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Transmission à travers un parallélépipède

Chapitre III : Métamatériaux pour l’espace libre

III.14 Transmission à travers un parallélépipède

Le premier prototype réalisé est un parallélépipède en époxy incrusté de chaînes de motifs

Ω en cuivre. Lors de la conception, l’accent a été mis sur l’obtention d’une condition d’équilibre

assurant une évolution continue des bandes main gauche et main droite sans bande interdite. Ce comportement, typique des lignes de propagation duales, s’observe dès l’instant où les fréquences de résonance des circuits équivalents série et parallèle sont identiques. Or la particule Ω, qui est employée en technologie MMIC pour définir une self-inductance plaquée, peut être modélisée par une inductance. De plus, la mise en regard de deux plans de motifs illustrée par la figure III-13 est à l’origine d’un couplage capacitif entre les boucles de courant. En effet, de même que dans les anneaux imbriqués (cf. paragraphe II.12), la configuration des deux lettres Ω placées en regard annule le mode de résonance antisymétrique généré par le vecteur champ électrique

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parallèle aux bras. Par conséquent, la résonance du champ magnétique à l’origine de la perméabilité effective négative est la conséquence de courants parcourant les boucles dans le même sens. Le couplage entre ces boucles peut donc être modélisé par une capacité distribuée.

Figure III-13 : Cellule unitaire incluant deux lettres Ω (a), représentation en perspective du métamatériau volumique (b).

Ces comportements permettent de définir un schéma équivalent de la particule Ω (figure III-14) qui met en évidence la contribution d’un terme d’inductance shunt associé à un terme de capacité série. Les inductances L1 et L2 décrivent, en première approximation, le comportement inductif des bras et des boucles respectivement. C matérialise le couplage capacitif entre les deux boucles. On comprend dès lors que la transmission à travers les réseaux de motifs Ω interconnectés présente des similitudes avec la propagation sur une ligne de transmission duale.

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Figure III-14 : Schéma équivalent du motif Ω constitué des deux lettres en regard.

En considérant une permittivité relative du milieu hôte correspondant à celle de l’époxy (εr = 4,2), les dimensions des motifs ont été définies de manière à observer la continuité des branches de dispersion gauchère et droitière dans la bande de fréquence comprise entre 8 et 18 GHz. Le diagramme de dispersion théorique présenté sur la figure III-15 illustre la croissance continue de la constante de propagation avec un zéro situé autour de 13 GHz.

Figure III-15 : Diagramme de dispersion simulé du métamatériau composite équilibré.

Les dimensions retenues, supérieures ou égales à 0,5 mm, permettent d’envisager la définition des motifs par des techniques de fabrication de circuit imprimé conventionnelles. Des chaînes incluant 18 motifs Ω interconnectés sont définies par gravure chimique sur la face métallisée de substrats d’époxy. Ces substrats sont ensuite empilés pour constituer un

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parallélépipède en respectant l’orientation des boucles de courant en conformité avec la figure III-13. Le positionnement relatif de chaque substrat est assuré par deux tiges de Teflon qui traversent le parallélépipède de part en part. Un prototype, incluant 10 cellules unitaires dans la direction de propagation, a été réalisé par ce procédé. 120 substrats sont nécessaires de manière à présenter une face d’environ 10 x 7,5 cm2 en interaction avec l’onde plane incidente (figure III-16). Les faces inférieures et supérieures, qui présentent des irrégularités en raison de l’empilement des nombreux substrats, sont rectifiées à la fraise de manière à favoriser l’insertion du parallélépipède dans l’environnement de mesure décrit ci-après.

(a) (b)

Figure III-16 : Photographie du parallélépipède constitué de l’empilement de 120 substrats : (a) vue globale, (b) détail montrant les chaînes de motifs interconnectés.

La structure a été caractérisée au moyen d’un guide plan parallèle composé de deux plaques d’aluminium entre lesquelles sont insérés deux cornets (figure III-17). La distance entre le dispositif à mesurer et les cornets est d’environ 50 cm, de manière à travailler en condition de champ lointain. L’extension latérale de l’onde incidente est limitée par des couches de matériau absorbant Eccosorb AN-75 afin de s’affranchir des réflexions parasites et d’exciter le métamatériau par un front d’onde quasi plan.

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Figure III-17 : Photographie du banc de caractérisation incluant le parallélépipède (sans la plaque supérieure du guide plan parallèle).

Le spectre de transmission mesuré sur une structure incluant 10 cellules suivant la direction de propagation est représenté sur la figure III-18 où figure également la caractéristique simulée. Cette représentation montre un bon accord théorie expérience. L’étendue de la bande passante laisse supposer la contiguïté de deux branches de dispersion main gauche et main droite conformément au diagramme de dispersion de la figure III-15.

Figure III-18 : Comparaison des spectres de transmission d’un parallélépipède à 10 motifs mesuré et simulé. Cette situation interprétée précédemment en termes de schéma équivalent correspond à un alignement des fréquences plasma électrique et magnétique illustré par la figure III-19. Les deux graphes du haut correspondent aux indices de réfraction et impédance complexe obtenus, par

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inversion de Fresnel [6], à partir de la matrice Sij simulée pour une cellule unitaire. La bande passante exclut la zone hachurée qui correspond à un régime de forte évanescence. La fréquence pour laquelle l’indice de réfraction s’annule, voisine de 13 GHz, correspond à l’alignement des zéros des permittivité et perméabilité effectives. Ainsi, ces grandeurs sont toutes deux négatives entre 8 et 13 GHz, ce qui se traduit par une bande passante main gauche (indice de réfraction négatif) et positives entre 13 et 18 GHz, ce qui correspond à une bande passante main droite (indice de réfraction positif). Il est à noter que l’évolution de la permittivité présentée par les motifs Ω interconnectés est continue, par opposition à la réponse électrique résonante présentée par les particules isolées [1]. La décroissance du niveau de transmission en fonction de la fréquence observée sur le graphe de la figure III-18 s’explique par la diminution de la partie réelle de l’impédance qui tend à augmenter la réflexion à l’interface entre le parallélépipède et l’air. Cette variation d’impédance justifie le fait que les niveaux de transmission observés soient plus importants en bande gauchère qu’en bande droitière.

Figure III-19 : Paramètres effectifs obtenus par inversion de Fresnel à partir de la simulation des paramètres Sij sur une cellule unitaire : (a) indice de réfraction, (b) impédance réduite, (c) permittivité, (d) perméabilité.

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En complément de l’analyse de la transmission à travers un parallélépipède, au paragraphe suivant, nous proposons une démonstration expérimentale de la réfraction négative au moyen d’un prisme.