• Aucun résultat trouvé

CHAPITRE 1 – LA BOURSE DE MARCHANDISES ET LE RÔLE DE LA

I. LA BOURSE DE MARCHANDISES DANS LA LITTERATURE

3. Les intérêts et limites d’un marché future

3.1. Les intérêts

3.1.1. Le transfert des risques

D’un point de vue théorique, trois objectifs peuvent être poursuivis lorsque l’on opère sur un marché financier comme l’est un commodity exchange: la couverture, la spéculation et, dans une moindre mesure, l’arbitrage.

Selon Vernimmen.net, « la couverture est une pratique qui consiste à se protéger contre

un risque non désiré. C’est un comportement général employé aussi bien par les industriels, qui cherchent à se prémunir contre les fluctuations des marchés de capitaux, que par les investisseurs sur les marchés financiers ». Comme évoqué dans la section 2.1 de ce chapitre,

un agent en position physique longue, signifiant qu’il détient ou va détenir de manière certaine une certaine quantité de matières va réaliser une perte commerciale si le marché baisse (il va revendre moins cher) et un gain si le marché monte (il va revendre plus cher). Inversement, un agent en position courte, un utilisateur de matières premières notamment, va

réaliser une perte si le marché monte et un gain si le marché baisse. Ils vont donc pour cela créer une position financière de nature opposée (short pour l’agent en position physique longue et inversement) pour que les pertes observées sur un marché soient compensées par des gains sur l’autre marché et ainsi s’assurer d’un prix effectif d’achat ou de vente qui est indépendant du prix de marché de la matière première qui prévaudra à l’échéance. A la différence de cette stratégie de fix-price hedging, une stratégie d’offset hedging mise en œuvre par un négociant voire un transformateur vise non à assurer un certain niveau de prix, mais à bloquer une marge commerciale. Elle n’est en cela pas affectée par le risque de base alors que celle du producteur ou de l’utilisateur l’est.

Quant à la spéculation, elle se caractérise par l’acceptation d’un risque. Comme cela est explicité dans le Vernimmen, « Le spéculateur est celui qui prend position. Il fait un pari sur

l’évolution future d’une valeur. C’est un comportement qui est donc radicalement différent de celui de la couverture. C’est le comportement de l’investisseur en général, dans la mesure où, cherchant à prévoir des flux futurs, il spécule sur l’avenir. La spéculation joue un rôle fondamental: assumer des risques que les autres intervenants ne veulent pas supporter. Tout spéculateur minimise ainsi le risque des autres intervenants» De ce point de vue, une

opération de spéculation consiste à prendre délibérément une position sur le marché en fonction de son anticipation quant à l’évolution des prix sur le marché à terme. Cette prise de risque est donc rémunérée si l’anticipation s’avère exacte. Dans le cas contraire, c’est une perte sèche. On va acheter si on anticipe que les prix vont monter (et pas si les prix sont bas) et inversement. Ces opérateurs apportent indéniablement de la liquidité au marché, en se portant contrepartie du marché. On comprendra de cette lecture que la différence essentielle entre un spéculateur et un opérateur recherchant une couverture ne tient pas aux instruments qu’ils utilisent –ce sont les mêmes-, mais bien à l’existence ou non d’une position physique.

Spéculation et couverture pourront être poursuivies, à des degrés divers, par les différents acteurs de la filière. Le négociant est un intermédiaire dans le processus de commercialisation des marchandises entre le producteur et l’utilisateur industriel. Il peut soit acheter le produit directement au producteur (pays, exportateur ou autre) et le vendre à l’industriel, soit vendre et acheter à d’autres négociants (marché secondaire). La répartition géographique des partenaires commerciaux est très variée, aussi bien à l’achat qu’à la vente. Dans le secteur du café comme pour la plupart des commodities négociées internationalement, le moyen de transport utilisé depuis les origines est le navire. Le stockage est nécessaire, mais l’activité principale du négociant est d’embarquer du café qui sera pris en charge dans le port de destination par un des industriels, qui l’aura déjà acheté. Cet intermédiaire dans le processus de commercialisation du produit a un rôle primordial, puisqu’il assure la compatibilité dans le temps et dans l’espace des flux d’offre et de demande engendrés par les agents à l’amont et à l’aval de la filière (Marquet, 1992). Les vendeurs cherchent, en fonction de leurs anticipations, à vendre au prix le plus haut possible, à l’inverse, les acheteurs, attendront le prix le plus bas possible. Si ces agents ont globalement les mêmes anticipations quant aux évolutions de marché, la négociation commerciale directe sera de toute évidence difficile et ils devront être réconciliés par le négociant qui, grâce à sa stratégie de couverture, pourra acheter au prix élevé souhaité par le producteur et revendre au prix bas souhaité par l’utilisateur tout en s’assurant d’une marge d’intermédiation positive, bien que faible. Au vu de ses éléments, on se rend compte que le négociant achètera de la marchandise sans l’avoir encore vendue ou inversement. Il se trouve donc, à une date donnée, long ou court de physique pour telle origine, telle échéance, telle destination, etc. La rémunération du négociant est une rémunération pour tous les risques qu’il prend en servant d’intermédiaire. Et il dispose d’instruments qui lui permettent de gérer ces risques, en particulier le risque de variation de prix (vendre plus bas que ce que l’on a acheté).

Les spéculateurs sont présents sur les marchés financiers de commodities en raison de l’effet de levier que les contrats à terme, comme la plupart des produits dérivés offrent et par les perspectives de profit que celui-ci autorise. De façon très classique, ils achètent ou vendent une certaine quantité d’une marchandise s’ils prévoient l’augmentation ou la réduction de son prix, tout en acceptant le risque de perdre de l’argent si l’évolution est ne leur est pas favorable. On se saurait de ce point de vue dissocier la présence de spéculateurs sur un marché future des questions d’organisation de filière et de partage des risques. Supposer qu’un marché future pourrait fonctionner sans spéculateur reviendrait à faire l’hypothèse déraisonnable qu’au sein d’une filière donnée les opérateurs commerciaux (producteurs et utilisateurs) s’équilibrent naturellement. A défaut de cela en effet, un excès durable de positions shorts (longues) sur le marché future conduirait à une baisse (hausse) des prix futures, annihilant de ce fait l’intérêt d’une couverture sur ce marché pour les producteurs (utilisateurs). La présence de spéculateur est, en cela, indispensable au bon fonctionnement du marché, mais si elle implique, comme les développements récents (avant 2014) des marchés de matières premières en attestent. Notons enfin que, contrairement à la définition donnée par le Vernimmen, la spéculation ne résulte pas nécessairement d’une démarche active. Un producteur qui ne se couvrira pas alors qu’il disposerait des conditions pour le faire postule, s’il est rationnel, que le risque intrinsèque auquel il est soumis tournera à son avantage et fait donc le pari –risqué- que les prix vont augmenter. Il en va de même pour l’acheteur de telle sorte que ne pas se couvrir face à un risque peut être assimilé à une opération de spéculation passive.

Outline

Documents relatifs