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Utilisation d’un système laser à visée industrielle

PARTIE II – E XPERIENCES ET RESULTATS

4.2 Utilisation d’un système laser à visée industrielle

4.2.1 Le laser à fibre dopée Ytterbium

La source laser utilisée pour mener à bien les expérimentations est le modèle Tangerine développé par la société Amplitude Systèmes (Bordeaux, France). C’est un laser impulsionnel à fibre dopée à l’Ytterbium et pompé par diode. Il délivre des impulsions allant de 300 femtosecondes à 10 picosecondes, dans le proche infrarouge (IR) à la longueur d’onde centrale de 1030 nm. La puissance moyenne maximale en sortie de source est de 30 W, ce qui donne une énergie maximale par impulsion de 150 µJ, à des taux de répétition pouvant atteindre les 2 MHz.

Figure 4.1: Modèle Tangerine, système laser à fibre dopée Ytterbium, développé par Amplitude Systèmes.

4.2.1.1 Principe de génération des impulsions laser ultra-brèves

Pour générer les impulsions laser ultra-courtes, le laser Tangerine utilise une technologie à fibre d’amplification à dérive de fréquence (Fiber Chirped Pulse Amplification, FCPA). Cette technique consiste à étirer temporellement les impulsions (étireur), puis à augmenter l’énergie de ces impulsions (milieu amplificateur) pour ensuite compresser les impulsions et leur rendre leur durée initiale (compresseur) [Zaouter et al. 2013 ; Zhou et al. 2007]. L’amplification d’impulsions

ultra-courtes à des puissances-crêtes élevées nécessite la conception de fibre et amplificateur innovants. L’architecture du système laser pour la génération de ces impulsions femtosecondes est celle illustrée par la figure suivante [Lopez et al. 2013] .

Figure 4.2: Architecture du système laser basé sur l’amplification à dérive de fréquence [Lopez et al.

2013].

Etape 1 : L’oscillateur

Dans une cavité laser, seuls certains modes longitudinaux peuvent coexister. Le nombre total de modes présents dans la cavité est limité par la largeur spectrale du gain du milieu amplificateur. Dans le cas du laser Tangerine, c’est une fibre dopée Ytterbium. Si ces modes ne sont pas liés par une relation de phase, ils oscillent indépendamment les uns des autres : l’intensité laser émise est alors continue.Lorsque ces modes sont mis en phase, on est alors en régime impulsionnel. C’est ce que l’on appelle le verrouillage de modes.Pour le réaliser, on place dans la cavité un miroir semi-conducteur absorbant saturable (SESAM = SEmiconductor Saturable Absorber Mirror) qui permet de moduler le gain. Tous les modes longitudinaux sont alors synchronisés en phase dans la cavité résonante, pour générer un train d’impulsions.

L’oscillateur permet de générer des trains d’impulsions stables, à des taux de répétition compris entre 10 MHz et 10 GHz. Pour le laser Tangerine, la fréquence des impulsions en sortie de l’oscillateur est de 41,5 MHz.

Etape 2 : Le Pulse Picker

Ces trains d’impulsions arrivent ensuite sur un premier modulateur acousto-optique (Acousto-Optic Modulator, AOM), appelé le Pulse Picker (PP). Cet interrupteur optique contrôlé électriquement permet de prélever des impulsions en sortie de l’oscillateur pour que l’amplification ne porte que sur ces impulsions sélectionnées. Il permet également de diminuer le taux de répétition des impulsions en sortie de l’oscillateur.

Etape 3 : L’étireur

Les impulsions sélectionnées passent par l’étireur, dont le rôle est d’allonger ces impulsions. Pour étirer temporellement une impulsion, on réalise une séparation spatiale des composantes spectrales de l’impulsion, grâce à un réseau de diffraction. Cela est possible parce que l’étireur crée une différence de vitesse de groupe positive. Cela se traduit par une augmentation de la durée d’impulsion, et donc une diminution de la puissance-crête.

Etape 4 : L’amplificateur à dérive de fréquence

Le milieu amplificateur est une fibre à cristaux photoniques, dont le cœur en silicium est dopé aux ions Ytterbium (Yb3+). La fibre est pompée par des diodes laser InGaAs à 976 nm. Dans ce type de fibre à cristaux photoniques, les effets non-linéaires sont moins gênants que dans des fibres classiques.

La bande d’absorption de l’Ytterbium est comprise entre 900 et 980 nm, pour une bande spectrale d’amplification de 6 THz. Les propriétés thermo-optiques de ce matériau en font un milieu de gain de choix pour la génération de puissance moyenne élevée. La largeur de bande de gain de la fibre est d’environ 40 nm, ce qui permet alors la génération et l’amplification d’impulsions de durée inférieure à 400 fs. Ce milieu amplificateur possède une très bonne efficacité de conversion, permettant ainsi d’éviter des architectures complexes d’amplificateur, comme les amplificateurs multi-passages ou régénératifs [Lopez et al. 2013].

Etape 5 : Le compresseur

Les impulsions amplifiées passent par un compresseur, formé d’un système de réseaux parallèles et d’un dièdre (miroir en coin). Le premier réseau diffracte les différentes composantes spectrales de l’impulsion en direction du second réseau. Le compresseur permet de créer une dispersion de vitesse de groupe négative : on a donc un étalement spatial des longueurs d’onde. Cet étalement est compensé par un dièdre qui réfléchit et décale en hauteur les impulsions vers le second, qui annule la dispersion des longueurs d’onde.

Grâce au compresseur, il est possible d’ajuster la durée des impulsions pour le laser Tangerine sur une plage de 300 femtosecondes à 10 picosecondes.

Etape 6 : Le modulateur externe

En sortie de ce compresseur se trouve un deuxième AOM, appelé modulateur externe, qui permet de moduler la puissance laser en sortie de source. Il sert également à réduire la fréquence des impulsions, qui est égale à un diviseur du taux de répétition donné par le Pulse Picker. Ce modulateur externe n’a aucune influence sur l’amplification et la compression des impulsions.

4.2.1.2 Module de doublage-triplage de fréquence

En sortie de la source laser se trouve un module de doublage-triplage de fréquence, développé par Amplitude Systèmes. Le faisceau IR, sortant de la tête amplificatrice, arrive sur une lame demi-onde en entrée du module. En fonction de la rotation de cette lame d’demi-onde, le faisceau passe dans

le module sans être dévié (cas n°1), ou il est renvoyé vers les lignes de doublage et triplage de fréquence.

Pour réaliser le doublage de fréquence, le faisceau laser IR passe à travers un cristal non-linéaire, pour ressortir à la longueur d’onde de 515 nm. Il est ensuite réfléchi par des miroirs dichroïques, qui ne laissent passer que le faisceau à la longueur d’onde voulue. En fin de ligne, le faisceau doublé passe par des hublots à haute tenue de flux (cas n°2).

Pour générer le troisième harmonique, il faut tout d’abord réaliser un doublage de fréquence, puis combiner le faisceau doublé avec le faisceau non doublé, pour générer la longueur d’onde de 343 nm. Le faisceau IR passe donc à travers 2 cristaux non-linéaires, pour être à nouveau réfléchi par des miroirs dichroïques et traverser le hublot (cas n°3).

Figure 4.3: (a) Architecture du module de doublage-triplage de fréquence associé au laser Tangerine, et (b) différents chemins optiques du faisceau au sein du module.

4.2.2 La plateforme de micro-usinage

Le système laser Tangerine présenté précédemment est intégré dans la plateforme de micro-usinage MUSE 3D (Micro-Usinage Système Expérimental 3D), développée par la société belge Optec.

Figure 4.4: Plateforme de micro-usinage MUSE 3D, développée par la société Optec.

La figure ci-dessous montre la plateforme expérimentale MUSE 3D, comprenant les deux sources laser présentes (le laser femtoseconde Tangerine et le laser nanoseconde G4-SPI), le module de doublage et triplage de fréquence, ainsi que les différents éléments optiques de contrôle du faisceau et le système de focalisation.

Figure 4.5: Schéma simplifié de la plateforme de micro-usinage MUSE 3D, comprenant les deux sources laser à fibre nanoseconde (SPI) et femtoseconde (Tangerine), le module de doublage-triplage de fréquence

(SHG/THG), un atténuateur (AT), des miroirs (M), un expanseur de faisceau (BET), la tête-scanner et la lentille de focalisation f-θ, et l’échantillon posé sur des platines de translation.

Le laser à fibre nanoseconde développé par la société SPI émet des impulsions à la longueur d’onde de 1064 nm, de durée ajustable entre 15 et 220 ns, à des fréquences allant de 1 kHz à 1 MHz et pour une puissance moyenne de 20 W. Le faisceau a un coefficient de qualité M² < 1,3 [URL SPI

Laser]. La longueur d’onde de ce laser étant proche de celle du laser Tangerine, il est possible

d’utiliser le même chemin optique IR pour les deux sources. La présence de cette seconde source permet une utilisation polyvalente de la plateforme, pour des travaux où la précision du laser femtoseconde n’est pas nécessaire.

Il est également possible avec cette machine de micro-usinage de travailler à différentes longueurs d’onde, grâce au module de doublage-triplage de fréquence.

Cette plateforme intègre également différents éléments optiques de contrôle le long du chemin optique du faisceau. Ce chemin optique fait environ 2,5 mètres. Tout d’abord, le faisceau arrive sur un atténuateur, constitué d’une lame demi-onde et d’un cube polariseur séparateur, qui sert à moduler sa puissance. En sortie de l’atténuateur, il est possible de placer différentes lames d’onde (quart d’onde ou demi-onde) pour modifier l’état de polarisation, initialement rectiligne, du faisceau. Ensuite, le faisceau laser arrive dans un expanseur de faisceau (Beam Expander Telescope, BET), composé d’un doublet de lentilles motorisées, qui permet de modifier aisément son diamètre d’un facteur de grandissement .

Le faisceau laser est focalisé sur l’échantillon grâce à différents systèmes de focalisation : une tête-scanner associée à une lentille F-Theta de 100 mm de focale, un objectif de microscope de focale 10 mm, une tête de découpe ou encore une tête de trépanation.

Le système de focalisation que nous avons utilisé principalement est la tête-scanner, car elle donne une très grande liberté de trajectoires réalisables, pour une résolution maximale de 2,5 µm et un champ de travail de 30x30 mm². Elle est constituée de miroirs galvanométriques, qui permettent d’atteindre des vitesses de balayage pouvant aller jusqu’à 1875 mm/s avec une lentille F-Theta de 100 mm de focale. Ce type de lentille permet de maintenir constant le diamètre de faisceau focalisé sur la cible.

L’échantillon est placé sur des platines de translation X-Y à moteurs linéaires offrant une course utile de 300 mm. Ces platines ont une précision de l’ordre du micromètre, et peuvent atteindre des vitesses allant jusqu’à 700 mm/s.

La machine de micro-usinage MUSE 3D, intégrant le laser à fibre à forte puissance et haut taux de répétition, permet d’allier une rapidité d’usinage importante à une énergie laser disponible élevée.