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Chapitre 3 – Discussion

3.2 Utilisation des services et des ressources

Nos résultats démontrent que l’utilisation de certains services et ressources était significativement plus faible chez les participants du Gr-PHT que chez ceux du Gr-CTL au congé de l’urgence et lors des suivis à 1 et 3 mois. Au congé de l’urgence, les participants du Gr-CTL se sont vu prescrire environ 40% plus fréquemment un test d’imagerie diagnostique que ce qui était recommandé par le physiothérapeute. Ces résultats sont conformes à ceux que l’on retrouve dans la littérature. 78,80 Selon les guides de pratique

clinique les plus récents, l’imagerie ne serait pas indiquée pour plusieurs patients présentant des troubles NMSQ, à moins qu’une pathologie grave ne soit suspectée ou que l’imagerie soit susceptible de modifier la conduite thérapeutique. 48,49 Selon Baker et al., environ 40%

des demandes d’imagerie faites à l’urgence pour des patients présentant un trouble NMSQ non traumatique ne seraient pas conformes aux recommandations des lignes directrices. 18

En outre, Décary et al. ont observé un degré de concordance élevé entre le diagnostic émis par le physiothérapeute à l’aide de son examen clinique et le diagnostic posé par le médecin à l’aide d’un examen clinique et de tests d’imagerie pour certains troubles communs musculosquelettiques au genou. L’examen réalisé par le physiothérapeute s’est également révélé d’une grande validité diagnostique. 111 Ainsi, il est possible que le recours moins

fréquent à l’utilisation de tests d’imagerie par le physiothérapeute comparativement aux urgentologues dans ce projet soient en partie dû à la réalisation d’un examen physique mieux ciblé par le physiothérapeute et à un respect accru des guides de pratique clinique. À un et trois mois, aucune différence n’a été constatée entre les groupes quant à l’utilisation d’examens d’imagerie et aucun effet indésirable n’a été signalé dans les deux groupes, ce qui laisse entendre que la prise en charge en accès direct réalisée par le physiothérapeute à l’urgence était sécuritaire et au moins équivalente à celle des urgentologues.

Au congé de l’urgence, les participants du Gr-PHT se sont vu recommander en moyenne 25% moins souvent de la médication d’ordonnance, mais environ 60% plus fréquemment de la médication en vente libre que ceux du Gr-CTL. Lors des suivis, les participants du Gr- PHT avaient consommé 40% moins de médication d’ordonnance à un mois, y compris des opioïdes, et 25% moins de médication en vente libre à trois mois par rapport au Gr-CTL. Toujours selon des guides de pratique clinique récents 48,49, la médication en vente libre et

d’ordonnance tels que l’acétaminophène, les anti-inflammatoires ou les opioïdes ne devraient pas être recommandés aux patients présentant un trouble NMSQ, car ils ont tendance à être associés à des résultats moins favorables. Les prestataires de soins devraient aussi privilégier des modalités non-pharmacologiques telles que les conseils pour rester actif, l’éducation individualisée du patient et des exercices thérapeutiques supervisés, ce qui semble avoir été privilégié par le physiothérapeute. 48,49 En ce qui concerne le taux

de réadmission à l’urgence, aucun participant du Gr-PHT n’est retourné à l’urgence au cours des trois premiers mois suivant la prise en charge initiale par le physiothérapeute. En comparaison, 21% des participants vus par un urgentologue étaient retournés à l’urgence à un mois. À notre connaissance, le présent projet est le premier qui compare les effets d’une prise en charge par un physiothérapeute en accès direct à l’urgence à la prise en charge usuelle sur le taux de réadmission à l’urgence pour des personnes présentant un trouble NMSQ. Ces différences entre les taux de réadmission à l’urgence selon le professionnel qui a assuré la prise en charge initiale pourraient s’expliquer en partie par la différence de formation et d’approches utilisées par chaque prestataire de soins. Comme mentionné ci-

haut, les lignes directrices actuelles recommandent de fournir de l’éducation ou des informations pour encourager l’auto-gestion et pour informer et rassurer les patients présentant un trouble NMSQ sur leur état de santé. 48 Les patients devraient également se

voir proposer une éducation individualisée propre à leurs besoins. 49 Par exemple,

l’éducation sur la neuroscience de la douleur pour les personnes présentant un trouble NMSQ serait associée à une diminution de l’intensité de la douleur, une amélioration des connaissances des patients sur la douleur, une amélioration du fonctionnement et du mouvement et une minimisation de l’utilisation des soins de santé. 120 Par ailleurs, il a été

démontré que les physiothérapeutes ont un niveau de connaissances plus élevé dans la gestion des troubles NMSQ que les étudiants en médecine, les internes, les résidents et tous les médecins spécialistes à l’exception des orthopédistes. 25 Les participants du Gr-

PHT ont peut-être alors reçu des interventions leur octroyant le sentiment d’être mieux équipés et habilités à gérer leur condition de santé, ce qui peut avoir été rassurant et avoir ainsi réduit le besoin perçu d’utiliser des services et de ressources supplémentaires au fil du temps. Comme la prise en charge à l’urgence était une intervention unique et ponctuelle, l’auto prise en charge privilégiée par le physiothérapeute pourrait avoir été un élément déterminant vis-à-vis l’utilisation des services et ressources par les participants du Gr-PHT.

3.3

Temps d’attente et durée de séjour à l’urgence

Tout d’abord, bien qu’on dénote un temps attendu avant prise en charge significativement plus bas pour le Gr-PHT que pour le Gr-CTL, cette différence est due en grande partie au fait que le physiothérapeute était entièrement dédié à la prise en charge de patients du projet. Il était donc pratiquement toujours immédiatement disponible lorsqu’un participant était recruté dans l’étude, contribuant ainsi au plus court temps d’attente avant la prise en charge des participants du Gr-PHT. Aucune différence significative n’a été observée entre les deux groupes quant à la durée de séjour à l’urgence. Ce constat, qui peut sembler étonnant à première vue, peut s’expliquer en bonne partie par le fait que tous les participants du Gr-PHT devaient voir un urgentologue afin de recevoir leur congé de l’urgence même s’ils avaient été pris en charge au départ par le physiothérapeute. En ayant permis au physiothérapeute d’agir à titre de professionnel autonome en accès direct à l’urgence, c’est- à-dire en lui ayant permis de prescrire les tests d’imagerie indiqués, le cas échéant, et la médication nécessaire au congé, et en ayant permis au patient de quitter l’urgence sans avoir vu l’urgentologue, la durée de séjour des participants du Gr-PHT n’aurait été que d’environ 1h30 minutes, et non de 6h39 minutes comme ce fut le cas. En plus de

possiblement contribuer à une diminution significative de l’engorgement à l’urgence, cette pratique autonome pourrait permettre une meilleure atteinte des cibles ministérielles au Québec de durée de séjour à l’urgence qui sont de quatre heures pour la clientèle ambulatoire et de 12h pour la clientèle sur civière sans hospitalisation. 125 Une telle pratique

autonome du physiothérapeute pourrait également se répercuter sur le temps attendu et la durée de séjour d’autres clientèles consultant à l’urgence, les urgentologues ayant plus de temps clinique pour les patients autres que ceux présentant un trouble NMSQ. Malgré tout, les résultats de notre groupe de discussion laissent entendre que le modèle d’offre de services utilisé durant le projet a permis de favoriser une plus grande interdisciplinarité et une meilleure connaissance des rôles et responsabilités du physiothérapeute de la part des urgentologues.

3.4 Niveau de satisfaction des patients

Selon les résultats de la présente étude, la prise en charge en accès direct par un physiothérapeute est associée à une satisfaction plus élevée comparativement à la prise en charge usuelle par un urgentologue. Ces résultats sont cohérents avec ceux retrouvés dans la littérature. 78,83,116,117,123,124,126,127 Le niveau de satisfaction exprimé en faveur de la prise en

charge par un physiothérapeute pourrait s’expliquer en partie par une meilleure explication faite aux participants par le physiothérapeute concernant leur condition ainsi que du pronostic de récupération attendue. 126 Il est également possible qu’il ait pu passer plus de

temps avec certains participants au besoin, augmentant ainsi la satisfaction face aux soins reçus. 116

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