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Chapitre 3. Des chiffres érigés en totems : une « restriction du périmètre de la

2) Vers une totemisation des résultats économétriques ? 157

La preuve économétrique a un statut particulier : elle obéit à des canons statistiques stricts qui lui confèrent une certaine scientificité mais risque toujours d‟être entachée par un potentiel biais de sélection. Elle appartient à l‟univers technocratique, puisqu‟elle présente des gages d‟objectivité tout en étant difficilement compréhensible par le profane. Elle permet donc de légitimer et de guider les décisions publiques, tout en étant susceptible de restreindre l‟éventail des choix possibles, comme on l‟a vu avec les deux risques évoqués ci-dessus. Afin de tenir compte de ces différentes dimensions, nous avons choisi d‟utiliser l‟expression de totem pour

145 Sous cette forme, l‟utilisation de l‟outil économétrique participerait en elle-même d‟une dépolitisation du débat dans lequel le chercheur s‟inscrit. Il ne s‟agit pas seulement de dire, comme certaines études l‟ont fait auparavant, que même quand il est considéré comme « expert », un individu a tendance à écarter une information qui lui paraît aller à l‟opposé de ses valeurs culturelles ou politiques (Kahan 2016).

146 L‟obstacle principal, en ce qui concerne l‟étude des phénomènes de récidive, reste celui des bases de données disponibles, qui peuvent restreindre considérablement l‟éventail des choix méthodologiques possibles.

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désigner de mauvais usages des résultats économétriques et par extension d‟autres données quantifiées. Pour définir cette notion, nous suivons les termes de Florence Jany-Catrice lorsqu‟elle s‟intéresse aux mésusages du chiffre. Le totem est ainsi un chiffre qui possède les propriétés suivantes :

- Il a « les vertus illusoires de la neutralité axiologique évacuant le caractère politique du processus de quantification » ;

- Il « circule facilement d‟espaces dans lesquels il est élaboré [comme la recherche], aux espaces d‟appropriation publique, perdant souvent en route les métadonnées qui en font sa singularité » ;

- Il « évite le temps long de l‟apprentissage cognitif collectif » ;

- Il « peut être soumis à la répétition, ce qui favorise l‟acculturation collective rapide et l‟insertion dans les jugements collectifs » (Jany-Catrice 2012a, p. 30)147

.

En d‟autres termes, il existe un risque de totemisation des résultats économétriques ou d‟autres données statistiques lorsque les utilisateurs de ces chiffres oublient les conventions ordinaires qui les sous-tendent et ne tiennent pas compte du fait que ces chiffres sont construits, historiquement et socialement situés et qu‟ils doivent être interprétés avec précaution, sans être justement érigés en totems que l‟on ne discute plus. Cette dérive peut s‟avérer dommageable, en particulier parce que les statistiques constituent des outils robustes de légitimation des politiques publiques. Si leurs utilisateurs ne sont pas conscients de cette dimension conventionnelle, ils risquent d‟imposer comme neutres et objectives des décisions qui ne le sont jamais totalement (a). Qu‟en est-il en ce qui concerne spécifiquement la question pénitentiaire ? Certains chiffres sont- ils repris en boucle, sans que l‟on s‟interroge sur les choix méthodologiques qui ont présidé à leur construction ? Quelles justifications, statistiques ou non, sont apportées aux différentes politiques pénitentiaires ? Pour répondre à ces questions, nous avons entrepris une recension des discours médiatiques et institutionnels portant sur les pratiques pénitentiaires (b).

a) La statistique, pour « prendre des décisions sans en avoir l‟air »148

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Par exemple, le chiffre des « 3 % de déficit public » constitue un totem abondamment repris dans l‟espace public.

148 Cette citation provient de l‟ouvrage de Theodore Porter, Trust in Numbers. The Pursuit of Objectivity in

une « restriction du périmètre de la démocratie » ?

- 159 - Le risque de totemisation du chiffre s‟alimente à différentes sources, dont on peut distinguer ici principaux deux volets. D‟une part, les résultats statistiques peuvent contribuer à justifier les décisions publiques, puisque l‟exercice du pouvoir politique s‟accompagne nécessairement d‟un discours de légitimation (Weber 2000 [1921]). Celui-ci peut s‟appuyer sur différents registres (Ogien 2010, p. 23), comme le montre l‟exemple du bracelet électronique. On peut ainsi expliquer que la prison a fait ses preuves et la considérer comme le mode principal d‟exécution des sanctions (registre de la tradition) ; que tous les justiciables doivent être traité de la même manière et qu‟il n‟est pas concevable que certains condamnés puissent bénéficier de la mesure quand d‟autres en sont privés dans certaines juridictions (registre de l‟égalité) ; que le juge est souverain et qu‟il octroie des bracelets électroniques comme il l‟entend et selon la jurisprudence en vigueur (registre de la justice) ; qu‟il faut au contraire calculer pour chaque condamné un score mesurant sa probabilité de récidive pour trancher, sans avoir recours au jugement professionnel (registre du calcul) ; ou encore qu‟il faut que le PSE soit accordé de façon rationnelle à ceux pour qui le coût de la mesure est inférieur à son bénéfice estimé (registre de l‟efficacité économique). Cette dernière perspective prend de l‟ampleur à partir des années 1990 (Dubar 2005), où « une nouvelle fonction de la recherche en sciences sociales semble émerger ou s‟amplifier : celle de la légitimation des décisions publiques appuyées sur des procédures d‟évaluation » (ibid, p. 366). Ces travaux statistiques ne supplantent pas la décision politique mais ils doivent plutôt servir à la guider. Néanmoins, dans les faits, le choix du décideur se trouve restreint puisqu‟à partir du moment où une mesure est évaluée comme étant beaucoup plus efficace qu‟une autre, il est difficile de ne pas la mettre en pratique. En ce sens, les outils statistiques, au premier rang desquels figure l‟économétrie, sont susceptibles de devenir un puissant outil de « restriction du périmètre de la démocratie » (Supiot 2015, p. 263), pour reprendre le titre de ce chapitre.

D‟autre part, le chiffre peut participer d‟une telle légitimation de l‟action publique du fait de sa « valeur sociale » (Ogien 2010, p. 35), puisqu‟il est associé à des propriétés comme la vérité, l‟objectivité ou l‟« indiscutabilité », indépendamment de sa valeur substantielle. En particulier, une décision fondée sur de tels résultats numériques revêt l‟apparence de la neutralité (Porter 1995, p. 8) ; l‟évaluation économétrique en particulier place le chiffre au cœur de l‟action publique tout en évacuant les enjeux politiques. Il s‟agit en fait d‟un « rejet du politique pour mieux légitimer les politiques » (Jatteau 2016, p. 451). La force de ces résultats tient également à leur caractère scientifique, puisque les articles de cette littérature reprennent généralement les codes du domaine de la physique ou des disciplines dites « dures » en affichant en particulier de nombreuses équations. De plus, une information chiffrée apparaît souvent plus convaincante qu‟un développement nuancé, d‟autant plus qu‟elle est souvent présentée de manière

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décontextualisée, ce qui évite les coûts préalables de familiarisation avec l‟objet du débat. Affirmer que « les deux tiers des anciens détenus sont recondamnés dans les cinq années suivant leur libération », c‟est faire un constat sans équivoque et convaincre son auditoire qu‟il faut « agir » ; ce résultat se suffit à lui-même. La simplification, caractéristique essentielle du résultat chiffré, participe en elle-même à la production d‟une certaine autorité (Espeland et Sauder 2007, p. 3).

Finalement, « que ce soit dans les sciences sociales ou dans la gestion du monde social, la statistique a donc été investie d‟un rôle comparable de “désidéologisation” et “d‟objectivation”, permettant de traiter les faits sociaux “comme des choses”, selon l‟expression d‟Émile Durkheim » (Desrosières 2000, p. 122). De nombreux chercheurs ont étudié ce mouvement dans différents domaines, qu‟il s‟agisse par exemple des dispositifs de chiffrage des programmes politiques (Lemoine 2008), de la domination du Produit intérieur brut comme guide de l‟action publique (Jany-Catrice 2010, p. 93), des statistiques relatives à l‟institution policière (Didier 2011) ou à l‟enseignement supérieur (Harari-Kermadec 2016) ou encore de la production d‟indicateurs d‟identité concernant les peuples autochtones (Parizet 2013). Tous s‟accordent pour souligner la dépolitisation induite par les chiffres, qui s‟affichent comme incontestables, scientifiques, universels et accordent un pouvoir important à des savoirs experts. Dans ce « système de performance totale », la « raison statistique » ou la « raison métrique » semblent régner en maîtresses et écraser tous les autres dispositifs de légitimation (Jany- Catrice 2012a, p. 24).

Ce mouvement général de quantification occupe particulièrement l‟économiste, puisque celui-ci y occupe une place d‟expert par excellence, « du fait de son avantage comparatif en techniques quantitatives et l‟extension de son objet à l‟ensemble des phénomènes sociaux ». À la suite de Jérôme Gautié, on peut parler d‟un « impérialisme empirique », impulsé par la multiplication de bases de données et surtout par « le perfectionnement des techniques économétriques permettant de les traiter » (Gautié 2007, p. 932). Cet impérialisme conforte le « sentiment de supériorité » des économistes vis-à-vis des autres sciences sociales (Fourcade, Ollion et Algan 2015). On retrouve donc ici un lien fort entre puissance sociale du chiffre et économétrie, la seconde venant renforcer la première. Il n‟y a alors plus qu‟un pas à franchir pour que les résultats d‟évaluation des politiques publiques deviennent prescripteurs des futures actions à mener. Les travaux des économistes gagnent ainsi en influence puisqu‟ils peuvent être utilisés pour justifier les projets de réformes. Dans cette perspective, le Conseil d‟Analyse économique a récemment formulé la recommandation de « recourir systématiquement à des équipes d‟enseignants-chercheurs pour évaluer l‟efficacité des politiques publiques » (Benassy-Quéré,

une « restriction du périmètre de la démocratie » ?

- 161 - Blanchard et Tirole 2017, p. 11), soulignant par là-même l‟importance potentielle des études économétriques et les exposant à un risque de totemisation.

D‟après Alain Supiot, le mouvement de l‟économie du droit (Law and Economics) se situe justement en plein cœur de ce qu‟il appelle la « gouvernance par les nombres », à tel point que l‟auteur choisit d‟y consacrer un chapitre entier de son ouvrage pour illustrer ses propos (Supiot 2015, chapitre 6)149. Pour lui, les économistes appartenant à ce mouvement considèrent que leurs résultats ont une valeur normative et non seulement descriptive : « le propre de la doctrine Law and Economics consiste à tirer de l‟observation de ces pratiques [juridiques] des normes de portée générale, auxquelles elle entend soumettre l‟ensemble des sytèmes juridiques » (ibid, p. 189). L‟encadré 7 donne ainsi l‟exemple de quelques laboratoires de recherche spécialisés en économie du droit en France ; il apparaît que l‟objectif des travaux qui y sont menés n‟est pas seulement de donner un éclairage sur les institutions telles qu‟elles sont mais également telles qu‟elles devraient être.

Encadré 7 – Les laboratoires d’économie du droit en France : un objectif normatif ?

Il existe peu de laboratoires de recherche spécialisés en économie du droit en France ; nous en avons ici retenus trois.

Le texte de présentation du laboratoire d‟Économie du droit de l‟Université Paris 2, d‟abord, indique que les travaux qui y sont développés ont « une dimension positive et normative » et visent « non seulement à fournir de nouvelles idées dans le raisonnement juridique, mais aussi des études d’impact fondées sur les techniques économiques »150.

Le Bureau d‟économie théorique et appliquée (Beta), unité mixte de recherche située à la fois à Strasbourg et à Nancy, s‟inscrit dans la même perspective en ce qui concerne son sixième axe de recherche consacré à l‟économie du droit. Le texte de présentation indique ainsi que « la démarche adoptée est positive lorsqu‟il s‟agit de mesurer la capacité des règles et des systèmes juridiques à atteindre leurs finalités (conflits du travail, pensions alimentaires, droit de la défaillance d‟entreprise…) mais aussi normative lorsqu‟il s‟agit de discuter du caractère socialement souhaitable de certaines évolutions du droit (transposition du plaider coupable en droit français, Law and Finance, droit européen de la responsabilité…) »151.

À l‟université de Nanterre, enfin, le laboratoire EconomiX possède également un pôle consacré à l‟économie du droit, intitulé « Droit, Institutions, Réglementation et Interactions

149 Pour rappel, le domaine du Law and Economics prend son essor à l‟Université de Chicago à la fin des années 1940, sous l‟impulsion de Henry Simons et de Friedrich Hayek et en lien étroit avec d‟autres économistes comme Milton Friedman. Il porte un objectif idéologique fort, puisqu‟il cherche à étudier les cadres juridiques et institutionnels adaptés à l‟univers concurrentiel. Cette branche de l‟économie est particulièrement intéressante pour nous puisque le sous-ensemble de l‟économie des prisons en fait partie.

150 D‟après http://cred.u-paris2.fr/presentation (nous soulignons).

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Stratégiques » (DIRIS). Les travaux qui y sont menés cherchent notamment à « analyser et [comparer] l’impact des traditions juridiques et de l‟organisation de l‟institution judiciaire sur les activités marchandes et non marchandes » ou à « évaluer les effets liés à la dynamique d‟évolution des systèmes juridiques »152

. Ainsi, le laboratoire accorde une place particulière au « design des lois et de l‟organisation judiciaire » et « les questions abordées (…) comportent une importante dimension de politique publique notamment en matière de réformes judiciaires »153. Le rapport d‟activités précise que les chercheurs du pôle DIRIS ont « le souci de répondre à une demande sociale » et s‟impliquent dans des appels à projets d‟institutions non académiques154. Par exemple, ils ont réalisé plusieurs rapports d‟expertises, notamment pour le compte du Conseil National des Barreaux155 ou de la DARES156.

Les trois laboratoires évoqués dans l‟encadré 7 mettent donc l‟accent, dans leur texte de présentation, sur leur dimension à la fois positive et normative : les travaux qu‟ils mènent ont vocation à déboucher sur des réformes judiciaires. Toutefois, il ne faut pas exagérer cette caractéristique, puisque cet objectif normatif concerne de nombreuses branches de l‟économie et pas uniquement celle de l‟économie du droit (c‟est le cas par exemple de l‟économie de l‟environnement, de l‟économie de l‟éducation ou encore plus généralement de l‟économie publique). En outre, en ce qui concerne plus précisément l‟économie des prisons, les recommandations politiques sont souvent présentées avec précaution. En voici deux illustrations, qui seront complétées avec profit par la consultation d‟autres publications passées en revue au chapitre 1.

“This article finds that the length of parole supervision has no significant deterrent effect. Given that community supervision is costly, it might be optimal for the government to keep the parole spell shorter.”

(Mariyana Zapryanova 2014, conclusion) “The results indicate that early electronic monitoring release reduces the chances of re-arrest of ex-prisoners by between 20 and 40 percent within two years, suggesting that it is a very cost effective policy to reduce recidivism.”

(Olivier Marie 2015, abstract)

152 D‟après https://economix.fr/fr/axes/diris/ (nous soulignons).

153 D‟après https://economix.fr/pdf/rapports/Rapport_d_activite_2007_2012_et_projet_scientifique_pour_le_ contrat_quinquennal_2014_2018_EconomiX.pdf, p. 35 (nous soulignons).

154 Ibid, p. 37. 155

« La Régulation du métier d‟avocat en entreprise » (2008), « Les effets de la libéralisation du marché des avocats sur la profession d‟avocat » (2008) ou encore « Enquête statistique sur l‟organisation des activités des avocats » (2012).

une « restriction du périmètre de la démocratie » ?

- 163 - Ces deux extraits soulignent les directions « optimales » à suivre pour la mise en place de réformes pénitentiaires : réduire les périodes de libération conditionnelle (première citation) ou accroître la proportion de personnes placées sous surveillance électronique (deuxième citation). Cependant, ces implications politiques sont nuancées, dans le premier cas par l‟utilisation du verbe “might” et dans le second par celle de “suggesting that”. Ces exemples soulignent finalement le rôle à double tranchant des outils statistiques et économétriques en particulier. D‟un côté, ils sont susceptibles d‟éclairer puissamment nos choix collectifs, en fournissant des évaluations des politiques publiques mises en œuvre et de celles qui pourraient l‟être ; de l‟autre, ils peuvent faire l‟objet de mauvais usages et se voir totemisés. Dans ce cas de figure, la foi dans les totems conduirait à soustraire certains choix aux processus de délibération collective en guidant aveuglément vers certaines solutions au détriment d‟autres. Pour éviter ce risque, il convient de manier ces chiffres avec précaution, en n‟oubliant pas qu‟ils conservent une dimension conventionnelle et doivent être appréhendés avec suffisamment de recul.

En ce qui concerne l‟économie des prisons, ce risque de totemisation reste plutôt théorique. En effet, dans la sphère publique et notamment médiatique, les arguments avancés en la matière semblent davantage régis par ce que l‟on a pu appeler un « populisme pénal » (Mucchielli 2008, p. 17) que par des choix rationnels : il s‟agit plutôt de réagir à des faits divers qu‟à des études économétriques.

b) Les politiques pénitentiaires, une totemisation restreinte

Afin de nous intéresser à la diffusion de ces travaux statistiques dans l‟espace public, nous avons effectué une recension de rapports parlementaires et institutionnels ainsi que d‟articles de presse157, et avons pu ainsi lister les arguments utilisés par les différents acteurs lorsqu‟ils évoquent la « question carcérale ». Pour effectuer ce dépouillement, nous nous sommes concentrés sur les écrits portant sur le thème général de la prison et en particulier sur ceux des conditions de détention, des aménagements de peine et de la récidive. Nous avons exclu de l‟analyse les publications qui concernent spécifiquement la question de la radicalisation en prison158, trop éloignée de notre sujet d‟étude. Nous nous sommes focalisés par ailleurs sur la

157 Nous avons choisi de retenir la sphère médiatique car les journalistes participent, par leurs écrits, à l‟élaboration d‟un référent ou d‟une norme « par rapport à laquelle le politique va être temporairement contraint (…) de se situer » (Lemoine 2008, p. 416).

158 Pour une recension portant sur la radicalisation en prison et en particulier sur les chiffres utilisés à ce sujet, le lecteur peut consulter de Galembert (2016).

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presse nationale, qu‟elle soit quotidienne ou hebdomadaire, sans recenser les articles parus dans la presse régionale. En effet, cette dernière traite souvent de la prison comme d‟un fait divers et non comme d‟un problème social, ce qui n‟est pas l‟angle d‟approche souhaité.

L‟ensemble des rapports institutionnels et des articles de presse recensés est décrit et présenté exhaustivement à l‟annexe 1-H, qui comprend également d‟autres précisions sur la méthode employée. Nous avons choisi deux temporalités différentes afin de recueillir suffisamment de documents. Pour les rapports institutionnels, nous avons commencé la recension au début de l‟année 2013, car celle-ci est marquée par la tenue de la Conférence de consensus sur la prévention de la récidive, événement au cours duquel le Ministère de la Justice a réuni un grand nombre de professionnels et de chercheurs pour synthétiser les connaissances existantes en la matière. Le corpus présenté comporte donc 21 publications issues d‟institutions publiques159, comme le Ministère de la Justice ou le Contrôleur général des lieux de privation de liberté. En ce qui concerne les articles de presse, nous nous sommes limités à une année complète du fait de leur fréquence plus régulière ; nous avons donc effectué une recension exhaustive à partir de la base de données Europresse de juillet 2016 à juillet 2017. L‟ensemble décrit à l‟annexe 1-H regroupe 53 articles160. Nous avons fait une synthèse des informations présentes dans les rapports institutionnels et les articles de presse à l‟aide d‟un tableau séparant celles qui présentent des chiffres de celles qui n‟en comportent pas161. Nous les avons également catégorisées au moyen d‟un code couleur, afin de repérer visuellement les arguments les plus fréquemment employés.

Cette recension amène à plusieurs constats. D‟abord, cinq rapports institutionnels mentionnent qu‟il existe peu de chiffres pour contextualiser la condition carcérale en France. En particulier, ils pointent l‟absence de données sur les caractéristiques sociodémographiques des personnes incarcérées ou sur les comportements de récidive. Cette situation est paradoxale

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Nous avons initialement dépouillé 36 rapports avant d‟en écarter une partie pour deux raisons. D‟une part, nous n‟avons pas conservé ceux qui ne comportaient aucun élément relatif à nos sujets d‟intérêt (en particulier les conditions de détention, la récidive, les aménagements de peine). D‟autre part, certains documents se sont révélés redondants d‟une année sur l‟autre ; nous avons choisi de ne pas les présenter dans le tableau de l‟annexe 1-H.

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Pour parvenir à ce total, nous en avons initialement recensé plus de 2 000 avant d‟effectuer un premier tri, suite auquel nous en avons consultés 332. Pour sélectionner les articles consultés, nous avons exclu tous ceux portant sur un pays étranger, ainsi que ceux se focalisant sur des faits divers. Lors de notre consultation des 332 articles, nous nous sommes concentrés sur ceux qui s‟intéressent à la question carcérale en tant que