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sur laconnectivité despaysages

?

L’estimation de l’empreinte environnementale de la croissance urbaine peut être réalisée via des études d’impacts.

L’impact environnemental de l’urbanisation couvre un champ d’action très large pouvant aller de l’analyse de la diminution des espaces verts urbains (Conway, 2009) à l’estimation de l’exposition au bruit de certaines espèces dans les zones urbaines (Reed et al., 2012). Ces impacts environnementaux estimés sont le plus souvent des impacts écologiques, concernant la

faune et la lore. Par exemple, un impact environnemental reconnu est l’émission de polluants

Figure  3.6 • 

Exemples de scénarios théoriques et réalistes issus de différents modèles de

atmosphériques, agissant sur la qualité de l’air. Outre l’impact négatif sur les organismes humains, la dégradation de la qualité de l’air a un impact notable sur la lore et la faune.

L’évaluation des impacts écologiques de l’urbanisation est une thématique très large qui fait l’objet de nombreuses études techniques et scientiiques. Les méthodes utilisées pour l’évaluation des impacts écologiques de l’urbanisation diffèrent selon leur fenêtre temporelle d’analyse qui est généralement liée à la manière dont est représentée la croissance urbaine, rétrospective ou prospective. Une troisième approche existe, l’approche statique, qui ne tient pas compte du processus de croissance urbaine mais peut permettre par exemple d’identiier les zones urbaines riches en biodiversité.

3.3.1 c

hoixdelafenêtretemporelled

analyse

Certains auteurs évaluent l’impact écologique de l’urbanisation de manière rétrospective. Par exemple, Pauleit et al. (2005) estiment l’impact de la densiication des villes sur les espaces verts en mesurant trois paramètres environnementaux : la température de surface, le ruissellement et la diversité des espaces verts. Ces paramètres sont mesurés de manière diachronique, en comparant les évolutions de ces indicateurs entre 1975 et 2000 à l’aide d’images satellites. Conway (2009) évalue, lui, les impacts écologiques de l’urbanisation à partir d’un indice caractérisant la couverture de végétation. Le bâti résidentiel antérieur à 1946 est comparé au bâti construit entre 1946 et 1975 ain d’évaluer l’impact écologique de deux formes de développement résidentiel : l’étalement urbain classique et le New Urbanism. Ici encore, les calculs sont réalisés de manière diachronique, en calculant l’indice de couverture de végétation en 1946 et en 1975 pour chaque type de forme urbaine. Citons encore un dernier exemple d’étude rétrospective, celle de Su et al. (2012) où l’impact écologique de l’urbanisation est estimé à l’aide de mesures de connectivité structurelles réalisées à partir de cartes d’occupation du sol de 1994 et de 2003. Ces mesures ont été effectuées avec le logiciel Fragstats (McGarigal et al., 2002). Dans cette étude, l’impact écologique de l’urbanisation est évalué encore une fois de manière diachronique.

Parmi les approches prospectives permettant d’évaluer l’impact écologique potentiel de l’urbanisation, nous pouvons mentionner l’étude récente de Scolozzi et Geneletti (2012). Les auteurs s’appuient sur des scénarios de planiication urbaine ain d’évaluer qualitativement l’impact écologique potentiel du développement résidentiel dans des parcelles déinies comme potentiellement urbanisables dans les années futures. D’autres études utilisent des automates cellulaires pour simuler la croissance urbaine et en évaluer les impacts écologiques potentiels (Aguilera et al., 2011; Mitsova et al., 2011; Syphard et al., 2005). Évaluer l’impact écologique de la croissance urbaine de manière prospective suppose d’imaginer la croissance urbaine future dans un paysage donné ainsi que l’évolution conjointe de la connectivité écologique de ce paysage.

3.3.2 i

ntroduction de variaBles écologiques pour la conception de scénariosd

urBanisation

Il est possible de simuler des scénarios d’urbanisation en limitant ou en empêchant l’urbanisation dans des zones protégées. Par exemple, Penteado (2013), simule huit scénarios combinant quatre scénarios relatifs à la protection de la biodiversité (no preservation, greenway, park

system et network) et deux scénarios d’urbanisation (compact et diffus). Pour ces huit scénarios,

l’urbanisation simulée prend en compte les réserves naturelles à des échelles régionales et locales. La croissance urbaine est simulée à partir de prévisions démographiques. L’indicateur écologique de mesure des impacts est la quantité et la qualité de l’habitat de trois espèces cibles. Bauer et Swallow (2013) introduisent, eux, des variables écologiques et économiques pour la simulation de leurs scénarios d’urbanisation. Ceux-ci se distinguent par leur densité bâtie (dense et peu dense), leur effet sur la connectivité paysagère et sur les taches d’habitat d’un panel d’espèces (taille et qualité). Les quatre politiques de conservation simulées sont : (1) protection de 100 % des taches d’habitat et de 0 % du reste de la matrice paysagère, (2) protection de 33 % des taches d’habitat et de 66 % du reste de la matrice paysagère (0,4 ha protégé pour 0,8 ha urbanisé), (3) protection de 50 % des taches d’habitat et de 50 % reste de la matrice paysagère (0,4 ha protégé pour 0,4 ha urbanisé) et (4) protection de 50 % des taches d’habitat et 33 % du reste de la matrice paysagère.

Les auteurs quantiient le coût économique de chaque politique de préservation et évaluent la

probabilité de persistance des métapopulations animales pour chacun d’entre eux. Ces deux études introduisent ainsi des variables écologiques en amont de la simulation des scénarios de croissance urbaine.

3.3.3 u

ne connaissance incomplète de l

impact écologique des formes d

urBanisation

Certains auteurs mettent en avant le fait que les impacts écologiques des formes d’urbanisation ne sont pas clairement identiiés (Alberti, 2005; Bierwagen, 2005). Termorshuizen et al. (2007) expliquent que ce manque d’informations peut provenir du fait que les transferts de connaissances entre le champ de l’aménagement du territoire et le champ de l’écologie du paysage sont relativement limités. De fait, les recherches développées par les chercheurs en écologie du paysage ou en biologie de la conservation utilisent régulièrement des scénarios de planiication urbaine préétablis (p. ex. Mörtberg et al., 2007).

Alberti (2005) pointe aussi le fait que les études écologiques traitant de l’urbanisation simpliient trop souvent les structures urbaines. Ce faisant, les résultats obtenus sont rarement utilisables dans le champ de l’aménagement urbain. Par exemple, Tratalos et al. (2007) comparent plusieurs mesures de densité urbaine avec une série de mesures de qualité environnementale et de potentiel de biodiversité. Les résultats obtenus montrent que des formes urbaines similaires peuvent présenter différents niveaux de qualité environnementale. Ce type de résultat ne permet pas de comprendre précisément la nature des relations entre les formes urbaines et la connectivité écologique. D’autres études plus approfondies des impacts écologiques, par exemple à l’aide de modélisation de graphes paysagers, ne s’appuient pas sur des scénarios d’urbanisation réalistes (Tannier et al., 2012b). Inversement, la modélisation de scénarios d’urbanisation réalistes débouche rarement sur des analyses approfondies des impacts écologiques des formes

Les méthodes de mesures de l’impact écologique des formes d’urbanisation diffèrent aussi substantiellement. Elles peuvent être qualitatives (Scolozzi et Geneletti, 2012), quantitatives (Mörtberg et al., 2007) ou encore les deux à la fois (Li et al., 2010). Certains auteurs mesurent la perte d’habitat des espèces en se focalisant uniquement sur des zones écologiquement sensibles (Beardsley et al., 2009; Mörtberg et al., 2007). Les travaux d’une étude française de Vimal et al. (2012) utilisent par exemple les zonages de type ZNIEFF pour déterminer les zones écologiquement sensibles. La croissance urbaine future est estimée à l’aide des PLU existants sur certaines communes et des prévisions démographiques de l’INSEE. Les sites de conservation des espèces (ZNIEFF) sont considérés comme menacés par l’urbanisation si plus de 30 % de leur surface subit potentiellement des modiications anthropiques à l’horizon 2030. D’autres études évaluent la perte de connectivité en calculant des métriques structurelles (Bierwagen, 2007; Mitsova et al., 2011; Syphard et al., 2005). D’autres encore mesurent la perte de connectivité fonctionnelle (Fu et

al., 2010; Tannier et al., 2012b). Estimer l’impact écologique des formes d’urbanisation à l’aide de

mesures de connectivité fonctionnelle nous paraît être l’approche la plus pertinente d’un point de vue écologique. Cependant, cette approche est encore peu répandue, puisqu’elle nécessite la mise en place de modèles de simulation d’urbanisation prospective, et la modélisation des réseaux écologiques des espèces, par exemple à l’aide de graphes paysagers. L’étude menée par Tannier et

al. (2012b) consiste à mesurer la connectivité fonctionnelle potentielle de manière diachronique,

pour un graphe paysager construit à l’état initial, et pour un graphe paysager construit après la simulation de la croissance urbaine. Cette approche présente l’avantage de pouvoir mesurer la perte de connectivité potentielle fonctionnelle pour chaque scénario d’urbanisation et d’offrir la possibilité de comparer l’impact écologique de différentes formes de croissance urbaine.

Ces différents travaux, qui se basent sur des méthodologies très diverses, permettent d’identiier certaines relations entre la forme urbaine et la connectivité écologique des espèces animales. À l’échelle globale d’une région urbaine, l’étalement urbain peut entraîner une augmentation du traic induite par les déplacements quotidiens des individus entre le centre et leur périphérie (Aguilera et al., 2011; Camagni et al., 2002; Mörtberg et al., 2007). Cette augmentation du traic peut provoquer un effet barrière des réseaux de transports (Fu et al., 2010; Gurrutxaga et al.,

2010). À une échelle locale, des études montrent que la densiication du développement urbain

peut éviter la perte d’habitats écologiques (Conway, 2009) mais conjointement augmenter l’effet barrière des zones bâties (Aguilera et al., 2011; Marull et Mallarach, 2005). La réduction de la densité bâtie peut limiter cet effet car la limite urbaine est dans ce cas relativement loue et permet la traversée des espaces bâtis par certaines espèces (Czamanski et al., 2008). Cependant, pour d’autres espèces, un développement urbain peu dense peut contribuer à la réduction de la connectivité écologique en augmentant la fragmentation paysagère.