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Un professionnalisme qui ne se dément pas

CHAPITRE IV L’ANALYSE ET L’INTERPRÉTATION DES DONNÉES

4.2 La phase des traitements

4.2.4 La réponse du réseau de santé en période de traitements

4.2.4.1 Un professionnalisme qui ne se dément pas

Pouvoir compter sur des personnes-ressources en tout temps, bénéficier d’un suivi rigoureux et attentionné, facilité par un travail d’équipe efficace, et être pris en charge par des professionnels de la santé qui vont au devant des besoins du couple met d’emblée en confiance les répondants durant cette période cruciale du combat contre la maladie.

Ici, c’est bien, c’est le cinq étoiles, les services sont bons (…) il n’y a rien qui se perd (…) Ils se présentent à nous et ils veulent aider (p. 15). On est très bien suivi et c’est très aidant. (Joseph, p. 16)

Le Dr T (…) a eu une attitude très paternaliste, dans le bon sens du terme. Il a dit: « est-ce que je peux compter sur vous qu’à compter d’aujourd’hui, c’est moi le boss ? (…) Vous avez des nausées, vous m’appelez… vous vous coupez, vous m’appelez. Ça passe par moi d’abord et avant tout. (…) Si vous voulez changer de médication, appelez-moi, je veux le savoir ». C’était lui et ensuite les autres… « Moi je dois savoir tout ce qui se passe dans votre personne pour vous donner le meilleur traitement possible. La grande priorité, c’est le traitement, tout le restant devient secondaire » (p. 42). Là, ça a été ouf, lui il sait où il s’en va… (p. 46). On s’est dit : « on se laisse aller ». (Paul, p. 42)

Le moindrement qu’on a une question, (…) c’est des réponses précises… (p. 51). Il y a toujours quelqu’un pour répondre. Ça, ça m’a énormément soulagé, il n’y avait plus de méfiance ou d’appréhension, c’est devenu (…) très facile (…), ça a créé une accalmie qui fait que le traitement est très positif. On ne sent pas de difficulté à le faire. (Paul, p. 42)

86 Tous apprécient l’approche attentive, personnalisée et respectueuse des professionnels de la santé à l'endroit du couple, et ce, malgré un rythme de travail stressant. Cependant, dans certaines circonstances, ce rythme de travail effréné ne permet pas au personnel de s’attarder. Si certains se sentent alors bousculés, ils n’en perdent pas pour autant confiance dans le système de santé qui, à leur sens, répond au plus pressé de façon professionnelle.

L’approche est très personnalisée et le support est là… On revient la deuxième fois, c’est une autre garde, qui a un autre style mais cette rigueur reste là (…) (p. 50). La première personne qui est arrivée elle se présente, s’identifie: « vous êtes Madame X », et là (…) on lui parle, pas de façon infantilisante (…), on lui explique… J’ai senti que, malgré le fait qu’il y en avait 11 autres autour, il y avait toujours une attention (p. 49). Ce sont des infirmières d’un certain âge qui ont une expérience (…), c’est fantastique de les voir aller (p. 50). Elles font preuve de beaucoup de professionnalisme, il n’y a jamais rien de paniquant ici… mais elles n’arrêtent jamais. Pourtant, il n’y a pas de stress, on ne sent pas de course, de débordements, de dérapages (…). Les gens, sont très rigoureux et c’est rassurant… Ils semblent savoir où ils vont et ils le font de façon méthodique. (Paul, p. 51)

On sent qu’on est suivi mais ils sont toujours à la course [les professionnels de la santé] (p. 29). Ils te parlent mais des fois ils arrêtent, il faut qu’ils aillent voir ailleurs où c’est peut-être plus urgent, mais tu le sens ça… Ils en ont trop (p. 30). Ils sont tout le temps sur la go… Le médecin nous a écoutés, il voulait bien, mais il a autre chose [à faire]… Les infirmières, il fallait qu’elles travaillent aussi… (p. 20). Faut pas qu’on sente qu’ils sont débordés, parce qu’il y en a des fois qui n’aiment pas déranger. (Coté, p. 30)

Des fois ce n’est pas évident, quand a va voir le médecin (…) c’est plutôt impersonnel. Je me dis, ils en voient beaucoup, (…) quand ils ont quelque chose à dire ils [ne] mettent pas des gants blancs, ils te le disent tout de suite (…). Si tu lui poses une question, elle va t’expliquer mais au début, ça se passait tellement vite (…) faut qu’elle gère des choses, vous avez ça, ça et là on va opérer ça, (…) elle parle en tant que médecin, c’est pas ami- ami (…) elle a un travail à faire, toi t’es là comme patient. Faut qu’elle dise les vraies affaires. (Marc, p. 30)

Par contre, dans de rares cas, l’insensibilité du personnel à l’aspect humain des choses devient insoutenable.

Il y a certaines personnes (…) à l’hôpital qui me sont apparues tellement négatives… entre autres, un jeune résident qui (…) est venu rencontrer Solange (…). Les seules remarques qu’il a eues à l’esprit c’était de nous

dire que les métastases peuvent s’étendre tellement qu’à un moment donné il n’y a plus de retour, et que c’est ensuite les soins palliatifs et la mort. (…) Je peux vous dire que ça me tentait de sortir dans le corridor avec lui pour lui dire : « toi t’es étudiant (…) mais il va falloir que tu apprennes d’autres aspects de la médecine (…) comme l’empathie et le soin du moral. (Damien, p. 45)

Enfin, l’excellente note donnée par les conjoints interrogés au service d’oncologie d’un hôpital ultra-spécialisé contraste avec l’expérience catastrophique vécue par un répondant dans un hôpital régional : soins minimalistes, absence de soutien du personnel soignant, sollicitation démesurée des ressources familiales pour compenser les manques du système, sentiment de devoir constamment se battre pour obtenir des soins adéquats.

Je ne connaissais pas le milieu hospitalier (…). C’était (…) fou (…), je trouvais [que] les soins étaient minimalistes. (…) J’avais l’impression(…) qu’on utilise le fait qu’il y a des personnes-ressources. Ça ne me dérange pas, je suis là, j’aime mieux aider pour l’alimentation, la toilette… mais il faut toujours que tu demandes… il n’y a rien qui vient spontanément (p. 19). Je trouvais (…) [qu’] il y avait énormément de gribouillage (…) et que les patients étaient laissés beaucoup à eux-mêmes. (…) j’ai trouvé ça un peu déplorable… (p. 20). À l’hôpital Y, (…) c’était toujours très long, très compliqué (p. 45). Il n’y a pas beaucoup d’empathie (p. 49). À l’urgence, c’est pire que tout (…). Tout le monde court et on a l’impression qu’il n’y a pas grand-chose qui se fait. (Paul, p. 45)