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LANGUES NATIONALES ET DÉVELOPPEMENT

II TRAITS PANAFRICAINS

III.1. interprétation sociolinguistique

3- Traitement des données

Si mes premières enquêtes devaient trouver un traitement de fortune, quasiment artisanal pour établir des tableaux croisés, à une époque où l’informatique n’était qu’une affaire de spécialistes, on peut aujourd’hui constituer des bases de données plus aisément et surtout les interroger et les manipuler pour des utilisations multiples.

Que ce soit l’analyse de la syntaxe, le repérage de particularités lexicales, ou les connotations socioculturelles, le stockage des données joue un rôle appréciable, et commence à être largement utilisé. Dans le projet décrit plus haut il s’agit d’outils en cours d’élaboration, qui sont mis au service des chercheurs et qui donneront une beaucoup plus grande fiabilité aux résultats. Ils permettront aux équipes et aux chercheurs d’être autonomes, une fois la phase expérimentale surmontée. Par le biais d’internet, on peut penser que leur accessibilité sera une réalité partagée. Pour une

information tout à fait complète je renvoie aux trois articles suivants d’Elisabeth Delais-Roussarie et alii, qui donnent un aperçu de la littérature sur le sujet :

- Constitution et annotation du corpus : méthodes et recommandation (2003 : 89) - Quelques outils d’aide à la transcription et l’annotation de données audio pour

constituer des corpus oraux (op. cit. p. 127) et

- Annoter et segmenter des données de parole sous PRAAT (p. 159).

CONCLUSION

Je pense qu’on peut trouver là des outils, que je m’efforce de modéliser, qui permettent, grâce à des tests de type labovien (distinguant, en particulier les styles surveillés et non surveillés) de

- dresser un état de la prononciation du français actuel (standard et régional), donc de redéfinir les contours d’une phonologie différentielle, et de contribuer aux recherches prosodiques actuelles.

- retrouver dans la morphologie et la syntaxe des productions enregistrées et transcrites (grâce à des logiciels expérimentaux mais qui pourraient devenir partagés) des éléments de réflexion sur l’évolution du français – et ses constantes, ce qui définit la francophonie.

- constituer un formidable outil de référence utilisable et interrogeable de quelque région que ce soit de l’espace francophone concernée, à l’instar de la BDLP proposée pour le Lexique par l’équipe de M. Francard.

Il offre multiples utilisations possibles comme référentiel et outil méthodologique.

S’y ajoute la possibilité de mettre en réseau les apports de chaque discipline (phonologie, morphosyntaxe, sociolinguistique…).

Annexe 1

Aperçu de la place du français dans le multilinguisme au Burkina Faso D’après Napon (2001 : 705), le français assume des fonctions très importantes pour les locuteurs citadins :

- dans le fonctionnement des institutions étatiques, pour régler les problèmes juridiques, médicaux, administratifs ;

- dans le travail ; - dans l’enseignement ;

- dans l’intercommunication, comme trait d’union entre les divers groupes ethniques du pays (lingua franca) ; et dans les contacts avec l’extérieur du pays, principalement avec les autres pays francophones.

Le statut respectif des langues nationales et du français relève de la diglossie : les comportements langagiers montrent que la dynamique des langues a une influence sur les pratiques.

Alou Keïta (2000) le confirme : la part grandissante du français dans la communication a amené certains linguistes à émettre l’hypothèse selon laquelle le français serait la 61e langue du Burkina Faso. Il précise que parmi les langues nationales, le mooré et le jula jouent un rôle capital vu le poids démographique de leurs locuteurs. Le jula est de plus un véhiculaire interrégional et interethnique au Burkina.

Seul le français cependant a le statut de langue officielle.

La capitale Ouagadougou est un cas particulier puisqu’elle est devenue un pôle d’attraction des migrations, dont le rôle s’est accru ces dernières années en raison des évolutions politiques et économiques de la sous-région (en particulier de la Côte d’Ivoire). Ce phénomène a une contrepartie linguistique (Batiana, 1998) : toutes les langues parlées au Burkina sont représentées à Ouagadougou, même si cette représentation est inégale. Outre son emploi dans les situations formelles, le français a aussi une fonction véhiculaire. L’acquisition, ajoute Batiana, se fait moins par la voie scolaire que par un apprentissage « sur le tas », ce qui a pour conséquence une pratique

« populaire » où la communication semble l’emporter sur la qualité.

Enfin, il aurait une fonction d’identité citadine. Batiana a mené une enquête sur des jeunes citadins, qui a consisté en une étape d’observation directe, une autre de questionnaire devant permettre de recueillir des informations sociolinguistiques sur les langues parlées et sur le mode d’acquisition du français.

Annexe 2

Remarques sur la compétence des locuteurs burkinabé en français

C. Caitucoli (1998b), envisageant la compétence des « francophones » africains, estime que parler français,

c’est, dans une situation précise donnée, définie sur les plans macro-sociolinguistique et micro-macro-sociolinguistique, prononcer un énoncé que l’on tient pour français et qui est admis comme français par le récepteur. Il s’agit là d’un contrat énonciatif (…)° Ce contrat est négocié en permanence dans les actes concrets d’utilisation du langage (p. 10).

Avant même d’envisager un aménagement linguistique qui modifie l’accès (scolaire ou en formation d’adulte) à la langue des apprenants, il faut se poser la question des attitudes et des représentations. Il est exclu que le français demeure pour l’ensemble des usagers un système extérieur à la communauté, réduit à sa fonction instrumentale et donc peu soumis à la pression normative. Au contraire, on assiste à l’émergence d’un français « ordinaire », qui va de pair avec la construction d’une identité burkinabè francophone urbaine.

Carole de Féral, introduisant le n° 104 (1994) de Langue française consacré aux

« Faits d’Appropriation du français en Afrique noire », rappelle que cette langue

« superposée » à une multitude de langues locales conduit les habitants des États francophones, à défaut d’en être des locuteurs, du moins à être des auditeurs passifs. Ce qui fait qu’on assiste à un continuum qui couvre des niveaux de compétence que l’on continue à dissocier en basilectal, mésolectal et acrolectal, niveau qui se confond avec la compétence de français langue native. Certains chercheurs (surtout africains, selon Caitucoli, 1998) en inventorient les traits. J’ai moi-même subdivisé en deux niveaux les productions orales de sujets à partir d’enregistrements de procès de 1984-85 : basilectal et mésolectal, en relevant les écarts par rapports à la prononciation standard du français (1998a).

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DICTIONNAIRE ÉLECTRONIQUE