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8 Évènements d‘épissage alternatifs pour les UGT

8.1 UGT2B28

Les premières données supportant l‘épissage alternatif de gènes UGT proviennent de l‘étude d‘UGT2B28. En effet, Lévesque et collaborateurs ont, en 2001, apporté des évidences de l‘existence de deux transcrits additionnels pour ce locus (Levesque et al. 2001). Deux transcrits alternatifs distincts ont été isolés à partir de la lignée de cancer de la prostate LNCaP, en plus d‘UGT2B28_v1 représentant le transcrit classique décrit précédemment dans la littérature. UGT2B28 type II est dépourvu de l‘exon 4 et 5, alors qu‘UGT2B28 type III est privé d‘une partie de l‘exon 1, probablement via l‘utilisation d‘un site cryptique d‘épissage. Leurs résultats supportent que ces transcrits mènent à la formation de protéines alternatives, mais démontrent que ces dernières sont dépourvues d‘activité transférase (Levesque et al. 2001). En effet, la perte de l‘exon 4 et 5 (308 nt) pour le deuxième transcrit entraîne la formation d‘une protéine tronquée de 335 acides aminés. Celle-ci est dépourvue du domaine de liaison au cosubstrat UDPGlcA et du domaine transmembranaire. La perte d‘une partie de l‘exon 1 pour UGT2B28 type III affecte probablement le domaine de liaison au substrat. Néanmoins, la partie C-terminale de la protéine de 412 acides aminés reste similaire à celle du variant classique de type I. La localisation au RE ne semble pas compromise par la perte de l‘une ou l‘autre de ces régions (Levesque et al. 2001).

8.2 UGT1

Le locus UGT1A est un bel exemple de diversité transcriptionnelle générée à partir d‘un seul gène. En 5‘ sont situés 13 exons 1 partagés aux exons communs 2 à 5 en 3‘ (Gong et al. 2001). Notre laboratoire a isolé, à partir de tissu de foie, un nouvel ADN

complémentaire de 1495 paires de bases. Ce dernier est dépourvu de la séquence classique encodée par l‘exon 5 terminal (Levesque et al. 2007). Ce nouveau transcrit tronqué en C-terminal est généré par un nouvel évènement d‘épissage alternatif en 3‘ du locus UGT1A. Lévesque et collaborateurs ont ainsi démontré la présence d‘un nouvel exon dans l‘intron 4 de ce gène nommé exon 5b. Cet exon 5b est épissé alternativement avec l‘exon 5 classique renommé 5a (Figure 8).

Figure 8. Nouvel évènement d'épissage alternatif au locus UGT1A.

Lévesque et collaborateurs ont identifié un nouvel exon dans la partie commune du locus UGT1A. Ce nouvel exon, nommé 5b, est épissé alternativement avec l‘exon 5 classique, renommé 5a. L‘exon 5b peut être présent seul (v2) ou avec l‘exon 5a (v3), mais ces deux variants mènent à la formation de la même protéine étant donné la présence d‘un codon stop dans l‘exon 5b. ORF : open reading frame (cadre de lecture ouvert). Figure adaptée de Lévesque et al. 2007.

Par la suite, Girard et collaborateurs ont démontré que ce nouvel évènement d‘épissage alternatif en 3‘ du locus UGT1A était également couplé au partage d‘exons en 5‘ de ce gène (Girard et al. 2007). La combinaison de ces deux mécanismes entraîne ainsi la formation de 18 nouveaux variants d‘ARNm codant pour 9 nouvelles protéines UGT humaines nommées isoformes 2 (i2). Celles-ci s‘ajoutent aux 9 protéines déjà décrites

dans la littérature renommées isoformes 1 (i1). La transcription du gène UGT1A mène donc à la formation de 27 variants d‘ARNm (9 variants v1 et 18 variants v2/v3) qui codent pour 18 protéines UGT1A (9 isoformes i1 et 9 isoformes i2) (Figure 9). De plus, ce nouvel exon a été confirmé chez d‘autres espèces, telles le rat et le singe, suggérant que cet évènement d‘épissage alternatif soit conservé chez d‘autres mammifères (Girard et al. 2007).

Figure 9. Représentation schématique du gène UGT1A et des évènements d'épissage alternatifs en 5' et en 3' de ce locus.

La présence d‘un nouvel exon (5b) dans l‘intron 4 du locus UGT1A entraîne la formation de 18 variants d‘ARNm (v) et de 9 isoformes (i) protéiques supplémentaires. Ces nouvelles protéines appelées i2 s‘ajoutent aux 9 protéines classiques renommées i1. Le locus UGT1A code donc pour la formation de 27 variants d‘ARNm (9 variants 1 et 18 variants 2/3) et de 18 protéines UGT1A (9 isoformes i1 et 9 isoformes i2). Figure adaptée de Girard et al. 2007.

L‘exon 5b comprend 28 nucléotides suivis d‘un codon stop (TGA) en remplacement des 298 nucléotides codés par l‘exon 5a. Les protéines résultantes i2 ont un poids moléculaire d‘environ 45 kDa et possèdent les domaines complets de liaison au substrat et au cosubstrat (Figure 10). Ces protéines possèdent également un peptide signal et un domaine de rétention au RE, tout comme les isoformes i1. Par contre, les isoformes i2 sont dépourvues du domaine transmembranaire (acides aminés 490-510), normalement encodé par l‘exon 5a. Les 10 acides aminés codés par l‘exon 5b (RKKQQSGRQM) contiennent un motif dilysine typique (KKXX) pour la rétention au RE, en plus de 4 résidus chargés positivement pouvant interagir avec la membrane chargée négativement. Les données accumulées jusqu‘à maintenant supportent que les i2 localisent à la membrane du RE avec les protéines i1, en plus d‘être localisées au cytosol. En effet, la quantité de protéines alternatives i2 est plus élevée dans les homogénats cellulaires comparativement aux fractions microsomales. Ces données suggèrent une localisation subcellulaire additionnelle pour les protéines i2 comparativement aux enzymes i1 (Levesque et al. 2007). De plus, des données in vitro supportent que la plupart des i2 sont N-glycosylées, suggérant que ces protéines alternatives soient présentes à l‘intérieur du RE où ce type de modifications post-traductionnelles prend place. De plus, pour UGT1A3_i2 et UGT1A6_i2, la présence de deux bandes en immunobuvardage, avant la digestion par l‘endoglydosidase H suggère que ces protéines existent sous plusieurs états de glycosylation (Girard et al. 2007).

Figure 10. Représentation schématique des protéines UGT1A isoformes 1 et isoformes 2.

Les i2 possèdent les mêmes domaines protéiques que les enzymes i1, à l‘exception du domaine transmembranaire en C-terminal qui est absent chez ces protéines alternatives. Les protéines UGT sont localisées à la membrane du réticulum endoplasmique (RE). La topologie des i1 indiquent qu‘environ 95 % de la protéine est localisé du côté luminal de la membrane du RE, alors que la topologie des i2 reste à être confirmée expérimentalement. L‘étude de l‘expression tissulaire de ces transcrits par RT-PCR a démontré que les variants 2 sont exprimés dans plusieurs tissus dont ceux impliqués dans le métabolisme des médicaments. Ils sont également majoritairement présents dans les mêmes tissus que les variants 1 (Figure 11) (Girard et al. 2007). Néanmoins, certains v2 peuvent être exprimés dans un tissu sans leur v1 homologue, tel est le cas pour 1A1_v2/v3 dans le rein (Levesque et al. 2007). L‘évaluation de l‘expression protéique des i2 par immunobuvardage dans les tissus humains de foie, iléum, jéjunum et rein supporte que ces variants soient traduits. De plus, les niveaux d‘expression des i2 varient entre les tissus. Ils démontrent également une variabilité interindividuelle d‘expression au sein d‘un même tissu (par exemple, dans les homogénats de foie, variation de 5 à 57 % d‘intensité pour la protéine 1A1_i2) (Levesque et al. 2007).

Figure 11. Distribution tissulaire des formes d'épissage d'UGT1A humain.

A. Expression des transcrits des formes d‘épissage du gène UGT1A dans 5 tissus. Les v2/v3 sont majoritairement coexprimées avec les v1 dans les principaux tissus du métabolisme des médicaments. B. Expression protéique de l‘enzyme UGT1A1_i1 et de la protéine alternative 1A1_i2 dans des fractions microsomales et des homogénats de foies humains provenant de 5 individus différents. L‘expression des i1 et i2 présente une grande variabilité interindividuelle. De plus, l‘expression des i2 est plus abondante dans les homogénats comparativement aux fractions microsomales. C. Expression protéique des isoformes d‘épissage d‘UGT1A1 dans plusieurs tissus humains (HL : foie (human liver); IN : intestin; K : rein (kidney); J : jéjunum; IL : iléum). Figure adaptée de Lévesque et al 2007; Girard et al 2007.

Un système de surexpression de ces nouvelles protéines alternatives a été généré dans les cellules de rein embryonnaire humain (HEK293). Des essais enzymatiques avec le cosubstrat classique des UGT (UDPGlcA) supportent que ces protéines soient dépourvues d‘activité transférase envers différents substrats des UGT1A. Étant donné la proximité physique des protéines alternatives i2 avec les enzymes i1 dans les mêmes tissus et structures subcellulaires, un modèle de coexpression a été développé pour 1A1,

1A7, 1A8, 1A9. Les données in vitro supportent que la coexpression des i2 avec les i1 mène à une diminution significative de l‘activité de glucuronidation pour les substrats testés (un substrat par enzyme UGT1A). Le niveau de répression de la glucuronidation par les protéines alternatives i2 varie de 15 à 79 % (Girard et al. 2007). De plus, l‘expression relative des i2 dans les modèles de surexpression était toujours inférieure à celle des enzymes i1. Ces données suggèrent que, même un faible niveau d‘expression de ces nouvelles protéines relativement à celui des enzymes i1, puisse influencer la glucuronidation cellulaire. Des expériences préliminaires de co-immunoprécipitation pour l‘enzyme et la protéine alternative de 1A1 suggèrent que cette modulation négative de la glucuronidation s‘effectue via des interactions protéine-protéine, supportant un rôle de dominant négatif pour les i2 (Levesque et al. 2007).