• Aucun résultat trouvé

f ormes urBaines et consommation d ’ énergie

1.3. p rincipaux aspects fonctionnels des formes urBaines

1.3.3 f ormes urBaines et consommation d ’ énergie

L’implication des acteurs publics dans la réduction de la consommation d’énergie est croissante. L’objectif est triple : réduire les émissions de gaz à effets de serre, préserver les ressources naturelles et limiter les surcoûts liés à la consommation d’énergie. En milieu urbain, l’énergie est majoritairement utilisée dans les bâtiments, pour le transport des personnes et des biens, pour l’industrie et la collecte des déchets (Ishii et al., 2010). Les besoins en énergie dépendent de plusieurs facteurs : la forme urbaine, les transports, l’énergie utilisée dans les bâtiments et les politiques publiques (Ewing et al., 2008; Ewing et Rong, 2008; Owens, 1990). D’après les travaux de Brown et al. (2009) et de Steemers (2003), environ 40 % de l’énergie totale est utilisée dans les bâtiments pour les besoins de chauffage, climatisation et électricité, et un tiers de l’énergie totale est utilisé dans les moyens de transports. La réduction de la consommation d’énergie dans les bâtiments et pour les besoins de transports peut donc signiicativement réduire la consommation

La réduction de la dépendance à l’automobile peut signiicativement diminuer la part de la consommation d’énergie liée aux transports. La quantité d’énergie utilisée par les transports dépend du choix modal et de la réduction des distances à parcourir, notamment en voiture particulière (Schwanen et al., 2004). Les mesures économiques telles que l’augmentation du prix du carburant, la création de péages urbains ou l’augmentation du prix des places de stationnement ne sufisent pas à réduire la dépendance à l’automobile (p. ex. Buhler, 2015; Dupuy, 1999). La prise en compte des relations entre transports et formes urbaines ont conduit la communauté scientiique à imaginer des modèles de croissance urbaine limitant la dépendance à l’automobile. Certaines politiques européennes ont intégré directement des mesures issues de ces modèles dans leurs documents d’urbanisme et de planiication. Ces mesures visent principalement à limiter l’étalement urbain et promouvoir des villes plus compactes, ain de réduire la consommation d’énergie liée aux moyens de transports (Hart, 1992; Williams et al., 2000). En effet, de nombreuses études montrent qu’une forte densité d’urbanisation est corrélée à des plus courts trajets et à un nombre réduit de trajets en véhicule particulier (Kenworthy et Laube, 1999; Kockelman, 1997; Næss et al., 1995). Les villes compactes semblent plus eficaces dans la réduction de la consommation d’énergie liée aux trajets en véhicule particulier dans la mesure où les distances parcourues sont plus faibles que dans les formes urbaines plus étalées (Camagni et al., 2002).Ces résultats sont cependant contredits par d’autres études. Par exemple, aux États-Unis, Levinson et Kumar (1997) montrent que les temps de trajets en voiture particulière diminuent lorsque la densité de population augmente, mais augmentent de nouveau en raison de la congestion du traic à partir d’un seuil de densité compris entre 3 300 et 3 900 habitants par kilomètre carré.

Schwanen et al. (2004), dans une étude menée aux Pays-Bas, montrent que le transport public est stimulé dans les modèles de villes compactes ou modérément compactes (décentralisation concentrée, ville compacte stricte et politique ABC). Les distances parcourues en voiture particulière sont réduites dans la ville compacte stricte, inchangées pour la politique ABC, mais augmentent dans le modèle de décentralisation concentrée. Cependant, une forme urbaine compacte dans une ville monocentrique réduit la dépendance à l’automobile et la consommation d’énergie liée aux déplacements. Par contre, la congestion liée au traic, a tendance à augmenter. Bien que les formes urbaines globales de type polycentrique, ou de type décentralisation concentrée présentent l’avantage de réduire les déplacements vers la ville-centre (Helminen et al., 2012), les déplacements entre les plus petits centres urbains sont augmentés (Aguilera et Mignot, 2004; Schwanen et al., 2001).

Outre la réduction des temps de trajets en véhicule particulier et l’augmentation de l’utilisation des transports en commun, la baisse globale de la consommation d’énergie liée aux transports passe également par la stimulation d’utilisation de modes de transports non motorisés. Certaines formes de villes sont plus favorables à l’utilisation de modes doux. La densité bâtie seule ne semble pas être un facteur stimulant l’utilisation de ces modes de déplacements (Forsyth et al., 2007). En revanche, la présence d’espaces verts, d’espaces ouverts et de zones dédiées aux modes doux comme les pistes cyclables ou les trottoirs aménagés inluencent l’utilisation de modes de transports alternatifs et non motorisés (Giles-Corti et al., 2005). Pour favoriser l’utilisation des modes de déplacements doux, il semble que la meilleure combinaison soit une densité bâtie plutôt élevée intégrant différents types d’utilisation des sols comme des espaces commerciaux, des espaces

ouverts et des espaces verts (Cao et al., 2009; Saelens et al., 2003). La stimulation de l’usage de modes de déplacements gratuits et non polluants est donc inluencée par la forme urbaine locale avec par exemple l’intégration d’espaces verts et de zones résidentielles modérément compactes. La forme urbaine globale des villes inluence plutôt le choix des autres modes de déplacements (transport en commun, voiture particulière) et la réduction des temps de trajets.

La consommation d’énergie dans les bâtiments est un autre phénomène. Ewing et Rong (2008) ont montré que les bâtiments construits dans des zones urbaines peu denses sont plus énergivores que les bâtiments construits dans les zones urbaines denses. En effet, les bâtiments construits dans les zones urbaines peu denses sont souvent plus grands. Les besoins en électricité, chauffage et climatisation sont donc accrus. De plus, leur espacement avec les autres bâtiments ne leur permet pas de tirer proit du phénomène d’îlot de chaleur urbain. Ils concluent que les formes urbaines les plus compactes sont les plus eficaces en matière de réduction de la consommation d’énergie dans les bâtiments. Ces résultats sont conirmés par les conclusions d’autres études (Brown et

al., 2009; Qin et Han, 2013; Sovacool et Brown, 2010). Cependant, d’autres auteurs nuancent

ces propos en indiquant que la différence d’énergie consommée par les familles entre les maisons individuelles et les appartements des bâtiments collectifs est fortement réduite depuis les années 1980 (Holden et Norland, 2005). Partant du constat selon lequel le nombre d’habitants par logement est plus faible en centre-ville que dans les maisons individuelles périurbaines, Perkins

et al. (2009) concluent que l’énergie consommée par individu est similaire que ce soit pour un

résident du centre-ville ou un résident périurbain. De plus, il semble que la qualité architecturale des bâtiments (matériaux, isolation) soit au moins aussi importante que la forme urbaine en elle- même pour ce qui est de la consommation d’énergie (Rickwood et al., 2008). L’étude menée au Japon par Ishii et al. (2010) conclut que les densités urbaines intermédiaires offrent le meilleur potentiel pour l’installation de technologies visant à économiser l’énergie. Les formes de villes modérément compactes semblent donc être le meilleur compromis à adopter pour réduire la consommation d’énergie dans les bâtiments.