplinaire, qu’est ce qu’on doit aller chercher comme information pour être plus efficace? » (M)

Ou de personnes ressources, dont l’expertise devient utile pour faire avancer la réflexion du groupe tout entier

« Là…les critères de performance…ce serait bien de voir c’est quoi, les données qui rentrent en ligne de compte. Moi, j’ai déjà eu à faire avec l’archiviste, ce serait bien de la faire venir, pour qu’elle nous explique comment ils saisissent nos données…là. » (I)

« L. on la connaît, on a déjà eu à faire à elle, notamment pour notre projet d’unité ambulatoire (P) (...) Ce serait une idée de la faire venir pour voir comment on pourrait faire rentrer des indicateurs…qui nous parlent à nous…dans notre pratique et qu’on ne retrouve pas dans le système informatique MAGIC qu’on nous a présenté. » (M)

Tout au long du suivi de la dynamique de ce groupe de travail, la communication qui structure les échanges parmi les membres, met en saillance - outre des différences liées aux façons de faire entre les deux équipes de gériatrie - des appartenances bien spécifiques. Tantôt liées à une identité professionnelle revendiquée ou bien circonscrite à un petit groupe d’acteurs qui partagent les mêmes valeurs et des apprentissages en commun comme dans le cas de l’équipe noyau de la CoP, ces appartenances teintent les discours produits et rythment les échanges du groupe, du moins dans un premier temps.

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V.4.6.4 – Une nouvelle forme de coopération interstitielle : l’élargissement de la