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Transformations physiques et physico-chimiques pendant la cuisson

1.6 Les céramiques de terre cuite

1.6.3 Transformations physiques et physico-chimiques pendant la cuisson

Toutes ces étapes sont maîtrisées aujourd’hui ainsi que les technologies employées. Aussi, les usines de production sont nombreuses et sont déployées partout dans le monde. Dans le contexte actuel du stockage thermique où la tendance est croissante face au développement des matériaux de type céramique, ces usines peuvent être un tuyau intéressant pour le développement de matériaux de stockage thermique pour une utilisation à l’échelle industrielle.

1.6.3 Transformations physiques et physico-chimiques pendant la

cuisson

1.6.3.1 Transformations physico-chimiques

Plusieurs transformations physico-chimiques ont lieu au cours de la cuisson d’un ma- tériau à base d’argile. Ces transformations dépendent du type d’argile (kaolinite, illite, etc.) et des différents minéraux non argileux présents dans le mélange de fabrication.

Le tableau 1.13 rassemble quelques transformations physico-chimiques rencontrées en fonction de la plage de température.

Température

(°C) Transformations physico-chimiques

Chauffe

Action sur les minéraux

argileux Actions sur les autrescomposants Jusqu’à 200 Dégagement de l’eau

résiduelle d’interposition -

200 à 450 - Décomposition de matières

organiques ; transformation des hydroxydes de fer en

oxydes 450 à 650 Départ d’eau de

constitution, destruction de la structure originelle des

argiles

Changement de forme cristallographique du

quartz 650 à 1050 Début de formation des

eutectiques à bas points de fusion dans les systèmes

Al2O3− SiO2− N a2O ou K2O Formation de spinelle Décomposition des carbonate de calcium, dégagement de CO2 et apparition de la chaux 1050 à 1200 Fusion progressive des

éléments fondants, apparition de flux visqueux, formation de la mullite et d’aluminosilicates de calcium - Refroidissement >750°C Cristallisation des nouveaux composés -

Ambiante - Changement de forme du

quartz vers 570°C

Table 1.13 – Transformations physico-chimiques des minéraux argileux et non argileux pendant la cuisson (Kornmann, 2009; Alprandi, 1989; Carroll et al., 2005). Une température de cuisson inférieure à 450°C n’entraine qu’une déhydratation des feuillets d’argile par un dégagement d’eau résiduelle de séchage. Lorsque le mélange de fabrication utilisé contient de la matière organique, elle se décompose et les hydroxydes de fer sont transformés en oxydes.

Une déshydroxylation des minéraux argileux existe dans la plage de température allant de 450 jusqu’à 650°C. Ce mécanisme entraine le détachement des groupements hydroxyles

Familles Températures Réactions chimiques Kaolintie (Carroll et al., 2005) 450-550°C Al2Si2O5(OH)4→ Al2Si2O7+ 2(H2O) Illite (Earnest, 1991; Nigay, 2015)

500-600 K(Al, M g, F e)2(Si, Al)4O10[(OH)2, H2O] → K(Al, M g, F e)2(Si, Al)4O12+ 2H2O

Table 1.14 – Réactions de déshydroxylation des kaolinites et des illites

qui assurent la cohésion entre les différentes couches T et O entrainant donc une modi- fication de la structure minéralogique. Le tableau 1.14 montre les équations de déshy- droxylation associées aux minéraux argileux appartenant à la famille des kaolinites et des illites.

La perte en eau de constitution des minéraux argileux provoque une ouverture des couches octaédriques et la libération d’éléments chimiques. Jusqu’à 1050°C, les éléments chimiques présents réagissent ensemble pour former des eutectiques et donner place à de nouveaux composés chimiques. Aussi, il y a généralement une décomposition des carbo- nates dans cette plage de température entrainant un dégagement de CO2 et une formation

de chaux.

Une fusion progressive des éléments fondants contenus dans les argiles comme les feld- spaths a lieu entre 1050 et 1200°C. Cela se manifeste par une apparition de flux visqueux généralement accompagné par la formation de mullite (Al6Si2O13) et d’autres aluminosi-

licates comme la spinelle Al-Si (Si3Al4O12).

Il n’y a aucun phénomène particulier pendant l’étape de refroidissement ; juste une cristallisation des éléments fondus et un changement de forme cristallographique du quartz vers 570°C.

1.6.3.2 Frittage thermique

Le principal mécanisme intervenant pendant la cuisson d’un matériau de terre cuite est le frittage thermique. C’est le mécanisme qui conduit à la consolidation de la céramique sous l’action de la chaleur (Bernache-Assollant, 1993; Alprandi, 1989). Cette consolidation est généralement accompagnée par une modification de la microstructure qui peut se traduire par une réduction du taux de porosité. Des liaisons solides se forment par diffusion de matière entrainant l’obtention d’un squelette dense.

Un schéma simplifié du mécanisme de frittage est représenté par la figure 1.6.2.

Figure 1.6.2 – Différentes étapes du mécanisme de frittage

corps poreux (Bernache-Assollant, 1993). Une céramique crue à base d’argile a une énergie de surface excessive qui se réduit fortement en fonction de l’état de cuisson jusqu’à se stabiliser selon le mécanisme présenté par la figure 1.6.2.

On peut distingue plusieurs étapes (Bernache-Assollant, 1993) :

— La première étape est la formation de ponts. Ce stade a lieu lorsque les particules commencent à s’unir par la formation de ponts par transfert de matière. L’établis- sement de ce squelette engendre une consolidation élémentaire du matériau mais jusqu’à ce moment, on n’a pas de retrait macroscopique.

— Densification et croissance des grains : Au fur et à mesure que le frittage se poursuit, on peut observer une croissance des grains tandis que les particules com- mencent à perdre leurs identités. La formation des ponts progresse de telle façon qu’elle produit une structure dans laquelle les particules ont tendance à arrondir les arêtes et à former une structure poreuse. A ce stade, il s’agit d’une porosité conti- nue ouverte. On atteint ainsi environ 80 à 90% de la densité théorique (Bernache- Assollant, 1993; Nigay, 2015), valeur au delà de laquelle débute la formation de porosité fermée. L’effet macroscopique de cette phase est le retrait du matériau céramique.

— Le stade final du frittage étrangle les cavités poreuses qui ont tendance à prendre une forme sphérique ; cela jusqu’à une disparition plus ou moins complète. La structure en couche des minéraux argileux entraine une proximité entre les particules et favorise une formation de joints de grains. Le transport de matière à partir des interfaces entraine un rapprochement des particules et une densification. La présence de calcaire dans la terre argileuse dans certains cas entraine le dégagement de CO2 pendant le frittage.

Ce dégagement augmente la pression de la phase gazeuse et peut influencer le mécanisme de densification (Nigay, 2015). La consolidation effective des céramiques de terre cuite s’effectue après cette étape de décarbonatation. C’est l’une des raison pour laquelle la température de cuisson dans les installations industrielles est généralement supérieure à 900°C (Munoz V. et al., 2016).

1.6.3.3 Evolution des propriétés

Les propriétés caractéristiques des céramiques de terre cuite sont : — La résistance mécanique,

— La conductivité thermique.

Ces propriétés sont pilotées par la microstructure, plus précisément par le taux de porosité qui dépend de la température de cuisson (Kim et al., 2002; Horai et Simmons, 1969; Nigay et al., 2017; Lecomte-Nana et al., 2011). En effet, comme discuté dans la partie précédente, la cuisson entraine une densification de la matière (frittage thermique) qui s’accompagne par une modification de la porosité des matériaux avec un ensemble de réactions physico-chimiques.

Les travaux éffectués par Ven-Gen Lee et al. montrent l’effet de la température sur le développement des propriétés mécaniques des céramiques de terre cuite (Lee et Yeh, 2008). Ils ont montrés qu’il existe un lien entre la température de cuisson appliquée et la résistance mécaniques. Entre 900 et 1000°C, il n’y a pas de modification majeure de la microstructure des céramiques d’argile alors qu’entre 1000 et 1200°C, il y a une baisse de la porosité qui entraine une augmentation drastique de la résistance mécanique. Dans le même sens, il a été montré que les températures favorables à l’obtention de meilleures résistances mécaniques sont entre 950 et 1200°C (Sutcu et Akkurt, 2010; Teixeira et al., 2008; El Mahllawy, 2008). A plus de 1200°C, de la mullite est formée et constitue la principale phase chimique. Elle est dissoute dans une masse fondue et le comportement mécanique de la céramique est dégradé même si elle présente une densité élevée et une faible porosité. D’autres auteurs (Aras, 2004; Balkyavichus et al., 2003) ont étudié l’in- fluence des transformations physico-chimiques sur les propriétés mécaniques. Leurs études montrent que la cuisson joue un rôle déterminant dans la formation des phases visqueuses dans la structure qui influence les propriétés physiques des céramiques et leurs résistances mécaniques.

D’une façon générale, la résistance mécanique et la conductivité thermique des céra- miques sont liées. L’augmentation de l’un entraine l’autre. Concernant la conductivité thermique, plusieurs études expérimentales et des études par modélisation ont permis de mettre en évidence l’influence de la porosité des céramiques sur la propriété (Pia et al., 2016; Huai et al., 2007; Carson et al., 2005; Smith et al., 2013). Il est évident que la réduction du taux de vide augmente la contribution du squelette solide et la chaleur est transmise plus rapidement.

Il ressort qu’il est possible d’obtenir des céramiques de terre cuite avec différentes propriétés thermiques, mécaniques et physiques contrôlées par la température de cuisson.