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DISCUSSION ET PERSPECTIVES

3. Vers un modèle de conversion in vivo

Les principaux résultats de notre article sont basés sur un modèle de conversion in vitro des

cellules CD4 TN. De façon intéressante, nous avons récemment trouvé un modèle de conversion

in vivo qui récapitule les observations phénotypiques et fonctionnelles mesurées lors de la

conversion in vitro. En effet, le transfert adoptif de lymphocytes CD4 TNissus d’une souris

C57BL/6 AND TCR transgénique Rag2-/- chez une souris sauvage C57BL/6 conduit à leur

conversion en cellules CD4 TN Ly-6C-. Après un jour de transfert, la quasi-totalité des cellules

transférées exprime CD69, un marqueur précoce d’activation du TCR, qui reflète l’interaction de ces cellules avec le Soi. Cette interaction induit un Tonic Signaling, plus important que celui

qu’elles reçoivent dans leur hôte d’origine, entrainant leur conversion en cellules CD4 TN Ly-

6C- en 8 jours (Figure 32). En accord avec ces résultats, après un transfert de cellules T CD4+

naïves AND dans une souris déficiente pour le CMH de classe II, aucune expression de CD69 n’est observée à jour 1 et les cellules ne diminuent pas leur expression de Ly-6C après 8 jours de transfert (Figure 33). Comme la montré Tomura et al., cette interaction des cellules AND transférées avec le Soi est due à une diminution de la compétition pour le complexe p-CMH dont elles sont spécifiques (Tomura et al., 2010). En plus de cette diminution de compétition, les cellules semblent avoir une avidité plus forte pour le Soi, qui leur est spécifique. En effet,

un transfert de CD4 TN issues de souris OT-II (exprimant un TCR spécifique de l’ovalbumine)

dans une souris sauvage ne nous permet pas de reproduire ces résultats (données non montrées).

Les cellules CD4TN OT-II ont donc une avidité pour le Soi plus faible que les cellules AND.

Enfin, de manière similaire à notre modèle de conversion in vitro, les cellules CD4 TN AND

converties in vivo voient leur capacité à se différencier en iTreg augmentée (Figure 34, résultats préliminaires à confirmer).

4. Perspectives

Les résultats que nous avons obtenus concernant les voies moléculaires induites par le Tonic Signaling soulèvent plusieurs questions.

 Quelle est la dynamique des flux calciques reçus par les CD4 TN lors du Tonic

Signaling ?

Les variations de [Ca2+] intracellulaire, en plus d’être étroitement régulées via de nombreuses

pompes calciques, sont dépendantes de l’intensité et de la durée des flux calciques perçus par la cellule. Les voies moléculaires qui en résulte dépendent également de ces flux (Dolmetsch et

al., 1997, 1998). Ainsi, l’analyse de la dynamique des flux calciques au cours du Tonic Signaling pourrait apporter des précisions sur les voies induites par celui-ci. Cependant les techniques courantes utilisées pour mesurer les flux calciques in vitro, avec les colorants

calciques, ne sont pas adaptées aux observations in vivo. Récemment deux équipes ont mis au

point des outils innovant pour pallier ce problème. Ils ont généré des souris transgéniques capables d’exprimer un senseur du calcium couplé à une protéine fluorescente, qui est inductible par la doxycycline (Le Borgne et al., 2016) ou exprimé spécifiquement dans les cellules T CD4+ (Dong et al., 2017). Nous pourrions adapter ces outils à notre modèle de

conversion in vivo afin d’imager en temps réelle, et durant les 8 jours nécessaires à la

conversion, les flux calciques induits par le Tonic Signaling au niveau cellulaire.

 Quelles sont les voies moléculaires qui résultent du Tonic Signaling ?

Une première approche serait de réaliser une analyse phosphoprotéomique des cellules CD4 TN

AND transférées en souris C57BL/6 à jour 1 afin de connaître l’état d’activation des différentes

voies moléculaires. Hatano et al. ont récemment réalisé ce type d’analyse sur des cellules T

stimulées en présence d’CD3 ou de ionomycine +/- CsA (Hatano et al., 2016). La comparaison

avec ces données nous informerait sur l’effet de la composante calcique, dépendante ou non de

la calcineurine, dans le Tonic Signaling. De plus nous pourrions étudier plus précisément la limite du seuil qu’il existe entre le Tonic Signaling reçu par les lymphocytes T en périphérie, qui induit un signal TCR sans activation, et le signal TCR qui conduit à leur activation.

Une seconde approche serait d’analyser et comparer l’expression génique des cellules CD4 TN

Ly-6C- et Ly-6C+ cultivées sous diverses conditions. Pour cela nous avons récemment obtenu

le transcriptome de ces sous populations de CD4 TNcultivées en présence d’Iδ-7 avec ou sans

TG et +/- l’inhibiteur de la calcineurine, la CsA. δa condition contrôle avec l’Iδ-7 seulement

va nous permettre également d’étudier l’effet d’une absence d’interaction avec le complexe

pCεHII. Nous pourrons analyser l’effet d’une augmentation progressive de calcium

intracellulaire grâce à la thapsigargine. Enfin la condition avec la cyclosporine A nous permettra de connaître les gènes dépendant de la calcineurine, donc dépendant en grande partie de NFAT. Une première analyse nous a permis de confirmer nos résultats précédents sur la variation de

Ly-6C et d’autres marqueurs qui sont influencés par le calcium et sont calcineurine dépendant.

De plus nous avons identifié cinq clusters de gènes, dont la variation d’expression est similaire

entre les différentes conditions de cultures. Des analyses supplémentaires nous permettront d’approfondir nos connaissances sur les voies moléculaires induites par le Tonic Signaling.

cellules CD4 TN CD5Low. δ’ajout d’Iδ-2 lors de la polarisation en iTreg pourrait ainsi avoir un

effet bénéfique plus important sur les cellules CD5Low que les cellules CD5Hi. Enfin, lors la

différenciation en iTreg nous utilisons une gamme de concentrations de TGF 1 plus étalée, ce

qui nous permet d’identifier les différences plus précisément. δ’analyse transcriptomique des

lymphocytes T CD4+ naïfs montre également une certaine similitude entre les cellules Ly-6C-

et CD5Hi. Elles partagent une partie de leur signature (figure 27), ce qui est en accord avec leur

sensibilité commune aux signaux de différenciation en cellules régulatrices induites. δ’analyse

GSEA révèle aussi que la composante NFAT semble intervenir dans la régulation d’expression

génique des lymphocytes T les plus auto-réactifs Ly-6C- ou CD5Hi. Cela est en accord avec nos

résultats de l’article, où l’expression de CD5 à la surface des cellules CD4 TN Ly-6C+ est

augmenté par la TG et bloqué par l’ajout d’un inhibiteur de la calcineurine.