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Deuxième éducation thymique : la sélection négative

La sélection négative, aussi appelée délétion clonale, dépend de l’auto-réactivité des

lymphocytes T et de leur affinité pour le Soi à travers l’interaction TCR-pCMH. Les thymocytes

SP issus de la sélection positive sont tous capables de reconnaître le Soi, mais possèdent une affinité variable pour celui-ci. Ainsi, cette étape permet de tester cette affinité et d’éliminer les cellules exprimant un TCR avec une trop forte affinité pour le Soi. En effet des lymphocytes T

fortement auto-réactifs sont susceptibles de déclencher des maladies auto-immunes et s’avèrent

néfastes pour l’organisme. Ils sont donc sont éliminés au cours de cette sélection par apoptose.

Les autres cellules possédant une affinité suffisante pour le complexe pCMH pourront terminer leur développement et rejoindre la périphérie (figure 8).

Figure 8 : Sélection thymique en fonction du signal TCR perçue par la cellule.

Dans la médulla cette sélection est assurée par les cellules épithéliales médullaires thymiques (mTECs) et les cellules dendritiques. Ces cellules présentent, via une molécule du CMH, des

antigènes du Soi qui sont également exprimés dans les tissus en périphérie. δ’expression et la

présentation de ces antigènes tissulaires périphériques, ou TRA (Tissue Restricted Antigens),

permettent d’induire une tolérance (Derbinski et al., 2001). Le facteur de transcription AIRE

(AutoImmune REgulator) exprimé dans les mTECs contrôle l’expression d’environ 40% de ces TRAs (St-Pierre et al., 2015). De plus il régule aussi le développement et la fonction des mTECs

comme leur maturation (Nishikawa et al., 2014) ou l’expression de XCδ1 qui permet

l’accumulation de DCs dans la médulla (Lei et al., 2011). AIRE est donc indispensable pour induire une bonne tolérance. En effet, les souris déficientes pour Aire présentent une diminution d’expression de nombreux TRAs ainsi qu’un phénotype auto-immun, comme la production d’auto-anticorps et une infiltration de cellules inflammatoires dans plusieurs tissus (Anderson, 2002; Hubert et al., 2009). De plus chez l’homme la mutation de ce gène entraîne le

développement de l’APECED (Autoimmune PolyEndocrinopathy Candidosis Ectodermal Distrophy), une maladie auto-immune multi-organe. Les patients présentent, dans la plupart des cas, une candidose au niveau de la peau et des muqueuses, des endocrinopathies auto-immune comme l’hypoparathyroïdie ou l’insuffisance surrénale, mais aussi des anomalies dentaires et une dystrophie ectodermique. Chaque patient possède également un répertoire unique de réactivité d’auto-anticorps (Capalbo et al., 2012; Meyer et al., 2016; Nagamine et al., 1997).

Ces symptômes suggèrent qu’une déficience en Aire entraîne une sélection anormale des

lymphocytes T dans le thymus, qui vont ainsi réagir au Soi en périphérie, ainsi qu’une perte de

la tolérance des cellules B induite par les cellules T.

D’autres cellules participent à la sélection négative en présentant des TRAs qu’elles ont capté, ce sont les cellules dendritiques. Plusieurs types de DCs colonisent le thymus : les DCs plasmacytoïdes (pDC) et les DCs conventionnelles (cDC) issue de la périphérie ou du thymus (Bonasio et al., 2006; Donskoy and Goldschneider, 2003; Li et al., 2009). Le rôle des pDCs

dans cette sélection négative n’est pas encore totalement établi. Cependant certaines études

montrent qu’elles sont capables de capter des antigènes en périphérie et de les transporter dans

le thymus de manière dépendante du CCR9 (Hadeiba et al., 2012). De plus les pDCs CCR9+

semblent promouvoir la différenciation des lymphocytes T CD4 naïfs en cellule régulatrice à la périphérie (Hadeiba et al., 2008). Cette sous population de pDC pourrait ainsi jouer un rôle dans la tolérance après leur recrutement dans le thymus. Les cDCs issues du thymus, qui résident dans la médulla, présentent à leur surface des antigènes capturés dans le microenvironnement thymique. En revanche, les cDCs migratrices issues de la périphérie, qui peuvent se localiser dans la médulla et le cortex, présentent essentiellement des antigènes captés à la périphérie ou véhiculés par le sang (Klein et al., 2014). La présence des cDCs au niveau du cortex suggère que la sélection négative n’est pas restreinte à la médulla. En effet, des études montres qu’une délétion clonale des thymocytes au stade DN se produit dans le cortex (Daley et al., 2013a). Cette sélection négative étant principalement contrôlée par les DCs corticales (McCaughtry et al., 2008).

Enfin la présence de cellules B dans le thymus a également été démontrée. Comparées aux cellules B conventionnelles retrouvées en périphérie, les cellules B thymiques expriment plus de CMHII et de molécules co-stimulatrices (Perera et al., 2013). Une partie de ces cellules expriment également le facteur de transcription AIRE (Yamano et al., 2015). Les cellules B thymiques semblent donc aptes à induire une tolérance. En effet, de récentes études ont montré

l’implication des cellules B dans la génération de cellules T régulatrices (Treg) dans le thymus (Walters et al., 2014).

Ainsi plusieurs populations cellulaires participent à l’éducation des lymphocytes T au cours de

la différenciation thymique (figure 9). Cela permet de générer des lymphocytes T naïfs matures possédant une affinité suffisante pour le Soi, les plus auto-réactifs étant éliminés. Un fort signal TCR conduit généralement à la sélection négative. Cependant, sous certaines conditions ce signal conduit au développement de lignées de lymphocytes T non conventionnelles (Stritesky et al., 2012). Cette autre voie est appelée sélection agoniste.

Figure 9: Les cellules stromales au cours du développement thymique des lymphocytes T. Dans le cortex les cellules épithéliales corticales thymiques (cTEC) assurent le développement des lymphocytes T. Ce sont les partenaires des LTs durant la sélection positive. On retrouve également des cellules dendritiques conventionnelles (cDC) migratrices qui ont un rôle dans la sélection négative des thymocytes double négatif (DN). Une fois passé au stade simple positif (SP) les thymocytes migrent vers la médulla pour passer l’étape de sélection négative avant de se diriger dans la périphérie. Cette sélection négative à plusieurs actrices : les cellules épithéliales médullaires thymiques (mTEC), les DCs plasmacytoïdes (pDC), les DCs conventionnelles résidantes ou migratrices ainsi que les cellules B. Issue de (Klein et al., 2014).