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Utilisation d’oligonucléotides antisens induisant une redirection du site de clivage comme

3. DISCUSSION ET PERSPECTIVES

3.2. R EDIRECTION DU SITE DE CLIVAGE EN PRESENCE D ’ OLIGONUCLEOTIDES ANTISENS

3.2.3. Utilisation d’oligonucléotides antisens induisant une redirection du site de clivage comme

Ce phénomène de polyadénylation alternatif est impliqué dans le développement de plusieurs pathologies humaines (Danckwardt et al., 2008; Elkon et al., 2013; Jenal et al., 2012; Uitte de Willige et al., 2007). Ces phénomènes délétères peuvent être induits pas des mutations dans les séquences régulatrices canoniques (béta-thalassémie, syndrome IPEX, maladie de Fabry, thromboses) mais également par des mutations dans les facteurs protéiques (OPMD, cancers) impliqués dans la maturation en 3’ des ARNm.

Ainsi, dans le cadre du développement de stratégies thérapeutiques pour ces pathologies caractérisées par la production d’ARNm utilisant un signal de polyadénylation alternatif au lieu du signal de polyadénylation canonique, cette capacité de redirection du site de clivage en présence d’un AO peut être exploitée afin de forcer les différents facteurs protéiques à utiliser le signal de polyadénylation canonique.

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3.3. Inhibition des différents variants ARNm de DUX4 : lesquels et

quand ?

3.3.1. Quelles conséquences de cette stratégie thérapeutique sur

l’expression des différentes isoformes de DUX4 ?

Trois isoformes de DUX4 sont produites dans les cellules somatiques à partir du chromosome 4qA : deux variants longs DUX4-fl (1 et 2) composés des exons 1-2-3 et qui diffèrent par l’épissage ou non de l’intron 1, et un variant court DUX4-s, qui se caractérise par l’utilisation d’un site d’épissage cryptique situé dans l’exon 1, donnant un ARNm exon 1s-2-3 (Figure 57). Les deux variants DUX4-fl codent pour une protéine DUX4-fl fonctionnelle. Cependant, il n’est pas exclu que les isoformes DUX4-fl codent pour des protéines différentes. En effet, trois codons initiateurs MKG, MAL et MQG, pourraient permettre la traduction de trois protéines DUX4 (Snider et al., 2009). La plupart des ARNm DUX4 commencent en amont du codon initiateur MAL. Néanmoins, l’isolation de la ou des protéines DUX4 représente un défi technique majeur du fait des faibles expressions protéiques dans les conditions physiologiques. Pour le moment, aucune étude n’a encore pu isoler de potentielles isoformes protéiques DUX4 dans des cellules FSHD, et encore moins déterminer leur rôle. A l’inverse

DUX4-s est traduit en une protéine DUX4-s présentant le domaine de fixation à l’ADN mais

pas le domaine de transactivation nécessaire à l’activité du facteur de transcription (Bosnakovski et al., 2008; Dixit et al., 2007; Kawamura-Saito et al., 2006; Snider et al., 2009, 2010). L’expression de DUX4-s n’est pas toxique pour la cellule au contraire de l’expression de DUX4-fl (Geng et al., 2011).

Ces trois variants ARNm de DUX4 possèdent l’exon 3. Ainsi, l’utilisation d’oligonucléotides antisens ciblant les séquences impliquées dans le mécanisme de polyadénylation de l’ARNm

DUX4, toutes localisées dans l’exon 3 ou en aval de celui-ci, pourrait réduire l’expression de

ces trois isoformes de DUX4. A ce jour, il n’existe aucune information quant aux rôles des différentes isoformes protéiques DUX4 ou des variants ARNm DUX4. Il est donc difficile d’établir si une stratégie thérapeutique inhibant l’expression de DUX4 doit nécessairement réduire l’expression de toutes ces isoformes.

193 FIGURE 57. Récapitulatif des différents variants de l’ARNm DUX4 transcrits dans les cellules somatiques ou les cellules germinales. Dans les cellules somatiques, trois ARNm DUX4 peuvent être générés à partir de la dernière unité D4Z4. Tous les ARNm contiennent l’exon 2 et l’exon 3. L’ARNm

DUX4-s résulte d’un épissage cryptique démarrant dans l’exon 1. Il est exprimé dans les myoblastes

contrôles et dans les tissus somatiques. Les deux ARNm DUX4-fl contiennent l’exon 1 en entier. Ces deux ARNm DUX4-fl diffèrent par la présence ou non de l’intron 1. Cependant, ces deux variants sont

tous deux associés à la FSHD et sont exprimés dans les myotubes d’haplotype 4qA. Dans les cellules germinales, deux autres ARNm DUX4 sont transcrits. Ces ARNm sont composés de l’exon 1-2-6-7 ou

1-2-4-5-6-7. L’exon 3 est toujours exclu. Le signal de polyadénylation utilisé ici est localisé dans l’exon 7.

La séquence codante du rétrotansposon DUX4 est conservée depuis plus de 100 millions d’années chez les Catarrhini (primates de l’ancien monde) et les Afrotheria (Clapp et al., 2007). D’un point de vue évolutif, une pression de sélection empêche probablement la divergence de la séquence codante DUX4 dans ces clades en raison d’une potentielle fonction physiologique de DUX4. L’expression de DUX4 dans des cellules musculaires est toxique. Cette toxicité pourrait être médiée par l’activation, sur une longue période de temps, par DUX4, de l’expression de centaines de gènes impliqués dans diverses fonctions biologiques (Geng et al., 2012; Snider et al., 2010). Par ailleurs, DUX4 s’exprime dans les cellules de la lignée germinale testiculaire et dans des iPS (Snider et al., 2010). Le profil d’expression de DUX4 dans la lignée germinale est similaire à celui observé pour d’autres protéines à deux homéodomaines dont la fonction n’est pas encore connue (Booth and Holland, 2007; Wu et al., 2014). L’ensemble de ces observations suggère que DUX4 pourrait avoir un rôle au cours du développement précoce mais aussi dans les fonctions biologiques de la reproduction. Chez l’adulte, DUX4 est ensuite réprimé uniquement dans les cellules somatiques dont celles du muscle squelettique. L’absence d’une répression de DUX4 chez les patients FSHD conduit à l’activation transcriptionnelle entre autres de gènes de la lignée germinale et du

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développement précoce, et dont l’expression pourrait être toxique pour la cellule somatique (Geng et al., 2012; Snider et al., 2010). Bien que ceci reste une hypothèse à confirmer, si

DUX4, ou certains variants DUX4, sont nécessaires au développement précoce ou aux

fonctions biologiques de reproduction, le traitement thérapeutique ne doit pas inhiber l’expression de DUX4 au cours du développement ou dans la lignée germinale.

Or, dans les cellules germinales, deux autres isoformes faisant intervenir les exons 4-5-6-7 sont exprimées à partir des chromosomes 4 et 10 (Figure 57). Une isoforme correspond à l’association des exons 1-2-6-7 tandis que la seconde est composée des exons 1-2-4-5-6-7 (Geng et al., 2012; Snider et al., 2010). L’exon 3 est toujours exclu. Le signal de polyadénylation utilisé ici est localisé dans l’exon 7. Notre stratégie thérapeutique, ciblant exclusivement des éléments de l’exon 3, ne permet donc pas d’induire une diminution de l’expression de ces deux isoformes spécifiques aux cellules germinales et donc de potentiellement interférer avec les fonctions biologiques de la reproduction.

3.3.2. Quelle expression spatio-temporelle pour les différents