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doxorubicine et leurs applications

2. Validation in cellulo de la cible Ku80 par immunohistochimie

Ces expériences ont été conduites par la plateforme de criblage phénotypique à haut débit de l’IGBMC.

Nous avons voulu confirmer les résultats obtenus lors des pulldown avec la sonde MR-0142 par des expériences de co-localisation visualisées par immunofluorescence. L’objectif est de valider la localisation de Ku80 au niveau des cassures double brins induites par l’exposition des cellules à la doxorubicine. La protéine 53BP1 (p53 binding protein) a été utilisée comme marqueur des cassures double brins. De nombreuses études ont montré que cette protéine est rapidement recrutée au niveau des cassures d’ADN double brins et induit le recrutement des protéines de la machinerie de réparation de l’ADN au niveau du site de coupure (Panier and Boulton) .

Le principe de cette technique est d’exposer les cellules à la doxorubicine pendant un temps donné, afin de générer des cassures double brins. Dans un deuxième temps l’excès de doxorubicine est éliminé par incubation des cellules dans du milieu sans inhibiteur et la réparation de l’ADN a lieu pendant un temps défini par l’expérimentateur. Les cellules sont ensuite fixées et marquées avec un anticorps primaire dirigé contre les cibles d’intérêt, Ku80 et 53BP1, puis les anticorps primaires sont reconnus par des anticorps secondaires avec un fluorophore différent (mCherry et GFP dans notre cas). Les cellules ainsi marquées sont visualisées au microscope à fluorescence où l’on cherche à détecter des foci de réparation de l’ADN dans les noyaux coloré au DAPI. Si les foci correspondant aux deux fluorescences sont co-localisés, ils apparaissent (jaune/orangée dans notre cas) lorsque l’on superpose les images prises séparément sur les deux marqueurs.

Le premier essai en immunohistochimie a été réalisé dans la continuité des expériences de pulldown sur la lignée cellulaire RS4, 11. Un premier travail d’optimisation a été réalisé sur le temps d’exposition à la doxorubicine et de réparation des cellules avant l’immunofluorescence. Cependant la fluorescence pour 53BP1 et Ku80 est apparue diffuse dans le noyau (Figure 86). Britton et al. ont publié en 2013 une étude de l’optimisation des immunofluorescences des cassures d’ADN double brins par visualisation des protéines 53BP1 et Ku80 connues pour être recrutées sur les cassures double brins (Britton et al.). Les optimisations ultérieures se sont inspirées de cette publication. Dans un premier temps, l’utilisation du protocole publié n’était pas adaptée aux cellules RS4, 11 qui sont trop fragilisées lors du processus pour un immunomarquarge. De plus les cellules RS4, 11

185 poussent en suspension ce qui pose un problème technique pour les marquages fluorescents. Cette contrainte technique n’a pu être corrigée malgré de nombreux tests d’adhésion.

Finalement au vu des nombreuses difficultés techniques rencontrées, la lignée RS4, 11 a été remplacée par la lignée U2OS (ostéosarcome humain) également utilisée dans la publication de Britton et al. Elle est un modèle cellulaire éprouvé pour les études de cassures double brins (Britton et al.). Après quelques optimisations portant notamment sur le choix des anticorps primaires de Ku80, des résultats interprétables ont été obtenus. Après exposition à la doxorubicine et immunomarquage fluorescent, plusieurs foci de réparation par noyau sont visibles dans les cellules marquées contre 53BP1 (Figure 87). Ces mêmes cellules présentent également plusieurs foci de réparation lors de la visualisation du marquage contre Ku80 (Figure 87). La superposition des images met en évidence une co-localisation des foci associés aux deux marquages.

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Figure 86 Co-localisation par immunomarquage dans les cellules RS4, 11. Les noyaux sont localisés grâce à la coloration au DAPI. Le marquage de Ku80 est diffus dans le noyau et quelques foci de 53BP1 sont visibles.

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Figure 87 Immunofluorescence anti 53BP1 et Ku80 de cellules U2OS exposées 24 heures à 100 µM de doxorubicine avec un temps de réparation de 30 minutes.

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Figure 88 Immunofluorescence anti 53BP1 et Ku80 sur cellules U2OS exposées 24 heures à 200 µM de doxorubicine avec un temps de réparation de 30 minutes.

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Figure 89 Contrôle immunofluorescence contre Ku80 et 53BP1 sans exposition à la doxorubicine.

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Ces expériences in cellulo nous ont permis de mettre en évidence que la protéine Ku80 est recrutée au niveau des cassures double brins générées lors de l’exposition de cellule U2OS à la doxorubicine. Ce résultat concorde avec de nombreuses études qui montrent que la réparation des cassures double brins générées par la doxorubicine est majoritairement prise en charge par NHEJ au sein duquel le complexe Ku tient une place centrale (Ayene et al., 2005; Caldecott et al., 1990; Critchlow et al., 1997; Fell and Schild-Poulter, 2015; Grawunder et al., 1997; Jeggo et al., 1989; Mimori and Hardin, 1986).

Lors des expériences sur cellules, nous constatons donc que Ku80 est effectivement recruté sur les cassures double brins induites par la doxorubicine. Ces expériences de co-localisation de Ku80 avec les coupures ne permettent pas de comprendre si la doxorubicine est libérée avant la fixation du complexe Ku, ou si la doxorubicine est encore fixée au site de coupure lorsque le complexe Ku se fixe. Cela dit, Schonn et al. ont suggéré que la distorsion de l’ADN induite par la doxorubicine rend ce type de cassure difficilement réparable. Il est donc possible que le complexe Ku soit séquestré en présence de doxorubicine sur ces cassures chimio-induites, empêchant transitoirement leur réparation (Schonn et al., 2010).

Cette expérience sur cellules en culture est complémentaire des expériences de pulldown réalisées avec la sonde dérivée de la doxorubicine sur les extraits cellulaires. En effet, n’ayant pas exclu que le complexe Ku encore fixé à de l’ADN ait été capturé par la sonde doxorubicine dans les extraits, tous ces éléments semblent indiquer que la doxorubicine piège le complexe Ku sur l’ADN.

Cependant ces expériences ne nous indiquent pas comment le complexe Ku / ADN / doxorubicine est organisé d’un point de vue structural et quelles sont les interactions en jeu.

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