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DU BON USAGE D’UN PHARMAKON LITTÉRAIRE DANS LE P RÉCIS DES SŒURS DE SAINTE-

Représentations du genre romanesque dans le discours savant et institutionnel

DU BON USAGE D’UN PHARMAKON LITTÉRAIRE DANS LE P RÉCIS DES SŒURS DE SAINTE-

ANNE

Les travaux de Camille Roy, à titre d’historien de la littérature, de critique littéraire et de professeur, ont profondément marqué le développement de l’enseignement de la littérature. Roy n’est toutefois pas le seul à produire du matériel pédagogique en littérature. Au tournant du XXe siècle, la Procure de la Mission des Sœurs de Sainte-Anne publie le

Précis d’histoire des littératures française, canadienne-française, étrangères et anciennes

(1925). On sait désormais que ce manuel scolaire est l’œuvre d’une seule personne, Sœur Marie-Élise (née Évelyna Thibodeau) qui, après avoir complété le cours supérieur et le cours gradué du couvent de Lachine, s’engage activement dans l’enseignement à partir de 1888 jusqu’à obtenir le poste de préfète générale des études en 1914291. Le Précis a ceci de particulier qu’il s’adresse à un public spécifique : les jeunes filles dont l’éducation est donnée par les Sœurs de Sainte-Anne. Cette mission éducative particulière teinte la représentation du genre romanesque dans le manuel scolaire de la congrégation. C’est sous le signe du danger que le roman est placé : il faut inculquer aux jeunes filles la méfiance à l’égard de ce genre qui pourrait les mener à la perdition. Cette mise en garde quant au genre romanesque colore de manière appréciable la façon dont Sœur Marie-Élise décrit le roman; ses définitions ont valeur de sanctions dogmatiques et sont alors d’une grande limpidité, comme on le verra.

À l’instar du manuel de Camille Roy, le Précis des Sœurs de Sainte-Anne connaît plusieurs éditions. La première, en 1900292, se concentre uniquement sur la littérature française, et est suivie d’un appendice traitant de la littérature chrétienne grecque et latine. Le fait que ce premier ouvrage porte très spécifiquement sur la littérature française et ne fasse aucune place aux œuvres littéraires du Canada français est symptomatique de la difficulté de concevoir, encore en 1900, la littérature canadienne-française comme un sujet d’étude pertinent. Cette perspective change en 1925 : les textes du Précis d’histoire de

littérature française sont ensuite repris pour constituer une partie du Précis d’histoire des

291 Karine Cellard, Leçons de littérature, op. cit., p. 117.

292[Sœur Marie-Élise], Précis de l’histoire de la littérature française, suivi d’un appendice sur la littérature chrétienne grecque et latine, Montréal, Cadieux & Derome, 1900.

littératures française, canadienne-française, étrangères et anciennes293. En 1928, la section sur la littérature canadienne-française, revue pour y introduire les nouveaux auteurs, mais demeurant fondamentalement inchangée si ce n’est de ces ajouts, est ensuite publiée de manière autonome294, symbole de la nouvelle légitimité acquise par la littérature canadienne-française. Étant donné qu’il n’y a pas de différences majeures entre ces trois éditions, je me concentrerai ici sur l’édition de 1925, intéressante en particulier parce que le discours sur le roman canadien y côtoie des représentations du roman français, ce qui permet de le mettre en perspective.

Comme le nom de leur ouvrage l’indique, le Précis d’histoire des littératures

française, canadienne-française, étrangères et anciennes des Sœurs de Sainte-Anne

cherche à couvrir très largement le champ de la littérature et ne se restreint plus à la seule littérature française. Le volume s’ouvre sur la littérature française, suivie de celle du Canada, puis des littératures britannique, anglo-américaine, italienne, espagnole et allemande. La portion de l’ouvrage dédié aux littératures anciennes s’organise quant à elle davantage autour de la religion, on retrouve alors, dans cet ordre, les littératures, hébraïque, grecque païenne, latine païenne, grecque chrétienne et latine chrétienne. L’enchaînement des chapitres ne répond pas à une vision évolutive de la littérature; le Précis refuse d’ailleurs d’aborder les littératures en fonction d’une chronologie qui ferait que l’une découlerait de l’autre, mais repose d’abord sur l’appartenance nationale, puis sur la religion, deux caractéristiques qui influenceront sa compréhension du roman. La disposition des différents chapitres révèle toutefois quelque chose de la vision de la littérature canadienne. Absente de la première édition du Précis, la littérature canadienne- française est insérée en second dans l’édition de 1925, encadrée des littératures de ses deux métropoles, la littérature française et la littérature anglaise. Sans être le point d’intérêt principal, cette seconde position montre que la littérature canadienne-française occupe une place d’importance dans l’édition de 1925.

293 [Sœur Marie-Élise], Précis d’histoire des littératures française, canadienne-française, étrangères et

anciennes, Montréal, Procure de la Mission des Sœurs de Sainte-Anne, 1925. J’emploierai dorénavant le sigle PSSA pour référer à ce titre.

294[Sœur Marie-Élise], Précis d’histoire littéraire. Littérature canadienne-française, Montréal, Procure de la

La section sur la littérature française, pratiquement inchangée de la version de 1900, présente d’abord un historique repérant les différentes phases de la littérature française et ne discute que peu du genre romanesque. Le Précis d’histoire des littératures française,

canadienne-française, étrangères et anciennes se positionne par la suite d’entrée de jeu

très clairement contre le roman français du XIXe siècle :

[C]e genre de composition a été et est encore aujourd’hui l’auxiliaire le plus recherché des passions malsaines et le plus grand agent de destruction morale chez la jeunesse. Généralement, sous le rapport littéraire, ces productions ne valent guère mieux que sous celui des mœurs et de la vertu. On compte par milliers ceux qui ont écrit dans ce genre; il faut savoir choisir parmi ces fruits aux brillantes couleurs, mais souvent empoisonnés295

Le Précis s’adresse spécifiquement aux jeunes filles et il faut lire dans ce passage un avertissement à celles qui seraient tentées de se laisser guider dans le choix de leur lecture par leur appétit pour le genre romanesque. L’image de la jeune fille dévorant les romans n’est pas une nouveauté; il s’est transposé depuis la France du XVIIIe siècle296 jusqu’au Canada. La jeune Canadienne française a elle aussi, dans l’imaginaire de l’époque, un goût prononcé pour le genre romanesque et y joue sa vertu : « Les jeunes filles, jalouses de conserver à leur intelligence toute sa claire vue, à leur cœur tout son calme, à leur piété toute son intensité et à leur conscience toute sa limpide tranquillité, devraient en faire la loi souveraine de leur conduite et occuper leurs loisirs à l’étude et aux lectures instructives ou édifiantes. » (PSSA, 165) Le but du Précis est donc spécifiquement de guider les jeunes lectrices pour leur permettre de faire la distinction entre les fruits nourriciers et les baies toxiques. Le trope du roman considéré comme un poison est évidemment accentué dans le

Précis par l’idéologie catholique, particulièrement prégnante.

La section sur le roman français se résume alors à une courte description tenant en un seul paragraphe sur les vices du roman, suivi d’une liste des « auteurs à proscrire sous le rapport de la morale » (PSSA, 160) dont les noms sont parfois accompagnés de courts commentaires expliquant le danger qui est associé à leur lecture297. À cette liste de romans

295 [Sœur Marie-Élise], Précis d’histoire des littératures française, canadienne-française, étrangères et anciennes, Montréal, Procure des Missions des Sœurs de Sainte-Anne, 1933, p. 160.

296 Voir notamment Sandrine Aragon, Des liseuses en péril : images de lectrices dans les textes de fiction (1656-1856), Paris, Honoré Champion, coll. « Les Dix Huitièmes siècles », 2003.

297 Lucie Delarue-Mardrus est ainsi décrite comme appartenant à cette « pléiade de femmes qui travaillent à

restaurer les lettres païennes » (PSSA, 161) alors que Guy de Maupassant est déclaré « mort fou le 6 juillet 1893 » (Ibid.). La liste des auteurs à l’Index qui paraît à la suite est écourtée, ne contenant que les auteurs

proscrits, le Précis oppose une liste d’auteurs recommandés dont la présentation reprend l’image du poison et appuie l’importance de la dimension morale des romans :

En présence d’un danger tel que celui des publications malsaines, plusieurs écrivains ont cherché le contrepoison du mal incurable qu’elles font chaque jour à la société et surtout à la jeunesse; tout en ne désirant que faire du bien, ils ont souvent produit des chefs-d’œuvre. (PSSA, 164)

Les romans sont porteurs d’une charge virale, la maladie s’est disséminée dans le corps social et attaque principalement la jeunesse : « [l]a liste des mauvais livres et interminable. Les romans contemporains se comptent par milliers et leur nombre augmente chaque jour. » (PSSA, 163) Les mauvais romanciers posent en quelque sorte un geste criminel en répandant un tel poison. L’antidote, pourtant, se présente sous la même forme : il existe de vaillants romanciers moraux qui proposent des œuvres romanesques saines. Il ne faudrait toutefois pas croire que le Précis admette la valeur morale du genre. En reprenant une citation de l’abbé L. Bethléem, contenant elle-même une citation de Mme de Staël, le Précis discrédite tous les romans, même les meilleurs : « “Je ne me dissimulerai pas, disait Mme de Staël, que les romans même les plus purs font du mal.” » Ce jugement est confirmé par la religion, le bon sens, l’expérience et les autorités les plus graves. » (PSSA, 165)

La valeur normative du Précis au sujet du roman français, particulièrement en ce qui a trait aux lectures de romans par les jeunes filles, dresse donc un portrait du roman qui met l’accent sur l’importance de sa dimension morale. On pourrait s’attendre à ce que le roman canadien soit présenté sous le même angle. Le Précis ne tente toutefois pas du tout de lier les romans français et canadiens et capitalise plutôt sur la spécificité des littératures nationales pour justifier la séparation des deux corpus : « La littérature d’un peuple, d’une période, est l’expression de la société, c’est-à-dire que les auteurs traduisent dans leurs œuvres les idées, les croyances, les doutes, les mœurs, les joies et les tristesses de leurs contemporains » (PSSA, 167). Dans ces circonstances, il n’est pas surprenant que le Précis préconise une littérature canadienne qui porte sur des sujets canadiens ou étrangers, mais « parée d’images et de sentiments canadiens-français. » (PSSA, 167)

certainement considérés comme les plus dangereux : Honoré de Balzac, Alexandre Dumas père, Victor Hugo, Eugène Sue, Voltaire et Émile Zola en particulier. De manière paradoxale, une longue notice est accordée à George Sand, autrice pourtant abhorrée et dont les romans sont décriés dans le Précis.

Une entreprise définitoire et dogmatique

Découpé en périodes, à l’instar du Manuel d’histoire de la littérature canadienne-

française de Roy, périodes elles-mêmes subdivisées en fonction des genres, le Précis prend

toutefois une certaine distance par rapport au corpus des romans dans la période de l’émergence du genre (1860-1900 selon la chronologie du Précis). La Fille du brigand (1844) d’Eugène L’Écuyer, Les Fiancés de 1812 (1844) de Joseph Doutre, Charles Guérin (1846) de Pierre-Joseph-Olivier Chauveau, La Terre paternelle (1846) de Patrice Lacombe et, en somme l’ensemble des romans publiés avant les Anciens Canadiens (1863) de Philippe Aubert de Gaspé père, considéré comme le véritable pivot de la constitution du roman au Canada, sont ainsi qualifiés de « primitifs canadiens », de « timides essais de romans [, car] la simplicité dans la relation des événements rapproche ces compositions de

l’histoire ou de la chronique » (PSSA, 221. Je souligne.). Le commentaire ici n’est pas

sans rappeler les propos d’Edmond Lareau qui, dans l’Histoire de la littérature canadienne, présentait en des termes identiques les romans canadiens. Le Précis n’hésite pas non plus à faire référence aux œuvres romanesques canadiennes comme à des esquisses de mœurs. Au contraire de Lareau toutefois, Sœur Marie-Élise ne lie pas directement la forme de l’esquisse à une diminution de la valeur de ces œuvres pour autant; La Terre paternelle est par exemple décrite comme « une véritable esquisse de mœurs canadiennes, qui n’a que le tort d’être trop courte. » (PSSA, 221. Je souligne.) Malgré tout, le genre romanesque est présenté, dans la foulée des affirmations de Camille Roy, « de tous les genres en prose, celui qui, chez nous, a moins bénéficié du renouveau littéraire. » (PSSA, 316)

Le Précis est toutefois l’un des premiers ouvrages à proposer une définition claire de la nouvelle, du conte, de la légende et de la chronique, genres différents entre eux, mais aussi en regard du genre romanesque (PSSA, 231). En ce sens, le Précis fait montre d’un début de systématisation du discours sur le roman. Sœur Marie-Élise tente en effet de proposer une définition précise du roman, bien moins impressionniste que celle de Lareau ou de Roy. On retrouve dans le Précis une section dont le titre « Définition et division » ne peut laisser place au doute quant à sa visée descriptive. L’autrice y pose le roman comme « une histoire fictive ou vraie dans le fond, mais imaginaire dans les circonstances, écrite en prose, où l’auteur cherche à exciter l’intérêt, soit par le développement des passions, soit par la peinture des mœurs, soit par la singularité des aventures. » (PSSA, 221)

Cette définition porte à la fois sur le contenu, la forme et la finalité du roman. Quoiqu’encore assez simple — la description de la forme ne repose que sur la notion d’écriture en prose —, elle commence à se détacher progressivement d’une vision unitaire et unifiée sur le roman, où presque seule l’esquisse de mœurs avait droit de cité. Le Précis contient en effet une liste de trois sous-genres, chacun associé à une visée particulière : « Suivant que le roman se propose d’instruire, ou d’amuser, ou de propager des idées, nous avons le roman historique ou scientifique, le roman d’aventures inventées dans le seul but de piquer la curiosité, de distraire, et le roman à thèse. » (PSSA, 221. Je souligne.)

S’éloignant ici un peu de la vision horatienne qui veut que la littérature doive simultanément instruire et divertir, le Précis propose plutôt des romans qui instruisent ou qui amusent. L’esquisse de mœurs est pour ainsi dire évacuée au profit de la terminologie proprement romanesque. Chaque sous-genre est exemplifié par au moins une œuvre : Une

de perdue, deux de trouvées de Georges Boucher de Boucherville représente le roman

d’aventures (l’œuvre est également qualifiée de roman de mœurs), les huit romans de Joseph Marmette, publiés entre 1867 et 1878, rendent compte du sous-genre historique et

Jean Rivard d’Antoine Gérin-Lajoie paru en 1874 est l’illustration du roman à thèse. Le Précis s’attarde sur ce sous-genre :

C’est là ce qu’on appelle un roman à thèse. L’auteur veut faire pénétrer une vérité dans les intelligences, il l’imprime, pour ainsi dire, à chaque page de son livre, dans le développement d’un fait qui se poursuit à travers un grand nombre de circonstances plus ou moins heureuses ou tragiques. Ces récits doivent amener la conviction dans l’âme des lecteurs et leur faire accepter les conclusions pratiques voulues par l’auteur. (PSSA, 226)

On sent bien que des trois sous-genres évoqués, c’est surtout le roman à thèse qui obtient la faveur de la rédactrice du Précis. L’Appel de la race (1922) de Lionel Groulx se trouve donc, selon le Précis, « [e]n tête de nos meilleurs romans – fond et forme » (PSSA, 316). La raison de cette appréciation de l’œuvre de Groulx repose explicitement sur le fait qu’il s’agit d’un roman à thèse : « Ce roman contient une doctrine : la survivance française au Canada par le nationalisme intégral. » (PSSA, 316) Dans le Précis, la fonction morale du roman, qui ne visait vraiment que les bonnes mœurs chez Lareau, se réalise le plus pleinement dans la morale catholique. Tout à fait en phase avec l’idéal terroiriste d’un nationalisme catholique reposant sur une glorification de la langue française, le Précis célèbre le « roman messianique » Le Centurion d’Adolphe Routhier où la fiction se mêle

« au récit évangélique et à l’histoire du temps où vécut le Messie » (PSSA, 316) et les auteurs qui, comme Camille Roy et Adélard Dugré, cumulent les fonctions d’ecclésiastiques et d’écrivains. Le roman La Campagne canadienne de ce dernier est décrit comme une œuvre qui est un « plaidoyer en faveur du sol natal. Elle contient des descriptions champêtres d’un art très vrai et des évocations de la vie paysanne d’un sain réalisme » (PSSA, 317). Ce « sain » réalisme doit être opposé au réalisme et au naturalisme littéraire des œuvres à l’Index. La vraisemblance des romans ne doit pas céder le pas à la représentation du vice, de la laideur, mais restée toute confinée à l’intérieur des frontières de la décence et la moralité, justement parce qu’ils doivent proposer des modèles de vie pour les jeunes filles qui les liront.

Le roman agit en effet dans le Précis à titre de vecteur de l’éducation des femmes. Dans leur notice sur La Maison vide d’Harry Bernard, l’autrice retranscrit une citation tirée de la Revue dominicaine : « Toute femme en le lisant [le roman] voudra faire un meilleur emploi de sa vie » (PSSA, 317). De manière similaire, le Précis accorde aussi de l’importance au roman La Ferme des pins de Bernard puisque le roman porte sur la problématique du mariage mixte. La Ferme des pins illustre le fait que « [c]’est la mère qui fait le foyer français ou anglais (pour ne parler que de ces deux races), selon qu’elle appartient à l’une ou l’autre de ces nationalités » (PSSA, 317-318) et agit ainsi comme un guide moral à l’intention des jeunes femmes. L’insistance du Précis sur la dangerosité du roman français du XIXe siècle pour les jeunes filles et l’accent mis sur les romans canadiens dont les problématiques touchent directement l’enseignement moral des jeunes femmes, sont expliqués très certainement par le fait que le Précis sert justement à l’éducation des jeunes filles, montre comment le roman, en tant que genre, peut être idéologisé et récupéré pour en faire le véhicule d’une doctrine.

Le Précis est également la première monographie à dédier une section complète à l’écriture en prose des femmes298. Dans l’ensemble des pratiques évoquées, parmi lesquelles le journalisme domine largement, le roman n’occupe que peu de place; le Précis se contente par ailleurs de donner le titre des œuvres écrites par des femmes, sans réellement s’y arrêter. Laure Conan occupe une place privilégiée dans cette section, et si

298 Camille Roy reconnaît l’apport des femmes à l’écriture des romans pour enfants dans son Manuel de 1939,

l’on reconnaît que la publication de son roman Un Amour vrai (1879) constitue « une innovation, un événement » (PSSA, 357), ce n’est pas en raison de la qualité de l’œuvre, dont on ne glisse mot, mais uniquement parce qu’elle est publiée par une femme, ce qui cause « une extrême surprise dans le monde canadien-français » (PSSA, 357). Le roman

Angéline de Montbrun (1884) est quant à lui décrit comme un « petit roman d’analyse »

(PSSA p. 358), bien qu’une citation de l’abbé Casgrain — « Pour la première fois, une femme vient réclamer sa place dans notre littérature et, disons-le tout de suite, elle en fait la conquête avec un talent qui ne peut être méconnu » (Casgrain, cité dans PSSA, 358) — confère à l’œuvre un début de renommée. C’est plutôt L’Oublié qui est considéré comme le roman consacrant la maturité du talent de Conan tandis que le seul de ses romans qui se mérite un résumé est La Sève immortelle, « roman de la fidélité au Canada français » (PSSA, 359). Le Précis fait aussi état de Fleur des ondes (1912) de Gaëtane de Montreuil, dont on ne sait rien de plus en dehors du fait qu’il s’agit d’un roman historique, et de

Nicolette Auclair (1930) de Marie-Rose Turcot, sur lequel on ne dit rien.

La section sur la prose des femmes reconnaît également l’importance de Marie- Claire Daveluy pour son « roman historique d’éducation » (PSSA, 365), Les Aventures de

Perrine et de Charlot, « un conte délicieux qui comporte une belle leçon de courage et de

patriotisme » (PSSA, 365), et Maxine pour le roman pour enfant Le Petit Page de

Frontenac, « qui vaut bien des leçons apprises par cœur dans un manuel d’histoire du