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Les différents types de conversions hydrothermales des lignocelluloses

Le milieu hydrothermal fait l'objet de nombreuses études pour diverses applications en fonction des sévérités de réaction. Trois principaux types de travaux scientifiques se distinguent dans la littérature : la saccharification, la gazéification et la liquéfaction directe (Figure A-16).

Figure A-16 : Domaine opératoire des principales applications des conversions hydrothermales sous pression de plusieurs dizaines de MPa

II.2.a La saccharification

La biomasse lignocellulosique est constituée principalement de glucides mais la grande majorité de ceux-ci n'est pas directement accessible du fait de la structure composite de la biomasse lignocellulosique. Les glucides ont cependant un intérêt certain dans les domaines du bioéthanol, de la chimie fine et des matériaux. Le traitement hydrothermal à des températures de 180-350°C, une pression de l'ordre de la dizaine de MPa et des temps de réaction de quelques minutes, peut être utilisé comme prétraitement de la biomasse

lignocellulosique dans le but de faciliter la voie de fermentation des sucres (Deguchi et al.,

2006; Saka and Konishi, 2001; Sasaki et al., 2004; Sasaki et al., 2003a; Schacht et al., 2008;

Zhao et al., 2009). Ce type de prétraitement est appelé LHW (Liquid Hot Water) dont le

principe de réaction tire profit de l'action hydrolytique de l'eau sur les liaisons osidiques. Toutefois, la sévérité du milieu réactionnel a aussi une action sur les oses libérés par la dépolymérisation des polymères glucidiques. Ceux-ci peuvent se dégrader en furanes et en composés carbonyles et acides carboxyliques de faibles masses moléculaires sous l'action du milieu réactionnel. En plus de la perte de matières fermentescibles, ces sous-produits sont des inhibiteurs pour les fermentations. Les productivités de saccharification peuvent être améliorées en élaborant des réacteurs à plusieurs étapes de conversion sub- et supercritiques (Ehara and Saka, 2005; Lu et al., 2009; Mochidzuki et al., 2003; Zhao et al., 2009), des réacteurs semi-batch avec un profil de température croissant (Sasaki et al., 2003b) ou en

utilisant des catalyseurs acides comme le CO2 (Kim et al., 2004; Rogalinski et al., 2008;

Schacht et al., 2008) ou des acides forts tels que l'acide chlorhydrique ou l'acide sulfurique (Lavarack et al., 2002; Matsushita et al., 2004).

II.2.b La gazéification

Dans les conditions supercritiques sévères (plus de 400°C), la biomasse lignocellulosique se gazéifie en quantité significative pour former principalement un mélange

de CO2, CO, H2 et CH4 (Loppinet-Serani et al., 2010; Matsumura et al., 2005). Ce type de

traitement est appelé SCWG (SuperCritical Water Gasification) et présente l'avantage de convertir de la matière humide et de transformer l'ensemble des lignocelluloses sans les contraintes provenant de leurs différences de réactivités qui sont rencontrées au cours de la liquéfaction. Ainsi, des rendements de gazéification de plus de 90% peuvent être atteint à partir de biomasses lignocellulosiques humides (Calzavara et al., 2005). Des catalyseurs, principalement métalliques, permettent de diminuer la quantité de résidus solides (Bicker et al., 2005; Resende and Savage, 2010; Savage, 2009). Différentes application sont à l'étude, par exemple pour le traitement de biomasses de lixiviation des polluants du sols ou de déchets comme le marc de vinification (Bocanegra et al., 2010).

II.2.c La liquéfaction directe

Les mises en œuvres de liquéfaction directe permettent d'obtenir des liquides riches en composés organiques ayant des pouvoirs calorifiques intéressants pour être des candidats potentiels pour la production de bases pour carburants ou produits chimiques. De nombreux

lignocelluloses avec des rendements généralement compris entre 40 et 60% (Huber et al., 2006; Mochidzuki et al., 2003; Xu and Lad, 2008). Ce type de procédé peut être appelé HTL (HydroThermal Liquefaction) mais ils ne possèdent pas une grande maturité industrielle. Ainsi, ce type de conversion est actuellement étudié principalement à l'échelle laboratoire.

Les études qui comparent les propriétés des produits de HTL avec les autres types de conversion sont rarement publiées. Le Tableau A-5 compare les propriétés des solutions de HTL à celles de la biomasse lignocellulosique, d'une huile de pyrolyse rapide et d'un produit pétrolier fossile. Les liquides de HTL auraient des teneurs en eau, en hydrogène, en oxygène ainsi qu'un pouvoir calorifique supérieur (PCS) intermédiaires entre les produits pétroliers et les huiles de pyrolyse (Bridgwater et al., 1999; Huber et al., 2006; Xu and Lad, 2008). Toutefois, ces liquides seraient 100 fois plus visqueux que les huiles de pyrolyse et que les produits pétroliers fossiles.

Tableau A-5 : Propriétés d'huiles de pyrolyse, de solutions provenant d'un procédé HTL et de produits pétroliers fossiles (Huber et al., 2006)

Propriétés lignocellulosique Biomasse Huiles de pyrolyse rapide Produits de conversion HTL Produits pétroliers Teneur en eau (%m/m) 2-20 15-30 5 0,1 pH 2,5 / / densité 0,5-0,7 1,2 1,1 0,94 %m/m C 46-52 54-58 73 85 %m/m H 3-6 5,5-7 8 11 %m/m O 38-44 35-40 16 1 %m/m N 1-5 0-0,2 / 0,3 %m/m cendres 0,1-2 0-0,2 / 0,1 PCS (MJ/Kg) 15-20 16-19 34 40 Viscosité à 50°C (cP) 40-100 15000 180 Teneur en solides (%m/m) 0,2-1 / 1

/ : données non disponibles

Les produits de HTL ne sont donc pas semblables aux produits pétroliers, ils sont notamment plus oxygénés. Différentes mises en œuvres sont présentées dans la littérature pour améliorer les propriétés carburants des produits de HTL comme par exemple des procédés d'hydrotraitement comme l'hydrodeoxygenation et le zeolite upgrading dont l'effet principale est la diminution de leur teneur en oxygène (Huber et al., 2006; Xu and Lad, 2008).

Pour rendre les conversions plus sélectives, le développement de catalyseurs est un domaine de recherche intensif dans la communauté scientifique de l'hydroliquéfaction. Pour améliorer les rendements de liquéfaction, les principaux catalyseurs étudiés sont des sels

basiques tels que des hydroxydes (LiOH, NaOH, KOH, RbOH, CsOH, Ba(OH)2, Ca(OH)2,

...), des carbonates (Na2CO3, K2CO3, ...) et des sulfates (FeSO4, CuSO4, ...) (Bhaskar et al.,

2008; Karagoz et al., 2004; Karagoz et al., 2005b; Karagoz et al., 2006; Kim et al., 2004; Song et al., 2004; Xu and Etcheverry, 2008; Xu and Lad, 2008). Les études mettent en évidence une influence significative de l'espèce basique et de son contre ion sur les rendements de liquéfaction. Les autres types de catalyseurs étudiés sont des catalyseurs métalliques et des oxydes supportés (Bicker et al., 2005; Fang et al., 2008a; Oasmaa and

Johansson, 1993; Seri et al., 2002). Généralement les mécanismes d'actions de ces catalyseurs ne sont pas décrits. La plupart des études ayant été réalisées par des auteurs différents avec des mises en œuvres et des conditions opératoires différentes, la performance des différents catalyseurs ne peut souvent pas être comparée d'après les données de la littérature.

Autre voie de recherche pour l'amélioration de la sélectivité de liquéfaction, l'ajout de cosolvants à l'action hydrogénante comme des acides carboxyliques ou des alcools semble prometteuse. L'ajout d'acide formique lors de la conversion hydrothermale du glucose en réacteur batch à 300°C et 9 MPa permet d'augmenter la quantité de produits liquides et de réduire la quantité de résidus solides formés (Watanabe et al., 2006). L'acide formique semble être à l'origine de réactions d'hydrogénation des fonctions chimiques insaturées des produits, limitant ainsi les réactions de condensation des composés insaturés et donc la quantité de résidus solides formés (Figure A-17).

Figure A-17 : Schéma de conversion du glucose en milieu aqueux sous pression a) et effet de l'ajout de l'acide formique b) (Watanabe et al., 2006)

L'acide formique est aussi utilisé dans le procédé LtL (Lignin to Liquid) où additionné à de l'alcool (éthanol ou propanol) à 380°C, il permet de favoriser la dépolymérisation de la lignine avec seulement 5% de résidus solides. Le liquéfiat obtenu possède un faible ratio O/C (0,05-0,1), un fort ratio H/C (1,3-1,8) et un fort pouvoir calorifique (35,6-44 MJ/kg) par rapport aux huiles de pyrolyse (Figure A-18) (Kleinert and Barth, 2008). Toutefois la mise en évidence de l'intérêt de ces agents hydrogénants étant relativement récente, très peu d'informations sur leur mode d'action sont disponibles dans la littérature.

II.3 Les charges lignocellulosiques et les conditions opératoires de