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Traitement de la douleur:

FICHE D’EXPLOITATION

PRISE EN CHARGE DES BRULURES CHEZ L’ENFANT AUX URGENCES

6. Traitement de la douleur:

La douleur est actuellement définie telle une expérience sensorielle et émotionnelle désagréable, associée à un dommage tissulaire présent ou potentiel, ou décrite en termes d’un tel dommage. Le tout s’intégrant dans le vécu de l’individu. [48]

a) Douleur de fond

Le traitement de la douleur de fond repose sur l’administration systématique d’antalgiques à intervalles fixes. La douleur de la brûlure est une douleur de forte intensité qui justifie le recours aux antalgiques de palier III de l’OMS.

(1) Brûlure grave nécessitant une assistance ventilatoire

Chez l’enfant brûlé sous assistance respiratoire, l’administration généralement concomitante d’un morphinique et d’un hypnotique vise à soulager la douleur de la brûlure et procurer confort, adaptation au ventilateur et, si possible, maintien d’un état d’éveil. Il est recommandé aujourd’hui de titrer la sédation à un niveau minimal, compatible avec la sécurité du patient, pour ne pas retarder le sevrage ventilatoire et limiter la morbidité (pneumopathies

Les agonistes liposolubles sont utilisés préférentiellement à la morphine dans cette indication.

Le fentanyl est 100 fois plus puissant que la morphine. Sa demi-vie d’élimination augmente de façon importante en cas de perfusion prolongée avec pour conséquence un risque d’accumulation et de dépression respiratoire retardée.

Le sufentanil est 1000 fois plus puissant que la morphine. Il tend à remplacer le fentanyl pour l’analgésie et la sédation continue car son accumulation est théoriquement moindre. Ces qualités sont contrebalancées par des modalités d’administration contraignantes (voie d’administration dédiée, valve anti-reflux, surveillance hémodynamique rapprochée). Un autre inconvénient est l’absence d’analgésie résiduelle à l’arrêt de la perfusion. Il faut systématiquement anticiper un relais par un autre morphinique quand il existe une douleur de fond importante.

L’hypnotique de choix pour la sédation continue en réanimation pédiatrique est le midazolam. Il possède une demi-vie d’élimination plus courte que les autres benzodiazépines mais sa demi-vie contextuelle s’allonge au cours d’une administration prolongée (accumulation de 1 OH midazolam et de son dérivé glucuroconjugué).

Les phénomènes de tolérance et d’hyperalgésie sont particulièrement marqués chez l’enfant brûlé. La répétition de stimulations nociceptives de forte intensité, l’utilisation de fortes doses de morphinomimétiques (hyperalgésie

L’utilisation de kétamine à faible dose (1 à 4 µg/ kg/min) peut être proposée pour prévenir l’installation de l’hyperalgésie. Dans la même optique, l’administration de protoxyde d’azote [50] ou d’agents halogénés, agents qui ont également une activité antagoniste des récepteurs NMDA, peut être indiquée.

À l’arrêt de la sédation, la diminution de posologie des morphiniques (et des hypnotiques) doit être progressive pour ne pas induire de syndrome de sevrage [51].

(2) Brûlure moins sévère

Dès le sevrage ventilatoire ou d’emblée lorsque la brûlure est moins grave :  la morphine : constitue l’antalgique de choix pour l’analgésie chez l’enfant en ventilation spontanée. La dose efficace doit être atteinte par palier selon le principe de titration.

La voie intraveineuse est la voie d’administration préférentielle durant les premiers jours. L’analgésie est entretenue par une perfusion continue (20-50 µg/kg/h) supplémentée par des bolus injectés. Il faut diviser ces doses de départ par deux chez le nouveau-né et le nourrisson de moins de 3 mois.

La voie orale est utilisée en relais. La posologie nécessaire est habituellement comprise entre 0,2 et 0,5 mg/kg six fois par 24 heures [52]. Des inter-doses permettent de contrôler les épisodes douloureux intercurrents. Une fois que les besoins antalgiques sont stabilisés, l’utilisation d’une présentation à libération prolongée permet de diminuer le nombre de prises en conservant une

 Les agonistes-antagonistes et les agonistes faibles :(nalbuphine, codéine, tramadol) n’ont pas leur place en début de traitement du fait de l’effet plafond.

 Les antalgiques non morphiniques : visent à diminuer les doses de morphinomimétiques nécessaires et si possible les effets secondaires dans une optique d’analgésie multimodale. Il a été montré dans le domaine de la douleur postopératoire que le paracétamol à la dose de 60 mg/kg/jour procure une épargne morphinique de l’ordre de 20 à 30 % sans diminution des effets secondaires [53] et que les AINS peuvent offrir une épargne plus importante, de l’ordre de 30 à 60 %, et une diminution significative des effets secondaires [54] . Il semble en outre que les AINS exercent un effet favorable sur l’hypercatabolisme, chez le brûlé [55]. Cependant les brûlures étendues avec fuite plasmatique importante représentent une contre indication temporaire à l’utilisation des AINS du fait du risque rénal.

 Pansements : multiples et variés. Leurs actions dépendent des propriétés physiques, chimiques et biologiques qu’ils exercent au contact de la plaie. En pratique 2 types de pansement peuvent être distingués en fonction de leur mode de renouvèlement (potentiels algiques différents) :

o les pansements permanents : Ils sont appliqués ou se constituent au contact de la plaie à laquelle ils adhérent ou s’intègrent pour reconstituer une pseudo-barrière physiologique. Ils sont éliminés, soit spontanément après cicatrisation complète, ou bien lors d’un acte

prolongée et un potentiel algique maîtrisé lors de leur renouvellement ;

o les pansements provisoires : Leur potentiel algique est fonction du niveau d’adhérence de leur interface avec la brûlure. Le choix d’un pansement provisoire avec une interface non adhérente est donc un avantage important dans la lutte contre la douleur [48].

b) Douleurs liées à la régénération des terminaisons nerveuses

Les études réalisées chez des adultes brûlés montrent que jusqu’à 30 % des patients brûlés ont des douleurs chroniques invalidantes plusieurs années après le traumatisme initial.

La symptomatologie associe une douleur de fond à type de brûlure ou de sensation de crampe provoquée par le froid, des paroxysmes souvent décrits comme des décharges électriques, et des anomalies objectives de la sensibilité cutanée au même endroit (hypoesthésie au tact ou à la piqûre, allodynie mécanique) [56].

Elle peut apparaître à partir du 10e-15e jour, en cours d’hospitalisation à la phase aiguë.

Le traitement repose sur les antidépresseurs tricycliques, les anticonvulsivants classiques ou les nouvelles molécules comme la gabapentine ou la prégaballine.

c) Douleurs provoquées

Les douleurs provoquées par les actes thérapeutiques sont souvent plus intenses que les douleurs liées à la brûlure elle-même, particulièrement chez l’enfant [57].

Chez le jeune enfant, le caractère hautement répétitif des soins, quotidiens voire pluriquotidiens au début, est propice au développement de phénomènes de mémorisation et de conditionnement. Le traitement antalgique lors des premiers soins a donc pour objectif d’empêcher ces phénomènes.

La réalisation d’un pansement de brûlure implique donc le plus souvent une anesthésie générale chez l’enfant, au moins les premiers jours. Par la suite, ou d’emblée lorsque les lésions sont moins sévères, on peut envisager une prémédication orale par morphine et benzodiazépine, l’administration de mélange protoxyde d’azote/oxygène et/ou de kétamine à faible dose. Compte tenu du délai de résorption, la morphine doit être administrée sous forme de comprimé à libération immédiate, au minimum 40 minutes avant le soin [58]. La posologie est de 0,2 à 0,5 mg/kg.

Le traitement des douleurs provoquées peut également faire appel aux méthodes cognitivo-comportementales telles que l’hypnose, la relaxation ou différentes techniques de distraction. L’hypnose procure un état de conscience modifié au cours duquel la perception des stimulations douloureuses est altérée. Elle a été utilisée avec succès au cours de pansements de brûlure, avec ou sans supplément pharmacologique [59]. Cependant, la disponibilité des personnes

proposée chez le patient brûlé [60]. Ces techniques ne visent pas nécessairement à remplacer la prise en charge pharmacologique mais plutôt à la compléter dans une optique de limitation des effets secondaires et de renforcement de l’autonomie des patients. Elles sont aujourd’hui très demandées.