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1. INTRODUCTION GENERALE

1.3. D ESCRIPTION GENETIQUE DE LA FSHD

1.3.6. Gènes candidats pour la FSHD

1.3.6.4. FAT1

FAT1 (FAT Atypical cadherin 1), proposé également comme gène candidat de la FSHD, est

localisé à 3,5Mb en amont de la première répétition D4Z4 sur le chromosome 4q (Dunne et al., 1995; Masny et al., 2010). Composé de 28 exons répartis sur une région de 139kb, FAT1 est transcrit en un long ARNm de 15kb et traduit en une protéine transmembranaire de 4 594 acides aminés pour un poids moléculaire de 506kDa (Dunne et al., 1995). Trois autres gènes FAT existent : FAT2, FAT3 et FAT4 (Dunne et al., 1995; Hoeng et al., 2004; Katoh and Katoh, 2006; Mitsui et al., 2002; Nakayama et al., 2002). Les protéines FAT appartiennent à la famille des super-cadhérines en raison de leur grand nombre de répétitions cadhérines (Nollet et al., 2000). La protocadherine FAT1 possède dans sa région extracellulaire 34 répétitions cadhérines associées à cinq motifs EGF (Epidermal Growth Factor) et un domaine laminine A-G localisé entre le 1er et le 2nd motif EGF (Dunne et al., 1995; Mahoney et al., 1991; Ponassi et al., 1999) (Figure 19). Ces motifs permettent des interactions cellule-cellule dépendantes du calcium et l’adhésion cellulaire (Davis, 1990; Dunne et al., 1995; Shapiro et al., 1995; Takeichi, 1995; Tepass et al., 2000). Une unique région transmembranaire est suivie d’un domaine cytoplasmique contenant des domaines PDZ et deux sites de fixation des

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caténines qui permettent une liaison au cytosquelette (Cox et al., 2000; Dunne et al., 1995; Kemler, 1993; Ponassi et al., 1999; Provost and Rimm, 1999) (Figure 19).

FIGURE 19. Structure de la protéine FAT1. La protocadherine FAT1 possède dans sa région extracellulaire, 34 répétitions cadhérines (rond gris clair) associées à cinq motifs EGF (Epidermal

Growth Factor) (rectangle gris) et un domaine laminine A-G (triangle noir). Une unique région

transmembranaire (rectangle blanc) est suivie d’un domaine cytoplasmique (rectangle gris foncé) contenant des domaines PDZ et deux sites de fixation des β-caténines, qui permettent une liaison au

cytosquelette.

FAT1 est une protéine modulatrice de la polarité planaire. Elle joue un rôle dans la morphogenèse tissulaire de par son implication dans la mobilité cellulaire, dans la polarité cellulaire, dans la voie de signalisation Hippo (contrôle de la croissance des organes au cours du développement) ou encore dans le contact cellule-cellule (Bennett and Harvey, 2006; Cho et al., 2006; Harumoto et al., 2010; Hou and Sibinga, 2009; Moeller et al., 2004; Simons and Mlodzik, 2008; Skouloudaki et al., 2009; Sopko and McNeill, 2009; Tanoue and Takeichi, 2004). La majorité de ces fonctions implique une régulation de la dynamique de l’actine ou des microtubules (Tanoue and Takeichi, 2004). FAT1 est exprimé au cours du développement dans les muscles et les tissus épithéliaux, dont la peau, le rein, les poumons ou encore le neuro-épithelium (Caruso et al., 2013; Cox et al., 2000; Ponassi et al., 1999; Smith et al., 2007). La protéine FAT1 est également exprimée dans les fibres musculaires différenciées, enrichie au niveau de l’interface entre les tubules-T et les unités contractiles, à proximité du récepteur dihydropyridine, un canal calcium voltage-dépendant (Caruso et al., 2013). Des études ont montré que le niveau d’expression de FAT1 varie au cours du temps. Très élevée au début du stade fœtale, son expression diminue d’environ 90% à la fin du développement (Mariot et al., 2015).

Une délétion constitutive de FAT1 chez la souris entraine une mortalité néonatale, confirmant l’importance de cette protéine au cours du développement (Ciani et al., 2003). Plus précisément, chez des souris homozygotes Fat1-/-, la léthalité est probablement due à la présence de podocytes, cellules épithéliales au niveau du glomérule rénal, anormaux. Ce défaut de développement du rein peut être associé à une holoprosencéphalie (défaut de

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développement du cerveau antérieur) et une microphthalmie-anophthalmie (défaut de développement des yeux) (Ciani et al., 2003). Un autre modèle murin existe : des souris homozygotes hypomorphiques Fat1 avec une délétion d’une partie des répétitions cadhérines, du domaine lamine A-G et des motifs EFG. Ce modèle est un peu moins sévère et présente un taux de mortalité de l’ordre de 50% dans les trois mois suivant la naissance (Caruso et al., 2013). De manière intéressante, ces souris avec des anomalies développementales rénales, récapitulent le phénotype musculaire et non musculaire de la FSHD, y compris l’asymétrie et la rétinopathie. FAT1 a donc probablement un rôle dans le développement de la FSHD (Caruso et al., 2013). L’expression d’une protéine hypomorphique Fat1 module la polarité migratoire des myoblastes au stade fœtus chez la souris. Aux stades postnataux, les souris présentent alors une réduction sélective de la masse musculaire, au niveau des muscles des épaules et de la face. Aux stades plus avancés, une dystrophie musculaire étendue est observée (Caruso et al., 2013).

Par ailleurs, des études montrent un niveau d’expression de FAT1 plus faible chez les patients FSHD comparés à des individus contrôles (Caruso et al., 2013; Mariot et al., 2015). En effet, le niveau de FAT1 est réduit de cinq fois dans le deltoïde de certains patients FSHD comparé à des individus contrôles (Caruso et al., 2013). A cela s’ajoute une variabilité intra-individuelle. FAT1 est exprimé, dans des fœtus contrôles, plus faiblement dans les muscles précocement atteints comme le deltoïde versus les muscles tardivement atteints comme le quadriceps (Mariot et al., 2015). Les faibles niveaux de FAT1 peuvent être corrélés au niveau de sévérité de la pathologie (Caruso et al., 2013; Mariot et al., 2015). L’ensemble de ces résultats suggèrent un rôle de FAT1 dans la FSHD. Cette hypothèse est appuyée par la découverte d’un polymorphisme délétère dans une potentielle séquence régulatrice intronique dans le locus FAT1 et qui ségrége avec la FSHD (Caruso et al., 2013). De plus, récemment, un groupe de patients FSHD ne présentant pas de contraction des répétitions D4Z4 mais possédant des protéines FAT1 mutées a été décrit (Puppo et al., 2015).

Il est donc proposé que des individus avec un plus faible niveau de FAT1 comparé au niveau moyen quantifié dans la population générale, soient plus susceptibles de développer la FSHD (Mariot et al., 2015). Les muscles dans lesquels FAT1 est faiblement exprimé, pourraient être plus sensibles à une dérégulation des gènes. Cependant, plusieurs zones d’ombres demeurent. Notamment la raison pour laquelle un groupe musculaire précis est affecté par la perte de

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Par ailleurs, la souris hypomorphique Fat1 présente des atteintes du rein, ce qui n’est pas observé chez les patients FSHD (Caruso et al., 2013). Deux hypothèses sont envisageables (Caruso et al., 2013; Reynolds et al., 2010) :

1) l’effet de l’absence de FAT1 au niveau du rein chez les patients FSHD est contrecarré par une autre protéine ;

2) les patients avec une perte sévère de la fonction de FAT1 et des dysfonctionnements rénaux décèdent probablement avant l’apparition des symptômes musculaires, et ne sont ainsi pas classifiés FSHD.

La FSHD ne peut pas être uniquement considérée comme une pathologie due à une mutation dans FAT1, mais FAT1 semble tout de même jouer un rôle dans le développement de cette pathologie.