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l’oscillateur à transfert de spin

2.3.4 Vérification du modèle par simulation

Afin de vérifier le modèle présenté dans la partie précédente, et de tester l’implé-mentation de notre algorithme, nous avons effectué des simulations qui intègrent les équations de Langevin (2.28). Comme pour l’étude précédente à T = 0, on utilise la constante d’amortissement Γ0 comme échelle caractéristique de temps et on transforme les équations de mouvement dans le repère tournant défini par la fréquence linéaire, c(t) → c(t) exp(−iω0t).

Les trajectoires simulées pour 10 réalisations du bruit thermique sont montrées sur la figure 2.17 pour n = 1. L’évolution de la super-criticité est montrée sur les parties Fig. 2.17(a)-(c). Dans le régime sous-critique (ζ = 0.8), le point fixe est c = 0 et le bruit thermique provoque des fluctuations autour de ce point [Fig. 2.17(a)]. Lorsque le seuil d’auto-oscillation est franchi, le cycle limite apparaît et les fluctuations se localisent autour de ce cycle [Fig. 2.17(b)], comme illustrées schématiquement sur la figure 2.16. Au fur et à mesure que ζ croit, le rôle des fluctuations devient moins

0 50 100 150 200 250 t -0.4 -0.2 0 0.2 0.4 R e ( c)

Figure 2.18: Variation de c en présence des fluctuations thermiques. Chaque courbe montre une trajectoire pour une réalisations du bruit thermique à q = 10−3 et à

ζ = 1.2.

important, ce qui se traduit par une décroissance de la largeur de l’anneau autour du cycle limite qui représente la zone parcourue par l’oscillateur [Fig. 2.17(c)]. En effet, la température (ou l’amplitude du bruit) influe sur la largeur de cet anneau, ce qui est montré sur les parties Fig. 2.17(d)-(f) où q varie de plusieurs ordres de grandeurs.

Les variations temporelles de la variable c sont montrées sur la figure 2.18. Malgré une condition initiale identique pour chaque trajectoire, nous voyons que les fluc-tuations thermiques engendrent une dérive importante du signal après plusieurs périodes d’oscillations. Nous rappelons ici que la période représente uniquement la partie non linéaire de la fréquence, car les équations de mouvement sont résolus dans le repère tournant. Néanmoins, on peut constater qu’une perte de cohérence se produit après t ≈ 100, c’est-à-dire 100 fois le temps caractéristique de la relaxation linéaire. Cette dérive comprend les fluctuations d’amplitude et de phase et elle est à l’origine de la largeur de raie dans le domaine fréquentiel.

Nous cherchons maintenant à obtenir une estimation de la densité spectrale de puissance à partir des traces temporelles obtenues par l’intégration stochastique. En théorie, la densité spectrale de puissance peut être obtenue directement à partir de la carrée de la transformation de Fourier de la série temporelle, comme montrée sur la figure 2.18. En pratique, la série temporelle contient un nombre fini de points et donc sa transformation de Fourier discrète peut introduire des artefacts. Un problème majeur est la fuite spectrale, qui provient du fait que la durée finie du signal net contient pas de nombre entier de période d’oscillation (pour une fréquence donnée). Même pour une sinusoïde parfaite, dont le spectre est décrit par une ligne fréquentielle, une analyse réalisée sur une durée finie pourrait donner une dispersion de la puissance dans les raies adjacentes, car le signal n’est pas périodique dans l’intervalle de temps.

(a) (b) (c) (d) (e) 0 0 1 4096 FFT Hann t 0 w 0.5

Figure 2.19:Méthode de Welch pour l’estimation de la densité spectrale de puissance. (a) Une trace longue sur 223points (avec une précision de ∆t = 0.125) est obtenue par intégration stochastique de l’équation 2.28. Le trait en bleu représente une fenêtre glissante de 215 = 32768points. (b) Fenêtrage glissant avec un recouvrement de 75%. (c) Application du fenêtrage de Hann sur la trace temporelle. (d) Transformé de Fourier de chaque fenêtre. (e) L’estimation de la densité spectrale de puissance est obtenue en moyennant sur tous les segments.

Afin de minimiser de tels effets, nous utilisons la méthode de Welch qui repose sur le fenêtrage de la série temporelle [57]. Cette méthode est schématisée sur la figure 2.19. Nous utilisons comme exemple une simulation effectuée sur une longue durée, où nous intégrons l’équation 2.28 jusqu’à t = 220− ∆t avec une précision de ∆t = 0.125; cela donne un total de 223= 8 388 608points dans la série temporelle [Fig. 2.19(a)]. La méthode consiste à découper cette série temporelle en plusieurs sous-blocs qui se chevauchent partiellement ; pour cet exemple, nous avons choisi une fenêtre de 215= 32 768points avec un recouvrement de 75% [Fig. 2.19(b)]. Un fenêtrage avec la fonction de Hann est appliqué à chaque segment, qui représente une pondération temporelle du signal dans le segment [Fig. 2.19(c)]. Puisque les valeurs du signal sont rendues nulles aux extrémités du segment, nous pouvons atténuer le phénomène de Gibbs et rendre le signal périodique sur chaque segment. Nous

0 0.2 0.4 0.6 10-2 10-1 100 101 102 PSD (a rb . u n it s) 0.8 1 1.2 1.4 1.6 1.8 2 0 0.1 0.2 0.3 0.4 0.5 0.8 1 1.2 1.4 1.6 1.8 2 10-3 10-2 10-1 2 1.4 1.6 1.8 1.2 1 (b) (c) (a)

Figure 2.20: Vérification du modele stochastique de l’oscillateur à transfert de spin par simulation. n = 1 et q = 0.001. (a) Densité spectrale de puissance (PSD) à plusieurs valeurs de super-criticité, ζ. (b) Fréquence de l’oscillation, ωc, en fonction de super-criticité. La courbe en vert représente l’équation 2.3.2. (c) Largeur de raie, ∆ω, en fonction de super-criticité. La courbe en bleu pointillé représente la limite linéaire et la courbe en rouge pointillé représente la limite de forte super-criticité.

effectuons ensuite une transformation de Fourier de chaque segment, en gardant les carrées des modules des coefficients, ce qui représente la densité spectrale de puissance [Fig. 2.19(d)]. La moyenne des spectres obtenus pour chaque segment donne une estimation de la densité spectrale de puissance de la série temporelle originale [Fig. 2.19(e)]. Pour cette dernière étape, nous pouvons constater qu’il est possible de minimiser le phénomène de fuite spectrale, qui est bien présent dans le spectre de chaque segment mais qui n’est plus visible dans le spectre moyenné. Cette méthode est importante car elle nous permet d’avoir une meilleure estimation des grandeurs comme la largeur de raie spectrale.

En nous reposant sur cette méthode d’analyse, nous étudions la variation de la densité spectrale de puissance en fonction de la super-criticité de l’oscillateur stochastique. Dans le premier exemple, nous avons choisi une faible non linéarité de fréquence (n = 1)à une température de q = 0.001. Les résultats de la simulation sont présentés sur la figure 2.20. En dessous du courant critique, la raie principale est centrée à ω − ω0 = 0 et elle représente les oscillations amorties du mode linéaire. Ceci est équivalent au scénario dessiné sur la figure 2.3(a), où le seul point fixe est l’origine c = 0et tout écart de cette position engendre des trajectoires en spiral vers cette position d’équilibre. Lorsque le seuil d’auto-oscillation est franchi, nous pouvons constater l’apparition d’un pic à ω − ω0 > 0, qui croît en amplitude et se décale en

0 2 4 6 8 10-2 10-1 100 101 102 PSD (a rb . u n it s) 0.8 1 1.2 1.4 1.6 1.8 2 0 2 4 6 8 0.8 1 1.2 1.4 1.6 1.8 2 0 0.1 0.2 0.3 0.4 (b) (c) (a) 2 1.4 1.6 1.8 1

Figure 2.21:Vérification du modele stochastique de l’oscillateur à transfert de spin par simulation. n = 10 et q = 0.001. (a) Densité spectrale de puissance (PSD) à plusieurs valeurs de super-criticité, ζ. (b) Fréquence de l’oscillation, ωc, en fonction de super-criticité. La courbe en vert représente l’équation 2.3.2. (c) Largeur de raie, ∆ω, en fonction de super-criticité. La courbe en bleu pointillé représente la limite linéaire et la courbe en rouge pointillé représente la limite de forte super-criticité.

fréquence au fur et à mesure que ζ augmente. Nous avons ajusté ces spectres par une fonction lorentzienne :

S(ω) = 1 π

A∆ω

(ω − ωc)2+ (∆ω/2)2, (2.45)

où ωc désigne la fréquence centralte, ∆ω la largeur à mi-hauteur et A l’ampli-tude. Fig. 2.20(b) montre la variation de la fréquence centrale en fonction de la super-criticité, où nous pouvons constater un excellent accord entre les résultats de simulations et la variation prédite par l’équation (2.39). L’accord pour la largeur spectrale est bon également dans les cas limites ζ  1 et ζ  1, comme montré sur la figure 2.20(c).

L’accord est moins bon lorsque la nonlinéarité est plus élevée, comme montré sur la figure 2.21. Bien que l’allure des raies spectrales soit qualitativement la même, l’évolution de la fréquence centrale se décale davantage vers le bleu à cause de la nonlinéarité en fréquence. Cette tendance est illustrée sur la figure 2.21(b). La théorie analytique prédit bien son évolution autour du courant critique (ζ = 1), mais l’accord s’empire au fur et à mesure que la super-criticité augmente. Nous supposons que ce phénomène est lié à une augmentation de l’amplitude moyenne de l’oscillateur qui est induite par le bruit. Néanmoins, nous reproduisons l’augmentation de la

0.1 0.2 0.3 0 1 0.1 0.2 0.3 0 1 0.1 0.2 0.3 0 1 0.1 0.2 0.3 0 1

PSD

(a

rb

.

u

n

it

s)

(a) (c) (b) (d)

Figure 2.22: Densité spectrale de puissance de c dans le repère tournant à température finie avec ζ = 1.25, G = 2, n = 1 et pour plusieurs valeurs du retard : (a) τ = 1, (b)

τ = 60, (c) τ = 106 et (d) τ = 200. Le niveau du bruit q est proportionnel à la température.

largeur spectrale au dessus du courant critique, un effet qui a été prédit par une théorie stochastique et observé expérimentalement [Fig. 2.21(c)]. Les cas limites de la variation de la largeur spectrale s’accordent bien avec la théorie.

2.4 Effets de rétroaction sur les propriétés

stochastiques

Les effets de la rétroaction sur les spectres sont illustrés sur la figure 2.22. Comme pour des faibles valeurs du retard, la densité spectrale consiste en une raie principale, dont la largeur augmente avec le niveau du bruit thermique, en accord avec la théorie stochastique présentée auparavant. Dès leur apparition, les bandes latérales associées à la modulation sont également élargies par le bruit thermique, ce qui est attendu car la modulation provient de l’oscillateur lui-même. Au fur et à mesure que le retard augmente, nous observons davantage de bandes latérales comme pour le cas à température nulle. En revanche, nous constatons que la structure fine de la modulation est désormais « lissée » par le bruit, ce qui est relié à la perte de cohérence engendrée par les fluctuations thermiques. Ce phénomène est davantage visible pour des retards importants, où il devient impossible de distinguer les bandes de modulation de l’élargissement de la raie principale. Notons que la rétroaction induit un forçage qui est forcément bruité, ce qui peut induire un élargissement supplémentaire par rapport à l’action du bruit thermique.

max PSD min (a) 0 50 100 150 200 0 0.1 0.2 0.3 0.4 (b) 0 50 100 150 200 0 0.1 0.2 0.3 0.4 (c) 0 50 100 150 200 0 0.1 0.2 0.3 0.4 9 0 0.4 11 49 0 0.4 51 99 0 0.4 101 149 0 0.4 151

Figure 2.23:Cartographie de la densité spectrale de puissance en fonction du retard à plusieurs températures : (a) q = 10−5, (b) q = 10−4, (c) q = 10−3. Les inserts dans la partie (c) montrent une vue détaille sur quatre intervalles de τ .

La figure 2.23 montre des cartographies de la variation de la densité spectrale de puissance en fonction du retard à plusieurs températures. Comme pour la figure 2.23, la couleur indique l’intensité des raies spectrales. La variation globale reste qualitati-vement inchangée par rapport au cas à température nulle. L’effet principal du bruit est d’élargir la raie principale, ainsi que les bandes latérales, ce qui conduit à la perte de la structure fine qui est présente sur la figure 2.15. Nous pouvons constater cet effet en comparant les cartographies sur la figure 2.23, où le bruit thermique varie d’un ordre de grandeur entre chaque partie. La perte de cohérence conduisant à la perte de structure fine se voit également par la valeur du retard à partir de laquelle les bandes latérales se confondent avec un élargissement de la raie principale. Les inserts de la figure 2.23(c) montrent une vue détaillée de cette perte de cohérence,

où nous pouvons constater que la modulation de la fréquence centrale reste visible jusqu’aux retards de τ ≈ 100.

Pour de faibles valeurs du retard la raie spectrale est bien décrite par un profil lorentzien. Ceci est cohérent avec la faible nonlinéarité pour laquelle les effets d’élar-gissement inhomogène, qui provient du couplage entre les fluctuations d’amplitude et les fluctuations de phase, peuvent être négligés. Comme dans la partie précé-dente, nous avons donc ajusté les raies par la fonction (2.45). La variation de ces paramètres ajustés avec le retard est montrée sur la figure 2.24. Comme pour la fréquence, l’amplitude de l’oscillateur est périodique avec le retard. La variation de la fréquence est illustrée sur la figure 2.24(b), où nous pouvons observer une évolution d’un comportement sinusoïdale vers une forme en dents de scie. Ceci suggère que l’oscillateur subit d’abord une simple modulation sinusoïdale de son amplitude, qui se traduit par une variation de la fréquence à cause de la nonlinéarité, et davantage vers un phénomène d’entrainement lorsque le retard augmente. Cette différence est également visible dans les inserts de la figure 2.23(c). Nous notons également que les variations de fréquence sont centrées autour de sa valeur en absence de rétroaction.

Les variations de la largeur de raie sont montrées sur la figure 2.24(c). Contrairement aux comportements de l’amplitude et de la fréquence, la variation de la largeur spectrale avec le retard est asymétrique par rapport à la valeur obtenue en absence de rétroaction. En outre, les minima de ∆ω apparaissent lorsque la fréquence approche sa valeur en absence de rétroaction. Ceci est indiqué par la ligne rouge verticale en pointillé sur la figure. Cette diminution de la largeur spectrale est analogue au phénomène de verrouillage de phase par un forçage externe. On note qu’un phénomène similaire a été prédit et observé pour un oscillateur à vortex dans une boucle de rétroaction [48, 58]. Lorsque ωcdévie de sa valeur sans rétroaction, nous observons une augmentation nette de ∆ω qui peut atteindre un facteur de trois. Les régions en jaune claire indiquent des intervalles entre deux maxima successifs de ∆ω, qui correspondent à deux extrema de ωc. Ceci indique que la perte de cohérence induite par la rétroaction est la plus importante lorsque la fréquence dévie la plus de sa valeur sans rétroaction.

Enfin, nous présentons l’effet du gain sur les propriétés spectrales à faible retard sur la figure 2.25. Nous observons que le comportement globale ne varie guère avec le gain, c’est-à-dire, les oscillations de l’amplitude, de la fréquence et de largeur spectrale en fonction du retard sont présentes pour la gamme de G étudiée. L’effet principal du gain est de contrôler l’amplitude de ces variations.

5 10 15 20 0.16 0.18 0.2 0.22 0.24 5 10 15 20 6 7 8 9 10 5 10 15 20 0 0.01 0.02 0.03 0.04 (a) (c) (b)

Figure 2.24:Variation des propriétés de la raie principale en fonction du retard τ pour

n = 1, G = 2 et q = 0.001. (a) Amplitude, (b) fréquence, (c) largeur à mi hauteur. Les barres d’erreur indiquent l’incertitude sur les paramètres ajustés. La ligne bleue horizontale indique la valeur en absence de rétroaction. La ligne rouge verticale en pointillé indique un minimum dans la largeur spectrale. La région en jaune claire indique une intervalle de retard entre deux maxima successifs de la largeur spectrale.

10 11 12 13 14 15 0 0.5 1 1.5 2 (a) 9.40 5.65 10 11 12 13 14 15 0 0.5 1 1.5 2 (b) 0.23 0.17 10 11 12 13 14 15 0 0.5 1 1.5 2 (c) 0.025 0

Figure 2.25: Cartographie montrant la variation des propriétés spectrales en fonction du retard τ et du gain G pour des faibles valeurs du retard (n = 1, q = 0.001). (a) Amplitude, (b) fréquence, (c) largeur à mi hauteur. Le code couleur représente la déviation de la valeur obtenue en absence de rétroaction.

2.5 Conclusion

En résumé, nous avons étudié les effets de rétroaction sur l’oscillateur de transfert de spin en se basant sur un modèle non linéaire développé à partir d’une théorie d’ondes de spin. La rétroaction est introduite comme une modulation du courant de commande, où nous supposons que le signal de l’oscillateur est proportionnel à la partie réelle de la variable d’oscillateur, c. Nous nous sommes focalisés sur la dynamique d’amplitude et de phase de l’oscillateur et la manière dont elle varie en fonction du retard et du gain de la rétroaction.

À température nulle, la rétroaction résulte en une forte modulation du signal de l’oscillateur qui donne lieu a un grand nombre de bandes latérales dans la densité spectrale de puissance. Le nombre de ces bandes augmente avec le retard. Pour des faibles retards, la rétroaction engendre une oscillation de la fréquence centrale qui est liée a la modulation de l’amplitude, qui se traduit par une modulation de fréquence grâce à la nonlinéarité n. Des bandes latérales apparaissent lorsque le retard augmente et leur densité deviennent tellement élevée aux retards importants que le spectre ressemble à un élargissement inhomogène de la raie principale.

À température finie, le bruit thermique engendre un élargissement de la raie spectrale et des bandes latérales. La diminution du temps de cohérence limite le nombre de bandes latérales visibles dans la densité spectrale de puissance, où nous pouvons constater une absence de la structure fine qui est présente à température nulle. Pour des faibles retards, l’ajustement de la raie principale par un profil lorentzien montre des oscillations de la largeur spectrale en fonction du retard, qui est associé à un phénomène de verrouillage par l’oscillateur lui même. Ces résultats suggèrent qu’il est possible d’améliorer la densité spectrale par rétroaction dans une certaine gamme de paramètres.

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